Rayonnement synchrotron et applications par Irène NENNER Service des photons, atomes et molécules, DSM/DRECAM, Centre d’études de Saclay Jean DOUCET et Hervé DEXPERT Laboratoire pour l’utilisation de rayonnement électromagnétique (LURE), laboratoire mixte CNRS, CEA, MESR 1. 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 Caractéristiques du rayonnement synchrotron ............................... Principe de l’émission .................................................................................. Principaux paramètres ................................................................................. Machines ....................................................................................................... Équipement associé au rayonnement synchrotron................................... Utilisation actuelle du rayonnement synchrotron ..................................... 2. 2.1 2.2 2.3 2.4 Techniques de caractérisation et d’analyse ...................................... Introduction................................................................................................... Techniques d’absorption.............................................................................. Techniques de diffraction-diffusion ............................................................ Techniques d’émission de particules et de rayonnement......................... — — — — — 13 13 15 20 28 3. 3.1 3.2 3.3 3.4 3.5 Autres technologies et instrumentations associées au rayonnement synchrotron ................................................................ Introduction................................................................................................... Techniques d’imagerie et microscopie ....................................................... Métrologie des rayons X : détecteurs et étalonnage................................. Rayonnement synchrotron comme source d’insolation........................... Laser à électrons libres dans l’infrarouge et applications ........................ — — — — — — 31 31 31 36 37 38 4. Avenir du rayonnement synchrotron .................................................. — 41 Pour en savoir plus ............................................................................ PE 2 700 - 2 — 2 — 3 — 4 — 8 — 12 Doc. PE 2 700 L e rayonnement synchrotron, lumière émise par des électrons ou des positrons relativistes et soumis à une accélération centripète fournit un très large spectre de longueurs d’onde depuis l’infrarouge lointain jusqu’aux rayons X. La nouvelle génération de machines spécialement conçues pour l’utilisation de cette lumière a ouvert, à une large communauté de scientifiques de laboratoires publics et privés, une grande variété de méthodes d’investigation de la matière condensée qui complètent et vont au-delà des méthodes classiques. La continuité spectrale et l’utilisation en faisceau monochromatique, la brillance de la source, sa structure temporelle, sa polarisation linéaire ou circulaire, ses propriétés de cohérence ont donné une nouvelle dimension aux études des propriétés structurales, électroniques, magnétiques de la matière à un niveau de résolution extrême. Les méthodes de caractérisation et d’analyse basées sur l’absorption, la diffusion-diffraction du rayonnement avec de nombreuses variantes, ou encore sur la fluorescence X et la photoémission, sont décrites avec différents exemples d’application choisis dans les secteurs de la catalyse, Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 1 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ l’électrochimie, l’adhésion, la biocristallographie, la métallurgie ou encore les matériaux magnétiques artificiels. Les technologies et l’instrumentation associées au rayonnement synchrotron et au laser à électrons libres dans l’infrarouge, tels que les techniques d’imagerie, de microscopie et de lithographie beaucoup plus récemment développées en France ou à l’étranger sont présentées et illustrées par des exemples empruntés à la médecine, la chimie, l’électrochimie, la micromécanique. Enfin, le laser à électrons libres, qui peut être considéré comme une retombée du développement du rayonnement synchrotron, est décrit comme une autre nouvelle source de lumière. Les performances de la version infrarouge de ce laser sont illustrées par des applications en électrochimie et en microscopie à effet tunnel. 1. Caractéristiques du rayonnement synchrotron est un des plus puissants synchrotrons actuels avec une énergie de 6 GeV, particulièrement optimisé pour le domaine des rayons X. 1.1 Principe de l’émission Le rayonnement synchrotron présente des caractéristiques qui, pour la plupart, lui confèrent des qualités bien supérieures à celles offertes par les sources classiques de lumière. Cela justifie amplement son utilisation et son développement actuel malgré sa lourdeur technique et son coût de revient élevé (il est tout de même possible d’y accéder pour un coût marginal). Passons en revue les principales caractéristiques du rayonnement synchrotron. La lumière émise par des particules chargées, telles que des électrons ou des positrons (« électrons » chargés positivement) accélérés à une vitesse proche de celle de la lumière, est appelée rayonnement synchrotron. Le principe de base de cette émission s’interprète bien dans la théorie des ondes électromagnétiques de Maxwell [1]. Toute particule chargée soumise à une accélération émet un rayonnement électromagnétique. Lorsque l’accélération est faible (approximation de mécanique classique), le rayonnement est émis, dans tout l’espace de manière isotrope et il est presque monochromatique ; c’est le cas des antennes radio (figure 1 a et 1 c). Au contraire, lorsque l’accélération est forte (approximation de mécanique relativiste), le rayonnement est émis exclusivement tangentiellement à la trajectoire des particules et sa distribution en énergie s’étend continûment sur plusieurs puissances de 10 en fréquence (figure 1 b et 1 d ). C’est le cas dans les accélérateurs de particules que sont les synchrotrons et les anneaux de stockage dans lesquels les particules, portées à des vitesses proches de celle de la lumière, se trouvent soumises à des accélérations centripètes très élevées produites par des champs magnétiques intenses qui incurvent leur trajectoire. L’émission est caractérisée, entre autres, par la longueur d’onde critique (en nm) définie par : 1.2 Principaux paramètres λc = 0,56 R/E3 = 1,86/BE2 avec R (m) rayon de courbure, B (T) induction magnétique, E (GeV) énergie des particules. Donc, plus l’énergie des particules est élevée, plus λc est petit et plus le rayonnement émis se déplace vers les grandes énergies. Typiquement, l’anneau Super-ACO (LURE-Orsay) fonctionne avec une énergie de 0,8 GeV et une longueur d’onde critique de 1,9 nm, ce qui permet de couvrir la gamme de rayonnement électromagnétique des rayons X mous jusqu’au visible, alors que l’anneau DCI (LURE-Orsay) fonctionne avec une énergie de 1,85 GeV et une longueur d’onde critique de 0,3 nm, ce qui donne accès aux rayons X durs. L’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) à Grenoble PE 2 700 − 2 Figure 1 – Schéma de l’émission d’un électron accéléré sur une orbite circulaire ■ La continuité spectrale, de l’infrarouge lointain jusqu’aux rayons X, est exceptionnelle et n’est atteinte par aucune autre source sur une aussi large plage de longueurs d’onde. Ainsi il est possible d’avoir accès à des longueurs d’onde difficilement accessibles Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ autrement, comme les rayons X mous (énergie autour du keV) et l’ultraviolet proche (λ > 105 nm) et lointain (λ < 105 nm). ■ La faible divergence d’émission dans le plan vertical (de l’ordre de 0,1 à 1 mrad) conduit à une brillance bien supérieure à celle des tubes de rayons X ou des lampes à décharge et permet une excellente focalisation des faisceaux. La focalisation horizontale est réalisée dans un onduleur (voir § 1.3) où on obtient typiquement quelques milliradians. Dans le cas d’un aimant de courbure ou d’un wiggler, on doit recourir à des optiques adaptées pour refocaliser (voir § 1.4.2). ■ L’intensité (flux ou puissance moyenne) du rayonnement synchrotron est de plusieurs ordres de grandeur supérieure à celle des générateurs de rayons X bien connus dans les laboratoires. Dans le domaine de l’ultraviolet ou des rayons X mous, c’est la même chose mais la comparaison avec les lasers se limite à quelques longueurs d’onde seulement. Dans le visible, les lasers sont plus intenses que le rayonnement synchrotron. Notons que, si l’on choisit la puissance crête des sources, les sources lasers sont incomparablement plus puissantes que le rayonnement synchrotron. En revenant à la puissance moyenne, il est cependant ici préférable de distinguer le flux total de photons émis, de la luminance (ou brillance pour suivre le terme anglo-saxon) de la source qui dépend de sa taille et de la divergence ; les deux ne sont pas tout à fait couplés et selon les besoins d’utilisation on peut privilégier l’une ou l’autre de ces caractéristiques. Pour fixer les idées, la figure 2 donne une comparaison des luminances émises en fonction de la longueur d’onde par des sources synchrotrons et un tube typique de rayons X. La luminance et/ou le flux peuvent être considérablement amplifiés au moyen de structures magnétiques qui créent des déviations secondaires à la trajectoire initiale des particules ; ces structures (wiggler et onduleur) seront décrites au paragraphe 1.3. ■ Le rayonnement synchrotron a une structure temporelle. En effet, les particules circulent dans l’anneau par paquets cylindriques discrets (de 1 à plusieurs dizaines ou centaines selon les machines). Le diamètre du cylindre détermine la taille de la source, sa longueur, la durée de l’impulsion et la distance entre paquets, la fréquence des impulsions. Typiquement, la durée de l’impulsion est de l’ordre de la nanoseconde ou d’une dizaine de picosecondes et la fréquence de l’ordre de quelques MHz à quelques dizaines de MHz. Certaines techniques d’analyse exploitent cette caractéristique. ■ Le rayonnement synchrotron est fortement polarisé linéairement dans le plan de l’orbite des particules. De part et d’autre de ce plan, cette polarisation linéaire diminue fortement et laisse place à une polarisation circulaire. En utilisant des onduleurs ou wigglers spéciaux (hélicoïdal, asymétrique), on peut obtenir de la lumière circulairement polarisée avec un flux élevé. ■ La lumière émise par un paquet de particules est normalement incohérente puisque la source n’est pas ponctuelle et que chaque particule est en soi une source polychromatique sans relation de phase avec les photons émis par les autres particules. Cette source ne satisfait à aucune des conditions de cohérence spatiale et temporelle d’une source telle qu’un laser. Toutefois, on peut rendre le faisceau de lumière cohérent au niveau d’un détecteur (et réaliser un hologramme par exemple) en sélectionnant un intervalle spectral et un angle solide suffisamment petits. Pratiquement, on utilise la lumière émise sur l’axe d’un onduleur qui est très intense et très peu divergente et on réalise ensuite les conditions de cohérences spatiale et temporelle grâce donc à une fente de sortie très étroite et à un monochromateur. Notons qu’un rayonnement cohérent est bien sûr obtenu avec le laser à électrons libres, mais est limité à la région des courtes longueurs d’onde UV, du moins jusqu’à maintenant (voir § 3.3). ■ Enfin, le rayonnement synchrotron a une intensité moyenne qui, à long terme, est décroissante car les paquets se « désagrègent » lentement au cours du temps. Les périodes de décroissance vont de quelques heures à une centaine d’heures selon les machines, ce qui oblige à réinjecter des particules dans ces machines de une ou deux fois par semaine jusqu’à plusieurs fois par jour. 1.3 Machines 1.3.1 Évolution Jusqu’au début des années soixante-dix, le rayonnement synchrotron était considéré comme un phénomène parasite et gênant pour la réalisation des expériences de physique des collisions, phénomène que l’on cherchait à minimiser dans les accélérateurs de particules. C’est à cette époque que certains chercheurs confrontés aux problèmes de l’étude de la matière condensée ont perçu l’avantage qu’on pourrait tirer de telles sources de lumière si l’on arrivait à les exploiter correctement. Les premiers centres de recherche utilisant le rayonnement synchrotron pour l’étude des matériaux se sont alors développés autour des synchrotrons existants, en utilisant cette source en « parasite », en dehors des heures de fonctionnement propres à la physique des particules. Le succès aidant, les centres de rayonnement synchrotron ont fini par utiliser majoritairement les installations, puis enfin exclusivement, en profitant par ailleurs du déclin d’activité des installations de physique des particules, dont l’énergie se révélait insuffisante. Vers la fin des années 1980 sont apparus les premiers anneaux construits spécifiquement pour délivrer du rayonnement synchrotron. Enfin, en 1994, le premier synchrotron dit de la 3e génération pour les rayons X durs a été mis en service à Grenoble (ESRF). Par rapport aux précédents, il délivre, grâce à la haute énergie communiquée aux particules dans l’anneau de près de 900 m de circonférence, des faisceaux dont le flux et la brillance dépassent, dans la gamme des rayons X durs, de plusieurs ordres de grandeur ceux des synchrotrons précédents. Deux autres synchrotrons du même type, l’un aux États-Unis et l’autre au Japon, sont en 1995 en fin de construction. Les performances des installations expérimentales installées sur les trente ou quarante lignes de lumière issues de ces anneaux vont permettre le développement de nouvelles techniques et ainsi donner une nouvelle impulsion à de multiples domaines et en particulier des efforts à la science des matériaux. Paradoxalement, en parallèle avec la tendance vers le gigantisme des installations, se développe également la tendance vers la miniaturisation. Certaines firmes, notamment au Japon et en Grande-Bretagne, commercialisent des synchrotrons « de poche », moins énergétiques bien sûr, de gamme spectrale limitée mais délivrant néanmoins un faisceau intense malgré leur faible taille (environ 10 m de diamètre). Il est tout à fait concevable que certains industriels puissent s’équiper de telles installations pour des applications spécifiques pouvant aller jusqu’au contrôle de procédés, comme sont actuellement utilisés des équipements mi-lourds de laboratoire. Actuellement il existe plus d’une cinquantaine de centres de rayonnement synchrotron dans le monde qui se répartissent en Asie du Sud-Est (Japon, Corée, Taïwan, Chine), en Amérique du Nord (États-Unis), du Sud (Brésil) et en Europe (Grande-Bretagne, Allemagne, Italie, France, Suède, Pays-Bas, Russie). 1.3.2 Description des machines Les machines produisant du rayonnement synchrotron le plus couramment utilisées sont des anneaux de stockage d’électrons ou de positrons et non pas directement des synchrotrons. Cela permet d’éviter d’alourdir la structure des anneaux par les dispositifs d’accélération et de les rendre plus efficaces pour la délivrance de rayonnement. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 3 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ Figure 2 – Luminance spectrale pour des sources « aimants de courbure » à l’ESRF à Grenoble, Super ACO et DCI à LURE (Orsay) Généralement, les particules sont produites dans un canon à électrons, accélérées par une série de klystrons dans un accélérateur linéaire puis éventuellement, comme pour les machines de la troisième génération, dans un petit anneau synchrotron appelé « booster » (ou élanceur), dont le but est de porter les particules à l’énergie nominale avant d’être injectées dans l’anneau de stockage proprement dit. La figure 3 a représente le principe d’un anneau de stockage avec ses principaux éléments. La figure 3 b montre la machine ESRF en fonctionnement à Grenoble avec son système d’injection, ses lignes aimants notées D et ses lignes onduleurs notées ID. L’anneau de stockage est constitué par une succession de sections droites et de sections courbes. La courbure de la trajectoire est produite par des aimants dipolaires. Dans les sections droites sont placés les éléments permettant l’injection, la cavité radiofréquence qui permet de redonner aux particules l’énergie perdue par émission synchrotron et de les rassembler en paquets, des éléments électrostatiques (quadrupôles, sextupôles, octupôles...) destinés à focaliser la trajectoire, et enfin des éléments d’insertion (ID) qui jouent le rôle d’amplificateur de rayonnement, les onduleurs et les wigglers. Leur principe est basé sur des déviations de faible amplitude des trajectoires par des structures magnétiques périodiques ; à chaque courbure supplémentaire, il y a émission de lumière (figure 4 a). Lorsque l’induction magnétique est faible (quelques dixièmes de tesla), il existe un phénomène d’interférence de l’émission à chacune des oscillations et le spectre d’émission mesuré à travers un trou d’épingle dans l’axe est un spectre de raies d’harmoniques i d’intensité proportionnelle à N 2/i (figure 4 b). Lorsque l’induction magnétique est forte (typiquement 5 teslas obtenus avec des aimants supraconducteurs), il n’y a plus de phénomènes d’interférences et le spectre revient à la superposition de l’émission issue de chaque oscillation. On notera que le spectre d’émission est alors déplacé vers les grandes énergies. Si l’émission d’un de ces onduleurs est stockée dans une cavité optique, on peut obtenir un laser dit laser à électrons libres (LEL) [2]. Il y a interaction entre le rayonnement émis et les paquets d’élec- PE 2 700 − 4 Figure 3 – Machine produisant du rayonnement synchrotron trons à chaque passage dans le champ de l’onduleur ; l’impulsion de lumière peut être amplifiée au détriment de l’énergie cinétique des électrons avec un gain suffisant pour produire l’oscillation laser. Un faisceau relativiste d’électrons qui interagit avec le champ sinusoïdal d’un onduleur (d’amplitude maximale B0 et de période spatiale λ0) émet du rayonnement synchrotron à la longueur d’onde λ (en cm) et ses harmoniques i : λ = λ0 (1 + K 2/2) / 2γ 2 avec K = 0,94 B0 λ0 (B0 exprimé en teslas et λ0 en centimètres). Le paramètre γ est un nombre sans dimension représentant l’énergie des particules normalisée à l’énergie des électrons au repos. Le choix de l’accélérateur conditionne le domaine spectral du laser. L’infrarouge lointain correspond à des accélérateurs Van de Graff, ou des microtrons (1 à 5 MeV avec γ = 2 à 10), l’infrarouge proche strequiert des accélérateurs linéaires (10 à 200 MeV avec γ = 20 à 400) tandis que l’ultraviolet nécessite des énergies plus élevées (0,2 à 1,5 GeV avec γ = 400 à 3 000) que fournissent les anneaux de stockage. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ sième génération en comptent plusieurs dizaines régulièrement réparties autour de l’anneau. Il y règne le vide de l’anneau (sans fenêtre physique) pour les rayonnements mous tandis que le vide des lignes pour les rayons X durs qui sont peu absorbés est moins poussé et des fenêtres isolant le vide des lignes de celui de l’anneau (en général en béryllium) peuvent être traversées. Aux extrémités des lignes de lumière on trouve les expériences qui se divisent en trois parties : l’optique, le poste d’analyse et le détecteur. 1.4.2 Optique Le rôle de l’optique est de transformer le rayonnement sortant de la ligne de lumière en un rayonnement adapté à l’utilisation souhaitée. Les éléments principaux sont les monochromateurs, les miroirs, les collimateurs. ■ Les monochromateurs pour les rayons X sont constitués par une lame cristalline qui sélectionne, par diffraction sur une famille de plans réticulaires, une longueur d’onde (et ses harmoniques) parmi le continuum du faisceau blanc. Ce sont en général des lames de silicium ou de germanium choisies pour leur grande réflectivité et, selon la résolution en énergie souhaitée, on fait subir au faisceau une ou plusieurs réflexions. En outre, les cristaux peuvent être très légèrement courbés de façon à focaliser le faisceau incident au niveau du poste d’expérience. Pour l’UV, on n’utilise plus des lames cristallines mais des réseaux. Comme la réflectivité des métaux varie fortement avec l’angle d’incidence et la longueur d’onde du rayonnement, on utilise des monochromateurs à incidence normale pour l’ultraviolet proche, sous-vide et des monochromateurs à incidence rasante pour le domaine des rayons X mous. Figure 4 – Émission de lumière dans un anneau de stockage ■ Les miroirs sont des éléments généralement en verre, recouverts d’une fine couche métallique, qui travaillent en incidence rasante et dont le double but est d’éliminer les harmoniques du rayonnement fondamental choisi issu des monochromateurs et de focaliser, moyennant une très faible courbure, le faisceau dans une direction perpendiculaire à celle obtenue par le monochromateur. Dans les meilleurs cas, on peut concentrer avec le système miroir-monochromateur le faisceau monochromatique sur une section de 200 µm x 200 µm. L’intérêt des LEL est de fournir un rayonnement totalement accordable en faisant varier continûment le champ magnétique (paramètre K) pour une énergie donnée des particules. Leur rayonnement surpasse en puissance crête les lasers de laboratoire dans l’infrarouge moyen et lointain. Dans l’ultraviolet, c’est son accordabilité, la puissance moyenne, sa structure temporelle, et en particulier sa fréquence de répétition naturellement synchronisée avec l’émission de lumière fournie par les aimants de courbure ou les autres onduleurs de la machine, qui est recherchée pour des applications dites à deux longueurs d’onde différentes ou « deux couleurs ». ■ Pour les rayons X, le rôle des collimateurs est de limiter, si besoin, la taille du faisceau incident sur l’échantillon. Les plus simples sont constitués par des ensembles de trous coaxiaux et ils permettent de descendre jusqu’à des diamètres de faisceau de quelques µm. Pour atteindre le micromètre, voire moins, il est maintenant possible d’utiliser des lentilles à rayons X dérivées des lentilles de Bragg-Fresnel pour l’optique classique. Elle ne sélectionne pas seulement une partie du faisceau comme pour les collimateurs classiques mais focalisent le faisceau, ce qui permet d’obtenir un flux élevé concentré sur une surface de l’ordre du µm2. Ce type de dispositif permet d’envisager le développement de divers types de microanalyse. 1.4 Équipement associé au rayonnement synchrotron 1.4.1 Lignes de lumière Une fois issue de l’anneau, par une fenêtre dans l’axe de la section droite pour un élément d’insertion ou sur la tangente à la trajectoire pour un aimant de courbure, la nappe de rayonnement circule dans un tube (ou ligne de lumière) et est en général divisée de façon à alimenter simultanément plusieurs expériences. Les anciens anneaux ne comportaient que quelques lignes de lumière, ceux de la troi- 1.4.3 Postes d’analyse La plupart des postes d’analyse que l’on trouve dans les centres de rayonnement synchrotron appartiennent à l’une des trois catégories suivantes : diffraction, absorption ou émission. Ils ont en commun leur taille imposante par rapport aux expériences analogues de laboratoire, et leur automatisme et motorisation qui sont très élaborés à cause de l’interdiction ou des difficultés d’accès lorsque le faisceau est présent. Pour les rayons X durs, toutes les expériences sont enfermées dans des enceintes dont les parois sont imperméables au rayonnement. Pour les rayons X mous ou l’ultraviolet, il n’est pas nécessaire de protéger les utilisateurs par des enceintes car le rayonnement est absorbé par des épaisseurs très fines de matière et l’enveloppe des lignes de lumière suffit à protéger l’environnement. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 5 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ Une autre caractéristique des expériences avec rayonnement synchrotron est leur mode de fonctionnement continu jour et nuit. Les attributions d’expériences se font pour des périodes portant sur plusieurs mois, voire l’année, par des comités scientifiques qui examinent l’ensemble des projets déposés pour chaque expérience. Il existe d’autres modes d’accès plus rapides pour la recherche industrielle. PE 2 700 − 6 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ Tableau 1 – Comparaison des performances de différentes techniques utilisant le rayonnement synchrotron (RS) (parties grisées) avec quelques méthodes concurrentes Méthode Information Taille d’échantillon minimale Environnement d’échantillons Durée minimale d’une prise de donnée Dynamique au niveau atomique (temps caractéristique) Détérioration d’échantillons Diffusion/diffraction X Structure 3D pour tous avec rayonnement les éléments Z surtout synchrotron (RS) les éléments lourds Volume : 1 µm3 Surface : µm2 Grande flexibilité 50 picosecondes non oui pour les échantillons d’éléments de faible Z Diffusion/diffraction X Structure 3D pour tous avec générateur X les éléments Z surtout les éléments lourds Volume : 106 µm3 Surface : 104 µm2 Grande flexibilité qq secondes non oui pour les échantillons d’éléments de faible Z Diffusion/diffraction avec neutrons Structure 3D pour tous les éléments Z surtout H Volume : qq mm3 Surface : fraction de cm2 Grande flexibilité qq minutes oui (10−7 à 10−13 s) non RMN du solide Ordre local spécifique d’un élément H, T, C, N, O, Si, P, S informations quantitatives imagerie possible Volume : qq mm3 Grande flexibilité qq minutes à qq heures ou jours pour la RMN 2D et 3D oui (10−5 à 10−11 s) non RMN de solutions Constitution de molécu- Volume : 400 µL les complexes et biologi- concentration ques (petites protéines) < 1 mM en solution diluée Spécifique d’un élément H, T, C, N, O, Si, P, S... Possibilités limitées liées à la stabilité de l’échantillon et au solvant qq secondes à qq jours pour la RMN 2D et 3D oui (10−3 à 10−13 s) non EXAFS avec rayonnement synchrotron Ordre local autour de l’atome sondé (tous Z sauf H) dans gaz, solutions et solides Imagerie : rayonnement synchrotron sélectivité en Z et liaison chimique, propriétés magnétiques résolution spatiale : 100 µm Volume : 106 µm3 Surface : 104 µm2 Grande flexibilité milliseconde non oui pour les échantillons d’éléments de faible Z Fluorescence X avec rayonnement synchrotron (microsonde X) Analyse élémentaire à 100 attogrammes 10−16 g (ultime) imagerie : résolution latérale < µm Surface : 1 µm2 Sensibilité < 1 ppm pour éléments lourds Grande flexibilité microseconde non oui pour les échantillons de faible Z Fluorescence X avec générateur X Analyse élémentaire à qq Surface : < 1 mm2 nanogrammes Sensibilité : 100 ppm pour éléments lourds Grande flexibilité qq minutes non oui pour les échantillons de faible Z Fluorescence X avec particules (microsonde nucléaire) Analyse élémentaire ima- Surface : < 1 µm2 Grande flexibilité gerie résolution latérale : Sensibilité : ≈ 1 ppm 0,5 à 1 µm sur échantillons sans contraintes d’épaisseur milliseconde non oui, forte pour les éléments de faible Z et les isolants Fluorescence X avec électrons Analyse élémentaire ima- Surface : ≈ 1 µm2 gerie résolution spatiale : Sensibilité : 5 à 20 nm sur coupes 1 000 ppm ultraminces (< 1 µm) Grande flexibilité milliseconde non oui, forte pour les éléments de faible Z et les isolants Photoémission avec RS Propriétés électroniques de surface et de volume imagerie : résolution spatiale de 100 à 0,1 µm Surface : 104 µm2 limité par l’environnement ultravide qq minutes non oui, faible ESCA-XPS Propriétés électroniques de surface et de volume imagerie : résolution spatiale 10 µm Surface : 100 µm2 limité par l’environnement ultravide qq minutes non oui, faible Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 7 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ Tableau 1 – Comparaison des performances de différentes techniques utilisant le rayonnement synchrotron (RS) (parties grisées) avec quelques méthodes concurrentes (suite) Taille d’échantillon minimale Environnement d’échantillons Durée minimale d’une prise de donnée Dynamique au niveau atomique (temps caractéristique) Détérioration d’échantillons Méthode Information Imagerie X par RS en transmission (micro) tomographie imagerie différentielle de matériaux non homogènes, anatomie, pour tous Z sauf H Résolution : µm Grande flexibilité milliseconde non oui (limitée) pour les faibles doses Imagerie X par générateur X (scanner) imagerie différentielle de matériaux non homogènes, anatomie, pour tous Z sauf H Résolution (in vivo) : 1 mm Grande flexibilité < seconde non oui (limitée) pour les faibles doses Imagerie RMN imagerie fonctionnelle, anatomie (eau, graisses) résolution spatiale (in vivo chez l’homme) : 0,1 à 1 mm Grande flexibilité 40 ms à qq minutes ≈ 10−9 s non Imagerie caméra à positons métabolisme, pharmacologie résolution (in vivo) : 2 à 10 mm Grande flexibilité 1 min à qq heures limitée pour les faibles doses 1.4.4 Environnement d’échantillons ■ Dans le domaine des rayons X durs (E > 3 keV), l’échantillon est placé dans le faisceau à l’air car la ligne de lumière est construite avec une fenêtre de beryllium en amont qui isole le vide de l’anneau tout en étant mécaniquement rigide et transparente au rayonnement. ■ Dans le domaine des rayons X mous (E < 3 keV), il n’existe pas de matériaux convenables comme fenêtre équivalente et l’échantillon est donc placé sous vide. Dans le premier cas, l’échantillon lui-même peut être étudié dans un environnement spécifique : cellule haute pression, haute ou basse température, sous atmosphère réactive, et plus généralement in situ, par exemple sous chauffage laser, à l’état nébulisé, à l’interface d’un solide sous tension, etc. Cette flexibilité explique la grande variété des applications (cf. § 2.2.3 et 2.3.3). On peut également envisager d’étudier des produits radioactifs dans une cellule adaptée (activité < 5 mCu soit 18,5 x 107 Bq) ou dans une boîte à gants à condition de respecter les règlements en vigueur. 1.4.5 Détecteurs Les détecteurs de photons utilisés sur les diverses expériences dépendent énormément du type de mesure souhaité [3, 4]. On trouve ainsi des compteurs ponctuels, des détecteurs linéaires, bidimensionnels, avec ou sans sélection d’énergie, avec des sensibilités plus ou moins grandes, des dynamiques plus ou moins élevées, des résolutions spatiales de diverses qualités... Il n’existe bien sûr pas de détecteur universel idéal, et le développement de certains des paramètres précédents se fait au détriment des autres. Ce n’est pas l’objet de ce chapitre de décrire les principes et les fonctionnements de tous ces détecteurs d’autant plus que leur évolution actuelle est très rapide. Cette évolution est précisément induite par le développement des sources de lumière de plus en plus brillantes (synchrotron de 3e génération) qui créent des besoins toujours plus exigeants dans la détection, notamment par le grand nombre de photons qu’ils délivrent dans des temps très courts. PE 2 700 − 8 Plus généralement, le grand essor que connaît l’utilisation du rayonnement synchrotron joue un rôle moteur dans l’amélioration des performances des optiques, des postes expérimentaux et des détecteurs. Ces améliorations sont en retour bénéfiques aux équipements traditionnels de laboratoire, voire à ceux d’autres branches de la recherche (imagerie médicale par exemple). 1.5 Utilisation actuelle du rayonnement synchrotron Avant de passer en revue dans le paragraphe 2 les principales techniques et applications liées au rayonnement synchrotron, brossons-en un rapide tableau afin de les situer parmi l’ensemble des autres techniques. Le tableau 1 montre une comparaison des performances de diffusion/diffraction, d’absorption des rayons X, de fluorescence X, de photoémission, d’imagerie avec le rayonnement synchrotron avec quelques techniques concurrentes. Nous avons déjà dit que les centres de rayonnement synchrotron délivrent des faisceaux de lumière dont les qualités sont généralement très supérieures à celles des sources conventionnelles. L’utilisation principale de ces sources est la caractérisation et l’analyse des matériaux, au niveau atomique au-delà des techniques classiques, sous toutes leurs formes, essentiellement par des expériences d’absorption de diffraction et d’émission [5]. Certaines techniques sont propres au rayonnement synchrotron, mais d’autres se pratiquent également depuis longtemps en laboratoire, comme la diffraction X, mais la source synchrotron ouvre alors de nouvelles possibilités pour étudier par exemple la structure des matériaux. Toutes les disciplines scientifiques sont concernées : biologie, physique, chimie, chimie-physique, astrophysique, physique moléculaire, sciences de la terre... La variété des applications est aussi grande que celle des tubes à rayons X et des spectrométries IR [6] ; citons la médecine, la pharmacie, les biotechnologies, les cosmétiques, la pétrochimie, la chimie des matériaux, les céramiques, la métallurgie, la métrologie, la micromécanique, les polymères, l’électronique, la microélectronique, l’espace, etc. Cela explique l’intérêt croissant témoigné par des chercheurs de sciences fonda- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ mentales mais également et de plus en plus par les industriels qui utilisent aujourd’hui le rayonnement synchrotron pour résoudre des problèmes très concrets liés à la R&D, la fabrication et le marché concurrentiel. À côté de l’utilisation pour les matériaux, il existe deux autres types d’utilisations que nous aborderons également dans le paragraphe 3 : l’étalonnage et l’insolation. Le rayonnement synchrotron constitue en effet une source qui peut servir comme moyen d’étalonnage. L’utilisation comme source d’insolation devrait se développer également rapidement dans le cadre des techniques de lithographie, à une échelle pouvant être industrielle. La construction d’anneaux synchrotron exclusivement dédiés à cet usage est envisagée dans divers pays, en Allemagne ou dans le Sud-Est asiatique. À noter également les développements envisagés dans le domaine médical pour le diagnostic et la thérapie. faisceaux réémis sont caractéristiques des atomes ou des liaisons chimiques. ■ Émission de particules : dans certains cas, des molécules libres ou adsorbées sur une surface peuvent être scindées en plusieurs fragments neutres ou ionisés sous l’action de la lumière. Dans tous les cas de la matière condensée, on peut avoir émission de photoélectrons, d’électrons Auger, ainsi que de particules ionisées ou neutres désorbées. Le tableau 2 donne les différentes techniques et applications du rayonnement synchrotron en fonction des branches scientifiques et de l’énergie des rayonnements. 2. Techniques de caractérisation et d’analyse 2.1 Introduction Schématiquement, les longueurs d’onde de quelques centaines de nanomètres à quelques nanomètres (ultraviolet proche : λ > 105 nm) correspondent à des énergies de transition électronique. Les longueurs d’onde plus courtes (quelques dixièmes à quelques centièmes de nanomètre) des rayons X durs sont de l’ordre de grandeur des distances interatomiques. Ainsi, en choisissant correctement la longueur d’onde, le rayonnement synchrotron peut être adapté à l’étude des propriétés électroniques ou à la description des structures des matériaux. La figure 5 schématise les différents processus d’interaction matière-rayonnement soit avec des molécules adsorbées sur une surface, soit avec des matériaux condensés (solides ou liquides). De façon très simplifiée, on peut classer les processus de la façon suivante. ■ Diffraction-diffusion : certains photons X sont réémis sans changement d’énergie dans plusieurs directions de l’espace qui dépendent de la structure atomique du matériau et de son orientation par rapport au faisceau incident. Lorsque l’on a affaire à un matériau non ordonné (liquide, amorphe), le phénomène s’appelle diffusion et lorsque le matériau est ordonné à l’échelle atomique (ordre cristallin), il apparaît alors des interférences constructives entre les faisceaux diffusés et le phénomène s’appelle diffraction. ■ Réflexion : sous incidence rasante pour les rayons X et sous angle plus important pour les rayonnements plus mous, certains photons sont réfléchis par les surfaces. ■ Absorption : seule une partie du faisceau incident traverse l’échantillon sans modification, le reste est absorbé ou réémis selon différents phénomènes. Un certain nombre de techniques sont basées sur la mesure du coefficient d’absorption en fonction de la longueur d’onde. ■ Fluorescence : c’est la réémission de photons d’énergie plus faible que l’énergie incidente suite à des processus au niveau de la structure électronique de l’atome (fluorescence X), ou au niveau des liaisons chimiques (fluorescence UV). Les longueurs d’onde des Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 9 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ Tableau 2 – Différents types d’études en sciences des matériaux avec le rayonnement synchrotron Matériaux Énergie des photons (eV) 0,1 (1) Rayonnement Processus Métaux et solides divers Verres, céramiques, semi et superconducteurs Infrarouge Vibration moléculaire Surfaces et adsorbats 1 (1) Visible Énergie de liaisons Surfaces et adsorbats 10 (1) Ultraviolet Échanges électroniques Photochimie 100 Ultraviolet sous vide 1 000 Rayons X mous 10 000 Rayons X durs Espèces biologiques et pharmaceutiques Dynamique Protéines des protéines en solution (dénaturation/ agglomération) Propriétés électroniques et magnétiques Propriétés électroniques de surfaces et interfaces Propriétés magnétiques Absorption X Diffraction, diffusion Fluorescence Diffusions Compton et Raman Polymères Colloïdes et agrégats Propriétés structurales à l’échelle atomique États d’oxydation Propriétés Arrangements cristallines atomiques Couches minces Grains nanométriques Morphologie Évolution sous contrainte Analyse élémentaire Structures microscopiques Analyse de traces Suivi de réactions Structures des biomolécules (1) Domaine des lasers 2.2 Techniques d’absorption 2.2.1 Principe Nous entendons par absorption les techniques de spectroscopie d’absorption X en fonction de l’énergie de photons et non pas les techniques de radiographie X qui seront abordées dans le paragraphe 3. Il est bien connu que l’absorption des photons X par un élément chimique donné présente des discontinuités qui correspondent aux divers niveaux énergétiques de ses couches électroniques. Les courbes d’absorption en fonction de l’énergie des photons : I0 /I = f (E) avec Figure 5 – Les différents processus résultant de l’interaction rayonnement/matière condensée Dans ce qui suit, nous allons examiner les principales techniques d’absorption, de diffraction et d’émission. Notre but n’est pas de décrire de façon détaillée ces techniques, mais de mettre en relief ce qu’elles peuvent apporter lorsqu’elles sont couplées au rayonnement synchrotron et d’examiner leurs applications possibles dans ce cadre. Pour chacune des trois techniques nous décrirons de façon plus approfondie quelques applications afin d’en souligner les potentialités en recherche fondamentale ou appliquée. PE 2 700 − 10 I0 I intensité incidente, intensité transmise, E énergie des photons, montrent, au-dessus de l’énergie du seuil d’absorption, des oscillations autour de la courbe monotone théorique que donneraient des atomes isolés (figure 6 a). Ces oscillations proviennent du fait que l’onde associée aux électrons éjectés de l’atome absorbeur est « rétrodiffusée » par les atomes voisins, en utilisant improprement une expression de mécanique classique pour un phénomène qui est décrit, en fait, par la mécanique quantique. Les interférences entre les ondes « émises » et « réfléchies » conduisent à des oscillations dites EXAFS (Extended X-ray Absorption Fine Structure) dans la courbe d’absorption. L’analyse par transformée de Fourier des oscillations jusqu’à environ 1 000 eV du seuil, donne la distribution, en termes de probabilité, des atomes voisins autour de l’atome absorbeur en fonction de leur distance (figure 6 b et 6 d ). La technique d’EXAFS fournit donc des informations sur les distances interatomiques avec une bonne précision (0,01 nm), l’identification chimique, la coordination et également le désordre thermique. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ L’application d’un champ magnétique dans une direction donnée de l’espace conduit à l’alignement des moments magnétiques des atomes dès lors que droite et gauche cessent d’être équivalents. L’absorption sera différente selon la direction du vecteur polarisation de la lumière par rapport à son aimantation. Pratiquement on mesure la différence d’absorption entre les faisceaux polarisés circulairement à droite et à gauche pour chaque longueur d’onde. Les spectres sont obtenus soit en se plaçant successivement au-dessus puis en dessous du plan de l’orbite des particules circulant dans l’anneau, soit en inversant le champ magnétique produit par la bobine dans laquelle est situé l’échantillon. C’est le dichroïsme magnétique circulaire (MCXD Magnetic Circular X-ray Dichroïsm). Si l’on mesure la différence d’absorption entre les faisceaux polarisés linéairement dans les directions parallèle et perpendiculaire, on obtient une mesure de dichroïsme magnétique linéaire (MLXD Magnetic Linear X-Ray Dichroism). Selon que l’on excite la couche atomique L ou K, on accède à la grandeur et la direction des moments magnétiques p, d ou f sur l’atome. Avec la méthode MCXD, seuls les ordres ferro(ferri)magnétiques peuvent être étudiés tandis que la méthode MLXD permet d’accéder aux ordres antiferromagnétiques. Ces méthodes sont complémentaires et, par exemple, particulièrement adaptées à la caractérisation d’une grande variété de matériaux artificiels dans le cadre de la R&D liée à l’enregistrement magnétique à très haute densité (§ 2.2.3.4). On citera les structures artificielles magnétiques composites pour lesquelles il est important d’obtenir les informations magnétiques en même temps que les informations structurales et électroniques locales pour chacun des éléments constituants l’échantillon. 2.2.2 Instrumentation associée Figure 6 – Spectres d’absorption X : forme générale, oscillations EXAFS, région XANES Au voisinage immédiat du seuil (à moins de 50 eV), on observe parfois d’autres structures ou résonances (région dite XANES pour X-ray Absorption Near Edge Structure) qui proviennent de transitions entre orbitales au sein de l’atome absorbeur. Elles reflètent la symétrie du site et l’état électronique de l’élément excité qui renseignent sur les liaisons chimiques auxquelles participe cet atome. Il existe plusieurs variantes instrumentales de mesure des spectres d’absorption suivant les matériaux analysés et les conditions d’analyse. La technique de base consiste à balayer en énergie la zone autour de la discontinuité d’absorption de l’atome analysé. Ce balayage est obtenu en tournant le bloc monochromateur par rapport au faisceau incident (figure 7). L’intensité du faisceau est mesurée avant et après traversée de l’échantillon. Il faut remarquer que seuls les éléments de numéros atomiques supérieurs à environ 25 à 30 sont analysables sur les anneaux synchrotrons fournissant des rayons X durs. Les énergies d’absorption des éléments plus légers se situent en-dessous du keV ou de quelques keV et ne sont donc accessibles que sur des machines d’énergie moyenne (inférieure au MeV). On comprend par ailleurs pourquoi l’absorption X n’est pas une technique utilisable avec une source conventionnelle : elle nécessite un rayonnement continu en énergie et celui offert par les générateurs classiques de rayons X est bien trop faible (cf. figure 2) pour permettre des mesures dans des temps raisonnables. Les spectroscopies d’absorption dans ses deux composantes EXAFS et XANES fournissent donc des informations sur l’ordre local autour de l’atome absorbeur difficilement accessibles par d’autres techniques, d’autant plus qu’elles s’appliquent quelle que soit la nature du matériau, qu’il soit cristallisé ou amorphe, solide, liquide ou gazeux. Il existe des dispositifs EXAFS adaptés à l’étude des surfaces et des films minces, d’autres adaptés à l’analyse des échantillons dilués par examen non pas du faisceau transmis mais de la fluorescence réémise (voir § 2.4), ce qui permet de descendre à des concentrations de quelques dizaines de ppm, d’autres enfin destinés au suivi de cinétiques rapides (EXAFS dispersif) en analysant en énergie le spectre d’absorption global. Sur la plupart des dispositifs, on peut faire varier les conditions d’environnement des échantillons, par exemple la température, la pression ou l’environnement gazeux. Il est alors possible de suivre et d’analyser l’environnement atomique d’une espèce chimique sélectionnée lors d’une réaction ou d’une évolution chimique. Les spectroscopies XANES et EXAFS associées à la polarisation linéaire, circulaire droite et gauche du rayonnement synchrotron permettent d’accéder aux propriétés magnétiques des matériaux. L’absorption d’un matériau dépend explicitement de la polarisation de la lumière, une brisure de symétrie de l’espace traduite par la non-équivalence entre gauche et droite ou chiralité du système étant ainsi décelable. Il s’agit du phénomène de dichroïsme. Un aspect particulier du dichroïsme est le dichroïsme magnétique. Enfin, dans le cas particulier des études de dichroïsme, ces montages d’absorption X nécessitent d’être installés derrière des onduleurs ou wigglers spéciaux (asymétriques, hélicoïdaux, etc.). On peut aussi utiliser une ligne classique avec un faisceau polarisé linéairement, une lame quart d’onde spécialement conçue pour les rayons X permettant comme on peut le faire avec un rayonnement visible, d’obtenir à volonté du rayonnement circulairement polarisé droite ou gauche. Toutefois, ce système est limité aux rayons X con- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 11 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ d’analyser que la première sphère de coordination pour les systèmes industriels, ce qui est malgré tout suffisant pour donner des informations que l’on ne peut obtenir par ailleurs. Figure 7 – Montage expérimental classique du type monochromateur à deux cristaux utilisé en spectroscopie d’absorption X ventionnels (au-dessus de quelques keV) et, pour une lame donnée, l’accordabilité en longueur d’onde est réduite. 2.2.3 Applications des techniques d’absorption Elles sont donc très nombreuses puisque tous les types de matériaux sont analysables et, également, presque tous les éléments qui les constituent. Parmi les applications les plus répandues, citons le suivi de réactions de catalyse, des interfaces liquide-solide en électrochimie, l’analyse des céramiques, des verres, des alliages métalliques, des polymères, des couches minces, des systèmes colloïdaux, de certains matériaux biologiques ou d’intérêt pharmaceutique. Il est normal dans ces conditions que les techniques de spectroscopie d’absorption soient devenues des moyens d’investigation très utiles à la recherche industrielle. Avec les possibilités offertes par les nouveaux synchrotrons de très haute brillance, il sera bientôt possible d’effectuer de la microanalyse structurale locale ou des cartographies de signatures spectroscopiques. Les figures 8 a et 8 b montrent l’évolution des modules des transformées de Fourier en fonction des distances interatomiques r autour des atomes de platine pour un catalyseur chloré comportant 1 % en masse de métal dispersé sur alumine gamma pendant une réduction de plusieurs heures sous une pression de 15 x 105 Pa d’hydrogène entre 150 et 400 °C. On observe la disparition des liaisons Pt-O de l’oxyde de platine et la formation de liaisons Pt-Pt par genèse d’un agrégat métallique lorsque la température augmente. La figure 8 b donne la transformation de ce même catalyseur placé successivement et de haut en bas : — sous une pression de 105 Pa d’hydrogène à 350 °C (I) ; — après 2 heures et demie de conversion d’un mélange H2-nC7H16 une pression de 3 x 105 Pa (II) ; — pendant (III et IV) et après déplacement (V) du carbone déposé lors de cette réaction, déplacement effectué par une nouvelle réduction à 450 °C sous une pression d’hydrogène de 3 x 105 Pa. L’absence de liaisons Pt-O après réduction et l’apparition, pendant la conversion de n-heptane, puis la destruction de liaisons Pt-C (voir flèches) sont très nettement visibles. 2.2.3.2 Réactivité électrochimique La compréhension des corrélations entre la structure de l’électrode et sa réactivité est une étape importante. Les réactions électrochimiques sont particulièrement difficiles à étudier du fait de leur caractère interfacial et des champs électriques statiques élévés qui règnent à l’interface. La spectroscopie d’absorption X (XANES et 2.2.3.1 Catalyse L’EXAFS est une technique de caractérisation très performante pour l’étude des catalyseurs de reformage, matériaux employés pour obtenir notamment des essences à indice d’octane plus élevé. Cette méthode permet une description de l’ordre local et donc une formulation de modèles structuraux de l’espèce active constituée par des particules métalliques dont la taille est de l’ordre du nanomètre. Le XANES peut être utilisé en complément de l’EXAFS pour déterminer l’état électronique des éléments sondés. Dans le cas des particules bimétalliques supportées sur alumine, silice, zéolithe, il est possible par exemple de mettre en évidence directement les transferts électroniques entre un métal actif et un ajout, normalement inactif en catalyse, échanges qui peuvent modifier l’activité ou la sélectivité des catalyseurs. Un domaine particulièrement intéressant rendu accessible par le rayonnement synchrotron est celui des études in situ : suivi de cinétique de formation de particules, mise en évidence de liaison métalcarbone sous mélange réactif à haute température et haute pression, etc. L’application de cette spectroscopie EXAFS en mode dispersif permet en complément le suivi en continu, à l’échelle de la seconde, des diverses modifications structurales et électroniques (autour d’un élément de numéro atomique Z choisi par la longueur d’onde du rayonnement) de ces catalyseurs bimétalliques en partant du sel imprégné sur alumine, de l’étape de calcination sous air, en passant par la réduction sous hydrogène, jusqu’au fonctionnement sous flux d’hydrocarbures [8, 9]. Dans ces conditions extrêmes, le flux disponible sur les sources actuelles ne permet PE 2 700 − 12 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ Figure 8 – Modules des transformées de Fourier du signal EXAFS au seuil L3 du platine présent dans un catalyseur Pt/Al2O3 lors de sa réduction in situ a et pendant la conversion du n-heptane, suivie d’une nouvelle réduction b EXAFS) permet de déterminer in situ la structure locale de l’adsorbat et son état physico-chimique. Exemple : dans une cellule électrochimique comportant une électrode de travail en monocristal d’or, une contre-électrode en film de platine pulvérisé sur une feuille de polyamide et un électrolyte de sulfate de cuivre en mélange avec du sulfate de sodium, on électrodépose le cuivre sur l’or. Les spectres d’absorption X mesurés au seuil K du cuivre évoluent en fonction du potentiel de l’électrode, donc en fonction du recouvrement [10]. Les résultats montrent l’évolution de la structure cristallographique du cuivre en submonocouches, au cours de l’oxydation avec la mesure des distances Cu-O, Cu-Cu et les coordinences associées. Un autre exemple de mesures d’absorption X in situ est le suivi de la cinétique de réduction du cuivre et les phénomènes d’inclusion du Cu dans une cathode de poly(3-méthyl-thiophène, PMeT) polarisée [11]. La signature de l’état d’oxydation du cuivre : Cu(II), Cu(I) et Cu(0) est identifiée par les structures fines du signal XANES enregistrées en fonction du temps et pour une valeur donnée du potentiel d’électrode. La structure locale du cuivre est fournie par le signal EXAFS résolu dans le temps. On montre ainsi qu’au début du processus de réduction électrochimique, les ions Cu(II) d’abord entourés d’oxygène se réduisent rapidement en ions Cu(I) puis sont stabilisés par les atomes de soufre du polymère. Enfin le cuivre métallique est formé en agrégats puis sous une forme cristalline en plaquettes organisées. La corrélation de ces phénomènes microscopiques entre la conductivité macroscopique des polymères et la formation d’inclusions métalliques a pu être établie. 2.2.3.3 Topologie des interfaces métal-polymère La méthode d’absorption des rayons X s’applique aussi mais, cette fois, le choix de l’énergie des photons est dicté par la nature de l’adsorbat. Dans le cas de polymères c’est le carbone dont le seuil K se situe autour de 300 eV. Il s’agit de rayons X mous qui sont absorbés fortement par la plupart des matériaux et il convient de placer l’échantillon sous ultra-vide afin que le faisceau de lumière arrive sur la cible en rencontrant depuis l’anneau le minimum d’obstacle depuis l’anneau de stockage lui-même jusqu’au monochromateur et le système optique de transport de lumière. On réalise l’expérience d’absorption des rayons X en mesurant en fonction de l’énergie des photons, non pas l’intensité des photons transmis mais l’intensité globale des photoélectrons émis par l’échantillon. La figure 9 présente un exemple d’étude d’électrodéposition de films minces de 2 nm d’épaisseur dérivés du polythiophène sur du platine ; la mesure XANES effectuée en orientant la surface parallèlement et perpendiculairement au vecteur champ électrique du faisceau de photons, fournit des informations sur l’interface [12]. Les chaînes courtes s’étalent sur la surface tandis que les chaînes longues se dressent perpendiculairement au substrat. 2.2.3.4 Structures artificielles magnétiques Les matériaux à structure artificielle que sont les multicouches et les super-réseaux présentent des propriétés magnétiques variées : anisotropie perpendiculaire, magnétorésistance géante, etc. dont l’origine est étroitement corrélée à leur structure topologique et en particulier à la nature de l’interface. Les spectroscopies d’absorption XANES et EXAFS avec une détection d’électrons sensible à la surface permettent de déterminer comment le réseau accommode les contraintes interfaciales (différences de paramètres) et éventuelle- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 13 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ ment la façon dont l’interdiffusion permet de réduire ces contraintes. Par exemple, dans des multicouches fer/cuivre où une épaisseur ultramince de fer (quelques monocouches) est déposée sur du cuivre (100) puis recouverte de cuivre avec une épaisseur de 0,2 à 2,5 nm, il a été possible [13] de démontrer que, selon la température de dépôt, le fer adopte la structure du cuivre (370 K) ou une structure métastable moins ordonnée (300 K). Dans le diagramme température/épaisseur de couche, ces deux températures correspondent à deux domaines magnétiques différents, montrant ainsi la corrélation entre ordre local et magnétisme. Dans le même ordre d’idée, les propriétés de magnétorésistance géante observées sur des multicouches Fe/Cu pour des épaisseurs de cuivre inférieures à 1,3 nm, sont intimement liées à la structure cubique centrée du cuivre. 2.3 Techniques de diffraction-diffusion 2.3.1 Principe Le phénomène de diffraction-diffusion est un phénomène d’interaction élastique entre les photons X et les électrons du matériau (diffusion de Thomson). Chaque atome diffuse les photons X de façon continue avec une amplitude qui dépend de l’angle 2 θ entre le faisceau incident et la direction considérée. Pour 2 θ = 0, l’amplitude maximale est proportionnelle au nombre d’électrons de l’atome diffuseur. Dans un matériau, les ondes diffusées par chaque atome vont interférer, ce qui va conduire à une réponse totale du matériau non monotone en fonction de l’angle 2 θ. Il est clair que l’amplitude totale diffusée par le matériau dépendra des positions atomiques mutuelles et sera différente si l’on a affaire à un milieu ordonné ou non. Figure 9 – Étude de l’adhésion par voie électrochimique de films minces (2 nm) du thiophène sur du platine [11] Mathématiquement, cette amplitude est égale à la transformée de Fourier de la densité électronique du matériau. Ainsi, dans le cas d’un matériau non ordonné de type liquide ou amorphe, l’intensité diffusée, qui est proportionnelle au carré du module de l’amplitude, est continue et présente un maximum large. Celui-ci traduit l’existence des distances les plus probables entre atomes voisins, c’est le phénomène de diffusion des rayons X pour un matériau non ordonné. Dans le cas opposé des cristaux parfaits, caractérisés par un ordre périodique, les interférences ont pour effet de concentrer exclusivement la diffusion dans des directions discrètes de l’espace (réflexions de Bragg), théoriquement selon des angles solides infiniment petits. En effet, la transformée de Fourier d’une fonction périodique est une fonction périodique discrète formée par des pics δ. C’est le phénomène de diffraction. Si le milieu n’est pas parfaite- PE 2 700 − 14 ment périodique, les écarts à la périodicité vont donner naissance à de la diffusion plus ou moins continue localisée en dehors des réflexions de Bragg : c’est le phénomène de diffusion diffuse. Autour de la direction de faisceau incident, il n’y a normalement pas d’intensité diffusée sauf lorsque le milieu présente des hétérogénéités de densité électronique de grande dimension et non périodiques : c’est le phénomène de diffusion aux petits angles. Du fait que les longueurs d’onde des rayons X durs (0,05 à 0,2 nm) sont du même ordre de grandeur que celle des distances interatomiques dans la matière condensée, l’interaction entre photons X et électrons donne naissance à des phénomènes d’interférences plus ou moins parfaites. L’exploitation des spectres de diffraction-diffusion permet donc d’accéder aux caractéristiques géométriques de Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ l’arrangement des atomes dans le matériau, cela d’autant plus précisément que l’ordre est bien défini. Les techniques de diffraction-diffusion se sont développées dès les années 1910, elles sont maintenant la technique privilégiée d’analyse structurale de la matière. Nous n’allons pas ici en décrire toutes les potentialités, nous nous contenterons seulement d’expliquer ce qu’apporte le rayonnement synchrotron pour certaines d’entre elles. 2.3.2 Apport du rayonnement synchrotron 2.3.2.1 Microanalyse Bien que le rendement du phénomène de diffusion élastique soit faible par rapport à tous les autres processus d’interaction photonmatière, les générateurs classiques délivrent généralement des faisceaux assez intenses pour que les phénomènes de diffraction soient correctement analysables sur des cristaux de quelques dixièmes de millimètre d’arête. En revanche, pour les tailles inférieures, il faut faire appel au rayonnement synchrotron dont l’intensité permet de descendre à des dimensions cristallines de l’ordre du micromètre. L’utilisation du rayonnement synchrotron permet d’améliorer également les données collectées lors de l’expérience grâce à un meilleur rapport signal/bruit et à la faible divergence des faisceaux. Par ailleurs, le développement des microfaisceaux, grâce aux lentilles de Bragg-Fresnel par exemple, va permettre de travailler sur des zones de l’ordre du micromètre carré. Cette possibilité ouvre de larges perspectives en microanalyse d’échantillons non homogènes, notamment sur des tissus biologiques, dont certaines dimensions caractéristiques sont souvent de l’ordre du micromètre à la centaine de micromètres (taille des cellules). 2.3.2.4 Diffraction-diffusion anomale Une des caractéristiques essentielles du rayonnement synchrotron est sa continuité spectrale. Celle-ci est mise à profit pour la technique de diffusion anomale qui consiste à collecter des données de diffraction ou de diffusion en faisant varier l’énergie des photons X autour d’un seuil d’absorption d’un élément du matériau. Autour du seuil, l’amplitude diffusée par l’atome analysé présente des variations brutales non monotones, avec déphasage, ce qui provoque des variations d’intensité importantes entre les faisceaux diffractés ou diffusés à différentes longueurs d’onde autour du seuil. Ces variations qui proviennent exclusivement des atomes absorbeurs renseignent sur leurs positions mutuelles ; les atomes absorbeurs jouent donc le rôle d’atomes-sondes. Cette technique de diffraction en fonction de l’énergie ne se pratique bien sûr qu’avec le rayonnement synchrotron. De manière équivalente, mais cette foisci en collectant les signaux de spectroscopie d’absorption EXAFSXANES dans la direction angulaire d’un pic de diffraction, il est également aujourd’hui possible, avec ces nouvelles sources très intenses, d’obtenir des informations structurales locales selon des orientations choisies de plans atomiques. 2.3.2.5 Diffraction-diffusion aux très petits angles L’excellente collimation accessible avec le rayonnement synchrotron et l’intensité des faisceaux rendent également possible les mesures de la diffusion aux petits angles très proches du faisceau incident (fraction de minutes d’arc). En travaillant avec des distances échantillon-détecteur de plusieurs mètres, voire dizaines de mètres, on peut atteindre des distances entre objets diffractants ou des tailles d’objets diffusants de l’ordre du micromètre, certains envisagent même d’atteindre 10 µm. Rappelons que les limites des installations classiques sont de l’ordre de 0,05 à 0,1 µm. 2.3.2.6 Diffraction avec polarisation 2.3.2.2 Suivi de cinétiques rapides La grande intensité des faisceaux délivrés par les synchrotrons, couplée aux performances actuelles des détecteurs, permet de collecter des données très rapidement et de suivre des évolutions brusques des diagrammes de diffraction. À titre d’exemple, comme d’ailleurs pour la spectroscopie d’absorption X en mode dispersif, on peut au LURE suivre en faisceau monochromatique des cinétiques avec des prises de données toutes les quelques millisecondes, soit dix à cent fois plus rapidement qu’avec un tube classique ; ces performances seront nettement améliorées à l’ESRF si les progrès en performance des détecteurs permettent d’atteindre des temps caractéristiques autour de la microseconde. En faisceau blanc, les mesures sont bien sûr plus rapides ; une collecte de données dans les conditions dites « technique de Laüe » a pu être réalisée à l’ESRF uniquement avec une impulsion de lumière, c’est-à-dire avec un temps d’exposition de 50 · 10−12 environ. Ici encore on constate que de formidables perspectives sont ouvertes en diffraction X. 2.3.2.3 Diffraction haute résolution Il est possible avec un tube de rayons X d’obtenir des faisceaux monochromatiques avec une excellente résolution en énergie grâce à des réflexions successives sur plusieurs lames de monochromateur. Mais la trop faible intensité résultante empêche toute utilisation pratique. Au contraire, avec le rayonnement synchrotron, on obtient des faisceaux d’intensité correcte malgré une résolution en énergie très poussée ; les performances actuelles atteignent ∆E/E = 10−9 en couplant plusieurs monochromateurs successifs ce qui permet l’analyse de la diffusion inélastique de rayons X. Enfin, le fait de travailler avec une source à plusieurs mètres ou dizaines de mètres et avec des optiques focalisantes confère aux faisceaux une excellente résolution spatiale et un excellent rapport signal/bruit, nettement supérieurs à ceux obtenus sur les installations classiques. Le faisceau synchrotron est naturellement polarisé horizontalement. Le fait de pouvoir disposer d’une telle polarisation augmente fortement les informations que l’on peut obtenir sur certains composés, notamment sur les composés magnétiques. Des polarisations plus sophistiquées sont mises au point à l’ESRF, notamment une polarisation hélicoïdale. 2.3.3 Applications des techniques de diffraction-diffusion La diffraction et la diffusion de rayons X sont déjà, avec les sources classiques parmi les techniques les plus puissantes d’analyse et de caractérisation des matériaux à l’échelle microscopique atomique ou moléculaire. Tous les types de matériaux sont concernés, mais l’information est d’autant plus riche que l’arrangement des atomes ou molécules est régulier, c’est-à-dire proche du cristal. Couplées avec le rayonnement synchrotron, elles deviennent de formidables outils de caractérisation non destructifs de la matière capables, entre autres, de suivre des cinétiques jusqu’à la nanoseconde (figure 10), voire en-dessous, de faire de la microanalyse à l’échelle submicronique, d’analyser des structures dont les tailles caractéristiques vont de 0,01 nm à quelques micromètres [14, 20]. De même que pour la spectroscopie d’absorption X, la grande souplesse laissée à l’environnement des échantillons permet à nouveau de suivre de multiples processus physiques ou chimiques, tels que les effets mécaniques, les réactions chimiques, la fatigue, le vieillissement... en fonction d’un grand nombre de paramètres : température, pression, atmosphère gazeuse, champ électrique ou magnétique, humidité, diffusion chimique, temps... D’autre part, les matériaux sont analysables sous toutes leurs formes : cristaux, poudres cristallines, liquides, amorphes, émulsions, films minces, surfaces, fibres, matériaux à plusieurs composantes... Il est important de souligner que les applications touchent aussi bien la recherche appliquée que le développement des produits comme le contrôle de Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 15 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ finiment ce système de plaques. Des détecteurs bidimensionnels basés sur la technique CCD (Charge Coupled Device) commencent également à être utilisés. L’ensemble de la collecte de données pour un cristal de protéine (environ 20 000 réflexions) s’effectue en quelques heures. Les plus beaux succès de la biocristallographie sont les déterminations des structures de virus qui nécessitent pratiquement la mesure d’un million d’intensités. Outre ce type d’expérience classique de biocristallographie, deux techniques sont développées en parallèle et sont exclusives du rayonnement synchrotron. La première est la méthode MAD (Multiple wavelengths Anomalous Diffraction) qui consiste à exploiter la diffusion anomale d’un atome lourd inclus dans la protéine et à déterminer sa position, puis à aider au phasage, à partir de la collecte de données autour du seuil d’absorption. La seconde, méthode de Laue, consiste à travailler avec un faisceau blanc, ce qui permet des collectes de données avec des temps d’exposition excessivement courts, de la microseconde à la picoseconde. Ces techniques sont en plein essor. 2.3.3.2 Propriétés des métaux et alliages Figure 10 – Diagramme de diffraction en mode dispersif résolu dans le temps et in situ d’un échantillon de ciment en cours d’hydratation [20] qualité. Nous allons décrire de façon plus détaillée trois exemples d’applications. 2.3.3.1 Biocristallographie L’objet de la biocristallographie est de déterminer la structure des macromolécules biologiques (protéines et ADN) à l’échelle atomique par la technique de diffraction de rayons X sur des matériaux cristallisés [14]. Les étapes d’une détermination de structure sont les suivantes : cristallisation lorsque le séquençage chimique est connu, collecte des données par mesure des intensités de milliers de réflexions de Bragg disponibles, passage des intensités aux amplitudes diffractées par phasage des faisceaux diffractés à partir de diverses méthodes, détermination et affinement de la densité électronique par transformée de Fourier des amplitudes diffractées. La collecte des données constitue une opération clé car sa qualité conditionne les suivantes. C’est à ce niveau qu’intervient l’utilisation du rayonnement synchrotron qui, à qualité cristalline égale, permet d’obtenir de meilleures informations que les sources conventionnelles au niveau de la précision des mesures et de leur résolution spatiale, grâce notamment à un meilleur rapport signal/bruit. Par ailleurs, les forts débits de dose et les courtes longueurs d’onde évitent une trop rapide détérioration des cristaux pendant les mesures. En fait, le rayonnement synchrotron à contribué à l’élévation en général des normes de qualité et des exigences des cristallographies, pas uniquement pour l’usage des biocristallographes chez qui son utilisation est devenue à la fois banale et indispensable. Cette activité devrait couvrir à elle seule 10 à 15 % de l’utilisation des faisceaux de l’ESRF. Les mesures se font en modifiant l’orientation du cristal par rapport au faisceau incident de manière à collecter le maximum de réflexions de Bragg. Cela s’obtient soit simplement en tournant par pas constant (typiquement 0,5°) le cristal autour d’un axe et en enregistrant les intensités à chaque pas, soit en plaçant le cristal sur un diffractomètre automatique qui, par des rotations autour de plusieurs axes appropriés va couvrir l’ensemble des orientations du cristal. La détection se fait maintenant principalement avec des systèmes de plaques photosensibles (image plate) où une image latente sur un film contenant des atomes phosphorescents par excitation X est d’abord relue et numérisée à l’aide d’un système laserphotomultiplicateur. Cette information est ensuite effacée par exposition à une lumière blanche, ce qui permet de réutiliser quasi indé- PE 2 700 − 16 La compréhension des propriétés des métaux et alliages nécessite la connaissance de leur structure microscopique, à savoir à la fois les positions relatives des atomes et les défauts d’empilement (lacunes, interstitiels, dislocations, fautes d’empilements). La diffraction-diffusion des rayons X présente l’avantage, par rapport aux autres techniques d’investigation, de rendre possible des analyses en volume : le rayonnement synchrotron repousse encore ici les limites atteintes avec les sources classiques et crée de nouvelles possibilités d’analyse [15]. Passons en revue quelques exemples. ■ La diffraction haute résolution, notamment sur des poudres [16], permet d’effectuer des analyses de profils de raies et aussi d’obtenir des informations sur la structure en domaines. ■ La diffraction anomale autour des seuils d’absorption des atomes constitutifs des alliages permet de remonter aux paramètres d’ordre qui caractérisent la répartition des atomes et donc conditionnent les résistances mécaniques. ■ L’analyse de la diffusion diffuse donne accès aux fonctions de corrélation de paires pour un monocristal de solution solide ou aux paramètres d’ordre local pour les monocristaux d’alliages binaires. ■ L’analyse de la diffusion diffuse donnée par des monocristaux près des pics de Bragg (diffusion de Huang) permet d’atteindre des informations sur la nature des défauts (lacune, interstitiels), sur la structure des défauts ou celle de leurs amas. ■ La diffusion centrale couplée à la diffusion anomale met non seulement en évidence des fluctuations de densité électronique de taille comprise entre le nanomètre et le micromètre, mais également détermine les atomes qui sont concernés par ces fluctuations, comme par exemple dans le cas des verres métalliques. ■ Enfin, signalons les techniques d’analyse de surface (§ 2.3.3.4) et de détermination des contraintes mécaniques sur des couches minces ou en surface par la méthode du sin2ψ. Cette méthode consiste à suivre les déplacements angulaires d’une réflexion donnée en fonction de la direction d’incidence du faisceau sur l’échantillon, déplacements qui sont induits par les contraintes mécaniques qui déforment le réseau cristallin de façon non isotrope. 2.3.3.3 Diffusion aux petits angles sur les systèmes colloïdaux Une solution colloïdale est une dispersion d’une phase liquide ou solide dans un milieu liquide telle que la taille caractéristique des particules (qui ne sont pas obligatoirement de forme sphérique) s’échelonne entre le nanomètre et quelques micromètres. Les solutions colloïdales sont plus ou moins stables, leur stabilité dépend des énergies d’interaction entre particules, énergies électrostatiques, de dispersion, dues aux forces hydrophobes ou bien d’hydra- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ tation... La maîtrise de la stabilité des systèmes colloïdaux est cruciale pour leur utilisation qui touche de très nombreux secteurs : métallurgie et minéralogie (flottation des minerais, récupération assistée du pétrole), agroalimentaire, pharmacie et cosmétologie comme support de produit, biotechnologie pour l’extraction de protéine, détergents... La diffusion des rayons X aux petits angles est ainsi un outil tout à fait adapté à l’étude de la stabilité des solutions colloïdales [17] car elle permet de mesurer les forces moléculaires, via la compressibilité osmotique en extrapolant l’intensité diffusée à l’angle nul et à la fraction volumique de phase dispersée nulle (figure 11). On comprend donc l’apport du rayonnement synchrotron qui permet d’atteindre des angles plus petits que les sources classiques. En fait, la première étape dans une caractérisation de colloïdes consiste à déterminer les structures des « particules » qui sont plus ou moins allongées, séparées les unes des autres en formant des réseaux connectés ou même parfois bicontinus, plus ou moins différentes. Les dimensions des particules pouvant atteindre le micromètre et les distances entre particules pouvant être encore plus grandes, le rayonnement synchrotron est dans un bon nombre de cas indispensable pour caractériser correctement la structure de la suspension colloïdale correspondante. D’autre part, l’intensité de la diffusion dépend du contraste de densité électronique entre les particules et le milieu liquide ; lorsque ce contraste est, par exemple pour certaines vésicules de composés insolubles comme les tartres ou les colorants, pour certains cristaux liquides lyotropes et polymères en solution, et même pour certaines microémulsions, l’utilisation du rayonnement synchrotron est indispensable, grâce à son haut flux photonique, pour atteindre une statistique de comptage suffisante. 2.3.3.4 Analyse des surfaces et couches minces par diffraction La principale difficulté rencontrée dans l’analyse des surfaces par diffraction de rayons X tient à leur faible épaisseur qui conduit à des intensités diffractées très faibles avec les appareils classiques d’analyse. La grande intensité du rayonnement synchrotron surmonte cet obstacle et ouvre de très larges possibilités de caractérisation des surfaces [13] et donc, de compréhension des phénomènes structuraux dont elles sont le siège. La plupart du temps, grâce au parallélisme des faisceaux synchrotron, on travaille en incidence rasante ce qui permet soit d’augmenter la longueur du trajet à travers des couches minces, soit de jouer sur la profondeur de pénétration du faisceau dans les matériaux épais et donc d’effectuer une analyse en fonction de la distance à la surface de quelques dixièmes de nanomètre à plusieurs micromètres. Cette dernière technique est très intéressante pour l’analyse des couches d’oxydes et de l’état des surfaces (rugosité, porosité). Citons quelques exemples d’études : — surfaces d’oxydes : la surface propre de TiO2 selon les plans (100) est instable et présente plusieurs reconstructions selon la température de recuit préalable. La structure 1 x 3 (triplement de la maille selon une direction) a été élucidée en combinant des expériences de diffraction rasante et de diffusion lente d’électrons (LEED). Il a été montré que la face (100) est en fait constituée par une succession de microfacettes (110) conférant à la surface une structure en dents de scie ; — interfaces sur céramiques : la structure de l’interface entre un film de niobium (111) épitaxié sur un substrat de saphir Al2O3 (0001) a été étudiée par diffraction de rayons X en incidence rasante. Cette technique a permis de caractériser à l’échelle de la première couche atomique la liaison entre le substrat et le film, et donc de mieux comprendre et maîtriser cette liaison. Ainsi une déformation du réseau d’atomes de niobium sur la couche atomique de l’interface a été mise en évidence ; — surfaces de semi-conducteurs : toujours en incidence rasante, la reconstruction (2 x 8) de la surface (111) du germanium recuit a été résolue et comparée aux images fournies par microscopie tunnel ainsi qu’à des calculs de minimisation totale d’énergie. Ces quelques exemples illustrent les possibilités de la diffraction pour l’étude des surfaces. Cependant, pour être vraiment efficace, cette technique doit être associée à d’autres moyens d’investigation complémentaires, comme par exemple les techniques d’absorption EXAFS pour l’analyse de l’ordre local, les techniques de photoémission et de XANES pour la caractérisation des structures électroniques, d’observations par microscopie électronique ou de champ proche. 2.3.3.5 Diffraction en conditions extrêmes de température et pression Les pressions et les températures qui règnent dans les couches internes de la terre sont très élevées puisqu’elles atteignent environ 350 GPa et 6 000 K au centre du noyau. Soumis à ces conditions extrêmes, les minéraux constituant les différentes couches de la planète se présentent sous des formes très différentes de celles rencontrées en surface. Figure 11 – Profils des pics de Bragg obtenus par dilution d’une phase lamellaire de phospholipide zwitterionique par de l’eau [17] En résumé, comme pour la plupart des analyses par diffraction et diffusion de rayons X, l’utilisation du rayonnement synchrotron élargit considérablement les potentialités de la diffusion aux petits angles sur les systèmes colloïdaux grâce à son intensité, aux résolution atteintes et aussi, bien que nous ne l’ayons pas mentionné dans ce cas, à la diffusion anomale. La compréhension de nombreux phénomènes de géophysique interne nécessite donc la connaissance du comportement des matériaux des diverses couches dans leurs conditions naturelles. On ne sait pas encore reproduire les conditions du noyau, mais on atteint néanmoins des pressions et températures significatives (respectivement plusieurs centaines de GPa et 2 000 K) qui permettent de préciser les diagrammes de phase des minéraux dans le manteau terrestre. Les conditions de pression et température étant obtenues sur des volumes excessivement petits (< 10−4 mm3), il est nécessaire de travailler avec le rayonnement synchrotron pour que les faisceaux diffractés soient assez intenses [18]. Une des cellules possibles d’analyse est la cellule à enclume de diamant, matériau relativement transparent aux rayons X de plusieurs keV. Le matériau à Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 17 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ analyser est introduit entre deux diamants que l’on presse et la température est produite simultanément par chauffage laser. À titre d’exemple des possibilités actuelles, la figure 12 montre l’effet d’amorphisation par la pression de la fayalite (Fe2SiO4) qui apparaît vers 20 GPa sur le diagramme de diffraction [19]. Des applications se développent en mécanique, extraction pétrolière et biotechnologies. 2.4 Techniques d’émission de particules et de rayonnement 2.4.1 Fluorescence X Dans bien des cas, la présence d’éléments sous forme de traces peut influer sur les propriétés caractéristiques des matériaux. L’analyse par fluorescence X qui est une méthode non destructive est parfaitement adaptée à la caractérisation qualitative et quantitative d’éléments en faible teneur. des faisceaux monochromatiques de diamètre de l’ordre du micromètre ou même inférieur avec des flux de photons raisonnables sur des synchrotrons de troisième génération [23]. Ce nouveau champ de la microanalyse par fluorescence X devrait connaître un essor très rapide dans les années à venir. La microanalyse trouve par suite des applications dans de nombreux domaines. Le domaine des sciences de la vie est bien sûr un domaine privilégié avec la nutrition, la toxicologie, la pharmacologie, la biologie cellulaire... En pharmacologie, il est par exemple possible de suivre un élément chimique donné d’une molécule pharmaceutique dans les cellules des organites cellulaires. Dans d’autres domaines, comme les sciences de la terre et de l’environnement, la fluorescence X constitue bien sûr un outil privilégié d’analyse de traces dans les minéraux et divers matériaux comme les cendres, l’atmosphère, les eaux (figure 13)... Dans un proche avenir on pourra obtenir, avec une excellente résolution (de l’ordre de quelques micromètres), la cartographie de la répartition d’un élément donné dans un objet. Les principales caractéristiques du rayonnement synchrotron en font une source pratiquement idéale pour l’excitation de la fluorescence X [21, 22]. Son intensité, son vaste spectre continu en énergie, sa faible divergence angulaire et sa polarisation horizontale peuvent être mises à profit pour améliorer les limites de détection de très petites quantités de matière. Grâce au spectre continu en énergie il est possible de travailler avec un faisceau monochromatique à n’importe quelle énergie, ce qui permet d’augmenter considérablement le rapport signal/bruit car le rayonnement diffusé (élastique et Compton) est pratiquement supprimé. Le haut flux permet de reculer les limites de détection par rapport aux installations classiques de fluorescence. Le haut taux de polarisation horizontale du faisceau peut être pour sa part mis à profit pour l’analyse des éléments ultratraces dans des solutions liquides. La surface parfaitement plane est attaquée en incidence rasante par le faisceau de rayons X qui subit une réflexion totale : la profondeur de pénétration est donc très faible et la surface analysée importante. La diffusion est pratiquement éliminée par la détection du signal perpendiculairement au faisceau incident, ce qui repousse les limites de sensibilité dans le domaine du femtogramme. Figure 13 – Distribution du calcium, du fer et du titane dans deux particules (A et B) attachées de cendres volantes par microfluorescence X avec le rayonnement synchrotron [24] 2.4.2 Photoémission d’électrons La spectroscopie de photoémission d’électrons est la méthode privilégiée pour l’étude des propriétés électroniques des solides, des surfaces, des films minces, des interfaces, des interfaces enterrées, etc. Ces méthodes connues au laboratoire sous le nom de UPS (Ultraviolet Photoemission Spectroscopy), XPS (X-ray Photoemission Spectroscopy) ou encore ESCA (Electron Spectroscopy for Chemical Analysis) prennent une nouvelle dimension avec l’accordabilité, la polarisation linéaire et la brillance du rayonnement synchrotron [24]. Figure 12 – Diagramme de diffraction de la fayalite (Fe2SiO4) en pression (amorphisation du composé au-delà de 20 GPa) Le haut flux et la faible divergence peuvent être également exploités en réduisant la taille des faisceaux d’analyse. Une nouvelle technique basée sur l’utilisation de lentilles de Bragg-Fresnel faites de multicouches déposées sur un substrat de silicium permet d’obtenir PE 2 700 − 18 L’énergie des photons peut être choisie pour que le photoélectron émis ait une énergie (autour de 40 eV) telle que le libre parcours moyen soit minimal c’est-à-dire quelques couches atomiques. Ainsi, avec la mesure de l’énergie et de l’angle d’éjection du photoélectron émis mesuré par rapport à la direction normale à la surface, on peut obtenir des informations spectroscopiques différenciées sur le volume et la surface, à savoir : la structure de bandes, les états électroniques de surface, la densité d’états intégrés, que l’on peut associer à des informations d’ordre structural. Par ailleurs, le choix de la longueur d’onde d’excitation au voisinage d’un seuil d’ionisation en couche interne d’un élément de numéro atomique donné, permet une mesure avec une sensibilité chimique bien plus grande que pour l’ESCA classique, en jouant sur la section efficace d’absorption, maximale au voisinage d’un seuil d’ionisation. Cela est particulière- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ ment important pour caractériser des couches minces, épitaxiées, des interfaces enterrées dans des métaux et alliages, des semiconducteurs, des supra-conducteurs, des céramiques, des superréseaux ou de suivre la croissance de couches in situ ou encore d’étudier l’adhésion de polymères sur métaux ou semi-conducteurs. Le défi est de relier la signature spectroscopique à la structure géométrique des atomes de surface, sur tous les sites différenciés par la symétrie y compris les défauts (marches, impuretés, etc.) et ceux qui sont liés avec des adsorbats éventuels. L’exemple suivant permet d’apprécier les performances ultimes des techniques de photoémission à haute résolution avec le rayonnement synchrotron : une surface de silicium hydrogénée préparée chimiquement pour obtenir une surface homogène et quasi idéale (domaines de plus de 103 nm2 de H/Si(111)-(1 x 1) montre (figure 14) un spectre du silicium 2p particulièrement résolu avec une largeur de raie du Si 2p3/2 de l’ordre de 160 meV (élargissement par la durée de vie du trou 2p de l’ordre de 35 meV) [25]. La figure 14 montre également l’importance du choix de l’énergie des photons. Pour 108 eV, le photoélectron a une énergie faible de quelques eV et son libre parcours moyen est de quelques 1,5 nm ; le spectre obtenu est caractéristique du volume de l’échantillon. Au contraire, pour une énergie de photon de 130 eV, le libre parcours moyen du photoélectron est minimal (0,4 nm) et le spectre montre une forte contribution des atomes de silicium en surface, à savoir la contribution majoritaire du pic de surface S1 dont la signature est due aux atomes de silicium liés à l’hydrogène. 3. Autres technologies et instrumentations associées au rayonnement synchrotron 3.1 Introduction Le paragraphe 2 a donné un aperçu, non exhaustif, des techniques de caractérisation et d’analyse des matériaux. Ces techniques représentent à l’heure actuelle la majeure partie des activités liées au rayonnement synchrotron et certaines sont utilisées en routine. Mais à côté de la caractérisation des matériaux et de leur analyse à l’échelle nanoscopique, se développent de plus en plus d’autres applications que l’on peut classer soit en techniques d’imagerie, soit en techniques d’insolation ou d’étalonnage. Ces nouvelles applications ouvrent de larges perspectives dans des domaines aussi variés que le diagnostic médical, la radiothérapie, ou encore les microfabrications. Enfin, à côté des machines à rayonnement synchrotron, les lasers à électrons libres construits sur la base d’accélérateurs linéaires et optimisés dans l’infrarouge sont des outils nouveaux qui ouvrent aussi des perspectives dans de nombreux domaines comme la microscopie ou l’étude in situ de surfaces. 3.2 Techniques d’imagerie et microscopie 3.2.1 Techniques liées à l’optique X Les qualités des faisceaux synchrotrons permettent d’envisager à terme la transposition des activités de l’optique classique (imagerie - interférométrie) dans le domaine X, avec, autant que possible, transposition des performances à l’échelle de la longueur d’onde. Mais cette transposition passe nécessairement par le développe- Figure 14 – Spectre de photoémission dans le silicium (111) hydrogéné et dans la direction normale à la surface avec une résolution en énergie de 45 meV [26] ment de nouveaux éléments d’optique X permettant de repousser les limites technologiques des optiques actuellement utilisées et qui ne manquera pas, même à court terme, de profiter également aux techniques de caractérisation [27]. Parmi les éléments d’optique, on peut distinguer sommairement les optiques à miroirs, les multicouches et les optiques de BraggFresnel qui combinent les propriétés des cristaux et celles des optiques diffractives. ■ Les optiques à miroirs ont un très vaste domaine d’application qui va de l’infrarouge jusqu’aux longueurs nanométriques. On distingue les optiques rasantes qui sont encore utilisées pour le transport du faisceau, ou lorsque l’on désire transmettre une bande large, et les optiques « normales » qui ont les meilleures performances en résolution et collecte de flux. ■ Les multicouches sont constituées par un empilement alterné d’une centaine de couches d’un matériau lourd, comme le tungstène, et d’un matériau léger, comme le carbone. Le but visé est d’obtenir une structure lamellaire tridimensionnelle capable de réfléchir les faisceaux X, selon la loi de Bragg. L’intérêt de ces structures est de permettre de travailler avec des longueurs d’onde que l’on ne peut atteindre avec les cristaux si la périodicité de multicou- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 19 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ ches est suffisamment grande, typiquement 5 nm. En outre, le pouvoir réflecteur des multicouches est élevé et ces systèmes tiennent bien aux rayonnements intenses. il sera même très certainement possible, dans un proche avenir, de les suivre en temps réel. 3.2.2 Tomographie La tomographie est une méthode de reconstruction d’images d’objets à trois dimensions à partir d’une série d’images de coupes d’absorption obtenues en faisant tourner l’objet autour d’un axe de rotation. Cette technique est couramment utilisée comme contrôle d’objets industriels en utilisant le plus souvent des sources de rayons γ et X [39]. Mais la résolution spatiale se trouve alors dans le domaine macroscopique (quelques millimètres). Le couplage des techniques de microtomographie avec les microfaisceaux de rayons X obtenus à partir de rayonnement synchrotron a permis le développement de la tomographie X avec une résolution de l’ordre du micromètre et la possibilité de cartographier un élément chimique donné en accordant la longueur d’onde de part et d’autre du seuil d’absorption de l’élément considéré. Figure 15 – Optique de Bragg-Fresnel vue au microscope électronique [27] ■ Les optiques dites de Bragg-Fresnel sont d’abord des réflecteurs dont la réflectivité est assurée par une structure épaisse donnant lieu à une réflexion de Bragg (cristal ou multicouche selon la longueur d’onde). La focalisation est obtenue non pas par la forme générale de la structure réfléchissante mais par un réseau diffractant planaire gravé dans la structure réfléchissante. Les optiques de Bragg-Fresnel n’ont pas de concurrent pour l’imagerie haute résolution puisqu’elles permettent d’obtenir des faisceaux submicroniques en dessous du nanomètre en longueur d’onde. La figure 15 représente une vue partielle d’une optique de Bragg-Fresnel vue au microscope électronique. Ce type d’optique ouvre donc la voie à la microanalyse qui se développe actuellement rapidement dans les centres de rayonnement synchrotron. Les progrès des techniques « d’optique » sur rayonnement synchrotron n’en sont en fait qu’à leurs débuts. Il se développe des techniques d’interférométrie pure qui donnent accès aux variations d’indice de réfraction avec une grande précision, et donc à des hétérogénéités de structure avec une résolution de quelques nanomètres, des techniques de microscopie par holographie X, qui sont une transposition directe de l’idée originale de Gabor et des techniques d’imagerie par absorption. Pour ces dernières, le contraste est habituellement dû à l’absorption des faisceaux, comme en radiographie. Les images peuvent être obtenues en mode parallèle (image) ou en mode à balayage avec focalisation du faisceau. La résolution spatiale des microscopes à rayons X mous basés sur le contraste d’absorption est de l’ordre de 0,1 nm et peut atteindre 0,03 nm dans certains cas. Cette technique est par exemple capable de fournir des images de détails submicrométriques de circuits intégrés. Ce type d’imagerie permet, en accordant l’énergie des photons X aux seuils d’absorption des éléments du matériau, de visualiser l’image de l’objet pour un élément donné. Dans le domaine des sciences de la vie, la microscopie X devrait combler la lacune qui existe entre les microscopies optiques et électroniques. Elle permet en outre de travailler dans des environnements proches des environnements naturels (aqueux). La microscopie est ainsi bien adaptée à l’observation des cellules et des composants intracellulaires, et PE 2 700 − 20 Les applications de la microtomographie sont nombreuses. Citons, à titre d’exemple, le suivi de la formation de microfissures et de microfuites à l’interface d’implants d’hydroxyapatite et de tissus minéralisés (os, dentine), l’effet de la distribution en taille des pores lors de la récupération du pétrole dans le grès, la combustion à basse température du charbon, l’effet d’une atmosphère caustique sur les catalyseurs, l’évolution spatiale et temporelle de la propagation des fissures dues à la fatigue dans les métaux ou des composites, la formation de pores pendant le frittage de céramiques, le contrôle de circuits intégrés ou de plaquettes de multicouches pour les composants électroniques. 3.2.3 Imagerie médicale Une application du rayonnement synchrotron promise à des débouchés très utiles pour la société est le diagnostic médical. 3.2.3.1 Coronographie Pour la coronographie (image des artères coronaires), on doit actuellement injecter par un cathéter un « colorant » pour rayons X contenant de l’iode. Il y a donc à la fois risque lié à la cathétérisation artérielle et effet nocif des grandes quantités d’iode injectées chez le patient. L’utilisation d’une source synchrotron de rayons X est alors très intéressante puisqu’elle permet d’une part de diminuer considérablement la dose d’iode injectée au patient (on peut alors l’introduire simplement par voie veineuse) et, d’autre part, de travailler avec des doses de rayonnement plus faibles grâce au contraste obtenu en travaillant à deux longueurs d’onde situées de part et d’autre du seuil d’absorption de l’iode. Concrètement, les deux faisceaux monochromatiques (en dessous et au-dessus du seuil) sont inclinés légèrement l’un par rapport à l’autre et se croisent au niveau du cœur. Les deux images qui se trouvent sur les faisceaux à nouveau séparés sont lues par deux détecteurs et leur soustraction par ordinateur permet de visualiser avec une grande précision les artères et vaisseaux autour du cœur. La figure 16 montre un angiogramme coronarien du cœur battant d’un chien anesthésié. Une injection contenant de l’iode (37 %) a été utilisée pour réaliser le contraste et l’énergie des photons est fixée au-dessus (+ 130 eV) du seuil de l’iode (33,17 keV). Cette méthode de soustraction d’image augmente le contraste du signal provenant des veines par rapport à celui donné par la chair et les os d’un facteur 150 000 environ. Cette coronographie avec le rayonnement synchrotron se pratique déjà dans plusieurs pays : États-Unis, Russie, Japon, Allemagne et devrait être appelée à se développer rapidement avec les synchrotrons de la troisième génération. La figure 17 schématise l’installation en développement à l’ESRF. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ tions spatiales de l’ordre du micromètre. La figure 18 illustre une mesure effectuée sur une coupe transversale d’une émulsion d’un film polaroïd formée de cinq couches successives de polyéthylène [29]. Elles sont respectivement de 32 µm d’épaisseur pour le côté du film en contact avec le papier, suivi de trois couches de 8,4 et 4 µm d’épaisseur de différents mélanges entre poly(acétate de vinyle) et alcool polyvinylique et enfin de gélatine pure en surface (6 µm). Les mesures d’absorbance sont faites avec une résolution spectrale de 8 cm−1, à raison de 240 s par spectre, avec un pas de déplacement du faisceau infrarouge de 1 µm et une résolution spatiale effective de 10 µm. 3.2.5 Imagerie magnétique Figure 16 – Angiogramme coronarien d’un cœur battant d’un chien anesthésié, obtenu à l’aide d’un rayonnement synchrotron monochromatique 3.2.3.2 Tomographie médicale Comme expliqué au paragraphe 3.2.2, la tomographie est une technique comparable à la radiographie mais qui donne des images tridimensionnelles reconstituées par ordinateur. Son emploi à des fins de diagnostic, par exemple pour visualiser le cerveau, est également envisagé à l’ESRF sur la même ligne que la coronographie. Pour la coronographie, le faisceau utilisé étant localisé sur une plage de 300 x 10 mm2, le patient est translaté verticalement à une vitesse d’environ 50 cm/s pour obtenir une image de l’ensemble du cœur en 250 ms pendant la phase de repos. Pour la tomographie, il faudra en plus faire tourner le patient autour de l’axe de son corps. Des applications de cette technique sont également entrevues pour l’évaluation des pathologies osseuses, comme l’ostéoporose. La visualisation directe des domaines magnétiques de matériaux artificiels peut être réalisée avec la méthode MCXD (§ 2.2.1) en lumière polarisée circulairement où les électrons secondaires de l’échantillon sont utilisés dans un microscope photoélectronique permettant d’obtenir des images de domaines magnétiques avec une résolution spatiale égale au micromètre. Cela a été réalisé récemment sur un disque magnétique de cobalt, platine et chrome recouvert de 13 nm de carbone et 4 nm de polymère fluorocarboné, sur lequel ont été écrits différents motifs tests à base de « bit » de 10 µm x 10 µm et de 10 µm x 2 µm avec une magnétisation parallèle aux rangées mais alternée d’un bit à l’autre [30]. Les images enregistrées en lumière circulairement polarisée droite et en incidence rasante au voisinage des seuils L2 et L3 du cobalt montrent (figure 19) pour la même zone de 200 µm, une différence de contraste selon l’énergie des photons. Les motifs sont alternativement blancs et noirs et le contraste est inversé selon que l’énergie des photons correspond à L2 ou L3. Cette différence est due à l’inversion de l’effet dichroïque entre les deux seuils d’ionisation. Les images montrent effectivement les bits prélablement écrits sur le disque. Le contraste est bon pour les bits de grande taille mais pas pour les plus petits. Cette image montre néanmoins l’intérêt de cette méthode pour visualiser des domaines magnétiques sur des couches enterrées. Figure 17 – Schéma de l’installation de coronographie en développement à l’ESRF 3.2.4 Microspectroscopie dans l’infrarouge lointain Le rayonnement synchrotron est un spectre blanc qui s’étend dans l’infrarouge moyen et lointain jusqu’au domaine millimétrique. On peut l’utiliser comme source d’un interféromètre avec l’avantage par rapport à des sources infrarouges classiques que la luminance du rayonnement synchrotron est très supérieure à celle d’un corps noir (« globar ») et que l’on peut mesurer des absorbances élevées avec des rapports signal/bruit supérieurs aux sources classiques. Une des applications les plus marquantes est la microspectroscopie qui associe un interféromètre avec un microscope. La grande luminance du rayonnement synchrotron permet d’atteindre des résolu- Figure 18 – Spectres d’absorption infrarouge pris le long de la série de couches organiques formant un film Polaroïd d’après, [29, p. 30] Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 21 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ 3.4 Rayonnement synchrotron comme source d’insolation La grande intensité des faisceaux X des synchrotrons et leur bonne homogénéité sur des surfaces de plusieurs cm2 sont à la base de leur utilisation comme source d’insolation à des fins de fabrication d’objets à l’échelle industrielle ou semi-industrielle. C’est un domaine encore récent, surtout pour les microfabrications, qui laisse entrevoir d’énormes possibilités d’applications, ce qui explique l’engouement qu’il suscite actuellement dans tous les centres de rayonnement synchrotron. Nous aborderons deux types de techniques : la lithographie par rayons X mous, avec des applications en électronique, et la lithographie par rayons X durs, avec des applications pour les microfabrications. 3.4.1 Lithographie par rayons X mous Figure 19 – Image d’un disque enregistreur composé de cobalt, platine et chrome recouvert de carbone et de polymère sur lequel ont été écrits des domaines magnétiques de différentes tailles [30] Depuis plus d’une décennie, l’industrie de la microélectronique intensifie sa poussée vers la miniaturisation des composants. Parmi les techniques intervenant dans la chaîne des fabrications, la lithographie représente une étape essentielle, non seulement techniquement, mais également au niveau du prix de revient. C’est une opération qui consiste à créer un dessin en relief dans une résine sensible à une radiation, ces régions ainsi découvertes permettent un dépôt localisé de métal, après attaque sèche ou humide. L’insolation de la résine peut être effectuée à travers un masque qui est constitué de parties transparentes et de parties opaques aux rayons X mous, ou par balayage direct d’un faisceau (électrons ou ions). 3.3 Métrologie des rayons X : détecteurs et étalonnage Industriellement, la lithographie optique est largement utilisée, mais la lithographie par rayons X mous (0,5 nm < λ < 5 nm) peut d’ores et déjà s’inscrire comme concurrente à condition d’être couplée au rayonnement synchrotron pourvu que le flux de rayonnement soit suffisant. Le rayonnement synchrotron est une source d’étalonnage de détecteurs pour de nombreuses applications, comme les détecteurs embarqués dans des satellites, l’étude des plasmas créés par laser et leurs implications à la fusion par confinement inertiel, le développement des lasers à excimères, des études d’émission de rayons X stimulée, les détecteurs de rayonnement en général et enfin les besoins propres aux sources synchrotron (caractérisation du faisceau, utilisation en diffusion-diffraction, détection de haut flux, etc.) [3, 4]. On distingue les détecteurs sans résolution temporelle et avec résolution temporelle. Les avantages de la lithographie par rayons X mous pour l’industrie des semi-conducteurs sont sa haute résolution, sa bonne profondeur de focalisation, sa tolérance aux défauts et la latitude qu’elle laisse pour modifier les paramètres de fabrication [31]. Pour les premiers, les barettes de photodiodes et les CCD sont 100 à 1 000 fois plus sensibles que les films. Les bolomètres ont l’avantage de permettre des mesures absolues d’énergie X et peuvent servir d’étalon. Le rayonnement synchrotron est une source étalonnée, monochromatique, intense dans tout le domaine X mou et X conventionnel, qui permet d’améliorer la précision des étalonnages. Pour les détecteurs avec résolution temporelle, les photomultiplicateurs associés à des scintillateurs permettant d’atteindre des résolutions temporelles meilleures que la nanoseconde, les diodes à vide, les photoconducteurs atteignent la centaine de picosecondes ; enfin les caméras à balayage de fente permettent d’atteindre une résolution temporelle de quelques picosecondes, une bonne résolution spatiale (10 pixels/mm) et une bonne sensibilité (1 W/cm2). Grâce au rayonnement synchrotron, on peut tester les performances de tels détecteurs en exploitant non seulement l’accordabilité mais aussi sa luminance et sa structure temporelle. PE 2 700 − 22 En outre, la résolution de la lithographie optique est limitée à 1 µm (par contact ou proximité) ou 0,5 µm (par projection). Pour atteindre des résolutions plus fines, il faut utiliser des longueurs d’onde plus courtes. Il est aussi possible d’atteindre de très hautes résolutions nettement inférieures à 0,1 µm, domaine de la nanolithographie. Il est intéressant de noter que ces techniques ne sont pas uniquement développées dans des grands centres de rayonnement synchrotron mais également sur des petits synchrotrons « de poche » (à l’échelle d’une dizaine de mètres de circonférence) spécialement dédiés à cette application. 3.4.2 Lithographie par rayons X durs Au cours de la dernière décennie, plusieurs techniques de construction d’objets de dimensions inférieures au millimètre ont été développées. On peut citer en particulier les techniques d’usinage du silicium qui ont donné lieu à la réalisation des premiers microsystèmes à plusieurs fonctions. D’autres méthodes de microfabrication permettant l’utilisation de matériaux métalliques, plastiques, céramiques, ont vu le jour récemment. En particulier, les chercheurs du Kernforschungzentrum de Karlsruhe ont développé un procédé dénommé LIGA qui permet la réalisation de microstructures pseudo-tridimensionnelles avec une grande précision [32, 33]. Ces objets peuvent atteindre simultanément des dimensions latérales minimales de l’ordre du micromè- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ tre et des épaisseurs de quelques centaines de micromètres, voire plus. La précision des dimensions et la planéité des parois obtenues par cette méthode sont inégalées par les autres techniques de microfabrication. Ce résultat remarquable est dû essentiellement à la première étape du procédé qui est une étape de lithographie X durs de profondeur. Elle consiste à répliquer un masque X par ombre portée sur un substrat recouvert d’une résine sensible en utilisant le rayonnement synchrotron dans la gamme de longueur d’onde 0,1 à 0,4 nm. Le quasi-parallélisme du faisceau synchrotron en fait un rayonnement idéal pour limiter les erreurs de parallélisme sur la profondeur à des niveaux de l’ordre de 10−4. Le moule de résine ainsi formé peut être reproduit dans une grande gamme de matériaux par étapes successives de microélectrodéposition ou de micromoulage par injection. Celles-ci peuvent être de deux natures : soit la pièce métallique directement utilisable, soit un nouveau moule destiné à la réplication en grande série de composants avec des matières diverses (métaux, polymères, céramiques, verres...) (figure 20). La technique est en plein stade de développement mais de remarquables résultats ont d’ores et déjà été obtenus. Ainsi, une roue dentée d’une hauteur et d’un diamètre de 50 µm a été fabriquée au centre de rayonnement synchrotron du Wisconsin (États-Unis) dès le début des années 1990. Aujourd’hui, on construit des microengrenages qui sont intégrés dans des micromoteurs (figure 21 et [32]) potentiellement utilisables en médecine par exemple. Un autre développement consiste à obtenir des pièces réellement tridimensionnelles en utilisant différents masques correctement orientés les uns par rapport aux autres. 3.4.3 Radiothérapie Dans le domaine médical, les caractéristiques des faisceaux synchrotron pourraient, en plus de leur apport en imagerie et diagnostic, servir à développer certaines radiothérapies, notamment pour le traitement des tumeurs cérébrales. En effet, pour ces tumeurs, la radiothérapie conventionnelle comporte de sérieux risques de séquelles irréversibles en particulier chez les jeunes enfants dont les tissus cérébraux sont sensibles au rayonnement. Le rayonnement synchrotron, par son intensité et ses caractéristiques géométriques, offre une approche nouvelle basée sur l’utilisation de très petits faisceaux émis par impulsions très courtes. 3.5 Laser à électrons libres dans l’infrarouge et applications Le laser à électrons libres dans l’infrarouge construit sur un accélérateur linéaire est un instrument récent, encore unique en France, mais qui fonctionne déjà en routine pour de multiples utilisations [34]. Au contraire du rayonnement synchrotron, c’est un rayonnement monochromatique, pulsé dans le domaine de la picoseconde, de forte puissance crête et accordable dans l’infrarouge proche et moyen (2 à 50 µm sur la machine CLIO d’Orsay). Il permet entre autres de développer des techniques de l’optique non linéaire inaccessibles au rayonnement synchrotron ou de suivre des phénomènes cinétiques ultrarapides dans le domaine de la (sub) picoseconde. Figure 20 – Lithographie de profondeur 3.5.1 Spectroscopie vibrationnelle d’interfaces par génération de la fréquence somme : application à l’électrochimie La génération de la fréquence somme est une technique d’optique non linéaire développée récemment pour sonder in situ et sélectivement les espèces adsorbées à l’interface entre deux milieux condensés, la seule contrainte étant la transparence d’une des phases. Cette technique est obtenue par mixage non linéaire (synchronisation) d’une onde laser visible fixe (laser YAG doublé) et d’une onde laser infrarouge accordable (laser à électrons libres). Le signal de fréquence somme devient résonnant quand la fréquence infrarouge est voisine de celle d’un mode de l’adsorbat. La puissance du laser à électrons libres et son accordabilité dans un domaine spectral inaccessible aux lasers de table en font un outil puissant pour caractériser les espèces adsorbées à l’interface métal-électrolyte (réactifs, produits et intermédiaires de réaction, nature et symétrie des sites Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 23 _____________________________________________________________________________________________________________________________________ pond à λ/4, donc une valeur bien meilleure que celle obtenue en microscopie infrarouge conventionnelle. En imageant à différentes longueurs d’onde la même surface, il est possible d’accéder à une cartographie spectroscopique de la surface. Figure 21 – Micrographie d’une roue dentée, produite par le procédé LIGA, positionnée dans le chas d’une aiguille d’adsorption) et maîtriser des processus interfaciaux tels que l’électrocatalyse et la catalyse hétérogène, l’adhérence, la corrosion. Exemple : Sur le système platine-méthanol, qui constitue le modèle de pile à combustible, il a été identifié sans ambiguïté les intermédiaires adsorbés produits par la chimisorption dissociative du méthanol et montré qu’il s’agit du CO adsorbé en site sommet et en site ponté, la proportion du type de site dépendant du potentiel de l’électrode et de la concentration du méthanol [35]. Le système hydrogène-métal a une importance considérable en électrochimie pour les interfaces sèches (électrocatalyse, stockage de l’hydrogène, fragilisation des métaux, - ...). Peu d’études infrarouge ont été réalisées sur ce système, du fait de la très faible section efficace infrarouge de la liaison hydrogène-métal, qui rend sa détection très difficile. La sensibilité sélective de la méthode de génération de la fréquence somme avec le laser à électrons libres infrarouge a permis de mesurer les spectres vibrationnels de fixation de l’hydrogène sur les plans cristallographiques (hkl ) du platine en fonction du potentiel, de montrer qu’en milieu électrochimique l’hydrogène est adsorbé en site sommet, stabilisé par l’interaction avec les molécules du solvant [36]. 3.5.2 Microscopie à effet tunnel optique La microscopie à effet tunnel optique peut être étendue dans l’infrarouge grâce au laser à électrons libres. Cette microscopie permet de former des images de surface dépassant le critère de Rayleigh et d’atteindre des résolutions spatiales ultimes de l’ordre de λ/20 ou mieux. La réflexion totale d’un faisceau de lumière crée une onde évanescente dont l’amplitude dépend des détails (rugosité, adsorbats, etc.). Cette onde est détectée par une fibre optique épointée qui la convertit en onde progressive [37, 38]. En déplaçant cette fibre avec un système piézoélectrique au voisinage de la surface, on peut construire une image. L’intérêt de faire ces mesures dans l’infrarouge plutôt que dans le domaine visible est d’obtenir une signature spectroscopique de la surface au travers des modes de vibrations caractéristiques, avec le balayage latéral. L’intérêt du laser à électrons libres pour le domaine infrarouge est l’accordabilité continue de ce laser dans un large domaine (CLIO va de 2 à 50 µm) avec l’avantage d’une résolution spatiale inférieure à la longueur d’onde d’excitation grâce à la technique champ proche, meilleure que les techniques conventionnelles de microscopie infrarouge. L’exemple de la figure 22 montre une image d’une aire 50 x 50 µm2 d’un motif de silice de 0,1 µm de hauteur déposé sur substrat de silicium. Les bandes de silice autour de 5 mm apparaissent clairement avec une résolution spatiale de 1 mm, ce qui corres- PE 2 700 − 24 Figure 22 – Image d’un motif de silicium de 0,1 µm de hauteur sur substrat de silicium 50 x 50 µm2 de surface par microscopie à effet tunnel optique dans l’infrarouge avec le laser à électrons libres CLIO [37, 38] 4. Avenir du rayonnement synchrotron Le paramètre principal caractéristique de l’évolution des sources synchrotron est l’accroissement de la luminance. Pour donner une idée de cette évolution, il est intéressant de savoir que les sources de rayonnement synchrotron les plus anciennes sont quatre ordres de grandeur plus brillantes que les tubes à rayons X à anode tournante. L’écart en luminance entre ces sources et celles qui ont été optimisées avec des onduleurs très performants comme à l’ESRF, se situe autour de sept nouveaux ordres de grandeur ! On peut alors très raisonnablement imaginer que le rayonnement synchrotron qui est déjà une sonde pour l’étude des propriétés structurales, électroniques, magnétiques de la matière à l’échelle nanométrique, donnant des informations physicochimiques multiples avec une résolution spectrale, spatiale et temporelle inégalée, quel que soit le niveau de complexité du matériau, deviendra un instrument de plus en plus incontournable pour résoudre de nombreux problèmes en sciences de la matière condensée comme les sciences de la vie. En d’autres termes, c’est un outil non destructif idéal pour un suivi de réactions in situ dans des environnements divers (température, pression, action chimique ou électrochimique, action électromagnétique ou radiolyse) permettant d’obtenir des informations en temps réel jusqu’à la milliseconde. Un effort particulier sur les lignes de lumière sera envisagé pour traiter une grande variété d’objets comme des échantillons sous haute température et sous pression, des échantillons radioactifs, des réacteurs, etc. ne demande que du temps pour aboutir. C’est par ailleurs un outil pour fabriquer des objets de taille micronique en très grande quantité, ce qui ouvrira donc une utilisation commerciale directe de ces sources. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation ______________________________________________________________________________________________________________________________________ L’utilisation des sources de rayonnement synchrotron visera en fait de plus en plus non seulement l’exploitation de toutes ses propriétés ultimes mais aussi à faciliter son accessibilité pour satisfaire les besoins industriels. Remerciements Nous remercions J.P. DURAUD, B. PERLY, P. JEHENSON et J.P. COUTURES pour leur aide précieuse dans l’évaluation des performances de techniques concurrentes au rayonnement synchrotron. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation PE 2 700 − 25 P O U R Rayonnement synchrotron et applications E N par Irène NENNER Service des photons, atomes et molécules, DSM/DRECAM, Centre d’études de Saclay et Jean DOUCET Hervé DEXPERT Laboratoire pour l’utilisation de rayonnement électromagnétique (LURE), laboratoire mixte CNRS, CEA, MESR Références bibliographiques Généralités: rayonnement synchrotron, lasers à électrons libres et instrumentation [1] [2] KOCH (E.E.). – Handbook on synchrotron radiation vol. 1. (1983) Amsterdam North Holland. COUPRIE (M.E.) et al. – Dans Actes du colloque UVX94, ed. 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PE 2 700 − 1 P L U S P O U R _____________________________________________________________________________________________________________________________________ Centres de rayonnement synchrotron européens European Synchrotron Radiation Facility (ESRF). Grenoble. PETROFF (Y.). ELETTRA. Trieste. ROSEI (R.). Science & Engineering Research Council (SERC). Cheshire. THOMPSON (D.J.). E N Berliner Elektronenspeicherring-Gesellshaftr für Synchrotronstrahlung mbH (BESSY). Berlin. GUDAT (W.). Hamburger Synchrotronstrahlungslabor (HASYLAB). Hamburg. MATERLIK (G.). MAX-Laboratory. Lund. LINDAU (I.). Electron Stretcher and Accelerator (ELSA). Bonn. Laboratoire pour l’utilisation du rayonnement électromagnétique (LURE). Orsay. COMES (R.). S A V O I R P L U S Doc. PE 2 700 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Analyse et Caractérisation
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