france - Free

DU JOURNALISME AU BRAQUAGE
DE MAGASINS DISCOUNT
ENQUÊTE – LIRE PAGE 19
Du sancerre
dans les veines
STYLES – LIRE PAGE 13
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014 - 70e année - N˚21505 - 2 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr ---
LE GHETTO DE VARSOVIE
REPREND VIE AU THÉÂTRE
CULTURE – LIRE PAGE 11
Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directrice : Natalie Nougayrède
Le retour de Nicolas Sarkozy
contrarié par les affaires
t Après les révélations du « Monde», les proches de l’ancien président dénoncent un «acharnement» de la justice
E
n l’espace d’une semaine, l’ancien président se trouve fragilisé par la diffusion d’enregistrements clandestins réalisés par son conseiller Patrick Buisson,
puis par des soupçons de trafic d’influence et de violation
du secret de l’instruction. Ces deux affaires, qui jettent un
troubleà la fois sur l’exercice du pouvoir et sur l’entourage
deNicolasSarkozy,contrarientsastratégiederetourpolitique. D’autant que d’autres nuages judiciaires menacent :
son nom et ceux de ses proches sont cités dans quatre
autres dossiers: l’arbitrage Tapie dans l’affaire du Crédit
lyonnais, le dossier des commissions en marge de l’attentat de Karachi, l’éventuel soutien libyen à la campagne de
2007 et enfin les sondages commandés par l’Elysée sous
son mandat. A ce stade, pourtant, le favori des sympathisantsdel’UMPn’estpasconfrontéàdeschargesincontestables le disqualifiant pour 2017.
Les proches de Nicolas Sarkozy estiment que leur candidat est «victime» d’un «acharnement» de la justice. L’avo-
catdel’ancienprésident,Me ThierryHerzog,aainsidénoncé
une«affairepolitique(…)montéedetoutespièces»pournuireàsonclient.Enfin,desélusdel’UMPetdesavocatss’interrogent sur la légalité des écoutes téléphoniques commandées par la justice à l’encontre de Nicolas Sarkozy. L’ancien
présidenta décidéde continuerà apparaîtrepubliquement
danscettepériodedecampagneélectorale.IlseraàNice,lundi 10mars, en compagnie de Bernadette Chirac. p
a LIRE P. 8 ET 9
QUAND LES
FRANÇAIS
SE PIQUENT
DE TATOUAGE
t C’est un secteur en
plein essor qui tient
Salon, du 7 au 9 mars,
à la Grande Halle de
La Villette. Longtemps
confidentiel en France,
le tatouage s’y impose
comme ailleurs. Un
Français sur dix en
porterait, selon l’IFOP.
Une filière encore à
organiser
Un artiste
au travail,
au Mondial
du tatouage,
à La Villette
LIONEL BONAVENTURE
LIRE CAHIER ÉCO
Bertrand Delanoë :
«Les réformes
de société
doivent rester à
l’ordre du jour»
t Dans un entretien,
le maire de Paris assure ne pas
souhaiter devenir ministre
A
la veille de tirer sa révérence après
deux mandats comme maire de
Paris, Bertrand Delanoë défend son
bilan et critique sévèrement la campagne
dela candidatede l’UMP,NathalieKosciusko-Morizet, qu’il accuse d’avoir fait preuve de « désinvolture». Il salue par ailleurs
la priorité donnée par François Hollande
au « dynamisme économique », mais il
encourage le chef de l’Etat à plus d’audace
sur les grandes réformes de société, comme la simplification de l’adoption ou la
reconnaissance du statut du beau-parent.
Enfin, il affirme qu’il n’envisage pas de
devenir ministre dans l’immédiat :
« Après treize ans de responsabilités, il est
sain de prendre du recul durablement pour
y voir clair. » p LIRE PAGE 6
ACCIDENT AÉRIEN
Un Boeing et ses 227 passagers
disparaissent au large du Vietnam
Le vol MH370 de la Malaysia Airlines,
qui effectuait la liaison entre Kuala
Lumpur et Pékin, a disparu des radars,
dans la nuit du vendredi 7 au samedi 8
mars, alors qu’il survolait le sud du
Vietnam. Le Boeing 777-200 transportait 227 passagers, dont trois Français,
et douze membres d’équipage. La marine vietnamienne tentait encore, samedi
matin, de localiser l’appareil.
LIRE PAGE 4
UK price £ 1,80
SOCIÉTÉ
La grossesse, catalyseur
de la violence conjugale
Le phénomène est méconnu
et glaçant : selon les rares études
disponibles, de 20 % à 40 %
des femmes victimes de violences
domestiques ont subi les
premiers coups alors qu’elles
étaient enceintes. Si la grossesse
déclenche souvent une violence
latente dans le couple, elle
permet aussi de repérer les abus.
Reportage à la maternité de
l’hôpital de Montreuil, pionnière
dans le dépistage et la prise en
charge des victimes. LIRE PAGE 10
TÉLÉVISIONS
La magie de
«House of Cards»
a Entretien avec Kevin
Spacey et Robin Wright,
héros de la série
américaine culte, qui
revient sur Canal+
a Gros plan sur l’affaire
« Intime conviction »,
procès virtuel inspiré
du dossier du Dr Muller,
interdit par la justice
SUPPLÉMENT
Chômage: qui faut-il croire?
L
es Français n’avaient
donc rien compris ! A la
fin du mois de janvier, les
statistiques mensuelles
de Pôle emploi tombaient commeun couperet: laFrance comptait, à la fin de décembre 2013,
3 300 000 chômeurs. François
Hollande lui-même était alors
contraint d’admettre qu’il avait
perduson pari d’inverserla courbe du chômage.
Et voilà que l’Insee, le 6 février,
publie des chiffres qui disent
l’inverse.Selonl’Institut dela sta-
ÉDITORIAL
tistique, dont la rigueur est
reconnue, il y avait, au 31 décembre, 2 800 000 demandeurs
d’emploi.Soit un taux de chômage de 9,8 % de la population active, en recul de 0,1 point au quatrième trimestre. Entre les deux
statistiques, l’écart est de
500 000 personnes!
Aussitôt, Michel Sapin, le
ministre de travail, a claironné
qu’en définitive la promesse du
président de la République avait
été « respectée ». Et ajouté que
c’est l’indicateurde l’Insee,établi
à partir de la définition du
Bureau international du travail
(BIT), qui est utilisé pour les comparaisons internationales et qui
sert de référence à la Commission européenne pour vérifier le
respect par la France de ses engagements en la matière.
Cette analysea étéimmédiatement contestée tant par la CGT
que par l’UMP. Il est vrai qu’il y a
de quoi être troublé devant
l’étonnante divergence entre les
« chômeurs Pôle emploi » et les
« chômeurs Insee ».
Cet écart, déjà apparu dans le
passé à un degré moindre, est dû
à des différences de méthode et
de définition. Pôle emploi recense des chômeurs qui appartiennent à la catégorie A, c’est-à-dire
quin’ont eu aucuneactivité salariée au cours du mois écoulé. A
ce titre, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté, en
2013, de 175 000. L’Insee, dans
son enquête trimestrielle, interroge 100 000personnespar téléphone. Pour être caractérisées
comme chômeurs, elles doivent
remplir trois conditions : être
sans emploi, être disponibles
pour en reprendre un et être en
recherche active.
Pour corser les choses, l’Insee
a revu son questionnaire, fin
2013, et ne demande plus aux
sondés s’ils recherchent un
emploi partiel ou occasionnel,
mais simplement un emploi
tout court. Cette innovation
aurait fait baisser le taux de chô-
mage de 0,5 point, soit 145 000
sans-emploi de moins.
A quoi s’ajoute l’évolution des
comportements. Des jeunes non
indemnisés ou des seniors dispensésderecherched’emploiont
été sortis des statistiques de Pôle
emploi. La sincérité des réponses
au questionnaire de l’Insee peut
parfois être aléatoire. Et l’on
connaît le grave phénomène des
personnes sans emploi qui se
découragentetnesontplusrecensées comme chômeurs.
Tous les statisticiens de France et de Navarre pourront expliquer avec sagacité la nature des
différencesentre les deux indicateurs du chômage. Pour les Français,malheureusement,la distorsion entre les deux fait inévitablementpeserundoute surlafiabilitédeschiffreset l’usagepolitique qui en est fait.
A cet égard, il est assez stupéfiant d’entendre le ministre du
travail déclarer : « Il y a deux
typesde statistiques,ellesontchacuneleurvaleur. A chacun deretenir l’indicateur qu’il souhaite. »
Pour mettre fin à ces distorsions
et disposer de statistiquesincontestables, ne faudrait-il pas s’en
tenir à la seule définition du BIT
pour comptabiliser les chômeurs ? Sans quoi, les Français
continueront à n’y rien comprendre. p
« Un périple fascinant
dans une Inde loin des clichés
STUDIO CINE LIVE
ex nihilo présente
un film de
michel spinosa
scénario
michel spinosa, agnès de sacy
au cinéma le 12 mars
Algérie 150 DA, Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤, Autriche 2,50 ¤, Belgique 2 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤,
Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA
2
international
0123
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
La bataille du Qalamoun fait rage en Syrie
L’armée de Bachar Al-Assad tente de reprendre ce massif stratégique, situé entre la frontière libanaise et Damas
Reportage
Ersal (Liban)
Envoyée spéciale
A
Des réfugiés syriens dans la ville d’Ersal au Liban, le 18 février. AHMAD SHALHA/REUTERS
Homs
Mer
Méditerranée
Qoussair
Ersal
KA
A
Yabroud
MO
NE
QA
LA
AI
Beyrouth
UN
DE
LA
BE
LIBAN
PL
hmad le rebelle maudit, sa
jambe blessée. Sans ce tibia
fracturé par des éclats
d’obus lors d’un bombardement
aérien, le combattant de l’Armée
syrienne libre (ASL) prendrait
encore part à la bataille acharnée
qui se déroule en Syrie contre les
troupes loyalistes de Bachar
Al-Assad dans les montagnes du
Qalamoun, ces flancs escarpés aux
portes du Liban. Et son épouse
Amani n’aurait pas gagné avec lui
ce camp de réfugiés qu’elle déteste, à Ersal, une ville libanaise frontalière où elle se sent parquée.
« On ne peut pas perdre le Qalamoun! », s’alarme Ahmad, 30 ans,
alors que la guerre a repris de plus
belle vers la mi-février dans cette
région située entre Damas et la
plaine de la Bekaa. Selon Ahmad,
évacué après le début de la nouvelle offensive, les combats sont
redoutableset lespertes considérables dans chaque camp.
Lancée en novembre, la bataille
du Qalamoun a permis au régime
de reconquérir plusieurs localités
au nord de ce massif stratégique,
près de l’autoroute reliant Homs à
Damas. Début décembre, les rebelles, dont ceux du Front Al-Nosra
affilié à Al-Qaida, s’emparaient, au
sud, de la célèbre cité chrétienne
de Maaloula. Depuis, les armes
n’ont jamaisvraimentcessé de crépiter dans cette région abritant
pro et anti-Assad, même si l’offensive semblait s’être ralentie.
Déployant blindés et avions de
chasse, le régime syrien compte
désormais, avec l’aide décisive du
Hezbollah libanais, reprendre
Yabroud,au cœurdece paysagearide. Située à plus de mille mètres
d’altitude, cette bourgade composée de sunnites et de chrétiens est
la principale ville du Qalamoun.
Longtemps épargnées par la
guerre, les collines rugueuses qui
l’entourent ont vu foisonner les
trafics en tous genres, du mazout
aux enlèvements. Au gré du
conflit qui s’installe en Syrie, les
courants islamistes radicaux s’y
sont aussi renforcés.
Si plusieurs analystes considèrent que l’issue de la bataille ne
signera pas de tournant militaire,
les belligérants jugent pourtant
que l’offensive en cours est cruciale. Pour les rebelles déployés dans
cette partie de la Syrie, le Qalamoun constitue un repaire
d’autant plus précieux qu’ils ont
perdu, en juin 2013, le bastion de
Qoussair, au nord-est du Liban.
Depuis les montagnes, ils ont lancé plusieurs attaques dans les faubourgs de Damas.
Cette base arrière constitue aussi l’une de leurs dernières lignes de
ravitaillement depuis le Liban.
C’est ainsi qu’affluent de la ville
Maaloula
SYRIE
Damas
frontalière d’Ersal, dont le cœur
bat pour la rébellion syrienne,
armes, médicaments et vivres
acheminés par des chemins de
contrebande. Les mêmes chemins
qu’Ahmad et Amani ont empruntés pour gagner le Liban, peu après
que le combattant a été blessé près
de Yabroud. Les mêmes routes que
l’arméesyriennebombardeà répétition, au point de rendre quasi
impossible depuis le début mars
l’évacuation de blessés vers le
Liban, selon une source informée.
En éliminant ce maquis au nord
de la capitale, le régime de Bachar
Al-Assad entend recentrer ses forces sur d’autres fronts, comme
Damas ou Alep, après avoir sécurisé l’autoroute entre Homs et la
capitale. Quant au Hezbollah, il
affirme vouloir venir à bout de
ceux qui font passer des voitures
piégées, utilisées dans la série d’attentats qui frappent des régions
chiites libanaises, et qui proviennent, selon la formation d’Hassan
Nasrallah, du Qalamoun. Plusieurs de ces attaques ont été
revendiquées par des groupes djihadistes, pour se venger du combat livré en Syrie par les miliciens
chiites du Parti de Dieu.
L’intensification des combats a
entraîné un vaste exode de civils.
Selon l’agence des Nations unies
pour les réfugiés, près de
13 000 Syriens fuyant Yabroud et
ses alentours ont gagné Ersal
depuis la reprise de l’offensive.
« Quand l’armée d’Assad a appelé
les civils à partir, on a compris que
la grande attaque commençait,
explique Ahmad. La plupart des
habitants ont déserté Yabroud,
pour Damas ou le Liban. On ne
peut pas répéter le désastre de
Qoussair, quand la ville, encerclée,
a été pilonnée de toutes parts. »
C’est de cette localité qu’Ahmad
est originaire, à la manière de milliers de combattants de la région
d’Homs qui se sont repliés dans le
Qalamoun après la chute de Qoussair, venant grossir les rangs des
unités déjà présentes.
Cette défaite a laissé un goût
amer aux rebelles, persuadés que
sans l’intervention du Hezbollah,
le régime n’aurait jamais repris la
ville. La chute de Qoussair, en ruines, a donné un avantage militaire
aux forces de Bachar Al-Assad,
même s’il reste relatif.
D’un air malicieux, Ahmad retire le cache qui recouvre son œil
droit crevé. « Ça, c’est Qoussair »,
dit-il. Il relève un pan de sa chemise : son estomac n’est qu’une vaste
cicatrice. Mais il ne regrette pas
son ancienne vie, celle d’avant le
«Notre problème
reste le même depuis
le début de cette
guerre: le manque
d’armes»
Ahmad
combattant
de l’Armée syrienne libre
soulèvement, « quand le peuple
sunnite était pauvre et humilié ».
Habitué à commander sur le terrain, il ne s’est jamais séparé de sa
famille dans les zones de guerre :
« Si on doit mourir, que ce soit
ensemble! » Sonépouse rit. « Jesoutiens Ahmad. Tous les Syriens doivent lutter. Mais je suis fatiguée de
notre vie », concède Amani, dont
les mouvements s’accompagnent
du cliquetis de ses bracelets en or.
Sous un léger fichu, elle laisse
apparaître ses mèches brunes,
insouciante du regard sévère des
hommes barbus qui surveillent
les allers et venues dans ce camp
financé par le sultanat d’Oman.
Silhouette élancée, Ahmad,
ancien ouvrier agricole, croit que
les combats dans le Qalamoun
vont durer, même si les médias
pro-régime donnent la prise de
Yabroud pour imminente: « Face
au déploiement massif de l’armée
d’Assad et du Hezbollah, l’ASL et le
Front Al-Nosra coordonnent des
milliers de combattants. Notre problème reste le même depuis le
début de cette guerre : le manque
d’armes. » Selon lui, le terrain est
plus favorable aux insurgés dans
leQalamounqu’il ne l’était à Qoussair : « Yabroud est plus étendue,
plus difficile à assiéger. Et le relief
montagneux rend l’encerclement
compliqué.» C’est pourtant la tactique que semblent suivre les troupes syriennes et le Hezbollah, qui
assurent ratisser les derniers villages avant Yabroud.
La ville multiconfessionnelle
manque à la belle Amani. « Jusqu’à
l’offensive, on vivait bien, en tout
cas mieux que dans ce camp. Il y
avait des bombardementssporadiques, mais depuis l’enfer de Qoussair, on s’était habitués. » Dans ce
semblant de normalité, elle se sentait en sécurité avec ses deux
enfants. Sa voisine Oum Kamal,
elle, était moins sereine : elle
cachait à la maison son fils blessé,
de peur que l’adolescent soit
dénoncé par des loyalistes présents dans la ville. Ce quotidien
précaire a volé en éclats. Pilonnée,
Yabroud est aujourd’hui privée
d’eau et d’électricité. Des barils
d’explosifs, les mêmes que ceux
largués à Alep, sont utilisés par le
régime dans le Qalamoun.
Ahmad se donne un mois pour
être d’aplomb. Et reprendre les
armes, dans cette guerre qu’il voit
s’éterniser : « Trois de mes frères
ont été tués au combat dans le
conflit depuis 2011. Je ne connaîtrai
pas la Syrie en paix. Mon fils aîné,
qui a 7 ans, peut-être… » Dans une
allée voisine, Khaled, un jeune
combattant du Front Al-Nosra,
s’apprête à rejoindre le Qalamoun,
malgré les bombardements à la
frontière, après avoir, comme
d’autres rebelles, mis sa famille à
l’abri dans la Bekaa.
La région n’a pourtant rien d’un
havre de paix : les pilonnages de
l’armée syrienne sur les environs
d’Ersal et les tirs d’obus rebelles
visant des villages pro-Hezbollah
s’y succèdent depuis la fin
février. p
Laure Stephan
LeNigerremetàlaLibyeSaadiKadhafietAbdallahMansour,accusésdedéstabilisation
Tripoli a exercé de fortes pressions sur Niamey, très inquiet pour la sécurité de sa frontière avec le Sud libyen
G
enoux à terre, tête baissée
en train d’être rasée. La photo de Saadi Kadhafi revêtu
de l’uniforme bleu gris des prisonniers à son arrivée à Tripoli, jeudi
6 mars, a fait le tour d’Internet.
Remis aux autorités libyennes par
le Niger, le troisième fils de
MouammarKadhafiarejointlaprison de haute sécurité d’Al-Hadhba
où sont déjà détenus d’autres proches de l’ancien régime comme
Abdallah Al-Senoussi, livré par la
Mauritanie en septembre2012, ou
l’ex-premier ministre Mahmoud
Al-Baghdadi,extradéparla Tunisie
trois mois plus tôt.
Saadi Kadhafi, 40 ans, devient
ainsi le deuxième membre de la
famille Kadhafi susceptible d’être
jugé en Libye. Son frère, Saïf
Al-Islam, capturé fin 2011 par une
brigade de Zenten (ville de l’ouest
du pays), y est toujours détenu, les
rebelles refusant obstinément de
le remettre à Tripoli. Aucunprocès,
aucune audience publique n’a jusqu’ici eu lieu en Libye concernant
les anciens dignitaires du régime,
qui n’ont pas accès non plus à leurs
avocats internationaux. Le Niger
avait toujours affirmé, jusqu’ici,
qu’iln’extraderaitpasSaadiKadhafi pour des raisons humanitaires.
Cet ancien ex-patron de la Fédération libyenne de football dirigeait une brigade pendant le
conflit. Il se trouvait au Niger, en
résidence surveillée, depuis sa fuite il y a bientôt trois ans. Son extra-
dition forcée s’est accompagnée de
celle d’une dizaine d’autres
Libyens. Quinze jours auparavant,
le 14 février, Niamey avait remis à
Tripoli le général Abdallah Mansour,ancienresponsabledelasécurité et proche du colonel Kadhafi.
« Pays frères et amis »
Lesautoritéslibyennesont exercé une incroyable pression sur le
Niger pour récupérer cet ancien
dignitaireaccusé,documentsàl’appui, d’avoir planifié des « actes terroristes visant à déstabiliser la
Libye ». Tripoli le soupçonne
d’avoir fomenté les troubles qui
ont éclaté en janvier dans le sud
libyen, à Sebha. Placée en état d’urgence, la ville avait été le théâtre de
violents affrontements qui ont fait
de nombreuses victimes. Sur place, des témoignages avaient fait
état de la présence d’anciens partisans du régime Kadhafi.
Dès lors, les exigences de Tripoli
se sont considérablement accrues
envers le Niger, pays voisin déjà
inquietpour la sécurité de sesfrontières. En mai 2013, le président
MahamadouIssoufouavait accusé
la Libye d’abriter dans le sud de son
territoire des groupes armés responsables de l’attaque d’une garnison à Agadez et d’une mine d’uranium d’Areva, ce qu’avait alors
démenti vigoureusement Tripoli.
Depuis, les relations entre les deux
pays étaient restées tendues.
Après Abdallah Mansour, le sort
de Saadi Kadhafi a donc été rapidement scellé. « Pour créer une entente entre deux pays frères et amis,
nous avons décidé de mettre fin à
cette situation qui va arriver tôt ou
tard », a curieusement expliqué à
la presse, le 6 mars, Marou Amadou, le ministre nigérien de la justice et porte-parole du gouvernement. « C’est seulement en tenant
compte des intérêts supérieurs de
notre pays que nous avons décidé
de mettre fin à cette situation qui
met en difficulté notre pays, dans
un contexte sahélien compliqué»,
a-t-il poursuivi. Niamey assure
avoirtentédetrouveruneautreterre d’asile à son hôte encombrant,
dont la Tanzanie, mais n’avoir
essuyé que des refus. « Nous
n’avons eu aucun candidat », insiste M. Amadou.
Des arguments qui ne convainquent pas. Dans un communiqué
rendu public jeudi, Human Rights
Watch interpelle les autorités nigériennes sur ce qui leur fait croire
que Saadi Kadhafi « ne serait pas
maltraité et pourrait bénéficier
d’un procès équitable ». Le fils Kadhafinefaitl’objetd’unmandatd’arrêt internationalque pourdes malversationsfinancières.Tripoliassure qu’il est aussi responsable de
« crimes visant à maintenir son
père au pouvoir» et qu’il est impliqué dans le meurtre en 2005 d’un
ancien entraîneur d’Al-Ittihad, un
club de foot de Tripoli. p
Isabelle Mandraud
0123
international
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
3
Ukraine: le gaz russe,
arme à double tranchant
Tandis que Gazprom menace de cesser ses livraisons à Kiev, le débat
sur l’exportation du gaz de schiste américain prend de l’ampleur
L
a guerre du gaz aura-t-elle
lieu ? Le patron du groupe
public russe Gazprom a en
effet menacé l’Ukraine, vendredi
7mars, d’interrompre ses exportations de gaz à l’Ukraine – dont 60 %
de l’approvisionnement dépendent de Moscou – en raison d’impayés de 1,9 milliard de dollars
(1,36 milliard d’euros). « Nous ne
pouvons pas livrer du gaz gratuitement, a prévenu Alexeï Miller. Soit
l’Ukraine règle ses arriérés, soit il y a
unrisquederevenirà la situationde
début2009.»La datelimitedepaiement des livraisons de février tombait vendredi 7 mars, et «Gazprom
n’a reçu aucun paiement sur son
compte»,ajustifiéceprocheduprésident Vladimir Poutine.
Il y a plusieurs jours, la compagnie ukrainienne Naftogaz avait
déjà signifié à Gazprom qu’elle ne
pourrait pas honorer ses factures.
Ses difficultés risquent de s’accroître, puisque Gazprom a décidé de
mettrefin en avril à la ristournesur
le prix du gaz accordée en décembreàl’ex-présidentprorusseViktor
Ianoukovitch.
Une telle décision de Gazprom
perturberait l’approvisionnement
de l’Union européenne (UE), dont
les fournitures de gaz russe (30 %
de la consommation européenne)
transitent par l’Ukraine. L’Europe
risque ainsi de revivre – à une saison plus clémente – les crises du
gaz de janvier 2006 et de janvier2009. Certes, depuis la mise en
service en 2011-2012 du gazoduc
Nord Stream sous la Baltique, qui
peut acheminer jusqu’à 55 milliards de m3 par an de la Russie vers
l’Allemagne,le Vieux Continentest
moins exposé au « goulet d’étranglement » du gazoduc Brotherhood traversant l’Ukraine : il n’y
passe plus que 15% du gaz consommé par les Européens, même si certains pays, comme la Slovaquie
et la Hongrie, restent vulnérables.
Mais l’arme du gaz est délicate à
manier. Gazprom a écoulé un volume record (162,7 milliards de m3)
vers l’UE et la Turquie en 2013, dont
86milliardsonttransitéparl’Ukraine. Et sa part de marché en Europe
est passée de 25,6 % en 2012 à 30 %
en 2013, a révélé le vice-président
de la société devant l’assemblée
générale des actionnaires, le 3 mars
à Londres. Le message d’Alexandre
Medvedev était sans ambiguïté :
l’Europe achètera de plus en plus
de gaz à la Russie à mesure que sa
propre production (Grande-Bretagne, Norvège,Pays-Bas…)déclinera.
Mais Moscou n’a aucun intérêt
économique à priver l’Europe de
ses hydrocarbures. Un arrêt total
des exportations vers l’UE ferait
perdre 75 milliards de dollars à la
Russie et pourrait entraîner « un
repli de l’ordre de 3,7 % du PIB », a
calculé Charlotte de Lorgeril, du
Entretiens Poutine-Obama et Lavrov-Kerry
Pour la deuxième fois en deux
jours, Vladimir Poutine et
Barack Obama ont eux un long
entretien téléphonique, vendredi 7 mars. Le président américain a justifié « des mesures de
représailles, en coordination
avec [les] partenaires européens » par le viol de la souveraineté de l’Ukraine après l’annonce du référendum sur le rattachement de la Crimée à la Russie.
Vladimir Poutine l’a mis en garde contre le risque de « sacrifier » les relations américanorusses pour des « problèmes
internationaux isolés ». Le chef
de la diplomatie russe, Sergueï
Lavrov, a averti son homologue
américain, John Kerry, que les
sanctions américaines (interdictions de visas, gels d’avoirs)
pourraient « avoir un effet boomerang » sur les Etats-Unis.
cabinet SIA Partners. La Russie est
de plus en plus « pétro-dépendante» : l’énergiereprésente71 %de ses
exportations contre 54 % en 2000,
quand Vladimir Poutine a été élu
pour la première fois au Kremlin.
Que peut faire l’UE ? Elle n’a pas
les moyens de décréter un embargo sur les exportations énergétiques russes, puisqu’elle importe
225 millions de tonnes de pétrole
par an de Russie et une bonne partiedesongaz.Lecommissaireeuropéen à l’énergie, Günther Oettinger, a annoncé mardi que l’Europe
aiderait Kiev, au bord de la faillite, à
régler sa dette gazière.
Moyen terme
Vu de Washington aussi, ce qui
se joue entre Kiev et Simferopol
(capitale de la Crimée) a un parfum
de gaz. La diplomatie américaine
est tentée de considérer la crise
ukrainienne comme une occasion
de remettre en cause l’ascendant
que donne à Moscou sa domination dans l’approvisionnement de
l’Europe en gaz, en utilisant une
arme économique nouvelle: le gaz
de schiste. Dans le Dakota du Nord
et le Texas, où ce nouvel or noir
jaillit en abondance et à bon marché, se jouerait aussi l’avenir de
l’Ukraine…
Lessociétéspétrolièresaméricaines, relayées par des élus républicains, n’ont pas tardé à se lancer
dans cette nouvelle bataille où
convergent arguments géopolitiques et intérêts commerciaux.
D’ExxonMobil à Chevron, le lobby
des pétroliers s’agite pour obtenir
de Barack Obama l’autorisation
d’exporter du gaz vers l’Europe.
Actuellement, les compagnies
n’ontledroitdelefairequ’àdestination de pays avec lesquels existe un
accord de libre-échange, comme le
Mexique et le Canada.
« Une mesure que le président
peut et doit prendre immédiatement,consisteàaccélérerconsidéra-
Une conduite de gaz à Sébastopol, en Crimée. VLADIMIR DOKIN/AFP
blement la décision d’approuver les
exportations américaines de gaz
naturel», a plaidé John Boehner, le
président de la Chambre des représentants, le 4mars. Dans une tribune publiée deux jours plus tard
dans le Wall Street Journal, sous le
titre « Contrer Poutine en libérant
le gaz naturel américain», le « speaker» républicainstigmatisela«lenteur atroce du processus d’autorisation » que « Vladimir Poutine s’est
faitunplaisird’exploiterpourfinancer ses ambitions stratégiques».
De fait, le rapport de force énergétique entre Washington et Moscou a radicalement changé ces dernières années: alors que l’administration Bush envisageait d’importer du gaz russe en 2007, la technique controversée de la fracturation
hydraulique a permis aux Américainsdedevenirleplusgrosproduc-
Dès la fin mars,
400Russes arriveront
à Saint-Nazaire pour
se familiariser avec
le porte-hélicoptères
«Vladivostok»
Maroc, la marine nationale française ne déléguera pas d’équipage de
conduite. Le Vladivostok sera livré
en octobre, puis sera armé à SaintPétersbourg avant de rejoindre la
flotte russe du Pacifique en 2015.
Le deuxième BPC russe sera livré
fin 2015.
Au-delà de ce symbole, la coopération recouvre de classiques et
régulières réunions d’étatsmajors. Une visite du chef d’étatmajor de la marine russe est ainsi
prévue en juillet à Paris.
Car les troupes des deux pays
conduisent des exercices ensemble. Un entraînement opérationnel, totalement inédit, avait mobili-
sé 60 aviateurs français et leurs
Mirage F-1, en août2013, en Russie:
pour la première fois depuis la fin
de la deuxième guerre mondiale,
des pilotes français et russes ont
volé de conserve. «Un premier
jalon, pour voir», explique l’armée
de l’air. Autre exemple, depuis
2005, les marins français participent chaque année à l’exercice
naval Frukus avec les Russes, les
Américains et les Britanniques. Le
prochain est toujours programmé,
à l’été, au Royaume-Uni.
Mais la coopération bilatérale
va beaucoup plus loin. Dans une
conjoncture économique déplorable, Paris compte fortement sur
ses exportations de défense. Or, le
marché russe est stratégique. Moscou annonce que son budget militaire va croître de plus de 40%
dans les trois ans.
Les grands industriels français
du secteur scellent des alliances
avec des entreprises russes, dans
l’électronique de combat des hélicoptères, le contrôle aérien, ou
encore la navigation inertielle. De
nouveaux transferts de technologie sont au cœur de cette relation.
C’est ce qu’a rappelé Dmitri Rogozine, vice-premier ministre russe,
cité par Ria Novosti le 13février,
lors du deuxième forum bilatéral
de coopération militaire technique à Moscou: « Nous nous trouvons à une étape très importante,
marquée par la transition de la coopération militaro-technique, qui se
poursuit depuis vingt ans, à la coopération technologico-militaire, ce
qui est bien plus important.» p
Nathalie Guibert
Philippe Bernard
et Jean-Michel Bezat
‘‘ Le petit miracle de ce début d’année ’’ PREMIÈRE H H H
‘‘ Un film fédérateur et républicain ’’ LES CAHIERS DU CINÉMA
‘‘ Un hymne à la richesse culturelle ’’ PHOSPHORE
LA COUR DE BABEL
un film de
Julie Bertuccelli
© ILLUSTRATION : CHRISTOPHE BLAIN
un BPC il aurait pu sceller la victoire militaire de 2008 contre la Géorgie «en 40 minutes au lieu de
26heures»?
Par un hasard de calendrier, le
premier BPC, le Vladivostok, a fait
ses essais à la mer le 5 mars. Une
dizaine de conseillers d’un prestataire français ont déjà été envoyés
à Saint-Pétersbourg et, à partir de
la fin mars, quelque 400 Russes
arriveront à Saint-Nazaire pour se
familiariser avec le navire. Contrairement à ce qui vient d’être fait
pour la frégate Fremm livrée au
titivité que leur procure aujourd’hui le gaz bon marché, si l’offre
venait à être réduite du fait des
exportations.
Les conséquences de l’exportation du gaz américain vers l’Europe ne se feraient sentir qu’à moyen
terme. Malgré tout, Hillary Clinton,
prenant acte de la puissance géostratégique que confère aux EtatsUnis leur position d’exportateur
potentiel d’hydrocarbures, a créé
fin 2011 un Bureau des ressources
énergétiques au sein du Département d’Etat. Son directeur, Carlos
Pascual, ex-ambassadeur en Ukraine,a expliquéle5 marsauNewYork
Timesquelaperspectived’exportations de gaz américain permettait
désormaisde réfléchir«à la manière d’influencer les événements». p
LES FILMS DU POISSON ET SAMPEK PRODUCTIONS PRÉSENTENT
LacoopérationmilitaireentreMoscouet
Parisnesouffreenriendelacriseukrainienne
PAS QUESTION de changer quoique ce soit à la coopération militaire en cours entre la France et la Russie. En dépit de la crise en Ukraine,
tel est, pour l’heure, le mot d’ordre
présidentiel à Paris.
A l’agenda figure d’ailleurs toujours une réunion, le 18mars, à
Moscou, du Conseil de coopération sur les questions de sécurité,
instance bilatérale consacrée au
dialogue stratégique. Le Conseil
associe les ministères de la défense
et des affaires étrangères. A l’occasion, une rencontre avec le chef de
l’Etat hôte est normalement prévue. Le Conseil a cependant plusieurs fois déjà été reporté.
Permise par la volonté de Moscou de moderniser rapidement
son outil de défense et, pour cela,
de s’ouvrir à de nouveaux partenaires en Occident, la coopération de
défense franco-russe est en plein
renouveau. Le symbole en a été la
vente, finalisée en 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, de
deux « bâtiments de projection et
de commandement» (BPC), des
porte-hélicoptères Mistral fabriqués sur les chantiers navals français de STX à Saint-Nazaire (LoireAtlantique). Montant du contrat,
1,3milliard d’euros.
Au départ, Moscou souhaitait se
doter de cinq de ces navires mais a
réduit ses ambitions. Reste que cette vente, assortie de matériels de
navigation et de radars de dernière
technologie, continue de gêner les
alliés de la France dans la nouvelle
Europe, Pologne et pays baltes en
tête. Le commandant de la marine
russe n’avait-il pas ironisé qu’avec
teur mondial de gaz. Les compagnies se bousculent pour demander des autorisations d’exporter
mais, pour l’heure, seuls six permis
ont été accordés.
Pourtant, la diplomatie du gaz
n’a guère de chance de peser dans
l’immédiat sur la crise ukrainienne. Comme l’indique Michael Levi,
expert au Council on Foreign Relations, plusieurs années seraient
nécessaires pour mettre en place
les infrastructures de liquéfaction
etdetransportàlarentabilitéincertaine. D’autant que l’Asie, où les
prixdugazsontnettementplusélevés qu’en Europe, pourrait se révéler nettement plus attractive. Moscou, qui a la haute main sur la gestiondeGazprom,seraittentéderéagir en abaissant ses prix.Quant aux
industriels américains, ils pourraient perdre l’avantage de compé-
AU CINÉMA LE 12 MARS
4
0123
international & planète
Disparitionen vol
d’unBoeing777
deMalaysiaAirlines
L’appareil effectuait la liaison entre Kuala
Lumpur et Pékin, avec 239 personnes à bord
L
e Vietnam et la Malaisie ont
lancé, samedi 8 mars, des opérations de recherche après la
disparition d’un Boeing 777 de
Malaysia Airlines effectuant la
liaison entre Kuala Lumpur et
Pékin avec 239 personnes à bord.
L’appareil, qui a quitté Kuala Lumpursamedià 0h 41 et devait arriver
àPékinà 6h30locales(22h30GMT
vendredi), a disparu deux heures
aprèsson décollage.Il n’aenvoyéni
signaldedétresseni aucuneindication sur un éventuel problème,
selon la compagnie.
Plusdedouzeheuresaprèsavoir
perdu contact avec l’avion qui survolait alors le Vietnam, personne
n’était encore en mesure de localiser le vol MH370, qui transportait
227 passagersde plusieursnationalités (153 Chinois, 38 Malaisiens, 12
Indonésiens,7Australiens,4Américains et 3 Français), ainsi que
12membres d’équipage. Les efforts
pour tenter de localiser le Boeing
777-200 se poursuivaient samedi
matin.Selonle gouvernementvietnamien, l’avion a perdu le contact
près de l’espace aérien de la province de Ca Mau, dans le sud du pays. Il
aurait dû prendre contact avec le
contrôle aérien de Ho-Chi-MinhVille mais n’est jamais apparu.
Le ministère vietnamien de la
défense a lancé une mission de
secours en coordination avec la
Malaisie et la Chine. Les autorités
ontenvoyéun avion,deuxhélicoptères et quatre navires pour
fouiller une zone de la mer de
Chine méridionale, a également
indiqué Faridah Shuib, porte-parole de l’Agence de surveillance des
affaires maritimes de Malaisie. Les
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Menacessurlesdroitsdesfemmes
Pays conservateurs et progressistes s’opposent à l’ONU sur de nouveaux objectifs
L’état des législations sur l’avortement dans le monde
Philippines ont dépêché trois navires de la marine et un avion de surveillance. Selon la Chine et la
Thaïlande, l’appareil n’est pas
entré dans leur espace aérien.
Un des avions les plus sûrs
« Nos pensées et nos prières
accompagnent les passagers et
l’équipage, ainsi que les membres
deleursfamilles,a déclaréle PDGde
Malaysia Airlines, Ahmad Jauhari
Yahya, lors d’une conférence de
presse. Notre priorité, maintenant,
est de travailler avec les équipes de
secours et les autorités.» Aux aéroports de Pékin et de Kuala Lumpur,
des membres de famille de passagers attendaient dans l’angoisse.
Boeing, de son côté, s’est exprimé
sur Twitter: « Nous suivons attentivement les informations sur le
MH370. Nos pensées vont à tous
ceux qui sont à bord.»
Surnommé le triple 7, le Boeing
777, le plus grand biréacteur du
monde, très prisé des compagnies
aériennes, a la réputation d’être
l’un des avions les plus sûrs du
monde. Entré en service en 1995, le
long-courrier n’a connu qu’un seul
incident grave, en juillet 2013, lorsqu’un appareil de la compagnie
sud-coréenneAsianaAirlinesaraté
son atterrissage sur l’aéroport de
San Francisco, provoquant la mort
de trois passagers.
La disparition de l’un de ses
avions est une très mauvaise nouvelle pour Malaysia Airlines.
Concurrencée par la compagnie à
bas coût AirAsia, elle avait admis
en 2012 être « en crise », et enregistré des pertes l’année suivante. p
Service International avec AFP
ARABIE SAOUDITE
PourRiyad,les Frères musulmans
sontdes terroristes
RIYAD. L’Arabie saoudite a rendu publique, vendredi 7 mars, une
« première liste » d’organisations terroristes, dans laquelle les Frères musulmans figurent aux côtés d’Al-Qaida, de l’Etat islamique
en Irak et au Levant et du Front Al-Nosra. Toute activité partisane, par le biais d’Internet, et tout appel à manifester sont interdits, a également précisé le ministère de l’intérieur. Ces décisions
constituent une escalade majeure contre les Frères musulmans
égyptiens, auxquels Riyad est hostile, et témoignent des craintes
croissantes du royaume d’un retour de Saoudiens partis combattre en Syrie. Elles surviennent dans un contexte de crise au sein
des monarchies arabes du Golfe, entre l’Arabie saoudite notamment et le Qatar, qui a soutenu le « printemps arabe ». – (AFP.) p
RDC Germain Katanga, chef de guerre congolais,
condamné par la justice internationale
LA HAYE. La Cour pénale internationale a jugé, vendredi 7 mars,
Germain Katanga, coupable de certaines des accusations de crimes de guerre. A l’issue de six ans de procès, l’ex-chef de milice
congolais a été condamné pour complicité de meurtres et de
pillages lors de l’attaque du village de Bogoro, en février2003,
dans l’est de la RDC ayant fait 200 victimes civiles. – (Reuters.)
Espagne
Salvador
Un projet de loi présenté
le 20 décembre 2013 revient
sur le droit à l’avortement
durant les quatorze
Nicaragua premières semaines
de grossesse.
Corée du Nord
Malte
Japon
Chine
La Chine a annoncé en
novembre 2013
l’assouplissement
de sa politique controversée
de l’enfant unique.
Selon les détracteurs
de cette loi, les cas
d’application brutale restent
fréquents, avec stérilisations
forcées et avortements
imposés.
Chili
Michelle Bachelet, qui a
remporté la présidentelle
en décembre 2013, a annoncé
pendant sa campagne vouloir
dépénaliser l’avortement
en cas de viol ou de danger
pour la santé de la mère
ou de l’enfant.
SOURCES : AFP ; THE WORLD ABORTION LAW 2013
C
’est à une épreuve de force
peu visible mais intense que
se livrent progressistes et
conservateurs autour des « droits
sexuels et reproductifs » des femmes (et notamment du droit à
l’avortement), ainsi que les qualifient les conventions et textes
internationaux. Alors que doit se
réunir pour deux semaines, à partir du lundi 10 mars, au siège des
Nations unies, à New York, la Commission du statut des femmes,
chargéenotammentd’évaluerprogrès et défis au niveau de l’égalité
entrefemmeset hommes,l’inquiétude est réelle dans le camp des
pays les plus progressistes.
«Onassiste àunecoalitionobjective des conservateurs de toutes
obédiences et ces pays s’opposent à
tout progrès en matière de droits
des femmes, estime Najat VallaudBelkacem, la ministre française
des droits des femmes, attendue à
New York lundi. Il ne s’agit pas seulement de positions religieuses,
mais d’une intolérance à ce que le
droit international fixe des règles. »
De fait, plusieurstextesinternationaux sont en cours de révision.
Les Nations unies préparent ainsi
pour 2015 une conférence « Pékin
+ 20 », destinée à réactualiser les
objectifs fixés par la conférence de
Pékin en 1995, parmi lesquels l’élimination de toute forme de discrimination, la garantie des droits à
la santé et à l’éducation ou encore
de ceux liés à la procréation. Dès
septembre, doit avoir lieu, à
Pays où l'avortement est
autorisé sans restriction
interdit sauf pour raisons de santé et motifs
socio-économiques (âge, ressources...)
interdit sauf pour raisons de santé
interdit sauf en cas de danger pour la vie
de la mère
totalement interdit
New York, une réunion « Le Caire
+ 20 », censée réviser des objectifs
liés au développement humain et
aux dynamiques de population,
intégrant en particulier les droits
reproductifs et l’égalité entre femmes et hommes. La 3e conférence
internationale sur la population et
le développement s’était tenue
dans la capitale égyptienne en
1994.
« Il s’agit, plus globalement, de
redéfinir les Objectifs du millénaire
pour le développement, dont la
date butoir est 2015, à travers les
nouveaux Objectifs du développement durable pour la période
2015-2030», explique Nicolas Rainaud, chargé de plaidoyer à Equilibres & Populations, organisation
non gouvernementale travaillant
à l’amélioration des conditions de
vie et du statut des femmes. Dans
les enceintes onusiennes, le thème
quicrée le plusde tensionsdiplomatiques est toujours celui lié aux
droitssexuelset à la santéreproductive. Certains pays ne veulent pas
entendre parler de “droits”. »
Alors que, sur ces questions, des
progrès avaient été enregistrés ces
dernièresannées, la tendancesembleaujourd’huià lastagnation,voire à la régression.Il n’est mêmepas
certain qu’un nouveau texte sera
soumis à la conférence « Le Caire
+ 20 ». Il pourrait n’y avoir qu’un
simple état des lieux, région par
région, sans nouveaux objectifs.
En Europe, la Pologne et Malte
sont les plus réticents. La Russie et
Un rapport de l’ONU,
rendu public en février,
dénonce l’utilisation
de produits chimiques
introduits dans le vagin
de certaines femmes
pour les forcer à avorter.
Pays où la loi a été durcie
ces vingt dernières années
Pas de données
la Hongrie freinent également, ce
quiétaitaussile casde l’Irlandejusqu’à récemment. Le Vatican, selon
les spécialistes du dossier, est à la
manœuvre.Une offensivereligieuse relayée par les pays musulmans
les plus intégristes, dans le Golfe
comme en Afrique.
Cette bataille sur les textes se
traduit dans les faits, à des degrés
divers. En Espagne, le gouvernement tente de revenir sur le droit à
l’avortement. En France, les oppositions au mariage pour tous se
« On assiste à une
coalition objective
des conservateurs
de toutes obédiences»
Najat Vallaud-Belkacem
ministre des droits
des femmes
sont fortement exprimées dans la
rue. En Ouganda, une loi antihomosexualité particulièrement
dure a entraîné une réaction de la
communauté internationale ainsi
que le report d’un prêt de la Banque mondiale.
Pour Xavier Lacroix, doyen de la
faculté de théologie de Lyon et
représentantde l’Eglisecatholique
au sein du Conseil consultatif
national d’éthique, il ne s’agit pas
d’une offensive réactionnaire,
mais d’une réponse à une orientation jugée trop « libérale » au
niveau international. « Plutôt
qu’un retour en arrière, il y a plutôt
une fuite en avant et donc la nécessité, pour l’Eglise, de freiner le mouvement, explique-t-il. La liberté de
choix individuel est le maître mot
aux Nations unies. Or, pour l’Eglise,
ce n’est pas le critère absolu. Il y a
aussi le respect du bien commun,
de la cellule familiale de base: père,
mère et enfant. »
Devant cette contre-offensive,
nombre de pays restent prudents
quant à la nécessité de rouvrir certains débats. Le risque d’un recul
n’est pas à écarter, disent-ils. « A
partir du moment où l’agenda
post-2015 est sur la table, on va
devoir se battre, estime Pascal Canfin, le ministre français délégué au
développement. On est dans une
logique offensive, tout en ayant
conscience qu’il existe un risque de
régression. » « Les pays les plus
conservateurs parlent le plus fort,
ajoute Mme Vallaud-Belkacem. Il
faut que les pays progressistes se
mobilisent, se fassent entendre. »
Pour gagner la bataille, « il faut,
montrer que l’accès des femmes
aux différents services, santé, travail… est une question de droit,
mais aussi d’efficacité», fait valoir
M. Canfin, qui défend une approchepragmatique,susceptibled’entraîner des pays comptant parmi
les plus réfractairesaux problématiques de droits sexuels des femmes. « Le développement ne peut
exister si les femmes en restent à
l’écart», ajoute-t-il. p
Rémi Barroux
Liguiades, village martyr grec, n’a rien oublié
L
Ce dimanche à 12h10
LAMBERT MENDE OMALANGA
Porte-parole du gouvernement de la République Démocratique
du Congo, ministre des médias et des Relations avec le Parlement
répond aux questions de Philippe Dessaint (TV5MONDE),
Sophie Malibeaux (RFI).
Diffusion sur les 8 chaînes de TV5MONDE, les antennes de RFI et sur Internationales.fr
0123
e président allemand, Joachim Gauck, a achevé, vendredi 7mars, son séjour de
trois jours en Grèce par la visite
du village martyr de Liguiades,
situé en Epire, à 400 kilomètres
d’Athènes, dans l’ouest du pays.
Une visite hautement symbolique
au cours de laquelle M.Gauck a
demandé « pardon, au nom du
peuple allemand, aux familles des
victimes» d’un massacre commis
par l’armée allemande durant la
seconde guerre mondiale. « Je
m’incline devant les victimes d’un
crime monstrueux», a-t-il ajouté.
Des mots qui rappellent ceux
que M.Gauck avait prononcés le
4septembre2013 en visitant un
autre village martyr – en France
celui-là –, lorsqu’il s’était rendu
avec François Hollande à Oradoursur-Glane (Haute-Vienne). « On
sait que M. Gauck va partout en
Europe demander pardon pour les
crimes nazis, mais cela nous laisse
indifférents», commente Lefthéris
Gérakos, 70 ans, un descendant de
victimes de Liguiades.
Le 3octobre 1943, en représailles du meurtre d’un officier
allemand par des résistants de la
région, les occupants nazis ont
exécuté 96 personnes – âgées de
2mois à 100 ans – et brûlé les maisons du village. « Il ne restait que
l’église et l’école lorsque l’autre
moitié des habitants, qui était partie dans les montagnes ramasser
des noix, a découvert le carnage »,
raconte Lefthéris. « Chaque
famille a perdu quelqu’un. Nous,
on a perdu 5 membres. Le corps de
mon oncle, dont je porte le nom, a
été retrouvé dans la cheminée de la
maison familiale. Une tragédie
pareille, ça marque au fer rouge.»
Liguiades n’avait pas été choisi
au hasard. Situé sur un promontoire, il domine la plaine et le lac de
la grande capitale de l’Epire, Ioannina. « Comme ça, tous les villages
environnants ont vu ce qui se passait et la peur s’est imprimée partout. Liguiades a brûlé pour l’exemple», dit Lefthéris.
Réparations de guerre
Comme beaucoup, il a suivi l’arrivée du cortège officiel du président Gauck, accompagné du président de la République grec. Originaire de la région, Carolos Papoulias, 84 ans, a participé à la résistance antinazie de 1942 à 1944. Il a
profité de la visite de son homologue allemand pour rouvrir la question des réparations de guerre
réclamées à l’Allemagne en compensation des crimes commis lors
de l’occupation du pays par les
nazis (1941-1944) et d’un emprunt
forcé à la Grèce contracté en 1942.
En septembre2012, un «groupe
de travail», créé sous l’égide de la
Cour des comptes grecque, a chiffré à 162 milliards d’euros le montant des réparations que la Grèce
pourrait réclamer à l’Allemagne.
« Vous savez que je ne peux vous
faire d’autre réponse que vous dire
que la voie légale est fermée », a
répondu M.Gauck.
Berlin a toujours fait valoir que
la question des réparations de
guerre avait été réglée dans le
cadre d’accords entre Etats à la
Conférence de Paris en novembre1945. Mais, depuis le début de
la crise financière en 2010, beaucoup en Grèce ont ressorti ce
débat en arguant que ces réparations permettraient d’effacer plus
de la moitié de la dette grecque.
« Moi, la dette, je m’en moque,
avoue Lefthéris, mais l’Allemagne
doit bien cela à ses victimes. Le
sang, lui, ne s’effacera jamais. » p
Adéa Guillot (Athènes,
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6
france
0123
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
M. Delanoë: «NKM fait preuve de désinvolture»
L’actuel maire de Paris critique la campagne de la candidate UMP. Il affirme ne pas souhaiter devenir ministre
Entretien
A
la veille de tirer sa révérence, Bertrand Delanoë livre
son testament de maire de
Paris. Après deux mandats, il se dit
fier d’avoir accompli deux « ruptures»:Paris a retrouvéson dynamisme démographique et a, en partie,
aboli les barrières avec ses voisins.
Il salue la priorité donnéepar François Hollandeau « dynamismeéconomique » de la France mais l’encourage à aller de l’avant sur les
grandes réformes de société.
Anne Hidalgo a-t-elle gagné la
bataille de Paris ?
Anne Hidalgo a incontestablementremportéla bataille de la crédibilité et de l’authenticité pour
diriger Paris. Mais l’élection se
déroule dans un contexte particulier, donc soyons modestes ! Un
scrutin est par essence incertain.
Craignez-vous un vote sanction
contre le gouvernement ? Les
attaques de la droite sur la pression fiscale ne risquent-elles pas
de vous porter préjudice ?
Les Parisiens que je rencontre
me parlent très peu de politique
nationale. Contrairement à
Mme Kosciusko-Morizet, ils savent
que leurs impôts locaux sont les
plus bas de France, et qu’en treize
ans nous ne les avons augmentés
qu’à deux reprises et modérément. Cela étant dit, la fiscalité reste un sujet très important. Anne
Hidalgo a eu le courage d’annoncer qu’elle n’augmenterait pas les
impôts,tout en se montrant offensive pour réformer la dépense
publique. Elle n’a fait aucune promesse qu’elle ne pourra tenir. A
l’inverse, Mme Kosciusko-Morizet a
promis de baisser les impôts tout
en faisantdes annonces particulièrement dispendieuses comme la
couverturecomplètedu périphérique qui coûterait plusieurs milliards d’euros. Ce n’est pas sérieux.
Comment jugez-vous la campagne de NKM ?
C’est une personne que je n’ai
jamais sous-estimée. Mais en plusieurs mois de campagne, elle n’a
pas réussi à incarner une vision
pour Paris. Par ses invectives et ses
propos mensongers, elle n’a pas
donné la dignité requise à la campagne qu’elle mène. Elle fait preuve de désinvolture sur le fond des
dossiers et d’une condescendance
que je n’imaginais pas vis-à-vis
des siens, de ses concurrents et
donc des Parisiens.
Reconnaissez-vous un échec
dans la lutte contre l’insécurité ?
En treize ans de mandat, j’ai été
maire dix ans sous des gouvernements de droite. Dans ce cadre, j’ai
été un partenaire loyal et constructif. J’ai augmenté de 50% la contribution de la ville au budget de la
préfecture de police. J’ai mis en
œuvre un plan de vidéoprotection
malgréles critiquesde gauche et de
droite.J’ai toujourscherchél’efficacité dans l’action.
Sur la prétendue hausse catastrophique de l’insécurité depuis
mai 2012, je note que la droite se
fonde sur des comparaisonsstatistiques tronquées, comme l’a souligné un rapport de l’Inspection
générale de l’administration sur le
maquillagedes chiffres sous la pré-
«Ce qui a été très
frustrant, c’est de voir
le temps qu’il faut
pour réaliser
des projets comme
celui des Halles»
sidence de M. Sarkozy. Pour
autant, je ne dis pas que tout va
bien. Il y a en 2014 des phénomènes de violence qui sont liés
notamment à la virulence de la crise que connaît la société. Je reste
malgré tout opposé à la création
d’une police municipale. Et je suis
sur ce point en accord parfait avec
Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy
qui m’ont toujours dit : « N’écoutez pas nos amis du Conseil de Paris
qui vous demandent de la créer ! »
Paris se vide d’une partie de ses
classes moyennes avec enfants.
La gauche n’a-t-elle pas
« embourgeoisé » la capitale ?
Comment pouvez-vous dire
que Paris se vide quand, en onze
ans, la capitale a regagné 125 000
habitants, dont 16 000 familles et
31 000 jeunes ? Quelle rupture
avec les décennies précédentes! Il
y a plus de gens qui viennent s’installerà Paris quede gens qui en partent. De quel embourgeoisement
ou gentrificationparle-t-on quand
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Bertrand Delanoë, à laMairie de Paris, le 5 mars. CORENTIN FOHLEN/DIVERGENCE POUR « LE MONDE »
72 % des Parisiens ont des revenus
qui pourraient leur donner droit
au logement social ? Grâce au
rachat d’immeubles menacés de
vente à la découpe, la Ville a maintenu 13 000 familles à Paris.
30 000 logements sociaux ont été
attribués aux classes moyennes.
Bien sûr, nous comptons
aujourd’hui 130 000 demandeurs
de logements sociaux. Mais 30 %
d’entre eux ne sont pas parisiens.
Et cette hausse de la demande est
aussi une conséquence de l’attractivité retrouvée de la capitale, qui
est confrontée aux limites géographiques de son territoire, huit fois
inférieurà celui deBerlin.La réponse à la crise du logement passe par
la création de la métropole.En treize ans, nous avons opéré une rupture avec des siècles pendant lesquels Paris s’est construite en édifiant des barrières avec ses voisins.
Bâtir la métropole sera le grand
défi de l’équipe élue en mars. Si
j’avais poursuivi ma mission à la
tête de la ville, j’aurais été ravi de
porter ce projet.
Après treize ans comme maire,
quel est votre principal regret ?
Etant tourné vers l’avenir, je
n’ai pas de regrets. En revanche, ce
qui a été très frustrant pour moi,
c’est de voir le temps qu’il faut
pour réaliser les projets. Je pars
alors que certains grands chantiers comme les Halles demeurent
inachevés, du fait des multiples
recours ou des nécessaires améliorations souhaitées par les habitants dans le cadre des concertations que nous avons menées.
Mais je suis sûr que, dans un an, au
moment de l’inauguration, les
Parisiens se diront que c’est réussi.
M. Hollande mène-t-il la politique que vous défendiez ensemble au congrès du PS en 2008 ?
François Hollande est cohérent.
Il y a une parfaite continuité entre
ce que nous disions au congrès de
Reims et la politique qu’il mène
aujourd’hui. Il pense que, sans
dynamisme économique, on ne
peut ni réduire les inégalités ni faire baisser le chômage ni préserver
les services publics. Cet état d’esprit, porteur d’une « efficacité de
gauche», j’y souscris totalement.
Sur les réformes de société, souhaitez-vous plus d’audace ?
Je ne doute pas de la volonté du
chef de l’Etat d’aller de l’avant sur
ces sujets-là. En 2013, il y a eu le
mariage pour tous, avec le droit
d’adopter pour les couples homosexuels. Le président a pris aussi
l’engagement courageux d’avancer sur le dossier de l’accompagnement de la fin de vie. Tout ne peut
pas être fait en une semaine. L’important, sur ces sujets, comme sur
ceuxde la simplificationde l’adoption ou la reconnaissance du statut du beau-parent, présents dans
le projet de loi famille, c’est qu’ils
restent à l’ordre du jour du quin-
quennat. De la même manière,
tout en restant opposé à la gestation pour autrui, je souhaite que
soit autorisée la procréation médicalement assistée.
Si l’on vous propose d’être ministre, accepterez-vous ?
Après treize ans d’exercice de
responsabilitéslourdeset passionnantes, il est sain de prendre du
recul durablement pour y voir
clair, pour méditer un peu. Après
ce temps long de retrait, reviendra
peut-être alors un nouveau temps
d’engagement. Il peut s’épanouir
dans différents domaines: économique, culturel, humanitaire…
Pas politique ?
Je n’envisage pas de prendre
d’autres responsabilités classiques. Il y a heureusement tellement d’autres façons de s’engager
qu’en étant ministre. p
Propos recueillis par
Béatrice Jérome
et Thomas Wieder
Dans le 5e arrondissement, l’avenir de Censier fait débat
THIERRY SAILLOT l’a appris de la
bouche même de Marie-Christine
Lemardeley avant que ce ne soit
officiel. « Elle est venue m’annoncer le déménagement du
[bâtiment] Censier à la fois comme présidente de l’université et
comme candidate aux élections
municipales », se souvient le
gérant de la librairie universitaire
Palimpseste, située à quelques
mètres de l’université parisienne.
C’était en octobre2013.
Comme à Jussieu, le bâtiment
est amianté. Et, après moult projets avortés, le ministère de l’enseignement supérieur a annoncé la
construction de nouveaux locaux
dans le 12e arrondissement sur des
terrains appartenant au ministère de l’agriculture. Le déménagement est prévu en 2018.
A peine annoncé, le sujet est
devenu un enjeu des prochaines
élections municipales dans cet
arrondissement, berceau de la Sorbonne. D’autant que la tête de liste du Parti socialiste, Marie-Chris-
tine Lemardeley, préside l’établissement depuis 2008. « Cela ne
devrait pas être un enjeu de campagne, mais un enjeu de santé
publique, se désole-t-elle. S’il n’y a
pas de danger immédiat, le bâtiment a une durée de vie limitée.»
ADN universitaire
Marie-Christine Lemardeley a
beau expliquer que l’université
va gagner 3 000 m2, une salle de
théâtre, que la Cinémathèque de
Paris ne sera pas très loin et, pour
finir, qu’un vrai lieu de vie étudiante sera construit sur les ruines de Censier, ses adversaires
politiques parlent d’aberration
financière, de cataclysme économique… Et se demandent comment concilier sa position de candidate à la mairie avec sa volonté
de vider l’arrondissement de son
identité universitaire, l’ADN de ce
quartier privilégié.
Dominique Tiberi, candidat dissident de la droite dans le 5e arrondissement, en a fait son cheval de
bataille. Dès l’annonce du déménagement, le fils de l’ancien maire
de Paris Jean Tiberi avait publié
un tract « Non à la disparition de
la fac Censier du 5e arrondissement». Depuis, il mène le combat
en meeting, sur les marchés, surfant sur l’inquiétude des riverains. « Quand on est président
d’université, oser supprimer une
faculté dans le 5e est lamentable.
Oui, Censier doit être désamianté.
Mais il faut faire comme à Jussieu,
transférer les étudiants dans un
autre lieu pendant les travaux et
les faire revenir ensuite.» Cette
solution avait pourtant été imaginée à la fin des années 1990, puis
de nouveau en 2010. A l’époque,
le clan Tiberi s’y était opposé.
Florence Berthout, la candidate
UMP, investie par Nathalie Kosciusko-Morizet, mène aussi le
combat. « Si je suis élue, je demanderai un moratoire», affirme-t-elle en dénonçant « le summum de la gabegie financière de
cette affaire » en référence aux
28 millions d’euros déjà dépensés
par l’Etat pour construire un
second pôle immobilier de l’administration centrale du ministère
de l’agriculture et de la pêche.
Au-delà de ce « scandale financier », Florence Berthout s’indigne
des conséquences économiques
pour les commerçants les plus proches du bâtiment. «C’est un suicide!», dénonce-t-elle. Bars, restauration rapide, points de photocopie,
les commerçants alentour vivent
de la clientèle étudiante. « Depuis
cette annonce, les banques me suivent encore moins, dit le libraire,
Thierry Saillot, dont le chiffre d’affaires est réalisé à 90 % grâce au
public de Censier. Alors, logiquement, sans elle on est mort. »
Pour l’instant, Marie-Christine
Lemardeley fait la course en tête.
Deux sondages réalisés en janvier
et en février ont donné la liste PS
en tête au premier tour et gagnante dans tous les cas de figure au
second tour. p
Nathalie Brafman
8
0123
france
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Les nuages judiciaires perturbent le retour de Nicolas Sarkozy
L’ancien président, qui projette de se présenter à la présidentielle de 2017, se trouve fragilisé par la succession d’affaires révélées ces derniers jours
E
noctobre2013, lecampSarkozy se montrait soulagé : l’horizon judiciaire de l’ancien
président s’éclaircissait avec le
non-lieu prononcé par la justice
dans l’affaire Bettencourt. Celui
quiprojette de seprésenterà la présidentielle de 2017 se voyait débarrassé de son principal obstacle
judiciaire sur le chemin de son
retour. Désormais, selon ses partisans, plus rien ni personne ne pouvait empêcherle favorides sympathisants UMP de s’imposer dans la
course élyséenne à droite. Le battu
de 2012 peinait lui-même à cacher
son optimisme. Et se voyait déjà
revenir aux affaires. « Quand on a
été président, on le reste », se félicitait-il lors d’un déplacement en
Charente-Maritime, le 30 janvier.
Un peuplus d’unmoisplustard,
patatras! Deux coups de tonnerre
sont venus assombrir le ciel de
Nicolas Sarkozy. En l’espace d’une
semaine,ce dernierse retrouvefra-
A droite, personne ne
s’est risqué à enfoncer
l’ex-président. Mais,
après les municipales,
les coups devraient
pleuvoir
gilisé par la diffusion d’enregistrements clandestins réalisés par son
ancien conseiller Patrick Buisson
(dont de nouveaux extraits pourraient être distillés dans les semaines à venir) et la révélation par Le
Monde (daté 8 mars) de soupçons
de trafic d’influence et de violation
du secret de l’instruction qui
pèsent sur son entourage. Deux
affaires qui contribuent à jeter le
soupçon sur la pratique du pouvoir par Nicolas Sarkozy et ses proches. Un pouvoir suspecté d’avoir
manœuvré pour défendre ses intérêts, au mépris des règles élémentairesd’unEtat dedroit,tellel’indépendance de la justice.
S’il est prématuré d’affirmer
que ces affaires vont compromettre son retour, il est en tout cas établi qu’elles sont de nature à pertur-
Une lettre de M. Avrillier
au procureur financier
Sur l’un des enregistrements
publiés par le site Internet Atlantico, Patrick Buisson, l’ancien
conseiller de Nicolas Sarkozy,
s’inquiète du départ de Claude
Guéant de l’Elysée, lui qui
« connaissait (…) les dossiers »
et « se mouillait un petit peu »,
« notamment pour les affaires
auprès du parquet ». La conversation remonterait au 27 février
2011.
A quels « dossiers » fait-il référence ? L’arbitrage Tapie-Lagarde ? L’affaire Bettencourt ? Celle des sondages de l’Elysée ?
Raymond Avrillier, maire adjoint
honoraire écologiste de Grenoble et membre de l’association
Anticor, a adressé, le mercredi
5 mars, une lettre à la procureur
national financier pour signaler
de possibles faits d’« entraves à
la saisine de la justice ». Dans
son courrier, Raymond Avrillier
rappelle le contexte de la Sarkozie et n’exclut pas que certaines
« personnes » aient été « capables de faire pression sur les
magistrats ».
Une affiche de la campagne présidentielle de 2012 de Nicolas Sarkozy, au siège de l’UMP, le 3 mars. ALBERT FACELLY/DIVERGENCE
ber sa stratégie. « Cela pèse sur
l’agenda », grimace un de ses
conseillers.Redescendredans l’arène au lendemain des élections
européennes de juin 2014, comme
l’évoquaient certains sarkozystes,
semble désormais inenvisageable.
Car avant, l’ex-président entend
avoir évacué les affaires potentiellement gênantes. Or, les nuages
judiciaires planant au-dessus de
lui ne manquent pas. Outre les
deux affaires qui viennent d’éclater, son nom et ceux de ses proches sont cités dans quatre dos-
siers (Tapie, Karachi, éventuel soutien libyen à la campagne de 2007
et sondages de l’Elysée). « Les épées
de Damoclès suspendues au-dessus de la tête de Nicolas Sarkozy
créent une insécurité permanente
pour sa trajectoire de retour
gagnant en 2017. A tout moment,
une indiscrétion prêtant à suspicion peut le handicaper le temps
qu’il s’y confronte. Sa mise en examen dans l’affaire Bettencourt l’a
par exemple accaparé pendant six
mois», soulignele politologueThomas Guénolé, auteur de l’ouvrage
Nicolas Sarkozy, chronique d’un
retour impossible (First, 2013).
Si le climat n’est pas des plus
positifs, le favori des sympathisants UMP n’est pas pour autant
confronté à ce stade à des charges
le disqualifiant pour 2017. Seule
une condamnation, ou une mise
encause accompagnéed’unepreuve irréfutable, semble de nature à
le mettre hors jeu. « Si les faits qui
lui sont reprochés étaient étayés,
cela lui porterait un coup majeur»,
juge le politologue de l’IFOP Jérôme Fourquet.
Dans le camp Sarkozy, ses partisans veulent croire que la successiond’affaires n’empêcherapas un
retour victorieux. « Cela fait partie
de la course d’obstacles et ce n’est
pas décisif », minimise l’un d’eux,
soulignant que, « pour l’instant,
toutes les charges ont glissé sur
lui ». Depuis son départ de l’Elysée,
chaqueaccusationcontreM.Sarkozy suscite même un réflexe de solidarité des militants UMP à son
égard. « Les électeurs de droite ont
une réaction épidermique et font
bloc autour de lui car ils se disent :
Les revers de l’hyper-interventionnisme de l’ex-président
Analyse
Bettencourt, Karachi, Tapie, Kadhafi, sondages de l’Elysée, écoutes
Buisson, trafic d’influence à la
Cour de cassation… L’avalanche
d’«affaires» dans lesquelles apparaît le nom de Nicolas Sarkozy donne le vertige. Certes, jusqu’ici, l’exchef de l’Etat est parvenu à échapper à la justice, contrairement à
nombre de ses proches – peut-être
parce qu’il n’a rien à se reprocher,
sur le plan strictement pénal. Mais
pour un homme décidé à se représenter à la présidentielle en 2017,
cette menace judiciaire protéiforme pourrait se transformer en obstacle insurmontable.
Tout se passe comme si, un an
et demi après son départ de l’Elysée, M.Sarkozy se trouvait rattrapé
par un mode de fonctionnement
qui a aussi fait son succès. Les ressorts de cette gouvernance très particulière sont connus. Ils ont accouché d’un « omni-président»
convaincu que, tirée des urnes, sa
légitimité lui confère des devoirs,
mais aussi des droits. De son point
de vue, le président de la République doit s’occuper de tout.
M.Sarkozy ne s’en est jamais
caché, revendiquant cet hyper-présidentialisme, avec un culte de l’efficacité, qui, conjugué à l’hyperactivisme propre à sa personnalité, a fini par épuiser les Français.
Un activisme contagieux
M.Sarkozy a voulu incarner la
rupture avec Jacques Chirac, dont
il n’a eu de cesse de dénoncer l’immobilisme. En privé, il n’a pas de
mots assez durs pour François Hollande, incarnation caricaturale,
selon lui, de l’impuissance en politique. Car plus qu’une idéologie, le
sarkozysme est d’abord une
méthode. Mais si l’énergie débordante et le volontarisme effréné de
Nicolas Sarkozy ont contribué à sa
réussite, ils ont aussi scellé son
échec. Et menacent à présent son
retour en politique, sur fond d’affaires politico-judiciaires.
Cet hyper-interventionnisme a
produit deux types d’effets per-
vers. D’abord, en pensant pouvoir
s’affranchir des habitudes, des
règles, des conservatismes, mais
aussi parfois des lois, M.Sarkozy a
sans doute été trop loin, au point
d’attirer l’attention de la justice.
Les exemples sont légion: dans
le litige opposant Bernard Tapie au
Crédit lyonnais, l’ex-chef de l’Etat,
ses agendas en font foi, est intervenu plusieurs fois au secours de
l’homme d’affaires, même si celuici s’en défend. Par amitié, peutêtre. Mais aussi parce que M.Sarkozy était persuadé qu’un bon arrangement, même coûteux, valait
mieux que le recours à une justice
qu’il trouve lente et désuète. Dans
le scandale Bettencourt, l’enquête
a établi qu’il s’occupait directement d’un dossier susceptible de
l’éclabousser.
Surtout, cet activisme s’est révélé contagieux. Sans forcément le
vouloir, l’ex-maire de Neuilly-surSeine a incité son entourage à
adopter le même comportement.
Pire, soucieux de protéger mais
surtout de plaire à leur chef, qu’ils
craignent autant qu’ils l’admirent,
ses conseillers ont parfois été
au-devant de ses désirs, jusqu’à
franchir la ligne jaune. Cela explique sans doute pourquoi la quasitotalité de ses proches sont inquiétés par la justice.
Installé par M.Sarkozy à la tête
de la Direction centrale du renseignement intérieur, Bernard Squarcini a chuté pour avoir fait espionner les conversations d’un journaliste du Monde, coupable de
publier des articles gênants. La
même mésaventure est arrivée à
l’ex-procureur de Nanterre, Philippe Courroye. Claude Guéant est
soupçonné d’être intervenu dans
le dossier Tapie afin de favoriser
les intérêts de l’homme d’affaires.
Et que dire du magistrat Gilbert
Azibert, suspecté d’avoir renseigné
M.Sarkozy, dont il est politiquement proche, des avancées de la
procédure Bettencourt? Ce sont
d’abord ces excès de zèle dont Nicolas Sarkozy paye le prix. p
Gérard Davet
et Fabrice Lhomme
“On attaque notre champion pour
le salir” », observe M. Fourquet.
Après les révélations du Monde,
les sarkozystes ont de nouveau
joué sur cette corde sensible en
assurant que leur candidat était la
«victime» d’un «acharnement»de
la justice et des médias. L’avocat de
l’ex-président,Me ThierryHerzog,a
dénoncé une « affaire politique »,
«montée de toutes pièces», dans le
but de nuire à son client. Manière
de laisser entendre que le pouvoir
socialiste serait à la manœuvre.
Certains, à droite, ne partagent
pas cette analyse et rejettent la
théorie du complot. « Je ne vois pas
pourquoi François Hollande mettrait des bâtons dans les roues de
Sarkozy, alors que ce dernier est un
épouvantail pour la gauche et reste celui qui fédère le mieux le camp
d’en face », remarque un ancien
ministre UMP.
A droite,personne ne s’est encore risqué à enfoncer l’ex-président. Contexte électoral oblige.
Mais après les municipales des 23
et 30 mars, les coups devraient
pleuvoir. François Fillon a notamment prévenu qu’il dirait tout le
mal qu’il pense des agissements
de Patrick Buisson, à qui M. Sarkozy a ouvert les portes du pouvoir.
« Je me suis toujours tenu à l’écart
de ses méthodes et des gens qui les
incarnent. Aujourd’hui, se tenir à
l’écart ne suffit plus, il faut les combattre», a déclaré l’ancien premier
ministre avec force, jeudi.
En attendant, Nicolas Sarkozy
doit assister lundi 10 mars à l’inauguration de l’Institut Claude-Pompidou de Nice, en compagnie de
Bernadette Chirac. L’occasion de
testersa popularitéetde direpubliquement ce qu’il pense des soupçons qui pèsent sur lui. p
Alexandre Lemarié
0123
france
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Portrait L’avocat est aussi excessif et brutal avec ses ennemis qu’inconditionnel avec ses amis.
Nicolas Sarkozy, avec qui le lien s’est noué dès 1980, lui a depuis longtemps confié sa défense
Me Thierry Herzog, l’indéfectible ami
I
Me Thierry Herzog, à Bordeaux, le 25 avril 2013. BERNARD PATRICK/ABACA
constitutionde partiecivile au procès qui allait l’opposer à l’ancien
premier ministre, rompant ainsi
avec toutela traditionde sesprédécesseurs sous la Ve République.
Cette fois, l’avocat rompu à la
procédure pénale, qui avait déjà à
son tableau quelques-uns des plus
beauxdossierspolitiquesduprécédent septennat – il avait défendu le
mairede ParisJeanTiberi, obtenant
L’amitié entre
les deux hommes
s’est nourrie
de leur passion pour
la chanson française
et du même goût
pour la castagne
l’annulationdepansentiersdel’instruction menée par le juge Eric Halphen–changeaitdedimension.Joignant le geste à la parole, il disait :
« C’est que j’ai quelqu’un derrière
moi, je ne peux pas le décevoir.»
Le face-à-face avec Dominique
de Villepin et ses avocats fut violent, parfois déstabilisant pour
celui qui, aux yeux de tous, portait
la parole de Nicolas Sarkozy. Ceux
qui ont assisté au procès ont gardé
en mémoire la réplique cruelle lancée par Dominique de Villepin à
une question de l’avocat: « Il y a eu
uneépoqueoùMe Herzogtravaillait
avec moi à l’Elysée quand j’étais
secrétairegénéral et il avait alors un
ton beaucoup moins agressif ! » Ou
encore ces trop longues heures de
plaidoirie où le défenseur de Nicolas Sarkozy, noyé dans son souci de
ne rien laisser passer, s’était fait
sèchement prier d’en venir à sa
conclusion par le président du tribunal. Mais on a vu aussi, dans ces
moments délicats, la bande des
pénalistes – Hervé Temime, Pierre
Haïk, Patrick Maisonneuve et quelques autres – entourer leur ami de
leurs conseils et de leur amitié.
Celle de M. Sarkozy ne lui a
jamais fait défaut, en dépit de
l’échecque représentait,pourlui,la
relaxe de M. de Villepin. C’est à
Thierry Herzog et à personne
d’autrequ’ila demandéde ledéfendre dans chacune des procédures
qui ont émaillé son mandat, pour
violation de l’intimité de sa vie privée ou pour atteinte à l’image.
Et c’est encore à l’ami avocat que
Nicolas Sarkozy, redevenu simple
justiciable, confie le soin de mener
La gauche dénonce «une affaire d’Etat»,
la droite un «acharnement»
« SCANDALE D’ETAT». Si la gauche
et la droite s’accordent sur les
mots pour qualifier les révélations
du Monde, vendredi 7mars, sur la
nouvelle affaire Sarkozy, ils ne
sont pas d’accord sur le sens.
L’UMP voit dans la mise sur écoute
de l’ancien président la preuve
d’un acharnement politique, alors
que les socialistes se concentrent
sur le contenu de ces enregistrements, qui mettent au jour des
soupçons de trafic d’influence
impliquant le camp Sarkozy et un
magistrat de la Cour de cassation.
« Si les faits évoqués sont confirmés, ils sont d’une exceptionnelle
gravité et sont constitutifs d’une
affaire d’Etat », a réagi auprès du
Monde le premier secrétaire du
Parti socialiste, Harlem Désir.
« Cela est surtout révélateur d’un
comportement plus général à droite vis-à-vis de la justice, un comportement clanique et qui porte
atteinte au sens de l’Etat et à la
séparation des pouvoirs», estime-t-il, appelant la droite à «se ressaisir et [à] respecter l’indépendance de la justice ». De la même
manière, pour le président du
groupe socialiste à l’Assemblée,
Bruno Le Roux (Seine-SaintDenis), « si on était dans un
roman, on parlerait d’un système
mafieux». « On commençait à
oublier comment Nicolas Sarkozy
avait abîmé l’Etat, mais avec ces
affaires, on s’aperçoit de la façon
dont il a dévoyé totalement nos
institutions, indique-t-il.
« Tentative d’affaire »
« C’est la semaine horribilis
pour l’UMP, tout le monde y passe ! », a réagi le député Thierry
Mandon (PS, Essonne). « Il n’y a
aucun complot, mais simplement
une justice qui trouve son chemin », insiste le porte-parole du
groupe socialiste à l’Assemblée.
« On aurait enfin levé un coin du
voile sur le système sarkozyste que
je n’ai eu de cesse de dénoncer », a
pour sa part réagi la députée européenne Eva Joly (EELV), dans un
communiqué. Pour Marie-Pierre
de la Gontrie, secrétaire nationale
du PS en charge de la justice, « placer sur écoute un ancien président
est la preuve que la justice est vraiment indépendante».
Ce n’est pas l’avis de la droite.
Ainsi, Thierry Mariani, député
UMP et ancien ministre de Nicolas Sarkozy, estime que «cela montre qu’il y a un réel acharnement
de certains magistrats contre Nico-
las Sarkozy. Alors que les enquêtes
sur Karachi et Bettencourt se révèlent totalement sans objet pour
lui, on nous sort ce nouvel épisode.
Cet acharnement est choquant».
Même tonalité chez Bernard
Debré (UMP, Paris), pour qui « ce
qui paraît être un vrai scandale
d’Etat, c’est d’avoir écouté les
conversations entre Nicolas Sarkozy et son avocat ». « Est-ce légal de
le faire ? Je suis très inquiet de la
tournure que prennent les événements contre Nicolas Sarkozy. A
quoi riment ces acharnements?
Pour moi, cela jette surtout la suspicion sur les méthodes du gouvernement et de la justice », juge-t-il.
Sur son compte Twitter, Nadine
Morano, ancienne ministre et candidate aux élections européennes, s’interroge: « Le rôle du cabinet noir de l’Elysée? L’angoisse de
François Hollande de jouer le
match retour face à Sarkozy ? Une
nouvelle tentative d’affaire…»
«Sommes-nous dans un Etat
démocratique ou dans un Etat totalitaire? », a aussi demandé JeanPierre Door (UMP, Loiret), quand
Patrick Balkany (Hauts-de-Seine),
interrogé par Public Sénat, parle
de « déviance de la justice». p
Service France
A Dreux, le FN parie sur
une transfuge de l’UMP
l ne faut avoir aucun regret
pour le passé, aucun remords
pour le présent, et une confiance inébranlable pour l’avenir. »
Thérèse Mauboussin, candidate
du Rassemblement Bleu Marine
(RBM) aux élections municipales
à Dreux (Eure-et-Loir) cite Jean
Jaurès pour motiver ses troupes.
Une trentaine de personnes se serrent dans l’ancienne boutique
d’électroménager un peu
défraîchie. Derrière la référence
au père du socialisme français se
résume toute l’histoire d’amour
et de désamour entre la ville et le
Front national.
En 1983, Jean-Pierre Stirbois fait
une entrée fracassante à la mairie
après la fusion de sa liste frontiste
avec celle du RPR. Après sa mort
dans un accident de voiture en
1988, sa veuve, Marie-France
reprend le flambeau. Elle collectionne les succès. Aux municipales de 1989, elle obtient 22% des
voix. Elle devient député la même
année avec 61% des suffrages.
Q
u’il rentre d’un concert de
Johnny Hallyday, d’un meeting avec Nicolas Sarkozy ou
d’un procès d’assises où il a entendu une belle plaidoirie, Thierry
Herzog a le même enthousiasme.
« Vous auriez vu le mec, il est fabuleux ! » Et le voilà qui refait tout le
concert, le meeting, l’audience,
émerveillé et drôle, jouant tour à
tour chacun des rôles, racontant le
public, la chemise trempée de
sueur du héros, sa meilleurerépartie, sa plus belle reprise, son morceau d’éloquence. Il est comme ça,
Thierry Herzog, il admire généreusement. Il applaudit depuis quarante ans les mêmes idoles, peut
sauter dans un avion ou un train
pour ne pas rater une plaidoirie de
son ami Eric Dupond-Moretti à
l’autre bout du pays, et annuler un
rendez-vous pour racheter discrètement le bureau de son ancien
patron, vendu sur saisie judiciaire,
afin de le lui restituer.
Parce qu’il n’est jamais dans la
demi-mesure, il déteste avec la
mêmegénérosité.Ilest aussi excessifet brutalavecses ennemisqu’inconditionnel de ses amis. Ni l’âge,
nile temps, ni la notoriété, ni le statut d’« avocat du président » que
lui avait donnél’accession de Nicolas Sarkozy à la présidence de la
République ne l’ont policé.
Entre Me Herzog et M. Sarkozy, le
lien semble indéfectible. Il s’est
noué en 1980 au barreau de Paris,
quand le premier faisait ses armes
de pénaliste au cabinet de JeanLouis Pelletier et que le second
remuait ciel et terre pour faire élire
son patron, Guy Danet, au bâtonnat de Paris. Leur amitié s’est nourrie des vacances à La Baule (LoireAtlantique) en famille, de la passionpartagéepourla chansonfrançaise – le seul sujet sur lequel
Thierry Herzog revendique la première place –, du même goût de la
castagneetd’unefidélitéàladroite.
Lorsqu’en janvier 2006 Nicolas
Sarkozy a décidé de se constituer
partie civile dans l’affaire Clearstream contre Dominique de Villepin, c’est vers Thierry Herzog qu’il
s’est tourné. « Mon Thierry, ce n’est
pas à l’ami que je m’adresse, c’est
au professionnel.Veux-tu être mon
avocat ? », lui demande-t-il. L’honneur allait se révéler écrasant
quand, devenu président de la
République, Nicolas Sarkozy prendrait la décision de maintenir sa
batailledanslesdossiersquilemettent en cause, au premier rang desquels l’affaire Bettencourt, soldée
par un non-lieu. En ces temps de
tourmente et de trahison, l’ancien
président de la République mesure
sans doute aussi que de tous ceux
qui l’ont accompagné dans la traversée du quinquennat, Thierry
Herzog est sans doute celui qui en
est sortile plus fidèleà lui-même. p
Pascale Robert-Diard
9
« Confiance immédiate »
Mais après son départ, le FN ne
présente aucune liste aux municipales de 2001 et 2008. Au premier
tour de la dernière élection présidentielle, Marine Le Pen a atteint
le score de 14, 3 %, loin des 18,3 %
de son score national.
L’arrivée de Thérèse Mauboussin, ancienne adjointe au maire
UMP, Gérard Hamel, peut-elle
modifier cette tendance? Elle a
quitté ses fonctions en 2008 et
rejoint le Front national en 2012.
« Nous sommes une commune
pauvre. Il y a 23,9 % de chômage
quand la moyenne nationale est à
9,8 %. Il faut se saisir de la question sociale», qui aurait été laissée de côté selon elle.
Elle décide donc de se présenter aux municipales sous l’étiquette du RBM. La candidate de
42 ans a un discours qui peut plaire. Elle s’adresse aux populations
pauvres qui se sentent délaissées,
oubliées des politiques. « Je
n’avais pas pensé revenir un jour
en politique», assure-t-elle. Elle
n’avait « pas d’intérêt extraordinaire pour le FN. Je ne serais pas là
sans Marine Le Pen», dont elle partage les analyses sociales et économiques. Elle a aussi bénéficié
d’« une confiance immédiate»
auprès des militants, raconteelle.
Mme Mauboussin reconnaît
l’héritage des Stirbois mais
depuis, le parti a su évoluer, explique-t-elle. Pour Julien Auer,
32 ans, conseiller financier, « il ne
faut pas faire d’amalgame. On
doit beaucoup à cette génération.
Ils ont laissé une base militante
mais le Front est en pleine mutation. Je n’aurais pas adhéré dans
les années 1980. Mais c’est l’effet
Marine.»
Après la décision de se présenter, le premier défi a été de constituer une liste. A force de faire du
porte-à-porte, les quelques militants de Dreux y sont parvenus.
Pour Philippe Loiseau, secrétaire
régional du parti, c’est déjà une
« victoire dans cette ville symbole
pour le FN ». En attendant, Thérèse Mauboussin a déjà réservé des
salles pour l’organisation de réunions publiques à l’entre-deuxtours. p
Déborah Coeffier
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LA VOIX
EST
LIBRE
10
0123
france
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Recrudescenced’incidents
homophobes ou racistes
sur les campus
Des représentants locaux d’organisations
étudiantes déplorent «un sale climat»
L
es organisations étudiantes,
UNEF et FAGE en tête, le
constatent depuis la rentrée
universitaire: les campus sont de
plus en plus souvent la cible d’actions d’intimidation de groupuscules d’extrême droite, tags racistes, homophobes, nationalistes et
parfois même coups de poings.
Jeudi 20février, jour d’élection à
l’université Lyon-III, François Billy,
sympathisant de l’UNEF, tracte
avec un camarade: « Il était 17 heures quand on a vu un groupe de sept
hommes et trois femmes habillésen
noir, blousons de cuir et rangers, et
se réclamant du GUD [Groupe
union défense, mouvement étudiant d’extrême droite], s’en prendre à nos tracts. J’ai eu le malheur de
dire que ce n’était “pas très intelligent” et je me suis pris un coup de
casque de moto sur la tête. J’ai eu le
réflexe de me protéger avec la
main. » La troupe disparaît avant
que le service de sécuritén’arrive et
François Billy s’en tire avec un
hématome à la main. Il a déposé
plainte et la vidéosurveillance permettra peut-être d’identifier les
agresseurs.
Le 27 février, sur les réseaux
sociaux, apparaît une caricature
représentantun gros rat (emblème
du GUD) qui tabasse, avec un casque, un étudiant, ainsi légendée :
«Faceà l’UNEF,ayez le bonréflexe.»
En réponse, le syndicat étudiant a
déposé une nouvelle plainte, à
Paris, pour incitation à la haine.
Les étudiants de l’université de
Dijon ont découvert, mardi 4mars,
sur le mur extérieur de l’établissement, deux tags d’une même
main: « Vive la France» et « A mort
LGBT » (pour lesbien, gay, bi et
trans). Le président de l’université
de Bourgogne, Alain Bonnin, a
dénoncé sur son compte Twitter
un « acte antirépublicain». L’incident n’est pas isolé : en novembre 2013, une statue du campus
étaitvandaliséeavecleslogan«Hollande démission » signé « ONLR »
pour «On ne lâche rien », mot d’ordre des partisans de la Manif pour
tous. « Les manifs anti-mariage
pour tous ont donné des ailes à ces
extrémistes », juge Jean-Baptiste
Bourdillon, de l’UNEF Dijon.
Et le phénomène s’étend : les
murs de l’université Toulouse-I
Capitole et de divers locaux ciblés
(association locale LGBT, siège du
NPA) ont, le 19 février, été recouverts de croix gammées, de croix
celtiques – symbole repris par plusieurs groupuscules d’extrême
droite – et de sigles OAS, du nom de
Les femmes enceintes plus souvent
touchées par les violences conjugales
Pionnière, la maternité de l’hôpital de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, tente de faire
de la grossesse un moment privilégié de repérage et de prise en charge des victimes
l’organisation clandestine terroriste qui milita pour l’Algérie française. Le forfait s’est produit durant le
week-end: « Je suis persuadé qu’il
ne s’agit pas d’étudiants de chez
nous»,affirmeleprésidentdel’université, Bruno Sire.
AStrasbourg,le9février,onpouvaitlire,surlesmursdelabibliothèquedel’université«Alsacenationaliste» et « La France aux Français»,
assorties d’une fleur de lys stylisée,
symbole du Renouveau français,
mouvement se disant « pour la
renaissance nationale ». « Ce n’est
qu’unincidentd’unelonguesérie, et
ils vont crescendo», témoigne Flavie Linard, présidente de l’UNEF
Strasbourg,quisesouvientdestags
«Amortlessocialistes»,desautocollantsetaffichessiglésGUDouencore des distributions de journaux
Action universitaire française. « On
Lyon, Dijon,
Strasbourg, mais aussi
Angers, Poitiers,
Bordeaux, Orléans,
Nantes et Rennes ont
eu leur lot d’incidents
ne voit jamais les fauteurs de troubles,ce qui me conduit à penserqu’il
s’agitd’élémentsextérieurs»,confirme l’étudiante, à l’origine, avec
d’autres associations, d’un comité
de vigilance.
«Un sale climat s’installe aussi à
Clermont-Ferrand», juge Pauline
Maximi, militante de l’UNEF. Un
drame a même été évité de justesse, le 17 janvier, lors du concert
organisé par Réseau universitaire
sans frontières (RUSF), en soutien à
une famille arménienne expulsée.
Un skinhead, Kevin Pioche, a tiré
des coups de feu, faisant deux blessés légers. Il a été, depuis, condamnéàdeuxansde prisonferme.Mais
les militants UNEF et RUSF se sentent toujours menacés, puisque,
début février, les murs de la faculté
de lettres ont été graffités de slogans « Europe jeunesse génération » et « Pasaran quand même»,
référence au régime franquiste.
Angers, Poitiers, Bordeaux,
Orléans, Nantes, Rennes ont aussi
eu leurs lots d’incidents. « Tous ces
groupuscules d’extrême droite se
structurent et sont de plus en plus
visibles», juge Julien Blanchet, président de la FAGE, qui tient désormais une minutieuse comptabilité de leurs manifestations. p
Isabelle Rey-Lefebvre
JUSTICE
Troiscandidatsau djihaden Syrie
condamnésà de la prisonferme
Le tribunal correctionnel de Paris a condamné, vendredi 7 mars, à
des peines de deux à quatre ans ferme trois candidats au djihad
interpellés en 2012 à l’aéroport de Saint-Etienne, alors qu’ils s’apprêtaient à se rendre en Syrie (Le Monde daté 2-3 février). Les trois
hommes, âgés de 21 à 26 ans, étaient poursuivis pour «association
de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes terroristes». Dans
leurs bagages, les policiers avaient retrouvé des holsters, gilets
dits « tactiques» et des jumelles à vision nocturne. – (AFP.) p
Discrimination 50 000 euros d’amende requis
contre un office HLM
Le tribunal de Nanterre a requis, vendredi 7 mars, une amende de
50 000 euros contre l’un des plus gros bailleurs sociaux d’Ile-deFrance, Logirep, jugé pour avoir, en 2005, refusé un logement à
un homme au motif qu’il était Noir et établi un « fichage ethnique» des locataires (Le Monde daté 7 mars). Le parquet a en outre
demandé l’effacement de ce fichier. Le jugement sera rendu le
2mai. – (AFP.)
Municipales Enquête pour « abus de faiblesse
et faux » après le dépôt d’une liste FN à Orléans
Le parquet, saisi par le préfet du Loiret « sur la possible absence
de consentement d’un candidat » de la liste du FN à Orléans, « a
ouvert une enquête pour abus de faiblesse et faux», a indiqué vendredi 7 mars Jérôme Bourrier, procureur adjoint de la République d’Orléans. Selon La République du Centre, Georgette Vassort,
90 ans, figurant en 51e place sur la liste du FN, est atteinte de la
maladie d’Alzheimer et est hospitalisée. – (AFP.)
P
our Aude Ngoma, c’est devenu « un rituel ». L’arrivée à
14 heures à l’hôpital AndréGrégoire de Montreuil (SeineSaint-Denis). L’ascenseur jusqu’au
service de réanimation néonatale.
« C’est la maman de Mathis », soufflé dans l’interphone, puis le vestiaire, la blouse et les surchaussures. Enfin, au bout des longs couloirs, son bébé, qui pleure « d’une
toute petite voix ».
Un rituel qu’elle répète tous les
jours, un peu plus tôt le dimanche
parce qu’elle vient « directement
après l’église », depuis maintenant
trois moiset la naissanceprématurée de son enfant. Une grossesse
d’à peine vingt-cinq semaines,
mise à terme brutalement par les
violences conjugales.
Phénomène méconnu, les violencesfaitesaux femmes augmentent durant la grossesse. Selon les
rares études disponibles sur ce
sujet, pour 20 % à 40 % des femmesvictimesde violencesconjugales en France, la maltraitance physique a commencé alors qu’elles
étaient enceintes.
« La grossesse catalyse et déclenche une violence latente dans un
couple. La femme est en fait déjà
sous l’emprise de son conjoint mais
ne l’a pas identifié », explique
Mathilde Delespine, 27 ans, sagefemme à la maternité de l’hôpital
de Montreuil, où ont lieu
3 200 accouchements par an. Très
mobilisée sur ce sujet, elle y a mis
enplace une permanence,un jeudi
sur deux, pour libérer la parole des
patientes concernées. « Les dames
me disent : “Depuis que je suis
enceinte, je ne le reconnais plus.” »
Pour Aude Ngoma, assistante
administrative de 40 ans, « cela a
commencé verbalement ». Avec la
grossesse, la situation a empiré :
« Une fois enceinte de lui, je ne pouvais plus le mettre dehors »,
confie-t-elle d’une voix posée, les
mains serrées sur son chocolat
chaud, à la cafétéria de l’hôpital.
A celle de la femme rendue captive par sa grossesse, les médecins
ajoutent deux hypothèses pour
expliquercetteirruptiondeviolence : l’arrivée d’un tiers – l’enfant –
vient briser le rapport exclusif et
l’emprise bâtie par l’agresseur, qui
réagit; la grossesse provoque chez
lui un syndrome post-traumatique, s’il a été lui-même victime de
violences dans l’enfance.
« C’est devenu physique à deux
mois de grossesse », explique Aude
Ngoma. Elle se défend « des gifles
et des coups de pied » en mordant
mais se tait, et n’en parle pas à son
gynécologuede Goussainville(Vald’Oise). C’est « la honte », ça va s’arranger, et d’ailleurs le lendemain
« la vie reprenait », toutefois rythmée par les arrêts maladie.
Les conséquences sur la grossesse sont importantes. « C’est être
enceinte dans un pays en guerre,
compareMathildeDelespine.Physiquement, la maternité est souvent
directement attaquée, avec des
coups sur le ventre. » Une enquête
Un phénomène sous-évalué, selon une étude
Le repérage systématique vient
d’être testé pour la première
fois à l’échelle d’un département. Entre juin 2013 et
février 2014, six maternités de la
Seine-Saint-Denis ont, pendant
une semaine, proposé un questionnaire anonyme à toutes les
femmes enceintes en consultation prénatale. Les résultats de
cette enquête financée par
l’agence régionale de santé sont
probants. Seulement 4 % de
refus, et, pour les 96 % de questionnaires validés, un taux de
réponses positives qui, signe
d’une sous-évaluation du phénomène par le corps médical, a sur-
pris tous les soignants. Plus d’un
tiers (36,8 %) des 691 patientes
interrogées confient avoir subi
une violence au moins une fois
dans leur vie.
Parmi elles, une sur quatre exprime le souhait d’être aidée, et
une sur cinq une souffrance.
Une femme sur trois dit avoir
subi une violence verbale, une
sur cinq une violence physique
et une sur dix une violence
sexuelle. Côté soignants, ceux
qui ont été formés rencontrent
moins de refus ; et tous constatent une « grande facilité à évoquer [ces questions] malgré les
appréhensions ».
de 2012 en Seine-Saint-Denis sur
62 grossesses touchées par la violence montre une forte prévalence
de fausses couches (18% contre 2 %
en moyenne dans ce département)
et d’enfants prématurés (23 %
contre 7 %). « Les “petits poids”
[moins de 2,5kg à la naissance] sont
aussi surreprésentés », explique
Emmanuelle Piet, médecin en centre de protection maternelle et
infantile en Seine-Saint-Denis et
coauteure de cette enquête.
« La grossesse catalyse
et déclenche une
violence latente
dans un couple »
Mathilde Delespine
sage-femme à l’hôpital
de Montreuil
Le 5 décembre, Aude Ngoma
accouche au service grossesses à
hautrisque à Montreuil.Une« chose»qu’ellemettradutempsà appeler un bébé, « née par les violences », et qui pèse 510 grammes.
Pour elle, c’est à la maternité que la
parole va se libérer, peu à peu, avec
la psychologue, l’assistantesociale
et la sage-femme référente. C’est
aussi là qu’elle est mise en lien
avec une association.
Si la grossesse les exacerbe, elle
est aussi un moment particulièrementfavorableaurepéragedesviolences, actuelles ou passées. Avec
une moyenne de 18 contacts avec
desprofessionnelsde santé,«lavictime n’aura probablement jamais,
au cours de sa vie, autant d’occasions de rompre son isolement »,
souligne Mathilde Delespine.
Uneopportunitéderepéragelargement sous-exploitée en France.
« Les violences sont encore taboues
dans la culture médicale. Subsiste
l’idée qu’il s’agit de la vie privée de
la patiente et que nous, soignants,
ne sommes pas des psys », regrette
la jeune sage-femme.
« Un jour, en consultation, une
dame m’a demandé si elle était
capable de “faire des enfants
vivants”. Elle avait fait cinq fausses
couches. A chaque fois, elle avait
reçu des coups sur le ventre, et à
aucun moment un médecin ne lui
avait posé la question des violen-
ces », illustre ainsi la médecin
Emmanuelle Piet.
Mathilde Delespine se bat pour
que la professionadopteune pratique simple : le repérage systématique. « Les victimes se confient peu
spontanément. Elles pensent que
c’est hors sujet, leur conjoint leur
répète que cela n’intéresse personne. Poser la question est donc déjà
en soi un acte thérapeutique: cela
brise la loi du silence, la victime
commence à déconstruire le schéma de son agresseur », explique-t-elle. L’objectif est que chaque soignant voyant pour la premièrefoislapatientepose automatiquementla question. Uneenquête qu’elle a pilotée, dévoilée vendredi 7 mars par l’Observatoire de
la Seine-Saint-Denis des violences
envers les femmes, montre le bon
accueil réservé à la démarche par
patientes et soignants.
« Priorité désormais à la formation, insiste Ernestine Ronai, coordinatrice nationale de la lutte
contreles violences faitesaux femmes au sein de la mission interministérielle pour la protection des
femmes victimes de violences
(Miprof). Contrairement aux policiers, médecins et sages-femmes
n’en avaient jusqu’alors aucune! »
Cette année, une question sur
ce sujet fait son apparition aux
épreuves classantes nationales, à
la fin de la troisième année de
médecine. Et la Miprof a créé, fin
2013, un groupe de travail pour
« aboutir à un cahier des charges
de formation des sages-femmes ».
Depuis septembre, les étudiants
en master 1 planchent sur un
module « Prévenir et dépister les
violences faites aux femmes »,
affirme l’ordre des sages-femmes.
Des avancées en passe d’être
validées par la loi : « La loi pour
l’égalité femmes-hommes rendra
obligatoire la formation initiale et
continue de toutes les professions
concernées,médecins et sages-femmes en tête », plaide Ernestine
Ronai.
Depuis dix jours, le bébé d’Aude
Ngoma peut mettre des vêtements. La route reste longue, il est
tout juste « au milieu du tunnel ».
Mais,avec son 1,9 kg, «c’est maintenant un vrai bébé ». p
Benjamin Leclercq
culture
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Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
11
Le ghetto de Varsovie
par «Ceux qui restent»
Au Théâtre Montfort, David Lescot transforme
les récits de deux survivants en pièce bouleversante
Théâtre
S
ous son apparente simplicité,
voilà un spectacle qui apporte sa pierre, de belle façon,
aux relations entre le théâtre et
l’Histoire. Et pas n’importe laquelle : celle de la seconde guerre mondiale et de l’extermination des
juifs d’Europe. Cette histoire qui a
suscité des débats éthiques et
esthétiques âpres, violents, sur la
question de son récit et de sa transmission,l’auteuret metteurenscène David Lescot l’aborde d’une
manière qui, pour être modeste,
n’en est pas moins juste de bout en
bout. Et si l’on sort ému, pour le
moins, de Ceux qui restent, cette
émotionest d’une qualité bien particulière, qui mène vers la
réflexion et vers la réappropriation de cette histoire.
David Lescot est, à 42 ans,
l’auteur d’une douzaine de (bonnes) pièces. Il sait donc ce qu’écrire
de la fiction veut dire – en mai, on
pourra voir au Théâtre des Abbesses, à Paris, Nos occupations, qui se
passe pendant la guerre. Mais là, il
a bâti son spectacle sur les témoignages de deux des derniers survivants du ghetto de Varsovie, Paul
Felenbok et Wlodka Blit-Robertson. « Il m’a semblé évident, dès le
départ, que tout ce que je pourrais
écrire serait moins fort que leur
parole», souligne-t-il.
La qualité du spectacle tient
d’abord à celle de ces témoignages,
qui émanent de deux survivants à
même, par leur culture générale et
politique,maisaussipar leurdignité et leur sens de la distance – voire
de l’humour –, de mettre en perspective ce qu’ils ont vécu sans se
laisser déborder par le pathos. Elle
tient aussi à la qualité de l’intervieweur, David Lescot, qui leur a
posédesquestionsprécises,concrètes, sur leur vie dans le ghetto et
dans les caches où ils ont survécu
jusqu’à la libération de Varsovie,
L’histoire qu’ils
racontent est celle
de leur survie
miraculeuse, enfants
seuls dans la guerre
en janvier 1945. « Je voulais vraiment rentrer dans les détails de la
vie quotidienne, raconte-t-il. C’était
pour moi la seule manière de rendre l’histoire sensible, humaine,
sanstomberdansune émotionfacile, et dans les clichés.»
Paul Felenbok et Wlodka BlitRobertson sont cousins, bien que
lui soit français, astrophysicien à la
retraite, et elle anglaise, vivant à
Londres, où elle a travaillé comme
manipulatrice en radiologie. Ils
avaient 7 et 12 ans en avril 1943,
quand ils se sont enfuis du ghetto –
par les égouts pour lui, par une
échelleau-dessusdumurd’enceinte pour elle –, quelques jours avant
l’insurrection et la destruction du
ghetto par les Allemands.
L’histoirequ’ilsracontentestcelledeleursurviequasimentmiraculeuse, enfants seuls dans la guerre,
cachés dans des maisons abandonnées ou accueillis, moyennant
finances,dansdesfamillespolonaises.
Paul Felenbok avait perdu ses
parents très tôt, arrêtés dans leur
première cachette, où l’enfant ne
se trouvait pas ce jour-là, et déportés. Wlodka Blit-Robertson avait
étéenvoyée à l’extérieurdughetto,
seule avec sa sœur Nelly. Son père,
qui était un des dirigeants du
Bund, l’union générale des travailleurs juifs, avait rejoint la Russie;sa mère,militanted’unmouvement plus radical, avait tenu à rester dans le ghetto, où elle était
membre du Judenrat, le conseil
juif. Elle sera déportée au camp de
Majdanek, et assassinée. Après la
guerre, Wlodka Blit a retrouvé son
père à Londres, où il était devenu
journaliste.
Ce qui rend leurs témoignages
extraordinaires, c’est la manière
dont leur histoire individuelle,
incarnée, recoupe la grande Histoire, qu’il s’agisse de l’antisémitisme
Les témoignages sont portés par les acteurs Marie Desgranges et Antoine Mathieu. VINCENT PONTET/WIKISPECTACLE
polonais, de celui des Ukrainiens,
auxiliaires zélés des nazis, ou du
rôle de l’Union soviétique, « libératrice » pour le moins ambiguë. Du
fait de l’engagement politique des
parents de Wlodka, des acteurs historiques traversent leurs récits, à
l’instar de Marek Edelman, qui fut
l’un des leaders du soulèvement
du ghetto. L’histoire de leur
famille, constituée de religieux et
delaïques, demilitants révolutionnaires et/ou sionistes et de petits
industriels, forme aussi un tableau
saisissant d’une identité juive plurielle et complexe.
Restait à faire de ces témoignages – validés, sur le plan historique,
par l’historien Tal Bruttmann, spécialiste de cette période – un vrai
moment de théâtre. C’est absolument le cas dans Ceux qui restent,
LescanularsvisuelsdeJoan Fontcuberta
INGMAR BERGMAN
DARK STAR
© 1955 – 1957 – 1960 – 1966 – 1974 – 1978 AB SVENSK FILMINDUSTRI. Tous droits réservés. - Photo PERSONA : Bo Arne Vibenius.
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l’URSS a fait disparaître toute trace
– à l’exception des indices rares
enfermés sous vitrine. Il y a aussi
cetteenquêteexclusivesurleterroriste Ben Laden, dont deux journalistes révèlent – journaux arabes à
l’appui– qu’il s’agit en réalité d’un
acteurdesérietélé,engagépourjustifier l’intervention en Afghanistan.
Toutes ces histoires farfelues,
aux mises en scène spectaculaires,
tiendraient de la blague potache si
l’auteur ne mettait un soin méticuleux à leur donner un vernis de
véracité. L’artiste, qui a grandi dans
la propagande franquiste, s’attaqueenréalitéàladimensionautoritaire des images qui sont notre lot
quotidien: publications scientifiques, images médiatiques, discours religieux et même productions artistiques. « Je ne me réjouis
pas à l’idée de tromper le spectateur, expliquel’artistequi sèmedes
indices. Ce que je veux, c’est instiller
une culture du soupçon qui se poursuive dans la vie réelle.»
Riendansl’expositionn’esttotalement vrai ni totalement faux : ni
les livres qu’il expose sous vitrine
(ilssontbienécritsparunJoanFontcuberta, mais pas forcément celuilà), ni les portraits anciens accrochésdanslessalles(l’artisteyasubstitué ici son oreille, là son nez). Au
spectateur de faire le tri.
Ainsi concentrées, les séries de
Fontcuberta perdent un peu de
leur force subversive. D’ordinaire,
Fontcuberta expose ses œuvres
dans des lieux sans rapport avec
l’art : le cosmonaute dans un
musée d’astronomie, les animaux
fabuleux dans des musées d’histoire naturelle. Résultat : les spectateurs s’y laissent prendre, les journalistes reprennent ces histoires
sans recul,et l’ambassadede Russie
protestedefaçonofficielle.Etlaréalité dépasse alors la fiction. p
Claire Guillot
Camouflages, 5-7, rue de Fourcy,
Paris4e. De 4,50 ¤ à 8 ¤. Jusqu’au
16 mars.
Fabienne Darge
Ceux qui restent, paroles de Paul
Felenbok et Wlodka Blit-Robertson.
Conception et mise en scène : David
Lescot. Dans le cadre du festival
(Des) illusions, Montfort Théâtre,
106, rue Brancion, Paris 15e. Tél. :
01-56-08-33-88. A 17 heures ou 21 heures, jusqu’au 9 mars, puis du 19 au
23 mars. De 16 ¤ à 25 €.. Durée : 1 h 20.
SÉLECTION
LE MONDE
Jour2fête présente
FESTIVAL INTERNATIONAL
DU FILM DE ROME
CINEMAXXI 2013
Parce que
j’étais peintre
L’art rescapé des camps nazis
un film de Christophe Cognet
ACTUELLEMENT AU CINÉMA
DESSIN : JOSEPH RICHTER /
I
l n’est pas si courant d’éclater
de rire en visitant une exposition. Pas question de bouder
son plaisir dans celle de Joan Fontcuberta, cet Espagnol qui, à la Maison européenne de la photographie, prend un malin plaisir, de salle en salle, à vous balader de canular en fiction.
Dans les sous-sols voûtés du
musée est exposée la recherche de
savantsquiont découvertdes espèces disparues. Les documents, les
articles de journaux, les photos
scientifiques, attestent du sérieux
de la démarche. Tout, sauf les animaux en question qui présentent
une forte ressemblance avec… des
centaures, des licornes et des griffons. A l’étage, les salles sont occupées par des scandales inédits: ainsil’histoired’uncosmonautesoviétique, dont la mission disparut
corps et biens dans l’espace, et dont
Le titre du spectacle prend alors
tout son sens.Il y a ceux qui restent
de cette histoire-là, et qui sont de
jourenjourmoinsnombreux.Il ya
ceux qui restent après eux, à qui il
incombe maintenant de transmettre l’histoire. Et il y a la forme de
médiation, sans recours à la fiction, que permet le théâtre, cet art
qui, depuis toujours et par essence,
fait revivre les morts. p
“Un documentaire remarquable !”
L’artiste espagnol dynamite avec humour la propagande des images
Photographie
spectacle d’une force et d’une
intensité rares, qui montre le rôle
spécifique que peut jouer le théâtre dans la transmission de cette
histoire.
Dans un dispositif minimal – un
plateau nu, deux chaises –, les
témoignages des deux survivants
sontportéspardeuxacteursremarquables, Antoine Mathieu et Marie
Desgranges. Ils sont plutôt jeunes,
habillés de manière banale et
actuelle. Ils n’« incarnent » pas les
personnages de Paul et de Wlodka,
qu’ils n’ont d’ailleurs pas rencontrés. Mais, au fil de la représentation, il se passe une chose stupéfiante: ils semblent se fondre dans
lapersonnedontilsportentla parole. Ilssont devenuseux-mêmesdes
témoins, qui témoignent pour les
témoins.
LA HUIT PRÉSENTE UN FILM RÉALISÉ PAR CHRISTOPHE COGNET ÉCRIT PAR CHRISTOPHE COGNET JEAN BRESCHAND PIERRE-FRANÇOIS MOREAU IMAGE NARA KEO KOSAL SON GRACIELA BARRAULT NICOLAS PATURLE BRUNO ELHINGER MONTAGE CATHERINE ZINS MONTAGE SON DIDIER CATTIN
MIXAGE JEAN-MARC SCHICK PRODUCTEUR DÉLÉGUÉ STÉPHANE JOURDAIN PRODUCTEURS ASSOCIÉS GILLES LE MAO LAURENCE MILON CAROLINE HELBURG DIRECTION DE PRODUCTION FRED DUUEZ ALAIN BASTIDE ELSA BARTHÉLÉMY UNE COPRODUCTION FRANCO-ALLEMANDE EN COPRODUCTION AVEC
AUGENSCHEIN FILMPRODUKTION JONAS KATZENSTEIN ET MAXIMILIAN LEO AVEC LA PARTICIPATION DU CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE ANIMÉE DE LA FILMFÖRDERUNGSANSTALT DE LA KULTURELLE FILMFÖRDERUNG MECKLENBURG-VORPOMMERN DE LA FONDATION
POUR LA MÉMOIRE DE LA SHOAH DE LA FONDATION ROTHSCHILD AVEC LE SOUTIEN DE L’ANGOA-AGICOA AVEC LE SUPPORT DU PROGRAMME MEDIA DE L’UNION EUROPÉENNE AVEC LE SOUTIEN DE EURIMAGES © LA HUIT / AUGENSCHEIN FILMPRODUKTION - 2013
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culture
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
La joie d’être de Jacques Schwarz-Bart
Le musicien a présenté son dernier album, «Jazz Racine Haïti», au New Morning, à Paris
Jazz
G
rand absent du Nouveau
Dictionnaire du jazz (Laffont,2011),JacquesSchwarzBart(saxténor)estunedesmeilleures nouvelles du jazz au XXIe siècle.
Conscience, science, souffle, vie, la
leçondes Antilles.Sonoritéde messager des dieux, loyauté des rythmes, fureur incandescente, souplesse des mélodies jouées juste,
juste la mélodie, capacité physique à rejoindre les sphères, tout
concert de Jacques Schwarz-Bart
dépasse de loin la musique. Cérémonie ? Oui, mais sans cérémonial.Avecson dernieralbumconsacré aux racines vaudou du jazz,
JazzRacineHaïti(Motéma,Harmonia Mundi), Jacques Schwarz-Bart
aggrave son cas.
Alternant incantations, mélopées peinardes,suraigus aylériens,
il présente un groupe exceptionnel avec bonne humeur, racontesa
vie, son expérience, patine sur des
plaisanteries douteuses, offre cette expérience de joie et de pensée
qui dépasse de loin la musique.
Le groupe ? Sensiblement différent de l’album,il réunit la superbe
MoonlightBenjamin(chantet danse), le génial celte Alex Tassel au
bugle, le divin Stéphane Kerecki à
la contrebasse,Claude Saturne aux
tambours vaudous (tout une histoire), Arnaud Dolmen (batterie de
catégorie). Plus Grégory Privat et
sa formidable présence au piano.
Soit, sous ce déluge d’adjectifs
hélas trop exacts, un mélange des
âges, des couleurs, des tempéraments, propre à fonder un groupe
à des années-lumière du talent
dont on se contente.
Pourquoi ? Parce que Jacques
Schwarz-Bart : Jacques SchwarzBart en maître de cérémonie, en
agitateur pince sans rire, en
meneur de bande, employé corps
et âme à la musique, et à faire que
la musique sorte de soi. Il peut se
faire que les critiques tiquent.
Commesi cettecélébrationdes forces du vent, du tonnerre et de la
lumière, du visible et de l’invisible,
du vaudou pris au pied de la lettre,
finissait par égayer.
Simpleaboutissementprovisoire d’une quête ? Des années de
MohamedBriouel:
«Un rêve de mélomane»
Le musicien et son ensemble vont jouer, au
Théâtre de la Ville, la Nûba Al-Istihlâl en entier
Entretien
M
ohamed Briouel, 60 ans,
dirige l’Orchestre araboandalou de Fès. Vieille de
dixsiècles, la musique arabo-andalouse est segmentée en nûbas (ou
noubas), vingt-quatre à l’origine,
onzeaujourd’hui,comportantchacune cinq mouvements. A l’invitation du Théâtre de la Ville à Paris,
Mohamed Briouel et son ensemble s’apprêtent à réaliser une performance artistique et physique :
jouer la Nûba Al-Istihlâl dans son
entier, soit 7 h 40 de musique ininterrompue – deux pauses de quinze minutes cependant pour le
confort des spectateurs. Un coup
d’audace, une première mondiale,
dit le violoniste fassi, rencontré à
Paris.
De mémoire de musicien
contemporain, l’intégralité
d’une nouba n’avait jamais été
jouée en concert, même au
Maroc ?
Au New Morning, à Paris, avec la chanteuse Moonlight Benjamin, vendredi 7 mars. CHRISTIAN DUCASSE
métier à New York, sans pitié pour
le nouveau venu, créolophone qui
plus est. Travail personnel sur les
origines, le son, les formes, pour se
rejoindre : Jazz Racine Haïti n’a
rien d’une mixture, c’est bien pire.
Les chansons vaudous lui viennent de la mère guadeloupéenne,
Simone. Avec son meilleur sourire, saluant Simone à distance, Jacques Schwarz-Bart ose dire, à
l’aube de la cinquantaine, qu’il est
de ceux qui ont la chance de
n’avoir pas réglé leur œdipe. Il
chante donc sa voix à elle.
Il ne se donne qu’une injonction: « Au lieu des stratégies d’écriture de mes précédents albums, se
placer debout face à des chants que
la musique charge de mystique,
tels quels. Sans les altérer. » En un
temps où les artistes se cassent la
nénette en studio pour graver une
vingtaine de prises de chaque thème, son disque est tricoté de huit
« premières prises » et deux
« deuxièmes». En scène, après une
Contredanseaux faux airs de placidité furieuse, il ose : « En studio,
franchement, ça aurait été une très
bonne prise.»
Où que se produise Jacques
Schwarz-Bart, musicien philosophe, fils des écrivains résistants
André et Simone Schwarz-Bart,
Sonorité de messager
des dieux, loyauté
des rythmes, fureur
incandescente,
souplesse des
mélodies jouées juste
Christiane Taubira, garde les
sceaux, au premier rang. Ensemble, beau couple, ils font la « une »
de la revue Jazz News de mars. Leur
dialogue sera un jour porté au
théâtre.
Au New Morning, affluence des
grands soirs.Mme Farhi,sa fondatrice à la beauté intacte, veille sur une
soirée dont elle sait, que comme
trois cents autres, elle fera date.
Public plus métissé que d’habitu-
de. Elégances dont le jazz se prive
bêtement. Le plus troublant, c’est
ce luxe mâtiné de décontraction
dont seul est capable Brother Jacques. Exactementcomme l’étaient
tous ces ténors dont il semble le
chaînon retrouvé, Sonny Rollins,
Dexter Gordon, Pharoah Sanders,
ArchieShepp.Ajoutons-y,pour faire bonne mesure, Coltrane et
même Coleman Hawkins. Il y a
dans le jeu de Jacques SchwarzBart une maturité, une conscience,
une lucidité, une joie d’être qui
peuvent tout atteindre.
Le 16 janvier vers 6 h59, dans un
TGV en partance pour Lyon, on lui
a volé son ténor, les becs, les
anches, le son et l’image secrète
bien tapie dans l’étui. Un autre se
serait fait sauter le caisson ou
aurait rejoint sans un mot l’administration. L’administration, Jacques Schwarz-Bart, diplômé de
Sciences Po, en vient. Le caisson ?
Trop d’énergie vitale en lui, trop
d’amour de la vie. Plus un aphorisme: « L’art, c’estla facultéde se relever. » Mme Taubira : « J’admire sa
légèreté dans la vie. Au sens où il n’y
a pas de pesanteur dans sa démarche. Il explore.» p
Francis Marmande
Non,c’estun événementhistorique, un rêve pour de nombreux
amateurs, qui viendront d’ailleurs
de Fès, de Rabat, de Tanger pour y
assister. C’est un rêve de mélomane. En principe, au Maroc, on joue
un seul mizân [un mouvement] et
l’on passe à autre chose.
L’Orchestre de Fès, qui a été créé
par mon maître de musique, El
Hadj Abdelkrim Rais [1912-1996],
comporte en principe quinze
musiciens ; nous serons huit à
Paris – violons, rebab, oud, percussions, chant. Abdelkrim Rais, qui
fut l’élève de Mohamed El Brihi,
grand virtuose disparu en 1945, a
été un novateur. Il a modifié les
rythmes, rendu la musique araboandalouse, qui n’est pas dévotionnelle ni sacrée, plus accessible aux
jeunes générations. Contrairement aux autres orchestres marocains, tels l’Ensemble Temsamani
de Tétouan, dirigé par Amine El
Akrami, ou celui de Rabat, aujourd’hui en sommeil faute de relève,
nous n’utilisons pas d’instruments à vent, flûtes ou clarinettes.
Cette musique est-elle toujours
vivante au Maroc ?
Bien sûr. D’ailleurs, beaucoup
de Marocains connaissent les poèmes par cœur, les chantent. Parce
que toutes ces musiques, le melhoun [genre populaire], les thèmes soufis, l’arabo-andalou, ont
fait de Fès un creuset musical.
Nous avons, au Conservatoire
national de Fès, que je dirige, plus
de six cent cinquante élèves, qui
apprennent à la fois la musique
classique occidentale, avec solfège
et pratique d’instrument, et la
musique traditionnelle.
J’ai moi-même étudié aux
conservatoires de Fès et de Rabat,
et j’ai nourri un grand dessein,
celui de transcrire les noubas en
notation occidentale, alors qu’elles ont été transmises oralement
depuis le XIe siècle. Il y avait vingtquatre noubas, onze ont traversé
le temps, et j’ai entrepris d’en écrire les partitions. Pour le moment,
j’ai publié la Nouba Grib’t Lahssine. Il faut trouver des fonds pour
continuer.
Il y a eu des essais de transcription pendant la période coloniale,
par exemple par le compositeur
Alexis Chottin. Il y a des archives
sonores. En 1992, les onze noubas
restantes ont été enregistrées intégralementet consignéesdans l’Anthologie Al Ala [un coffret de 73 CD,
publié par le ministère de la
culture marocain et la Maison des
cultures du monde].
Les noubas ont-elles été composées par Zyriab, « le Merle
Noir », un esclave affranchi d’origine persane, venu de Bagdad se
fixer en 822 à Cordoue à la cour
du souverain Omeyyade Abd
al-Rahman II ?
Il est sûr qu’il a joué un rôle,
mais en arrivant en Espagne, il a
évidemment trouvé une nouvelle
civilisation,juive, occidentale, arabe. De même, en 1492, les expulsés
du royaume andalou ont trouvé à
Fèsunlieude culture,avecune université d’excellence, Quaraouiyine.
La musique arabo-andalouse
est une musique médiévale très
proche de la musique occidentale,
je peux d’ailleursla jouer au piano,
ce qui est impossible avec la musique arabe qui pratique le quart de
temps. J’ai enregistré en 1999 Cantigas du roi Alfonse X, avec Joel
Cohen, qui dirigeait le Boston
Camerata. J’ai vu alors à quel point
cette musique « adorable» qui est
la nôtre est un pont entre l’Occident et le monde arabe. p
Propos recueillis par
Véronique Mortaigne
Orchestre andalou de Fès, dimanche
9 mars, à 15 heures. Théâtre de la Ville,
2, place du Châtelet, Paris 4e. 19 euros.
Tél. : 01-42-74-22-77.
Ouvrirla prisond’Angersà l’artcontemporain
Les batailles culturelles des municipales 11/18 Ce lieu vétuste est partiellement classé
Angers
Envoyée spéciale
S
a présence massive, avec ses
bâtiments en croix et sa porte
d’entrée en forme de châtelet,
s’imposent au cœur de la ville et
pourtant, ses portes sont fermées
aux Angevins. Sauf aux repris de
justice. La prison d’Angers, inscrite
partiellement au titre des Monuments historiques, construite au
milieuduXIXe siècle,pourraitbientôt s’ouvrir au public. Notamment
aux amateurs d’art contemporain.
C’esten tout cas le souhait de Christophe Béchu, sénateur UMP, président du conseil général de Maineet-Loire et candidat aux municipalesface aumaire(PS)sortant,Frédéric Béatse. Il voudrait profiter d’un
déménagement prochain des prisonniers vers un lieu moins insalubre pour faire de cet endroit « un
espace ouvert à la création contemporaine sous toutes ses formes».
Estimant que le « rayonnement
culturel » de la cité angevine,
connue pour son festival de courtsmétrages Premiers plans, « ne correspondpas»àladensitédepopulation de l’agglomération (280 000
habitants), le candidat défend avec
ferveurce projet qui,dit-il,pourrait
«réveiller la ville». S’il est conscient,
lui aussi, de la nécessité de dynamiserl’offreculturelled’Angers,Frédéric Béatse ironise face aux propositions de son concurrent qu’il juge
« irréalistes» financièrement. « De
quelles sommes disposera-t-il pour
accrocher des œuvres dedans ? »
interroge-t-il, sans pour autant
avancer de pistes pour le devenir
de la prison. Et, pour enrichir l’offre
artistiquedelaville,ditmener«des
discussions avec Beaubourg» pour
inscrire Angers dans le cadre des
expositions itinérantesde l’établissement parisien.
«Installeruncentred’artcontemporainpermettraitdelimiterlestravaux a minima », défend Christophe Béchu, qui estime même
qu’une certaine vétusté devrait
êtregardéeafinde«jouerlecontraste»avecl’artmoderne.«Cettetransformation d’un centre d’enfermement, de privation de liberté en un
lieu de transfert des savoirs, ouvert
sur la ville et la création, serait un
fantastique symbole», s’emballe le
sénateur, qui a imaginé ce projet
avec Alain Fouquet, son colistier
chargé de la culture.
Nonclassé, le haut mur de pierre
de10mètresdehautquiceintlaprison,situéeaucœurduquartierPasteur, seraitabattu, afin de désenclaver le bâtiment et permettre un
accès direct depuis la rue ou le jardindesplantesattenant.Delastructure en croix du bâtiment, le candidat entend tirer parti en attribuant
à chaque aile une spécificité, la première étant dévolue aux « cultures
De la structure en
croix du bâtiment, le
candidat UMP entend
tirer parti en
attribuant à chaque
aile une spécificité
urbaines,auhip-hop»,ladeuxième
aux « arts picturaux», et la troisièmetransforméeen«lieuderésidence pour artistes». Les anciennes cellules devenant des ateliers.
Christophe Béchu dit avoir été
inspirépardes initiativesdumême
ordre menées «au Brésil et en Tchéquie». C’est toutefois en Uruguay, à
la prison de Miguelete située en
plein centre de Montevideo, que
l’ontrouveunexempledetransfor-
mation d’un lieu carcéral en centre
d’art proche du projet défendu par
lesénateur:depuis2010,lesanciennes cellules de la plus ancienne prison d’Uruguay accueillent
tableaux, installations artistiques
et performances d’artistes uruguayens et étrangers en résidence.
Suspendu aux résultats des
municipales, le projet de Christophe Béchu ne pourra être réalisé
qu’avecl’avalduministèredelajustice. Dénoncée pour son insalubrité, sa surpopulationet sa vétusté, la
maison d’arrêt fait l’objet depuis
plusieurs mois de discussions
entre les élus locaux et la garde des
sceaux. Christiane Taubira avait
souhaité, dans un premier temps,
une rénovation des lieux (coût estimé à 500 000 euros), avant de se
montrer sensible aux arguments
des élus qui penchent pour la
construction d’une nouvelle prison. Celle-ci pourrait voir le jour à
Trélazé. Une expertise a été menée
au début de l’année. La décision
devrait être rendue prochainement. p
Sylvie Kerviel
Prochaine article : le Musée des beauxarts de Reims
0123
culture & styles
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
BibiTangafait écho aux
turbulencescentrafricaines
Le chanteur et musicien né à Bangui sort un
nouvel album, «Now», écrit en partie en sango
Musique du monde
U
n cousin musulman qui
s’était réfugié en Israël, où
les Centrafricains peuvent
se rendre sans visa, vient de rejoindre Madrid. Des membres de ma
familleayantfui leursmaisonsbrûlées commencent à rentrer chez
eux. » Vendredi 7 mars, à 8 heures,
Bibi Tanga nous téléphone de son
domicile parisien pour donner des
nouvellesde son pays,la Centrafrique. Juste un peu plus rassurantes
qu’il y a encore quelques semaines, dit-il. « On est en période de
reconstruction », poursuit le musicien, chanteur et bassiste.
S’il ne participe pas au concert
de solidarité avec la Centrafrique,
organisé à Paris, lundi 10 mars (un
peu surpris, nous avoue-t-il, qu’il
n’y ait pas eu de suite, après une
première démarche dans sa direction), il espère aller là-bas courant
mai pour organiser des choses
avec des collègues déjà sur place. A
Bangui, où Bienvenu Tanga (que
tout le monde appelle Bibi) est né
le 19 septembre 1969, passent déjà
les titres en langue sango de son
nouvel album, Now.
Dans ses disques, révélant son
appétit pour le groove funky et la
soul (il se dit fan de George Clinton, James Brown, Curtis Mayfield…),Bibi Tanga mélange les langues, français, anglais et… sango.
Ce cinquième album révèle l’attachement à sa terre natale de l’élégant et souriant Parisien. « Je
remercie ma famille en France, en
Angleterre,aux Etats-Unisd’Amérique et surtout à Bangui,en République centrafricaine. Que la paix s’y
installe durablement ! », écrit-il
dans les notes de pochette.
Il compte quatre chansons écrites dans sa langue maternelle. Le
chanteur y insuffle davantage de
groove, de rythmes d’Afrique, que
dans les précédents disques,
notamment le monteguene, un
rythme dansant joué dans la
Œnologie Négociant et producteur du Sancerrois depuis vingt ans, Pascal Jolivet a su très tôt
marquer sa différence. Ses vins sont à son image, souples, tendres mais aussi capables d’exploser
Pascal Jolivet, des vins sains et fougueux
région de la Lobaye, au sud-ouest
du pays. « J’avais besoin de ressortir un peu plus cette musique qui
m’a bercé. Du fait de l’éloignement,
sans doute », raconte-t-il. S’il vit à
Paris,après unepériodetrès nomade pendant son enfance, au gré des
affectations de son père, diplomate (sa mère, elle, était sage-femme), Bibi Tanga n’a jamais coupé
les ponts avec sa terre.
Il y retournait régulièrement
jusqu’à il y a deux ans et les premiers signes annonçant la tragédie à venir. Les paroles de certaines
chansonsde Nowsemblentdirectement faire écho aux turbulences
dramatiques que vient de connaître la Centrafrique. « Du sang d’enfance sur la conscience, la tristesse
S’il vit à Paris,
Bibi Tanga n’a jamais
coupé les ponts
avec sa terre
s’est emparée du pays », écrit Bibi
Tanga dans Ngombe (« arme à
feu»).«A traverscette chansons’exprimetoute latensionque je ressentais au téléphone, l’année dernière,
quand j’appelais mes cousins et
mes cousines. Je sentais dans leur
voix qu’ils me mentaient en
essayant de nous rassurer. On
connaît les voix de nos proches. La
couleur de l’air avait changé. » p
Pascal Jolivet possède 40 hectares, plantés en sauvignon, sur lesquels il produit des sancerres et des pouillys fumés. DROLETT/FREDERICK WILDMAN AND SONS
Sancerre (Cher)
Envoyée spéciale
P
les jours que des parcelles se vendent », lance ce personnage atypiquedu mondeduvin. Ni bourgeois
ni conventionnel, ce type du terroir est toujours à l’affût des beaux
morceaux de terre, comme celui
duRoc,surunsoldesilex,sadernièreacquisition,prometteuse:« Lorsque j’ai commencé à faire du vin, il
y a vingt ans, j’ai compris que je
devais me différencier de ceux qui
étaientlà avantmoi. C’estdonc passé par une vinification naturelle
dès le début. Depuis, notre seul
intrant dans le vin reste le soufre, et
encore, de manière très modérée.»
Du coup, ses vins sont très sains,
maisdugenrefougueux,àsurprendre, à exploser, avec personnalité
et identité. Les cuisiniers les adorent et on les retrouve, bien répartis, dans les cartes de restaurant
aussi bien en France (comme chez
Serge Vieira, à Chaudes-Aigues
dans le Cantal, un deux-étoiles
Michelin hautement recommandable) qu’à l’étranger (Jolivet
exporte 70 % de sa production).
C’est d’ailleurs chez son importateur au Cambodge qu’il vient de
trouver sa dernière recrue pour
s’occuper de la distribution internationale, Anne Bouche, 25 ans,
qui parle plusieurs langues et possèdedéjà des expériencesdans plusieurs pays. C’est que Pascal Jolivet, doté d’une réactivité sans
failles, sait saisir les occasions au
vol. Comme ses vins, qui rebondis-
sent de notes florales en notes épicées.
Son premier œnologue, « probio », Jean-Luc Soty, est resté
vingtans à ses côtés, avant de partir à l’été 2013 – Pascal Jolivet en a
pleuré. Mais il n’est pas de ceux qui
se morfondent longtemps. Il rencontre vite sa nouvelle œnologue,
Valentina Buso, une jeune Italienne passée notamment par des vinifications au Chili après avoir obtenu son diplôme à Montpellier.
çoit le caractère humain, tant ils
sont à la fois souples et tendres.
Pour aller plus loin, Yannick
Cadiou, qui a passé son enfance
dans la campagne de la Loire, poursuit un travail rigoureux en
culture biologique. « Ce qui m’intéresse,explique-t-il,c’estqueValentinatravailleen levuresindigènesqui
sont naturellement présentes dans
les raisins que je contribue à cultiver. La plupart des œnologues sont
stressés. Ils craignent que les choses
s’emballent, leur échappent. Alors,
ils utilisent des enzymes,des levures
de compétition, etc. Je trouve ça
dommage en général d’avoir peur
de la rencontre, de l’inattendu ou de
sortirducadre.C’estpourtantenrestant ouvert que le meilleur arrive ;
Valentina l’a compris.»
Un discours original pour ce
scientifique qui ressent la nature
comme personne. Le fils de Pascal,
Clément, 25 ans et les bonnes couleurs aux joues de celui qui vit
dehors, écoute ce discours peu
conventionnel avec joie. Il arrive
tout juste d’une journée de taille
passée chez un voisin vigneron.
«C’estbienpourluiqu’ilfassesapropre expérience avant de venir au
domaine! », lance Pascal Jolivet, de
la fierté dans la voix. p
GALERIE SUZANNE TARASIÈVE
our comprendre les vins de
Pascal Jolivet, il faut trouver
une porte d’accès au personnagequi sort vraiment des sentiers
battus.Pas toujours facilede suivre
ce genre d’esprit libre, qui n’en fait
qu’à sa tête. A l’école, quand il a
6 ans et qu’on lui demande ce qu’il
veut faire plus tard, il écrit pourtant déjà sur sa copie : « négociant
en vins ». Déterminé, le garçon.
C’est qu’il est souvent avec son
grand-père qui a pignon sur la rue
de la Gare, à Cosne-sur-Loire (Nièvre), où il a créé son affaire de négoce en 1926. Les Jolivet sont du cru,
mais ne possèdent pas de vignes.
Après des études de commerce
– et non d’œnologie – Pascal Jolivet
travaille chez Pommery, en Champagne, avant de revenir parmi les
siens, où il est le seul dans la région
à être 100 % négociant. Mais, dit-il,
«mon objectifest d’êtrele plus indépendant possible, et cela ne peut
passer que par la propriété».
En 1993, il a la possibilité d’acheter sa première vigne, magnifiquement exposée sur Bué, « La plante
des prés». Aujourd’hui, il possède
40 hectares, plantés en sauvignon,
répartis sur plusieurs terroirs de ce
vignoble du Sancerrois et produit
des sancerres et des pouillys
fumés. « J’aimerais aller jusqu’à
60 hectares, mais ce n’est pas tous
te: celle d’un réenchantement perplexe du monde. p
Gastronomie Chaque mois, le père de Salvatore Rotiroti envoie origan sauvage, figues, câpres…
Patrick Labesse
Now 1 CD Jazz Village –
Harmonia Mundi, sortie le 11 mars.
En concert le 31 mai, festival Jazz sous
les pommiers, à Coutances (Manche).
Concert solidarité avec la Centrafrique,
10 mars, 20 h 30, Théâtre de la Ville,
2, place du Châtelet, Paris 4e. Avec Ray
Lema, Youssou N’Dour, Bonga, Lokua
Kanza, So Kalmery, Idylle Mamba…
Tarif unique : 20 ¤. La totalité de la recette sera versée au profit de la reconstruction de l’Espace Linga Téré de Bangui.
Tél. : 01-42-74-22-77.
GALERIE
Romain Bernini
Galerie Suzanne Tarasiève
Comme tout temple qui se respecte, celui de Romain Bernini se
cache sous une prolifération végétale. Il faut affronter, donc, une
forêt dense de toiles, pour rencontrer ensuite les grands prêtres de
ce culte païen. Des quidams arrachés au quotidien, mais affublés
de masques en tout genre, dogons
ou mélanésiens, dont on peut espérer qu’ils les dotent de pouvoirs
extraordinaires. Mais rien n’est
moins sûr…
Saisis dans une nature qui semble
prendre l’eau, comme l’évoquent
les coulures superbes des pigments, perdus dans un univers
aux couleurs précieuses qui menace doucement, ces êtres nous regardent, bien que leurs yeux échappent. Ils confirment que le jeune
peintre français a trouvé une voie
infiniment originale et troublan-
13
« Sans titre », (2014).
Emmanuelle Lequeux
Galerie Suzanne Tarasiève,
7, rue Pastourelle, Paris 3e.
Tél. 01-42-71-76-54. Du mardi au samedi
de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au
15 mars. www.suzanne-tarasieve.com
DISPARITION
Mortdu cinéaste
Jean-LouisBertuccelli
Le cinéaste Jean-Louis Bertucelli, réalisateur de Docteur
Françoise Gailland, est décédé jeudi 6 mars à l’âge de 71 ans. En
1970, Jean-Louis Bertuccelli avait reçu le prix Jean Vigo pour son
premier film, Remparts d’argile, qui avait représenté la France
aux Oscars l’année suivante. Il est l’auteur de sept longs-métrages. En 1976, il avait offert un de ses plus beaux rôles à Annie
Girardot dans Docteur Françoise Gailland, d’après Un cri, un
roman de Noëlle Loriot (Grasset, 1974). La comédienne avait reçu
le César de la meilleure actrice pour ce film – qui rencontra un
grand succès public –, dans lequel elle jouait une femme médecin luttant contre le cancer aux côtés d’Isabelle Huppert, François Perrier et Jean-Pierre Cassel. Cinéaste engagé et attachant,
Jean-Louis Bertuccelli était le père de la cinéaste Julie Bertuccelli,
dont le nouveau film, La Cour de Babel, sortira en salles mercredi
12mars. p Franck Nouchi
n Sur Lemonde.fr : lire la nécrologie
«Je trouve ça
dommage d’avoir
peur de la rencontre,
de l’inattendu»
Pascal Jolivet
Apeinearrivée,la voilàà vinifier
le millésime 2013. Le résultat? Une
bombe! « Je lui ai donné les clés et
l’ai laissée libre », explique Pascal
Jolivet. Avec Valentina et Yannick
(Cadiou, le régisseur du vignoble),
ils forment un trio soudé, dans
lequel la communication est fluide. Il est rare qu’un homme des
vignes goûte les vins avec
l’œnologue ; rare qu’une œnologue passe du temps dans les
vignes. Les gestes fournis aux ceps
se traduisent dans le goût du vin :
une évidence énorme que tant
nient. Ce lien est la clé des saveurs
desvinsdePascalJolivet.Onenper-
Laure Gasparotto
Domaine Pascal Jolivet,
route de Chavignol, Sancerre. Tél. :
02-48-78-60-00. Pascal-jolivet.com
Unepizza du Brigand,toutela Calabreà Paris
L
a meilleure pizza de Paris ?
Vous la dégusterez chez Il Brigante, rue du Ruisseau, dans
le 18e arrondissement. Avec ses
bancs en bois, ses chaises de jardin
etsonplafondbas,lerestaurantest,
pour le moins, inconfortable, mais
l’ambiance y est unique, autour de
son patron, barbu comme Garibaldi, dont la photo de l’arrière-grandpère trône au-dessus du four à pizzas,àcôtédesstatuettesdela Madone et de Padre Pio…
Né en 1977 à Cardinale (Calabre),
SalvatoreRotirotiapassésonenfance entre deux volcans, l’Etna et le
Stromboli. Une terre de feu, propice aux caractères les plus trempés,
où l’on continue à lire dans les
entrailles du cochon comme les
Romains le faisaient, il y a plus de
deux mille ans…
En 2007, il s’est installé à Paris,
où, appliquant la devise de Voltaire, il a décidé d’être heureux, « car
c’est bon pour la santé ». De sa
Calabre natale, qui a façonné son
imaginaire,ilsaitrestituerlalumière et le goût sauvage à travers ses
sublimes pizzas, tendres et croustillantes à la fois, dont il prépare la
pâte trente-six heures à l’avance
avec de la farine des Pouilles, de
l’eau, du sel et une goutte d’huile
d’olive… de Calabre.
« Il faut écouter la pâte »
Dans cette région aride, le pain a
toujoursétésacré.Danscertainsvillages, sa cuisson demeure un rituel
mystérieux, imprégné de traditions païennes, au cours duquel les
femmes murmurent des formules
et font des gestes censés repousser
le mal et favoriser la réussite du
pain. Pour Salvatore, qui a hérité de
ce savoir-faire, la pizza est un art de
vivre : « Il faut écouter la pâte, lui
parler, sentir la vie qui est en elle et,
pour ça, mieux vaut être calabrais!», dit-il en riant.
Debout,faceàl’entréedesonrestaurant, le maestro étire et étale ses
pâtes avec toujours le même plaisir, car, pourlui, chaque jourest différent.Avantde mettreau four,Salvatore ajoute les plus beaux produits, ceux que son père lui envoie
de Calabre chaque mois : origan
sauvage, noisettes, aubergines,
figues, bergamote, pousses de brocolis sauvages, anchois, câpres,
joue de porc, sans oublier l’exceptionnellenduja, une spécialitécalabraise à base de viande de porc
fumée, de poivron et de piment.
Quelques grammes de cette
purée maison suffisent à relever
n’importe quelle pizza et à lui don-
neruneénergiefabuleuse!Ainsien
est-ildelacélèbre« Brigante»,composéedecoulisdetomate,fiordilatte (mozzarella crémeuse), poivrons
noirs grillés (marinés, épépinés et
pelés), oignon rouge, origan sauvage, huile d’olive, mozzarella fumée
et nduja… Une merveille proposée
à 15 euros et dédiée à l’une des femmes que Salvatore admire, la brigante Michelina Di Cesare
(1841-1868). «La cuisson de la pizza
ne doit pas durer plus de trois minutes. Pour cela, le four doit être très
chaud. Quand je trouverai un four à
bois,àParis,là,vousverrez,onpassera à l’étape supérieure!» p
Emmanuel Tresmontant
Il Brigante, 14, rue du Ruisseau,
Paris 18e. Tél. : 01-44-92-72-15.
Du lundi au samedi de 12 heures à 14 h 30
et de 19 h 30 à 23 h 30.
14
0123
disparitions & carnet
Ancien magistrat
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
AU CARNET DU «MONDE»
Nous,
Yaël Fogiel,
Laetitia Gonzalez
Et toute l’équipe des Films du Poisson,
M. et Mme Patrick Faure,
M. et Mme Philippe Faure,
ses enfants,
Mme Josiane Laporte,
sa compagne,
Sophie et Isabelle, Véronique, Florence
et Patrick,
ses petits-enfants
Et toute sa famille,
sommes terriblement tristes d’apprendre
le décès prématuré de
ont la grande tristesse de faire part
du décès de
Jean-Louis BERTUCCELLI.
Maurice FAURE,
Décès
Jean-Pierre
Dintilhac
Grand réalisateur, magnifique personne,
merveilleux père, grand-père et ami,
Jean-Louis va nous manquer.
Pour Julie, Emma, Darius et Angèle,
ainsi que tous les proches, nos pensées
les plus chaleureuses.
Ses amis de Cine Art
ont l’infinie tristesse d’annoncer le décès,
survenu le 5 mars 2014, à Metz, de
René CAHEN,
vice-président de la Ligue
de l’enseignement de la Moselle,
membre fondateur et vice président
du Cercle Jean Macé de Metz,
militant
de la Ligue des Droits de l’homme,
membre fondateur et programmateur
du festival du Cinéma arabe de Fameck,
chevalier
dans l’ordre des Arts et des Lettres,
homme de courage et de conviction.
Charlotte Dinnematin-Dukat,
sa fille,
Dominique et Gilles Dinnematin,
sa sœur et son frère,
Lucie Dukat,
la maman de Charlotte
Et toute la famille,
En 1998. THOMAS COEX/AFP
I
l avait choisi la magistrature
«un peu par hasardet par facilité », disait-il. Jean-Pierre Dintilhac, qui fut l’un des plus hauts
magistrats de France, est mort jeudi 6 mars à Paris. Il avait 70 ans.
La garde des sceaux, Christiane Taubira, a salué « un homme de
conviction et un magistrat qui a
toujours défendu l’indépendance
du parquet ». Le Syndicat de la
magistrature, dont il était adhé15 mars 1943 Naissance à Paris
1973 Entre dans la magistrature
1998-2002 Procureur de Paris
2002-2008 Cour de cassation
6 mars 2014 Mort à Paris
rent, a rendu hommage à son
« indépendance d’esprit qui l’a
amené à prendre des positions progressistes, avant-gardistes, dans
des domaines aussi divers que la
corruption ou la législation sur les
produits stupéfiants ». Chargé en
2007 d’un rapport sur l’évaluation
et l’indemnisation des préjudices
corporels, il a donné son nom à la
« nomenclature Dintilhac », désormais référence judiciaire en la
matière.
Fils de magistrat et petit-fils de
notaire, Jean-Pierre Dintilhac, né
le 15 mars 1943 à Paris, avait un
temps caressé l’idée de suivre la
voie de son grand-père. Finalement, il avait choisi la carrière de
magistrat « parce que la vie professionnelle était assurée, alors que
pour devenir notaire il fallait acheter une étude, ce qui coûtait cher »,
avait-il confié dans l’ouvrage Rendez-nous la justice. Un haut magistrat parle (Jacob-Duvernet, 2006).
Pourtant, c’est lors d’un stage
d’été, dans l’étude du notaire qui
avait succédé à son grand-père,
qu’il avait découvert la force du
droit, « en tentant notamment de
réconcilier deux paysans pour un
échange de terres à l’occasion d’un
remembrement», se souvenait-il.
Sorti de l’Ecole nationale de la
magistrature en 1973, il avait commencé sa carrière comme substitut au parquet de Melun. Son parcours l’a ensuite mené de la direction de l’administration pénitentiaire (1988-1990) jusqu’à la Cour de
cassation (2002-2008), en passant
par la direction du cabinet du
ministre socialiste de la justice
Henri Nallet (1990-1991), la Direction générale de la gendarmerie
nationale(1991-1993) et la fonction
de procureur de la République de
Paris (1998-2002).
C’est à ce poste, l’un des plus
prestigieux de la magistrature,
que Jean-Pierre Dintilhac a dû traiterquelquesaffairessensibles.Ainsi, en 2001, il avait requis l’audi-
ont le chagrin de faire part du décès de
tion commetémoin assistédu présidentde la Républiqued’alors, Jacques Chirac, dans une affaire de
marchéspublicsde larégion Ile-deFrance qui mettait en cause le RPR,
et dans une autre qui concernait le
paiement en liquide de voyages de
la famille du chef de l’Etat.
Dans son réquisitoire, l’homme
deloi se fondaitsur uneaffaire précédente au cours de laquelle l’exprésident Valéry Giscard d’Estaing
avait été entendu comme témoin.
Selon lui, rien n’interdisait en
droit l’audition du chef de l’Etat.
M. Dintilhac n’avait pas été suivi
par sa hiérarchie et, à la suite de ce
réquisitoire, la Cour de cassation
avait rendu un arrêt qui fait
aujourd’hui jurisprudence sur le
statut légal du chef de l’Etat.
Quoique délicat, cet épisode
n’était pas forcément celui qui
l’avait le plus marqué comme chef
du parquet de Paris. Confronté dès
son installation à l’affaire Elf, dans
laquelle Roland Dumas, qui présidait le Conseil constitutionnel,
était mis en cause, Jean-Pierre Dintilhac avait alors senti à quel point
la presse et les responsables politiques « attendaient avec intérêt »
ses décisions, glissait-il dans un
doux euphémisme.
Parfois à contre-courant
L’indépendance de Jean-Pierre
Dintilhac ne se négociait pas. Non
seulement à l’égard du pouvoir
politique, mais également vis-àvis de ses collègues et de ses camaradesdu Syndicatdela magistrature. Il pouvait aller à contre-courant
des siens et défendre des positions
jugées iconoclastes. Ainsi au sujet
de la suppression du juge d’instruction, à laquelle nombre de
magistrats sont résolument opposés. Jean-Pierre Dintilhac, qui militait pour l’indépendance du parquet, était partisan de la suppression du juge d’instruction. Il avait
acquis cette conviction en 1989, à
l’occasion des travaux de la commission « Justice pénale et droits
de l’homme » que présidait l’universitaire Mireille Delmas-Marty.
Selon lui, il fallaiten finir avec le
juged’instructionet confierla totalité des enquêtes aux magistrats
du parquet dont l’autorité sur les
enquêtes pénales serait soumise
au contrôle d’une chambre collégiale de l’instruction. A ses yeux, la
réforme du statut du parquet était
la clé de la réforme de la justice.
« Les liens entre le parquet et le
ministère de la justice, affirmait-il,
doivent être reconsidérés. » Il était
convaincu que si cette réforme
n’avait pas été entreprise, « c’est
parce qu’elle aboutissait à réduire
le pouvoir du gouvernement sur la
justice ». p
Yves Bordenave
Seymour DINNEMATIN,
journaliste,
le mardi 4 mars 2014,
à l’âge de soixante-six ans.
On se recueillera à la chambre funéraire
de l’hôpital Sainte-Périne, le mardi
11 mars, à 11 h 15, au 45, rue Mirabeau,
Paris 16e,
puis à 14 heures, au cimetière d’Epône
(Yvelines).
Cet avis tient lieu de faire-part.
Marianne et Frédéric,
ses enfants,
Antoine et Vladimir,
ses petits-enfants,
Valérie,
sa nièce,
leurs conjoints et amis, Jean-Pierre,
Martine, Christophe,
Ses petits-neveux,
Ses arrière-petits-neveux
Et toute la famille,
ont la tristesse de faire part du décès de
Hélène ESTENE,
née HARBON,
survenu le mercredi 5 mars 2014,
dans sa quatre-vingt-huitième année.
Elle rejoint son époux bien aimé,
Georges ESTENE,
décédé le 21 juin 2004.
Les obsèques auront lieu le lundi
10 mars, à 14 h 30, au cimetière du PèreLachaise, Paris 20e.
Ni fleurs ni couronnes.
La famille tient à remercier toutes
celles et tous ceux qui l’ont soignée
et accompagnée.
8, rampe des Saleurs,
06600 Antibes.
185, rue Ordener,
75018 Paris.
Le médecin général inspecteur (2S)
Léon Garréta,
son époux,
Anne et Dominique Garréta,
ses enfants,
Adrian et Carol Anne,
ses petits-enfants
et leur maman, Virginia Vander Jagt,
Pierre et Marie-Reine Garréta,
son beau-frère et sa belle-sœur,
Les familles Garréta et Gavagnach,
Ses amis
Et ses proches,
font part du rappel à Dieu de
Marcelle GARRÉTA,
née RENAUD,
pharmacien-biologiste,
le 6 mars 2014, à Paris.
Une messe sera célébrée le mardi
11 mars, à 10 h 30, en l’église SaintLambert de Vaugirard, Paris 15e.
L’inhumation aura lieu le même jour,
dans le caveau familial, à l’issue d’une
bénédiction en l’église de Villargoix
(Côte-d’Or), à 16 h 30.
13, rue François-Villon,
75015 Paris.
ancien ministre,
ancien député - maire de Cahors,
ancien sénateur du Lot,
ancien président
du conseil général du Lot,
ancien membre
du Conseil constitutionnel,
ancien président du Parti Radical,
commandeur de la Légion d’honneur,
Le jeudi 27 février 2014,
Yvonne KÉREL PAGLIANI,
s’est endormie pour toujours.
Une cérémonie aura lieu le lundi
10 mars, à 15 heures, au funérarium
de Montreuil-sous-Bois, 32, avenue JeanMoulin.
Le jeudi 13 mars, à 15 h 30,
elle rejoindra ses parents,
au cimetière de Squiffiec, en Bretagne.
Pagliani,
44, rue Saint-Antoine,
75004 Paris.
L’Association psychanalytique
de France
Maurice Faure a été cosignataire pour
la France du traité de Rome (1957).
a la tristesse d’annoncer du décès du
L’inhumation aura lieu dans l’intimité
familiale, au cimetière de Saint-Pierre
de Chignac (Dordogne).
Une messe de souvenir sera dite
à Paris ultérieurement.
18, quai de Béthune,
75004 Paris.
22, quai de Béthune,
75004 Paris.
115, rue des Cadourques,
46000 Cahors.
(Le Monde du 8 mars.)
M. Pierre-Henri Gourgeon et Mme,
M. Henri Sala
et Mme Michèle Gourgeon,
M. Hervé Gourgeon,
ses enfants,
Ses sept petits-enfants,
Ses onze arrière-petits-enfants,
Sa famille
Et ses nombreux amis,
ont la douleur de faire part du décès de
Mme Henri GOURGEON,
née Hélène DELZIANI,
survenu le 5 mars 2014,
dans sa quatre-vingt-quinzième année.
Ses obsèques auront lieu le mardi
11 mars, au cimetière du Montparnasse,
où l’on se réunira à l’entrée principale,
3, boulevard Edgar-Quinet, Paris 14 e,
à 11 h 30.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Ses élèves
ont la tristesse de faire part du décès de
M. René GOURGON,
professeur des Universités,
praticien hospitalier,
survenu le 5 mars 2014.
Chef du service de cardiologie
des hôpitaux Bichat et Beaujon, à Paris
et à Clichy, professeur à l’université ParisDiderot, il fut un « Maître » de la
cardiologie, aimé et unanimement
respecté.
Saint-Gildas-de-Rhuys (Morbihan).
Nantes (Loire-Atlantique).
Jean-Pierre Le Bihan,
Françoise Le Bihan
et Catherine Pinder, née Le Bihan,
ses enfants,
François Arradon,
son gendre,
François-Xavier, Pascale,
Stéphanie, Marianne,
Glenn et Yannis,
ses petits-enfants
et leurs conjoints,
Pierre-François, Cécile, Hélène,
Lili, Tom, Antoine, Marion,
Megan, Elise, Selenn, Alexandre,
Loïk et Charlie,
ses arrière-petits-enfants
et leurs conjoints,
Manon,
son arrière-arrière-petite-fille,
ont la tristesse de faire part du décès de
M. Pierre LE BIHAN,
veuf de
Yvonne MONNIER
et
Erika SCHUHSL,
survenu à Vannes, le 6 mars 2014.
Il aurait eu cent ans le 28 mai.
La cérémonie religieuse sera célébrée
le mercredi 12 mars, à 14 h 30, en
l’abbatiale de Saint-Gildas-de-Rhuys,
suivie de la crémation au Parc mémorial
Plescop.
Notre père repose en la chambre
funéraire de Sarzeau.
K En kiosque
Sa sœur,
Ses enfants,
Ses cinq petits-enfants
Et ses cinq arrière-petits-enfants.
survenu le jeudi 6 mars 2014,
dans sa quatre-vingt-treizième année.
La cérémonie religieuse sera célébrée
dans la cathédrale de Cahors (Lot),
le lundi 10 mars, à 10 heures.
en vente
actuellement
docteur Jean LOSSERAND,
Hors-série
survenu le 5 mars 2014.
Sa présence créative et son engagement
analytique ont marqué ceux qui l’ont
rencontré.
Les membres de l’APF adressent à
sa famille et à ses proches leurs sincères
condoléances.
Edith et Daniel,
ses enfants
Et toute sa famille,
ont la tristesse d’annoncer le décès de
Roger PAYOT,
agrégé de philosophie,
Hors-série
survenu à Lyon, le 25 février 2014.
L’inhumation a eu lieu à Menglon
(Drôme), où repose son épouse,
Suzanne,
décédée le 3 décembre 2011.
87, rue du Général-Conrad,
67000 Strasbourg.
Collections
------------------------------------------------------0123
Tous les amis de
Alain RESNAIS,
pourront se retrouver autour de
Sabine Azéma
et de Camille Bordes-Resnais,
en l’église Saint-Vincent-de-Paul, place
Franz-Liszt, Paris 10 e, pour lui rendre
un dernier hommage, le lundi 10 mars
2014, à 10 h 30.
L’inhumation aura lieu au cimetière
du Montparnasse, Paris 14 e , après
la cérémonie.
Dès jeudi 6 mars,
le volume n° 7
LA GRÈCE CLASSIQUE
Fleurs blanches.
(Le Monde du 4 mars.)
Anniversaires de décès
Il y a vingt-quatre ans,
les 3 et 11 mars 1990,
Hélène BLOCHE
et
Anne-Marie
BLOCHE-JALOUNEIX
nous quittaient.
Les années passent et pourtant elles
restent si présentes à travers nous,
nos mémoires et nos souvenirs partagés.
Le 10 mars 2012,
Michel LAGRAVE
Actuellement en kiosque
le CD-livret n° 15
C’EST COMMENT QU’ON FREINE
Le Musée
du
nous quittait.
Que ceux qui l’ont connu et aimé aient
une pensée pour lui.
Souvenirs
Sa femme,
Ses frères et sœurs,
rappellent au souvenir de ceux qui l’ont
connu, aimé
Michel CROISET,
assistant de mathématiques
à Paris IX-Dauphine,
mort le 10 mars 1974, cinq jours après
ses bébés, Emmanuelle et Chloé.
« Notre vie tu l’as faite
elle est ensevelie - Aurore d’une ville
un beau matin de mai - Sur laquelle
la terre a refermé son poing. »
Eluard.
Une pensée pour
Richard ROUD,
1949 - 1979,
fondateur
du New-York Film Festival en 1963,
son directeur pendant vingt-cinq
saisons consécutives,
auteur américain des premières
biographies de
Jean-Luc Godart,
Les Straub,
Henri Langlois
et de François Truffaut
(celle-ci inédite encore à ce jour).
Dès vendredi 7 mars,
le volume n° 23 LA SOURCE
de Jean Auguste Dominique Ingres
Nos services
-------------------------------------------------------------Lecteurs
K Abonnements
Tél. : 32-89 (0,34 � TTC/min)
www.lemonde.fr/abojournal
K Boutique du Monde
80, boulevard Auguste-Blanqui,
75013 Paris
M° Glacière ou Corvisart
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www.lemonde.fr/boutique
K Le Carnet du Monde
Tél. : 01-57-28-28-28
Professionnels
K Service des ventes
Tél. : 0-805-05-01-47
0123
météo & jeux
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
< -5°
0 à 5°
-5 à 0°
5 à 10°
Dimanche 9 mars 2014
Conditions printanières
H
20 km/h
7 16
40 km/h
Lille
D
www.meteonews.fr
4 19
5 19
Rennes
1005
1 17
990
7 19
T2
Poitiers
6 21
Limoges
Clermont-Ferrand
2 18
6 18
30 km/h
2 18
Biarritz
11 21
6 17
5 18
Françoise
Coeff. de marée 47
Dimanche, des hautes pressions protégeront à
nouveau la France des perturbations. Elles
permettront au soleil de briller
généreusement sur tout le pays. Seuls
quelques bancs de brouillard pourront
localement se manifester le matin, mais ils ne
seront pas tenaces et se dissiperont
rapidement en journée. Ce beau temps
s'accompagnera également de températures
printanières, proches de 20 degrés par endroit
l'après-midi.
Jours suivants
Mardi
Nord-Ouest
Ile-de-France
Nord-Est
Sud-Ouest
Sud-Est
Ajaccio
20 km/h
6 17
Lever 12h03
Coucher 02h51
Lundi
3 16
5 13
3 17
4 19
1 15
2 16
3 21
4 17
4 18
6 18
Mercredi Jeudi
6
15
5
15
4
16
8
15
4
15
6
15
5
15
3
13
3
15
5
19
4
19
6
20
7
19
9
21
4
19
3
4
5
Front froid
Occlusion
Thalweg
Ankara
FRANCE 3
1010
Beyrouth
D
Tripoli
Tripoli
Le Caire
beautemps
6 15
enpartieensoleillé 9 11
bienensoleillé
11 16
bienensoleillé
5 12
beautemps
1 14
beautemps
-2 15
beautemps
5 19
beautemps
4 12
beautemps
-1 8
bienensoleillé
3 8
cielcouvert
9 11
faiblepluie
10 12
assezensoleillé
1 5
faiblepluie
8 9
bienensoleillé
0 5
averseséparses
14 14
nuageux
11 16
beautemps
1 13
beautemps
6 17
1 15
beautemps
5 18
beautemps
3 7
assezensoleillé
enpartieensoleillé 13 19
enpartieensoleillé 3 9
0 9
bienensoleillé
2 3
faibleneige
SANTÉ
LOGEMENT
EMPLOI
6
5
101
Athènes
Jérusalem
Riga
Rome
Sofia
Stockholm
Tallin
Tirana
Varsovie
Vienne
Vilnius
Zagreb
assezensoleillé
beautemps
enpartieensoleillé
assezensoleillé
assezensoleillé
enpartieensoleillé
bienensoleillé
beautemps
bienensoleillé
beautemps
Dans le monde
Alger
beautemps
Amman
pluiesorageuses
Bangkok
beautemps
Beyrouth
averseséparses
Brasilia
aversesorageuses
Buenos Aires averseséparses
Dakar
assezensoleillé
Djakarta
soleil,oragepossible
Dubai
beautemps
Hongkong enpartieensoleillé
Jérusalem assezensoleillé
Kinshasa
soleil,oragepossible
Le Caire
bienensoleillé
Mexico
bienensoleillé
Montréal
assezensoleillé
assezensoleillé
Nairobi
1
8
1
3
2
8
0
2
0
4
9
16
6
11
6
17
10
13
9
12
8
14
26
20
19
17
19
26
22
16
14
23
14
10
-12
15
18
22
34
23
25
26
21
31
29
20
20
30
23
23
-6
27
New Delhi beautemps
assezensoleillé
New York
beautemps
Pékin
pluiesorageuses
Pretoria
cielcouvert
Rabat
Rio de Janeiro soleil,oragepossible
giboulées
Séoul
Singapour assezensoleillé
soleil,oragepossible
Sydney
bienensoleillé
Téhéran
assezensoleillé
Tokyo
enpartieensoleillé
Tunis
Washington assezensoleillé
Wellington bienensoleillé
Outremer
Cayenne
Fort-de-Fr.
Nouméa
Papeete
Pte-à-Pitre
St-Denis
assezensoleillé
assezensoleillé
averseséparses
soleil,oragepossible
bienensoleillé
soleil,oragepossible
13 29
1 4
-1 10
17 19
16 21
24 29
-1 3
24 32
20 25
7 16
1 9
10 16
4 9
15 18
24
24
22
27
23
25
29
28
29
32
27
29
Météorologue en direct
au 0899 700 713
1,34 € l’appel + 0,34 € la minute
7 jours/7 de 6h30-18h
présente
Motscroisés n˚14-058
2
Rabat
Dépression
Front chaud
Amsterdam
Athènes
Barcelone
Belgrade
Berlin
Berne
Bruxelles
Budapest
Bucarest
Copenhague
Dublin
Edimbourg
Helsinki
Istanbul
Kiev
La Valette
Lisbonne
Ljubljana
Londres
Luxembourg
Madrid
Moscou
Nicosie
Oslo
Prague
Reykjavik
Les jeux
1
D
Invitées : Chimène Badi, Joyce Jonathan, Julie
Zenatti, Nicoletta, Liane Foly, Michèle Laroque...
23.05 On n’est pas couché.
Avec Frigide Barjot, Renaud Lavillenie, Bernard
Menez, Disiz, Leïla Miñano, Julia Pascual (180min).
Istanbul
Tunis
Tunis
Alger
En Europe
8 17
Lever 07h16
Coucher 18h45
Aujourd’hui
Anticyclone
1020
7
De Lille à Marseille, en passant par Paris
Tout s’explique
sur Le Monde.fr/municipales
Sudoku n˚14-058
8
9
20.55 The Voice, la plus belle voix.
Episode 9. Invités : Pascal Obispo, Elodie Frégé,
Corneille, Hélène Ségara, Kylie Minogue...
23.25 The Voice. « La Suite ».
0.35 Les Experts : Miami.
Série. Les Vices de Miami. En plein vol. Jeux,
test et mort (S3, 14, 17 et 18/24, 160 min) U.
20.45 Une femme, un artiste.
EUROPE: Vaste anticyclone de la péninsule Ibérique à la Russie
Perpignan
Températures à l’aube 1 22 l’après-midi
D
Nice
Marseille
4 18
9 19
A
Séville
A
0
101
Montpellier
Rome
Barcelone
Barcelone
Solution du n˚1-057
Dimanche 9 mars
TF 1
FRANCE 2
Kiev
Budapest
Odessa
Zagreb
1030
Belgrade
Bucarest
Sofia
Lisbonne
Lisbonne
7 20
Moscou
1035
Munich Vienne
Madrid
Grenoble
Toulouse
Berne
Milan
Lyon
0
3
101 18
St-Pétersbourg
A
Paris
Chamonix
-3 13 1025
Bordeaux
20 km/h
1020
1025
Minsk
Amsterdam Berlin
Varsovie
Prague
Bruxelles
Londres
17
T
Helsinki
Copenhague
1 17
Dijon
TF 1
Riga
1015 Edimbourg
Dublin
Besançon
Samedi 8 mars
1005
Oslo
Stockholm
Strasbourg
Les soirées télé
> 40°
D
2 16
3 19
Nantes
35 à 40°
990
1010
Metz
Orléans
6 19
30 à 35°
1000
2 17
PARIS
995
25 à 30°
990
Châlonsen-champagne
5 18
20 à 25°
Reykjavik
4 18
Caen
8 18
1000
En Europe
Amiens
Rouen
Brest
15 à 20°
09.03.2014 12h TU
5 19
Cherbourg
10 à 15°
15
20.45 La Loi de Barbara.
Le Coupable idéal. Téléfilm. Didier Le Pêcheur.
Avec Josiane Balasko, Joseph Malerba (Fr., 2013).
22.28 Météo, Soir 3.
22.55 Louis la Brocante.
Série. Louis et le monte-en-l’air (S12, 2/3).
0.25 Appassionata - Acis et Galatée.
Opéra de Georg Friedrich Haendel. Par l’Orchestre
The King’s Consort, dir. Robert King (90 min).
CANAL +
20.55 Dead Man Down
Film Niels Arden Oplev. Avec Colin Farrell,
Noomi Rapace, Dominic Cooper (EU, 2013) V.
22.50 Intérieur sport. Magazine.
23.15 Jour de foot. Magazine (55 min).
FRANCE 5
20.36 Echappées belles.
De Ouagadougou à Conakry, la route des possibles.
22.08 La Menace d’un mégaséisme.
[1/2] La Terre tremble. Documentaire (2013).
23.01 A vous de voir. Magazine (25 min).
ARTE
20.50 L’Aventure humaine.
Expédition Mapaoni. L’Inaccessible Frontière.
Documentaire. Roland Théron (2011).
22.20 Les Soldats oubliés de Carthage (All., 2013).
23.15 Trop jeune pour mourir.
[3/4] Heath Ledger, le bien-aimé des dieux.
0.05 Tracks. Magazine (45 min).
M6
20.55 Die hard 4 : retour en enfer p
Film Len Wiseman. Avec Bruce Willis, Timothy
Olyphant, Justin Long, Maggie Q (EU, 2007) U.
23.25 Esprits criminels.
Série. Cruelles vidéos. Mis à nu (saison 2, ép. 3
et 4/23, 100 min). Avec Mandy Patinkin V.
FRANCE2
20.45 Les Femmes du 6e étage pp
Film Philippe Le Guay. Avec Fabrice Luchini,
Sandrine Kiberlain (France, 2010, audio.).
22.35 Faites entrer l’accusé.
Anne-Marie Le Couviour, la mort en héritage U.
0.15 Histoires courtes (45 min).
FRANCE3
20.45 Inspecteur Lewis.
Série. Le Dernier Voyage (S7, 2/3, audio, inédit).
22.15 Questions pour un assassin (S4, 3/4).
23.40 Météo, Soir 3.
0.10 Mayerling pp
Film Anatole Litvak. Avec Charles Boyer,
Danielle Darrieux (France, 1936, N., 90 min).
CANAL +
21.00 Football.
Ligue 1 (28e journée) : Bordeaux - Lyon.
22.55 Canal Football Club. Magazine.
23.15 L’Equipe du dimanche (50 min).
FRANCE5
20.40 Fais-moi une place.
Arielle Dombasle au Mexique. Documentaire.
22.10 La Case du siècle.
La Guerre d’Hollywood 1939-1945.
[2/3] Face aux dictatures. Documentaire.
23.05 La Grande Librairie.
« Spécial romancières ». Magazine (65 min).
ARTE
20.45 Spécial femmes engagées.
Frida p Film Julie Taymor. Avec Salma Hayek,
Alfred Molina, Geoffrey Rush (EU, 2002).
22.40 Kismet. Ces séries qui changent la vie.
Documentaire. Nina Maria Paschalidou (2013).
23.40 Angela Davis. Le combat continue.
Documentaire. Shola Lynch (France, 2010).
0.25 Kathleen Ferrier. Le Chant de la terre.
Documentaire. Diane Perelsztjen (2012, 50 min).
M6
20.50 Hawaï 5-0.
Série. Kupouli’la (S4, ép. 6, inédit) U ; Kahu.
Kapu (S3, ép. 11 et 12/24) U ; Pa Make Loa
(saison 2, ép. 21/23) U. Avec Alex O’Loughlin.
0.00 NCIS : Los Angeles.
Série. Pa Make Loa [2/2] (S3, 21/24, 50 min) U.
20.50 Capital.
Enquête sur ces milliardaires étrangers
qui choisissent la France. Magazine.
23.00 Enquête exclusive.
Ski, sensations fortes et avalanches : au cœur
des urgences de l’hiver (120 min).
Jean Jaurès
Un prophète socialiste
10 1 1 12
I
II
III
IV
V
VI
VII
VIII
IX
Euro Millions
X
Horizontalement
I. Heureusement, c’est possible
pour ce mot et ceux qui suivent.
II. Plus douce après grattage.
Forme d’avoir. III. Droit dans ses
angles. Demeurer bien au chaud.
IV. Accord. Causa du mal. Pousse
l’aiguille. V. Mis en doute. Belles
Tahitiennes. VI. Bien allumée.
Pour de bonnes fermetures.
VII. Serait le premier martyr
chrétien. Découpage du temps.
VIII. Fille de la famille. Bourré
de talent. IX. Deux dans un duo.
Les plus fortes font de la
résistance. Trois points sur quatre.
X. Cours autrichien. Travaille
de ses mains et à son compte.
Solution du n° 14 - 057
Horizontalement
I. Coupe-jarrets. II. Arrosera.
Rue. III. Tass. Tamiser. IV. Hissée.
Ede. V. OS. Edenté. Cl. VI. Dosse.
Otello. VII. Inusable. Gag.
VIII. Bi. Oise. Pi. IX. Univers.
Taie. X. Entendements.
Verticalement
1. Mauvais coup du sort. 2. Quand
il ne reste plus grand-chose sur les
os. 3. Croisé dans l'affrontement.
Vous veut du bien, en principe.
4. Leurs marques sont de plus en
plus nombreuses. 5. Mit en place
la Garde nationale. Fils d’Anchise.
6. En Suisse. Gouffre en région.
Possessif. 7. Sa dernière course
fut tragique. Au pied des monts
Matra. 8. Sa coquille est à
l’intérieur. Point. 9. Son museau
large et court est bien équipé.
10. Lâché dans l’indifférence.
Chants autour du feu. 11. Chants.
Roi de Juda. 12. Maintient
l’écartement.
Philippe Dupuis
Verticalement
1. Cathodique. 2. Oraison. Nn.
3. URSS. Subit. 4. Possessive. 5. Es.
Edéa. En. 6. Jetée. Bord. 7. Ara.
Nolise. 8. Ramettes. 9. Idée. Eté.
10. Erse. Lg. An. 11. Tue. Clapit.
12. Sérologies.
Résultats du tirage du vendredi 7 mars.
5, 10, 38, 40, 41, 1 e et 8 e
Rapports : 5 numéros et e e : pas de gagnant ;
5 numéros et e : 453 509,30 ¤; 5 numéros : 82 456,20 ¤ ;
4 numéros et e e : 6 572,50 ¤ ; 4 numéros et e : 273,80 ¤ ;
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3 numéros et e e : 75,00 ¤ ; 3 numéros et e : 16,80 ¤ ;
3 numéros : 13,90 ¤ ;
2 numéros et e e : 22,10 ¤ ; 2 numéros et e : 8,60 ¤ ;
2 numéros : 4,30 ¤ ; 1 numéro et e e : 11,30 ¤.
0123 est édité par la Société éditrice du « Monde » SA
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Corinne Mrejen
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80, bd Auguste-Blanqui,
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Fax : 01-57-28-39-26
Figure essentielle de l’histoire de la gauche et fondateur
du socialisme moderne, Jean Jaurès fut un des premiers
« indignés ». Tribun, écrivain, philosophe, journaliste, mais
aussi député, militant politique, théoricien, cet homme engagé,
républicain jusqu’au plus profond de l’âme, combattit toute sa
vie l’hypocrisie sociale, l’injustice économique et la guerre…
« Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? », chantait Brel. A l’occasion
du centième anniversaire de son assassinat, qui annonçait la
tragédie de 14-18, Le Monde cherche à répondre à cette question…
Dans ce hors-série, une INVITATION à la VISITE PRIVÉE
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de l’exposition JAURÈS, le 20 mars, aux Archives nationales
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Montpellier (« Midi Libre »)
16
décryptages
0123
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Alorsquelerégimede VladimirPoutine activesa propagande pourdiviser
sesvoisins,la militarisation du conflit soude un peuple hétéroclite
La menace russe unit les Ukrainiens
D
ans notre pays, l’Ukraine, on
n’estpasvraimentpolitiquement correct. On ne qualifie
pas instantanément toute
parole un peu crue de discours de haine. Voilà qui
ouvreà unécrivainouunpublicisteunvaste champ. Je sais qu’il n’est pas bon de se
laisser aller à dire tout ce qu’on pense,
mais je ne parviens pas toujours à me
contenir. Il y a quelques mois, dans une
interview, je me suis permis, entre autres
propos, d’ironiser sur la Russie : « Nous
avons un voisin merveilleux. S’il pouvait
nous attaquer militairement, ce serait inestimable. » Rien de bien nouveau, en somme. Cela fait déjà plus de vingt ans que la
Russie doit supporter l’existence d’une
Ukraine indépendante. Ce qu’elle n’apprécie pas vraiment et ce, depuis le tout début
de cette indépendance, c’est-à-dire depuis
1991.Maiscesdernièresannéessonmécontentement a grimpé de plusieurs crans, au
pointdesemétamorphoserenpureet simple névrose.
La « révolution orange» de 2004 sonna
le signal d’alarme : avec elle, l’Ukraine
échappait vraiment au contrôle russe. Elle
cessait d’être un morceau de l’empire russe, non seulement en droit mais aussi en
fait. Vers qui se tournerait-elle ? L’Occident? L’OTAN? L’Union européenne?
Le gâchis auquel cette révolution orange a abouti a un peu rassuré Moscou. Mais
lorsque, neuf ans après, presque jour pour
jour, la capitale ukrainienne s’est de nou-
Sur Maïdan, il s’agissait
de liberté et de justice,
de contrôle des citoyens
sur le pouvoir,
de transformation
de notre pays en
un pays plus humain
veau soulevée, les Russes ont mis plus de
nerf dans leur réaction. Je n’ai aucune peineàm’imaginerleprésidentPoutinesefaisant à lui-même le serment solennel cette
fois de ne lâcher sur rien. De fait, il ne cède
pas. Il transgresse. Non seulement les limites de l’acceptable, mais aussi les frontières d’un Etat souverain.
Les journées du 28 février et du 1er mars
n’ont pas été paisibles, loin de là. Au diable
les précautions oratoires : on peut dire
qu’ellesont étéatroces! Ellesont vulecommencement de l’agression armée russe
sur laquelle je m’étais permis d’ironiser.
Et, malgré tout, je n’arrivais pas à y croire.
Des militaires russes en armes sur le territoire ukrainien? Faisais-je un cauchemar?
Dans quel monde vivions-nous ? Plus au
MoyenAge sans doute,depuislongtemps!
Revivait-on l’Anschluss [l’entrée des troupes allemandes en Autriche, en mars1938] ?
Yuri Andrukhovych
DR
Né en 1960, Yuri Andrukhovych est l’une des figures les
plus populaires de la littérature ukrainienne
contemporaine. Poète, essayiste, romancier, il a fondé le
groupe de performances littéraires Bu-Ba-Bu
(Burlesque-Balagan-Bouffonade). Ses romans comme
« Moscoviada » (2007) ou « Douze cercles » (2009) sont
traduits en français aux éditions Noir sur Blanc.
Polémiste, il est notamment l’auteur de l’essai « Remix
centre-européen » dans l’ouvrage « Mon Europe », coécrit
avec Andrzej Stasiuk (2004)
Qui nous fait la guerre, qui nous occupe ?
Ces Russes, ne sont-ils pas nos frères ? Oui,
nous savions depuis toujours que Vladimir Poutine était un sale type, vindicatif et
cruel. C’est dans l’ordre des choses. On s’y
était habitué. Sa folie, en revanche, est une
mauvaise nouvelle. En voyant en direct les
sénateurs russes donner à l’unanimité
leur accord à « l’utilisation des forces
armées russes en Ukraine», j’ai eu du mal à
ne pas me croire chez Guignol tant l’anachronisme était criant, jusqu’à l’absurde.
Mais peu importent mes sentiments
personnels à l’heure où, quelque part en
Crimée, des soldats russes mettent en joue
leurs homologues ukrainiens, exigeant
leur capitulation. A la différence des sénateurs,les soldatsrussesn’avaient,eux, rien
de théâtral ni d’anachronique. Leurs
armes étaient toutes prêtes à faire feu.
Enécrivantces lignes,j’ai bienconscience qu’il est encore tôt pour écrire au passé.
Les armessont toujourschargées. On comprend enfin l’enjeu de cette propagande
imposée aux médias occidentaux durant
les mois de la révolte sur la place Maïdan.
Certes elle est passablement éculée, mais
celamarchetoujours: lesradicauxd’extrême droite, les nationalistes, les antisémites, les néofascistes. Vladimir Poutine en
personne, début décembre 2013, n’a-t-il
pas prétendu qu’« en Ukraine les protestations ressemblent de plus en plus à des
pogroms». Le mot pogrom n’était pas anodin. L’allusion est transparente.
C’est ainsique le signala été lancé et que
le plan s’est appliqué. Le monde entier
était censé croire l’Ukraine en proie aux
forces obscures, livrée à une remontée de
l’enfer politique. Il fallait que ce soient ces
forces qui tirent sur les gens désarmés, qui
enlèvent et torturent les passants, qui
occupent les bâtiments, les bureaux et les
logements des citoyens ordinaires. Il fallait qu’une centaine de personnes soient
mortes de leurs mains. Elles devaient ajuster et tirer systématiquement dans les
yeux et les parties génitales de leurs adversaires. C’est pour échapper à ces monstres
que le président légitime Viktor Ianoukovitch, amour et fierté de son peuple, avait
dû fuir. Qui pouvaient les arrêter, sinon la
puissante armée russe, au dernier
moment, juste avant la catastrophe ? La
Russie devait une nouvelle fois sauver le
monde en combattant l’hydre fasciste en
Ukraine.Il y a le mensonge.Il y a le trèsgros
mensonge. Il y a le mensonge flagrant et il
y a le mensonge immensément éhonté.
Mais il y a un mensonge suprême : la
machine de propagande russe. Elle s’appuie sur des traditions immuables et sur
des flux financiers tellement énormes
qu’on n’arrive toujours pas à la freiner.
Le problème du radicalisme de droite
est une réalité. Pendant la révolte de la place Maïdan, on s’est mis à en parler de plus
en plus. Mais il n’est ni antisémite ni néofasciste.Lorsqu’enjanvierlesunitésspéciales de police, ivres d’impunité, ont multi-
plié les tortures, les humiliations, les tirs
ciblés sur des femmes, des médecins et des
journalistes, lorsque la confrontation rue
Khrouchevski est devenue véritablement
dantesque, au spectacle des feux et des
fumées de pneus brûlés, les juifs de Kiev,
comme tous les autres citoyens de la capitale, ont fait passer au « secteur droit » les
cocktails Molotov. La droite de Kiev protégeait les juifs de Kiev contre les criminels
en uniforme de police. Est-ce si étonnant?
Non, si l’on garde présent à l’esprit que
la révolte de Maïdan a réuni toutes les couches sociales, les communautés ethniques, des groupes linguistiques et politiques si divers. Au point qu’elle en est
venue à personnifier l’Ukraine entière
dans sa complexité et sa diversité présentes. Non pas une Ukraine faite de régions
isolées ou peuplée de nationalistes, mais
reflétant la structure sociale d’un pays
complexe et dramatiquement divisé, avec
ses étudiants, ses fermiers, ses intellectuels, ses footeux « ultras », ses anarchistes, avec sa classe ouvrière intacte, ses
entrepreneurs,ses vétérans d’Afghanistan
et ses ex-officiers de Tsahal [l’armée
israélienne], avec ses femmes fantastiquement courageuses et avec tous les autres,
ukraino- et russophones. Même les Hare
Krishna – je n’oublierai jamais ce spectacle – déambulaient sur la place Maïdan
munis de battes de baseball pour défendre
leur prochain, comme l’enseignait Krishna lui-même à Arjuna.
Probablement le président de la Russie
a été mal informé. Peut-être a-t-il cru luimême ce dont il voulait persuader le monde, à savoir que Maïdan n’était remplie
que d’une poignée de raclures néofascistes. Il en allait sur Maïdan (et il y va toujours) de bien d’autres choses. Il s’agissait
deliberté et de justice, d’une société ouverte et libre, du contrôle des citoyens sur le
pouvoir, de la transformation de notre
pays en un pays plus humain.
Maintenant, alors que la Russie nous
attaque, à cause de toutes ces aspirations
qui demeurent inimaginables pour elle, il
s’agit d’une autre chose, probablement la
plus importante : il y va de notre unité au
nom de la défense de notre pays. Séparés
territorialement et désunis historiquement, jamais les Ukrainiens dans leur histoire n’ont ressenti un tel besoin d’unité.
Rien ne les unit plus aujourd’hui que la
menace russe.
Et ça, c’est vraiment inestimable. p
Traduit de l’ukrainien
par Iryna Dmytrychyn
Remaniementpar Cagnat
Revue
L’Irak, quatrième réserve pétrolière mondiale, et oubliée de l’actualité
Q
ui se soucie encore de l’Irak ? Depuis
le retrait du dernier soldat américain, en décembre2011, ce pays qui a
occupé une bonne partie de la couverture
journalistique américaine et mondiale de
la décennie passée est devenu un trou
noir. Tout au plus en émergent quelques
échos lointains d’attentats qui font quotidiennement plusieurs dizaines de morts
(9000 en 2013). Des explosions meurtrières visant le plus souvent des quartiers
chiites et systématiquement attribuées à
Al-Qaida en l’absence de revendication…
L’Irak ne se résume pas à ce décompte
macabre et, surtout, il existe des explications au déchaînement de violence, qui
n’est que la traduction de luttes de pouvoir acharnées dans le cadre de la recomposition totale d’un système socio-politique remontant à la fin de l’Empire ottoman, et auquel l’invasion américaine de
Diplomatie
Les grands
dossiers n˚9
Géopolitique
de l’Irak
Sous la direction
d’Alexis Bautzmann
Areion,
96p., 10,95¤
2003 a donné le coup de grâce.
Le numéro intégral consacré par la
revue Diplomatie à l’Irak est un précieux
vade-mecum pour ceux qui veulent comprendre ce qui se passe en Irak et où va ce
pays. Aucun aspect contemporain n’est
négligé, et le dossier débute même par un
succinct rappel historique sur l’ancienne
Mésopotamie. Comme le rappelle justement le chercheur Saïda Bédar, « l’Irak a
connu dans l’histoire récente, au début du
XXe siècle, dans le contexte de lutte de libération nationale, puis pendant une courte
période des années 1940 jusqu’en 1970, des
moments d’ouverture sociale, sans égale
dans le Moyen-Orient en termes de foisonnement intellectuel, de recomposition du
champ sociopolitique au-delà des clivages
traditionnels».
Un modèle moribond
C’est à cela que l’invasion de 2003 a mis
fin, même si le modèle était déjà moribond à cause de trois décennies de dictature totalitaire, de deux guerres (contre
l’Iran de 1980 à 1988 puis à la suite de l’invasion du Koweït en 1990-1991), et d’une
décennie d’embargo qui a broyé la société
irakienne. L’occupation américaine ne fut
pas qu’un fiasco. Elle a mené à l’instauration d’un pluralisme partisan inédit
auquel les Irakiens ne veulent pas renoncer, continuant de participer avec constance aux scrutins, pour le moment libres,
organisés à intervalles réguliers. Elle a aussi permis d’expérimenter la solution fédérale, au plus grand profit des Kurdes, qui
n’ont jamais connu une telle prospérité et
une telle paix au XXe siècle. Hosham
Dawod, anthropologue au CNRS, dresse
un tableau nuancé de l’expérience kurde
et des menaces pesant sur leur quasi-Etat.
Au lourd passif de l’occupation américaine s’ajoutent l’instauration d’un système politique confessionnel et milicien,
animé par des partis sans réelle base populaire et ayant conservé les pires habitudes
du temps de la clandestinité, comme le
note Saïda Bédar, une reconstruction fondée sur le clientélisme et une corruption
endémique. Le leader ayant le mieux saisi
ces dynamiques est le premier ministre
Nouri Al-Maliki, au pouvoir depuis 2006
grâce à un fascinant mélange de brutalité
et de clientélisme. Autre « spécificité» irakienne: l’émergence d’une deuxième
génération de militants d’Al-Qaida, en
train de mettre en place un quasi-Etat à
cheval sur l’ouest de l’Irak et l’est de la
Syrie.
Enfin, à la tête des quatrièmes réserves
mondiales prouvées d’hydrocarbures, le
pays est appelé à devenir un géant qui
pourrait concurrencer l’Arabie saoudite,
s’il lève les incertitudes sur le cadre législatif régissant la rente pétrolière et les
conflits entre le centre et les provinces.
Seul regret, dans ce numéro très complet, la scène artistique, l’un des seuls
lieux où les dynamiques échappent au terrible piège de la violence confessionnelle,
est oubliée. p
Christophe Ayad
0123
La solitude du
lecteur de fond...
Médiateur
Pascal Galinier
P
armi les bonnes résolutions de
l’année 2014: la décision d’arrêter le supplément hebdomadaire géopolitique. L’une des
plus mauvaises que le journal
pouvait prendre…» De quoi
parle Patrick Gosselin, lecteur de Triel-surSeine (Yvelines)? De la décision de « suspendre la parution» du cahier Géopolitique, annoncée le 19 décembre 2013 –
«dans une colonne en forme d’avis de
décès», observe Patrick Dombrowsky (Boissise-le-Roi, Seine-et-Marne)… Un choix qui
nous valut une flopée de courriers. Entre
tristesse, colère et incompréhension.
Tristesse. «Jour de deuil, hier soir», nous
écrivit dès le lendemain Rebecca Denantes
(Paris). Stéphane Mader (Toulon) vantait
les mérites du cher disparu qui, «en regroupant des articles de fond sur des thèmes précis, donnait la possibilité d’échapper – un
peu – à la dictature de l’événement et attestait clairement du fossé abyssal qui existe
entre “être au courant” et “comprendre”.»
Le 3janvier, de Saint-Raphaël (Var),
Patrick Rhodas nous postait, en guise de
carte de vœux, un billet de blog aussi touchant que cinglant: « Cher journal, permets-moi de te lancer un cri d’alarme. Oui,
je sais, il vient d’un “vieux” qui ne comprend rien au monde moderne, qui vit
dans le passé, etc. S’il te plaît, cher journal,
ne cède pas au modèle frivole et passager
des chaînes d’information en continu, ne
nous fais pas, toi, vivre dans un présent perpétuel où le seul émotionnel règne en maî-
Courrier
International Rien de neuf
sous le soleil de Chypre
Pas grand-chose de nouveau sous
le soleil, ai-je pensé en voyant l’article « Les négociations reprennent
pour la réunification de Chypre»
(Le Monde du 13février) et la photo
qui l’accompagne. Il y a vingtcinqans, le 15septembre 1988, correspondant de l’AFP, j’étais moi
aussi sur la ligne de démarcation
entre les deux zones de Chypre, au
Ledra Palace, et non à l’ancien aéroport. Devant les journalistes il y
avait comme sur votre cliché le pré-
sident de la République de Chypre
et celui de Chypre du Nord encadrant l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU. J’avais titré
mon papier: « Chypre – Vers des
négociations intercommunautaires longues et difficiles» ; je ne
croyais pas si bien dire.
Laurent Chevallier, Montpellier
Social Incompréhensible
et ingérable rétroactivité
des lois fiscales
Le président du Medef, Pierre Gattaz, a réclamé, mardi 18 février, un
!%&&'# "($'##'#
tre! Ce pourquoi nous t’aimons: nous permettre de trouver le temps, le recul, et le
refus de l’urgence induite par le court-termisme des passades, du “buzz” et des
modes.»
Colère. Celle de Nathalie MalinvaudRoy (Limoges): « J’appartiens à cette catégorie “conservatrice et arc-boutée sur ses
privilèges”: le prof! De toute évidence, je ne
fais plus partie de votre cœur de cible…»
Celle de Gérard Gret (LeMuy, Var): « Sur le
fond, les lecteurs ne peuvent que s’émouvoir de l’évolution d’un journal dont le
contenu ne justifie plus son titre, alors
qu’ils sont bombardés de “mondialisation”
à toutes les sauces et que leur journal tend
à devenir un support publicitaire pour marques de luxe, entrelardé de quelques articles originaux et dignes d’intérêt… Sans parler du Monde Magazine, qui est une véritable provocation!»
Incompréhension. «Ce supplément
était un peu la cerise sur le gâteau du Monde. Dans ces huit pages, il y avait une
inflexion, une cohérence, une belle
manière…», regrettent Béatrice et François
Mangenot, abonnés de Strasbourg. «Il
avait l’avantage d’étoffer la couverture
internationale d’un journal qui a vu, au fil
des années, ses pages “Etranger” se déplumer, au point de bien mal porter son
nom…», soupire Jean-Pierre Vialle (Paris).
«Cette suppression va de toute évidence
dans le sens d’un appauvrissement de
votre ligne éditoriale, déplore Francine
Guillot (Vincennes). Ou alors il faudra
m’expliquer…»
« moratoire» sur tous les projets
de loi, qui constituent, selon lui,
« du stress sur le dos des patrons ».
Il a notamment cité la complexité
de la réglementation relative aux
réformes des stages et du compte
pénibilité. On le comprend.
Cependant dans ce cadre et celui
de la simplification des procédures administratives, prônées par
le gouvernement, une mesure
stressante, incompréhensible et
ingérable pour tout responsable
d’entreprise, est la rétroactivité
des lois fiscales. Jusqu’à présent
personne n’en a parlé.
Bizarre.
André Le Lan,
Chatou (Yvelines)
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dialogues
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
(1%&D ):-1& -*7"/
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ceux qui, comme Alain Le Bloas
(Guilers, Finistère), voient dans la
suspension du supplément « Géopolitique» «un manque de respect envers
les abonnés de l’édition papier, qui constituent votre lectorat le plus fidèle et qui
désormais liront un quotidien appauvri»,
la directrice rappelle les «trois pages de
récit analysant le bilan des printemps arabes», ou «le supplément de huit pages
consacré à l’Ukraine, son histoire, ses
enjeux économiques et stratégiques». Reste, souligne-t-elle, qu’«une grande majorité de nos lecteurs – et cette part va croissant
– nous lisent à la fois sur le numérique et
sur le papier: nous nous adaptons à leur
rythme et à l’évolution des usages qui glissent vers les mobiles et les tablettes».
Le pari de la nouvelle mouture du Monde (avec ou sans «. fr») qui sera lancée au
printemps? «Accentuer ce qui nous démarque: le décryptage, l’approfondissement,
l’enquête, le reportage de terrain.» Avec à
la clé, promet-elle, «plus d’enquêtes et de
récits utilisant des formats innovants, com-
Europe Après l’économie,
un retour à la politique
Dans la très intéressante tribune
« Pour une union politique de
l’euro» (Le Monde du 18 février),
on est surpris qu’ait été entièrement passée sous silence la présence de l’Europe aux Nations
unies. Une union politique qui ne
serait pas représentée en tant que
telle au Conseil de sécurité serait
un abus de langage.
Cet objectif ne pourra être atteint
qu’au terme d’un processus plus
long que ne l’exigerait la sauvegarde de nos valeurs et de nos intérêts. Une première étape pourrait
consister en une offre française
de partage avec une Allemagne
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me le reportage “Fukushima an III”». Sans
oublier «un riche rendez-vous “géopolitique” dans notre édition numérique du soir,
qui sera lancée au printemps».
Tout cela suffira-t-il à rasséréner Denis
Le Nouvel (Paris), pour qui « le site Lemonde.fr et le journal Le Monde ne sont nullement interchangeables»? Ou Nicole
Dupouy (Fals, Lot-et-Garonne), qui nous
prévient: «Je ne m’abonne pas à la presse
papier pour être obligée de lire une partie
de l’information sur Internet»?
La conversion au numérique est décidément une course de fond… Pour nous comme pour vous, chers lecteurs. Sachez que
ces questions essentielles autant qu’existentielles nous nous les posons nous aussi.
Et que la place qui vous revient – pas seulement comme clients – est un sujet à part
entière, tant dans le « print» que sur le
Web. Nous aurons l’occasion d’en reparler
ici-même.
Quant à la « ligne éditoriale», un comité
de rédaction doit être convoqué prochainement par notre société des rédacteurs sur
ce sujet aussi sensible que stratégique. Un
comité auquel les lecteurs sont virtuellement conviés, par le truchement de leur
médiateur.
A vous de jouer, cher Gérard Gret, vous
qui vous demandiez si «LeMonde ne pourrait pas consulter de temps à autre ses fidèles lecteurs sur leurs attentes? » p
[email protected]
Mediateur.blog.lemonde.fr
@pasgalinier
disposée à assumer ses responsabilités internationales. Le temps
est venu, après un long détour économique, de revenir à la politique.
Robert Toulemon, Paris
Collectivités Diminution
des dépenses et impôts
On vient d’apprendre que Bruxelles somme la France de couper
dans les dépenses publiques. Le
gouvernement a d’ailleurs déjà
annoncé son intention de diminuer les dotations destinées aux
collectivités territoriales, décision
qui devrait être prise en avril,
juste après les élections municipa-
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les. Je pense qu’il serait intéressant de connaître les listes qui,
dans les projets qui seront proposés aux électeurs dans les semaines à venir, vont prendre en compte ces diminutions annoncées. Je
pense hélas qu’elles devraient se
compter sur les doigts d’une
main ! Et si les candidats ne prennent pas en compte cette hypothèse de diminution des dotations
tout à fait vraisemblable, une fois
élus, ils n’auront pas d’autre
choix pour réaliser leurs promesses que d’augmenter les impôts
locaux. C’est triste.
Bernard Combe,
Vincennes
(Val-de-Marne)
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Ensembles
« Jourdain » et « Chalgrin »
Hôtel Cromot du Bourg
Rue Cadet à Paris 9e
APPEL À PROJETS
La Régie Immobilière de la Ville de Paris lance deux appels à projets pour la location de
deux ensembles de locaux recevant du public dénommés « Jourdain » et « Chalgrin »,
situés dans l’hôtel Cromot du Bourg, 9-11 rue Cadet, à Paris 9e, classé monument
historique.
Ces locaux pouvant recevoir du public seront installés pour l’ensemble Chalgrin représentant environ 775 m² utile dans les bâtiments rue et cour (rez-de-chaussée, niveau 1,
entresol et niveau 2) et pour l’ensemble Jourdain représentant environ 760 m² utile
dans la halle et les bâtiments adjacents (rez-de-chaussée et sous-sol) de l’hôtel Cromot
du Bourg.
/<.A @ 8,A2?A;8A?9A92
Le projet du preneur devra être de nature culturelle, ouvert au public et en lien avec
le quartier.
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Les locaux seront mis à disposition du preneur après réhabilitation complète par la
Régie Immobilière de la Ville de Paris de l’hôtel Cromot du Bourg, dont l’achèvement
des travaux est prévu en décembre 2016.
Nos compétences,
notre expérience
et notre goût
du travail soigné
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Eh bien justement, expliquons-nous.
Bimédia, tel est l’enjeu de l’évolution –
de la révolution – en cours. Elle vise à permettre au Monde de « continuer de camper
sur les fondamentaux de son identité éditoriale, assure Natalie Nougayrède. Sur tous
les supports, y compris le journal papier
que nous voulons rendre encore plus rythmé, sélectif, haut de gamme, pédagogique,
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pages.»
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Le bail sera de préférence un bail commercial 3/6/9. Une proposition de variante de
bail pourra être étudiée sous réserve qu’elle respecte l’assujettissement au régime de
la TVA.
Les candidats intéressés sont invités à prendre connaissance de l’intégralité du dossier,
téléchargeable sur la plateforme de dématérialisation de la Régie Immobilière de la
Ville de Paris à l’adresse suivante : www.marches-securises.fr. Pour tous renseignements
complémentaires et demandes de visite du site, vous pouvez nous adresser un mail
à l’adresse suivante : [email protected].
Après examen des capacités financières, des références et des projets des candidats,
les occupants seront sélectionnés sur la base des critères énoncés dans le dossier de
l’appel à projets.
Date limite de remise des dossiers d’offre : 2 juin 2014 à 12 heures.
18
0123
analyses
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
Une certaine nostalgie scolaire du cinéma français
ANALYSE
me d’or à Cannes en 2008. Un prof de français,
aux prises avec une classe de 4e d’un collège du
19e arrondissementde Paris,et lamiseen évidence d’un gouffre culturel entre cet enseignant et
ses élèves.
classe unique d’une petite commune d’Auvergne. Sans éveiller les sentiments nostalgiques
qu’inspire Georges Lopez, Adèle Exarchopoulos, l’Adèle de Kechiche, ou Pierre Rochefort,
l’instit vacataire d’Un beau dimanche, de Nicole
Garcia, partagent cette même vocation.
D’autres films mettent en avant la réussite
pédagogique. La Cour de Babel est ainsi emblématique d’une certaine forme d’empathie éducative. Témoin cette scène tournée à la fin de
l’année scolaire,dans la classe d’accueil d’un collège du 10e arrondissement de Paris. Avant de
partir en vacances, 24 élèves venus des quatre
coins du monde disent au revoir à leur professeure de français. « C’est comme si on était tous
des frères et des sœurs et qu’on se séparait pour
de bon », dit une élève au bord des larmes,
«j’oublierai pas cette année, jamais».
Autre exemple, cette scène de La Fille de nulle
part (2012), le très remarquable film de JeanClaude Brisseau, lorsque le vieux professeur de
maths, solitaire et désenchanté, croise dans la
rue une ancienne élève qui lui rappelle tout ce
qu’elle lui doit. Pour tous les profs du monde, de
tels instants justifient bien des galères.
Il arrive parfois que le cinéma rende compte
de manière plus contrastée du métier d’enseignant. N’épiloguons pas sur les personnages
épouvantables campés dans Les Profs – encore
qu’il serait intéressantde s’interroger sur les raisons du succès de ce film – et souvenons-nous
d’Entre les murs, le film de Laurent Cantet, Pal-
par Franck Nouchi
Service Culture
E
tre et avoir, de Nicolas Philibert
(2002) ; L’Ecole pour tous, d’Eric
Rochant (2005) ; Entre les murs, de
LaurentCantet (2008); La Journée de
la jupe, de Jean-Paul Lilienfeld
(2008); Mademoiselle Chambon, de
Stéphane Brizé (2009); Les Profs, de Pierre-François Martin-Laval (2013); Sur le chemin de l’école,
de Pascal Plisson (2013) ; La Cour de Babel, de
Julie Bertuccelli, qui sort en salles le 12 mars… La
liste des films français récents consacrés d’une
manière ou d’une autre au métier d’enseignant,
et plus généralement aux problèmes pédagogiques,esttrèslongue.Hommeou femme,ces instits ou ces profs « de cinéma », qu’ils relèvent de
la fiction ou apparaissent « pour de vrai » dans
des documentaires, n’échappent que rarement
à l’archétype ou à la caricature.
Il y a ceux qui ont la vocation chevillée au
corps, les missionnaires de l’éducation nationale. Cette image idéale de l’enseignant, il ne faut
pascherchertrèsloinpourla trouver.Elleilluminait Etre et avoir, le magnifique documentaire
de Nicolas Philibert, à travers les faits et gestes
de l’inoubliable Georges Lopez, instituteur de
L’éducation nationale magnifiée
A travers ces films, on constate que l’éducation nationale n’a jamais été aussi magnifiée
par le cinéma qu’en ces temps où sa fonction est
contestée par la société. Dans les années 1960,
quandl’écolesemblaitremplirsonoffice,le cinéma dénonçait la machine à asservir. Aujourd’hui,alorsquetouteslesétudesmontrentqu’elle renforce les inégalités, le cinéma la célèbre
bien plus qu’il ne la critique. Ces films reproduisent, chacun à leur façon, les stéréotypes de l’enseignement d’aujourd’hui.
A l’heure où, un peu partout dans le monde,
l’on réfléchit à une redéfinition du concept de
classeet durôle duprofesseur– doivent-ilsdevenir des « profs coachs» accompagnant leurs élèves multiconnectés vers la connaissance? Fautil privilégier à l’école une culture de la maîtrise
des technologies du numérique, ou au contraire
doit-on s’en tenir à une culture de la résistance à
ces mêmes pratiques? –, la France perd de vue
l’essentiel: son école fonctionne sur des modèles anciens, qui conviennent peut-être encore à
une minorité – notamment les enfants d’enseignants – mais n’intéressent plus la masse des
adultes de demain.
La plupart des cinéastes qui s’intéressent à
ces sujets, comme les pédagogues, les responsables politiques et bien des intellectuels, ont les
yeux rivés, même s’ils s’en défendent, vers cette
écoleutopiquequi accorderaitles grandsprincipes de fraternité, d’égalité et d’altérité à une
conception somme toute classique du rapport
entre les maîtres et les élèves.
C’est, comme souvent, du côté des Etats-Unis
qu’il faut se tourner pour constater à quel point
notre vision est parfois étriquée. Pour vous en
convaincre, allez voir At Berkeley, l’extraordinaire documentaire de Frederick Wiseman.
Vous y verrez des femmes et des hommes réfléchir à l’université de demain. Vous les entendrezparlerpolitique,fiscalité,libéralisme,service public, mixité sociale, disparition des classes
moyennes. Vous assisterez à des discussions
entre profs et étudiants qui ne ressemblent en
rien à ce qui se pratique dans nos universités.
Finis les cours magistraux. Finie une certaine
conception surplombante de l’enseignement.
Au bout des quatre heures que dure la projection – eh oui, c’est long d’entrer dans la complexité de sujets pareils –, vous vous direz que
c’estlà-bas,ducôtéde SanFrancisco,ques’invente le monde de demain. Tandis que nous, en
admirateursde Stefan Zweig que nous sommes,
restons toujours accrochés à la nostalgie d’un
certain monde d’hier. p
[email protected]
PLANÈTE | CHRONIQUE
Lundi
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Votre supplément
Reportage, analyses,
infographies...
Réalisé en partenariat avec la Mission du
centenaire de la première guerre mondiale,
ce supplément est le deuxième d’une série
de dix dossiers spéciaux que Le Monde
publiera tout au long de l’année 2014.
ars
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2009
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Premières mesures
Le nouveau président
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métropolitaine
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montré. Une
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d’une chanteuse.
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a Le grand
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jour. Les cérémonies
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discours d’investituremardi 20 janvier,
toute l’Amérique
la liesse ; les
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un sur le
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ambitions
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force d’invoquer presque modeste.
moment qu’elle
de route. «
pendant
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l’accession
de la nouvelle
jamais un
administration:
de du 18 les festivités de l’investiture,
Lincoln,
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avait lui même King ou John Kennedy,
pendant cent la suspension
des armées, de comman- raconte 20 janvier. Pour Le Monde,
(…)
vertu,
il
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responsable
vingt
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elle
de plus les courants bravons une fois
discours ne
très haut. Le l’arme nucléaire, d’un
de Guantanamo. jours des audiences
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jeune sénateur de – elle a croisé l’actrice les rencontres
glacials et endurons
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les tempêtes à
postérité, mais
afri- le chanteur
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et l’éditorial
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de 47 ans.
venir. » Traduction
il fera date pour pas à la
Harry Belafonte… Bacall,
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miste Alan Greenspan.
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et l’écono- a It’s the economy...
des Etats-Unis.
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à mai 2010.
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Education
L’avenir de
Xavier Darcos
« Mission
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ne cache pas l’éducation
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tâches. L’historien d’autres
de l’éducation
Claude
Lelièvre explique
Ruines, pleurs
et deuil :
dans Gaza dévasté
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REPORTAGE
GAZA
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page 19
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les éclats d’obusIls colmissiles. Ils
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pourront
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faite entre les
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et Xavier Darcos.
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17
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Les Unes du Monde
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Du coup, ces derniers temps,
aucune étude scientifique sur les
PE ne peut être pardonnée. Aussi,
quelques jours après que les travaux de l’InVS eurent alimenté la
chronique, de nombreux journalistes recevaient un communiqué
du « collectif» Sauvons les fruits
et légumes de France. Titre du texte ? « Perturbateurs endocriniens:
le retour au rationnel s’impose! »
Sous-titre: « Il n’est pas imaginable de céder aux marchands de
peur». L’amicale des fruits et légumes relativise les risques posés
par les PE et met en garde: « Ne
pas céder à l’obscurantisme» afin
de ne pas « handicaper la compétitivité de nos entreprises».
D’abord, il est assez cocasse que
les adversaires d’un encadrement
strict des PE en appellent à la rationalité pour faire pièce à des travaux scientifiques, issus de la
démarche la plus rationnelle possible. Ensuite, qu’ils le veuillent ou
non, eux-mêmes et leur famille
sont également affectés par l’exposition diffuse aux PE. Or, convenons-en, contribuer à se mettre
soi-même en danger n’est pas une
attitude très… rationnelle. p
0123
Moscou
Courlande
Mer du Nord
Ile de Man
Dublin
avec le système hormonal.
Il n’est pas très compliqué de
comprendre. Les PE – pesticides ou
non– ne sont pas réglementés en
tant que tels. Le dossier est enlisé à
Bruxelles depuis plus d’une décennie et constitue pour l’Europe,
incapable de se défaire du lobbying intense qui s’exerce sur le
sujet, une formidable faillite. Mais
cela commence légèrement à se
voir. Et pléthore d’intérêts redoutent que des réglementations un
peu trop protectrices (ou trop
contraignantes, selon le point de
vue) ne soient adoptées.
enaire
l du cent
le journa
Vologda
Petrograd
Mer
Baltique
2005
SOURCES : ROLLAND ET AL.,
HUMAN REPRODUCTION
Mardi 11 mars
ourmente
t
la
s
n
a
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s
Les civil
Année
La fertilité masculine
française en baisse
Janv. 1989
IV
s piège des
des frontière
fermeture
En août, la
V
oilà une semaine, dans les
colonnes du Monde, il était
fortement question de sperme. Comme d’ailleurs dans
d’autres journaux, qui présentaient les résultats d’une étude sur
la fertilité masculine en France,
conduite par l’Institut de veille
sanitaire (InVS) et publiée fin
février dans Reproduction. Des
résultats de la même équipe, rendus publics voilà un an, avaient
déjà montré une baisse générale
de la qualité du sperme des Français. Celle-ci s’érode à une vitesse
remarquable. Entre 1989 et 2005,
la concentration en spermatozoïdes a chuté d’un tiers. Si l’érosion
se poursuit à ce rythme, la moyenne française sera au seuil d’infertilité d’ici moins de trente ans.
L’apport de cette nouvelle publication est d’opérer une discrimination régionale, pour tenter de
déterminer des causes à ce déclin.
A grands traits, le résultat est une
suspicion accrue sur les pesticides,
les régions de viticulture (Aquitaine et Midi-Pyrénées) étant parmi
les plus touchées. Certains produits utilisés, rappellent les
auteurs, sont en effet des perturbateurs endocriniens (PE) –cette catégorie de molécules interférant
UK price £ 1,40
dans
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0123
enquête
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
19
La panoplie de
Jean-Michel Coëffeur
saisie par la police.
SICOP
L’étrange
Ariane Chemin
Blois
Envoyée spéciale
A
vec le recul, il y a bien cet
indice, lors de son pot de
départ, à Blois. C’était juste
avant Noël 2009. La Nouvelle République du CentreOuest, une institution qui
rayonne tous les jours d’Angers à SaintAmand, de Niort à Orléans, avait proposé
un plan de départ avec 100 000 euros à la
clé pour les plus anciens. A 58 ans et près
de quarante ans de maison, Jean-Michel
Coëffeur, petit homme au teint pâle et aux
cheveux en brosse, avait saisi l’occasion.
Dans le hall de la locale de « La NR », il avait
mis les formes, Vouvray et champagne,
viande froide et pâtés, mais coupé net à
tout discours ou éloge. « Bon, bon, on boit
un coup ! »
Qu’auraient-ils dit de lui, de toute
façon ? Les pots de départ sont comme les
nécros des journaux, ceux qui disparaissent reçoivent de droit une médaille du
mérite. « Un doux, un gentil », se souvient
Xavier Dutheil, ancien directeur de La NR
dans le Loir-et-Cher, « modeste et réservé»,
ajoute un autre, « correct et consciencieux ». C’était avant tout un « bon collègue », résument de leur retraite Henri
Lemaire et Claude Choplin, toujours partant pour couvrir les sujets dont personne
ne voulait : la fronde de riverains contre
une déviation, un accident ou une inondation, le feuilleton de la liquidation d’une
imprimerie de la région. Epaules rentrées,
petit carnet en poche et lunettes sur le nez,
ilétaitdevenule préposéà la vie municipale et aux associations.
C’est souvent lors du pot de départ, ce
précipité du temps passé, qu’on prend
consciencequ’unvoisinde bureaudemeure parfois un parfait inconnu. Les collègues de La NR ignoraient que « JeanMichel» était le fils d’un cheminot CGT de
Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire),
dépôt mythique du rail où un simple brasero de grévistes peut mettre le feu au
pays. On n’aime pas beaucoup l’étalage
des vies dans ce coin de France calé entre la
Sologne et la Beauce. Les plus anciens se
souviennent que Coëffeur avait commencé comme monteur en un siècle de plomb
où les pages se dessinaient à l’atelier. Un
« seigneur du marbre », raconte Richard
Ode, ancien de La République du Centre,
figure locale devenue collaborateur de
deux journaux gratuits.
A la fin des années 1990, l’informatisation des ateliers rend certains métiers
obsolètes. La NR est une bonne maison,
paternaliste et sociale, qui négocie avec la
CGT le passage de certains gars du marbre
à la rédaction. « J’avais choisi Coëffeur pour
sa bonne culture générale, se souvient Hervé Guéneron, rédacteur en chef de La NR
de 1988 à 2002. Je me souviens des efforts
extrêmes que faisait cet homme humainement touchant. » Après un an de formation à Paris, l’ancien monteur revient à
Blois avec une carte de presse. « Un rêve
d’enfant», selon certains. Pour d’autres, au
contraire, « une grosse gamelle sur le coin
de la boule» et l’impression de « passer son
bac tous les jours ».
Il n’en « dormait pas la nuit », avait-il
confié à l’un de ses supérieurs. Aux confé-
affaire
dujournaliste
braqueur
Fin janvier,
un homme est pris
en flagrant délit par
la police. Déguisé et
armé, c’est son
sixième hold-up,
près de Blois.
«La Nouvelle
République »
découvre,
consternée, que
le braqueur de La
Foir’Fouille et autres
magasins discount
est un retraité de sa
rédaction
rences de presse, « il levait le doigt comme
un élève », se souvient une administrée de
la mairie. Pas du genre à téléphoner les
pieds sur le bureau, Coëffeur. Pas un as du
style, mais une copie propre, à l’heure et à
la longueur, comme on dit dans le jargon.
Jamais de rectif ou presque, un sens de la
précision administratif. Seule la danse et
la musique lui libéraient la plume. « Je lui
avais envoyé un petit mot après un concert
de William Sheller, pour le féliciter sur son
papier», dit encore Richard Ode.
Un de ses confrères se souvient d’avoir
un jour vu Coëffeur demander en rougissant le nom d’un avocat pour l’aider à
régler un problème de surendettement.
Etait-ce l’effet de la carafe de rouge de
L’Agriculture, le tabac en face du journal,
ou de Chez Philippe, à côté ? Un second
avait surpris un jour une brève confidence
surson destin d’éternelpayeurde « prestations compensatoires» aux deux mères de
ses enfants : « De toute façon, je n’ai jamais
d’argent pour moi. » Comme il était gêné
quand sa seconde compagne téléphonait
ou montait le trouver, en plein bouclage,
devant ses collègues de bureau !
Un journaliste à la retraite se lance parfois dans la politique locale, collabore au
journalmunicipal,se passionnepourl’histoire de sa ville ou adhère à une association de philatélistes. Pas Coëffeur. Depuis
son pot de départ, il s’était comme évanoui dans la molle douceur de la Loire. Il
avait retrouvé le comité de lecture de
La NR, sélectionnant avec d’autres les lauréats du prix Roblès du premier roman
organisé par les bibliothèques de Blois.
Mais pour Sauver Mozart, prix 2013, il était
absent. « Ça va, Jean-Michel ? », avait
demandé juste avant Noël Richard Ode, en
le croisant au supermarché Auchan de
Vineuil. « Ça va, je m’occupe», avait répondu Coëffeur.
Ce jour-là,ils n’avaient pas pris le temps
d’évoquer les récents braquages commis
sur cette zone commerciale, justement. Le
fait diversdela rentrée,pourtant: unhomme masqué, armé d’un colt visiblement
chargé, et qui à cinq reprises déjà avait
enfermé les personnels dans les remises
en confisquant leurs portables, avant de
braquerla caisseou le coffre! Le 19 septembre, c’était à La Halle aux vêtements, 535
euros. Le lendemain, chez Gémo, le roi de
la mode bon marché, 1 100 euros. 30 septembre,Vêt Affaires, 2850 euros. 8 novembre, chez Noz, 1 362. 4 décembre, à La Foir’Fouille, 2 200. Moins de 10 000 euros en
tout, et un drôle de circuit, à une époque
où on « monte » sur les bars-tabacs et les
bijouteries. Mais de ça non plus ils
n’avaient pas parlé.
Coëffeur n’avait jamais été très faits
divers. Il redoutait la « tournée», cette pratique des locales où, chaque jour, en cas
d’infolourde,quelqu’unestchargéd’appeler parquet, commissariat et pompiers.
Les procès, petites affaires de stups ou
conduite en état d’ivresse, il les suivait
quand personne ne pouvait couvrir
l’audience.La procureure de la République
de Blois, Dominique Puechmaille, et le
colonel Michel Duclap, il les connaissait
pour les avoir croisés, lors du lancement
de l’opération« Voisinssolidaires». Undispositif sécuritaire créé par la gendarmerie
de Blois, où chacun surveille la maison du
voisin en vacances. Coëffeur avait fait gros
sur cette histoire.
« C’était un localier,
il a braqué en localier »,
soupire Richard Ode,
en vieux routier
du fait div’
Deuxfois, avantNoël,la brigadede sûreté urbaine de Blois avait fait passer dans La
NR un avis de recherche du braqueur. En
octobre, le premier disait : « L’individu
recherché, de type caucasien, est âgé de
50 à 60 ans. Il portait une combinaison de
couleur verte, un bonnet en laine noir et un
imperméable gris. » En décembre, après le
casse de La Foir’Fouille, il avait un peu
rajeuni: « L’auteur du vol a un âge compris
entre 35 et 55 ans (…). L’individu dissimule la
partie inférieure de son visage et porte des
gants.»
Lefameux« individu» saitqu’«unecaisse, ça se braque le soir », comme dans la
chanson d’Eddy Mitchell. Mais il commet
une erreur: revenir deux fois sur les lieux
du crime. Il était tout juste 19 heures, le
20 janvier, sur le parking d’Auchan,
quand, dans une vieille Passat garée
devant le magasin Gémo, un homme ajuste perruque et fausse moustache, enfile
des gants, pose sur son nez un masque de
chantier.Puis la silhouetteglisse une arme
sous sa veste et se dirige vers la grande surface. Une équipe de la brigade de sûreté
urbainedeBloisen civilplanquedansl’ombre. « Putain, c’est lui…, glisse le capitaine
Xavier Counillet à ses trois hommes. On
bouge pas. On attend qu’il sorte de là. »
Deux minutes plus tard, la voiture de
police coupe le chemin de la Passat qui
prend la fuite. Ceinturé, l’homme à la perruque noire n’oppose pas de résistance.
«Bon, c’est pas Mesrine, mais on avait tellement planqué dessus ! », lâche le capitaine
Counillet. Le soir, à Blois, « l’individu »
décline avec calme son identité. Coëffeur,
avec un tréma sur le « e », Jean-Michel,
62 ans. Profession, journaliste retraité de
La NR en Touraine. Signe distinctif, aucun.
Domicile, Vineuil, à trois minutes du
Gémo. « C’était un localier, il a braqué en
localier», soupire Ode en vieux routier du
fait div. Poli mais laconique, le gardé à vue
évoque des problèmes d’argent. Sur les
photos de la police, sa panoplie ressemble,
au choix, à un kit de farces et attrapes ou à
l’attirail d’un braqueur des seventies.
A La NR, la nouvelle laisse la rédaction
sidérée. « Le journalisme mène à tout, mais
là… » A la stupéfaction succède aussitôt
une omerta totale. « Le braqueur solitaire
sous les verrous», titre le quotidien quatre
jours plus tard, sans donner le nom de l’interpellé – c’est la règle « maison ». Mais
sans relever non plus sa profession.
Moquée pour son silence, La NR se venge dans un billet en faisant la leçon aux
« médias nationaux » qui, sur leurs sites
Internet, ont revêtu Coëffeur « d’un croustillant passé de chroniqueur judiciaire »,
« spécialiste des faits divers (…), ce qu’il n’a
jamaisété ». La presse, commele capitaine,
rêvait sans doute d’un autre héros que ce
petit homme passe-muraille. Un truandjournaliste haut en couleur, un Jean
Maraisjouant à la fois Fantômas etFandor.
Pas ce personnage à la Simenon plein de
son enfance, de sa province et de ses fêlures, aujourd’hui en prison à Blois.
S
elon La NR, la maison d’arrêt est « un
établissement(…) de115 places en légère surpopulation, qui ne pose néanmoins pas de soucis de gestion». « Mise en
service en 1943, sous l’occupation allemande », elle abrite « des prévenus (détenus en
attente de jugement) et des condamnés
dont le reliquat de peine n’excède pas, en
principe, deux ans ». Ce n’est pas « un établissement moderne, mais les détenus n’y
sont pas entassés» et « plus de 70 % d’entre
eux y pratiquent une activité rémunérée
dans les 750 m2 d’ateliers de petite mécanique (tuyautage, perçage, montage, assemblage),ouencoredefaçonnage».C’estpointilleux et sec comme un procès-verbal.
C’est l’un des derniers articles, sans masque ni postiche, de Jean-Michel Coëffeur. p
20
0123
0123
Dimanche 9 - Lundi 10 mars 2014
L’AIR DU TEMPS | CHRONIQUE
pa r F l o r e n c e A u b e n a s
«On ne peut pas laisser les gens comme ça»
D
« TANT PIS
POUR TOI,
JE RESTERAI
CONSEILLER »
ans un coin de la pièce, on tendra un
rideau sur un fil à linge. C’est l’isoloir.
Sur la table d’écolier, on poussera la
Marianne en plâtre et son napperon de dentelle
pour poser l’urne et le registre. Ici, «on attend
les élections municipales comme le 14-Juillet, le
seul vote dont on soit encore fier dans les villages», explique la secrétaire de mairie. C’est peu
dire, donc, combien la honte fut cuisante
l’autre jour, à l’annonce des statistiques en Eureet-Loir: la commune faisait partie de ces 30%
de municipalités sans candidat déclaré à une
semaine de la date-limite d’enregistrement.
Soudain, la secrétaire de mairie s’interrompt: «Vous n’allez pas donner le nom du village? On vient de rectifier.» Et elle porte les mains
devant sa bouche, effarouchée et pudique, comme si on venait de surprendre la démocratie
toute nue dans une mairie de campagne.
Un coup de tocsin du préfet a redressé la
situation. Mais le 5 mars, vingt-quatre heures
avant la date-butoir, le compte à rebours court
encore: trois communes restent sans candidat
à la sous-préfecture de Nogent-le Rotrou, toutes
rurales et de moins de 1 000habitants.
A l’entrée des Etilleux, un chemin grimpe sur
la colline et s’arrête dans une cour de ferme: la
propriété d’Omer Huard, conseiller municipal
depuis trente-sept ans. Pour la première fois,
cette année, il a fallu partir à la pêche aux candidats dans la plupart des villages. Le nombre
d’habitants n’a pas vraiment varié (environ 250
ici) – «mais ils vivent autrement» depuis l’aménagement du lotissement et la vente de maisons anciennes à des jeunes couples de partout.
Aucun n’est agriculteur. Le matin, on en voit à
la gare de Nogent, au train de 5 h 30 pour Paris,
retour vers 20 heures au plus tôt. « Je me sens
un grand fauve, partant chasser dans la jungle
pour ses petits», explique un cadre, les yeux
plissés de sommeil.
A bord, ça discute de François Hollande, venu
à Chartres quinze jours plus tôt. «La visite a coûté 60000 euros pour une usine qui n’est même
pas en difficulté! », croit savoir un courtier, qui
a pris un emprunt sur trente et un ans dans un
hameau voisin. Par contraste, l’informaticien
s’émeut de son maire «qui nous a donné son
numéro de portable et passe déposer les documents administratifs à l’apéritif. On se sent quelqu’un». On lui a proposé d’être candidat « comme tout le monde». Et «comme tout le monde»,
il a refusé. « Je place la famille en premier, puis le
boulot.» Aux Etilleux, un ouvrier a accepté au
dernier moment de conduire une liste, la seule.
Il hésitait, des licenciements se préparent dans
son entreprise, au Theil. Pour la première fois,
les agriculteurs ne sont plus majoritaires parmi
les candidats, selon la « sous-préf’» de Nogent.
La liste des Etilleux a été déposée vers 10 heures, le 5 mars, un peu avant celle de Michel
Ricoil, maire sortant de Luigny, 428habitants.
Ce village-là est collé à l’autoroute, à 30km de
Chartres. « Une position idéale», assure
M.Ricoil, qui est garagiste. Il y a vingt ans, le
maire d’alors lui avait promis un terrain stratégique entre le péage et le bourg, avant de le
céder à un fabricant de piscines. Michel Ricoil
crie à l’injustice. La guerre est déclarée.
« Je ne veux plus que tu sois maire »
«Pour notre victoire, en 2007, on a bu le champagne comme à la télé », se souvient un de ses
colistiers. C’était juste avant que le percepteur
apprenne à la nouvelle équipe le surendettement du village, des emprunts inconsidérés
pour le cimetière ou la salle des fêtes. M.Ricoil a
définitivement l’impression de s’être fait avoir.
Il redresse les comptes, mais s’épuise; le garage,
la mairie, les enfants. Pas question d’un nouveau mandat. Personne d’autre ne veut s’y risquer. Il rechigne, mais replonge, à 44 ans, avec
l’impression d’«un pistolet sur la tempe», mais
«gêné de laisser les gens comme ça ».
Le soulagement est palpable à la permanence de la mairie. On y passe «quand on ne sait
pas où aller», affirme un grand maigre aux
yeux très bleus. Par exemple, comment changer un abonnement de portable? Ou bien calculer les points sur le permis? « Vous imaginez si
on est annexé par une grosse bourgade? Ici, on
nous répond, on vaut encore quelque chose.»
Le 6 mars, à trois heures de la clôture des listes, celle d’Argenvilliers, 368 habitants, n’est pas
complète. Jean-Paul Fleury, le maire, 80ans, est
près de la cheminée avec sa femme, 76ans.
Elle attaque: «Tu le sais très bien.»
Lui: «Quoi?».
– Je ne veux plus que tu sois maire.»
Elle le répète depuis 1971, sa première candidature. A l’époque, on se battait pour être sur
les listes, il y en avait plusieurs, c’était sanglant.
On accrochait des vestes devant la maison d’un
adversaire, signifiant: «Tu vas perdre.»
«L’enjeu, c’était l’honneur, dit M.Fleury. Il en
avait la passion, à en laisser couler la ferme
dans les années 1980. Les gens le disaient par
derrière. J’aurais été millionnaire sans ça, mais
on s’en est tiré, tu vois, Josette.
– Grâce à qui ? On ne sortait pas, les gosses
n’auraient jamais voyagé sans les écoles.
– Je suis un salopard, c’est ça ?»
Dans le village, on le traite plutôt de despote.
Il s’en vanterait presque. Elle se surprend à le
défendre: «En tout cas, ils ont toujours voté
pour toi.» Puis: « Moi, je partirais bien.»
– Tu vas aller où avec tes 600euros de retraite?»
Jean-Paul Fleury a fini par passer la main à
un professeur de lycée, Pascal Mellinger, bientôt à la retraite, comme 80% environ des candidats enregistrés à Nogent. «Tant pis pour toi, je
resterai conseiller», dit M.Fleury, devant la cheminée. Elle: « Il fallait que je t’aime.»
A 18heures, le 6mars, toutes les listes d’Eureet-Loir avaient trouvé candidat. p
[email protected]
Et la gagnante est...
Rose, retraitée girondine
règlement du jeu était rédigé de
manière lisible et les documents
commerciaux ne trompaient personne. La Libournaise a fait
appel. « Depuis janvier 2010, la
chambre civile de la Cour de cassation est très claire, fait valoir
Me Gérard Danglade. Seule l’existence de l’aléa affectant l’attribution d’un prix mis en évidence dès
l’annonce du gain permet de libérer la société de ses obligations.»
Pas très visible
Un aléa qui doit figurer dès la
première lettre et doit être visible
dès le premier coup d’œil. A
défaut, l’engagement – on parle
de quasi-contrat – est né et
devient irrévocable. Les juges de
la première chambre civile de la
cour d’appel de Bordeaux ont examiné à la lettre le publipostage
qui jouait sur les grosseurs de
caractères, sur les mots et leurs
différentes acceptions.
Or le code de la consommation
stipule que l’« organisateur d’une
loterie qui annonce un gain à une
personne dénommée sans mettre
en évidence l’existence d’un aléa
s’oblige de ce fait purement volontaire à le délivrer». Les juges n’ont
pas trouvé cet aléa très visible ou
lisible. Dans leur arrêt du
27 février, ils notent que « la première lecture amène bien au
contraire un consommateur
moyen à être convaincu que le
gain de 52 000 euros est acquis
sous la seule réserve de répondre
dans le délai de 48heures ». La lecture du règlement, et donc de
l’aléa, en petits caractères, est en
effet rendue difficile par le nombre d’annonces qui l’entoure. La
retraitée a obtenu gain de cause.
La société AMA est condamnée à
payer les 52 000euros promis.
Avec les intérêts. p
★★★
LE PARISIEN
“Meryl Streep irrésistible.”
LE POINT
“Le scénario est un chef-d’œuvre.”
AUFEMININ.COM
“Furieux et impressionnant.”
OUEST FRANCE
“Une Meryl Streep puissante et dévorante.”
MADAME FIGARO
“Une chronique familiale quatre étoiles aussi saignante qu’émouvante.”
GRAZIA
“C’est drôle, fin et cinglant. Un vrai combat de coqs se joue entre les deux actrices.”
ELLE
“Une mère manipulatrice interprétée avec beaucoup de justesse par une formidable actrice : Meryl Streep.”
EUROPE 1
“Le casting est impeccable et permet un duel au sommet entre Meryl Streep et Julia Roberts,
qui se jettent l’une sur l’autre comme des fauves.”
LE CANARD ENCHAÎNÉ
“Meryl Streep est une nouvelle fois magistrale (...) Julia Roberts, dans le rôle de la « fille préférée »
divorcée, montre qu’elle n’a plus rien de la petite fiancée de l’Amérique. Tant mieux.”
★★★★ GALA
“Streep et Roberts sont époustouflantes. Leur face-à-face dans des scènes d’anthologie est bouleversant.”
VERSION FEMINA
© WBD TOUS DROITS RÉSERVÉS. CRÉDITS NON CONTRACTUELS.
C
e matin d’octobre2010,
Rose a réellement cru que la
chance avait enfin frappé à
sa porte. Dans la boîte aux lettres
de cette retraitée girondine, un
courrier d’une société de vente
par correspondance lui annonce
qu’elle est l’heureuse gagnante
d’un chèque de 52000euros. Elle
lit et relit cette missive nominative, portant la mention « allocation nationale du gain » avec, en
surimpression, un tampon rouge
et rond « Envoi certifié », comparable à un cachet officiel.
Fidèle cliente, vivant seule avec
une petite retraite, Rose est intimement persuadée d’avoir gagné
et commence même à faire quelques projets. Modestes. Rembourser une dette, améliorer le quotidien, faire quelques cadeaux.
Comme indiqué sur le document,
elle répond dans les 48 heures.
Hélas, elle est vite rattrapée par la
réalité. Tout ce qu’elle a gagné,
c’est en fait le droit de… participer
à un tirage au sort.
« C’est assez injuste. Certains
sont des proies faciles et ne voient
pas qu’il s’agit d’un jeu, d’une opération promotionnelle», déplore
Me Gérard Danglade, conseil de la
septuagénaire. L’avocat a déjà
dans sa manche plusieurs décisions de justice, allouant des dommages et intérêts à ses clients
nourris de faux espoirs par ce
genre de courriers. Depuis des
années, les sociétés incriminées
réfutent toute pratique commerciale trompeuse et estiment que
leurs documents sont clairs et
qu’elles n’ont pris aucun engagement ferme de délivrance de gain.
Mais la retraitée et son conseil
ont voulu prendre la société AMA
à son propre jeu afin de se faire
remettre le gain promis. Direction le tribunal de grande instance de Libourne qui les a déboutés
le 4 octobre 2012. Pour les juges, le
Florence Moreau
(Bordeaux, correspondance)
Société éditrice du « Monde » SA
Président du directoire, directeur de la publication Louis Dreyfus
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pTirage du Monde daté samedi 8 mars 2014 : 336 923 exemplaires.
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2
JOHN W ELLS
ACTUELLEMENT AU CINÉMA
/UnEteAOsageCounty