B4360

Hélices marines
par
Max AUCHER
B 4 360
2 - 1996
Ingénieur Général de l’Armement
Ancien Directeur du Bassin d’Essais des Carènes de Paris
1.
1.1
1.2
1.3
1.4
Caractéristiques géométriques et hydrodynamiques....................
Définition de la géométrie d’une hélice.....................................................
Caractéristiques de fonctionnement d’une hélice ....................................
Hélice derrière la carène d’un navire .........................................................
Hélice optimale ............................................................................................
2.
2.1
2.2
2.3
Propulseurs dérivés de l’hélice ............................................................
Hélices à pales orientables .........................................................................
Hélices sous tuyère......................................................................................
Propulseurs non conventionnels................................................................
—
—
—
—
11
11
12
15
3.
3.1
3.2
3.3
Cavitation...................................................................................................
Considérations théoriques..........................................................................
Hélices supercavitantes...............................................................................
Tunnels de cavitation ..................................................................................
—
—
—
—
16
16
19
20
4.
4.1
4.2
—
—
21
22
4.3
Excitations des vibrations de navire par les hélices......................
Excitations des vibrations transmises par la ligne d’arbres ....................
Excitations des vibrations de coque engendrées par les fluctuations de
pression de l’hélice......................................................................................
Remèdes pour minimiser les excitations des vibrations .........................
—
—
25
28
5.
5.1
5.2
Projet d’hélice...........................................................................................
Données de départ ......................................................................................
Différentes étapes du calcul........................................................................
—
—
—
29
29
30
6.
6.1
6.2
6.3
6.4
6.5
Fabrication des hélices...........................................................................
Matériaux pour hélices................................................................................
Fonte des hélices .........................................................................................
Usinage des pales........................................................................................
Contrôle des pales. Tolérances...................................................................
Contraintes admissibles dans les pales.....................................................
—
—
—
—
—
—
31
31
32
32
32
32
7.
7.1
7.2
Entretien des hélices...............................................................................
Diverses causes de détérioration des hélices ...........................................
Opérations d’entretien ................................................................................
—
—
—
34
34
34
8.
8.1
8.2
8.3
8.4
Bruit d’hélice et vibrations des pales.................................................
Bruits d’hélice (bruit propre, bruit rayonné)..............................................
Réduction des bruits d’hélice .....................................................................
Vibrations des pales ....................................................................................
Chant des hélices.........................................................................................
—
—
—
—
—
34
34
36
36
36
9.
9.1
9.2
9.3
Annexe : théorie tourbillonnaire de l’hélice.....................................
Approximation de la ligne portante ...........................................................
Calcul par la surface portante.....................................................................
Théorie de l’actuator ...................................................................................
—
—
—
—
37
37
39
40
Pour en savoir plus...........................................................................................
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—
4
—
4
—
8
—
9
Doc. B 4 360
B 4 360 − 1
HÉLICES MARINES
_____________________________________________________________________________________________________________________
’utilisation de l’hélice pour la propulsion des navires a vu le jour dans la première moitié du 19 e siècle lorsque les machines à vapeur alternatives eurent
atteint un degré de fiabilité et un rendement acceptables pour pouvoir
concurrencer les bateaux à voiles pour lesquels l’énergie du vent était gratuite.
Ce n’est que dans la deuxième moitié du 19 e siècle que l’hélice l’emporta
définitivement sur les voiles et les roues à aubes, ces dernières n’étant plus guère
utilisées de nos jours que dans quelques cas pour la navigation intérieure dans
un but plutôt touristique.
Plusieurs pays revendiquent la paternité de l’invention de l’hélice dans les
années 1830. Côté français, l’inventeur de l’hélice est Frédéric Sauvage dont le
brevet a été déposé en 1832.
Les premières hélices n’étaient ni plus ni moins qu’une vis d’Archimède à deux
filets dont la longueur était égale au pas géométrique. Le commandant d’un
navire qui avait vu son hélice réduite accidentellement à la moitié de sa longueur
constata, non sans surprise, que la vitesse de son navire en était augmentée.
Ainsi, par modifications successives de la forme des pales et de leur nombre
résultant d’essais sur modèles et sur bateaux réels, l’hélice aboutit aux formes
actuelles. Sauf pour des applications spéciales, l’hélice est l’organe propulsif de
presque la totalité des bateaux depuis le petit bateau de plaisance motorisé
jusqu’aux énormes pétroliers de plusieurs centaines de milliers de tonnes.
De nombreux essais d’hélices modèles ont permis de définir leurs caractéristiques hydrodynamiques (poussée, rendement) en fonction du nombre et de la
géométrie des pales. Ces résultats, publiés sous forme de courbes, permettent
de définir rapidement la géométrie des hélices répondant en première approximation à des spécifications données.
Deux problèmes importants font encore aujourd’hui l’objet de nombreuses
recherches destinées à améliorer les performances des hélices : la cavitation et
les vibrations de navires induites par le fonctionnement de l’hélice. Le développement de l’hydrodynamique appliquée aux hélices et des calculateurs de plus
en plus puissants permet d’aborder ces deux problèmes d’une façon plus rationnelle et de définir les tracés d’hélices donnant le meilleur compromis entre
diverses contraintes (rendement, cavitation, vibration, tenue mécanique, etc.).
C’est ce que nous allons plus particulièrement développer dans cet article.
L
Notations et Symboles
Symbole
Unité
Ae /A 0
C
CD
Définition
Symbole
longueur de la corde d’une section
de pale
coefficient de traînée visqueuse
ρ
2
des pales C D = R v ---- A e V R
2
coefficient de portance d’une section
ρ
2
de pale C L = L ---- CV R
2
La notation adoptée est celle normalisée par les Conférences Internationales des
Bassins de Carènes (ITTC).
Notations : x valeur moyenne, x valeur fluctuante, x p relatif à l’hélice
(propeller ) et x d à la tuyère (duct ), x* grandeur adimensionnelle.
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Unité
Définition
fraction de surface développée des pales
m
CL
Notations et Symboles
Cp
CQ
coefficient de pression
C
p
p – p∞
= ----------------ρ
---- V 2
2
coefficient de charge de couple
de l’hélice
C
Q
Q
= -------------------------3
ρ πD 2
---- ----------- V 0
2 4
La notation adoptée est celle normalisée par les Conférences Internationales des
Bassins de Carènes (ITTC).
Notations : x valeur moyenne, x valeur fluctuante, x p relatif à l’hélice
(propeller ) et x d à la tuyère (duct ), x* grandeur adimensionnelle.
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Notations et Symboles
Symbole
Unité
CT
Notations et Symboles
Définition
coefficient de charge (de poussée)
de l’hélice
T
C T = ------------------------2
ρ πD 2
---- ----------- V 0
2 4
Symbole
Unité
VA
m/s
vitesse d’arrivée d’eau à l’hélice
[VA = V0(1 – w )]
VR
m/s
vitesse relative section de pale/fluide
m
épaisseur locale d’une section de pale
Hz
fréquence d’une vibration
Z
D
m
diamètre de l’hélice
e
F
cv
puissance absorbée par l’hélice
(1 cv = 0,736 kW)
f
J0
JA
i
coefficient d’avance relatif à la vitesse
d’arrivée d’eau à l’hélice
V0 ( 1 – w ) VA
= --------J A = --------------------------nD
nD
p
coefficient de pression K p = -------------------ρn 2D 2
coefficient de couple de l’hélice
Q
K Q = -------------------ρn 2D 5
Kp
KQ
KT
coefficient de poussée de l’hélice
T
K T = ------------------ρn 2D 4
L
N
N (n )
tr/min
nombre de pales
f0
coefficient (ou degré) d’avance
V0
de l’hélice J 0 = ----------nD
Définition
taux de cambrure d’une section
(f0 = fmax /C )
m
degré
immersion d’un point de l’hélice
ou inclinaison d’une pale
p
Pa (N/m2)
P∞
Pa
pression en milieu non perturbé
pv
Pa
pression de vapeur du fluide
r
m
rayon définissant une section de pale
rh
m
rayon du moyeu de l’hélice (r h = d h /2)
s
m
abscisse le long d’une section de pale
p0
pression (ou rang d’un harmonique)
pas réduit de l’hélice (p 0 = P /D )
w
sillage moyen dans le plan de l’hélice
wp
harmonique de rang p du sillage au
rayon r
x
rayon adimensionnel (x = r /R0)
α
rad
angle d’attaque d’une section de pale
portance d’une aile
β
rad
angle d’avance (tan β = V0 /x πnD )
nombre de tours par minute de l’hélice
(n en tr/s)
βi
rad
angle de pas hydrodynamique
δ
rad
angle de devers d’une pale
P
m
pas géométrique de l’hélice
Q
tf · m
couple résistant de l’hélice
(1 tf · m = 9,8 × 103 N · m)
η0
rendement de l’hélice en eau libre
η id
rendement idéal sans frottement
visqueux des pales
R
m
distance d’un point quelconque à l’axe
de l’hélice
ηh
RH
tf
résistance hydrodynamique du navire
(1 tf = 9,8 × 103 N)
R0
m
rayon de l’hélice
Rv
N
résistance visqueuse de la surface
des pales
S
m
distance d’un point quelconque
à un point de la surface des pales
T
tf
poussée de l’hélice (1 tf = 9,8 × 103 N)
Ua , U i, U t
m/s
U*
V0
m/s
rendement de la coque
θ
rad
ρ
kg/m3
σ0
σ
angle polaire d’un point d’une pale
par rapport à la verticale
masse volumique de l’eau
nombre de cavitation
ρ  2
 σ = ( p – p )  --- V
v
 0
 2  0
N/m2
nombre de cavitation rapporté
à la vitesse relative V R
ou contrainte du matériau d’une pale
vitesses induites par le fonctionnement
de l’hélice (figure 4)
Φ0
rad
angle de pas géométrique
vitesse adimensionnelle (U * = U/V 0)
Φe
rad
angle de pas effectif
ω
rad/s
vitesse en milieu non perturbé
La notation adoptée est celle normalisée par les Conférences Internationales des
Bassins de Carènes (ITTC).
Notations : x valeur moyenne, x valeur fluctuante, x p relatif à l’hélice
(propeller ) et x d à la tuyère (duct ), x * grandeur adimensionnelle.
vitesse angulaire
La notation adoptée est celle normalisée par les Conférences Internationales des
Bassins de Carènes (ITTC).
Notations : x valeur moyenne, x valeur fluctuante, x p relatif à l’hélice
(propeller ) et x d à la tuyère (duct ), x * grandeur adimensionnelle.
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B 4 360 − 3
HÉLICES MARINES
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1. Caractéristiques
géométriques
et hydrodynamiques
1.1 Définition de la géométrie d’une hélice
Initialement, les pales d’hélice étaient constituées d’une fraction
de surface hélicoïdale à pas constant. Pour des questions de vibrations et de cavitation (§ 3 et 4), le pas géométrique de la pale d’hélice
peut varier entre le moyeu et l’extrémité des pales.
D’un point de vue purement géométrique, une hélice est constituée de Z pales identiques également espacées.
Les pales ont des formes variées (figures 1 et 3). En général, vue
de l’arrière, la forme d’une pale n’est pas symétrique par rapport à
un rayon : elle présente un devers plus ou moins prononcé. Vue par
le travers, la pale est, en général, également inclinée vers l’arrière.
D’une façon plus précise, la géométrie de la pale est définie à partir
d’une courbe rencontrant l’axe appelée génératrice. Cette courbe
définit généralement le milieu des sections de la pale (mais ce n’est
pas une règle), sections qui sont empilées les unes sur les autres
suivant la loi définissant la valeur du pas P (r ) fonction du rayon r.
Compte tenu du mouvement de rotation de l’hélice, une section
de pale est définie par le développement de l’intersection de la
pale par un cylindre de rayon r centré sur l’axe. Chaque section
développée a la forme d’un profil d’aile dont la longueur C (r ) est
définie par sa corde, droite joignant le bord d’attaque au bord de
fuite du profil (figure 2). L’angle Φ 0 (r ) de cette corde avec le plan
perpendiculaire à l’axe de l’hélice définit l’angle de pas hydrodynamique.
Le pas géométrique est alors défini par la relation :
Figure 1 – Forme générale d’une hélice
P (r ) = 2πr tan Φ 0 (r )
La forme de la section de pale est elle-même définie par :
— la loi d’épaisseur e (s ) en fonction de l’abscisse s de la corde
(E entrée ou bord d’attaque, S sortie ou bord de fuite) ;
— la ligne moyenne, courbe passant à mi-épaisseur qui définit la
cambrure de la section f (s ) : f 0 = f max /C.
En définitive, la forme géométrique d’une pale d’hélice est donc
définie à chaque rayon r :
— par la génératrice fixant les angles de devers δ et d’inclinaison i ;
— par la longueur de corde C (r ) ;
— par le profil de la section définie par la loi d’épaisseur e (s ) et
la loi de cambrure f (s ).
Enfin, les caractéristiques générales de l’hélice sont définies
par :
— le nombre de pales Z ;
— le diamètre D (rayon R 0) ;
— le diamètre du moyeu d h (rayon r h) ;
— le pas géométrique moyen P =
P ( r )dr
------------------------- ;
(R 0 – r h )
— le pas géométrique réduit : p0 = P /D ;
A
1
— la fraction de surface -------e- = ------------------------------- ⋅
A0
π ( R 20 – r h2 )
C ( r )dr .
Nota : souvent, on remplace le pas réduit p 0 par sa valeur p 0,7R à r = 0,7R 0 , l’écou0
lement autour de la section à 0,7 R 0 donnant une bonne image de l’écoulement autour
de la pale. La longueur de la corde est donnée par :
2,15 A e
- -----------D- 0,7R # ---------Z A0 C
0
B 4 360 − 4
Les formes des pales d’hélices peuvent être très variées comme
le montre la figure 3. Le diamètre D d’une hélice peut varier dans
de grandes proportions de D = 0,20 à 0,40 m pour les bateaux de
plaisance à D = 10 à 11 m (poids 65 t) pour les pétroliers géants. Le
pas réduit P/D varie de 0,6 à 1,4 et la fraction de surface est en
moyenne de 0,6 à 0,8. Quant au nombre de pales, il est le plus souvent égal à 4 ou 5, mais peut atteindre 7 lorsque des problèmes de
vibrations excitées par l’hélice sont à craindre. Enfin, la vitesse de
rotation des hélices (nombre de tours) varie comme l’inverse du
diamètre, la vitesse tangentielle πnD en bout de pales étant de 30
à 45 m/s dans les conditions normales d’utilisation.
1.2 Caractéristiques de fonctionnement
d’une hélice
1.2.1 Principe de fonctionnement
R0
rh
Figure 2 – Définition de la géométrie d’une pale
La théorie de l’hélice est semblable à la théorie de l’aile portante
d’envergure limitée en aérodynamique mais plus compliquée car il
faut tenir compte des interactions entre les pales et du caractère tourbillonnaire de l’écoulement en aval de l’hélice. L’Annexe (§ 9) donne
quelques renseignements sur le calcul théorique des hélices
marines, calcul qui reste l’affaire de spécialistes. Cependant, de nombreux résultats expérimentaux mis sous forme de courbes permettent de résoudre la plupart des problèmes pratiques, et les principes
de base des calculs peuvent être expliqués simplement.
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_____________________________________________________________________________________________________________________ HÉLICES MARINES
Figure 3 – Différentes formes typiques d’hélice à pales orientables
de 5 à 6 m de diamètre (doc. kaMeWa, Suède)
Figure 4 – Définitions des différentes grandeurs intervenant
dans le fonctionnement hydrodynamique d’une section de pale
■ Triangle des vitesses
Considérons une hélice se déplaçant à la vitesse V0 dans une eau
au repos avec une vitesse de rotation ω = 2πn, n étant le nombre
de tours par seconde. Du point de vue calcul, le problème est équivalent à celui d’une hélice fixe placée dans un écoulement uniforme
de vitesse V 0 . À la section développée au rayon r, la vitesse axiale
est V 0 (axe Ox ) et la vitesse tangentielle V t = 2 πnr (figure 4). V0 et
V t définissent la vitesse relative V 0R de l’écoulement non perturbé,
V0R faisant un angle β (r ) avec Oz ; β (r ) est appelé angle d’avance :
V0
V0
= ---------------tan β ( r ) = -------------2πnr
πnDx
r
x = ------R0
Pour fournir une poussée T, l’hélice accélère l’eau qui la traverse
et en même temps lui communique un mouvement de rotation. Le
supplément de vitesse communiqué à l’eau (vitesse induite) est
défini à mi-corde de la section considérée par une vitesse axiale
induite Ua (r ) et une vitesse tangentielle U t (r ). Pour simplifier, on
suppose que C/r n’est pas trop élevé, disons C/r < 0,5 si bien qu’on
peut considérer U a et U t comme étant constants pendant la traversée de l’hélice par l’eau. Avec cette restriction, la vitesse relative
V R eau/section (figure 4) est définie par :
— une composante axiale : V 0 + U a (r ) ;
— une composante tangentielle : 2πnr – U t (r ) ;
— une vitesse relative V R (r ) faisant un angle β i (r ) avec l’axe Ox
de l’hélice. L’angle β i (r ) est appelé angle de pas hydrodynamique :
avec
V R2 = [ V 0 + U a ( r ) ]2 + ( 2πnr – U t )2 # V 02 + ( 2πnr ) 2
On démontre (§ 9) que l’hélice à pas constant est l’hélice ayant
le meilleur rendement idéal η id en l’absence de frottement de l’eau
sur les pales, quand on se fixe T (poussée), V 0 et n. De plus, la
■ Poussée
La vitesse relative V R fait un angle α avec la direction de la corde
(figure 4), angle appelé angle d’attaque. L’élément de pale compris
entre r et r + dr est alors soumis à une force de portance dL(r ) proportionnelle à V R2 , calculable par la théorie des ailes portantes dès
que l’on connaît α et la cambrure f max de la section :
f max
1
dL ( r ) = ---- ρ C V R2 2 π α + k ------------ d r
C
2
avec k = 0,8 à 0,9.
À cette force de portance dL(r ) normale à V R , il faut ajouter la
traînée de frottement dFv de l’eau sur la surface de la pale, cette traînée de frottement étant sensiblement parallèle à la direction de la
corde ou plus exactement normale à dL par définition (figure 4).
Finalement, les forces hydrodynamiques s’exerçant sur les Z sections de pales comprises entre r et r + dr donnent :
— en projection sur Ox, une poussée :
dT
-------- dr = Z [dL(r ) cos β i – dF v (r ) sin β i] dr
dr
— et un couple autour de Ox :
dQ
--------- dr = Z [dL(r ) sin β i + dF v (r ) cos β i] r dr
dr
L’intégration entre le moyeu et l’extrémité de pale donne la poussée T fournie par l’hélice et le couple Q résistant de l’hélice :
T =
Q =
vitesse induite U i = U a + U t est normale à V R (et en général,
beaucoup plus petite que V R sauf pour V 0 # 0), c’est-à-dire
U a /U t = tan β i . Toujours pour une hélice à pas constant en courant
uniforme, Ua et U t sont des fonctions linéaires de la somme des
poussées (dT/dr ) dr fournies par toutes les pales, ce qui simplifie
le problème du calcul de l’hélice si l’on connaît la relation entre
dT/dr et Ua , U t (§ 9). Si le pas de l’hélice n’est pas constant ou si
le courant n’est pas uniforme, les relations ci-avant ne sont pas
vérifiées mais peuvent servir de point de départ du calcul de
l’hélice.
R0
rh
R0
rh
dT
-------- d r
dr
dQ
--------- d r
dr
Le rendement de l’hélice est alors :
TV 0
η 0 = ------------------2πnQ
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B 4 360 − 5
HÉLICES MARINES
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La figure 5 donne l’allure de la répartition typique de la poussée
en fonction du rayon r (il s’agit d’une valeur moyenne). De plus, par
suite de la cambrure des sections de pale, la portance dL (r ) n’est
pas nulle pour α = 0, mais pour un angle ∆α e (figure 4) lié à la géométrie de la cambrure, qui définit le pas effectif Φ e = Φ 0 + ∆α e . Ainsi,
pour une hélice à pas constant, la poussée n’est pas nulle pour
V 0 = nP, mais pour V > V 0 .
Du point de vue rendement, les pertes sont dues principalement :
— à la perte fonction de U a ;
— à la perte par énergie de rotation U t ;
— à la perte par frottement des pales dans l’eau.
Pour une hélice adaptée à un problème donné, ces pertes sont
fonction du coefficient de charge C T de l’hélice (figure 6).
Figure 5 – Courbe de répartition type de la poussée
en fonction du rayon
1.2.2 Coefficients caractéristiques
Le schéma de fonctionnement de l’hélice ayant été décrit comme
ci-dessus, on définit pour les applications pratiques des caractéristiques de fonctionnement au moyen de nombres sans dimensions
valables pour toutes les hélices géométriquement semblables. Ces
nombres sans dimensions sont :
•
•
•
•
V0
J 0 = -------nD
T
K T = -------------------2
4
ρn D
Q
K Q = -----------------2 5
ρn D
J0 K T
η 0 = ---------------2πK Q
coefficient d’avance (lié à l’angle β ) ;
coefficient de poussée ;
coefficient de couple ;
rendement en eau libre.
Nota : dans la marine, qui est conservatrice, et compte tenu des ordres de grandeur
rencontrés, T est généralement exprimé en tonnes, Q en t · m, D en m et n en tr/s. Dans
ces conditions, ρ = 0,1045 = 1,025/g en eau de mer. Si T est exprimé en kN, Q en kN · m,
alors ρ = 1,025 t/m3.
Figure 6 – Diverses sources de pertes pour une hélice
(4-5 pales, A e /A 0 = 0,5 à 0,7)
Pour certaines applications, il est commode de parler de coefficients de charge en prenant comme référence de vitesse V 0 au lieu
de πnD. Ces coefficients de charge sont définis par :
8 KT
T
C T = -------------------------- = ----- ------2
π J2
ρ πD
2
0
---- ----------- V 0
2 4
8 KQ
Q
C Q = -------------------------- = ----- -------3
π J2
ρ πD
2
0
---- ----------- V 0
2 4
Les coefficients K T et K Q , fonction de J 0 , dépendent de la géométrie des pales, les paramètres les plus importants étant dans
l’ordre : le pas réduit p 0 = P /D, le nombre de pales Z puis la fraction
de surface Ae /A 0 et, à un degré moindre, la forme des pales.
Des essais effectués sur des modèles d’hélices en faisant varier
systématiquement certains paramètres géométriques ont permis
de tracer des réseaux de courbes donnant les coefficients K T , K Q
et le rendement η 0 en fonction de J 0 . Ces réseaux de courbes sont
très utilisés pour définir les caractéristiques géométriques générales lors d’un projet d’hélice. Les plus connus de ces essais systématiques concernent les hélices dites hélices Troost-série B [1]
essayées au Bassin d’Essais de Carènes de Wageningen (NSMB)
(Pays-Bas). Chaque série comporte 5 hélices de pas réduit
P/D = 0,6-0,8-1,0-1,2 et 1,4 et au total 120 hélices ont été essayées
en faisant varier le nombre de pales Z = 3, 4, 5 et 6 et la fraction de
surface des pales entre 0,4 et 1,0 selon le nombre de pales. La
figure 7 donne les courbes caractéristiques des hélices à 4 pales et
une fraction de surface voisine de 0,7. On remarque sur ces
courbes que le rendement maximal de l’hélice croît au fur et à
mesure que le pas réduit P/D croît. Au-delà de P/D = 3,0 (cas des
hélices aériennes), le rendement maximal diminuerait.
B 4 360 − 6
Figure 7 – Courbes caractéristiques K T , K Q , 0 des hélices B4-70
(Z = 4 pales, A e /A 0 = 0,70), avec en médaillon le contour développé
d’une pale (d’après NSMB)
Pour ces mêmes hélices, il existe également des caractéristiques
pour la marche arrière V 0 et n < 0 (figure 8) et également pour
n’importe quelle combinaison de V 0 et n (figure 9). Dans ce cas,
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
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Figure 8 – Courbes caractéristiques des hélices B 4-70
en marche arrière (d’après NSMB)
pour éviter d’avoir des valeurs J = V /nD = ∞ pour n = 0, on prend
comme paramètre l’angle d’avance β (figure 4) défini par :
V0
tan β = ---------------------0,7 πnD
Toutes les caractéristiques K T (J 0), K Q (J 0) obtenues sur modèles
par le NSMB ont été mises sous forme de développements en série
de la forme :
Ae x P y z
K T = ∑  --------  ----- J 0
 A0   D 
Figure 9 – Courbes caractéristiques des hélices B 4-70
pour V 0 et n quelconques (d’après NSMB)
x, y, z
comprenant environ 40 termes qu’il n’est pas question de reproduire
ici [3]. La mise en mémoire de ces coefficients permet d’effectuer
des calculs sans avoir à se reporter aux courbes.
Toutes les caractéristiques ont été obtenues par des essais
d’hélices modèles ( D = 0,18 à 0,25 m) translatées à vitesse V 0
constante en eau au repos (figure 10). On désigne les caractéristiques ainsi obtenues par caractéristiques d’hélice en eau libre ou
d’hélice isolée.
Ces caractéristiques servent de base à l’exploitation des essais
d’autopropulsion, hélice derrière la carène (figure 11).
1.2.3 Sillage d’un navire
On donnera plus loin au paragraphe 1.3 la définition du sillage.
Disons simplement que, lorsque l’hélice est placée derrière un
navire, la vitesse d’arrivée d’eau à l’hélice n’est pas la vitesse du
navire V 0 , mais une vitesse moyenne V A . Par définition, on appelle
sillage moyen w :
VA
1 – w = ------V0
Les caractéristiques K T , K Q et η 0 définies ci-avant pour une vitesse
uniforme V 0 sont également valables en remplaçant :
• V 0 par V A = V 0 (1 – w ) ;
• J 0 par J A = J 0 (1 – w ) ;
• etc.
Figure 10 – Dispositif pour essais d’hélice en eau libre
1.2.4 Influence du frottement des pales.
Rendement idéal
Les relations du paragraphe 1.2.1 qui définissent la poussée dT
et le couple dQ d’une section de pale sont la somme de deux termes,
l’un lié à la portance dL, l’autre dF v lié à la traînée des pales due
au frottement visqueux (figure 4).
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B 4 360 − 7
HÉLICES MARINES
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Prenons un exemple pour montrer l’importance du frottement des
pales sur le rendement d’une hélice. Considérons l’hélice à 4 pales de
la figure 7 au pas réduit P /D = 1,0 et A e /A 0 = 0,70.
Pour J 0 = 0,70, on a :
K T = 0,180
K Q = 0,031
η 0 = 0,645
Pour l’hélice modèle, on prend :
CD
= 10 × 10–3
∆K Tv = – 0,65 × 0,70 × 1,0 × 10 · 10–3 = 0,004 5
∆K Qv = 0,55 × 0,7 × 10 · 10–3 = 0,003 85
K Tid = 0,180 + 0,004 5 = 0,184 5
K Qid = 0,031 – 0,003 8 = 0,027 2
η id
Figure 11 – Dispositif pour essais d’autopropulsion
d’un modèle de navire (T + X = R H)
On désigne par poussée idéale K Tid , couple idéal K Qid et rendement idéal η id les caractéristiques de l’hélice en fluide parfait (frottement nul). Pour une section (figure 4), on a :
η id
dT id ⋅ V 0
( dL id ⋅ cos β i )V 0
tan β
- = -------------------------------------------------------= ----------------------------- = ----------------2
tan β i
dQ id ⋅ 2πn
( dL id ⋅ sin β i r ) 2 π n
D’une façon générale, on a :
J 0 K Tid
η id = --------------------2πK Qid
La théorie tourbillonnaire de l’hélice (§ 9) permet de calculer η id
dès qu’on se donne le coefficient de charge C Tid et le pas hydrodynamique P i défini par πr tan β i .
En ce qui concerne le frottement des pales dF v , il est défini par
le coefficient de traînée C D . Pour une section,
CD
∆K Tv
d’où la perte de rendement due au frottement des pales :
η id – η 0
0,11
------------------- = --------------- = 14,6 %
0,755
η id
8 KTid
- = 0,96 , les valeurs
Le coefficient de charge étant C Tid = ----- ----------π J2
0
de η id et η 0 sont en bon accord avec la figure 6.
Pour l’hélice réelle (diamètre 5 m), la longueur moyenne des cordes
des sections est de l’ordre de C = 1,7 m.
Une hélice neuve bien polie a une rugosité de 5 à 6 µm, ce qui correspond à un C D # 6 × 10–3. En linéarisant le problème, on peut
admettre que les pertes de rendement, par rapport au rendement idéal
η id , sont proportionnelles à C D . Avec cette approximation, on a :
–3
6 × 10
η 0 ( hélice neuve ) = 0,755 – 0,11 × ------------------------ = 0,69
–3
10 × 10
soit un gain de rendement par rapport à l’hélice modèle :
dF v
= ---------------------------------1
2
---- ρ V R C d r
2
Des calculs théoriques conduits par différentes méthodes [5] ont
conduit à la relation suivante où C D est un coefficient de traînée
moyen relatif à toute la pale :
Ae
= – 0,65 -------- p 0 C D
A0
Ae
∆K Qv = 0,55 -------- C D
A0
(indice v visqueux).
Le coefficient C D , déduit des essais sur hélices modèles, dépend
de la méthode d’essais : n = Cte, V 0 = Cte ou combinaison des deux.
En effet, l’écoulement étant en partie laminaire (côté bord d’attaque)
puis turbulent, le coefficient C D dépend de V R C . Les valeurs déduites
varient de C D = 6 × 10–3 à 10 × 10–3, ce dernier chiffre correspondant
aux essais du NSMB d’où est tirée la figure 7.
J 0 K Tid
- = 0,755
= ----------------2πKQid
∆η
0,69 – 0,645
-------- = -------------------------------- = 7 %
η0
0,645
Si, en service, la salissure des pales au bout de 6 à 8 mois donne une
rugosité moyenne correspondant à C D = 11 × 10–3, le rendement est :
11
η 0 (hélice sale) = 0,755 – 0,11 × ------ = 0,633
10
soit une perte de rendement de 8,2 % par rapport à l’hélice neuve.
Cette valeur est bien de l’ordre de grandeur des résultats obtenus au
cours de quelques rares essais à la mer.
Le problème de l’armateur est donc de connaître la périodicité du
nettoyage de l’hélice (6 mois ou 1 an) pour que le gain de combustible
du moteur de propulsion compense le coût du nettoyage (§ 7).
1.3 Hélice derrière la carène d’un navire
Les courbes caractéristiques d’hélices données par les figures 7
et 8 sont celles mesurées avec des hélices modèles en eau libre ou
en écoulement relatif uniforme, c’est-à-dire avec V 0 indépendant
du rayon et de la position angulaire de la pale.
■ Sillage
Derrière la carène d’un navire (figure 43), la vitesse d’arrivée d’eau
à l’hélice V A varie en fonction de la valeur du rayon r et pour un
rayon donné en fonction de la position angulaire θ de la pale
(figure 12). Cette variation de vitesse est très importante pour les
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■ Succion
Il existe également une autre interaction entre la carène arrière
et l’hélice. Comme il a été indiqué précédemment, l’hélice pour fournir une poussée accélère l’eau qui la traverse et, de ce fait, augmente
plus ou moins la vitesse d’écoulement sur la carène en son voisinage
amont. D’après le théorème classique de la mécanique des fluides,
1
p (pression) + ---- ρV 2 = Cte
2
cette augmentation de vitesse se traduit par une dépression sur la
partie arrière de la carène, donc par une augmentation de sa
résistance hydrodynamique. Cette augmentation est sensiblement
proportionnelle à la poussée de l’hélice : ∆R H = tT, le coefficient t
est appelé coefficient de succion.
Finalement, l’hélice doit fournir une poussée T telle que
T (1 – t ) = R H pour vaincre la résistance hydrodynamique, et cela
dans un écoulement de vitesse moyenne V A = V 0 (1 – w ) avec le rendement η 0 qu’elle aurait en eau libre. Le rendement global de propulsion est donc :
1–t
η g = η 0 --------------1–w
Figure 12 – Cartes de sillage axial pour divers types de navires
bateaux lents aux formes bien remplies (pétroliers) mais moins
importante pour les navires rapides à deux lignes d’arbres (paquebots, porte-conteneurs) ou les bateaux de plaisance.
On désigne par sillage local w (r, θ ) le rapport :
V A (r, θ ) = V 0 [1 – w (r, θ )]
À un rayon r donné, le sillage moyen est :
1
w ( r ) = -------2π
V0 ( 1 – w )
avec un coefficient d’avance J A = -------------------------- = J0 ( 1 – w ) .
nD
1–t
Le rapport η c = --------------- est appelé rendement coque car il dépend
1–w
essentiellement des formes arrière de la carène. Pour un bateau aux
formes arrière bien remplies, η c > 1,0 ; il est voisin de 1,0 pour un
navire rapide.
Grâce à la présence du sillage w dû en grande partie au frottement de l’eau sur la carène, on récupère ainsi une partie de
l’énergie dépensée pour vaincre le frottement hydrodynamique.
L’existence d’interactions entre la carène et l’hélice explique pourquoi mettre l’hélice à l’avant du bateau ne présente aucun intérêt
du point de vue propulsion comme l’ont montré de nombreux essais
sur modèles (il y a également d’autres raisons architecturales pour
ne pas mettre les hélices à l’avant).
2π
w (r, θ) dθ
0
1.4 Hélice optimale
Le sillage moyen total w est donné par :
2
w = -------------------------( R 20 – r h2 )
R0
rh
w (r ) r dr
Au rayon r, les harmoniques ak du sillage sont définis par :
w (r, θ ) = w 0 (r ) + w 1 (r ) sin (θ – ϕ1) + ... + wk (r ) sin (k θ – ϕk ) + ...
La figure 12 donne des cartes de sillage local dans le plan de
l’hélice pour différents types de navires à 1 ou 2 lignes d’arbres.
Comme on peut le constater, le sillage w peut être très important
et même comporter des zones d’eau presque morte (w = 0,8) dans
le cas d’un gros pétrolier. Il s’agit de mesures sur modèles ; pour
un navire réel, le sillage serait moins fort. Pour les bateaux rapides
de plaisance qui peuvent déjauger, la (ou les) ligne(s) d’arbres
est(sont) très fortement inclinée(s).
Si α est l’angle d’inclinaison de la ligne d’arbres, la vitesse axiale
d’arrivée d’eau à l’hélice est V 0 cos α (en l’absence de toute autre
perturbation), et la vitesse tangentielle est égale à V0 sin α cos θ, θ
étant l’angle polaire compté depuis la position haute des pales.
On appelle hélice optimale l’hélice dont les caractéristiques géométriques (diamètre, pas relatif), à nombre de pales donné,
conduisent au maximum de rendement dans les conditions
normales de fonctionnement prévues, à savoir : nombre de tours
d’hélice n, poussée T (ou puissance F ) à fournir et vitesse estimée V 0 .
Tout d’abord, si l’on considère une hélice en eau libre, on
démontre, en négligeant les pertes par frottement de l’eau le long
des pales, que l’hélice qui a le meilleur rendement est l’hélice de
plus grand diamètre possible dont le pas est constant.
Si l’on tient compte du frottement sur la surface des pales, la situation change. L’hélice optimale en écoulement uniforme a toujours
un pas constant, mais son diamètre et son pas relatif ont des valeurs
bien déterminées.
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le rendement de l’hélice
optimale n’est pas égal au rendement maximal de l’hélice de pas
P/D considéré, mais à un rendement voisin de celui donné par l’enveloppe des courbes de rendement de la figure 7. Il est facile de déterminer l’hélice optimale à partir de cette figure ou d’une figure
analogue.
On peut distinguer deux cas, suivant que l’on se fixe la poussée
T à fournir par l’hélice ou la puissance F.
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B 4 360 − 9
HÉLICES MARINES
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1er cas : on se fixe la vitesse moyenne d’arrivée d’eau à l’hélice
V A = V 0 (1 – w ) compte tenu du sillage moyen, la poussée T à
fournir et le nombre de tours n prévus. On se fixe également le
nombre de pales Z et très approximativement la fraction de surface
Ae /A0 . En faisant varier le diamètre D, on a :
V0 ( 1 – w )
J A = --------------------------nD
≈ J0
T
K T = -----------------2 4
ρn D
T
2 4
4
- n J A = AJ A
K T = -----------4
ρV A
d’où
A étant constant d’après les données, les caractéristiques de fonctionnement J A , K T de toutes les hélices répondant au problème se
trouvent déterminées par l’intersection de la courbe K T = A J A4 avec
les courbes caractéristiques des hélices ayant différents pas P /D. À
chaque point d’intersection correspond un rendement η 0 , qui présente un maximum quand J A varie, ce maximum correspondant à
celui de l’hélice optimale.
2e cas : au lieu de se fixer la poussée à fournir par l’hélice, on
peut se fixer la puissance F absorbée par l’hélice. La méthode pour
déterminer l’hélice optimale est analogue en considérant le coefficient de couple K Q au lieu de K T .
Dans la pratique, le calcul a été fait une fois pour toutes à partir
des caractéristiques K T , K Q et η 0 des hélices modèles ayant différents nombres de pales et différentes fractions de surface.
Ainsi, on se fixe la puissance fournie à l’hélice F à un nombre de
tours N (tr/min) donné. La vitesse V 0 espérée est estimée d’après
les statistiques du chantier constructeur pour des navires de même
type en appliquant éventuellement les lois de similitude (la précision
sur V 0 n’est pas critique). De plus, il faut également estimer le sillage
moyen w d’après les valeurs déduites des essais de navires de
même type.
Les abaques de la figure 13, permettant de calculer les caractéristiques géométriques de l’hélice optimale au problème posé,
donnent en fonction du paramètre B p :
•
N F
B p = --------------------------------------- (N en tr/min, F en cv et V 0 en nd ) ,
5/2
[ V0 ( 1 – w ) ]
•
•
•
le pas réduit P /D,
le rendement η 0 ,
ND
le diamètre D (m) par l’intermédiaire du rapport --------------------------- .
V0 ( 1 – w )
Nota : on rappelle que 1 nd = 1,94 m/ s.
Maintenant, si l’on se fixe la poussée T de l’hélice au lieu de la
puissance absorbée, ce cas pouvant être celui d’un bateau aux
formes inhabituelles dont on a mesuré la résistance sur modèle ou
le cas des chalutiers, le paramètre est alors :
Figure 13 – Abaques pour le calcul de l’hélice optimale à 4 pales
lorsque V, N et F sont donnés
augmente et du moteur plus encombrant. Le choix de la vitesse estimée n’est pas critique puisqu’une erreur de 5 % sur celle-ci conduit
à une erreur inférieure à 1 % sur le diamètre, le pas et le rendement.
Enfin, les calculs faits dans différents cas de figure montrent que
pour l’hélice optimale la valeur du K T opt ne dépend pas du pas de
l’hélice (ou très peu) mais du nombre de pales ; la fraction de surface ayant peu d’influence.
(0)
Nombre de pales Z :
3
K T opt :
Les abaques de la figure 14 donnent les mêmes renseignements
que ceux du cas précédent.
Les abaques des figures 13 et 14 ont été établis pour des hélices
à 4 pales, la fraction de surface Ae /A 0 variant de 0,40 à 0,85, ce qui
couvre le domaine des hélices courantes. On donne sur ces figures
les corrections à apporter quand on passe de 4 à 5 pales de même
fraction de surface. L’influence de la fraction de surface, choisie
pour des questions de cavitation (§ 3), est beaucoup plus importante que l’influence du nombre de pales.
On voit également l’intérêt qu’il y a du point de vue rendement
à adopter (quand c’est possible) des hélices tournant lentement
(faibles valeurs de B p ou A n) et cela au détriment du diamètre qui
B 4 360 − 10
4
-
5
-
6
0,14 - 0,17 - 0,19 - 0,20
Cette constatation permet de calculer directement le diamètre de
l’hélice optimale, dès que l’on connaît la poussée à fournir et le
nombre de tours :
2
n T
A n = ---------------------------------------4 ( n en tr/s, T en t et V 0 en m/s ) .
ρ [ V0 ( 1 – w ) ]
-
D opt =
4
T
------------------------2
ρ n K Topt
Connaissant D, VA et K T , il est alors facile à partir des courbes
donnant les caractéristiques du type d’hélice choisi de remonter à
VA ( 1 – w )
- , puis à P/D et η 0 puisque K T est connu.
J A = --------------------------nD
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Figure 14 – Abaques pour le calcul
de l’hélice optimale à 4 pales
lorsque V, T et n sont donnés
2. Propulseurs dérivés de l’hélice
2.1 Hélices à pales orientables
Les courbes des figures 7, 8 et 9 concernent des hélices à pales
fixes. Pour la propulsion d’un bateau, l’ensemble moteur de
propulsion + hélice possède des caractéristiques (puissance,
nombre de tours) fonction des conditions d’utilisation. En particulier,
le nombre de tours de l’hélice étant sensiblement proportionnel à
la vitesse du bateau, cela peut poser des problèmes de fonctionnement à faible vitesse pour des moteurs diesels. De même, pour les
manœuvres de marche arrière, l’inversion du sens de rotation d’un
diesel de forte puissance (ou d’une turbine) n’est pas une opération
instantanée.
Pour les chalutiers, il est intéressant de pouvoir utiliser la puissance totale du moteur en jouant sur le nombre de tours de l’hélice
lors du transit ou en remorquage du chalut. D’où l’intérêt des hélices
à pales orientables dont on ajuste le pas à partir du compartiment
des machines (figure 15).
Les hélices à pales orientables sont dessinées avec un pas donné
P /D correspondant à un optimum pour l’utilisation prévue. Par définition, ce pas est appelé calage zéro et il lui correspond un angle
de pas géométrique bien déterminé à 0,7R 0 :
P
tan Φ 0 = ---------------------------2 πD × 0,7
Pour changer le calage de la pale, on la fait tourner autour de son
axe perpendiculaire à l’axe de l’hélice d’un angle ∆Φ 0 qui définit le
calage des pales. Il faut remarquer que, si le pas est constant au
calage 0, il ne sera plus constant pour un calage ∆Φ 0 : le pas aug-
mentera plus vers l’extrémité des pales qu’au voisinage du moyeu
si ∆Φ 0 > 0 et vice versa si ∆Φ0 < 0. Cette remarque présente de l’intérêt en ce qui concerne le rendement et la cavitation.
La figure 16 donne les courbes caractéristiques d’une hélice à
3 pales orientables de pas p 0 = P /D # 1,0 au calage 0. La partie
gauche de la figure donne les caractéristiques lorsque la réduction
de pas est telle que la poussée devient négative.
Pour pouvoir loger les paliers de l’axe des pales ainsi que le
mécanisme d’orientation à l’intérieur du moyeu, il est nécessaire
d’avoir des diamètres relatifs de moyeu importants d h /D ≈ 0,35 à
0,40 (contre 0,2 pour une hélice à pales fixes). Cela se traduit par
une perte de rendement visible en comparant les figures 16 et 7.
Cette perte de rendement est due en partie à la dépression qui se
produit sur le culot (casque ) de l’hélice et qui constitue une poussée
négative.
Exemple de calcul d’adaptation d’une hélice à pales orientables au cas d’un chalutier
Il s’agit de définir une hélice qui donne le meilleur compromis en
puissance pour le transit et le chalutage. Considérons un chalutier de
1 000 t de déplacement. Il est équipé d’une hélice à pales orientables
de 3,15 m de diamètre et de pas réduit p 0 = 0,82 au calage + 5o
(figure 16).
En transit à la vitesse de 13 nd (soit 6,70 m/s), la vitesse d’arrivée
d’eau à l’hélice compte tenu du sillage du bateau est V A = 5,70 m/s. La
vitesse de rotation est de 2,6 tr/s (156 tr/min) et la poussée à fournir
T = 10 t. On a :
VA
5,7
J A = --------= -------------------------- = 0,70 (≈ J 0 sur figure 16)
nD
2,6 × 3,15
10
T
K T = -----------------= ------------------------------------------------------ = 0,15
2 4
2
4
0,104 ( 2,6 ) ( 3,15 )
ρn D
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HÉLICES MARINES
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Le point correspondant à ces deux valeurs est marqué T sur la
figure 16. Il correspond au calage θ = + 5o et au coefficient
K Q = 0,028 5.
En chalutage à V 0 = 4,5 nd, quelle sera la traction sur le chalut
sachant que l’on veut conserver la même puissance du moteur avec la
même vitesse de rotation n = 2,6 tr/s, donc avec le même coefficient
de couple K Q = 0,028 5 ?
4,5
À V 0 = 4,5 nd, J A = 0,70 × -------- = 0,242
13
K Q = 0,028 5
À ces deux valeurs correspondent le point marqué C sur la figure 16
et un calage θ = 0o sur la courbe K Q . Le point correspondant en poussée à θ = 0o donne K T = 0,232 d’où une poussée de l’hélice :
10 × 0,232
T = ---------------------------- = 15,4 t
0,15
La résistance hydrodynamique du chalutier nécessitant une poussée
de 0,8 t à 4,5 nd, la traction sur le chalut est égale à 15,4 – 0,8 = 14,6 t.
Une hélice à pales fixes adaptée à la vitesse de transit donnerait une
traction sur le chalut plus faible. Le calcul nécessite la connaissance
couple/vitesse du moteur. La traction serait de l’ordre de 11 à 12 t.
2.2 Hélices sous tuyère
Une hélice sous tuyère forme un ensemble constitué d’une hélice
placée à l’intérieur d’un conduit profilé de révolution et dont la longueur est de l’ordre de grandeur du rayon de l’hélice (figure 17b
et c ). En général, l’hélice est placée au 1/3 avant de la tuyère.
Le rôle de la tuyère est d’augmenter la vitesse d’arrivée d’eau à
l’hélice (tuyère accélératrice) tout en fournissant une poussée qui
s’ajoute à celle de l’hélice. Une hélice sous tuyère présente de l’intérêt quand le coefficient de charge :
T
C T = ---------------------------2
ρ πD
2
---- ----------- V 0
2 4
demandé au propulseur dépasse 2, ce qui est le cas des remorqueurs,
pousseurs de barges ou chalutiers remorquant leur chalut, en un mot
de tout bateau à faible vitesse nécessitant une forte poussée de
l’hélice.
On peut décrire qualitativement pourquoi une tuyère accélératrice
fournit une poussée. La figure 17a montre l’allure des lignes de courant passant au voisinage de l’extrémité des pales d’une hélice fournissant une forte poussée. Si on place autour de l’hélice une tuyère
très mince dont la corde du profil suit une ligne de courant et dont
la concavité est dirigée vers l’extérieur, chaque élément du profil se
comporte comme une aile d’avion dont la portance dL dirigée vers
l’axe est normale à la corde du profil (figure 17b ). Cette portance
dL a une composante axiale dirigée vers l’avant. La somme étendue
à tout le pourtour de la tuyère constitue la poussée de la tuyère T d .
De plus, à cause de la cambrure de la tuyère, la vitesse d’écoulement
se trouve accélérée côté hélice et ralentie côté extérieur. Cela
explique pourquoi le fluide est accéléré à l’intérieur de la tuyère.
Si la concavité du profil de la tuyère était dirigée vers l’axe de
l’hélice, on aurait l’effet contraire : poussée négative et décélération
du fluide à l’intérieur. On démontre, en négligeant le frottement du
fluide sur la surface de la tuyère, que si celle-ci accélère le fluide à
l’intérieur, elle fournit une poussée positive et que réciproquement,
si elle décélère, elle fournit une poussée négative (§ 2.2.1).
Comme pour les hélices classiques, il existe des résultats expérimentaux concernant des séries d’hélices placées sous des tuyères,
de différentes formes. La forme de la tuyère est généralement simple
afin d’en faciliter la réalisation mais c’est sans conséquence pour
les performances.
La figure 18 donne les caractéristiques hydrodynamiques d’une
série systématique d’hélices placées sous une tuyère de forme classique couramment utilisée. On trouve le coefficient de poussée totale
K Tt = K Tp + K Td avec K Tp pour l’hélice (propeller ) et K Td pour la
tuyère (duct ).
En posant τ = C Tp / C Tt , la figure 19 montre comment varie le
rapport :
K Td
C Td
1 – τ = ---------- = ---------K Tt
C Tt
en fonction de C Tt .
Ce rapport qui ne dépend que du coefficient de charge de l’hélice
est indépendant de la géométrie de celle-ci. Il ne dépend que de la
forme de la tuyère.
Le rapport τ tend vers 0,5 quand J 0 tend vers 0, c’est-à-dire lorsque
l’on est au point fixe (V 0 = 0). Dans ce cas, la poussée d’une tuyère
accélératrice est sensiblement égale à celle de l’hélice.
Un autre avantage des hélices sous tuyère est qu’il est possible
d’augmenter la surface de l’extrémité des pales de façon à réduire
le jeu hélice-tuyère, ce qui a pour effet d’augmenter la poussée spécifique de l’hélice.
La figure 20 donne les caractéristiques C*
Tt , C*
Q pour V 0 et n
quelconques.
2.2.1 Théorie simplifiée de l’hélice sous tuyère
Figure 15 – Principe de commande de l’orientation des pales
d’une hélice à pales orientables [2]
B 4 360 − 12
En Annexe (§ 9), on expose brièvement la théorie tourbillonnaire
de l’hélice et la théorie simplifiée de l’actuator qui fournissent
quelques renseignements intéressants. La figure 21 représente le
schéma tourbillonnaire de l’ensemble hélice + tuyère.
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Figure 16 – Courbes caractéristiques
K T , K Q , 0 des hélices à 3 pales orientables
(A e /A 0 = 0,35, d h /D = 0,35)
Sur la tuyère sont répartis des anneaux de tourbillons et des
sources (pour simuler l’épaisseur) qui induisent des vitesses axiales
U ad . Quant à l’hélice, elle est schématisée par un demi-solénoïde
de tourbillons.
Les tourbillons de l’hélice induisent une vitesse axiale égale à Uap
dans le disque de l’hélice, 2 Uap à l’infini aval et Uap = 0 à l’infini
amont (figure 21).
Les tourbillons liés de la tuyère induisent une vitesse axiale Uad
dans le plan de l’hélice et Uad = 0 à l’infini amont et aval.
La théorie de l’actuator donnée en Annexe (§ 9.3), basée sur la
quantité de mouvement, donne les relations suivantes :
— Débit-masse :
Q = ρ π R 20 ( V 0 + U ap + U ad )
— Poussée totale hélice + tuyère :
T t = T p + T d = Q 2 U ap = ρ π R 20 ( V 0 + U ap + U ad ) 2 U ap
— Poussée de l’hélice due à l’élévation de pression ∆p à la traversée de l’hélice (§ 9) :
2
— Rendement global :
Uap étant normalisée à V0 : avec U*
ap = Uap /V0 ,
T t V0
2U*ap
1
= --------------------------------------------- = ----------------------η g = ------------Ec
2U*ap ( 1 + U*ap )
1 + U*ap
1 + C Tp – 1
U*
(§ 9)
ap = ---------------------------------2
Finalement, comme C Tp = τ C Tt par définition :
avec
2
η g = --------------------------------------1 + 1 + τ C Tt
Pour une hélice isolée, on aurait :
2
η g = ---------------------------------1 + 1 + C Tt
d’où l’intérêt de l’hélice sous tuyère accélératrice pour laquelle τ < 1
(figure 23).
2
T p = πR 0 ∆p = ρ πR 0 ( V 0 + U ap ) 2 U ap
— Énergie cinétique axiale dans le sillage de l’hélice :
1
2
2
E c = ---- Q [ ( V 0 + 2 U ap ) – V 0 ] = Q ( V 0 + U ap ) 2 U ap
2
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B 4 360 − 13
HÉLICES MARINES
_____________________________________________________________________________________________________________________
Figure 18 – Courbes caractéristiques des hélices à 4 pales
sous tuyère (A e /A 0 = 0,70) (d’après NSMB)
Figure 17 – Principe de l’action d’une tuyère
Les relations précédentes de poussée mises sous forme adimensionnelle permettent de calculer U*
ap et U*
ad à partir des résultats
expérimentaux :
1 + C Tp – 1
U*
ap = -------------------------------2
C Td
1–τ
U*
- = --------------------C Tp
ad = ---------------2 τ U*ap
2U*
ap
Par exemple, à partir des caractéristiques de l’hélice sous tuyère
de la figure 18, on trouve la relation de couplage hélice/tuyère :
Figure 19 – Valeurs de et U*
ad pour la tuyère de la figure 18
et une hélice à 4 pales avec A e /A 0 = 0,55 (B4-55) et 0,7 (B4-70)
et un pas P/D variable (d’après NSMB)
U*
ad = 0,06 + 1,10 U*
ap
indépendamment de l’hélice sous la tuyère.
Au point fixe, V 0 = 0, U*
ap et U*
ad 1, si bien que d’après les relations précédentes, T d (poussée tuyère) = 1,10 T p (poussée hélice), ce
qui est en assez bon accord avec les résultats expérimentaux de la
figure 18.
2.2.2 Hélice sous tuyère optimale
Comme pour les hélices classiques, il est possible à partir des
résultats d’essais sur modèles de tracer des courbes donnant les
caractéristiques géométriques et le rendement de l’hélice sous
tuyère optimale, c’est-à-dire celle qui répond à un problème donné
B 4 360 − 14
par exemple : N, F (ou T ) et V0 (1 – w ) donnés. Les figures 22
donnent deux exemples de telles courbes. En comparant les courbes
de rendement η0 des figures 13, 14 et 22, on s’aperçoit que le rendement de l’hélice sous tuyère optimale est supérieur à celui de
l’hélice classique optimale dès que B p > 20 (ou A n > 2), ce qui correspond à un degré de charge du propulseur C T > 2 (figure 23).
Comme pour les hélices classiques, la valeur de K Tt opt de l’hélice
sous tuyère optimale dépend peu du pas et de la fraction de surface
de l’hélice. La valeur K Tt opt = 0,25 à 0,28 peut être prise pour un
premier calcul du diamètre de l’hélice, ce qui fait que le diamètre
de l’hélice sous tuyère est inférieur de 8 à 10 % à celui d’une hélice
classique.
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_____________________________________________________________________________________________________________________ HÉLICES MARINES
Figure 20 – Courbes caractéristiques des hélices sous tuyère
(figure 18) pour V 0 et n quelconques (Z = 4 pales et A e /A 0 = 0,70)
Figure 21 – Écoulement schématisé d’une hélice sous tuyère
en courant uniforme (schéma tourbillonnaire)
2.3 Propulseurs non conventionnels
Les propulseurs non conventionnels ont pour but d’accroître le
rendement de l’hélice classique (sauf cas des hélices en tandem).
Le succès de ces dispositifs où l’hélice joue le rôle principal est basé
sur la récupération de l’énergie rotationnelle dans le jet de l’hélice.
Figure 22 – Hélices optimales sous tuyère (figure 18) en fonction
des paramètres B p et A n (Z = 4 pales et A e /A 0 = 0,55 et 0,70)
■ Hélices en tandem
Il s’agit de deux hélices solidaires placées l’une derrière l’autre.
Cette solution présente de l’intérêt lorsque l’on est limité en diamètre, mais n’apporte pas de gains sensibles en rendement. Elle n’a
eu que quelques applications autrefois.
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B 4 360 − 15
HÉLICES MARINES
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Le même principe de distributeur amont ou redresseur arrière peut
également être utilisé avec les hélices sous tuyère. Ces dispositifs
sont solidaires de la tuyère, l’ensemble étant parfois appelé
pompe-hélice.
3. Cavitation
3.1 Considérations théoriques
La cavitation est un phénomène fort complexe difficile à maîtriser,
bien connu des hydrauliciens et des hydrodynamiciens. Pour situer
le problème, rappelons brièvement comment se présente le phénomène de cavitation dans le cas des hélices marines.
Schématiquement, si dans un liquide la pression devient inférieure
à la tension de vapeur p v du liquide, celui-ci tend à se vaporiser sous
forme de petites bulles allant en grossissant, voire même former des
poches de vapeur.
Dans le domaine maritime, et plus particulièrement pour les
hélices, ce phénomène est très gênant car il est à l’origine d’érosions,
de chutes de performances, de bruit et de vibrations.
Pour un corps placé dans un écoulement, il y a une relation entre
la pression statique p et la vitesse V à la surface du corps, d’une
part, et la pression p 0 et la vitesse V 0 de l’écoulement non perturbé,
d’autre part (théorème de Bernoulli) :
Figure 23 – Comparaison d’hélices isolées et d’hélices sous tuyère
optimales en fonction de C Tt
■ Hélices contrarotatives
Il s’agit de deux hélices non solidaires placées l’une derrière
l’autre, tournant en sens inverse et entraînées chacune par un arbre
différent. L’hélice arrière annule le mouvement de rotation du fluide
créé par l’hélice avant et annule ainsi les pertes d’énergie rotationnelle. Les gains de rendement peuvent atteindre 6 à 10 % voire plus
à cause des interactions avec la carène. Les hélices contrarotatives
ont un diamètre de 20 % inférieur à celui de l’hélice classique répondant au même problème, mais leur utilisation sur des navires de tonnage important est peu courante (elles sont utilisées sur les torpilles
sous-marines) à cause de leur complexité mécanique et de leur coût.
■ Hélice + hélice libre
Ce dispositif est analogue au dispositif d’hélices contrarotatives
avec comme différence importante que l’hélice arrière est libre et
d’un diamètre supérieur de 15 à 20 % à celui de l’hélice avant. La
forme des pales peu larges est telle que la partie derrière l’hélice
avant joue le rôle de turbine en redressant le mouvement rotationnel,
alors que la partie extérieure joue le rôle d’hélice, dont le couple
moteur est précisément engendré par la partie turbine de l’hélice
libre : gain de rendement annoncé 6 à 10 % basé sur une seule application pratique.
■ Hélice avec distributeur amont ou redresseur arrière
Devant l’hélice, on place des ailes vrillées dont le rôle est de donner
un mouvement de prérotation au fluide, qui annulera le mouvement
de rotation donné par l’hélice. Ce système n’est intéressant que si
la réduction d’énergie rotationnelle dans le jet de l’hélice est supérieure à la poussée négative et à la traînée du distributeur.
Au lieu de placer un distributeur devant l’hélice, on peut placer
un redresseur derrière l’hélice et fixé au gouvernail. Dans ce cas,
le redresseur annule le mouvement rotationnel créé par l’hélice et
fournit une poussée. Ces dispositifs montés sur quelques navires
ont donné des gains de rendement de 4 à 8 %.
B 4 360 − 16
1
1
2
2
p + ---- ρ V = p 0 + ---- ρ V 0 = Cte
2
2
On définit ainsi le coefficient de pression :
2
p – p0
V
- = 1 – ------C p = -----------------V0
1
2
---- ρ V 0
2
S’il y a cavitation, p = p v et on appelle nombre de cavitation σ0
le rapport :
p0 – pv
σ 0 = -------------------- = – Cp
1
2
---- ρ V 0
2
Dans ce rapport p 0 et p v sont des pressions absolues. Pour les
applications pratiques, il est commode d’exprimer ces pressions en
mètres de fluide. Pour l’eau, p v = 0,17 m à 15 oC et 0,23 m à 20 oC.
Quant à p 0 à la surface de l’eau, on peut prendre p 0 = 10 m, si bien
que p v peut être négligé. On peut alors écrire :
10 + i
σ 0 # 2 g --------------2
V0
avec i immersion ou pression en m d’eau
Il y a ainsi une étroite relation entre le nombre de cavitation et
le coefficient de pression minimal C p min d’un corps se déplaçant
dans un liquide.
En ce qui concerne plus particulièrement les hélices, la vitesse relative V R ≈ V ∞ entre une section de pale au rayon r et l’eau est
2
2
2
(figure 4) : V R # V 0 + ( 2 π nr ) . On est ainsi amené à considérer le
profil d’une section développée de pale placée dans un écoulement
de vitesse VR et donnant une portance dL. Dans les conditions normales de fonctionnement prévues pour une hélice bien dessinée,
la portance dL est essentiellement due à la cambrure de la section
et on choisit la forme de la cambrure pour obtenir une répartition
de pression aussi uniforme (plateau) que possible sur presque la
totalité de la longueur de la section : on a une dépression sur le dos
et une surpression sur la face (figure 24a ). À l’influence de la cambrure s’ajoute l’influence de l’épaisseur de la pale qui donne une
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dépression à la fois sur le dos et sur la face, dépression d’autant
plus importante que l’épaisseur relative de la section e max /C est
importante (figure 24b ). La somme cambrure + épaisseur donne la
répartition de pression sur la section pale représentée sur la
figure 24 c. Si l’hélice est bien dessinée, la dépression sur le dos de
la section est aussi uniforme que possible sur la plus grande partie
de la longueur :
— si (– C p )max < σ 0 , il n’y a pas de cavitation ;
— si (– C p )max > σ 0 , il y a cavitation sur le dos de la pale sous
forme de bulles ;
tout au moins tant que la différence (– C p , σ 0 ) reste faible
(figure 24 c ).
Si à partir de cette situation on met le profil en incidence, il
apparaît alors au bord d’attaque, côté dos, une pointe de dépression marquée qui conduit à la formation d’une lame de cavitation
au bord d’attaque (figure 24 e ) si (– C p)max > σ0 . Cette lame de
cavitation se développe de plus en plus vers l’arrière au fur et à
mesure que l’incidence croît et se transforme en nuage de bulles.
C’est ce type de cavitation qui est à l’origine de l’érosion des pales.
Si au contraire l’incidence devient négative, il apparaît, si elle est
importante, une cavitation par lame, côté face, au bord d’attaque.
On trouve dans la littérature technique [7] des tableaux donnant,
en fonction de l’abscisse s le long de la corde, les survitesses ∆Vc /VR
pour différentes formes de lignes moyennes de cambrure (parabolique ou NACA a = 0,8 par exemple), ∆V e /V R pour différentes formes
de profils d’épaisseur (NACA 65 ; 66...) et ∆Vα /Vr pour l’influence de
l’incidence du profil, ∆Vc , ∆V e et ∆Vα étant les survitesses locales
fonction de s. Cela permet de linéariser le calcul de la vitesse d’écoulement autour du profil pour les situations les plus courantes. On
a alors en fonction de l’abscisse s /C (§ 1.1) :
2
f max
e max
C p = 1 –  1 ± a 1 ------------ + a 2 ------------- ± a 3 α


C
C
a1 , a 2 , a3 fonction de s /C et + sur le dos et – sur la face, f étant la
fréquence de vibration.
Comme le coefficient de portance C Lc dû à la cambrure est proportionnel à f max /C et celui C Lα dû à l’incidence est proportionnel
à α, on a finalement (avec C Lα = 2π sin α ) :
C p = 1 – (1 ± A 1C Lc + A 2 emax /C ± A 3C Lα)2
les coefficients A1 , A 2 et A 3 étant donnés en fonction de s /C sous
forme de tableaux [7]. Pour un profil défini par un profil de base
e max /C et une ligne moyenne de cambrure, f max /C donnant C Lc , il
est alors possible de tracer des courbes d’apparition de cavitation
σ0 = – C p lorsque l’incidence α, c’est-à-dire C Lα varie, ou plus exactement quand C L = C Lc + C Lα varie.
La figure 25 donne un exemple de telles courbes qui définissent
le domaine de non-cavitation : σ0 > – C p , et les domaines où se manifestent les divers types de cavitation décrits précédemment. Ces
courbes ont été tracées pour deux valeurs de e max /C (0,06 et 0,09
valeurs courantes) et C Lc = 0, et 0,2 (0,2 valeur moyenne courante).
Du point de vue de la cavitation, on voit tout de suite l’influence de
la cambrure et de l’épaisseur du profil.
Plus le profil est relativement épais, plus la section de pale
encaisse les variations d’incidence dues aux variations de sillage
rencontrées au cours d’une révolution de pale ; mais cela au détriment du σ 0 d’apparition de la cavitation. Tout l’art du dessin
consiste donc à réaliser le meilleur compromis entre ces deux
constatations contradictoires : retarder l’apparition de la cavitation
en réduisant la valeur de e max /C, c’est-à-dire en augmentant la
corde, donc la fraction de surface, car emax est déterminé par la
contrainte mécanique du métal des pales, ou minimiser l’influence
des variations de sillage en augmentant e max /C, par augmentation
de e max .
Dans la pratique, on peut jouer sur la forme de la ligne moyenne
définissant la cambrure ou (et) sur la forme du profil d’épaisseur
(en particulier au voisinage du bord d’attaque), mais tout cela ne
Figure 24 – Différents types de cavitation d’un profil cambré
ou non en fonction de l’incidence et de l’épaisseur relative emax /C
va pas bien loin quand on part de lignes moyennes et de profils
d’épaisseur ayant de bonnes caractéristiques aéro- et hydrodynamiques.
Sur les figures 25 et 26, on voit que la cavitation qui tend à se
manifester la première, c’est-à-dire en présence de faibles variations d’incidence, est la cavitation par bulles sur le dos.
■ Formules pratiques
Pour une hélice au voisinage des conditions normales de fonctionnement, c’est-à-dire 0,15 < K T < 0,25, les calculs montrent qu’au
rayon 0,7R 0 , au voisinage duquel se trouve concentré le maximum
de la poussée (figure 5), rayon qui donne une bonne image de l’écoulement autour de la pale, on a :
kK T
C L = -------------------------------Z ( C/D ) 0,7R 0
avec k = 1,50 ± 0,10
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B 4 360 − 17
HÉLICES MARINES
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Figure 25 – Domaines de cavitation
pour un profil cambré (C Lc = 0,2)
ou non (C Lc = 0) et pour deux épaisseurs
de section e max /C = 0,06 et 0,09
Dans cette relation, σ0 doit être calculé en fonction de la vitesse
relative V R section de pale/fluide. On a à 0,7Rs0 d’après la figure 4 :
2
2
2
V R # V 0 ( 1 – w ) 0,7 R 0 + ( 0,7 π nD )
2
0,7 π 2
2
V 2R = V 20 ( 1 – w ) 0,7 R 0 +  -------------
 J0 
Figure 26 – Divers types d’apparition de la cavitation
en fonction de J 0 et 0 (Z = 4 pales, P /D = 1 et A e /A 0 = 0,85)
De plus, la cavitation par bulles sur le dos de pale se manifeste
au début au milieu de la pale.
Dans le cas d’une hélice bien dessinée pour les conditions de
fonctionnement α # 0 et comme A 3 # A 1 :
A1 = 0,28 à 0,31, A 3 ≈ 0,20 et A 2 = 1,1 à 1,2
on peut écrire, puisque C Lc + C Lα = C L :
A1 C Lα + A 3 C Lα # A*1 C L
avec A*1 # 0,30
2
À l’apparition de la cavitation par bulles, σ0 = – C p , si bien que
finalement :
e max
1,5K T
+ A*1 --------------------------------σ 0 = 1 + A 2  ------------
C 0,7R 0
Z ( C/D ) 0,7R 0
2
–1
Comme e max est pratiquement fixé par des considérations sur les
contraintes mécaniques dans le métal de la pale, la seule variable
sur laquelle on peut jouer est la longueur de corde C 0,7R0 dont la
valeur, à partir de la relation précédente, est donnée par :
( A 2 e max /D ) + ( 1,5 A *1 K T / Z )
( C/D ) 0,7R0 = --------------------------------------------------------------------------------1 + σ0 – 1
B 4 360 − 18
où i est l’immersion de la section 0,7R 0 à la position haute de la pale.
Il en résulte que, dans la relation précédente donnant la vitesse relative, la valeur de σ à considérer est :
2
4,85
σ 0,7R 0 = σ 0 ( 1 – w ) + ----------2
J0
La valeur de ( C/D ) 0,7R0 étant déjà déterminée précédemment, la
fraction de surface de l’hélice, pour les formes habituelles de pales,
est donnée approximativement par :
A e /A 0 = 0,45Z ( C/D ) 0,7R 0
si bien que :
C p = 1 – ( 1 + A*1 C L + A 2 e max /C )
le terme le plus important étant lié à la vitesse tangentielle,
0,7π 2
4,85
c’est-à-dire à  ------------- = ---------- avec 0,4 < J0 < 1,1 pour les hélices
2
 J0 
J0
habituelles.
En pratique, le nombre de cavitation σ 0 est basé sur la vitesse du
navire :
h + i – hv
- (h et i en m, V 0 en m/s, h v # 0)
σ 0 = 2g -----------------------2
V0
La fraction de surface étant ainsi calculée en première approximation, ainsi que le diamètre optimal (§ 1 et 4) et le pas correspondant, on dispose donc d’une première esquisse de la géométrie de
l’hélice. Cette géométrie peut être modifiée pour être adaptée, à
partir de calculs plus élaborés sur ordinateur, aux diverses
contraintes : adaptation du pas au sillage moyen à chaque rayon,
adoption d’un devers et d’une réduction de pas en extrémité de pale
pour diminuer les excitations de vibrations du navire dues à l’hélice.
Réciproquement, les relations ci-avant indiquent à quel nombre
de cavitation la cavitation par bulles sur le dos risque de se produire
pour une hélice donnée (emax /C, K T et C /D donnés). Cependant, il
faut noter que la chute de performances due à la cavitation ne se
produit que lorsque celle-ci est nettement établie. À ses débuts, la
cavitation n’est détectée que par le bruit ou par l’observation visuelle,
l’hélice étant illuminée par des flashs stroboscopiques, ce qui est
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couramment fait pour les hélices modèles dans les tunnels de
cavitation (§ 3.2) mais beaucoup plus difficile à réaliser à la mer sur
les bateaux.
■ Exemples de résultats expérimentaux
La figure 27 montre comment, pour une hélice donnée, les caractéristiques K T , K Q et η 0 varient quand le nombre de cavitation σ 0
est rapporté à la vitesse du navire.
Comme application des relations donnant σ0 et σ 0,7R0 , on considère le cas de l’hélice de la figure 27 de pas P /D = 1,2, à J 0 = 0,90,
où K T = 0,175. Pour cette hélice, à 0,7R0 , on a :
e max /D = 0,035,
ZC /D = 1,8
avec A*
1 = 0,31 et A 2 = 1,15.
Ainsi, avec w = 0 :
VR 2
4,85
-------- = 1 + ------------ = 7,0
2
V0
0,9
1,5 × 0,175
σ 0,7R 0 = 1 + 1,15 × 0,035 + 0,31 × -----------------------------1,8
2
– 1 = 0,18
σ 0 = 0,18 (VR /V0)2 = 1,26
σ expérimental # 1,3 (figure 27)
L’accord calcul/expérience est assez satisfaisant si on tient compte
des remarques ci-dessus au sujet de l’apparition des différentes
manifestations de la cavitation. L’indice σ 0 diminuerait si on augmentait la fraction de surface c’est-à-dire ZC /D, l’épaisseur e max /D
restant constante. C’est ainsi que pour l’hélice (Z = 4, Ae /A0 = 1), on
a, pour J 0 = 0,9 et K T = 0,175, σ 0 # 1,10, soit un gain de
1,3/1,1 # 1,09 sur la vitesse du navire à l’apparition de la cavitation, mais un rendement η 0 = 0,685 au lieu de 0,70 à cause de l’augmentation due au frottement des pales.
Pour les hélices actuelles avec des sections bien profilées, la cavitation, dans les conditions normales de fonctionnement prévues,
débute toujours par une cavitation par bulles sur le dos, puis :
— si J 0 diminue, K T augmente et apparaît la cavitation par lame
sur le dos ;
— si J 0 augmente, K T diminue et apparaît la cavitation par lame
sur la face (figure 26).
■ Influence du sillage
Si l’on considère un profil hydrodynamique bidimensionnel (aile),
le nombre de cavitation σ 0 d’apparition de la cavitation par lame peut
être assez bien prédit (figure 25). Lorsque σ0 diminue, il se développe
une poche (lame) de vapeur accrochée à la surface de la pale. À l’intérieur et sur les parois de la poche, la pression statique p = p v = Cte.
On doit donc calculer la forme de la poche de cavitation pour que
l’écoulement autour de la section profil + poche respecte la condition
p = Cte, ce qui n’est pas une chose facile.
Dans le cas des hélices opérant en sillage variable, le problème
se complique car on n’a pas affaire à un régime stationnaire de la
cavitation mais à un régime instationnaire, chaque pale cavitant
lorsqu’elle traverse un secteur de fort sillage (figure 28). Un certain
nombre de méthodes de calculs théoriques basées sur quelques
coefficients empiriques ont été proposées mais les résultats des calculs comparés à l’expérience divergent d’une méthode à l’autre ou,
pour une même méthode, donnent des résultats non conformes à
l’expérience selon la carte du sillage. Or, il est important, comme
on le verra au paragraphe 4.2.4, de calculer avec précision l’évolution
dans le temps du volume de la poche de cavitation afin de prévoir
les risques de vibration de l’arrière du navire.
Si l’hélice opère en courant uniforme mais avec un arbre incliné
d’un angle α par rapport à l’horizontale, il existe une composante
de la vitesse tangentielle relative qui n’est plus V t = 2πnr mais
V t = 2πnr – V 0 cos α sin θ, θ étant l’angle polaire de la pale (θ = 90o
pour la position horizontale). Cette variation de vitesse tangentielle
est relativement plus importante au voisinage du moyeu où r est
petit. Il en résulte pour θ = ± 90o des variations importantes de
l’angle d’attaque de la section, d’où risque de cavitation et
d’érosion.
Les hélices à pales orientables posent également un problème du
point de vue cavitation. Si les sections de pales sont correctement
dessinées pour le calage 0o, les sections de la pale par des cylindres
de rayon r se déforment quand le calage varie ; c’est une affaire de
géométrie. Au profil initial de la section au calage 0o, s’ajoute une
déformation en S de la corde. Il en résulte un risque accru de cavitation par lame sur le dos au bord d’attaque quand le calage croît
et sur la face quand le calage décroît.
Enfin, en plus des divers types de cavitation attachés à la pale
(par bulles, par lame), il peut exister également une cavitation par
tourbillons hélicoïdaux d’extrémités de pale qui viennent défiler le
long du gouvernail et sont sources de vibrations de celui-ci
(figure 29). On diminue l’intensité de ces tourbillons en diminuant
le pas en extrémité de pale. Il existe également une cavitation du
tourbillon s’échappant du moyeu de l’hélice.
3.2 Hélices supercavitantes
Pour un navire à grande vitesse, on ne peut pas éviter la cavitation.
La majorité des vedettes rapides sont propulsées par des hélices
cavitant partiellement, ce dont on tient compte en utilisant des caractéristiques d’hélice comme celles données par la figures 30.
Quand on approche de 50 nd (25,8 m/s), le nombre de cavitation
10 + i
- (avec i immersion de l’hélice) est inférieur à 0,35 et
σ 0 # 2 g -------------2
V0
Figure 27 – Caractéristiques d’une hélice à 4 pales
(P/D = 1,2 et A e /A 0 = 0,85) en fonction du nombre de cavitation
0 (0,7 < 0 < ∞)
le rendement des hélices partiellement cavitantes chute
sérieusement ainsi que la poussée (figure 27). Puisqu’on ne peut pas
éviter la cavitation, on essaie alors de la domestiquer en utilisant
des hélices supercavitantes. Pour une hélice supercavitante, on
donne aux sections de pales une forme telle que la cavitation forme
sur le dos une poche de vapeur se refermant loin derrière le bord
de fuite de la pale. Les sections de pale ont la forme d’un coin effilé
avec une cambrure élevée, travaillant avec une incidence de 2 à 3o.
Ce type de forme spéciale (figure 31) dérive des études sur les ailes
supercavitantes (hydroptères) où, comme pour les avions, on
cherche à minimiser le rapport traînée/portance.
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Figure 28 – Évolution de la cavitation en fonction de la position
angulaire de la pale (navire à une ligne d’arbres)
Figure 30 – Caractéristiques d’une hélice supercavitante
en fonction du nombre de cavitation
Figure 29 – Cavitation par lame au bord d’attaque et tourbillons
hélicoïdaux d’une hélice placée devant un gouvernail
(cliché Bassin des Carènes)
L’épaisseur de la poche de cavitation doit être réduite au minimum pour réduire les risques de blocage de l’écoulement entre les
pales, d’où un nombre de pales égal à 3 ou 4.
Le dessin des hélices supercavitantes part du dessin des hélices
subcavitantes, mais devient beaucoup plus compliqué dès que l’on
aborde le tracé des sections de pale. La figure 30 donne un
exemple de caractéristiques d’une hélice supercavitante. Pour de
telles hélices, le coefficient de poussée optimal est K T ≈ 0,10 au
lieu de 0,15 à 0,18 pour une hélice subcavitante. La difficulté dans
le tracé des hélices supercavitantes réside dans le fait d’avoir un
rendement acceptable dans une gamme de vitesse étendue avec
une bonne stabilité de la supercavitation pour éviter les emballements de moteur. Pour obtenir ce résultat, il faut utiliser des
hélices tournant très vite ou plus exactement des hélices dont la
vitesse tangentielle en bout de pale πnD est de l’ordre de 100 m/s.
Au-dessus de 60 nd, pour améliorer le rendement, on préfère
utiliser des hélices dont les pales en position haute percent la surface
de l’eau entraînant ainsi de l’air dans leur mouvement de rotation,
ce qui conduit à une supercavitation ventilée. Le tracé de telles
hélices utilisées pour les bateaux de compétition est basé sur un
B 4 360 − 20
Figure 31 – Section d’une pale d’une hélice supercavitante
certain empirisme (par exemple, le bord d’attaque de la pale au lieu
d’être à angle vif est émoussé).
3.3 Tunnels de cavitation
La cavitation intéresse non seulement les hélices et l’hydrodynamique navale mais également d’autres domaines tels que l’hydraulique. La voie expérimentale est encore nécessaire pour valider les
calculs théoriques, pour mieux comprendre le phénomène de cavitation lui-même et pour étudier l’influence de nombreux paramètres
non pris en compte dans les calculs et liés au fluide lui-même et à
ses impuretés (germes de cavitation). Les essais de cavitation relatifs
au domaine de l’hydrodynamique navale sont faits dans des installations appelées tunnels de cavitation.
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Figure 32 – Plan de principe du grand tunnel de cavitation du Bassin d’essais des Carènes de Paris
Un tunnel de cavitation est l’équivalent d’une soufflerie aérodynamique en circuit fermé où l’air est remplacé par l’eau. Installation importante, elle comporte pour la partie expérimentale une
veine d’essais horizontale de 5 à 10 m de longueur et de section
importante 1 à 3 m2 (figure 32), de façon à pouvoir y mettre en
place un modèle de navire ou de sous-marin de 3 à 5 m de long
avec ou sans hélice, ou simplement une hélice ou tout autre objet,
le tout étant motorisé et équipé de capteurs de force (dynamomètres) et de pression. De puissants projecteurs stroboscopiques
permettent de saisir l’image instantanée de la cavitation sur une
hélice, la mesure de la vitesse étant faite par vélocimètre laser.
Il s’agit, comme le montre la figure 32, d’installations très importantes, mises en œuvre dans les plus grands bassins de Carènes
du monde (en France au Val-de-Reuil près de Rouen).
En plus de la veine d’essais, le circuit d’un grand tunnel de cavitation moderne se compose (figure 32) :
— à la partie basse, d’une pompe suivie de son diffuseur, celui
se trouvant ainsi en charge pour limiter les risques de cavitation ;
— d’un conduit vertical avec à sa partie supérieure un coude
muni d’ailettes afin d’homogénéiser la vitesse. À la sortie du coude
sont placés des dispositifs permettant de régler la teneur de l’eau
en germes de cavitation ;
— à l’amont de la veine d’essais, d’un convergent qui accélère
l’eau jusqu’à la veine d’essais ;
— d’une veine d’essais proprement dite munie de hublots
d’observation ;
— à la sortie de la veine, d’un divergent qui permet de récupérer
sous forme de pression une partie de l’énergie cinétique de l’eau
de la veine ;
— puis d’un débulleur, grande cuve avec chicanes permettant
d’éliminer les dernières bulles de cavitation provenant de la veine
d’essais ;
— enfin, d’un conduit de retour ramenant l’eau à la pompe.
La pression absolue dans la veine d’essais peut être réglée depuis
une valeur très faible (≈ 1 m d’eau) jusqu’à une surpression de
quelques bars. Le réglage de la vitesse dans la veine d’essais peut
atteindre 15 à 20 m/ s qui, joint à celui de la pression, permet
p–p
d’atteindre des nombres de cavitation σ 0 = ---------------0- très faibles
ρ 2
---- V 0
2
(σ min = 0,07) simulant des vitesses de 50 à 55 nd (90 à 100 km/h) de
bateaux très rapides (vedettes, hydroptères, etc.).
L’augmentation des dimensions et du tonnage des cargos et des
pétroliers, ou de la vitesse des navires porte-conteneurs et des
vedettes rapides, a conduit à l’accroissement de la puissance
installée à bord et corrélativement à l’accroissement du niveau des
excitations de vibrations engendrées par les moteurs et hélices. De
plus, le développement des programmes de calcul de la fatigue des
charpentes par la méthode des éléments finis a conduit à des allégements de structure et par là-même à l’abaissement des fréquences
propres de vibrations dont les plus basses peuvent se situer dans
la gamme de celle des excitations dues à l’hélice.
4. Excitations des vibrations
de navire par les hélices
Ces phénomènes vibratoires sont dangereux pour la charpente de
coque, gênants pour le personnel et le fonctionnement de certains
appareils. Il est donc important entre autres, de pouvoir situer les
causes d’excitation de vibrations par l’hélice afin de mieux pouvoir
y remédier.
On peut distinguer deux sources d’excitations de vibrations par
l’hélice :
— par transmission par la ligne d’arbres sur les paliers et la butée
des efforts fluctuants sur les pales lorsque celles-ci opèrent dans un
sillage très variable ;
— par les fluctuations de pression sur la coque arrière lorsqu’une
pale, en position haute, passe précisément au voisinage de la coque.
Le même effet est également produit par la cavitation. De nombreux détails sur les développements théoriques suivants existent
dans l’ouvrage du Bureau Veritas [4].
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HÉLICES MARINES
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4.1 Excitations des vibrations transmises
par la ligne d’arbres
Si l’on considère les Z pales, θ étant la position angulaire de la
pale no 1 où le sillage moyen est w (θ ), on a :
dT =
4.1.1 Excitations de poussée transmises
à la coque par la butée
Les variations de poussée de la ligne d’arbres de l’hélice sont transmises à la charpente du navire par la butée, alors que les efforts
normaux à la ligne d’arbres sont transmis par les paliers.
Les calculs théoriques des efforts fluctuants sur les pales d’hélice
conduisent à une formulation assez complexe. Ces efforts, bien que
pouvant être importants, sont dus aux harmoniques du sillage (§ 1.3)
dont l’amplitude est de l’ordre de quelques pour-cent de la vitesse
du navire. D’une part, le sillage qui est mesuré sur modèle avec une
précision au mieux de 1 % doit être extrapolé au navire réel au moyen
de règles empiriques encore sujettes à caution. D’autre part, ce
sillage mesuré en l’absence d’hélice peut être également modifié par
le fonctionnement de l’hélice. Pour toutes ces raisons, il serait illusoire pour les applications pratiques de vouloir faire des calculs précis à partir de données de base incertaines.
La méthode approchée de calcul des excitations de vibrations
transmises par l’hélice à la ligne d’arbres décrite ci-après est relativement simple et facile à programmer. Elle a montré son bien-fondé
par comparaison avec des résultats expérimentaux.
■ Bases théoriques simplifiées pour de faibles largeurs de pales
Considérons une hélice dont la largeur des pales est faible
vis-à-vis du rayon de l’hélice :
C 0,1 R0
Pour un sillage moyen w constant, on a par définition (§ 1.2) :
V0 ( 1 – w )
VA
J A = -------- = ------------------------- = J 0(1 – w)
nD
nD
T = ρ n 2 D 4 K T (J A )
K T étant la caractéristique K T (J0) de l’hélice en eau libre (figure 7).
Au voisinage du point de fonctionnement de l’hélice K T = K T0 ,
on a pour une variation δJ de J A :
KT
3
d KT
ρn D
= ------------------ V 0 -----------Z
d JA
p=Z
∑
p=1
2π
w θ + p -------Z
Les excitations de vibrations par l’hélice sont à des fréquences
f = n Z, 2nZ, ... knZ, ... dont les amplitudes sont précisément liées
aux amplitudes des harmoniques du sillage. Si
w 1 , w 2 … w p , ϕ 1 , ϕ 2 … ϕ p … sont respectivement les amplitudes
et phases du sillage le long d’un rayon (§ 1.3), on a pour l’harmonique de rang p :
3
d KT
ρ nD
dT ( p ) = --------------- V 0 -----------Z
d JA
j=Z
∑ wp
j=1
2π
sin p θ + j -------- + ϕ p
Z
La somme Σ ci-dessus est nulle sauf dans le cas où p est un multiple de Z et vaut Z w p , si bien que :
d KT
3
dT ( p ) = ρ nD V 0 ----------- w p
d JA
On peut donc conclure que les excitations de vibrations sont dues
aux harmoniques du sillage de rang kZ (k entier) et sont à la fréquence nkZ.
Si on veut aller plus loin dans le calcul, il faut considérer ce qui
se passe à chaque section de pale car les harmoniques du sillage
varient suivant le rayon r = xR considéré.
Il faut alors considérer la répartition de poussée dK T /dx et remplacer dK T /dJ A par d 2K T /dJ Ad x. Des calculs faits sur un certain
nombre d’hélices montrent que les courbes dK T /dx et d 2K T /dJ Adx
dépendent très peu de la géométrie de l’hélice au voisinage du point
de fonctionnement normal et que la courbe dK T /dx peut être approximée par dK T /dx = ( x ) K T , ( x ) étant une courbe standard représentée par la figure 33 où :
x=1
x h = 0,2
(x) dx = 1
Pour les applications numériques, on peut prendre :
dK
= K T0 + ----------- δJ
dJ 0
À une variation δw du sillage moyen w correspond une variation de poussée :
δw
2 4 dK T
2 4 dK T
δT = ρ n D ------------ δJ = ρ n D ------------ V 0 --------d JA
d JA
nD
∑ δt 1
( x ) = 7x
2
1–x
où x = r/R.
dK T
δT = ρ n D 3 V 0 ------------ δw
d JA
La valeur de dK T /dJ 0 dépend peu de la géométrie de l’hélice
(figure 7). dK T /dJ0 ≈ – 0,4 si Z = 4 pales et – 0,5 si Z = 5 pales.
Pour tenir compte des variations de sillage en fonction de la position angulaire d’une pale, il faut raisonner pour une pale qui donne
une poussée t 1 = T /Z :
3
d KT
ρn D
δt 1 = ------------------ V 0 ------------ δw
d JA
Z
δw étant dans ce cas le sillage moyen dans le secteur polaire
occupé par la pale.
B 4 360 − 22
Figure 33 – Courbe moyenne pour représenter au mieux dT /dr
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Moyennant cette approximation raisonnable, on a alors, pour la
fréquence f = nkZ correspondant à l’harmonique de sillage de rang
p = kZ, une poussée réelle :
3
dT ( p ) = ρ nD V 0 KJA
′
avec
1
xh
( x ) w p ( x ) xR 0 d x
K JA
′ = – dK T /dJA .
■ Généralisation aux pales de largeur quelconque
Jusqu’ici on a supposé que les longueurs des sections de pale
étaient petites comparées au rayon R0 comme c’est le cas pour les
hélices aériennes ; mais en général, ce n’est pas le cas. Il faut
comparer la projection de la corde C cos Φ 0 à la longueur d’onde
2πxR 0
.
λ = ------------------kZ
Si C cos Φ 0 λ , tout se passe comme en régime permanent mais
si C cos Φ 0 λ , la corde joue le rôle de filtre passe-bas et n’est pas
sensible à l’harmonique du sillage. Il en résulte que, pour les excitations de vibrations de coque par fluctuations de poussée de l’hélice,
il n’y a guère que les premiers harmoniques de rang kZ qui jouent
un rôle. Pour tenir compte du rapport C cos Φ 0 / λ, on introduit dans
la relation de la poussée précédente un coefficient d’affaiblissement
S déduit de la théorie des ailes portantes de faible envergure en
régime instationnaire.
Le coefficient d’affaiblissement S est un nombre complexe représenté sur la figure 34 sous forme de son module M et de son argument ϕi en fonction de la fréquence réduite :
p C
f*p ( p ) = ----- ----- cos Φ 0
x D
x
(avec p nombre entier = kZ dans le cas présent) pour différents
0,2 Z
allongements C /R 0 = A r (Ar aspect ratio) des pales : A r # ------------------ .
A e /A 0
Finalement, mise sous forme adimensionnelle et symbolique, la
relation donnant l’amplitude et la phase des excitations de poussée
à la fréquence f = np = n kZ (k entier) devient :
K T ( p ) = J 0 K JA
′
wp
amplitude du sillage de rang p,
ϕ wp sa phase,
δ
le devers,
tous fonction de x = r /R 0 .
Pour les calculs, dans la gamme de valeurs rencontrées ( f *
p <3,
A r < 3), on peut utiliser les relations suivantes :
1
M (f *
p , A r ) = ------------------------------------------------------------------------2
1 + ( 0,5 f *p + 0,03 f *p ) A r
et
′ M wp
∆K T ( p ) = J 0 K JA
wp
w p ( x ) M ( f *p ) exp i ( ϕ wp + p δ + ϕ i ) d x
avec
avec
Dans le cas des hélices sans devers, on peut avoir une idée approximative de la force d’excitation par une formule simplifiée de la
forme :
′ M wp
∆T ( p ) = ρ nD 3 V 0 KJA
avec
1
xh
Figure 34 – Coefficient d’affaiblissement pour le calcul de K T ( p ) ,
p étant le rang de l’harmonique
p C
- ----- cos Φ 0
f*
p = ---x
x D
ϕ i = 1,0 – 0,8 [1 – exp (– 2,3 f *
p )] (en rad)
moyenne pondérée de wp (x ) :
wp = 0,2 [1,3 w p (0,5) + 2 w p (0,7) + 1,8 w p (0,9)]
M
facteur d’affaiblissement de la figure 34 moyenné pour
les formes usuelles de pales par :
2
Ae 1
p
f*p = p ------- ---- 3 1 – 0,1 ----A0 Z
D
Exemple de calcul approché d’une fluctuation de poussée
Prenons le cas d’un cargo rapide filant 20 nd, dont les caractéristiques sont les suivantes :
— pour l’hélice, Z = 5 pales, D = 4,5 m, n = 2,5 tr/s (150 tr/min),
devers nul.
A e /A 0 = 0,80, P /D = 1,0, K T = 0,18 et K’JA = 0,48
— pour le navire,V0 = 10 m/s (≈ 20 nd) soit J 0 = V 0 /nD = 0,89
sillage w 0 = 0,15 ; w 5 (0,5) = 0,025 ;
w 5 (0,7) = 0,03 ; w 5 (0,9) = 0,06
La relation du coefficient de poussée donne un moyen simple et
approché de calculer l’amplitude et la phase des excitations de vibrations, à condition d’avoir des renseignements sur le sillage du navire.
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B 4 360 − 23
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Par application de la formule
1
cos a cos b = ---- [ cos ( a + b ) + cos ( a – b ) ] , le terme sous le signe Σ
2
n’est autre que la somme :
On fait le calcul pour p = Z = 5 :
— poussée de l’hélice :
T = ρn 2 D 4 KT = 0,104 × 2,5 2 × 4,5 4 × 0,18 = 48 t
— sillage :
j=Z
∑
w 5 = 0,2 (1,3 × 0,025 + 2 × 0,03 + 1,8 × 0,06) = 0,038
j=1
wp
------2
cos
2π
( p – 1 ) θ + j ( p – 1 ) ------- + ϕ wp
Z
2π
+ cos ( p + 1 ) θ j ( p + 1 ) -------- + ϕ wp
Z
— fréquence réduite :
1
2
- × 3 ( 1 – 0,1 × 1 ) = 2,15
f*
5 = 5 × 0,8 × --5
0,2 × Z
et aspect ratio A r = ------------------- = 1,25
A e /A 0
d’où M = 0,58 (figure 34)
qui est nulle sauf pour p – 1 = kZ et p + 1 = kZ .
Les excitations de vibrations horizontales et verticales ne sont
donc dues qu’aux harmoniques de sillage de rang p = kZ + 1 et
p = kZ – 1.
La suite du calcul des efforts horizontaux F y et verticaux F z se
fait sans difficultés pour aboutir aux formules adimensionnelles de
K FY et K F .
3
′ Mw 5
∆T ( p = 5 ) = ρ nD V 0 K JA
z
= 0,104 × 2,5 × 4,53 × 10 × 0,48 × 0,58 × 0,038
= 2,5 t
Par exemple :
J0
K Fy ( p ) = ------- K′JA
2
′ Mw 5 = 0,89 × 0,48 × 0,58 × 0,038
∆K T ( p = 5 ) = J 0 K JA
= 0,009 4 = 0,052 K T .
Comme on le voit, il s’agit d’excitations de vibrations de 2,5 t sur la
butée, ce qui est loin d’être négligeable.
Fluctuations de couple sur l’arbre : lors de mesures à la mer sur
les bateaux, il est plus précis de mesurer le couple que la poussée.
Il existe une relation entre les fluctuations de poussée sur une section de pale dt 1 et les fluctuations de couple correspondantes dq 1 :
dq 1 = dt 1 r tan Φ 0
On a alors pour ∆Q ( p ) ou ∆K Q ( p ) une formule analogue à
K T ( p ) en ajoutant le terme x tan Φ 0 dans l’intégrale :
1
3
dQ( p ) = ---- ρ nD V 0
2
J0
dK Q ( p ) = ------- K ′JA
2
1
xh
w p ( x ) M ( f *p )
xh
tan Φ 0 ( x ) ( x )
∑
M ( f *p ) w p
p=1
exp i ( ϕ wp + p δ + ϕ i ) d x
l’expression sous le signe Σ étant la somme de deux termes où p 1
et p 2 sont respectivement égaux à p 1 = kZ – 1 et p 2 = kZ + 1.
Pour la force verticale, on aurait une formule analogue, les deux
termes sous le signe Σ étant de signes contraires. Dans les deux cas,
la fréquence des excitations de vibrations est également f = knZ .
Si l’on se borne à la fréquence fondamentale f = nZ, le choix du
nombre de pales Z dépend à la fois de la valeur des harmoniques
de sillage de rang Z – 1, Z, et Z + 1 et de la réponse de la structure
arrière du navire aux excitations de vibrations axiales ou transversales. Le calcul n’est pas facile car les harmoniques du sillage ne
sont pas toujours connus avec précision.
4.1.3 Cas du sillage tangentiel
xh
w p ( x ) M ( f *p )
x tan Φ 0 exp i ( ϕ wp + p δ + ϕ i ) d x
dF y1 (force transversale)= dt1 tan Φ 0 cos θ
dF z1 (force verticale)
= dt1 tan Φ 0 sin θ
3
nD
avec dt1 = ρ ------------ V 0 K JA
′ (x ) dw (x ) .
Z
Pour l’harmonique de rang p, on a en sommant sur les Z sections
de pales :
∑ dFy1
nD
= ρ ------------ V 0 K JA
′ (x )
Z
j=Z
∑
j=1
2π
w p cos θ + j ------Z
2π
cos p θ + jp ------- + ϕ wp
Z
égalité analogue pour dFz1 en remplaçant cos θ par sin θ.
B 4 360 − 24
p = p1, p2
1
1
Pour la position d’une pale à l’angle polaire θ, la composante tangentielle des forces sur une section de pale dt1 tan Φ0 se projette
sur des axes Oy et Oz liés au bateau (Oz vertical, Oy horizontal) selon
deux forces :
3
x tan Φ 0 exp i ( ϕ wp + p δ + ϕ i ) d x
4.1.2 Fluctuations des forces transversales
dF y ( p ) =
Dans le cas où la ligne d’arbres est inclinée sur l’horizontale ou
plus exactement sur l’écoulement à l’arrière, il existe également un
sillage tangentiel w t .
Par exemple, pour une inclinaison α de la ligne d’arbres, le premier
harmonique est w t1 # V 0 sin α.
Pour calculer l’influence du sillage tangentiel sur les forces générées par l’hélice, on part de la composition des vitesses pour une
section de pale donnée (figure 35).
Par rapport au régime moyen stationnaire, on voit que tout se
passe comme s’il y avait une augmentation dα de l’angle d’attaque
de la section de pale d’une part et, d’autre part, une augmentation
de la vitesse relative section de pale/fluide ou encore, ce qui
revient au même, comme s’il y avait une augmentation (ou dimi
nution selon le sens de V t ) de la vitesse de rotation de l’hélice :
J0 Vt 
- = n  1 + -------- w t
n*(équivalent) = n  1 + -------------


πx
2πnr 
Si V t et 2πnr sont de même sens, il y a augmentation de la poussée et vice versa.
Sans entrer dans le détail des calculs et moyennant quelques
approximations justifiées compte tenu de la géométrie des pales et
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des valeurs usuelles de pas (0,6 < P /D < 1,5), on aboutit à la formule
suivante au rayon r = xR 0 :
dT cos β
3
------- ( w t ) = ρ nD V 0 KJA
′ tan β  1 + 2 ------------------------- K T w
t


dr
1 – w0 ( r )
On obtient ainsi des formules analogues à celles obtenues pour
les harmoniques du sillage axial en remplaçant w par
2 cos β
 tan β + ------------------------ K  . Il faut cependant noter qu’on ne peut pas
w
t 
1 – w 0 ( r ) T
ajouter directement l’influence de w a et w t car les phases des harmoniques de même rang ne sont pas nécessairement égales. Pour
les navires de commerce à une ligne d’arbres, l’influence du sillage
tangentiel est bien plus faible que l’influence du sillage axial. Pour
les vedettes rapides où l’arbre d’hélice est fortement incliné, il peut
en être différemment. En particulier, en ce qui concerne les forces
verticales où ce sont les harmoniques de rang kZ ± 1 qui sont
concernés, si on fait k = 0, l’harmonique tangentiel de rang 1 conduit
à une force verticale. Pour la même raison, l’hélice est un bon amortisseur de roulis, la vitesse tangentielle étant liée à la vitesse de roulis
et donnant une force F y .
Figure 35 – Composition des vitesses dans le cas d’un sillage
tangentiel variable
4.2 Excitations des vibrations de coque
engendrées par les fluctuations
de pression de l’hélice
Quand une pale d’hélice passe au voisinage d’une surface rigide,
elle engendre sur celle-ci des variations de pression dues, d’une part,
aux forces de portance (poussée + couple) qu’exerce la pale et,
d’autre part, à l’épaisseur de la pale se frayant un chemin à travers
le fluide. Examinons la contribution de ces deux facteurs sur les fluctuations de pression au voisinage d’une hélice.
4.2.1 Fluctuations de pression dues à la poussée
La poussée est due à la portance des pales. Cette portance est
due elle-même à la dépression qui s’exerce sur le dos de la pale et
à la surpression qui s’exerce sur la face. Il existe ainsi un champ
de pression au voisinage de la pale, qui est stationnaire par rapport
à celle-ci, mais instationnaire par rapport au bateau (pour un sillage
nul).
Sur un élément de surface dσ = dr ds d’une section de pale, il
s’exerce une différence de pression ∆p, due à la dépression sur le
dos et à la surpression sur la face. La portance dL de la section est :
dL = dr
C
0
∆p (s ) ds
Figure 36 – Fluctuations de pression sur la coque : notations
et la poussée correspondante : dt 1 = dL cos Φ 0 (figure 4).
Le champ de pression engendré par une pale est alors donné par
la formule suivante :
1
p – p 0 = – ------4π
R0
rh
dr
C
0
1
∆ p -------dn
1
1
–
------ d s = ------- S
4π
s⋅ n
- dr ds
∆ p ------------3
S
où n est le vecteur unité normal à la pale et orienté de la face vers
le dos pour ∆p > 0 et s le vecteur unitaire du vecteur MP , joignant
le point M(∆p ) de la pale au point P de mesure (figure 36), S étant
la distance MP.
de l’hélice, Oz vers le haut. Les dimensions et longueurs sont
normalisées par le rayon R 0 de l’hélice. On désigne par X la projection de MP sur Ox et par R, γ les coordonnées polaires de la projection de P sur le plan y Oz. La forme des pales en projection dans
le plan y Oz est définie par le devers δ de la génératrice (milieu de
section) compté à partir d’un rayon directeur (figure 36) par les longueurs de corde C (r ), ainsi que par l’angle de pas Φ0 (r ). Au point
M de coordonnées polaires (r, θ ), l’élément de surface dσ = dsdr est
le centre du doublet de pression ∆p (s, r ) auquel correspond un élément de poussée :
∆t 1 drds = ∆p (s, r ) cos Φ0 drds
On considère donc un point M sur la pale et un point P de l’espace
et des axes Oxyz : Ox axe de l’hélice, Oy, Oz dans le plan moyen
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Après un calcul vectoriel simple, on aboutit à la formule suivante
relative à la pression engendrée par une pale (indice T1) :
1
p T1 = -------4π
1
xh
C
0
Les vitesses induites en un point P par une source située en A à
1 q
une distance S découlent d’un potentiel -------- ---- . Elles sont radiales
4π S
et ont pour valeur :
∆t 1 (s, r )
X – r µ tan Φ 0 + R sin ( θ + µ – γ ) tan Φ 0
----------------------------------------------------------------------------------------------------------- dsdr
S3
q s
U = -------- -------34π S
avec s vecteur unitaire suivant AP
Le calcul du champ de pression d’une telle source entraînée avec
une vitesse axiale V 0 et un mouvement de rotation ωr est donné par :
S = [(X – r µ tan Φ 0)2 + R 2 – r 2 – 2rR cos (θ + µ – γ )]1/2
p – p 0 = ρ (V 0 U x + ω RU t)
Pour simplifier, comme dans le cas des excitations de vibrations
par la ligne d’arbres, on peut examiner le cas où les cordes des sections sont petites devant R0 : C /R0 1 et µ # 0.
les grandeurs X, S, R, µ, θ et γ ayant la même signification que
dans le paragraphe précédent (figure 36) et U x et U t étant les
vitesses axiales et tangentielles induites par la source.
avec
Dans ce cas,
C
0
1
= -------------p
T1
4πZ
dT
1 dT
∆t 1 ds = ----------1- = ----- -------Z dr
dr
1
xh
X + R sin ( θ – γ ) tan Φ 0 d T
----------------------------------------------------------------- ------- d r
dr
S3
Pour mettre en évidence le coefficient de poussée K T , on considère
p
le coefficient de pression adimensionnel K p = ------------------- pour une pale
2 2
ρn D
(indice T1) :
1
K pT1 = -------πZ
1
xh
X + R sin ( θ – γ ) tan Φ 0 d K T
----------------------------------------------------------------- ------------ R 0 d r
dx
S3
Dans les formules ci-dessus, c’est la poussée (même constante)
qui engendre les fluctuations de pression et non les fluctuations de
poussée comme dans le cas des excitations de vibrations par la ligne
d’arbres. Le sillage n’a une influence modérée que par l’augmentation de poussée qui se produit lorsque la pale passe dans une
région de fort sillage mais les harmoniques de ce dernier n’entrent
pas directement en jeu.
La fréquence des fluctuations de pression engendrées par la poussée de l’hélice est évidemment celle du passage des pales et ses
multiples : f = nZ , 2nZ , etc. Pour connaître l’amplitude et la phase
p T1 ) relaà chaque fréquence, il faut calculer l’intégrale de surface ( tive à une pale pour les valeurs de θ variant de 0 à 2π, décomposer
en série de Fourier et multiplier le résultat par Z , pour avoir l’amplitude pour l’hélice entière. Avec de petits ordinateurs, le calcul
demande quelques secondes.
Pour tenir compte de la surface de la pale, on peut simplifier le
calcul si on ne cherche pas une grande précision ; on part de l’inté ) qui considère la pale comme une ligne portante et on
grale ( K
pT1
multiplie le résultat du calcul par le facteur k # 1 – 0,5 (A e /A 0)2.
4.2.2 Fluctuations de pression dues à l’épaisseur
des pales
Pour calculer le champ de pression dû à l’épaisseur des pales, on
linéarise le problème en supposant la cambrure des sections nulle,
ce qui est justifié dès que l’on s’éloigne quelque peu de la pale.
L’écoulement autour d’une section de pale est calculé en plaçant
sur la corde des singularités mathématiques appelées sources ou
puits selon leurs signes et d’intensités telles que le profil de la section
soit une ligne de courant.
L’intensité dq des sources est donnée par :
de
dq = V R -------- d s
ds
avec
e
épaisseur à l’abscisse s
B 4 360 − 26
On a :
q ( X – r µ tan Φ 0 )
U x = -------- ---------------------------------------4π
S3
et
q R sin ( θ + µ – γ )
U t = -------- -----------------------------------------4π
S3
On trouve, tous calculs faits, pour une section de pale :
ρω r
dp e = ----------4π
C
0
( X – r µ tan Φ 0 ) tan β – R sin ( θ + µ – γ )
- ds
q ( s, r ) ------------------------------------------------------------------------------------------------------S3
On désigne par F (X, R, S, r, θ, γ, µ ) le terme entre crochets associé
à q.
Si on s’éloigne quelque peu de la pale d’hélice, disons à une longueur de corde moyenne comme c’est le cas d’un point de la coque
situé au voisinage de l’hélice, on peut sans grande erreur remplacer
la répartition de sources le long de la corde par deux sources, l’une
(source) placée près du bord d’attaque (µ 1) et d’intensité V R e max ,
l’autre (puits) placée près du bord de fuite ( µ 2 ) et d’intensité
– V R e max . La position de ces sources correspond à l’abscisse du
profil où l’épaisseur e (s ) # e max /2, soit, pour les profils usuels, une
source à environ 0,08 C du bord d’attaque et un puits à 0,12 C du
bord de fuite. Cette approximation faite, le calcul des fluctuations
de pression engendrées par l’épaisseur d’une pale d’hélice se réduit
p égale à :
alors à une simple intégrale ρ
-------- ω
4π
avec
1
xh
e max
V R ------------- [ F E ( X E , R E , S E , r , θ E , γ E , µ E ) – F S ( X S … µ S ) ] r d r
R0
2πnr
V R = -------------------- # 2 π nr
cos Φ 0
V0 ( 1 – w )
tan β = ---------------------------2πn ⋅ rR 0
C
µ E = δ – 0,42 -------- cos Φ 0
R0
C
µ S = δ + 0,38 ------- cos Φ 0
R0
L’indice E concerne la source placée près du bord d’attaque et
l’indice S celle placée près du bord de fuite.
4.2.3 Fluctuations totales de pression
engendrées par l’hélice
Pour avoir la fluctuation de pression totale, la pression p e ainsi
calculée doit être ajoutée à la pression p T due à la poussée. Dans
la pratique, il est plus simple de décomposer p e en série de Fourier
comme dans le cas de p T . Les amplitudes de fluctuations de pres
+
sion totales s’obtiennent en faisant la somme p
T p e = p en tenant
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compte de leur phase respective. Pour la fréquence f = nZ , les pres
sions p T et p e sont déphasées d’environ 90o pour X = 0 (plan de
l’hélice), le déphasage diminuant vers l’avant de l’hélice et augmentant vers l’arrière. La figure 37 donne un exemple de fluctuations
de pression engendrées par une hélice à 5 pales sur une plaque
plane.
De plus, dans les conditions normales de fonctionnement, les
amplitudes de p T et p e sont du même ordre de grandeur pour un
harmonique kZ donné.
Le maximum de l’amplitude des fluctuations de pression décroît
très vite lorsque la distance R /R 0 croît. Par exemple, pour X = 0 le
coefficient de pression varie comme (1/R )Z + 1, (1/R )6 sur la figure 37
où Z = 5.
De même, ce coefficient de pression décroît très vite quand le
nombre de pales augmente, environ proportionnellement à 1/Z à
1/Z 2 selon les valeurs de X /R 0 et R /R 0 (figure 38).
Remarque importante : les calculs des fluctuations de pression
générées par l’hélice ont été faits sans tenir compte de la présence de la coque. Or celle-ci joue le rôle de miroir pour les ondes
de pression. Si la surface de la coque était parfaitement rigide,
plane et parallèle à l’axe de l’hélice, la pression mesurée sur la
coque serait égale à 2 fois celle calculée, ce que confirme l’expérience. En réalité, la coque joue le rôle d’un miroir déformant et
la pression mesurée est seulement de l’ordre de 1,5 à 1,8 fois la
pression calculée.
Figure 37 – Fluctuations de pression sur une plaque plane
à différentes distances de l’axe d’une hélice à 5 pales
(premier harmonique f = nZ )
4.2.4 Fluctuations de pression dues à la cavitation
La cavitation est à l’origine de la plupart des problèmes de
vibrations rencontrés sur les navires par suite des fluctuations de
pression trop élevées sur la coque arrière. C’est surtout la cavitation
par lame sur le dos (figure 28) qui se produit lorsque l’incidence
d’une section de pale est trop grande. Cela se produit dans les zones
de fort sillage situées à la partie haute de l’hélice, donc près de la
coque.
Si la cavitation par lame se produisait dans un sillage uniforme
et était peu étendue (disons longueur < C /2), elle serait quasiment
permanente et agirait comme un léger accroissement de l’épaisseur des pales, donc n’augmenterait que légèrement les fluctuations de pression sur la coque.
Malheureusement, cela n’est généralement pas le cas et la surface, donc le volume, de la poche de cavitation varie avec la position angulaire de la pale, donc avec le temps (figure 28). Une
poche de cavitation de volume variable Vol (t ) se déplaçant provoque une variation de pression, en un point P situé à une distance
S égale à :
Figure 38 – Influence du nombre de pales Z sur les fluctuations
de pression (X /R 0 = 0,5, R /R 0 = 1,4 et premier harmonique f = nZ )
ρ ∂  1 d Vol 
# ---------- --------------p
c
2π ∂t  S dt 
La cavitation se produisant à la position haute de la pale dans un
secteur limité (figure 28), S est presque constant : S # S 0 , et
comme θ = ω t = 2 π nt on a :
2
2
π n d Vol
p c # ρ ----------- ---------------S0 d θ 2
Il en résulte que les fluctuations de pression sur la coque dues à
la cavitation sont d’autant plus grandes que les variations de sillage
sont concentrées dans un secteur dθ étroit.
En général, la poche de cavitation présente un caractère assez irrégulier si bien que le terme d2Vol /dθ 2 introduit en plus de l’harmonique de rang 1 des harmoniques de rang 2 voire 3 (figure 39). La
présence d’une houle même peu importante peut moduler les fluctuations de pression ce qui rend délicate l’analyse des enregistrements de pression effectués à bord.
Figure 39 – Exemple d’enregistrement de fluctuations de pression
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De plus, contrairement aux fluctuations de pression dues à la poussée et à l’épaisseur des pales dont la phase varie selon le point de
la coque, les fluctuations de pression dues à la cavitation sont toutes
en phase, ce qui a pour effet d’augmenter la force totale sur l’arrière
du navire.
Le tableau suivant indique quelles sont les conséquences du point
de vue vibratoire de la demi-amplitude moyenne de crête à creux
des fluctuations de pression [4].
(0)
Niveau vibratoire
(∆p ) en m d’eau # 104 Pa)
(1er ou 2e harmonique)
Faible
< 0,60
∆p
Risque d’apparition
d’un niveau sensible
< 1,0
0,70 < ∆p
Risque d’un niveau gênant
< 1,50
1,0 < ∆p
Risque de cassures
dans la structure arrière
> 1,50
∆p
En général, on choisit un nombre de pales élevé : 5 ou 6 quitte
à perdre un peu sur le rendement.
Un moyen efficace pour réduire les excitations de vibrations
transmises par la ligne d’arbres consiste à donner du devers aux
pales. Intuitivement et qualitativement, cela est facile à
comprendre. Quand une pale passe dans un secteur de fort sillage,
par exemple derrière un aileron dans le cas d’un sous-marin, si la
pale n’a pas de devers, les fluctuations de poussée des différentes
sections de pale sont pratiquement en phase (figure 40). Si la pale
a du devers, les différentes sections passent dans le sillage avec un
déphasage croissant du pied de pale à l’extrémité de pale
(figure 40), si bien que la fluctuation de poussée se trouve réduite
sur la pale, et sur les autres pales quand l’harmonique du sillage
est égal à Z . La figure 41 montre quelle est la réduction théorique
des fluctuations de la poussée d’hélices à 3, 4 et 6 pales en fonction du taux de devers en bout de pale : Z δ T /2π.
Lorsque le devers est important – disons supérieur à 45o – le
maximum des contraintes a tendance à se situer à mi-hauteur de
pale au voisinage du bord de fuite. Il faut donc vérifier que ces
contraintes restent dans les limites admissibles (§ 6.5).
Comme les fluctuations de pression concernent plusieurs mètres
carrés de surface de coque, on voit que rapidement les efforts en
jeu dépassent plusieurs tonnes pour les navires de tonnage important (> 10 000 t).
4.3 Remèdes pour minimiser
les excitations des vibrations
L’hélice et le bateau forment un ensemble qu’on ne peut pas
dissocier. Les dispositions à prendre pour diminuer les risques de
vibrations sont à la fois une affaire d’architecte naval jouant sur les
formes arrière et une affaire de spécialiste d’hélice jouant sur la géométrie de celle-ci.
Tous les remèdes proposés ci-après pour diminuer les excitations
de vibrations du navire sont du domaine de l’hélice, mais on peut
également jouer sur les formes arrière de la carène pour améliorer
le sillage en le rendant plus régulier (figure 43). Dans le même but,
on peut également ajouter sur la coque arrière des ailerons, des
semi-tuyères, etc.
Tout d’abord, on a vu au paragraphe 1.4 comment on choisissait
les caractéristiques géométriques de l’hélice (diamètre, pas, fraction
de surface) pour que celle-ci ait un rendement maximal compte tenu
des conditions de fonctionnement imposées (hélice optimale). Des
modifications doivent être apportées à ces premières données pour
tenir compte des contraintes liées aux vibrations et à la cavitation.
Figure 40 – Illustration de l’influence du devers
sur les fluctuations de poussée (Z = 5)
4.3.1 Réduction des excitations
transmises par la ligne d’arbres
On a vu (§ 4.1) que seuls les harmoniques de sillage de rang kZ – 1,
kZ et kZ + 1 étaient à l’origine des excitations de vibrations par la
ligne d’arbres. Comme l’amplitude des harmoniques décroît en
moyenne quand leur rang croît, seuls les harmoniques de rang Z – 1
à Z + 1 ont de l’importance dans le choix du nombre de pales selon
que les risques de vibrations sont dus aux efforts fluctuants transversaux (Z – 1 et Z + 1) ou aux efforts axiaux sur la ligne d’arbres
(Z ). Malheureusement, on ne connaît pas toujours l’amplitude des
divers harmoniques d’un sillage mesuré sur modèle avec une certaine imprécision et qui peut être plus ou moins différent du sillage
du navire réel (effet d’échelle).
Dans le choix du nombre de pales Z , il faut également éviter que
la fréquence des excitations de vibrations par l’hélice : f = nZ (ou
knZ ) soit proche d’une des fréquences de vibrations de la charpente
arrière du navire dans les conditions normales d’exploitation, fréquences qu’on sait calculer par la méthode des éléments finis.
B 4 360 − 28
Figure 41 – Influence du devers de l’hélice sur les excitations
par la ligne d’arbres (P /D = 1 et A e /A 0 = 0,6)
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4.3.2 Réduction des fluctuations de pression
sur la coque
Donner du devers aux pales diminue les fluctuations de pression
sur la coque, cependant à un degré moindre que dans le cas des
excitations de vibrations par la ligne d’arbres. Le devers diminue non
seulement les fluctuations de pression d’une hélice non cavitante,
mais également celles d’une hélice cavitante, la réduction dépendant
du gradient de variation de sillage rencontré par les pales au voisinage de la coque (figure 42).
On a également vu, au paragraphe 4.2.3, que l’augmentation du
nombre de pales était également favorable à la diminution des
fluctuations de pression sur la coque avec ou sans cavitation
(figure 38).
Un autre moyen de réduire les fluctuations de pression sur la
coque consiste à diminuer la charge hydrodynamique (poussée) en
bout de pale.
Lorsqu’une pale passe en position haute au voisinage de la
coque, la distance S est minimale et l’influence de S 3 devient
importante. En diminuant ∆T en bout de pale et en reportant la
diminution de poussée à des rayons plus faibles (r < 0,7 R 0), on
diminue d’un pourcentage non négligeable les fluctuations de
pression maximales sur la coque. Cette diminution de la charge en
bout de pale est obtenue en réduisant le pas en bout de pale pour
r > 0,7 R 0 . La réduction de pas peut être importante puisque le
rapport (pas à R 0)/(pas à 0,7 R 0) peut descendre jusqu’à 0,60. Un
autre avantage de la réduction du pas en bout de pale est la réduction de la cavitation de cette partie de pale.
Pour la même raison, le jeu coque/hélice a une grande importance puisque les fluctuations de pression diminuent très rapidement lorsque le jeu augmente (figure 37). Les sociétés de
classification (Bureau Veritas, Lloyds, etc.) recommandent donc un
jeu minimal coque/hélice de l’ordre 0,1 D à 0,2 D selon la position
de la coque par rapport à l’hélice (figure 43).
p T1 figure le
Au paragraphe 4.2.1, dans l’expression donnant dK T1 1
∆t 1
rapport --------3- ou -------------- ------3- .
dx S
S
Figure 42 – Demi-amplitude des fluctuations de pression maximale
sur la coque d’un cargo en fonction du devers (Z = 4)
5. Projet d’hélice
Un projet d’hélice est le résultat des discussions d’un ménage à
trois : l’architecte naval définit les formes de carène, le motoriste les
caractéristiques du moteur qu’il propose et le spécialiste hélice,
parent pauvre du trio, doit s’adapter aux contraintes imposées par
les deux autres. Le degré de complexité du calcul d’une hélice
dépend du navire ou de l’engin qu’elle doit propulser. S’il s’agit d’une
hélice pour moteur out-board destinée à propulser un navire de plaisance, ses caractéristiques sont prises dans un catalogue de modèles
suivant la puissance du moteur et les dimensions du bateau à propulser. S’il s’agit d’un chaland automoteur, ses caractéristiques sont
également déterminées à partir du moteur et du tonnage du chaland
par des méthodes de calcul simples basées sur les courbes données
dans le paragraphe 1 mais il faudra tenir compte du sillage.
On décrit ci-après les étapes successives du calcul d’une hélice
dans le cas où celle-ci constitue un élément important du projet de
navire et malheureusement une source éventuelle d’ennuis dans
l’exploitation du navire (par exemple porte-conteneurs rapides,
navires de guerre).
L’organigramme de la figure 44 décrit les principales étapes de
calcul complet d’un projet d’hélice, le calcul pouvant être arrêté à
un stade quelconque selon le type de navire et les spécifications plus
ou moins sévères imposées. De même, au début, certaines étapes
peuvent être sautées, moyennant quelques formules
théorico-empiriques.
5.1 Données de départ
Connaissant le déplacement du navire et la vitesse souhaitée, une
première estimation faite par le chantier de construction permet de
choisir le moteur existant le mieux adapté au problème. En effet, il
est rare que l’on étudie un moteur spécial pour chaque projet sauf
peut-être dans le cas des turbines à vapeur de forte puissance. Dans
la plupart des cas, on choisit parmi les moteurs diesels existants,
moteurs diesels lents mais encombrants dans le cas des navires de
très fort tonnage, moteurs diesels rapides avec réducteur de vitesse
pour être adaptés à l’hélice.
Figure 43 – Forme arrière de la carène donnant peu d’excitations
de la part de l’hélice (jeux minima recommandés)
Dans tous les cas, les données de base [étape (1) de l’organigramme, figure 44 ] sont les suivantes : puissance F et nombre de
tours de l’hélice n (données nominales du moteur), vitesse estimée V.
En plus, soit d’après un système expert basé sur des statistiques,
soit d’après un essai sur modèle, on se donne la résistance R H (V ),
le sillage moyen w et le coefficient de succion t (§ 1.3).
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B 4 360 − 29
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Figure 44 – Organigramme
pour un projet d’hélice
En ce qui concerne la résistance, il faut considérer la résistance
en eau calme (ce qui est rare en haute mer), l’accroissement de résistance du à la houle et à la salissure de carène. On choisit donc une
résistance moyenne compte tenu des conditions d’exploitation
prévues.
5.2 Différentes étapes du calcul
■ Étape (2) : on se fixe le nombre de pales Z et la fraction de surface
de l’hélice A e /A 0 . Ces données avec les données de l’étape (1) permettent le calcul de l’hélice optimale (provisoire) (§ 1.4) à savoir le
diamètre D, le pas relatif moyen P /D et le rendement η0 .
■ Étape (3) : couplage avec le moteur.
À ce stade, il faut tenir compte des caractéristiques du moteur F (n )
à différentes puissances et différents nombres de tours (figure 45).
Pour diverses résistances R (V ) correspondant à une mer calme, une
carène sale, une mer agitée, etc., on fait varier le pas P /D et on détermine, pour chaque vitesse V, quelle sera la puissance à fournir et
la vitesse de rotation à partir des courbes déduites des séries sys-
B 4 360 − 30
tématiques d’hélices (figure 7 par exemple). Pour chaque loi de résistance R H (V ) considérée, on obtient ainsi un réseau de courbes
comme indiqué sur la figure 45. On adopte alors le pas qui convient
le mieux aux conditions d’exploitation.
L’adoption d’hélices à pales orientables offre évidemment plus de
souplesse, mais le calcul du calage de référence part de la même
méthode. On peut également jouer sur le diamètre optimal dans un
domaine limité.
Cette troisième étape permet d’affiner l’avant-projet (conduite du
moteur, diamètre de la ligne d’arbres, etc.).
Ces trois premières étapes sont de la compétence du chantier. Les
étapes suivantes peuvent être du domaine du chantier ou du
constructeur d’hélices, étant entendu qu’il existe une étroite concertation entre les deux.
Les étapes suivantes du calcul permettent de définir l’hélice avec
plus ou moins de raffinement selon les performances que l’on attend
d’elle. Elles sont détaillées dans l’organigramme de la figure 44,
mais peuvent être englobées dans un ou plusieurs programmes.
■ Étape (4) : elle constitue une bonne approximation pour les hélices
ayant peu de devers et une charge en extrémité de pale modérément
réduite (réduction de pas inférieure à 20 % environ). Le calcul basé
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Figure 46 – Répartition des pressions sur le dos (avant)
d’une pale d’hélice
Figure 45 – Couplage hélice/moteur diesel
pour une loi des résistances R (V ) du navire
sur l’utilisation des coefficients de Goldstein (§ 9) nécessite (comme
l’étape suivante) les données de :
— la répartition de la poussée dC T/d x ;
— la loi des épaisseurs emax en fonction du rayon, du choix du
type de profil, de la forme de la ligne moyenne adoptée, de l’immersion de la pale en position haute et de la variation de sillage w ( r ) .
Enfin, le programme de calcul inclut la formule des corrections
dues au frottement des pales par l’intermédiaire d’un coefficient de
frottement C D fixé, ainsi que la loi de correction de cambrure.
Cette étape de calcul donne pour chaque rayon : le pas P /D, la
longueur de corde C et la cambrure maximale fmax , ainsi que le
rendement η 0 de l’hélice.
■ Étape (5) : elle permet de mieux tenir compte du devers δ et de la
variation de pas P /D (r ) calculée à l’étape (4). Elle est basée sur
l’approximation de la ligne portante de Lerbs (§ 9), complétée par un
calcul plus précis de la correction de cambrure.
■ Étape (6) : elle permet d’affiner le calcul de la cambrure des
sections, de la répartition des pressions sur la pale pour un sillage
w ( r ) constant à chaque rayon et d’estimer ainsi les risques de
cavitation (§ 3 et figure 46). L’introduction de données, concernant
une définition plus précise du sillage en fonction de r et θ, permet un
calcul théorique plus ou moins précis par un maillage de la pale (§ 9)
– selon la méthode adoptée – des risques de cavitation.
Remarques générales : au vu des résultats de calculs obtenus après chaque étape, on
peut être amené à modifier légèrement les données géométriques de l’hélice ayant servi
comme données. On effectue alors une ou plusieurs boucles de calcul indiquées ou non
sur l’organigramme (figure 44).
De plus, il faut bien voir que la précision demandée aux calculs doit être cohérente
avec la précision des données, en particulier celle relative au sillage. Il est inutile de faire
des calculs précis à partir de données incertaines. En effet, compte tenu de la vitesse de
calcul des ordinateurs actuels, les calculs ci-avant ne demandent que quelques minutes
et il est tentant d’accumuler des listings de chiffres.
■ Étape (7) : calcul des contraintes par la méthode des éléments finis
(cf. article Méthode de calcul des structures élastiques [A 330] dans
le traité Sciences fondamentales).
Les caractéristiques géométriques de l’hélice définitivement
adoptées servent de base de calcul des contraintes mécaniques
compte tenu de la répartition de poussée adoptée au départ et vérifiée lors du calcul de la répartition des pressions sur la pale [étape
(6)]. Le calcul des contraintes donne également les déformations
Figure 47 – Contraintes calculées sur la face d’une hélice
(en daN/mm2)
de la pale sous l’effet de la poussée, surtout pour les hélices à fort
devers, dont on tient compte en apportant une correction au pas.
La figure 47 donne les contraintes calculées pour une hélice à fort
devers. On constate des contraintes élevées à mi-hauteur de pale
côté bord de fuite. Dans ce cas, il y aurait lieu d’augmenter les épaisseurs de pale dans cette zone.
Pour les hélices à pales orientables, il faut également calculer le
couple sur l’axe d’orientation afin de dimensionner les dispositifs
de commande du pas.
En résumé, il est relativement facile de calculer une hélice ayant
un bon rendement, mais il est plus compliqué de diminuer les
risques de cavitation et les excitations de vibrations, conduisant
ainsi à adopter des réductions de charge en extrémité de pale et
des devers importants.
6. Fabrication des hélices
La fabrication des hélices comporte trois phases : la fonderie, la
finition (par meulage ou usinage) et le contrôle géométrique.
6.1 Matériaux pour hélices
Les matériaux pour hélices doivent avoir les qualités suivantes :
— facilité de fabrication (moulage) ;
— bonne résistance mécanique ;
— faible corrosion marine ;
— résistance à l’érosion (cavitation en particulier) ;
— résistance à la salissure ;
— facilité de réparation (apport de métal en cas d’avarie).
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Alors que vers 1960, deux tiers des hélices étaient en laiton HR
(haute résistance), plus exactement Cu + Zn + addition de Ni et Al,
les hélices actuelles sont en grande majorité (70 à 80 %) en
bronze-Al-Ni ou bronze-Al-Mn (plus des traces de fer, etc.) pour améliorer la résistance à la corrosion.
C’est grâce aux études métallurgiques que les bronze-Al-Mn ont
pu apporter une amélioration importante dans les qualités requises
ci-avant.
Cependant, pour des hélices de faible diamètre ou pour des applications particulières, on trouve des hélices en acier inoxydable
(Cr + Ni + Mo) quand on a des problèmes de corrosion, voire en duralumin et même titane quand on cherche des gains de poids.
6.2 Fonte des hélices
La coulée des hélices rentre dans la technique des opérations de
fonderie (cf. articles Fonderie et moulage des alliages de cuivre
[M 800] et de zinc [M 830] dans le traité Matériaux métalliques en
prenant des précautions spéciales, en particulier quand il s’agit de
fondre des hélices de grand diamètre (D > 8 m) nécessitant presque
100 t de métal en fusion. Les précautions spéciales, indépendamment des masses de métal mises en jeu, résultent de la forme en
lame mince vrillée des pales ; après coulée, cette forme demande
un refroidissement contrôlé très lent et homogène pendant plusieurs
jours, voire la semaine, de façon à éviter toutes tensions résiduelles
qui pourraient par la suite conduire à des déformations de pale
incompatibles avec les surépaisseurs de fonderie prévues et que l’on
cherche à minimiser pour réduire le temps d’usinage.
Lorsque l’on fabrique une seule hélice, le moule est détruit après
usage et généralement, on prévoit une hélice de rechange. Lorsque
l’on fabrique plusieurs hélices, ou des pales d’hélices à pales
orientables, on utilise un modèle en bois réutilisable plusieurs fois.
La forme du moule ou du modèle est obtenue à partir de la forme
des différentes sections cylindriques du plan, compte tenu de la surépaisseur prévue. Cependant, selon les dimensions de l’hélice,
chaque fondeur a sa technique particulière, fruit d’une longue
expérience.
6.3 Usinage des pales
Sauf pour les petites hélices ( D < 0,30 m) qui peuvent être
obtenues sans finition par la technique de la cire perdue, il s’agit
d’enlever les surépaisseurs de fonderie et d’usiner le moyeu (fixation
sur l’axe d’hélice), ce dernier point ne présentant pas de difficultés
particulières. Pour l’usinage des pales, il existe deux procédés de
fabrication :
— la finition par meulage manuel ;
— l’usinage par machine à commande numérique.
Le meulage manuel demande une main-d’œuvre qualifiée et
l’obtention de la forme des sections de pale est vérifiée pas à pas
au cours du meulage au moyen de gabarits. Il s’agit d’une opération
bruyante, polluante malgré les précautions prises, nécessitant de
nombreuses heures de travail et ne permettant pas d’obtenir une
précision entrant dans les tolérances ISO les plus sévères.
L’usinage par machine à commande numérique est nécessaire
lorsque le matériau mis en œuvre se prête mal au meulage ou
conduit à de fortes surépaisseurs de fonderie (acier inoxydable),
mais il concurrence le meulage surtout lorsqu’il s’agit d’assurer une
grande précision. Les machines à commande numérique (cf. article
spécialisé [B 7 130] dans ce traité) utilisées sont adaptées à la taille
des pales d’hélices et peuvent être à trois axes ou cinq axes, de façon
à pouvoir usiner des surfaces gauches. Ces machines possèdent des
programmes de calculs spécifiques qui, à partir de la géométrie des
pales définies par un certain nombre de sections cylindriques, per-
B 4 360 − 32
mettent par interpolation entre sections de définir la trajectoire de
la fraise d’usinage. En fin d’usinage, une phase ultime de polissage
est destinée à effacer toute trace des outils.
Les machines à cinq axes sont nécessaires si l’on veut obtenir avec
précision la forme du bord d’attaque. Ceci est important car la forme
conditionne très fortement l’apparition de la cavitation par lame.
Pour l’usinage des pales des hélices à pales orientables, on peut
utiliser des machines à reproduire à partir d’une pale type.
6.4 Contrôle des pales. Tolérances
Il s’agit de vérifier que la forme de pale réalisée est bien conforme
à la forme prévue. Pour ce faire, à l’aide d’une machine à mesurer,
on mesure les coordonnées dans l’espace d’un grand nombre de
points judicieusement choisis sur la surface de la pale et on compare
les valeurs ainsi mesurées (après corrections liées aux caractéristiques du palpeur) aux valeurs théoriques du plan. L’idéal est de pouvoir le faire sur une même section cylindrique (figure 48), mais cela
n’est pas toujours possible.
Les normes ISO 484/1 et 2 précisent les tolérances admises sur
les principales grandeurs géométriques définissant une pale, ainsi
que sur la façon d’opérer. Ces tolérances portent sur le pas, les longueurs de corde, l’épaisseur des sections et leur cambrure, l’angle
de devers, etc. Le contrôle du profil des sections au voisinage du
bord d’attaque est effectué à l’aide de calibres de profil d’une certaine longueur de corde (20 %). Sont distinguées différentes
classes d’hélices ; citons dans un ordre de précision décroissante :
— classe S : navires rapides (V > 25 nd) et militaires, navires pour
lesquels le bruit et les vibrations sont d’une importance primordiale :
paquebots de croisière, navires de recherche, etc. ;
— classe 1 : navires marchands en général : ferries, remorqueurs
de haute mer, cargos, etc. ;
— classe 2 : navires de faibles puissance et vitesse : navires de
pêche côtière, péniches, etc.
6.5 Contraintes admissibles dans les pales
Comme indiqué dans le paragraphe 5, relatif au calcul de projet
d’hélice, l’étape finale consiste à calculer les contraintes dans la pale
de l’hélice par la méthode des éléments finis lorsque la géométrie
de la pale est bien définie. Le calcul est fait en tenant compte de la
2
1 d T
charge ----- -------------- prévue lors du projet, du pas des diverses sections
Z drdθ
et de la force centrifuge. Les contraintes sont maximales (en traction)
sur la peau de la face de la pale (intrados), la poussée y contribuant
pour 60 à 70 %, le couple pour 25 à 30 % et la force centrifuge pour
5 à 10 %.
Figure 48 – Principe du dispositif de contrôle des pales
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_____________________________________________________________________________________________________________________ HÉLICES MARINES
Dans le cas simple où la pale a un très faible devers, la théorie
de la lame encastrée a une extrémité donne une précision suffisante, la contrainte maximale étant située à l’emplanture de la
pale.
Pour les hélices à fort devers, disons supérieur à 60o, le calcul par
la méthode des éléments finis montre que le maximum de contrainte
se produit généralement côté bord de fuite, à mi-hauteur où la courbure du contour de la pale est la plus marquée (figure 47). En marche
arrière, les contraintes peuvent conduire à la rupture des pales si
l’épaisseur est insuffisante.
Dans le cas des hélices à pales orientables où le pas varie au cours
des manœuvres, la répartition de la poussée d 2T /dr dθ n’est pas
connue a priori et doit être calculée par la théorie de la surface
portante (§ 9) et on doit porter attention à l’implantation sur l’embase
de la pale, la longueur de corde y étant limitée par les impératifs
mécaniques et géométriques du système d’orientation.
Le problème est donc de vérifier que les contraintes maximales
calculées restent en dessous des contraintes admissibles du matériau. Or, celles-ci ne sont pas directement fonction de la résistance
à la rupture, ou de la limite élastique, compte tenu des coefficients
de sécurité. Il faut tenir compte du caractère cyclique des contraintes
qui varient à chaque révolution par suite de l’existence du sillage
engendrant des variations de poussée. Pour un navire peu rapide
( ≈ 15 nd) aux formes arrière bien remplies, les variations de
contrainte crête à creux (figure 49) peuvent représenter 50 à 100 %
de la contrainte moyenne. En revanche, pour un navire rapide ou
à deux lignes d’arbres, ce pourcentage est beaucoup plus faible.
Pour définir les contraintes maximales admissibles, on prend en
général comme référence la résistance du métal à la rupture au
bout de 108 cycles sous charge fluctuante (108 cycles correspondent en moyenne à 2 ans de fonctionnement d’un bateau qui peut
naviguer pendant 20 ans). Cette résistance à la rupture sous charge
fluctuante, qui diminue au fur et à mesure que le nombre de cycles
augmente (figure 50), est mesurée en laboratoire sur une
éprouvette soumise à une force de traction moyenne à laquelle on
superpose une force fluctuante, l’éprouvette étant arrosée par de
l’eau additionnée de 3 % de NaCl pour simuler l’influence de la
corrosion par l’eau de mer. D’autres machines utilisent des plaques
rectangulaires soumises à des efforts de flexion.
La contrainte moyenne admissible σ est évidemment fonction
σ appliquée (figure 51). Avec les
de la contrainte fluctuante ∆ bronzes Al-Mn, la résistance à la rupture est de l’ordre de
2
60 daN/mm . Les contraintes moyennes adoptées pour les hélices
marines varient de 5 à 10 daN/mm2 selon le type de navire. Par
exemple, pour une hélice de navire militaire n’utilisant que
périodiquement sa puissance maximale, on peut majorer légèrement les contraintes admissibles.
De plus, selon l’importance du projet on ne calcule pas systématiquement les contraintes mais, dans tous les cas, on doit respecter
les normes des sociétés de classification (Bureau Veritas, Lloyd,
etc.).
Le détail de la répartition d’épaisseur des sections en fonction
du rayon est d’abord une affaire d’hydrodynamicien (cavitation,
contraintes), mais le fondeur et l’usineur peuvent également
intervenir.
Figure 49 – Contrainte à 0,30 R 0 et e max sur la face d’une pale
en fonction de sa position angulaire (exemple du sillage d’un gros
pétrolier à une ligne d’arbres figure 12)
Figure 50 – Exemple de courbe de fatigue d’un bronze Al-Mn
Figure 51 – Relation entre la contrainte moyenne admissible sous corrosion pour 108 cycles
et la contrainte fluctuante (à titre indicatif, pour le bronze Al-Mn, compte tenu
d’un coefficient de sécurité)
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B 4 360 − 33
HÉLICES MARINES
_____________________________________________________________________________________________________________________
7. Entretien des hélices
7.1 Diverses causes de détérioration
des hélices
Les hélices neuves ont un très bon état de surface (rugosité
≈ 5 µm)*, mais l’état de surface se détériore plus ou moins en service
selon que le navire opère en pleine mer plus ou moins chaude, ou
en fleuve ou rivière. La détérioration dépend également du temps
passé en mer, en rade ou au port.
*Il existe plusieurs normes pour définir la rugosité d’une surface (cf. articles Caractérisation et mesure des microgéométries de mesure [R 1 230] dans le traité Mesures et
Contrôle et Tolérances et écarts dimensionnels, géométriques et d’états de surface [B 7 010]
dans le présent traité). La rugosité dont il est question ici correspond à la rugosité R t définie
par la différence entre le plus haut pic et le plus bas creux sur une longueur de référence.
Cette détérioration de l’hélice diminue le rendement, donc augmente la consommation de combustible à vitesse donnée (§ 1.2.4),
mais également change la caractéristique K T (J ) de l’hélice, donc
l’adaptation vitesse/nombre de tours pour les hélices à pales fixes.
Il convient donc de suivre avec attention l’état de surface des pales
des hélices en service. Les principales détériorations sont :
— accroissement de la rugosité ;
— salissure : coquillages, bernacles (anatifes), algues, tartres, surtout si le navire reste longtemps au port ;
— piqûres du métal ;
— craquelures (fissuration progressive par corrosion sous
tension) ;
— érosion de cavitation ;
— déformation locale ou enlèvement de métal par suite de la rencontre avec un objet entre deux eaux.
■ Rugosité
Les hélices en bronze Al-Ni conservent ou améliorent leur rugosité
de fabrication pendant les premières années de mise en service. Les
hélices en bronze-Mn voient, par contre, leur rugosité augmenter
(100 µ m au bout de plusieurs années). Cette différence de
comportement est expliquée en partie par l’efficacité moins grande
de la protection contre la corrosion électrolytique Cu-Fe de la coque,
réalisée au moyen de plaques de zinc fixées à la coque. En fait, la
rugosité est irrégulière sur la surface des pales, et on ne peut que
définir une rugosité moyenne calculée à partir des relevés faits en
de nombreux points sur plusieurs pales au moyen de rugosimètres.
En général, la rugosité est plus grande au voisinage du moyeu qu’en
bout de pale.
■ Salissure
Elle est moins importante pour les bateaux fluviaux que pour les
navires océaniques. Lorsque le bateau est à quai, un brossage énergique par plongeur suivi d’un polissage permet de redonner aux
pales une surface correcte.
■ Erosion de cavitation
Elle peut concerner 30 % des hélices au bout de 1 à 2 ans de service.
L’érosion se produit en général au-delà de 0,7 R0 et parfois au voisinage du moyeu pour les navires à deux lignes d’arbres si celles-ci
sont très inclinées. Le pourcentage ci-dessus dépend beaucoup de
la vitesse du navire, de l’irrégularité du sillage et de l’importance
des études faites lors du projet et des essais sur modèle en tunnel
de cavitation (§ 3.3). L’érosion de cavitation, qui peut atteindre une
profondeur de plusieurs centimètres sur des hélices de grand diamètre, modifie la forme des sections de pale et favorise en général
l’érosion de cavitation ultérieure. Si l’érosion de cavitation est importante, elle peut être à l’origine de fractures ou de ruptures de pales.
■ Craquelures
Elles peuvent être dues à des surtensions et/ou à des défauts
d’homogénéité du métal. Si les fissures sont légères, elles ne
peuvent être mises en évidence que lorsque l’hélice est nettoyée et
hors de l’eau, ou encore mieux lorsque l’hélice est débarquée à terre.
B 4 360 − 34
■ Déformations et cassures
Ces déformations locales situées en général côté bord de fuite ou
extrémité de pales peuvent être dues soit au collapse de poches de
cavitation (déformation en bec de casserole ), soit à la rencontre d’un
petit corps entre deux eaux. Les cassures avec enlèvement de métal,
autres que celles dues à la cavitation, résultent du choc avec des
corps sous-marins importants (troncs d’arbres, chaînes de bouées,
etc.).
7.2 Opérations d’entretien
D’une façon générale, il est difficile de fixer des règles précises
d’entretien qui font selon les cas l’objet d’une décision particulière.
En revanche, l’observation périodique de l’hélice, bateau au port,
peut faire l’objet de consignes de maintenance.
Les opérations d’entretien d’une hélice sont fonction des constatations faites lors d’inspections par des plongeurs du navire à flot
ou lors du passage au bassin de carénage lorsque le navire est à sec.
Pour la fréquence du polissage, l’opinion générale est qu’il vaut
mieux faire souvent moins bien que rarement et bien. En effet, un
superpolissage ne peut être fait que chez le fabricant et il risque
d’être dégradé durant le transport, les manutentions et au contact
des conditions ambiantes.
La réparation d’une hélice (craquelures, déformations, arrachement de métal) est une opération complexe et onéreuse. Elle est
l’affaire de spécialistes qualifiés et demande beaucoup de précautions. Donnons ci-après quelques indications.
— Les craquelures ou fissures sont signe d’une fatigue du métal.
Si elles ne sont pas supprimées jusqu’à la racine par meulage, elles
sont l’amorce d’une rupture de pale par fissuration progressive. Si
la fissure est profonde, un meulage en V suivi d’un apport de métal
est effectué.
— Les petites déformations au bord de fuite peuvent être redressées à froid ou à chaud. Si la déformation est importante, on l’élimine
par enlèvement du métal que l’on remplace par un nouveau morceau
comme ci-après suivi d’un meulage pour reconstituer le profil.
— Si les dégâts de l’hélice sont importants, la partie manquante
de la pale est remplacée par soudure par un morceau spécialement
coulé pour cette opération.
— Les cavités produites par l’érosion de cavitation sont soigneusement nettoyées, puis remplies par soudure avec un apport de
métal ; une opération de meulage rétablit la continuité de forme de
la pale.
Toutes ces réparations, qui ne peuvent être faites que par le fabricant, sont réglementées par des normes éditées par les sociétés de
classification (Bureau Veritas, Lloyds, etc.). Elles dépendent des
dimensions de l’hélice, de l’importance des dégâts selon les zones
de la pale abîmée. Par exemple, la norme ISO 484/1 concerne les
hélices d’un diamètre supérieur à 2,5 m et la norme ISO 484/2 les
hélices de diamètre 0,8 < D < 2,5 m.
8. Bruit d’hélice et vibrations
des pales
8.1 Bruits d’hélice
(bruit propre, bruit rayonné)
Pour un navire, il y a de nombreuses sources de bruit : hélice,
machines, ventilateurs, déferlement des vagues le long de la coque,
etc. Dans le bruit global, il n’est pas toujours facile de détecter la
source principale de bruit ; c’est ainsi que l’influence de l’hélice est
peu sensible à l’avant du navire alors qu’elle peut être prédominante
à l’arrière.
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D’une façon générale, on distingue deux sortes de bruit :
— le bruit propre, qui est perçu à bord par le personnel et les
appareils d’écoute pour les navires de guerre et de recherche ;
— le bruit rayonné, qui est mesuré à partir d’une certaine distance
du bateau (≈ 60 à 100 m). Le bruit rayonné doit être réduit au minimum pour les navires de guerre, pour ne pas être détectés à distance
par un sous-marin ennemi, et pour les navires de pêche ne devant
pas alerter par leur présence les bancs de poissons.
8.1.1 Bruit rayonné
Le niveau de bruit rayonné est défini à partir de la pression mesurée par un hydrophone, la mesure étant ramenée fictivement à la
distance de 1 m en admettant que la pression p varie comme 1/S 0
(S 0 distance à la source de bruit). Le niveau de bruit L p est exprimé
en décibels (dB) par la relation :
Lp
avec
Figure 52 – Courbe type de bruit rayonné par un navire
p (à 1 m)
= 20 lg -------------------------p0
p0 = 1 µPa.
En l’absence de cavitation, le bruit rayonné par une hélice
comporte un bruit à large bande dû à la turbulence engendrée par
l’hélice et un bruit de raies de fréquence f = knZ (k entier) qui émerge
du premier, tout au moins pour k = 1 et 2 (figure 52). Ce bruit, qui
n’est audible que si f > 20 Hz, a une grande longueur d’onde :
λ = 1 500/f ≈ 100 m, se propage à grande distance à cause de son
faible coefficient d’affaiblissement et peut être détecté par des sonars
spéciaux.
Au bruit directement rayonné par l’hélice se superpose le bruit
réfléchi par la coque par suite des fluctuations de pression engendrées par les pales (§ 4.2) et par les vibrations subséquentes de la
coque.
Comme pour les excitations de vibrations par l’hélice (§ 4), le bruit
rayonné par celle-ci est dû à la fois à la poussée de l’hélice et ses
fluctuations à cause du sillage et à l’épaisseur des pales. Contrairement aux fluctuations de pression sur la coque (§ 4.2) où la plus
grande partie de la fluctuation est engendrée par la pale qui passe
au voisinage de la coque, pour le bruit rayonné toutes les pales
apportent leur contribution mais avec des phases différentes, même
en courant uniforme, car il faut tenir compte de la vitesse de propagation du son dans l’eau : c*
0 # 1 500 m/s.
La théorie, même simplifiée, ne peut être exposée ici mais le résultat des calculs peut être résumé comme suit en ce qui concerne
l’influence de la poussée. Tous les harmoniques du sillage contribuent plus ou moins au bruit rayonné mais d’une façon différente
selon que l’on est proche de l’hélice (champ proche) ou bien éloigné
(champ lointain). En effet, dans le champ proche, le bruit (pression)
ne varie pas comme 1/S 0 , mais plus rapidement selon le rang de
l’harmonique du sillage (figure 53). La formulation mathématique
du bruit rayonné fait appel à des fonctions de Bessel et autres, formulation qui se simplifie dès que l’on est dans le champ lointain.
Si ∆T p ( w j ) est la fluctuation de poussée due à l’harmonique wj
de rang j, le bruit correspondant est alors donné à une constante
près par la formule :
ωR 0 R
1 1
1
p j ( w j ) = ∆T p ( w j ) A tan Φ 0 -------- -------- ----------------------- kZ ------------- ------R 0 S 0 ( kZ – 1 )!
2c*
0 S0
( kZ – j )
A étant une constante fonction décroissante de la fraction de surface Ae /A0 , R S 0 la distance du point considéré à l’axe de
l’hélice. L’argument entre parenthèses est très nettement inférieur
à 1 (environ 0,1 à 0,2) pour les hélices marines (ω R 0 ≈ 30 m/s,
c*
0 = 1 500 m/s, Z = 4 à 6 pales). Il en résulte que :
— le bruit décroît d’autant plus vite que le nombre de pales Z est
élevé ;
Figure 53 – Variation de l’amplitude dans le plan de l’hélice
du champ de pression en fonction de la distance à une hélice
à 4 pales placée dans le sillage d’un navire
— les harmoniques du sillage de rang j # kZ sont à l’origine du
bruit rayonné dans le champ lointain (figure 53).
En ce qui concerne le diagramme de rayonnement, il est donné
R  ( kZ – j )
≈  -----qui représente un lobe par
S0 
= Cte
par la relation : p
j
le travers de l’hélice d’autant plus étroit que (kZ – j ) est grand. Pour
kZ = j, l’hélice rayonne comme un piston vers l’avant et vers l’arrière.
Quant au bruit rayonné dû à l’épaisseur des pales, il se présente
sous une forme analogue à la formule précédente en remplaçant
∆T p ( w j ) par V R e max wj et tan Φ 0 par cos Φ 0 .
Cependant, la réflexion des fluctuations de pression sur la coque
et les vibrations qu’elles engendrent compliquent sérieusement le
problème. Tout cela rend délicate l’interprétation des mesures faites
près d’un modèle dans un bassin de faibles dimensions.
Lorsque l’hélice cavite, au-dessus du bruit rayonné normal,
apparaît un bruit à large bande : f > 100 Hz dû à l’implosion de nombreuses bulles de cavitation de toutes dimensions (figure 52). En
plus du bruit à large bande apparaît un bruit de raies de fréquence
knZ dû à la modulation de la cavitation lorsque l’hélice passe dans
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B 4 360 − 35
HÉLICES MARINES
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un secteur de fort sillage. Écouté du bord, ce bruit de cavitation ressemble à « celui d’un régiment de cavalerie défilant sur une avenue
pavée ».
Compte tenu des diverses sources de bruit rayonné, le diagramme
de rayonnement est à peu près sphérique.
8.1.2 Bruit propre
En ce qui concerne le bruit propre de l’hélice, c’est-à-dire celui
perçu à l’intérieur du navire, il reflète le bruit du champ proche auquel
s’ajoute le bruit dû aux vibrations du navire excitées par l’hélice. Pour
les basses fréquences ( f < 30 à 40 Hz), les vibrations sont plus
gênantes que le bruit, mais c’est surtout la cavitation qui est une
source de bruit propre à l’arrière du navire.
Chaque chantier important, qui construit des navires d’un type
déterminé, utilise sa propre formule empirique pour estimer le bruit
propre du navire en projet. C’est surtout pour les paquebots de croisière que le bruit, en général, doit être réduit le plus possible dans
les cabines des passagers. Pour déterminer ce bruit, on part du bruit
propre estimé au voisinage de l’hélice et on chemine vers l’avant
en tenant compte du transfert du bruit par la structure du navire.
8.2 Réduction des bruits d’hélice
Que ce soit pour le bruit propre ou pour le bruit rayonné, les
remèdes indiqués au paragraphe 4.3 pour réduire les vibrations excitées par l’hélice sont évidemment valables pour le bruit :
— jeu suffisant entre la coque et l’hélice ;
— choix du nombre de pales (augmentation du nombre de pales
favorable) ;
— devers aux pales ;
— diminution de la charge en bout de pale ;
— amélioration des formes arrière de carènes pour minimiser
l’influence du sillage.
En jouant sur ces paramètres, il a été possible de réduire le bruit
rayonné et le bruit propre. C’est ainsi que, pour les paquebots
construits entre 1980 et 1989, les amplitudes des fluctuations de
pression sur la coque sont passées de 80 à 20 mbar et le bruit propre
dans les cabines et locaux habités de 60-65 dB à 50-55 dB.
8.3 Vibrations des pales
Les pales d’hélices peuvent se déformer en vibrant suivant
différents modes. Sauf pour les modes de vibration fondamentaux,
il s’agit d’un phénomène extrêmement complexe à cause du vrillage
des pales, de leur devers, de la répartition d’épaisseur suivant la
corde et le rayon, mais aussi à cause de la notion de masse d’eau
ajoutée. Les vibrations de la pale peuvent être excitées (ou amorcées)
par l’hétérogénéité de l’écoulement, par les vibrations du moteur
transmises par la ligne d’arbres et par des phénomènes d’hydroélasticité (chant des hélices). La figure 54 donne quelques exemples
de lignes nodales dans le cas d’une pale de forme simple (vibrations
de flexion et vibrations de torsion).
Expérimentalement, pour déterminer les modes de vibrations, on
excite les pales par un vibrateur dont on fait varier la fréquence. Les
lignes nodales sont mises en évidence en saupoudrant la pale avec
du sable. L’essai peut se faire dans l’eau ou dans l’air. Les modes
de vibration et les lignes nodales sont très peu différentes, par contre
les fréquences sont plus faibles dans l’eau que dans l’air
(rapport # 0,65 pour les premiers modes de vibration) à cause de
l’inertie de la masse d’eau ajoutée.
B 4 360 − 36
Figure 54 – Exemples de modes de vibrations de pales d’hélice
( = 1,30 m) dans l’air [2]
Pour une pale classique, à faible devers, on peut appliquer la formule suivante pour la vibration fondamentale (flexion à la base de
la pale) (formule de Baker) :
0,20
e
gE
- ------------------ ---- e h C h
f 0 = -------------------------2
( R 0 – r h ) ρ bronze C
avec
E
module d’Young (= 12,6 × 109 Pa pour le bronze-Al)
si les dimensions sont en mètres,
ρbronze densité du bronze (≈ 7,5),
corde et épaisseur moyennes des sections,
C et e
C h et e h corde et épaisseur à la racine,
g
accélération due à la pesanteur.
Un certain nombre de mesures sur des pales d’hélices à faible
devers placées dans l’eau donnent pour la fréquence fondamentale
de flexion la formule approximative suivante :
100
f 0 # --------------- ( pour D > 3 m )
D(m)
En ce qui concerne le coefficient d’amortissement dans l’eau,
celui-ci est très faible pour le bronze. Il en résulte que les vibrations
des pales sont très peu amorties.
Il est possible, en théorie, de calculer les divers modes de vibration
par la méthode des éléments finis. Pour les premiers modes, la
comparaison calcul/expérience est satisfaisante. Pour les modes plus
élevés et dans l’eau, les calculs sont moins sûrs à cause des coefficients de masse d’eau ajoutée à prendre en considération pour des
vibrations de forme compliquée.
8.4 Chant des hélices
Le chant des hélices qui sort du bruit à large bande est un son
musical (raie pure) audible à partir du bord et qui se produit à une
fréquence bien déterminée (300 à 500 Hz, selon les dimensions des
hélices), fréquence indépendante de la vitesse contrairement aux
autres bruits de raies de fréquence f = knZ .
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Ce phénomène est peu fréquent, mais peut être gênant. Le chant
de l’hélice se produit pour une vitesse de rotation de l’hélice bien
déterminée. Il disparaît si on augmente ou diminue la vitesse. Il s’agit
en quelque sorte d’un phénomène aléatoire. Pour une même série
d’hélices, seules quelques hélices peuvent chanter, ou encore, pour
une hélice donnée, le chant peut apparaître en service pour disparaître quelque temps après.
L’origine du chant des hélices n’est pas bien élucidée. On admet
que, dans la plupart des cas, il s’agit d’un phénomène hydroélastique : la force excitatrice est causée par la formation de tourbillons
alternés au bord de fuite qui, en s’échappant, peuvent précisément
exciter un mode de vibration de la pale dont la ligne nodale est voisine du bord de fuite.
Il existe un remède empirique pour supprimer le chant de l’hélice :
il consiste à chanfreiner, côté dos, le bord de fuite sur une longueur
de 20 à 30 mm (≈ 0,5 % de C ) suivant un tracé qui varie selon les
auteurs.
Figure 55 – Schéma tourbillonnaire de l’hélice
9. Annexe : théorie
tourbillonnaire de l’hélice
La théorie tourbillonnaire de l’hélice [2] [5] [7] [8] est l’extrapolation de la théorie de l’aile portante d’envergure limitée au cas
où l’aile est animée, en plus de son mouvement de translation, d’un
mouvement de rotation autour d’un axe parallèle à la vitesse. Dans
le cas de l’hélice, les tourbillons liés à la surface de la pale rentrent
ou s’échappent de celle-ci (figure 55) pour former des tourbillons
libres allant jusqu’à l’infini aval selon une trajectoire hélicoïdale de
pas 2πr tan βi .
La figure 56a représente 4 tourbillons d’intensité γ s’échappant
d’une hélice à 4 pales après être rentrés dans les pales dans l’axe
de l’hélice (pour simplifier). L’ensemble de ces 4 tourbillons
induisent des vitesses axiales et tangentielles dans le plan de
l’hélice, par application de la formule de Biot-Savart.
9.1 Approximation de la ligne portante
L’approximation de la ligne portante consiste à supposer les pales
droites et de largeur très faible. L’intensité de ces tourbillons
(circulation) est γ (r ) = dΓ/dr.
Si le nombre Z de pales était infini, la figure 56a pourrait être
remplacée par une suite d’anneaux tourbillonnaires (figure 56b )
équivalente à un demi-solénoïde et une infinité de tourbillons
parallèles à l’axe de l’hélice (figure 56c ).
Considérons un cercle de rayon r centré sur l’axe de l’hélice
et à l’intérieur du solénoïde. La circulation 2πr U t (U t vitesse tangentielle) est égale à la somme des intensités des tourbillons traversant ce cercle, c’est-à-dire Zγ (r ’) dans le cas de la figure 56a. Si,
dans le cas plus général de l’hélice, on considère tous les
tourbillons traversant le cercle avec γ > 0 pour le tourbillon
entrant et γ < 0 pour les tourbillons sortant, on a :
2πrU t =
Figure 56 – Système de tourbillons élémentaires équivalent
aux tourbillons liés et libres d’une hélice à nombre de pales infini
r
0
Z γ ( r ′ )dr ′ = Z Γ ( r )
Devant l’hélice, U t = 0 et, dans le plan de l’hélice (X = 0), on
admet :
ZΓ(r )
U t ( 0 ) = ---------------4πr
En ce qui concerne l’intensité des anneaux tourbillonnaires dont
l’intensité linéaire est Z γ (r ’)/2πr ’ tan β i , on a comme vitesse axiale
à l’intérieur du solénoïde et à l’infini aval :
Zγ (r ′ )
U a ( ∞ ) = ---------------------------2πr ′ tan β i
et dans le plan de l’hélice au rayon r rayon r ’ du solénoïde :
Ua ( ∞ )
Zγ (r ′ )
U a ( 0 ) ( r r ′ ) = ------------------ = --------------------------2
4πr′ tan β i
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B 4 360 − 37
HÉLICES MARINES
_____________________________________________________________________________________________________________________
À l’extérieur du solénoïde, Ua = 0.
Considérons maintenant l’ensemble de l’hélice avec tous les tourbillons entrant ou s’échappant entre r ’ = r h et r ’ = R 0 . Si l’hélice a
un pas hydrodynamique P i # peu différent du pas géométrique
constant, on a :
2πr ’ tan β i = P i # P = Cte
On a alors dans le plan de l’hélice :
Ua ( r ) =
R0
r
Zγ (r ′ )
ZΓ (r )
------------------ d r ′ = ----------------------------2P i
4 π r tan β ′i
dΓ
car Γ = 0 pour r ’ = R 0 et γ (r ’) = --------dr ′
ZΓ (r )
U a ( r ) tan β ′i = U t ( r ) = -----------------2πr
d’où :
avec β ′i = β i (r ’ = r )
D’une façon générale, dans le plan de l’hélice, au rayon r où l’intensité des tourbillons liés est Γ (r ), on a :
Z Γ (r )
— vitesse tangentielle :
U t ( 0 ) = -----------------4πr
Z Γ (r ) 1
Z Γ (r )
U a ( 0 ) = ------------------ --------------- = -----------------— vitesse axiale :
4πr tan β i
2P i
Par la suite, ayant défini les grandeurs sans dimensions suivantes :
Γ (r )
G ( circulation ) = ---------------,
πDV 0
U
U* = ------- et x = r /R 0
V0
on obtient :
ZG ( x )
U*t = ------------------2x
et
U*a tan β i = U*t
9.1.1 Hélice optimale. Coefficients de Goldstein
Le lecteur pourra se reporter à la référence [9] de la bibliographie.
Dans le cas où le nombre de pales Z est fini et si l’hélice n’est
pas trop chargée (C T < 1), on démontre que l’hélice qui a le meilleur
rendement en fluide parfait est précisément l’hélice dont le pas
hydrodynamique P i = x tan β i des tourbillons hélicoïdaux est
constant (condition de Betz), soit en première approximation une
hélice à pas constant (quand elle est bien dessinée). Dans ce cas,
les vitesses induites U*t et U*a ne sont plus constantes sur un cercle
centré sur l’axe, mais sont maximales à la hauteur des pales et présentent un minimum entre pales, la différence maxi-mini étant
d’autant plus importante que le nombre de pales est faible. Toujours
dans l’approximation de la ligne portante, on a :
ZG ( x )
U*t = ------------------2x κ
avec κ coefficient de Goldstein, et toujours U*a tan β i = U*t .
Le coefficient κ, fonction de x, de λ i = x tan β i et de Z a été calculé
par divers auteurs et les résultats publiés sous forme de courbes
(figure 57). Il faut bien noter que, dans le cas de l’hélice à pas
constant en courant uniforme, les vitesses U*t et U*a ne dépendent
que de la circulation G (x ) au rayon r . Cette circulation G(x ) suit une
loi bien particulière et a une allure vaguement elliptique (G = 0 pour
r = 0 et r = R 0). La formule G ( x ) = kx 1 – x est une bonne approximation (k constante de proportionnalité).
Figure 57 – Coefficients de Goldstein pour les hélices à 4 et 5 pales
encore lorsqu’on a affaire à un sillage variant beaucoup dans le sens
radial, les coefficients de Goldstein ne sont qu’une première approximation peu précise en bout de pale car les vitesses induites
U*
a et U*
t à un rayon r dépendent non seulement de G(x ), mais de
la répartition de G(x ) à tous les rayons. Dans ce cas :
B 4 360 − 38
1
U*
a ( x ) = --2
1
xh
1
xh
dG I t ( x *, β *i )
----------- ----------------------------dx*
dx* ( x – x * )
dG I a ( x *, β *i )
----------- -----------------------------dx*
dx* ( x – x * )
x * étant la variable d’intégration et x le rayon considéré, I t et I a les
coefficients d’induction de Lerbs dont la formulation en fonction de
x */x et β i (x *) fait appel à des fonctions compliquées peu courantes
mais qui peuvent être approximées par des fonctions simples.
Les vitesses induites U*t et U*a ayant été calculées par
n’importe quelle méthode que ce soit, on a d’après le théorème de
Kutta-Joukovski pour la section au rayon r (figure 58), traduit en
grandeurs non dimensionnelles :
dT
------- = ρ Z Γ ( r ) ( 2πnr – U t )
dr
dQ
-------- = ρ Z Γ ( r ) ( V 0 + U a )r
dr
9.1.2 Ligne portante. Méthode de Lerbs
Le lecteur pourra se reporter à la référence [10] de la bibliographie.
Si la circulation G(x ) n’est pas optimale, par exemple dans le cas
où l’on réduit la charge donc le pas de l’hélice en bout de pale (risques
de cavitation importante, d’excitations de vibrations de coque) ou
1
U*t ( x ) = ---2
car
dC T
x
----------- = 4ZG  ------ – U*t 
 J0

dx
dC T x
dC Q
----------- = -------------- tan β i
dx
dx 2
1 + U*
V0 + Ua
a
- = ---------------------------- tan β
tan β i = -------------------------J0
2πnr – U t
1 – U*t -------πx
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_____________________________________________________________________________________________________________________ HÉLICES MARINES
et le rendement ηid de la section au rayon r est égal à :
η id
dT
-------V 0
tan β ( r )
dr
= -------------------- = -----------------------dQ
tan β i ( r )
2πn -------dr
Le lecteur pourra se reporter à la référence [11] de la bibliographie.
Ce rendement est indépendant de la section dans le cas de
l’hélice à pas constant optimale. Dans ce cas, des graphiques
2T
donnent alors ηid en fonction de C Tid = -------------------------- et de
2
2
ρV 0 πR 0
λ i = x tan β i = Cte, ce qui peut être intéressant pour des calculs
généraux préliminaires.
Quant au coefficient de portance, on a, d’après le théorème de
Kutta-Joukovski :
1
2
dL = ρ V r Γ ( r ) # ---- ρ CV r C L
2
C
C L ----- # 2 π G ( r ) sin β
D
En présence d’un sillage moyen w (r ) à chaque rayon, on obtient
des formules identiques en remplaçant V 0 par V 0 [1 – w (r )] : par
V0
exemple, tan β = ------------- [ 1 – w ( x ) ] ;
πnD
C
sin β
C L ----- = 2 π G ------------------------- , etc.
D
1 – w (x )
Dans ce cas, les coefficients de Goldstein ne servent qu’à calculer en première approximation le pas hydrodynamique x tan β i ,
introduction au calcul plus précis par la méthode de Lerbs.
Jusqu’à ce stade du calcul, on a considéré la pale comme une
ligne portante, mais chaque longueur de corde C doit être déterminée d’après les critères de cavitation (§ 3). Le nombre de cavitation
σ est fonction de l’épaisseur relative des pales e max /C et du coefficient de portance C L du profil ; e max (r ) est fixé a priori au départ.
Si le profil et la cambrure sont bien adaptés pour réduire les risques
de cavitation, on a (§ 3.1) :
e max 2
σ =  1 + A 1 C L + A 2 ------------ – 1
C
d’où
A 1 2 π G sin β + A 2 e max / D
C
 ---- = -----------------------------------------------------------------------D  x
1+σ –1
avec
( valeurs prises à x = r / R 0 )
πx 2
2
σ = σ 0 [ 1 – w ( x ) ] +  -------
J0
avec
σ0
e max
A1 et A 2
9.2 Calcul par la surface portante
fonction de l’immersion de l’hélice (§ 3.1),
Jusqu’ici les diverses formules ont été établies dans l’approximation de la ligne portante. Dans la réalité, pour tenir compte de
la largeur des pales, il faut étaler la circulation liée G (x ) sur toute
la largeur des pales, en s’arrangeant pour que, sur chaque section,
dG ( r )
----------------- (s abscisse le long de la corde) soit aussi constant que posds
sible pour limiter les risques de cavitation.
Pour le calcul de l’hélice devant fournir un coefficient de charge
donné, on divise la surface des pales en mailles plus ou moins serrées (figure 59) et, à chaque maille, on affecte un segment de tourbillon radial d’intensité γ r (r, s /C ) et un segment de tourbillon
tangentiel γ t (r, s /C ), γ r et γ t n’étant pas choisis au hasard mais suivant certaines considérations liées à la cavitation et à la répartition
radiale de G (r ). L’épaisseur de la pale est simulée par des sources
placées au centre de chaque maille et dont l’intensité est fonction
2
d e
de --------------- . Quant à la nappe de tourbillons hélicoïdaux, les prods dr
grammes de calcul les plus récents tiennent compte de l’évolution
de leur pas hydrodynamique en fonction de la contraction du sillage
due à l’augmentation des vitesses axiales. Pour le maillage des pales,
on tient évidemment compte du devers et de leur inclinaison.
Les vitesses induites par les tourbillons de chaque maille et les
tourbillons hélicoïdaux sont calculées au centre de chaque maille
par la formule de Biot-Savart. Les vitesses induites par les sources
sont calculées par des formules analogues à celles du paragraphe
4.2.2. Les vitesses induites ainsi calculées, additionnées vectoriellement avec les vitesses V0 et 2πnr permettent de tracer la forme
de la ligne moyenne de chaque section. La cambrure ainsi calculée
est légèrement différente quant à sa forme et plus importante que
celle déduite du coefficient C L donnée dans l’approximation de la
ligne portante. Pour les hélices à pas constant, forme de pales classique et à faible devers, on trouve dans la littérature [7] [8] en particulier des courbes donnant la correction de cambrure à apporter
à la cambrure calculée dans l’approximation de la ligne portante
sous forme du rapport k c = cambrure vraie/cambrure calculée.
Cette correction doit être effectuée avec prudence quand on
s’écarte de l’hélice à pas constant ou quand l’hélice a un fort
devers.
Le calcul des hélices par la théorie de la surface portante nécessite
des programmes de calcul assez longs, mais qui demandent des
temps de calcul assez courts, de l’ordre de la minute selon la puissance de l’ordinateur.
fixé au départ par des considérations sur la
contrainte dans les pales,
constantes liées au profil de base de la section
(NACA 66 par exemple) et au type de cambrure
(NACA a = 0,8 par exemple, § 3.1).
Figure 59 – Schéma de maillage d’une pale
Figure 58 – Composition des vitesses dans le plan de l’hélice
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B 4 360 − 39
HÉLICES MARINES
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Le calcul inverse dit calcul direct, qui consiste à trouver la répartition de poussée et la pression sur les pales, donc la valeur des
coefficients de poussée C T et C Q d’une hélice dans un écoulement
non uniforme et donné a priori, nécessite des temps de calcul
beaucoup plus longs car on ne connaît pas a priori la répartition
des tourbillons. Cependant, les résultats du calcul sont en général
assez satisfaisants.
9.3 Théorie de l’actuator
La théorie de l’actuator a été imaginée vers les années 1900 pour
essayer d’expliquer d’une manière simple quelques propriétés de
l’hélice (poussée et rendement). Celle-ci est remplacée par un disque
immatériel donnant une augmentation de pression ∆p au fluide qui
le traverse de façon à produire une poussée T = πR 20 ∆p . Cette pression ∆p correspond en moyenne à la différence de pression qui
s’exerce entre la face des pales en surpression et le dos des pales
en dépression.
Considérons le tube de courant passant par le bout des pales,
comme celui figuré par la ligne de courant 2 de la figure 17, ou
encore comme celui représenté sur la figure 22 sur laquelle on a
supprimé la tuyère et fait Ua = 0.
On désigne par U a la vitesse axiale moyenne dans le plan de
l’hélice et par U a ( ∞ ) la vitesse à l’infini aval dans le jet de l’hélice
(figure 60). On suppose de plus que l’hélice est peu chargée C T < 2,
de façon à ce que le tube de courant soit peu convergent et on suppose pour ce qui suit que la composante, suivant l’axe de l’hélice,
des forces de pression s’exerçant sur le tube de courant est négligeable devant la poussée de l’hélice.
On calcule de deux façons différentes la poussée de l’hélice pour
aboutir à la relation établie par la théorie tourbillonnaire.
– Calcul de ∆p par le théorème de Bernoulli :
1
∆p = ---- ρ
2
d’où :
[ V0 + Ua ( ∞ ) ]2 – V 02 = ρ Ua ( ∞ )
Ua ( ∞ )
V 0 + -----------------2
Ua ( ∞ )
2
Ua ( ∞ )
T = πR ∆p = ρ πR 2 V 0 + ----------------2
– Calcul de T par le théorème de la quantité de mouvement,
avec :
Q = ρ πR 2[ V 0 + U a ( 0 ) ] ( débit )
d’où :
T = Q Ua ( ∞ ) = ρ π R
2
[ V0 + Ua ( 0 ) ] Ua ( ∞ )
Par comparaison, on obtient bien U a ( ∞ ) = 2U a ( 0 ) .
Le rendement est obtenu après calcul de l’énergie dépensée pour
accroître la vitesse du fluide :
2
1
2
E c = ---- Q [ V 0 + 2U a ( 0 ) ] – V 0 = 2QU a ( 0 ) [ V 0 + U a ( 0 ) ]
2
V0
TV 0
η id = ----------= ----------------------------d’où :
Ec
V + Ua ( 0 )
0
B 4 360 − 40
Figure 60 – Théorie de l’actuator : évolution de la vitesse axiale Ua
et de la pression p
Si l’on considère le coefficient de charge C T , on obtient sous
forme adimensionnelle avec U*a = U a ( 0 ) /V 0 :
T
C T = ------------------------------------2 2
( ρ /2 ) πR 0 V 0
soit :
C T = 4 ( 1 + U*
a )U*
a
8 KT
1 + ----- ------2- – 1
π J
1 + CT – 1
0
U*
a = ------------------------------- = --------------------------------------2
2
2
η id = -----------------------------1 + 1 + Ct
à comparer avec la figure 6 : par exemple, pour C T = 1 on a ici
η id = 0,83 et η id # 0,81 (figure 6).
La formule ci-dessus ne tient pas compte de la perte de rendement due à l’énergie cinétique de rotation du fluide dans le jet de
l’hélice. Dans la théorie tourbillonnaire, on a vu que, pour une section de pale, on avait :
J0
1 – U*t ------tan β
πx
η id = --------------- = --------------------------tan β i
1 + U*a
U*t = U*
a tan β i
U*
a et U*
t étant les vitesses vraies à la hauteur de la pale et non
les vitesses moyennes U*
a et U*
t sur un cercle de rayon r . En tenant
compte des coefficients de Goldstein et en faisant les calculs au rayon
r = 0,7R 0 , on arrive moyennant quelques approximations aux formules suivantes valables pour les conditions normales de fonctionnement des hélices, c’est-à-dire 0,10 < K T < 0,25 :
avec
1 – 0,20 K
η id = -----------------------------T1 + k aU *
a
avec
1,00
1,00
k a = 1 + -----------  J 0 + P/D – -----------
Z 
Z 
Dans cette formule, 0,20 K T n’est autre que la perte de rendement
due au mouvement de rotation du fluide dans le jet de l’hélice et
k aU*a la perte de rendement due à l’énergie cinétique axiale du
fluide.
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© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique
P
O
U
R
Hélices marines
par
E
N
Max AUCHER
Ingénieur Général de l’Armement
Ancien Directeur du Bassin d’Essais des Carènes de Paris
Références bibliographiques
[1]
[2]
[3]
[4]
[5]
VAN LAMMEREN (P.A.), VAN MANEN (J.D.) et
OOSTERVELD (M.W.). – The wageningen Bscrew series, Society of Naval Architects and
Marine Engineers (NSMB) (1969).
CARLTON (J.S.). – Marine Propellers and Propulsion. Butterworth Heineman Ltd (1994).
KUIPER (J.). – The wageningen propeller
series (caractéristiques d’hélices et d’hélices
sous tuyère, plus disquette donnant le développement en série des caractéristiques des
hélices citées dans le livre). Marin Software
Engineering Dept, mai 1992.
Bureau Veritas. – Building and operations of
vibrations free propulsion plant and ships
(construction et solutions pour supprimer les
vibrations des navires dues à la propulsion),
NR. 207 - SMSE (1987).
Proceedings of ITTC : Comptes-rendus des
Conférences Internationales des Bassins de
Carènes. L’International Towing Tank Confer-
[6]
[7]
[8]
ence (ITTC) comprend entre autres un comité
hélice et un comité cavitation dont les rapports (tous les 3 ans) font la synthèse des travaux effectués dans le monde entier
(nombreuses références, environ 1 000 dans
chaque rapport).
AUCHER (M.). – Champ de pression et bruit
de raies engendrés par les hélices marines.
Revue scientifique et technique de la Défense
no 24 (1994).
ABBOTT (I.H.) et VON DOENHOFF (A.E.). –
Theory of wing sections. Mc Graw-Hill (1949).
Pour ce qui concerne l’application aux hélices, on trouve les données relatives aux profils et cambrures des sections de pales dans :
Hydrodynamique navale (tome III propulsion), l’École Nationale Supérieure des Techniques Avancées par S. BINDEL (1975)
VAN MANEN (J.D.). – Fundamentals of ship
resistance and propulsion (Fondements de la
[9]
[10]
[11]
résistance et de la propulsion des navires).
132 a du NSMB (1957) et publié par International Ship Building Progress International
Periodical Press.
ECKHARDT (M.K.) et MORGAN (W.B.). – Propeller design method (Méthode de calcul des
hélices). Transactions SNAME. Vol. 63,
p. 325-374 (1955).
LERBS (H.W.). – Moderatly loaded Propellers
with finite number of blades and an arbitrary
distribution of circulation (Calcul des hélices
modérément chargées avec un nombre fini
de pales et une distribution quelconque de la
circulation). Transactions SNAME. Vol. 60,
p. 73-117 (1952).
MORGAN (W.B.), SILOVIC (V.) et DENNY
(S.B.). – Propeller lifting surface corrections.
(Correction à apporter aux hélices d’après la
théorie de la surface portante). Transactions
SNAME. Vol. 76, p. 309-347 (1968).
Fabricants et fournisseurs d’hélices
(liste non exhaustive)
GEC Alsthom ACB.
Renou-Dardel SA.
Helicia SA.
Doc. B 4 360
2 - 1996
Pour les petites hélices de navires de plaisance,
on trouve sur étagère chez les représentants
des moteurs (par exemple, Jonhson, Couach, Quicksilver...)
des hélices de séries (dimensions en pouces généralement).
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est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique
Doc. B 4 360 − 1
S
A
V
O
I
R
P
L
U
S