l`o sse rvator e romano

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L’OSSERVATORE ROMANO
EDITION HEBDOMADAIRE
Unicuique suum
e
EN LANGUE FRANÇAISE
Non praevalebunt
Cité du Vatican
LXVII année, numéro 7 (3.418)
jeudi 18 février 2016
Au Mexique le Pape dénonce la corruption, l'exploitation, le trafic de drogue et la violence
La leçon des exclus
«Importante, rapide, mais tant désirée: par mon frère Cyrille et par
moi-même». Le Pape François a défini en ces termes la rencontre à l’aéroport de La Havane, avec le patriarche de Moscou et de toutes les Russies qui a précédé son voyage au
Mexique. A cette occasion, le
Saint-Père et le patriarche ont signé
une déclaration commune. Sur le vol
qui l’accompagnait à Mexico le 12 février, le Souverain Pontife a présenté
aux journalistes sur les motivations
spirituelles de la visite: «Mon désir le
plus intime est de m’arrêter devant la
Vierge de Guadalupe», dont le «mystère est étudié» mais pour lequel «il
n’existe pas d’explication humaine».
Corruption, exploitation, trafic de
drogue, violence sont «des injustices
qui portent atteinte directement au
rêve et au projet de Dieu»: la voix de
dénonciation du Pape s’est élevée
avec force durant les journées du
voyage au Mexique. Dès la première
rencontre publique, le 13 février au
Palais national, le Pape a rendu hommage à la richesse culturelle et naturelle du pays, en demandant dans le
même temps une réflexion sérieuse
sur la «responsabilité» qui incombe à
chacun dans la construction d’une
société solidaire et ouverte à tous. Ce
n’est pas un hasard si «l’expérience
nous montre que chaque fois que
nous cherchons la voie du privilège
ou des bénéfices de quelques-uns au
détriment du bien de tous, tôt ou
tard, la vie en société devient un terrain fertile pour la corruption, le trafic de drogue, l’exclusion des cultures
différentes, la violence, y compris
pour le trafic de personnes, les enlèvements et la mort, qui engendrent la
souffrance et freinent le développement».
Ces thèmes ont été repris lors de la
rencontre avec l’épiscopat mexicain et
lors de la Messe célébrée le jour suivant, premier dimanche de Carême, à
Ecatepec, banlieue très peuplée de
Mexico. Dans son discours aux prélats, François a exhorté à affronter le
défi des migrations et à éradiquer les
métastases du trafic de drogue qui
dévore la société: «En commençant
d’abord par les familles; en nous approchant et en embrassant la périphérie humaine et existentielle des
territoires dévastés de nos villes; en
impliquant les communautés paroissiales, les écoles, les institutions et les
structures de sécurité; c’est seulement
ainsi qu’on pourra se libérer totalement des eaux dans lesquelles se
noient malheureusement tant de
vies». Un appel renouvelé lors de
l’Eucharistie dominicale avec les familles et les laïcs engagés, lorsqu’il a
invité dans son homélie à ne pas fermer les yeux face aux injustices.
Dans la soirée a eu lieu la visite à un
hôpital pédiatrique de Mexico pour
rappeler que dans le soin des enfants,
outre les médicaments, la «thérapie affective» est utile, car «parfois,
une caresse aide beaucoup à se sentir
mieux». Mais le point d’orgue de ces
journées de François au Mexique a
été la prière au sanctuaire de Guadalupe. Aux pieds de la Vierge aimée
de tout le pays et patronne du continent, le Pape latino-américain s’est
longuement recueilli en silence pour
lui confier idéalement les fruits de ce
voyage pastoral.
Au cours de la Messe célébrée le
lundi 15 février, à San Cristóbal de
Las Casas, devant des dizaines de
milliers de fidèles représentant en
majorité les ethnies et les communautés locales, François a rappelé
qu’avec leur sagesse et leur capacité à
protéger la création, les populations
autochtones du Mexique ont «beaucoup à enseigner à l’humanité». Au
cœur du Chiapas, berceau de civilisations et de cultures dont les valeurs
ont été souvent piétinées au cours
des siècles, le Pape a donné voix à
l’aspiration à la liberté des peuples.
En dénonçant l’exclusion et le pillage
systématique des ressources perpétrés
au détriment des populations autochtones, le Pape a invité les responsables à «faire un examen de conscience», et à retrouver le courage de demander pardon. «Le monde d’aujourd’hui, dépouillé par la culture du
déchet, a besoin de vous!», a-t-il répété, en s’adressant aux communautés autochtones.
La quatrième journée du voyage
papal en terre mexicaine a eu un épilogue festif au cours de la grande
rencontre de prière et de témoignage
avec les familles au stade de Tuxtla
Gutiérrez. Frappé par le récit des expériences vécues par quatre d’entre
elles, François a souligné avec force
que le modèle de famille n’est en aucun cas «dépassé» et a lancé un avertissement contre les «colonisations
idéologiques» qui favorisent «l’isolement» et visent à détruire «la base de
toute société saine». Nous publierons
les discours et homélies du Pape à
Morelia et Ciudad Juárez dans notre
prochain numéro.
PAGES 2
À
14
DANS CE NUMÉRO
Messe avec les communautés autochtones du Chiapas à San Cristóbal de Las Casas
Page 15: Collecte annuelle pour la Terre Sainte. Soutien aux Eglises et aux
institutions. Pages 16 et 17: Messes à Sainte-Marthe. Pages 18 et 19: Informations. Page 20: Message pour la campagne de fraternité au Brésil. Treizième réunion du Conseil des cardinaux.
L’OSSERVATORE ROMANO
page 2
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Déclaration commune signée par François et Cyrille au terme de la rencontre à Cuba
Nous sommes frères
«Nous ne sommes pas concurrents,
mais frères». C’est ce qu’ont écrit le
Pape François et Cyrille, patriarche de
Moscou et de toute la Russie, dans la
Déclaration commune signée au terme
de la rencontre qui s’est déroulée à
l’aéroport José Martì de La Havane,
à Cuba. Nous publions ci-dessous le
texte de la déclaration.
«La grâce de Notre Seigneur Jésus
Christ, l’amour de Dieu le Père et la
communion du Saint Esprit soit avec
vous tous» (2 Co 13, 13).
1. Par la volonté de Dieu le Père de
qui vient tout don, au nom de Notre
Seigneur Jésus Christ et avec le secours de l’Esprit Saint Consolateur,
nous, Pape François et Cyrille, patriarche de Moscou et de toute la
Russie, nous sommes rencontrés aujourd’hui à La Havane. Nous rendons grâce à Dieu, glorifié en la Trinité, pour cette rencontre, la première dans l’histoire.
Avec joie, nous nous sommes retrouvés comme des frères dans la foi
d’Amérique latine et des autres continents.
Nous nous réjouissons de ce que
la foi chrétienne se développe ici de
façon dynamique. Le puissant potentiel religieux de l’Amérique latine, sa tradition chrétienne séculaire,
réalisée dans l’expérience personnelle de millions de personnes, sont le
gage d’un grand avenir pour cette
région.
3. Nous étant rencontrés loin des
vieilles querelles de l’«Ancien Monde», nous sentons avec une force particulière la nécessité d’un labeur commun des catholiques et des orthodoxes, appelés, avec douceur et respect, à
rendre compte au monde de l’espérance
qui est en nous (cf. 1 P 3, 15).
4. Nous rendons grâce à Dieu
pour les dons que nous avons reçus
par la venue au monde de son Fils
unique. Nous partageons la commune Tradition spirituelle du premier
millénaire du christianisme. Les témoins de cette Tradition sont la Très
Sainte Mère de Dieu, la Vierge Marie, et les saints que nous vénérons.
Discours du Pape
L’unité se fait en marchant
Après la signature de la déclaration, le patriarche et le Pape ont prononcé
deux brefs discours. Nous publions ci-dessous une traduction des paroles
prononcées en espagnol par le Pape.
Sainteté, Eminences, révérendes autorités religieuses,
Nous nous sommes parlé comme des frères, nous avons le même baptême, nous sommes évêques. Nous avons parlé de nos Eglises, et nous sommes tombés d’accord sur le fait que l’unité se fait en marchant. Nous
avons parlé clairement, sans détours, et moi, je vous avoue que j’ai senti
le réconfort de l’Esprit dans ce dialogue. Je remercie Votre Sainteté pour
l’humilité, pour la fraternelle humilité et le puissant désir de l’unité.
Nous avons envisagé une série d’initiatives qui, je le crois, sont viables
et pourront être réalisées. C’est pourquoi je voudrais remercier, une fois
encore, Votre Sainteté pour l’accueil chaleureux, ainsi que les collaborateurs, et j’en nomme deux: Son Eminence le métropolite Hilarion et Son
Eminence le cardinal Koch, qui y ont contribué avec toutes leurs équipes.
Je ne peux partir sans exprimer une sincère gratitude à Cuba, au grand
peuple cubain et à son président ici présent. Je vous remercie de votre
disponibilité concrète. Si vous continuez ainsi, Cuba sera la capitale de
l’unité! Et que tout cela soit pour la gloire de Dieu le Père, le Fils et le
Saint-Esprit, ainsi que pour le bien du saint peuple de Dieu, sous le
manteau de la Sainte Mère de Dieu.
chrétienne qui se rencontrent pour
se «parler de vive voix» (2 Jn 12), de
cœur à cœur, et discuter des relations mutuelles entre les Eglises, des
problèmes essentiels de nos fidèles et
des perspectives de développement
de la civilisation humaine.
2. Notre rencontre fraternelle a eu
lieu à Cuba, à la croisée des chemins
entre le Nord et le Sud, entre l’Est
et l’Ouest. De cette île, symbole des
espoirs du «Nouveau Monde» et
des événements dramatiques de l’histoire du XXe siècle, nous adressons
notre parole à tous les peuples
Parmi eux se trouvent d’innombrables martyrs qui ont manifesté leur
fidélité au Christ et sont devenus
«semence de chrétiens».
5. Malgré cette Tradition commune des dix premiers siècles, catholiques et orthodoxes, depuis presque
mille ans, sont privés de communion
dans l’Eucharistie. Nous sommes divisés par des blessures causées par
des conflits d’un passé lointain ou
récent, par des divergences, héritées
de nos ancêtres, dans la compréhension et l’explicitation de notre foi
en Dieu, un en Trois Personnes —
Père, Fils et Saint Esprit. Nous déplorons
la perte de l’unité,
conséquence de la faiblesse humaine et
du péché, qui s’est
produite malgré la
Prière sacerdotale du
Christ Sauveur: «Que
tous soient un. Comme toi, Père, tu es
en moi et moi en
toi,
qu’eux
aussi
soient un en nous»
(Jn 17, 21).
6. Conscients que
de nombreux obstacles restent à surmonter, nous espérons
que notre rencontre
contribue au rétablissement de cette
unité voulue par Dieu, pour laquelle
le Christ a prié. Puisse notre rencontre inspirer les chrétiens du monde
entier à prier le Seigneur avec une
ferveur renouvelée pour la pleine
unité de tous ses disciples! Puisse-telle, dans un monde qui attend de
nous non pas seulement des paroles
mais des actes, être un signe d’espérance pour tous les hommes de bonne volonté!
7. Déterminés à entreprendre tout
ce qui nécessaire pour surmonter les
divergences historiques dont nous
avons hérité, nous voulons unir nos
efforts pour témoigner de l’Evangile
du Christ et du patrimoine commun
de l’Eglise du premier millénaire, répondant ensemble aux défis du
monde contemporain. Orthodoxes
et catholiques doivent apprendre à
porter un témoignage unanime à la
vérité dans les domaines où cela est
possible et nécessaire. La civilisation
humaine est entrée dans un moment
de changement d’époque. Notre
conscience chrétienne et notre responsabilité pastorale ne nous permettent pas de rester inactifs face
aux défis exigeant une réponse commune.
8. Notre regard se porte avant
tout vers les régions du monde où
les chrétiens subissent la persécution. En de nombreux pays du Proche Orient et d’Afrique du Nord,
nos frères et sœurs en Christ sont
exterminés par familles, villes et villages entiers. Leurs églises sont détruites et pillées de façon barbare,
leurs objets sacrés sont profanés,
leurs monuments, détruits. En Syrie,
en Irak et en d’autres pays du Proche Orient, nous observons avec
douleur l’exode massif des chrétiens
de la terre d’où commença à se répandre notre foi et où ils vécurent
depuis les temps apostoliques
ensemble avec d’autres communautés religieuses.
9. Nous appelons la communauté
internationale à des actions urgentes
pour empêcher que se poursuive
l’éviction des chrétiens du ProcheOrient. Elevant notre voix pour défendre les chrétiens persécutés, nous
compatissons aussi aux souffrances
des fidèles d’autres traditions reli-
gieuses devenus victimes de la guerre civile, du chaos et de la violence
terroriste.
10. En Syrie et en Irak, la violence
a déjà emporté des milliers de vies,
laissant des millions de gens sans
abri ni ressources. Nous appelons la
communauté internationale à mettre
fin à la violence et au terrorisme et,
simultanément, à contribuer par le
dialogue à un prompt rétablissement
de la paix civile. Une aide humanitaire à grande échelle est indispensable aux populations souffrantes et
aux nombreux réfugiés dans les pays
voisins.
Nous demandons à tous ceux qui
pourraient influer sur le destin de
ceux qui ont été enlevés, en particulier des Métropolites d’Alep Paul et
Jean Ibrahim, séquestrés en avril
2013, de faire tout ce qui est nécessaire pour leur libération rapide.
11. Nous élevons nos prières vers
le Christ, le Sauveur du monde,
pour le rétablissement sur la terre du
Proche-Orient de la paix qui est «le
fruit de la justice» (Is 32, 17), pour
que se renforce la coexistence fraternelle entre les diverses populations,
Eglises et religions qui s’y trouvent,
pour le retour des réfugiés dans
leurs foyers, la guérison des blessés
et le repos de l’âme des innocents
tués.
Nous adressons un fervent appel à
toutes les parties qui peuvent être
impliquées dans les conflits pour
qu’elles fassent preuve de bonne volonté et s’asseyent à la table des négociations. Dans le même temps, il
est nécessaire que la communauté
internationale fasse tous les efforts
possibles pour mettre fin au terrorisme à l’aide d’actions communes,
conjointes et coordonnées. Nous faisons appel à tous les pays impliqués
dans la lutte contre le terrorisme
pour qu’ils agissent de façon responsable et prudente. Nous exhortons
tous les chrétiens et tous les croyants
en Dieu à prier avec ferveur le Dieu
Créateur du monde et Provident,
qu’il protège sa création de la destruction et ne permette pas une nouvelle guerre mondiale. Pour que la
paix soit solide et durable, des efforts spécifiques sont nécessaires afin
de redécouvrir les valeurs communes
numéro 7, jeudi 18 février 2016
qui nous unissent, fondées sur
l’Evangile de Notre Seigneur Jésus
Christ.
12. Nous nous inclinons devant le
martyre de ceux qui, au prix de leur
propre vie, témoignent de la vérité
de l’Evangile, préférant la mort à
l’apostasie du Christ. Nous croyons
que ces martyrs de notre temps, issus de diverses Eglises, mais unis
par une commune souffrance, sont
un gage de l’unité des chrétiens. A
vous qui souffrez pour le Christ
s’adresse la parole de l’apôtre: «Très
chers!... dans la mesure où vous participez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous, afin que, lors de la révélation de Sa gloire, vous soyez
aussi dans la joie et l’allégresse» (1 P
4, 12-13).
13. En cette époque préoccupante
est indispensable le dialogue interreligieux. Les différences dans la compréhension des vérités religieuses ne
doivent pas empêcher les gens de
fois diverses de vivre dans la paix et
la concorde. Dans les circonstances
actuelles, les leaders religieux ont
une responsabilité particulière pour
éduquer leurs fidèles dans un esprit
de respect pour les convictions de
ceux qui appartiennent à d’autres
traditions religieuses. Les tentatives
de justifications d’actions criminelles
par des slogans religieux sont absolument inacceptables. Aucun crime
ne peut être commis au nom de
Dieu, «car Dieu n’est pas un Dieu
de désordre, mais de paix» (1 Co 14,
33).
14. Attestant de la haute valeur de
la liberté religieuse, nous rendons
grâce à Dieu pour le renouveau sans
précédent de la foi chrétienne qui se
produit actuellement en Russie et en
de nombreux pays d’Europe de
l’Est, où des régimes athées dominèrent pendant des décennies. Aujourd’hui les chaînes de l’athéisme
militant sont brisés et en de nombreux endroits les chrétiens peuvent
confesser librement leur foi. En un
quart de siècle ont été érigés là des
dizaines de milliers de nouvelles
églises, ouverts des centaines de monastères et d’établissements d’enseignement théologique. Les communautés chrétiennes mènent une large
activité caritative et sociale, apportant une aide diversifiée aux nécessiteux. Orthodoxes et catholiques
œuvrent souvent côte à côte. Ils attestent des fondements spirituels
communs de la coexistence humaine, en témoignant des valeurs évangéliques.
15. Dans le même temps, nous
sommes préoccupés par la situation
de tant de pays où les chrétiens se
heurtent de plus en plus souvent à
une restriction de la liberté religieuse, du droit de témoigner de leurs
convictions et de vivre conformément à elles. En particulier, nous
voyons que la transformation de certains pays en sociétés sécularisées,
étrangère à toute référence à Dieu et
à sa vérité, constitue un sérieux danger pour la liberté religieuse. Nous
sommes préoccupés par la limitation
actuelle des droits des chrétiens, voire de leur discrimination, lorsque
certaines forces politiques, guidées
par l’idéologie d’un sécularisme si
souvent agressif, s’efforcent de les
L’OSSERVATORE ROMANO
pousser aux marges de la vie publique.
16. Le processus d’intégration européenne, initié après des siècles de
conflits sanglants, a été accueilli par
beaucoup avec espérance, comme un
gage de paix et de sécurité. Cependant, nous mettons en garde contre
une intégration qui ne serait pas respectueuse des identités religieuses.
Tout en demeurant ouverts à la contribution des autres religions à notre
civilisation, nous sommes convaincus
que l’Europe doit rester fidèle à ses
racines chrétiennes. Nous appelons
les chrétiens européens d’Orient et
d’Occident à s’unir pour témoigner
ensemble du Christ et de l’Evangile,
pour que l’Europe conserve son âme
formée par deux mille ans de tradition chrétienne.
17. Notre regard se porte sur les
personnes se trouvant dans des situations de détresse, vivant dans des
conditions d’extrême besoin et de
pauvreté, alors même que croissent
les richesses matérielles de l’humanité. Nous ne pouvons rester indifférents au sort de millions de migrants
et de réfugiés qui frappent à la porte
des pays riches. La consommation
sans limite, que l’on constate dans
certains pays plus développés, épuise
progressivement les ressources de
notre planète. L’inégalité croissante
dans la répartition des biens terrestres fait croître le sentiment d’injustice à l’égard du système des relations
internationales qui s’est institué.
18. Les Eglises chrétiennes sont
appelées à défendre les exigences de
la justice, le respect des traditions
des peuples et la solidarité effective
avec tous ceux qui souffrent. Nous,
chrétiens, ne devons pas oublier que
«ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour
couvrir de confusion ce qui est fort;
ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas,
voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est; ainsi aucun
être de chair ne pourra s’enorgueillir
devant Dieu» (1 Co 1, 27-29).
19. La famille est le centre naturel
de la vie humaine et de la société.
Nous sommes inquiets de la crise de
la famille dans de nombreux pays.
Orthodoxes et catholiques, partageant la même conception de la famille, sont appelés à témoigner que
celle-ci est un chemin de sainteté,
manifestant la fidélité des époux
dans leurs relations mutuelles, leur
ouverture à la procréation et à l’édu-
page 3
cation des enfants, la solidarité entre
les générations et le respect pour les
plus faibles.
20. La famille est fondée sur le
mariage, acte d’amour libre et fidèle
d’un homme et d’une femme.
L’amour scelle leur union, leur apprend à se recevoir l’un l’autre comme don. Le mariage est une école
d’amour et de fidélité. Nous regrettons que d’autres formes de cohabitation soient désormais mises sur le
même plan que cette union, tandis
ne est une atteinte aux fondements
de l’existence de l’homme, créé à
l’image de Dieu. Nous estimons notre devoir de rappeler l’immuabilité
des principes moraux chrétiens, fondés sur le respect de la dignité de
l’homme appelé à la vie, conformément au dessein de son Créateur.
22. Nous voulons adresser aujourd’hui une parole particulière à la
jeunesse chrétienne. A vous, les jeunes, appartient de ne pas enfouir le
talent dans la terre (cf. Mt 25, 25),
Paroles du patriarche
Nous pouvons travailler ensemble
Nous publions ci-dessous une traduction du discours prononcé en russe par le
patriarche de Moscou et de toutes les Russies.
Sainteté, Excellences, chers frères et sœurs, Mesdames et Messieurs,
Pendant deux heures, nous avons eu une conversation franche, avec une
pleine entente sur la responsabilité envers nos Eglises, notre peuple
croyant, l’avenir du christianisme et l’avenir de la civilisation humaine.
Cela a été une conversation riche de contenu, qui nous a donné l’occasion d’écouter et de comprendre les positions l’un de l’autre. Et les fruits
de la conversation me permettent d’assurer qu’actuellement, les deux
Eglises peuvent coopérer, en défendant les chrétiens dans le monde entier, et travailler ensemble, dans une pleine responsabilité, afin qu’il n’y
ait plus de guerres, que la vie humaine soit respectée partout dans le
monde, que se renforcent les bases de la morale personnelle, familiale et
sociale et, à travers la participation de l’Eglise à la vie de la société humaine moderne, qu’elle se purifie au nom de notre Seigneur Jésus Christ
et de l’Esprit Saint.
que la conception de la paternité et
de la maternité comme vocation particulière de l’homme et de la femme
dans le mariage, sanctifiée par la tradition biblique, est chassée de la
conscience publique.
21. Nous appelons chacun au respect du droit inaliénable à la vie.
Des millions d’enfants sont privés de
la possibilité même de paraître au
monde. La voix du sang des enfants
non nés crie vers Dieu (cf. Gn 4, 10).
Le développement de la prétendue euthanasie conduit à ce que les
personnes âgées et les infirmes commencent à se sentir être une charge
excessive pour leur famille et la société en général.
Nous sommes aussi préoccupés
par le développement des technologies de reproduction biomédicale,
car la manipulation de la vie humai-
mais d’utiliser toutes les capacités
que Dieu vous a données pour confirmer dans le monde les vérités du
Christ, pour incarner dans votre vie
les commandements évangéliques de
l’amour de Dieu et du prochain. Ne
craignez pas d’aller à contre-courant,
défendant la vérité divine à laquelle
les normes séculières contemporaines
sont loin de toujours correspondre.
23. Dieu vous aime et attend de
chacun de vous que vous soyez ses
disciples et apôtres. Soyez la lumière
du monde, afin que ceux qui vous
entourent, voyant vos bonnes actions,
rendent gloire à votre Père céleste (cf.
Mt 5, 14, 16). Eduquez vos enfants
dans la foi chrétienne, transmettezleur la perle précieuse de la foi (cf. Mt
13, 46) que vous avez reçue de vos
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L’OSSERVATORE ROMANO
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jeudi 18 février 2016, numéro 7
Paroles du Pape sur le vol Rome-La Havane
Un voyage tant désiré
«Important, chargé, mais tant désiré: par mon frère Cyrille, par moimême et également des Mexicains».
C’est en ces termes que le Pape
François a défini le voyage qui l’a
conduit à Cuba pour rencontrer le
patriarche de Moscou et de toute la
Russie et ensuite au Mexique. Sur le
vol qui le conduisait à La Havane
dans la matinée du vendredi 12 février, le Souverain Pontife s’est rendu peu après le décollage à l’arrière
de l’avion pour les traditionnelles salutations aux 76 journalistes qui l’accompagnent, dont une dizaine sont
mexicains. Et en les remerciant tous
— avant de les saluer personnellement un à un — pour leur présence
et pour le travail qui les occupera
jusqu’au jeudi 18, il a improvisé une
brève réflexion sur les motivations
spirituelles de la visite. «Mon désir
le plus intime — a-t-il confié — est de
m’arrêter devant la Vierge de Guadalupe», dont le «mystère est étudié» mais pour lequel «il n’existe
pas d’explications humaines». Car,
a-t-il ajouté, même «les études les
plus scientifiques le disent: “C’est
une chose de Dieu”». Et cela, a souligné François, fait même dire à certains Mexicains: «Je suis athée, mais
je suis guadalupien». Nous sommes
face à une dévotion mariale enracinée dans la culture de ce peuple qui
se prépare à embrasser le premier
Pape latino-américain. Ce dernier a
également fait référence à certains
éléments typiques des coutumes de
ce pays. Comme lorsqu’il a rappelé
le don que lui avait fait Valentina
Alazraki, vaticaniste de Televisa et
doyenne des journalistes accrédités à
la salle de presse du Saint-Siège, lors
de l’Audience générale du mercredi
10 février: une compilation de films
du grand acteur comique mexicain
Cantinflas, nom de scène de Fortino
Mario Alfonso Moreno Reyes (19111993). «Et ainsi, je suis entré au
Mexique par la porte de Cantinflas,
ce qui est bien drôle», a commenté
François. Ou lorsqu’il a revêtu le
sombrero qui lui a été offert toujours
par Valentina Alzraki. «Pour qu’il se
sente mexicain ! — a dit la journaliste —. Le premier, je l’ai donné à
Jean-Paul II il y a 37 ans. Puis il en a
fait une collection parce qu’il s’y est
rendu cinq fois en voyage. Le Pape
Benoît l’a porté à Guanajuato et a
dit qu’il se sentait mexicain». Celui
de François est même arrivé de Cuba. «Une famille mexicaine l’avait
apporté à Cuba, mais elle n’a pas pu
vous le remettre — a rappelé la journaliste — et elle me l’a laissé. J’ai
promis de vous le donner, au cas où
vous auriez maintenu votre promesse
de vous rendre au Mexique. Ce que
je n’avais pas imaginé, c’est que le
sombrero retourne à Cuba. Ça, c’est
une surprise». Enfin, le Pape a exprimé sa reconnaissance à l’organisateur des voyages Alberto Gasbarri,
qui conclut précisément au Mexique
son service, passant le témoin à Mgr
Mauricio Rueda Beltz, official de la
secrétairerie d’Etat. C’est le Pape
François lui-même qui l’a annoncé,
en souhaitant la bienvenue sur le vol
au prélat colombien. Directeur administratif de Radio Vatican, où il
travaille depuis 47 ans, Alberto Gasbarri s’occupe depuis au moins 37
ans des voyages pontificaux.
Déclaration commune
SUITE DE LA PAGE 3
parents et aïeux. N’oubliez pas que
vous «avez été rachetés à un cher
prix» (1 Co 6, 20), au prix de la
mort sur la croix de l’Homme-D ieu
Jésus Christ.
24. Orthodoxes et catholiques
sont unis non seulement par la Tradition commune de l’Eglise du premier millénaire, mais aussi par la
mission de prêcher l’Evangile du
Christ dans le monde contemporain. Cette mission implique le respect mutuel des membres des communautés chrétiennes, exclut toute
forme de prosélytisme.
Nous ne sommes pas concurrents, mais frères: de cette conception doivent procéder toutes nos actions les uns envers les autres et envers le monde extérieur. Nous exhortons les catholiques et les orthodoxes, dans tous les pays, à apprendre à vivre ensemble dans la paix,
l’amour et à avoir «les uns pour les
autres la même aspiration» (Rm 15,
5). Il ne peut donc être question
d’utiliser des moyens indus pour
pousser des croyants à passer d’une
Eglise à une autre, niant leur liberté
religieuse ou leurs traditions propres. Nous sommes appelés à mettre en pratique le précepte de l’apôtre Paul: «Je me suis fait un honneur d’annoncer l’Evangile là où
Christ n’avait point été nommé,
afin de ne pas bâtir sur le fondement d’autrui» (Rm 15, 20).
25. Nous espérons que notre rencontre contribuera aussi à la réconciliation là où des tensions existent
entre gréco-catholiques et orthodoxes. Il est clair aujourd’hui que
la méthode de l’«uniatisme» du
passé, comprise comme la réunion
d’une communauté à une autre, en
la détachant de son Eglise, n’est
pas un moyen pour recouvrir l’unité. Cependant, les communautés
ecclésiales qui sont apparues en ces
circonstances historiques ont le
droit d’exister et d’entreprendre
tout ce qui est nécessaire pour ré-
pondre aux besoins spirituels de
leurs fidèles, recherchant la paix
avec leurs voisins. Orthodoxes et
gréco-catholiques ont besoin de se
réconcilier et de trouver des formes
de coexistence mutuellement acceptables.
26. Nous déplorons la confrontation en Ukraine qui a déjà emporté
de nombreuses vies, provoqué d’innombrables blessures à de paisibles
habitants et placé la société dans
une grave crise économique et humanitaire. Nous exhortons toutes
les parties du conflit à la prudence,
à la solidarité sociale, et à agir pour
la paix. Nous appelons nos Eglises
en Ukraine à travailler pour atteindre la concorde sociale, à s’abstenir
de participer à la confrontation et à
ne pas soutenir un développement
ultérieur du conflit.
27. Nous exprimons l’espoir que
le schisme au sein des fidèles orthodoxes d’Ukraine sera surmonté sur
le fondement des normes canoniques existantes, que tous les chrétiens orthodoxes d’Ukraine vivront
dans la paix et la concorde et que
les communautés catholiques du
pays y contribueront, de sorte que
soit toujours plus visible notre fraternité chrétienne.
28. Dans le monde contemporain, multiforme et en même temps
uni par un même destin, catholiques et orthodoxes sont appelés à
collaborer fraternellement en vue
d’annoncer la Bonne Nouvelle du
salut, à témoigner ensemble de la
dignité morale et de la liberté authentique de la personne, «pour
que le monde croie» (Jn 17, 21). Ce
monde, dans lequel disparaissent
progressivement les piliers spirituels
de l’existence humaine, attend de
PAPE
FRANÇOIS
EVÊQUE DE ROME
DE L’EGLISE CATHOLIQUE
nous un fort témoignage chrétien
dans tous les domaines de la vie
personnelle et sociale. De notre capacité à porter ensemble témoignage de l’Esprit de vérité en ces
temps difficiles dépend en grande
partie l’avenir de l’humanité.
29. Que dans le témoignage hardi de la vérité de Dieu et de la
Bonne Nouvelle salutaire nous
vienne en aide l’Homme-Dieu Jésus
Christ, notre Seigneur et Sauveur,
qui nous fortifie spirituellement par
sa promesse infaillible: «Sois sans
crainte, petit troupeau: votre Père a
trouvé bon de vous donner le
Royaume» (Lc 12, 32)!
Le Christ est la source de la joie
et de l’espérance. La foi en Lui
transfigure la vie de l’homme, la
remplit de sens. De cela ont pu se
convaincre par leur propre expérience tous ceux à qui peuvent s’appliquer les paroles de l’apôtre
Pierre: «Vous qui jadis n’étiez pas
un peuple et qui êtes maintenant le
Peuple de Dieu, qui n’obteniez pas
miséricorde et qui maintenant avez
obtenu miséricorde» (1 P 2, 10).
30. Remplis de gratitude pour le
don de la compréhension mutuelle
manifesté lors de notre rencontre,
nous nous tournons avec espérance
vers la Très-Sainte Mère de Dieu,
en l’invoquant par les paroles de
l’antique prière: «Sous l’abri de ta
miséricorde, nous nous réfugions,
Sainte Mère de Dieu». Puisse la
Bienheureuse Vierge Marie, par son
intercession, conforter la fraternité
de ceux qui la vénèrent, afin qu’ils
soient au temps fixé par Dieu rassemblés dans la paix et la concorde
en un seul Peuple de Dieu, à la
gloire de la Très-Sainte et indivisible Trinité!
CYRILLE
PATRIARCHE DE MOSCOU
ET DE TOUTES LES RUSSIES
12 février 2016, La Havane (Cuba)
Sur la voie
de l’unité
GIOVANNI MARIA VIAN
Difficile au point d’apparaître pendant des décennies comme un rêve,
la rencontre entre le patriarche de
Moscou et le Pape de Rome a été
simple qu’une réunion entre frères.
Pendant deux heures, dans une salle
de l’aéroport de La Havane où
l’avion provenant de Rome a fait escale, Cyrille et François ont parlé.
«En toute franchise» et «en toute liberté», a précisé ensuite le Pape en
vol vers le Mexique, destination de
son douzième voyage international:
«une conversation entre frères», tous
deux évêques, sur leurs Eglises et
sur le monde où elles sont appelées
à vivre, en présence uniquement de
deux interprètes et des plus proches
collaborateurs, le métropolite Hilarion et le cardinal Koch, qui pendant plus de deux ans, ont tissé avec
patience les fils d’une toile compliquée.
Mais la toile a été tissée depuis
beaucoup plus longtemps, car elle
remonte à plus d’un demi-siècle,
avec l’affirmation du mouvement
œcuménique et avec la nouveauté
du Concile Vatican II. La rencontre
à Jérusalem entre Athénagoras et
Paul VI fut historique, et fut suivie,
bien qu’entre ombres et lumières,
par le renforcement de l’espérance et
de l’unité. Et aujourd’hui, outre la
réunion entre Cyrille et François,
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L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 7, jeudi 18 février 2016
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Discours aux autorités du Mexique
Carrefour
des Amériques
Le Pape François a prononcé le
premier discours en terre mexicaine
dans la matinée du samedi 13 février,
au cours de la rencontre avec les
autorités, la société civile et le corps
diplomatique au palais présidentiel de
la capitale. En voici une traduction.
Monsieur le président,
membres du gouvernement
de la République,
distinguées autorités,
représentants de la société civile,
mes frères dans l’épiscopat,
Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le président pour les paroles de bienvenue
que vous m’avez adressées. C’est un
motif de joie de pouvoir fouler cette
terre mexicaine qui occupe une place spéciale dans le cœur des Américains. Aujourd’hui, je viens comme
missionnaire de miséricorde et de
paix, mais également comme un fils
qui veut rendre hommage à sa mère,
la Vierge de Guadalupe, et se laisser
regarder par elle.
En cherchant à être un bon fils,
en suivant les traces de la Mère, je
veux, en même temps, rendre hommage à ce peuple et à cette terre si
riches de cultures, d’histoire et de
diversité. A travers votre personne,
Monsieur le président, je voudrais
saluer et embrasser le peuple mexicain dans ses multiples expressions
et dans les situations les plus variées
qu’il vit. Merci de me recevoir aujourd’hui sur cette terre.
Le Mexique est un grand pays,
doté d’abondantes ressources naturelles et d’une énorme biodiversité
qui s’étend sur tout son vaste territoire. Sa position géographique privilégiée en fait un point de référence
pour l’Amérique; et ses cultures indigènes, métisses et créoles lui confèrent une identité propre qui lui offre une richesse culturelle qu’il n’est
pas toujours facile de trouver et sur-
tout de valoriser. La sagesse ancestrale liée à sa multi-culturalité est, de
loin, l’une de ses meilleures ressources identitaires. Cette identité, qu’
elle a appris progressivement à gérer
dans la diversité, constitue sans doute un riche patrimoine à mettre en
valeur, à promouvoir et à préserver.
Je pense et j’ose dire que la principale richesse du Mexique aujourd’hui a un visage jeune; oui, ce
sont ses jeunes. Un peu plus de la
moitié de la population est jeune.
Cela permet de penser et de préparer l’avenir, le lendemain. Cela offre
espérance et perspective. Un peuple
Sur la voie de l’unité
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son fruit est une déclaration commune très belle, aux tons solennels
et chaleureux, que le Pape a définie
de pastorale et qui s’ouvre par une
action de grâce à «Dieu, glorifié
dans la Trinité, pour cette rencontre, la première dans l’histoire».
La solennité de l’expression est
pleinement justifiée: oui, «cette rencontre» est sans précédent, de même que la déclaration est historique. En reconnaissant avant tout
la signification du lieu où Cyrille et
François ont décidé, «enfin», de se
voir: Cuba, carrefour mondial et
symbole d’espérances et de drames,
comme l’a souligné le Pape en remerciant le président Raúl Castro,
présent à la signature du document.
«Loin des vieilles querelles», pour
affirmer la nécessité pour les chrétiens de regarder en avant et de
construire ainsi un modèle pour
l’humanité tout entière.
La conscience «que de nombreux
obstacles restent à surmonter» n’est
pas supérieure à la conscience, tout
aussi forte, de partager «une Tradition spirituelle commune» formée
au cours du premier millénaire sur
le témoignage de la Mère de Dieu
et des saints, en particulier des martyrs, «semence de chrétiens». Mais
si l’on regarde l’histoire, précisément à l’époque de l’Eglise indivise, se sont développées également
des divergences et d’âpres divisions,
jusqu’à la perte de l’unité autour de
l’Eucharistie, «conséquence de la
faiblesse humaine et du péché», déplorée dans la déclaration.
Aujourd’hui, «à un moment de
changement d’époque», tous ont
devant les yeux l’alarme tragique
des persécutions sanglantes contre
les chrétiens, surtout au MoyenOrient et en Afrique. Jusqu’à l’extermination de «familles, villes et
villages entiers», dont est responsable un terrorisme criminel qui s’ha-
bille de slogans religieux blasphématoires. En Europe, en revanche,
un sécularisme agressif menace la
liberté religieuse, ne respecte pas
les racines chrétiennes du continent, affaiblit la famille fondée sur
le mariage entre un homme et une
femme, détruit la vie humaine avec
l’avortement, l’euthanasie, la procréation assistée.
Après avoir dénoncé, d’une façon
qui n’a jamais été aussi forte, les
persécutions et le sécularisme hosti-
le, le document, qui indique avec
des accents nouveaux la nécessité
de réconciliation entre orthodoxes
et grecs-catholiques, se déclare tout
aussi convaincu que les orthodoxes
et les catholiques sont déjà unis:
non seulement par la tradition commune, mais également par la mission commune de prêcher l’Evangile auquel le monde aspire, même
sans le savoir. Pour avancer, en se
rencontrant et en marchant ensemble, sur la voie de l’unité.
jeune est un peuple capable de se
rénover, de se transformer; c’est une
invitation à élever le regard avec espoir vers l’avenir et — en même
temps — cela nous interpelle positivement dans le présent. Cette réalité
nous conduit inévitablement à réfléchir sur notre propre responsabilité
dans la construction du Mexique
que nous appelons de tous nos
vœux, le Mexique que nous voulons
léguer aux futures générations. Cela
nous conduit à nous rendre compte
également qu’un avenir d’espérance
se forge dans la vie présente d’hommes et de femmes justes, honnêtes,
capables de s’engager pour le bien
commun, ce «bien commun» qui, en
ce XXIe siècle, n’est pas très prisé.
L’expérience nous montre que
chaque fois que nous cherchons la
voie du privilège ou du bénéfice de
quelques-uns au détriment du bien
de tous, tôt ou tard, la vie en société
devient un terrain fertile pour la corruption, le trafic de drogue, l’exclusion des cultures différentes, la violence, y compris pour le trafic de
personnes, la séquestration et la
mort, causant la souffrance et freinant le développement.
Le peuple mexicain met son espérance dans l’identité qui s’est forgée
dans de durs et difficiles moments
SUITE À LA PAGE 6
Rencontre avec les journalistes sur le vol La Havane-Mexico
Un texte pastoral
Durant le vol vers la ville de Mexico, le Pape a parlé avec
les journalistes de la rencontre avec Cyrille. Nous publions
ci-dessous la traduction de ses paroles.
Bonsoir,
Je crois qu’avec la Déclaration que vous avez reçue [la
Déclaration commune avec le patriarche Cyrille], vous
avez du travail pour toute la nuit et aussi pour demain!
C’est pour cette raison que nous ne ferons pas de questions-réponses. Mais je voudrais vous exprimer mes
sentiments.
Avant toute chose, le sentiment d’accueil et de disponibilité du président Castro. J’avais discuté avec lui de
cette rencontre la fois précédente, et il était disposé à
tout faire et nous avons vu qu’il a tout préparé pour cela. Et il faut remercier pour cela.
Deuxièmement: avec le patriarche Cyrille. Ce fut une
conversation entre frères. Nous avons discuté de points
clairs, qui nous préoccupent tous les deux. En toute
franchise. Je me suis senti face à un frère, et lui aussi
m’a dit la même chose. Deux évêques qui parlent de la
situation de leurs Eglises, en premier lieu; et dans un
deuxième temps, de la situation du monde, des guerres,
guerres qui risquent aujourd’hui de ne plus tant être
«morcelées», mais de tout englober; et de la situation
de l’orthodoxie, du prochain synode panorthodoxe...
Mais je vous le dis, vraiment, je ressentais une joie
intérieure qui était précisément celle du Seigneur. Il
parlait librement et je parlais moi aussi librement. L’on
ressentait de la joie. Les traducteurs étaient bons, tous
les deux. Ce fut un entretien «à six paires d’yeux»: le
patriarche Cyrille, moi, S.Em. le métropolite Hilarion
et S.Em. le cardinal Koch, et les deux traducteurs.
Mais en toute liberté. Nous parlions tous les deux, et
les autres aussi lorsqu’on leur posait des questions.
Troisièmement, l’on a fait un programme de possibles activités en commun, car l’unité se fait en marchant. J’ai dit une fois que si l’unité se fait dans l’étude, en étudiant la théologie et le reste, sans doute le
Seigneur viendra-t-il alors que nous serons encore en
train de créer l’unité. L’unité se fait en avançant, en
avançant: que le Seigneur nous trouve au moins en
train de marcher, lorsqu’il viendra.
Et puis nous avons signé cette Déclaration commune
que vous avez en main: il y aura beaucoup d’interprétations, beaucoup. Mais s’il y a des doutes, le père Lombardi pourra donner la vraie signification de la chose.
Ce n’est pas une Déclaration politique, ce n’est pas une
Déclaration sociologique, c’est une déclaration pastorale, même lorsque l’on parle du sécularisme et de choses
explicites, de la manipulation biogénétique et de toutes
ces choses. Mais elle est pastorale: de deux évêques qui
se sont rencontrés avec une préoccupation pastorale. Et
cela m’a rendu heureux. A présent, 23 km de papamobile ouverte m’attendent...
Je vous remercie beaucoup de votre travail: faites ce
que vous pouvez! Merci beaucoup, merci.
L’OSSERVATORE ROMANO
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Discours
aux autorités
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de son histoire par de remarquables témoignages de citoyens qui
ont compris que, pour pouvoir
surmonter les situations nées de la
fermeture de l’individualisme, était
nécessaire l’accord des institutions
politiques, sociales et économiques, ainsi que celui de tous les
hommes et femmes engagés dans
la recherche du bien commun et
dans la promotion de la dignité de
la personne.
Une culture ancestrale et un capital humain prometteur, comme
les vôtres, doivent être la source
d’inspiration pour que nous trouvions de nouvelles formes de dialogue, de négociation, de ponts
capables de nous guider sur la
voie de l’engagement solidaire. Un
engagement dans lequel tous, en
commençant par nous qui nous
appelons chrétiens, nous devons
nous consacrer à la construction
d’«une politique vraiment humaine» (Gaudium et spes, n. 73) et
d’une société dans laquelle personne ne doit se sentir victime de
la culture du rejet.
Il revient, de façon spéciale, aux
dirigeants de la vie sociale, culturelle et politique, de travailler
pour offrir à tous les citoyens l’opportunité d’être de dignes acteurs
de leur propre destin, dans leur famille et dans tous les domaines où
se développe la société humaine,
en leur facilitant un accès réel aux
biens matériels et spirituels indispensables: logement décent, travail
digne, nourriture, justice réelle, sécurité effective, un environnement
sain et de paix.
Il ne s’agit pas seulement d’une
affaire de lois qui exigent des mises à jour et des amendements —
toujours nécessaires —, mais d’une
formation urgente à la responsabilité personnelle de chacun dans le
plein respect de l’autre en tant que
coresponsable de la cause commune de promotion du développement national. C’est une tâche qui
implique tout le peuple mexicain
dans les diverses instances aussi
bien publiques que privées, autant
collectives qu’individuelles.
Je vous assure, Monsieur le président, que dans cet effort, le gouvernement mexicain peut compter
sur la collaboration de l’Eglise catholique, qui a accompagné la vie
de cette nation et qui renouvelle
son engagement ainsi que sa volonté de servir la grande cause de
l’homme: l’édification de la civilisation de l’amour.
Je me prépare à parcourir ce
beau et grand pays en qualité de
missionnaire et de pèlerin qui veut
revivre avec vous l’expérience de
la miséricorde comme un nouvel
horizon de possibilité qui est inévitablement porteur de justice et
de paix.
Et je me place sous le regard de
Marie la Vierge de Guadalupe afin
que, par son intercession, le Père
miséricordieux fasse que ces journées et l’avenir de cette terre
soient une opportunité de rencontre, de communion et de paix.
Merci beaucoup!
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Rencontre avec les évêques dans la cathédrale de l’Assomption
Avec un courage prophétique
présentes dans ce vaste Mexique,
tout ce qui s’écoule intensément du
cœur du Pape.
Comme le fit saint Juan Diego et
comme le firent les générations successives des enfants de la Guadalupana, le Pape également, depuis
longtemps cultivait le désir de la regarder. Mieux, je voulais, moimême, être sous son regard maternel. J’ai beaucoup réfléchi sur le
mystère de ce regard et je vous prie
d’accueillir ce qui jaillit de mon
cœur de pasteur en ce moment.
Un regard de tendresse!
Dans la matinée du samedi 13 février,
le Pape François s’est rendu dans la
cathédrale de l’Assomption, à Mexico,
où il a rencontré les évêques du pays.
Au cours de la rencontre, il a prononcé
le discours suivant:
Chers frères,
Je suis heureux de pouvoir vous
rencontrer le lendemain de mon arrivée dans ce pays, que je viens moi
aussi visiter, suivant les traces de
mes prédécesseurs
Je ne pouvais pas ne pas venir!
Le Successeur de Pierre, appelé du
lointain sud latino-américain, pouvait-il se priver de l’opportunité de
poser son regard sur la «Vierge Brune»?
Je vous remercie pour m’avoir accueilli dans cette cathédrale, «petite
maison», «petite maison» agrandie
mais toujours «sacrée», qu’a demandée la Vierge de Guadalupe, et pour
l’aimable mot de bienvenue que
vous m’avez adressé.
Sachant qu’ici se trouve le cœur
secret de chaque Mexicain, j’entre
sur la pointe des pieds comme il
convient d’entrer dans la maison
ainsi que dans l’âme de ce peuple,
et je vous suis profondément reconnaissant de m’ouvrir la porte. Je sais
qu’en contemplant les yeux de la
Vierge, j’atteins le regard de votre
peuple qui, en elle, a appris à se
manifester. Je sais qu’aucune autre
voix ne peut exprimer avec autant
de profondeur le cœur mexicain
comme la Vierge peut m’en parler;
elle protège ses plus hautes aspirations, ses espérances les plus cachées, elle recueille ses joies et ses
larmes; elle comprend ses nombreuses langues et leur répond avec la
tendresse de Mère, parce que ce
sont ses propres enfants.
Je suis heureux de vous rencontrer, ici dans les environs du «Mont
du Tepeyac», comme à l’aube de
l’évangélisation de ce continent et,
s’il vous plaît, je vous demande de
me permettre d’exprimer tout ce que
j’ai à vous dire en partant de la
Guadalupana. Comme je voudrais
que ce soit elle-même qui vous exprime, jusqu’au plus profond de vos
âmes de pasteurs et, par vous, à chacune de vos Eglises particulières
En silence devant la Morenita
GIOVANNI MARIA VIAN
La longue prière silencieuse du Pape, seul devant l’image particulière
et très vénérée de la Vierge de
Guadalupe, protectrice de toute
l’Amérique, a fait une grande impression. Un moment fortement
voulu, demandé, annoncé et ensuite souligné par le Pape Bergoglio
dans ses discours et dans ses homélies à Mexico. Dès son discours
aux autorités au Palacio Nacional,
le siège symbolique du pouvoir
politique dont les portes se sont
ouvertes pour la première fois à un
Pape.
François est le troisième Pape
qui visite ce grand pays nord-américain et, au début de la rencontre
dans la cathédrale avec l’épiscopat,
il s’est demandé comment «le Successeur de Pierre, appelé de la
lointaine Amérique latine» aurait
pu ne pas «poser son regard sur la
Vierge Morenita». Avec le désir,
immédiatement déclaré, d’être re-
joint par le regard maternel de
Marie.
C’est précisément le regard de la
Vierge de Guadalupe, où «se trouve le cœur secret de chaque Mexicain», qui a été choisi par le Souverain Pontife comme fil conducteur pour la longue réflexion exigeante qui a caractérisé sa rencontre avec les évêques du pays. Il
s’agit d’un moment auquel le Pape
Bergoglio dans ses voyages internationaux a toujours réservé une
large place significative, qui voit la
réalisation de la communion catholique et d’un réel partage pastoral.
Il en a été ainsi cette fois aussi.
L’image clé du discours papal à
l’épiscopat mexicain a donc été
celle du regard: de la Morenita,
mais également de celui qui la contemple et qui, à son tour, a la
responsabilité de regarder l’autre,
pour lui offrir le sein de la foi
chrétienne et lui transmettre un reflet de la tendresse de Dieu. Les
évêques doivent avoir une attenSUITE À LA PAGE 8
Avant tout, la «Vierge Brune»
nous enseigne que l’unique force capable de conquérir le cœur des
hommes est la tendresse de Dieu.
Ce qui enchante et attire, ce qui fait
fléchir et vainc, ce qui ouvre et déchaîne, ce n’est pas la force des instruments ou la dureté de la loi, mais
la faiblesse toute-puissante de
l’amour divin, qui est la force irrésistible de sa douceur et la promesse
irréversible de sa miséricorde.
Un écrivain tourmenté et illustre
de cette terre (Octavio Paz), a dit
qu’à Guadalupe, on ne demande
plus l’abondance des récoltes ou la
fertilité de la terre, mais qu’on y
cherche un sein maternel à travers
lequel les hommes, toujours orphelins et déshérités, sont à la recherche
d’un abri, d’un foyer.
Des siècles après l’événement fondateur de ce pays et de l’évangélisation du continent, le besoin de sein
maternel qui fait languir le cœur du
peuple qui vous a été confié s’est-il
estompé, est-il oublié?
Je connais la longue et douloureuse histoire que vous avez traversée, non sans répandre beaucoup de
sang, non sans de fortes et déchirantes convulsions, non sans violence et
incompréhensions. Avec raison, mon
vénéré et saint prédécesseur, qui, au
Mexique, se sentait comme dans sa
maison, a voulu rappeler que:
«[son] histoire est traversée, comme
des fleuves parfois occultes mais
toujours abondants, par trois réalités
qui se rencontrent à certains moments et qui à d’autres révèlent leur
différences complémentaires, sans jamais se confondre entièrement: l’ancienne et riche sensibilité des peuples autochtones qui aimèrent Juan
de Zumárraga et Vasco de Quiroga,
que beaucoup de ces peuples continuent à appeler pères, le christianisme enraciné dans l’âme des Mexicains et la rationalité moderne,
d’origine européenne, qui a tant de
fois voulu exalter l’indépendance et
la liberté» (Jean-Paul II, Discours
lors de la cérémonie de bienvenue au
Mexique, le 22 janvier 1999).
Et dans cette histoire, le sein maternel qui a continuellement engendré le Mexique, même si parfois, il
paraissait un «filet qui recueillait
cent cinquante-trois poissons» (Jn
21, 11) ne s’est jamais révélé stérile,
et les fractures menaçantes se sont
toujours résorbées.
numéro 7, jeudi 18 février 2016
C’est pourquoi je vous invite, à
repartir de ce besoin de sein maternel qui émane de l’âme de votre
peuple. Le sein de la foi chrétienne
est capable de réconcilier le passé
souvent marqué de solitude, d’isolement et de marginalisation, avec
l’avenir continuellement relégué à un
lendemain qui s’esquive. Ce n’est
que dans ce sein maternel qu’on
peut, sans renoncer à sa propre identité, «[découvrir] la profonde vérité
de la nouvelle humanité, dans laquelle tous sont appelés à être fils de
Dieu» (ibid., Homélie à l’occasion de
la canonisation de saint Juan Diego).
Inclinez-vous donc, frères, délicatement et avec respect, sur l’âme
profonde de votre peuple, descendez
en faisant attention et déchiffrez son
mystérieux visage. Le présent, fréquemment dissous dans la dispersion et la fête, n’introduit-il pas aussi à Dieu qui est uniquement et pleinement présent? La familiarité avec
la douleur et la mort ne sont-elles
pas des formes de courage et des
chemins vers l’espérance? Percevoir
que le monde doit être toujours et
seulement sauvé n’est-ce pas un antidote contre l’autosuffisance arrogante de ceux qui croient pouvoir se
passer de Dieu?
Bien entendu, en raison de tout
cela, un regard capable de refléter la
tendresse de Dieu est nécessaire.
Soyez, par conséquent, des évêques
au regard limpide, à l’âme transparente, au visage lumineux. N’ayez
pas peur de la transparence. L’Eglise
n’a pas besoin de l’obscurité pour
travailler. Veillez à ce que vos regards ne soient pas obscurcis par les
pénombres du brouillard de la mondanité; ne vous laissez pas corrompre par le matérialisme trivial ni par
les illusions séductrices des accords
[conclus] en dessous de la table; ne
mettez pas votre confiance dans les
«chars et les chevaux» des pharaons
actuels, car notre force est la «colonne de feu» qui divise les eaux de la
mer en les fendant en deux, sans
grand bruit (Ex 14, 24-25).
Le monde dans lequel le Seigneur
nous appelle à accomplir notre mission est devenu très complexe. Et
cela, bien que l’arrogante idée du
«cogito», qui ne niait pas qu’il y ait
au moins un roc sur le sable de
l’être, soit aujourd’hui dominée par
une conception de la vie, jugée par
beaucoup, plus que jamais, vacillante, errante et affaiblie parce que sans
substrat solide. Les frontières si fortement invoquées et soutenues sont
devenues perméables à la nouveauté
d’un monde dans lequel la force de
certains ne peut plus se maintenir
sans la vulnérabilité des autres. L’irréversible caractère hybride de la
technologie rend proche ce qui était
lointain, mais malheureusement, il
éloigne ce qui devrait être proche.
Et précisément c’est dans ce monde même que Dieu vous demande
d’avoir un regard capable de saisir
l’interrogation fusant du cœur de
votre peuple, l’unique qui a dans
son calendrier une «fête du cri». A
ce cri, il faut répondre que Dieu
existe et est proche à travers Jésus.
Que seul Dieu est la réalité sur laquelle on peut construire, car «Dieu
est la réalité fondatrice, non pas un
Dieu seulement pensé ou hypothétique, mais bien un Dieu au visage
humain» (Benoît XVI, Discours inaugural de la Ve Conférence générale du
CELAM, 13 mai 2007).
L’OSSERVATORE ROMANO
Dans vos regards, le peuple mexicain a le droit de trouver les traits de
ceux qui «ont vu le Seigneur» (cf.
Jn 20, 25), de ceux qui ont été avec
Dieu. C’est l’essentiel. Ne perdez
donc pas du temps et des énergies
dans les choses secondaires, dans les
commérages et les intrigues, dans les
vains projets de carrière, dans les
plans vides d’hégémonies, dans les
clubs stériles d’intérêts ou de coteries. Ne vous laissez pas entraîner
par les rumeurs et les médisances.
Introduisez vos prêtres dans cette
compréhension du ministère sacré.
Nous autres, ministres de Dieu,
nous suffit la grâce de «boire le calice du Seigneur», le don de protéger
la part de son héritage qui nous est
confiée, même si nous sommes des
administrateurs
inexpérimentés.
Laissons le Père nous assigner la
place qui nous a été préparée (Mt
20, 20-28). Pouvons-nous vraiment
nous occuper d’affaires autres que
celles du Père? En dehors des
«affaires du Père» (Lc 2, 48-49),
nous perdons notre identité et, de
manière coupable, nous rendons vaine sa grâce.
Si notre regard ne témoigne pas
d’avoir vu Jésus, alors ses paroles
dont nous faisons mémoire ne représenteraient que des figures rhétoriques vides. Peut-être exprimeraientelles la nostalgie de ceux qui ne
peuvent pas oublier le Seigneur,
mais de toute façon, elles ne seraient
que le balbutiement d’orphelins près
du tombeau. Des mots en fin de
compte incapables d’empêcher que
le monde soit abandonné et réduit à
sa propre puissance désespérée.
Je pense à la nécessité d’offrir un
sein maternel aux jeunes. Que vos
regards soient capables de croiser
leurs regards, de les aimer et de saisir ce qu’ils cherchent avec ce courage par lequel beaucoup, comme eux,
ont quitté barques et filets sur l’autre
rive de la mer (Mc 1, 17-18), ont
abandonné des bancs d’extorsions
en vue de suivre le Seigneur de la
vraie richesse (Mt 9, 9).
Je suis préoccupé par beaucoup
d’entre eux, qui, séduits par la puissance du monde, exaltent les chimères et se revêtent de leurs macabres
symboles pour commercialiser la
mort en échange de trésor qu’en fin
de compte les mites et la rouille dévorent, et qui incite les voleurs à
percer les murs (cf. Mt 6, 20). Je
vous demande de ne pas sous-évaluer le défi moral et anticivique que
représente le trafic de drogue pour
la jeunesse et pour toute la société
mexicaine, y compris l’Eglise.
La proportion du phénomène, la
complexité de ses causes, l’immensité
de son extension comme une métastase qui dévore, la gravité de la violence qui désagrège, tout comme ses
connexions néfastes, ne nous permettent pas à nous, pasteurs de l’Eglise,
de nous réfugier derrière des condamnations génériques, une espèce
de nominalisme. Mais tout cela exige
un courage prophétique ainsi qu’un
projet pastoral sérieux et de qualité,
pour contribuer, progressivement, à
resserrer ce délicat réseau humain,
sans lequel tous, nous serions dès le
départ vaincus par cette insidieuse
menace. En commençant d’abord par
les familles; en nous approchant et
en embrassant la périphérie humaine
et existentielle des territoires dévastés
de nos villes; en impliquant les communautés paroissiales, les écoles, les
institutions
communautaires,
les
communautés politiques, les structures de sécurité; c’est seulement ainsi
qu’on pourra se libérer totalement
des eaux dans lesquelles malheureusement se noient tant de vies, que ce
soit la vie de celui qui meurt comme
victime, que ce soit celle de celui qui
devant Dieu aura toujours du sang
sur les mains, même s’il a les poches
pleines d’argent sale et la conscience
anesthésiée.
Tournant le regard vers Marie de
Guadalupe, je dirai une deuxième
chose:
Un regard capable de tisser
Dans le manteau de l’âme mexicaine, Dieu a tissé, avec le fil des
empreintes métisses de son peuple,
le visage de sa manifestation dans la
«Vierge Brune». Dieu n’a pas besoin
de couleurs ternes pour peindre son
visage. Les desseins de Dieu ne sont
pas conditionnés par les couleurs et
par les fils, mais ils sont déterminés
par l’irréversibilité de son amour qui
veut avec persistance s’imprimer en
nous.
Soyez, par conséquent, des évêques capables d’imiter cette liberté
de Dieu en choisissant ce qui est
humble pour rendre visible la majesté de son visage et de faire vôtre cette patience divine en tissant, avec le
fil fin de l’humanité que vous trouvez, cet homme nouveau que votre
pays espère. Ne vous laissez pas gui-
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der par le vain désir de changer de
peuple comme si l’amour de Dieu
n’avait pas assez de force pour le
changer.
Redécouvrez, en effet, la constance sage et humble avec laquelle les
Pères de la foi de ce pays ont su introduire les générations successives
dans la sémantique du mystère divin. D’abord, en apprenant, et ensuite, en enseignant la grammaire nécessaire pour dialoguer avec ce
Dieu, caché durant les siècles de
leur recherche et fait proche dans la
personne de son Fils Jésus, qu’aujourd’hui tant de personnes reconnaissent dans la figure ensanglantée
et humiliée, comme symbole de leur
propre destin. Imitez sa condescendance et sa capacité de s’abaisser.
Nous ne comprendrons jamais assez
le fait qu’avec les fils métis de notre
peuple Dieu a tissé le visage par lequel il se fait connaître! Jamais,
nous ne lui serons assez reconnaissants de s’être abaissé, de cette «synkatabasis».
Je vous demande un regard d’une
délicatesse singulière pour les peuples autochtones, pour eux ainsi que
pour leurs fascinantes cultures souvent méprisées. Le Mexique a besoin
de leurs racines amérindiennes pour
ne pas être réduit à une énigme irrésolue. Les autochtones du Mexique
attendent encore qu’on reconnaisse
effectivement la richesse de leur contribution et la fécondité de leur présence pour assumer cette identité qui
fait de vous une nation unique et
non seulement une parmi d’autres.
On a souvent évoqué le présumé
destin inachevé de cette nation, le
«labyrinthe de la solitude» dans lequel elle serait emprisonnée, la géographie comme destin qui la piège.
Pour certains, tout cela serait un
obstacle au projet d’un visage unitaire, d’une identité adulte, d’une position singulière dans le concert des
nations et d’une mission partagée.
Pour d’autres, l’Eglise au Mexique
serait également condamnée à choisir entre subir l’infériorité à laquelle
elle a été reléguée dans certaines périodes de son histoire, comme lorsque sa voix a été étouffée et qu’on a
cherché à limiter sa présence, ou à
s’aventurer dans les fondamentalismes pour réacquérir des certitudes
provisoires — comme ce fameux «cogito» — en oubliant d’enraciner dans
son cœur la soif d’Absolu et le fait
qu’elle est appelée dans le Christ à
réunir tous et non seulement une
partie (cf. Lumen gentium, 1, 1).
Ne vous lassez pas en revanche de
rappeler à votre peuple combien
sont puissantes les racines anciennes
qui ont permis la synthèse chrétienne vivante de communion humaine,
culturelle et spirituelle qui a été forgée ici. Souvenez-vous que les ailes
de votre peuple se sont déjà déployées plusieurs fois au-dessus de
nombreuses vicissitudes. Préservez la
mémoire du long chemin parcouru
jusqu’à présent — soyez deutéronomiques — et sachez susciter l’espérance
de nouveaux objectifs, car demain
sera une terre «riche de fruits» même s’il nous confronte à des défis
non négligeables (Nb 13, 27-28).
Que vos regards, posés toujours et
uniquement sur le Christ, soient capables de contribuer à l’unité de votre peuple; de favoriser la réconciliation de ses différences et l’intégraSUITE À LA PAGE 8
L’OSSERVATORE ROMANO
page 8
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Rencontre avec le collège épiscopal
la perte du sens de la sacralité de la
vie humaine, de la personne, des valeurs essentielles, de la sagesse accumulée au long des siècles, du respect
de la nature? Sans récupérer, dans la
conscience des hommes et de la société, ces racines profondes, il manquera, même au travail généreux en
faveur des droits humains légitimes,
la sève vitale qui peut provenir uniquement d’une source que l’humanité ne pourra jamais se donner ellemême.
Et, toujours en regardant la Mère,
pour terminer:
SUITE DE LA PAGE 7
tion de ses diversités; de promouvoir
la solution de ses problèmes endogènes; de rappeler le haut niveau que
le Mexique peut atteindre s’il apprend à s’appartenir avant d’appartenir à d’autres; d’aider à trouver des
solutions partagées et durables à ses
misères; de motiver la nation tout
entière à ne pas se contenter de
moins que ce qu’elle espère de la façon mexicaine d’habiter le monde.
Une troisième réflexion:
Un regard attentif et proche,
pas endormi
Je vous prie de ne pas tomber
dans la paralysie de donner de vieilles réponses aux questions nouvelles.
Votre passé est une source de richesses à creuser qui peut inspirer le présent et illuminer l’avenir. Malheur à
vous, si vous vous endormez sur vos
lauriers! Il ne faut pas mépriser l’héritage reçu, sauvegardez-le par un
travail constant. Vous êtes assis sur
les épaules de géants: évêques, prêtres, religieux, religieuses et les laïcs,
fidèles «jusqu’au bout», qui ont offert la vie pour que l’Eglise puisse
accomplir sa propre mission. Du
haut de ce podium, vous êtes appelés à lancer un large regard sur le
champ du Seigneur pour planifier la
semence et attendre la récolte.
Je vous invite à vous fatiguer, à
vous fatiguer sans peur dans la mission d’évangéliser et d’approfondir
la foi à travers une catéchèse mystagogique qui sache faire trésor de la
religiosité populaire de vos gens.
Notre temps demande une attention
pastorale aux personnes et aux groupes, qui espèrent pouvoir aller à la
rencontre du Christ vivant. Seule
une courageuse conversion pastorale
— et j’insiste, conversion pastorale —
de nos communautés peut retrouver,
générer et nourrir les disciples actuels de Jésus (Document d’Aparecida,
nn. 226, 368, 370).
Par conséquent, nous autres pasteurs, devons surmonter la tentation
de la distance — et je laisse à chacun
de vous le soin de faire la liste des
distances qui peuvent exister en cet-
Un regard d’ensemble et d’unité
te Conférence épiscopale; je ne les
connais pas, mais surmonter la tentation de la distance — et du cléricalisme, de la froideur et de l’indifférence, du triomphalisme et de l’autoréférentialité. Guadalupe nous enseigne que Dieu a un visage familier,
proche, que la proximité et la bienveillance, le fait de s’incliner, de
s’approcher, peuvent plus que la force, que n’importe quelle force.
Comme l’enseigne la belle tradition de Guadalupe, la «Vierge Brune» protège les regards de ceux qui
la contemplent, reflète le visage de
ceux qui la rencontrent. Il faut apprendre qu’il y a une chose unique
dans chacun de ceux qui, à la recherche de Dieu, nous regardent. Il
nous revient de ne pas nous rendre
imperméables à ces regards, de garder en nous chacun d’eux, de les
conserver dans le cœur, de les sauvegarder.
Seule une Eglise qui sait garder le
visage des hommes qui vont frapper
à sa porte est capable de leur parler
de Dieu. Si nous ne déchiffrons pas
leurs souffrances, si nous ne nous
rendons pas compte de leurs besoins, nous ne pourrons rien leur offrir. La richesse que nous avons ne
coule que lorsque nous rencontrons
la petitesse de ceux qui mendient et,
précisément, cette rencontre se réalise dans notre cœur de pasteurs.
Et le premier visage que je vous
supplie de protéger dans votre cœur
est celui de vos prêtres. Ne les lais-
En silence devant la Morenita
SUITE DE LA PAGE 6
tion particulière à l’égard des jeunes, a dit le Pape. Mais avec des
expressions fortes, il a surtout recommandé d’affronter avec courage
les phénomènes avilissants de la
corruption et du trafic de drogue,
défini comme une «métastase qui
dévore».
En effet, le modèle pour
l’évêque doit être la «compassion
et la capacité de se pencher» de
Dieu, qui a atteint son sommet
dans l’incarnation, concept sur lequel François a insisté en reprenant
le terme utilisé par les pères grecs
pour le définir: synkatàbasis. C’est
pourquoi l’épiscopat mexicain, assis «sur les épaules de géants»,
c’est-à-dire ses prédécesseurs dans
la foi qui lui permettent de regarder au loin, doit puiser au puits
des richesses du passé. Avec la cer-
titude, manifestée par le Pape, que
le Mexique et son Eglise arriveront
à temps au rendez-vous avec euxmêmes, avec l’histoire, avec Dieu.
Paul VI, qui a été cité par son
successeur à la fin de la Messe à
Ecatepec, avait exprimé le même
encouragement aux catholiques
mexicains. C’est précisément par
amour du Christ que la Vierge aima son prochain, «ce qui doit être
la norme de toute relation humaine» rappelait le Pape Montini. Et
il ajoutait que l’on doit voir «en
chaque homme un frère et en
chaque frère le Christ, de façon à
ce que l’amour pour Dieu et
l’amour pour les hommes s’unissent dans un même amour, vivant
et agissant, l’unique qui puisse racheter les misères du monde en le
renouvelant à sa racine la plus profonde: le cœur de l’homme».
sez pas exposés à la solitude et à
l’abandon, en proie à la mondanité
qui dévore le cœur. Soyez attentifs
et apprenez à lire [dans] leurs regards pour vous réjouir avec eux
lorsqu’ils sentent la joie de raconter
ce qu’ils «ont fait et enseigné» (Mc
6, 30), et également pour ne pas reculer lorsqu’ils se sentent un peu
abattus et ne peuvent que pleurer
parce qu’ils «ont renié le Seigneur»
(Lc 22, 61-62), et aussi, pourquoi
pas, pour les soutenir, en communion avec le Christ, quand l’un ou
l’autre, déjà abattu, sortira avec Judas «dans la nuit» (Jn 13, 30). Que
jamais, dans ces situations, ne manque votre paternité, en tant qu’évêques, à vos prêtres. Encouragez la
communion entre eux; promouvez
leurs dons; intégrez-les dans les
grandes causes, car le cœur de l’apôtre n’a pas été fait pour de petites
choses.
Le besoin de familiarité habite
dans le cœur de Dieu. Notre-Dame
de Guadalupe ne demande, en effet,
qu’une «petite maison sacrée». Nos
peuples latino-américains comprennent bien le langage diminutif —
«petite maison sacrée» — et très volontiers l’utilisent. Peut-être ont-ils besoin de diminutif parce qu’autrement ils se sentiraient perdus. Ils se
sont adaptés au fait de se sentir diminués et sont habitués à vivre dans
la modestie.
L’Eglise, lorsqu’elle se réunit dans
une majestueuse cathédrale, ne
pourra s’empêcher de se comprendre
comme un «petite maison» dans laquelle ses enfants peuvent se sentir à
l’aise. On se maintient devant Dieu
seulement si on est petit, si on se
sent orphelin, si on est mendiant. Le
protagoniste de l’histoire du salut est
le mendiant.
«Petite maison» familiale et en
même temps «sacrée», car la proximité est remplie de la grandeur toute-puissante. Nous sommes les gardiens de ce mystère! Peut-être avonsnous perdu ce sens de l’humble mesure divine et nous sommes fatigués
d’offrir aux nôtres la «petite maison» dans laquelle ils se sentiront en
intimité avec Dieu. Il se peut également qu’ayant découvert un peu le
sens de sa grandeur, on ait perdu
une partie de la crainte révérencielle
envers cet amour. L’homme ne peut
accéder à l’endroit où Dieu habite,
sans y être admis et il n’y entre
qu’en ôtant ses sandales (cf. Ex 3, 5)
pour confesser sa propre insuffisance.
Et ce fait d’avoir oublié d’«ôter
les sandales» pour entrer, n’est-il
vraisemblablement pas à la racine de
Rien qu’en regardant la «Vierge
Brune», on saisit entièrement le
Mexique. Par conséquent, je vous
invite à comprendre que la mission
que l’Eglise vous confie aujourd’hui,
et vous a toujours confiée, demande
ce regard qui embrasse la totalité. Et
cela ne peut se réaliser de manière
isolée, mais seulement en communion.
La Guadalupana est ceinte d’une
ceinture qui annonce sa fécondité.
C’est la Vierge qui a déjà dans son
sein le Fils attendu par les hommes.
C’est la Mère qui a déjà conçu l’humanité du nouveau monde naissant.
C’est l’Epouse qui préfigure la maternité féconde de l’Eglise du Christ.
Vous avez la mission de ceindre l’entière nation mexicaine de la fécondité de Dieu. Aucune partie de ce cordon ne peut être méprisée.
L’épiscopat mexicain a accompli
de remarquables progrès en ces années conciliaires; ses membres ont
augmenté; la formation continue et
qualifiée a été promue; le climat fraternel n’a pas manqué; l’esprit de
collégialité a crû; les interventions
pastorales ont eu un impact sur vos
Eglises et sur la conscience nationale; les travaux pastoraux partagés
ont été fructueux dans les domaines
essentiels de la mission ecclésiale tels
que la famille, les vocations et la
présence sociale.
Tandis que nous nous réjouissons
du parcours de ces années, je vous
demande de ne pas vous laisser décourager par les difficultés et de ne
ménager aucun effort possible pour
promouvoir, entre vous et dans vos
diocèse, le zèle missionnaire, surtout
en direction des régions qui ont le
plus besoin de l’unique corps de
l’Eglise mexicaine. Redécouvrir que
l’Eglise est mission est fondamental
pour son avenir, car seul «l’enthousiasme, l’émerveillement convaincu»
des évangélisateurs a la force pour
entraîner. Je vous demande, par conséquent, de prendre spécialement
soin de la formation et de la préparation des laïcs, en surmontant toute
forme de cléricalisme et en les impliquant activement dans la mission de
l’Eglise, surtout dans la tâche de
rendre présent, par le témoignage de
leur propre vie, l’Evangile du Christ
dans le monde.
Un témoignage unificateur de la
synthèse chrétienne et une vision
partagée de l’identité ainsi que du
destin de vos fidèles aidera beaucoup ce peuple mexicain. Dans ce
sens, il serait très important que
l’université pontificale du Mexique
SUITE À LA PAGE 9
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 7, jeudi 18 février 2016
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Prière aux pieds de la Vierge dans la basilique de Guadalupe
Là où il y a de la place
pour ceux qui ne comptent pas
Dans l’après-midi du samedi 13 février, le Pape François a célébré à Mexico la
Messe dans la basilique de Guadalupe, au terme de laquelle il a couronné
l’image de la Vierge. Nous publions ci-dessous l’homélie prononcée au cours de la
célébration.
Nous avons entendu comment Marie a été à la rencontre de sa cousine
Elisabeth. En hâte, sans hésiter, sans
tarder, elle va assister sa parente
dans les derniers mois de sa grossesse.
La rencontre avec l’ange ne retient
pas Marie, car elle ne s’est pas sentie
privilégiée, ni ne devait s’éloigner de
la vie de ses proches. Au contraire,
cette rencontre a ravivé et suscité
une attitude pour laquelle Marie est
et sera reconnue comme la femme
du oui, un oui du don d’elle-même
à Dieu, et en en même temps, un
oui du don à ses frères. C’est le oui
qui l’a poussée à donner le meilleur
en se mettant en route vers les autres.
Ecouter ce passage évangélique
dans cette maison a une saveur spéciale. Marie, la femme du oui, a
voulu également visiter les habitants
de cette terre d’Amérique à travers la
personne de l’indien saint Juan Diego. Tout comme elle a parcouru les
routes de Judée et de Galilée, de la
même manière, elle a sillonné le Tepeyac, revêtant ses costumes, utilisant sa langue, pour servir cette
grande nation. Et tout comme elle a
offert sa compagnie durant la grossesse d’Elisabeth, de même elle a accompagné et accompagne la gestation de cette terre mexicaine bénie.
Tout comme elle s’est fait présente
au petit Juan, de la même manière,
elle continue d’être présente à nous
tous; surtout à ceux qui, comme lui,
sentent «qu’ils ne valent rien»
(cf. Nican Mopohua, 55). Ce choix
particulier, disons préférentiel, n’a
été contre personne mais en faveur
de tous. Le petit indien Juan qui se
désignait lui-même comme «mecapal,
cacaxtle, queue, aile, entièrement dépendant d’autrui» (cf. ibid, 55), devenait «l’ambassadeur, vraiment digne de confiance».
Ce matin de décembre 1531, se produisait
le premier miracle qui
sera ensuite la mémoire vivante de tout ce
que le sanctuaire protège. Ce matin-là, lors
de cette rencontre,
Dieu a éveillé l’espérance de son enfant
Juan, l’espérance d’un
peuple. Ce matin,
Dieu a réveillé et réveille l’espérance des
petits, des souffrants,
des déplacés et des
marginalisés, de tous
ceux qui sentent qu’ils
n’ont pas une place
digne sur cette terre.
Ce matin, Dieu s’est approché et
s’approche du cœur souffrant mais
endurant de tant de mères, pères,
grands-parents, qui ont vu leurs enfants partir, se perdre, voire être arrachés de manière criminelle.
Ce matin-là, le petit Juan expérimente dans sa propre vie ce qu’est
l’espérance, ce qu’est la miséricorde
Discours aux évêques
SUITE DE LA PAGE 8
soit toujours davantage au cœur
des efforts de l’Eglise pour assurer
ce regard d’universalité sans laquelle la raison, réduite à des unités
partielles, renonce à sa plus haute
aspiration de recherche de la vérité.
La mission est vaste et la faire
progresser exige de multiples voies.
Et avec la plus vive insistance, je
vous exhorte à conserver la communion et l’unité entre vous. Ceci est
essentiel, frères. Ce n’est pas dans
le texte, mais cela me vient maintenant. S’il faut se disputer, disputezvous; s’il faut se dire les choses, dites-les; mais comme des hommes,
en face, et comme des hommes de
Dieu qui vont ensuite prier ensemble, discerner ensemble. Et si vous
dépassez les limites, demandez-vous
pardon, et maintenez l’unité du
corps épiscopal. Communion et
unité entre vous. La communion est
la forme vitale de l’Eglise et l’unité
de ses pasteurs donne la preuve de
sa véracité. Le Mexique ainsi que
son Eglise vaste et multiforme, ont
besoin d’évêques serviteurs et gardiens de l’unité fondée sur la Parole
du Seigneur, alimentée par son
Corps et guidée par son Esprit qui
est le souffle vital de l’Eglise.
Les «principes» ne sont pas nécessaires, mais une communauté de
témoins du Seigneur l’est. Le
Christ est l’unique lumière; il est la
source d’eau vive; de son souffle
émane l’Esprit qui déploie les voiles
de la barque ecclésiale. Dans le
Christ glorifié, que les gens de ce
peuple aiment honorer comme Roi,
allumez ensemble la lumière, soyez
comblés de sa présence qui ne
s’épuise pas; respirez à pleins pou-
mons l’air de son Esprit. Il vous revient de semer le Christ dans cette
terre, de maintenir allumée son
humble lumière qui éclaire sans
aveugler, d’assurer que la soif du
peuple soit étanchée par ses eaux;
d’étendre les voiles pour que le
souffle de l’Esprit les déploie et que
la barque de l’Eglise au Mexique
ne fasse pas naufrage.
Souvenez-vous-en bien, l’Epouse,
l’Epouse de chacun de vous, la Mère Eglise, sait bien que le pasteur
bien-aimé (Ct 1, 7) ne se trouvera
que là où le pâturage est vert et où
les cours d’eau sont cristallins.
L’Epouse ne fait pas confiance aux
compagnons de l’Epouse qui, parfois, soit par négligence soit par incapacité, conduisent le troupeau
par des endroits arides et rocheux.
Malheur à nous pasteurs, compagnons du Pasteur Suprême, si nous
laissons son Epouse errer parce que
l’Epoux ne se trouve pas dans la
tente que nous avons construite!
Permettez-moi un dernier mot
pour exprimer l’appréciation du Pape pour tout ce que vous faites afin
d’affronter le défi de notre époque
représentée par les migrations. Ce
sont des millions d’enfants de
l’Eglise qui vivent aujourd’hui dans
la diaspora ou en transit, se déplaçant vers le Nord à la recherche de
nouvelles opportunités. Beaucoup
d’entre eux laissent derrière eux
leurs propres racines pour aller à
l’aventure, même dans la clandestinité qui implique tout genre de risques, en quête du «feu vert» qu’ils
considèrent comme leur espérance.
Tant de familles sont divisées; et
l’intégration dans la supposée «terre promise» n’est pas toujours aussi
facile qu’on le croit.
Chers frères, que vos cœurs
soient capables de les suivre et de
les rejoindre au-delà des frontières.
Renforcez la communion avec vos
frères de l’épiscopat des Etats-Unis
d’Amérique pour que la présence
maternelle de l’Eglise maintienne
vivantes les racines de leur foi, de
la foi de ce peuple, les raisons de
leurs espérances et la force de leur
charité. Une fois leurs harpes pendues, que leurs joies ne se taisent
pas, qu’ils n’oublient pas Jérusalem
et ne deviennent pas des «exilés
hors d’eux-mêmes» (Ps 136). Qu’ils
témoignent ensemble que l’Eglise
est gardienne d’une vision unitaire
de l’homme et ne peut accepter
qu’il soit réduit à une pure «ressource» humaine.
L’empressement de vos diocèses
à passer un peu de baume sur les
pieds meurtris de ceux qui traversent vos territoires et à dépenser
pour eux l’argent difficilement recueilli ne sera pas vain; le Samaritain divin, en fin de compte, enrichira celui qui n’est pas passé, indifférent, devant lui lorsqu’il gisait
au sol sur le chemin (Lc 10, 25-37).
Chers frères, le Pape est sûr que
le Mexique et son Eglise arriveront
à temps au rendez-vous avec euxmêmes, avec l’histoire, avec Dieu.
Peut-être une pierre en chemin retardera-t-elle la marche, et la fatigue du voyage exigera-t-elle un arrêt, mais ce ne sera jamais suffisant
pour ne pas atteindre le but. Car
celui qui a une mère qui l’attend
peut-il arriver tard? Celui qui peut
entendre sans cesse résonner dans
son propre cœur «ne suis-je donc
pas ici, moi qui suis ta Mère»?
Merci.
de Dieu. Il est choisi pour superviser, soigner, protéger et encourager
la construction de ce sanctuaire. A
plusieurs occasions, il a dit à la Vierge qu’il n’était pas la personne indiquée, qu’au contraire, si elle voulait
mener à bien cette œuvre, elle devrait choisir d’autres personnes,
puisqu’il n’était pas cultivé, instruit
ou qu’il ne faisait pas partie de ceux
qui pouvaient le faire. Marie, obstinée — de cette obstination qui naît
du cœur miséricordieux du Père —
lui dit non, qu’il sera, lui, son ambassadeur.
Ainsi, elle réussit à éveiller une
chose qu’il ne savait pas exprimer,
un vrai étendard d’amour et de justice: dans la construction de cet autre
sanctuaire, celui de la vie, celui de
nos communautés, de nos sociétés et
de nos cultures, personne ne peut
être marginalisé. Nous sommes tous
nécessaires, surtout ceux qui normalement ne comptent pas parce qu’ils
ne sont pas «à la hauteur des circonstances» ou parce qu’ils n’«apportent pas le capital nécessaire» à
ces constructions. Le sanctuaire de
Dieu est la vie de ses enfants, de
tous et dans toutes leurs conditions,
surtout celle des jeunes sans avenir,
exposés à d’interminables situations
douloureuses, risquées, et celle des
personnes âgées non reconnues, oubliées dans tant de lieux. Le sanctuaire de Dieu, ce sont nos familles
qui ont besoin du minimum nécessaire pour pouvoir se construire et
grandir. Le sanctuaire de Dieu, c’est
le visage de tant de personnes qui
croisent nos chemins...
En venant à ce sanctuaire, il peut
nous arriver la même chose qu’à
Juan Diego. Regarder la Mère avec
nos douleurs, nos peurs, nos désespoirs, nos tristesses et lui dire: «Que
puis-je apporter, moi, si je ne suis
pas instruit?». Regardons la mère
avec des yeux qui disent: les situations qui nous ôtent la force, qui
font sentir qu’il n’y a pas de place
pour l’espérance, pour le changement, pour la transformation, sont si
nombreuses.
Voilà pourquoi, je crois qu’aujourd’hui un peu de silence nous fera du bien; tout comme la regarder,
elle, la regarder longuement et calmement, et lui dire comme l’a fait
SUITE À LA PAGE 10
L’OSSERVATORE ROMANO
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jeudi 18 février 2016, numéro 7
Célébration eucharistique à Ecatepec
Non à une société d’un petit nombre
pour un petit nombre
Au cours du premier dimanche de Carême, le 14 février, le Pape a célébré la
Messe à Ecatepec, banlieue peuplée de la périphérie de la capitale mexicaine. C’est
sur le campus du Centre d’études supérieures local, que le Pape a présidé
l’Eucharistie en présence de laïcs engagés dans l’église et de nombreuses familles.
Nous publions ci-dessous l’homélie prononcée par le Pape à cette occasion.
Mercredi dernier, nous avons commencé le temps liturgique du Carême où l’Eglise nous invite à nous
préparer à célébrer la grande fête de
Pâques. C’est un temps spécial pour
rappeler le don de notre baptême,
lorsque nous avons été faits enfants
de Dieu. L’Eglise nous invite à raviver le don qui nous a été fait, pour
ne pas le laisser endormi comme une
chose du passé, ou dans un «tiroir
aux souvenirs». Ce temps du Carême est un moment favorable pour
retrouver la joie et l’espérance que
nous ressentons du fait d’être enfants aimés du Père. Ce Père qui
nous attend pour nous enlever les
vêtements de la fatigue, de l’apathie,
de la méfiance, et nous revêtir de la
dignité que seuls un vrai père ou
une vraie mère savent donner à leurs
enfants, les vêtements qui naissent
de la tendresse et de l’amour.
Notre Père est le Père d’une grande famille, il est notre Père. Il sait
nourrir un amour unique mais ne
sait engendrer ni éduquer des «fils
uniques». C’est un Dieu qui sait ce
qu’est le foyer, la fraternité, le pain
rompu et partagé. Il est le Dieu du
«Notre Père», non pas du «Mon
Père», ni du «Votre Père».
En chacun de nous se trouve, vit
ce rêve de Dieu qu’à chaque Pâques,
dans chaque Eucharistie nous célébrons de nouveau: nous sommes en-
fants de Dieu. Rêve
que beaucoup de nos
frères ont vécu tout
au long de l’histoire.
Rêve dont ont témoigné beaucoup de
martyrs
d’hier
et
d’aujourd’hui, en versant leur sang.
Le Carême est un
temps de conversion
parce que nous faisons quotidiennement
l’expérience dans notre vie de la façon
dont ce rêve est sans
cesse menacé par le père du mensonge — nous avons entendu dans
l’Evangile ce qu’il a fait avec Jésus —
par celui qui cherche à nous séparer,
en créant une famille divisée et qui
s’affronte. Une société divisée et qui
s’affronte. Une société d’un petit
nombre et pour un petit nombre.
Que de fois ne faisons-nous l’expé-
Messe
à Guadalupe
SUITE DE LA PAGE 9
l’autre enfant qui l’aimait beaucoup:
«Te regarder simplement — Mère
—, /laisser ouvert uniquement le regard; / te regarder entièrement sans
rien te dire, / tout te dire, sans paroles et avec respect. / Ne pas perturber le vent de ton visage; / uniquement bercer ma solitude violée,
/ dans tes yeux de Mère amoureuses / et dans ton nid de terre transparente. / Les heures s’évanouissent; / secoués, les hommes insensés mordent les déchets / de la
vie et de la mort, bruyamment. / Te
regarder, Mère; rien que te contempler, / le cœur muet dans ta tendresse, / dans ton silence chaste de
lys» (Hymne liturgique).
Et en silence, dans cette contemplation, l’écouter une fois de plus
nous redire: «Que se passe-t-il mon
fils le plus petit? qu’est-ce qui attriste ton cœur?» (cf. Nican Mopohua, nn. 107-118). «Ne suis-je pas ici
moi, moi qui ai l’honneur d’être ta
mère?» (Ibid, n. 119).
Elle nous dit qu’elle a l’«honneur» d’être notre mère. Cela nous
donne la certitude que les larmes
de ceux qui souffrent ne sont pas
stériles. Elles sont une prière silencieuse qui monte vers le ciel et qui
trouve toujours chez Marie une place sous son manteau. En elle et
avec elle, Dieu se fait frère et compagnon de route, partage avec nous
la croix pour que ne soyons pas
écrasés par nos douleurs.
Ne suis-je pas moi, ta mère? Ne
suis-je pas présente? Ne te laisse
pas vaincre par tes douleurs, tes
tristesses,
nous
dit-elle.
Aujourd’hui, elle nous envoie de nouveau, comme le petit Juan; aujourd’hui, elle nous redit: sois mon
ambassadeur, sois mon envoyé pour
construire de nombreux et nouveaux sanctuaires, pour accompagner de nombreuses vies, pour essuyer de nombreuses larmes. Va
simplement par les chemins du voisinage, de ta communauté, de ta
paroisse comme mon ambassadeur, mon ambassadrice;
bâtis des sanctuaires en partageant la joie de savoir que
nous ne sommes pas seuls,
qu’elle chemine avec nous.
Sois mon ambassadeur, nous
dit-elle, en donnant à manger
à l’affamé, à boire à celui qui
a soif, accueille celui qui est
dans le besoin, habille celui
qui est nu et visite le malade.
Va au secours du prisonnier,
ne le laisse pas seul, pardonne à celui qui t’a offensé,
console celui qui est triste,
sois patient avec les autres et
surtout supplie et prie notre
Dieu. Et en silence, nous lui
disons ce qui surgit dans notre cœur.
«Ne suis-je pas, moi, ta
mère? Ne suis-je pas là,
moi?», nous redit Marie. Va
construire mon sanctuaire, aide-moi à bâtir la vie de mes
enfants, qui sont tes frères.
rience dans notre chair, ou dans notre famille, à travers nos amis ou nos
voisins, de la douleur qui naît de ne
pas voir reconnue cette dignité que
nous portons tous en nous! Que de
fois avons-nous dû pleurer et regretter de ne pas nous être rendu compte que nous n’avons reconnu cette
dignité dans les autres! Que de fois
— et je le dis avec douleur — ne
sommes-nous pas aveugles et insensibles devant le manque de reconnaissance de notre propre dignité et
de celle d’autrui!
Le Carême est un temps pour
ajuster les sens, ouvrir les yeux devant tant d’injustices qui portent atteinte directement au rêve et au projet de Dieu. C’est un temps pour démasquer ces trois grandes formes de
tentations qui brisent, divisent l’image que Dieu a voulu former.
Les trois tentations du Christ…
Trois tentations du chrétien qui
essayent de détruire la vérité à laquelle nous avons été appelés.
Trois tentations qui cherchent à
dégrader et à nous dégrader.
Premièrement, la richesse, en nous
appropriant de biens qui ont été
donnés à tous, les utilisant seulement pour moi ou «pour les miens».
C’est avoir le «pain» à la sueur du
front de l’autre, voire au prix de sa
vie. Cette richesse, qui est un pain
au goût de douleur, d’amertume, de
souffrance. Dans une famille ou une
société corrompue, c’est le pain que
l’on donne à manger à ses propres
enfants. Deuxième tentation, la vanité; elle est la recherche de prestige
sur la base de la disqualification
continuelle et constante de ceux qui
«ne sont pas comme nous». La recherche exacerbée de ces cinq minutes de gloire, qui ne supporte pas la
«gloire» des autres. «Transformant
l’arbre tombé en bois de chauffage»,
elle conduit progressivement à la
troisième tentation, la pire, celle de
l’orgueil; c’est-à-dire se mettre sur
un plan de supériorité en tout genre,
sentant qu’on ne partage pas «la vie
du commun des mortels», et prier
tous les jours: «je te rends grâce,
Seigneur parce que tu ne m’as pas
fait comme eux».
Trois tentations du Christ…
Trois tentations que le chrétien affronte tous les jours.
Trois tentations qui cherchent à
SUITE À LA PAGE 11
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 7, jeudi 18 février 2016
Angelus du 14 février
Les larmes
et le rêve
Au terme de la célébration de la Messe
à Ecatepec, le Pape François a guidé
la prière de l’Angelus.
Chers frères,
Dans la première lecture de ce dimanche, Moïse fait une recommandation au peuple. Lors de la moisson, dans l’abondance, lors des prémices n’oublie pas tes origines, n’oublie pas d’où tu viens. L’action de
grâce naît et grandit chez une personne et dans un peuple qui est capable de faire mémoire. Elle a ses
racines dans le passé, qui, entre ombres et lumière, a progressivement
généré le présent. Au moment où
nous pouvons rendre grâce à Dieu
parce que la terre a donné son fruit
et produire ainsi du pain, Moïse invite son peuple à se souvenir, en
énumérant les situations difficiles
qu’il a dû traverser (cf. Dt 26, 5-11).
En ce jour de fête, en ce jour
nous pouvons célébrer la bonté du
Seigneur envers nous. Nous rendons
grâce pour l’opportunité d’être réunis afin de présenter au Père plein
de bonté les prémices de nos enfants, petits-enfants, de nos rêves et
de nos projets. Les prémices de nos
cultures, de nos langues et de nos
traditions. Les prémices de nos soucis...
Comme il a été difficile pour chacun de vous d’arriver jusqu’ici!
Combien chacun a-t-il dû «marcher» pour faire de ce jour une fête,
une action de grâces! Que de chemin d’autres ont fait, n’ayant pas pu
arriver, mais grâce à eux, nous avons
pu continuer à avancer!
Aujourd’hui, suivant l’invitation
de Moïse, nous voulons en tant que
peuple faire mémoire, nous voulons
être le peuple de la mémoire vivante
du passage de Dieu au milieu de
son peuple, dans son peuple. Nous
voulons regarder nos enfants, en sachant qu’ils hériteront non seulement d’une terre, d’une langue,
d’une culture et d’une tradition,
mais qu’ils hériteront aussi du fruit
vivant de la foi qui rappelle le passage assuré de Dieu en ce pays. La
certitude de sa proximité et de sa solidarité. Une certitude qui nous aide
à lever la tête et à espérer avec enthousiasme l’aurore.
Homélie à Ecatepec
SUITE DE LA PAGE 10
dégrader, détruire et ôter la joie ainsi que la fraîcheur de l’Evangile;
qui nous enferment dans un cercle
de destruction et de péché.
Il vaut donc la peine de nous demander:
Jusqu’à quel point sommes-nous
conscients de ces tentations dans
notre personne, en nous-mêmes?
Jusqu’à quel point sommes-nous
habitués à un style de vie qui pense
que dans la richesse, dans la vanité
et dans l’orgueil se trouvent la source et la force de la vie? Jusqu’à
quel point croyons-nous que l’attention à l’autre, notre souci et occupation pour le pain, pour le nom
et pour la dignité des autres sont
source de joie et d’espérance?
Nous avons choisi Jésus et non le
démon. Si nous accueillons ce que
nous avons entendu dans l’Evangile, Jésus ne répond au démon par
aucune parole personnelle, mais il
répond par les Paroles de Dieu, par
les Paroles de l’Ecriture. Parce que,
frères et sœurs, mettons-le nous
dans la tête, avec le démon, on ne
dialogue pas, on ne peut pas dialoguer, parce qu’il nous vaincra toujours. C’est seulement la force de la
Parole de Dieu qui peut le vaincre.
Nous avons choisi Jésus et non le
démon; nous voulons suivre ses traces, mais nous savons que ce n’est
pas facile. Nous savons ce que signifie être séduit par l’argent, la
gloire et le pouvoir. C’est pourquoi
l’Eglise nous offre ce temps, elle
nous invite à la conversion avec
une seule certitude: Lui nous attend et il veut guérir nos cœurs de
tout ce qui dégrade, en étant dégradé ou en dégradant les autres. Il est
le Dieu qui porte un nom: miséricorde. Son nom est notre richesse,
son nom est notre gloire, son nom
est notre pouvoir et en son nom,
une fois de plus, nous redisons avec
le Psaume: «Tu es mon Dieu, en toi
j’ai mis ma confiance». Pouvonsnous le répéter ensemble? Trois
fois: «Tu es mon Dieu, en toi j’ai
mis ma confiance», «Tu es mon
Dieu, en toi j’ai mis ma confiance»,
«Tu es mon Dieu, en toi j’ai mis ma
confiance».
Qu’en cette Eucharistie, le SaintEsprit renouvelle en nous la certitude que son Nom est miséricorde et
qu’il nous fasse expérimenter
chaque jour le fait que «la joie de
l’Evangile remplit le cœur et toute
la vie de ceux qui rencontrent Jésus… Avec Jésus Christ la joie naît
et renaît toujours» (Evangelii gaudium, n. 1).
page 11
Avec vous aussi je m’unis à cette
mémoire reconnaissante. A ce souvenir vivant du passage de Dieu dans
vos vies. Regardant vos enfants, je
ne peux que faire miennes les paroles qu’un jour le bienheureux Paul
VI a adressées au peuple mexicain:
«Un chrétien ne peut pas [ne pas]
démontrer sa propre solidarité et ne
peut pas [ne pas] donner le meilleur
de lui-même pour résoudre la situation de tous ceux qui n’ont pas encore le pain de la culture ou l’opportunité d’un travail digne [...] On ne
peut pas rester insensible alors que
les nouvelles générations ne trouvent
pas le moyen de transformer en réalité [leurs] légitimes aspirations». Et
le bienheureux Paul VI continue par
une invitation à «être toujours en
première ligne dans tous les efforts
pour améliorer la situation de ceux
qui sont dans le besoin», et à voir
«en chaque homme, un frère, et en
chaque frère, le Christ» (Paul VI,
Message radiotélévisé aux catholiques
du Mexique, à l’occasion du 75e anniversaire du couronnement de Notre-Dame de Guadalupe [12 octobre 1970],
L’Osservatore Romano, éd. en langue
française [23 octobre 1970], p. 1).
Je voudrais vous inviter aujourd’hui à être en première ligne, à
être les premiers dans toutes les initiatives qui aident à faire de cette
terre mexicaine bénie une terre d’opportunités, où il ne sera pas nécessaire d’émigrer pour rêver; où il ne
sera pas nécessaire d’être exploité
pour travailler; où il ne sera pas nécessaire de faire du désespoir et de
la pauvreté d’un grand nombre l’opportunité de quelques-uns; une terre
qui ne devra pas pleurer des hommes et des femmes, des jeunes et des
enfants qui finissent, détruits, dans
la main des trafiquants de la mort.
Cette terre a le goût de la Guadalupana; elle qui nous a toujours devancés dans l’amour, disons-lui de
tout cœur:
Vierge Sainte, «aide-nous à rayonner par le témoignage de la communion, du service, de la foi ardente et
généreuse, de la justice et de l’amour
pour les pauvres, pour que la joie de
l’Evangile parvienne jusqu’aux confins de la terre, et qu’aucune périphérie ne soit privée de sa lumière»
(Evangelii gaudium, n. 288).
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L’OSSERVATORE ROMANO
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Visite à l’hôpital pédiatrique
Thérapie affective
Le Pape François a conclu la deuxième journée de sa visite au Mexique en se
rendant, dans l’après-midi du dimanche 14 février, à l’hôpital pédiatrique
«Federico Gómez» de la capitale. Nous publions ci-dessous les paroles prononcées
par le Pape lors de la rencontre avec les enfants malades.
Madame la première dame,
Madame la secrétaire à la santé,
Monsieur le directeur,
Membres du Conseil
d’administration,
familles ici présentes,
chers amis, chers enfants,
Bonsoir,
Je rends grâce à Dieu de me donner l’occasion de pouvoir vous visiter, de m’unir à vous et à vos familles dans cet hôpital. Pouvoir partager un moment de vos vies, de la vie
de toutes les personnes qui travaillent comme médecins, infirmiers,
membres du personnel et bénévoles
qui vous assistent, les nombreuses
personnes qui se dévouent pour
vous.
Il y a un bref passage de l’Evangile qui nous raconte la vie de Jésus
quand il était enfant. Il était tout
petit, comme certains d’entre vous.
Un jour ses parents, Marie et Joseph, l’emmènent au Temple pour le
présenter à Dieu. Et ils rencontrent
alors un vieillard appelé Siméon qui,
en le voyant, d’une manière très décidée, lui le vieillard, plein de joie et
de reconnaissance, le prend dans ses
bras et commence à bénir Dieu. Voir
l’Enfant Jésus a provoqué en lui
deux choses: un sentiment de reconnaissance, et l’envie de bénir. C’està-dire, rendre grâce à Dieu et, lui le
vieillard, a eu envie de bénir.
Siméon est le «grand-père» qui
nous enseigne ces deux attitudes
fondamentales de la vie: remercier,
et en même temps, bénir.
Ici, je vous bénis, les médecins
vous bénissent, chaque fois que vous
soignent les infirmières, tout le personnel, tous ceux qui travaillent
vous bénissent, chers jeunes; mais
vous aussi, vous devez apprendre à
les bénir, eux, et à demander à Jésus
de les protéger afin qu’ils vous soignent. Moi, ici (et pas seulement en
raison de l’âge), je me sens très proche de ces deux enseignements de
Siméon. D’une part, franchir cette
porte et voir vos yeux, vos sourires
— malicieux que vous êtes — vos visages, a suscité en moi l’envie de dire merci. Merci pour la tendresse
que vous manifestez en me recevant,
merci de voir la tendresse avec laquelle on vous soigne ici, la tendresse avec laquelle on vous accompagne. Merci pour l’effort de tous ceux
qui font du mieux possible pour que
vous puissiez récupérer rapidement.
Il est très important de se sentir
soigné et accompagné, de se sentir
aimé et de savoir que l’on cherche la
meilleure manière de vous soigner,
pour toutes ces personnes, je dis:
merci, merci.
En même temps, je veux vous bénir. Je veux demander à Dieu de
vous bénir, de vous accompagner
ainsi que vos familles, toutes les personnes qui travaillent dans cette
maison et qui cherchent à ce que ces
sourires continuent de grandir de
jour en jour; à toutes les personnes
qui non seulement avec les médicaments mais aussi avec la «thérapie
de la tendresse» contribuent à ce
que ce temps soit vécu dans une
plus grande joie. C’est si important
la «thérapie de la tendresse»! Si important! Parfois, une caresse aide
tant à récupérer! Connaissez-vous
l’indien Juan Diego, ou non? (Ils répondent: oui!). Alors, celui qui le
connaît, qu’il lève la main... Quand
l’oncle du petit Juan était malade, ce
dernier était très inquiet et angoissé.
A ce moment, la Vierge de Guadalupe apparaît et lui dit: «Que ton
cœur ne soit pas troublé, et que rien
ne t’inquiète. Ne suis-je pas là, moi
qui suis ta Mère?» Nous avons notre
Mère, demandons-lui de nous donner son Fils Jésus.
Et à présent, je vais demander une
chose aux enfants: fermons les yeux,
fermons les yeux et demandons ce
qu’aujourd’hui notre cœur désire.
Un petit moment de silence, les
yeux fermés, et demandons intérieurement ce que nous voulons. Et
maintenant, disons à notre Mère:
«Je vous salue Marie...».
Que le Seigneur et la Vierge de
Guadalupe vous accompagnent toujours. Merci beaucoup. Et, s’il vous
plaît, n’oubliez pas de prier pour
moi. Ne l’oubliez pas! Que Dieu
vous bénisse!
Deux priorités
GIOVANNI MARIA VIAN
nouvelles traductions bibliques dans
ces langues, après de longues années
de travail, et les remerciements enthousiastes au Souverain Pontife
pour avoir permis la reprise du diaconat permanent entre ces communautés. Des réalités qui renvoient
toutes deux au christianisme depuis
ses origines.
Cohérent avec la valorisation patristique des intuitions de vérité (les
«semina verbi») chez les poètes et
les philosophes païens, François a cité le texte maya Popol vuh, en expliquant qu’«au cœur de l’homme et
dans la mémoire de nombre de nos
peuples est inscrit le désir d’une ter-
La rencontre avec les familles et la
Messe avec des dizaines de milliers
d’autochtones dans le Chiapas ont
conduit le Pape de la capitale du
Mexique vers ses extrémités méridionales. Et elles ont montré sa volonté
missionnaire dans la proximité envers les pauvres et dans le soin apporté à tous ces foyers familiaux qui
affrontent un moment difficile. Des
priorités que Jorge Mario Bergoglio
a toujours clairement eues et qu’il a
rappelées de diverses façons depuis
le début de son pontificat, comme
cela émergera également de l’imminente et très attendue exhortation née des deux assemblées synodales.
A San Cristóbal, l’utilisation de trois langues autochtones, les chants, les musiques et les danses des peuples autochtones ont caractérisé la Messe papale sur la
terre où à partir de 1543 devint premier évêque le dominicain Bartolomé de las Casas, le pionnier dans leur défense qui écrivit la Brevísima
relación de la destrucción de las
Indias. Et la liturgique suggestive très ordonnée s’est
Messe avec les communautés autochtones du Chiapas
conclue par la présence de
re, d’un temps où la dévalorisation
est dépassée par la fraternité, l’injustice vaincue par la solidarité et la
violence réduite au silence par la
paix». Et ce désir a un visage, celui
de Jésus, a ajouté le Pape.
Un grand enseignement nous
vient également des populations autochtones, reconnu à Aparecida par
les évêques latino-américains et urgent face «à l’une des plus grandes
crises de l’environnement de l’histoire»: à savoir la capacité d’une relation équilibrée et harmonieuse avec
la nature, thème au centre de l’encyclique Laudato si’, qui a suscité un
grand intérêt. Pourtant, ces peuples
ont été incompris et exclus,
«bien souvent de façon systématique et structurelle». C’est pour
cette raison, a dit le Souverain
Pontife, qu’un examen de conscience nous ferait du bien: pour
apprendre à répéter «pardon,
pardon, frères!».
Le stade bondé de Tuxtla Gutiérrez a ensuite été le théâtre de
la rencontre avec les familles, où
Jorge Mario Bergoglio a écouté
les témoignages de quatre familles et dialogué avec elles. Et encore une fois, le Pape a élevé la
voix en faveur de la famille,
souhaitant des législations qui la
protègent et surtout en indi-
Lors de la rencontre avec les familles
quant la voie de l’engagement personnel comme antidote à la précarité
et à l’isolement, qui est même devenu un modèle social.
En reconnaissant que la vie en famille n’est pas facile, François a appliqué à celle-ci ce qu’il a dit de
l’Eglise à d’autres occasions. A savoir qu’il préfère «une famille blessée, qui essaye tous les jours de conjuguer l’amour», à des familles et
des sociétés rendues malades par la
fermeture sur elles-mêmes; qu’il préfère des familles au visage fatigué et
plein de rides à des visages maquillés éloignés de la tendresse et de la
compassion, qui sont propres à
D ieu.
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 7, jeudi 18 février 2016
page 13
Messe avec les autochtones à San Cristóbal de Las Casas
Examen
de conscience
Le voyage du Pape au Mexique a fait étape le lundi 15 février à San Cristóbal
de Las Casas, où François est arrivé dans la matinée pour célébrer la Messe avec
les communautés autochtones du Chiapas sur le terrain de baseball Pachón
Contreras du centre sportif municipal. Puis, après avoir déjeuné avec des
représentants des communautés autochtones, le Pape s’est rendu à la cathédrale de
San Cristóbal de Las Casas. Nous publions ci-dessous l’homélie prononcée lors de
la Messe.
Li smantal Kajvaltike toj lek – La
loi du Seigneur qui redonne vie est
parfaite. Ainsi commence le psaume
que nous avons écouté. La loi du
Seigneur est parfaite; et le psalmiste
se charge d’énumérer tout ce que
cette loi procure à celui qui l’écoute
et qui l’observe: elle redonne vie, rend
sage les simples, réjouit le cœur, clarifie
le regard.
C’est cette loi que le Peuple
d’Israël avait reçue des mains de
Moïse, une loi qui devait aider le
Peuple de Dieu à vivre dans la liberté à laquelle il avait été appelé. Une
loi qui est destinée à être lumière sur
le chemin du peuple et l’accompagner dans sa marche. Un peuple qui
avait subi l’esclavage et le despotisme du Pharaon, qui avait expérimenté la souffrance et les abus, jusqu’à ce que Dieu dise: assez, jusqu’à
ce que Dieu dise: ça suffit! J’ai vu la
misère, j’ai entendu les cris, je connais
ses souffrances (cf. Ex 3, 9). Et là, le
visage de notre Dieu se révèle, le visage du Père qui souffre devant la
douleur, les abus, l’injustice subie
par ses enfants; et sa Parole, sa loi,
devient symbole de liberté, symbole
de joie, de sagesse et de lumière. Expérience, réalité qui trouve écho
dans cette expression qui naît de la
sagesse bercée en ce pays depuis des
temps lointains et qui, dans le Popol
Vuh, dit ce qui suit: L’aube s’est levée
sur toutes les tribus réunies. La face de
la terre a tout de suite été assainie par
le soleil. L’aube s’est levée pour les
peuples qui ont sans cesse marché
dans les diverses ténèbres de l’histoire.
Dans cette expression, il y a une
aspiration à vivre en liberté, il y a
une aspiration qui a un goût de terre
promise, où l’oppression, les mauvais traitements et la dégradation ne
sont pas monnaie courante. Dans le
cœur de l’homme, et dans la mémoire de beaucoup de nos peuples, est
inscrit le désir d’une terre, d’un
temps où le mépris sera vaincu par
la fraternité, l’injustice par la solidarité, et où la violence sera réduite au silence par la paix.
Notre Père non seulement
partage ce désir, mais lui-même l’a aussi suscité et le suscite, en nous offrant son fils Jésus Christ. En lui, nous trouvons la solidarité du Père qui
marche à nos côtés. En lui,
nous voyons comment cette
loi parfaite prend chair, prend
un visage, entre dans l’histoire
pour accompagner et soutenir
son peuple; il se fait Chemin,
il se fait Vérité, il se fait Vie
pour que les ténèbres n’aient
pas le dernier mot et que l’aube ne tarde pas à se lever sur
la vie de ses enfants.
De multiples façons et sous
de multiples formes, on a voulu réduire au silence et taire ce
désir; de multiples façons, on
a voulu anesthésier notre âme,
de multiples manières on a essayé d’engourdir et d’endormir la vie de nos enfants et de
nos jeunes par l’insinuation
que rien ne peut changer ou que ce
sont des rêves impossibles. Devant
ces manières, la création aussi sait
élever sa voix, «cette sœur crie en
raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et
par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en
pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à
l’exploiter. La violence qu’il y a dans
le cœur humain blessé par le péché
se manifeste aussi dans les symptômes de maladie que nous observons
dans le sol, dans l’eau, dans l’air et
dans les êtres vivants. C’est pourquoi, parmi les pauvres les plus
abandonnés et maltraités, se trouve
notre terre opprimée et dévastée, qui
«gémit en travail d’enfantement»
(Rm 8, 22) (Laudato si’, n. 2).
Le défi environnemental que nous
vivons et ses racines humaines nous
touchent tous (cf. Laudato si’, n. 14)
et nous interpellent. Nous ne pouvons plus faire la sourde oreille face
à l’une des plus grandes crises environnementales de l’histoire.
En cela, vous avez beaucoup de
choses à nous enseigner, à enseigner
à l’humanité. Vos peuples, comme
l’ont reconnu les évêques de l’Amérique latine, savent entrer en relation, d’une manière harmonieuse,
avec la nature qu’ils respectent comme «source de subsistance, maison
commune et autel du partage
d’Aparecida,
humain»
(Document
n. 472).
Cependant, souvent, de manière
systématique et structurelle, vos peuples ont été incompris et exclus de
la société. Certains ont jugé inférieures vos valeurs, votre culture et vos
traditions. D’autres, étourdis par le
pouvoir, l’argent et les lois du marché, vous ont dépossédés de vos terres ou ont commis des actes qui les
polluent. C’est si triste! Que cela
nous ferait du bien, à tous, de faire
un examen de conscience et d’apprendre à dire: pardon, pardon,
chers frères! Le monde d’au-
Après la Messe, François a déjeuné
avec les représentants des communautés autochtones (ci-dessous)
et a visité la cathédrale de San Cristóbal de Las Casas (ci-contre)
jourd’hui, dépouillé par la culture
du déchet, a besoin de vous!
Les jeunes d’aujourd’hui, exposés
à une culture qui essaie de supprimer toutes les richesses et caractéristiques culturelles en vue d’un monde
homogène, ont besoin, ces jeunes,
que la sagesse de leurs anciens ne se
perde pas!
Le monde d’aujourd’hui, pris par
le pragmatisme, a besoin de réapprendre la valeur de la gratuité!
Nous célébrons la certitude que
«le créateur ne nous abandonne pas;
[que] jamais il ne fait marche arrière
dans son projet d’amour, [qu’]il ne
se repend pas de nous avoir créés»
(Laudato si’, n. 13). Nous célébrons
le fait que Jésus Christ meurt encore
et ressuscite en chaque geste que
nous accomplissons envers le plus
petit de nos frères. Ayons à cœur de
continuer à être témoins de sa Passion, de sa Résurrection en donnant
chair à Li smantal Kajvaltike toj lek –
La loi du Seigneur qui redonne vie est
parfaite.
L’OSSERVATORE ROMANO
page 14
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Rencontre avec les familles au stade de Tuxtla Gutiérrez
Avec les rides
de l’amour
Des milliers de familles mexicaines se
sont rassemblées dans l’après-midi du
lundi 15 février, au stade Víctor
Manuel Reyna de Tuxtla Gutiérrez
pour une rencontre de fête et de
témoignage avec le Pape. Nous
publions ci-dessous le discours prononcé
par le Pape à cette occasion.
Chers frères et sœurs,
Je rends grâce à Dieu de me trouver
sur cette terre du Chiapas. Il est bon
de se trouver sur ce sol, il est bon de
se trouver sur cette terre, il est bon
se trouver en ce lieu qui, avec vous,
a un goût de famille, de foyer. Je
rends grâce à Dieu pour vos visages
et pour votre présence, je rends grâce à Dieu pour son émouvante présence dans vos familles. Et merci
également à vous, familles et amis,
qui nous avez offert vos témoignages, qui nous avez ouvert les portes
de vos maisons, les portes de vos
vies; vous nous avez permis d’être à
vos «tables» partageant le pain qui
vous nourrit et la sueur face aux dif-
ficultés quotidiennes. Le pain des
joies, de l’espérance, des rêves et la
sueur face aux amertumes, face à la
désillusion et aux chutes. Merci de
nous permettre d’accéder à vos familles, à votre table, à votre foyer.
Manuel, avant de te remercier
pour ton témoignage, je voudrais remercier tes parents, tous deux à genoux devant toi, te tenant le papier.
Avez-vous vu cette scène? Les parents à genoux devant leur fils qui
est malade. N’oublions pas cette scène. Certainement, de temps à autre,
ils se disputent, certainement. Quel
mari et quelle femme ne se disputent-ils pas? Surtout si la belle-mère
s’en mêle, mais peu importe! Cependant, ils s’aiment, et ils nous ont démontré qu’ils s’aiment et qu’ils sont
capables, en raison de l’amour qu’ils
ont l’un pour l’autre, de se mettre à
genoux devant leur fils malade.
Merci, chers amis pour ce témoignage que vous avez donné et allez de
l’avant! Merci! Et merci à toi, Manuel, pour ton témoignage et surtout pour ton exemple. L’expression
que tu as utilisée m’a plu: «y mettre
de l’enthousiasme» tout comme l’attitude que tu as adoptée après t’être
entretenu avec tes parents. Tu as
commencé à mettre de l’enthousiasme dans ta vie, à mettre de l’enthou-
siasme dans ta famille, à mettre de
l’enthousiasme dans les rangs de tes
amis et tu nous communiques de
l’enthousiasme à nous ici réunis.
Merci! Je crois que c’est ce que l’Esprit Saint veut toujours faire au milieu de nous: nous donner de l’enthousiasme, nous faire le don de raisons de continuer à compter sur la
famille, à rêver, à construire une vie
qui ait un goût de foyer, de famille.
Sommes-nous animés d’enthousiasme? (Ils répondent: Oui!). Merci!
Et c’est ce que Dieu le Père a toujours rêvé et ce pour quoi depuis
longtemps Dieu le Père a lutté.
Lorsque tout semblait perdu, cet
après-midi-là, au jardin d’Eden,
Dieu le Père a suscité l’enthousiasme
chez ce jeune couple et lui a dit que
tout n’était pas perdu. Et lorsque le
peuple d’Israël sentait qu’il n’en
pouvait plus sur le chemin à travers
le désert, Dieu le Père lui a donné
de l’enthousiasme par la manne. Et
lorsqu’est arrivée la plénitude des
temps, Dieu le Père a donné pour
toujours de l’enthousiasme à l’humanité
et nous a envoyé son
Fils.
De la même manière, nous tous ici présents, nous avons fait
cette expérience, à
bien des moments et
sous diverse formes,
Dieu le Père a donné
de l’enthousiasme à
notre vie. Pouvonsnous nous demander
pourquoi?
Parce qu’il ne sait
pas faire autrement.
Dieu notre Père ne
sait pas faire autrement que de nous aimer et de nous donner de l’enthousiasme, de nous encourager, de nous
pousser de l’avant, il ne sait pas faire
autrement, parce que son nom est
amour, son nom est don, son nom
est don de soi, son nom est miséricorde. Il nous l’a manifesté avec force et clarté en Jésus, son Fils qui a
tout donné jusqu’à l’extrême pour
rendre possible le Royaume de
Dieu. Un Royaume qui nous invite
à entrer dans cette nouvelle logique,
qui suscite une dynamique capable
d’ouvrir les cieux, capable d’ouvrir
nos cœurs, nos esprits, nos mains et
de nous stimuler par de nouveaux
horizons. Un Royaume qui sait ce
qu’est la famille, qui sait ce qu’est la
vie partagée. En Jésus et avec Jésus,
ce Royaume est possible. Il est capable de transformer nos regards, nos
attitudes, nos sentiments souvent fades en vin de fête. Il est capable de
guérir nos cœurs et de nous inviter
sans cesse, soixante-dix-sept fois à
recommencer. Il est capable de toujours renouveler toute chose.
Manuel, tu m’as demandé de prier
pour de nombreux adolescents qui
sont découragés et se trouvent dans
des situations difficiles. Nous le savons, n’est-ce pas? De nombreux
adolescents démoralisés, sans force,
sans enthousiasme. Et comme tu l’as
si bien dit, Manuel, souvent, cette
attitude naît du fait qu’ils se sentent
seuls, parce qu’ils n’ont pas avec qui
parler. Réfléchissez-y, chers pères, réfléchissez-y, chères mères: parlezvous avec vos fils et vos filles? Ou
bien vous êtes toujours occupés,
pressés? Jouez-vous avec vos fils et
vos filles? Et cela m’a rappelé le témoignage de Beatriz. Beatriz, vous
avez dit: «le combat a été toujours
difficile à cause de la précarité et de
la solitude». Que de fois t’es-tu sentie montrée du doigt, jugée, «cellelà». Pensons à toutes les personnes,
à toutes les femmes qui ont traversé
la même situation que Beatriz. La
précarité, la pénurie, le manque fréquent du minimum peuvent nous
désespérer, peuvent nous faire sentir
une forte angoisse, puisque nous ne
savons comment faire pour aller de
l’avant et d’autant plus que nous
avons des enfants à notre charge. La
précarité non seulement menace l’estomac (et c’est déjà beaucoup), mais
elle peut aussi menacer l’âme, elle
peut démotiver, ôter la force et tenter avec des parcours ou des alternatives de solution apparente mais qui,
en définitive, ne résolvent rien. Et
vous avez été courageuse, Beatriz,
merci. Il existe une précarité qui
peut être très dangereuse, qui peut
se coller à nous sans que nous ne
nous en rendions compte, c’est la
précarité qui naît de la solitude et de
l’isolement. Et l’isolement est toujours mauvais conseiller.
Manuel et Beatriz, sans s’en rendre compte, ont utilisé la même expression, tous deux nous montrent
comment souvent, la plus grande
tentation à laquelle nous sommes
confrontés est de «nous enfermer» et
loin de «mettre de l’enthousiasme»,
cette attitude, comme la mite qui
nous ronge l’âme, nous dessèche
l’âme peu à peu.
La manière de combattre cette
précarité et cet isolement, qui nous
rendent vulnérables à tant de solutions apparentes — comme celle que
Beatriz a mentionnée —, doit se situer à divers niveaux. D’une part, les
législations, qui protègent et garantissent le minimum nécessaire pour
que chaque famille et pour que
chaque personne puisse se développer par la formation et un travail digne, représentent un niveau. D’autre
part, comme le témoignage de Humberto et de Claudia l’ont si bien souligné, lorsqu’ils disaient qu’ils cherchaient la façon de communiquer
l’amour de Dieu qu’ils avaient expérimenté dans le service et dans le
don de soi aux autres. Des lois et un
engagement personnel sont un bon
binôme pour rompre la spirale de la
précarité. Et vous vous êtes donné
du courage, et vous priez, et vous
êtes avec Jésus, et vous êtes intégrés
dans la vie de l’Eglise. Vous avez
utilisé une belle expression: «Nous
nous unissons au frère faible, au malade, à celui qui est dans le besoin,
au prisonnier». Merci, merci!
De nos jours, nous voyons et nous
expérimentons à travers différents visages comment la famille est affaiblie, comment elle est remise en
question. Comment on croit que
c’est un modèle déjà dépassé et
n’ayant plus de place dans nos sociétés qui, avec la prétention de la
modernité, offrent toujours davantage un modèle fondé sur l’isolement.
Et on inocule, dans nos sociétés —
on parle de sociétés libres, démocratiques, souveraines — on inocule des
colonisations idéologiques qui les
détruisent et nous finissons par être
des colonies d’idéologies destructrices de la famille, du noyau familial,
qui est la base de toute société saine.
Certes, vivre en famille n’est pas
toujours facile, bien des fois c’est
douloureux et fatiguant mais, comme je l’ai dit plus d’une fois de
l’Eglise — je crois qu’on peut l’appliquer à la famille —: je préfère une famille blessée qui essaie tous les jours
de vivre l’amour, à une famille et à
une société malades de l’enfermement ou de la facilité de la peur
d’aimer. Je préfère une famille qui
essaie sans cesse de recommencer, à
une famille et une société narcissistes
et obnubilées par le luxe et le confort. Combien d’enfants as-tu?
«Non, nous n’en avons pas parce
que, évidemment, nous aimons aller
en vacances, faire du tourisme, je
veux acheter une maison de campagne». Le luxe ainsi que le confort; et
les enfant attendent et, lorsque tu
veux en avoir un, il est déjà trop
tard. Comme ça fait du mal, ça, eh!
Je préfère une famille au visage
épuisé par le don de soi, à une famille aux visages maquillés qui n’ont
pas su ce qu’est la tendresse et la
compassion. Je préfère un homme et
une femme, Monsieur Aniceto et son
épouse, aux visages ridés à cause des
luttes quotidiennes qui, après plus
de cinquante ans, continuent de s’aimer, et nous les voyons là; et leur
fils a appris la leçon, il est marié depuis vingt-cinq ans. Voilà des familles! Lorsque j’ai demandé, il y a
quelques instants, à Monsieur Aniceto et à son épouse qui a eu plus de
patience que l’autre durant ces cinquante ans: «Nous deux, mon Père». Car en famille, pour réaliser ce
qu’ils ont fait, il faut avoir de la patience, de l’amour, il faut savoir se
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numéro 7, jeudi 18 février 2016
L’OSSERVATORE ROMANO
page 15
Collecte annuelle
Le regard tourné vers la Terre Sainte
Nous publions la lettre envoyée le 10
février dernier aux évêques du monde
entier par le cardinal Leonardo Sandri
et par S.Exc. Mgr Cyril Vasil’, respectivement préfet et secrétaire de la Congrégation pour les Eglises orientales, à
l’occasion de la collecte annuelle pour
la Terre Sainte.
Le Vendredi Saint est le jour où le
mal semble vaincre, où l’Innocent a
souffert la mort sur la croix; un jour
qui ne paraît pas décliner sur la Terre Sainte qui continue à vivre un
temps infini de violence. Si notre regard s’élargissait au monde entier, il
ne réussirait également pas à donner
des ailes à l’espérance d’un avenir
serein.
Le cœur de l’homme, inquiet et
tourmenté, réclame lumière, vie, espérance; il veut marcher avec les autres, il cherche la fraternité et veut se
remettre en chemin, il a besoin de
voir au-delà de la réalité qui l’entoure, une réalité plus grande et plus
vraie: le renouvellement éternel d’un
salut déjà donné.
La collecte du Vendredi Saint rallume en nous cette espérance sûre,
ce regard profond et plus vrai sur le
mal qui nous entoure, et se tourne
vers la Terre Sainte, Orient de notre
rédemption. Là, sont nos racines, là,
est notre cœur: nous sommes débiteurs envers ceux qui, de là, sont
partis annoncer la foi au monde; débiteurs envers ceux qui sont demeurés là, malgré les conflits qui l’ont
tourmentée à témoigner la foi, à
prendre soin des empreintes laissées
par Jésus qui nous font toucher du
doigt la vérité de notre credo. Cette
Terre appelle notre charité, depuis
toujours et aujourd’hui avec une urgence plus prégnante, parce que toute personne qui vit et travaille là a
besoin de nos prières et de notre aide concrète pour être soutenue dans
son engagement à panser les blessures tout en continuant à promouvoir
la justice et à œuvrer pour la paix.
En cette année jubilaire, nous
sommes plus que jamais exhortés à
manifester notre miséricorde et notre
proximité à nos frères du MoyenOrient. Les réfugiés, les personnes
âgées, les enfants et les malades ont
besoin de nous. Dans cette terre
d’Orient, on est tué, on meurt, on
est enlevé, on vit dans l’angoisse
pour les êtres chers, on souffre
quand la famille est dispersée par
l’émigration et par les exodes. On
expérimente la peur de l’abandon,
de la solitude et de l’incompréhension: temps d’épreuves et de défis, temps du martyre. Et tout cela se
répercute sur le devoir d’aider, de
faire face aux urgences, de reconstruire, de trouver des espaces, de
nouveaux modes et des lieux d’agrégation
ainsi
que
d’assistance.
Œuvres de miséricorde, nécessaires
et urgentes qui, quotidiennement
Un camp de réfugiés en Jordanie
font toucher du doigt que «si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain» (Ps 126).
Le Vendredi Saint se vit accrochés
à la Croix, mais soutenus par la lumière de la Résurrection. La Terre
Sainte est le lieu du dialogue, habitée par des hommes qui n’arrêtent
pas de songer à construire des
ponts, dans laquelle vivent des communautés chrétiennes où l’Evangile
de la paix est proclamé. Terre de
l’«œcuménisme du sang» et en même temps, Terre d’une extraordinaire
normalité.
«Nous ne pouvons pas rester indifférents: Dieu n’est pas indifférent!
Dieu s’intéresse à l’humanité, Dieu
ne l’abandonne pas!» (Pape François). Cela s’exprime dans le geste
de tendre la main pour offrir généreusement sa contribution et de ne
pas avoir peur de continuer les pèlerinages aux Lieux Saints de notre
salut, mais aussi de chercher à y visiter les écoles et les centres d’assistance, lieux privilégiés pour se faire
proches des chrétiens locaux en
écoutant leur témoignage.
La collecte pour la Terre Sainte
nous renvoie à un devoir «antique»
que l’histoire de ces dernières années
a rendu plus urgent, mais qui nous
donne la joie d’aider nos frères.
Je vous assure de la reconnaissance du Saint-Père François et de la
Congrégation pour les Eglises orientales qui accompagne nos frères
d’Orient d’un soin attentif, en vous
demandant de l’étendre à tous les fidèles de votre Eglise particulière.
Soutien aux Eglises et aux institutions
La collecte pour la Terre Sainte est
réglementée par des dispositions
spécifiques qui en établissent l’assignation à la Custodie franciscaine en
premier, qui est chargée du maintien
des sanctuaires nés sur les Lieux
Saints, ainsi que des structures pastorales, éducatives, d’assistance, médicales et sociales, qui permettent la
vie des paroisses et des organismes
ecclésiaux les plus divers qui les entourent, afin que des communautés
vives et actives en constituent la sauvegarde la plus évangélique.
Une contribution annuelle est allouée à l’assemblée des ordinaires de
Terre Sainte, en vue de l’engagement
indispensable de coordination et de
promotion de la présence ecclésiale.
Aux autres communautés ecclésiales catholiques, tant latines qu’orientales, des diverses traditions (Eglises
patriarcales, métropolies, éparchies
et exarchats; diocèses latins et vicariats apostoliques), ainsi qu’à de
nombreuses familles religieuses masculines et féminines de grand mérite
ont été assignées des contributions
ordinaires et extraordinaires pour les
mêmes finalités.
Les territoires qui bénéficient sous
diverses formes et de diverses natures d’un soutien provenant de la collecte sont: Jérusalem, la Palestine et
Israël, Jordanie, Chypre, Syrie, Li-
ban, Egypte, Ethiopie et Erythrée,
Turquie, Iran et Irak.
Parmi les subventions extraordinaires, figure la contribution à des
institutions locales ecclésiastiques et
civiles, pour des projets en faveur
des besoins locaux et des projets de
logements qui offrent aux jeunes
foyers familiaux la possibilité de demeurer en Terre Sainte. Le montant
total des subventions susmentionnées s’élève à 2.086.203,00 $ US.
Un réseau scolaire étendu, en particulier à travers les paroisses, favorise un niveau de scolarisation vaste et
qualifié, qui est très apprécié au niveau œcuménique et interreligieux,
comme l’atteste le pourcentage important de fréquence de la part
d’étudiants provenant d’autres Eglises et communautés ecclésiales chrétiennes et de la population musulmane.
Le diocèse patriarcal de Jérusalem
et la Custodie franciscaine assurent
depuis longtemps un engagement
admirable dans ce domaine, grâce à
l’aide provenant de la collecte, qui
est suivie par des organismes propres.
Un secrétariat de solidarité a été
mis en place, chargé de coordonner
le soutien aux institutions scolaires
gérées par les autres communautés
catholiques et par les instituts religieux.
L’une des prestigieuses institutions
qui contribue dans une très grande
mesure à la formation intellectuelle
et humaine des jeunes est la BethlehemUniversity. La Congrégation
pour les Eglises orientales offre une
contribution annuelle importante à
cette université. Le montant total des
contributions pour les activités scolaires s’élève à 2.600.000,00 $ US.
Grâce à la collecte, il est possible
d’allouer des contributions aux séminaires, aux maisons de formation religieuses et aux institutions culturelles dans les territoires indiqués, en
soutenant sous diverses formes (pour
plusieurs d’entre elle à travers des
bourses d’étude incluant les frais de
logement et de nourriture, les frais
universitaires et toute autre nécessité
médicale) à Rome également, où étudient de jeunes séminaristes et prêtres, des religieux et religieuses et,
selon les fonds disponibles, certains
laïcs provenant de la région du
Moyen-Orient, qui y retourneront,
en particulier comme futurs formateurs. Au cours des dernières années,
en raison de la délicate conjoncture
économique internationale, s’est fait
jour le problème d’un soutien particulier aux familles chrétiennes ellesmêmes; qui ont toujours plus de difficultés à garantir leur participation à
la gestion administrative des écoles
catholiques.
Dans la mesure du possible une
attention est réservée aux urgences
et en 2015, des sommes ont été
allouées pour la Syrie et l’Irak, avec
une attention particulière pour les
réfugiés de ces pays qui vivent en
Jordanie et au Liban.
Pour les diverses urgences ont été
accordées des aides qui s’élèvent à
1.204.171,00 $ US.
La Congrégation pour les Eglises
orientales avec d’autres contributions
offertes par l’Eglise universelle et par
des bienfaiteurs individuels, et avec
l’engagement louable des agences catholiques internationales, fournit des
subventions ordinaires et extraordinaires à toutes les autres Eglises
orientales catholiques du monde,
tant dans leur pays d’origine que
dans la diaspora. Au niveau de la
formation, uniquement à Rome, elle
contribue au soutien de l’institut
pontifical oriental, institution académique supérieure avec ses deux facultés de sciences ecclésiastiques
orientales et de droit canonique
oriental, dont le cardinal-préfet du
dicastère est le grand chancellier, et
environ 400 étudiants dans les huit
institutions de formation gérées directement par des bourses d’étude
complètes, intervenant ensuite par
des contributions partielles à des étudiants auprès d’autres structures culturelles.
L’OSSERVATORE ROMANO
page 16
Jeudi
28 janvier
Messes
à Sainte-Marthe
Sans mesure
Le thème du témoignage, entendu
comme élément fondateur de la vie
du chrétien, a été au centre de la réflexion du Pape François. Mais que
doit caractériser ce témoignage? Le
Pape a tiré la réponse directement
de l’Evangile du jour, en reprenant
le passage de Marc (4, 21-25), qui
suit immédiatement la «parabole du
grain». Jésus «nous parle de la lampe» qui n’est pas placée sous le
boisseau, mais sur le lampadaire.
Une lumière, a-t-il ajouté, qui ne
peut être cachée, mais qui sert
«pour illuminer». Voilà donc «l’un
des traits du chrétien, qui a reçu la
lumière dans le baptême et doit la
donner». Le chrétien «est un témoin». Le mot «témoignage» renferme précisément «l’une des particularités des comportements chrétiens». En effet: «Un chrétien qui
apporte cette lumière, doit la faire
voir parce qu’il est un témoin». Et si
un chrétien «préfère ne pas faire voir
la lumière de Dieu et préfère ses
propres ténèbres», alors «il lui manque quelque chose et ce n’est pas un
chrétien complet». Une partie de lui
est occupée, les ténèbres «entrent
dans son cœur, parce qu’il a peur de
la lumière» et il préfère «les idoles».
Mais le chrétien «est un témoin», témoin de «Jésus Christ, lumière de
Dieu. Et il doit placer cette lumière
sur le candélabre de sa vie». Dans le
passage évangélique proposé par la
liturgie, on parle aussi «de la mesure» et on lit: «De la mesure dont
vous mesurez, on mesurera pour
vous, et on vous donnera encore
plus». Voilà «l’autre particularité,
l’autre attitude propre» au chrétien.
Il est fait référence, en effet, à la magnanimité: «Un autre trait du chrétien est la magnanimité, parce qu’il
est fils d’un père magnanime, à
l’âme grande». Même lorsqu’il dit:
«Donnez, et il vous sera donné», la
mesure dont parle Jésus est «pleine,
bonne, débordante». De la même façon, «le cœur chrétien est magnanime. Il est toujours ouvert». Et il a
poursuivi: «Lorsque tu entres dans
cette lumière de Jésus, quand tu entres dans l’amitié de Jésus, quand tu
te laisses guider par l’Esprit Saint, le
cœur devient ouvert, magnanime».
Dès lors s’instaure une dynamique
particulière: le chrétien «ne gagne
pas, il perd». Mais en réalité, «il
perd pour gagner autre chose, et
avec cet “échec” d’intérêts, il gagne
Jésus, il gagne en devenant témoin
de Jésus». Pour traduire en termes
concrets sa réflexion, François s’est
alors adressé à un groupe de prêtres
qui célébraient le jubilé d’or de leur
ordination: «Cinquante ans sur la
voie de la lumière et du témoignage» et, «en cherchant à être meilleurs, en cherchant à apporter la lumière sur le candélabre»; une lumière qui, telle est l’expérience de tous,
«parfois tombe», mais qu’il est toujours bon de chercher à reproduire
«généreusement, c’est-à-dire avec un
cœur magnanime». Et, en remerciant les prêtres pour ce qu’ils ont
fait «dans l’Eglise, pour l’Eglise et
pour Jésus», et en leur souhaitant la
«grande joie d’avoir bien semé,
d’avoir bien illuminé et d’avoir ouvert les bras pour recevoir tous avec
magnanimité», le Pape leur a également dit: «Seuls Dieu et votre mémoire savent combien de personnes
vous avez reçues avec magnanimité,
avec une bonté de pères, de frères»
et «à combien de personnes qui
avaient le cœur un peu obscur vous
avez donné la lumière de Jésus».
Parce que, a-t-il dit en concluant son
raisonnement, «dans la mémoire
d’un peuple» demeurent «la semence, la lumière du témoignage et
la magnanimité de l’amour qui accueille».
Vendredi
29 janvier
Du péché à la corruption
Une prière pour toute l’Eglise, afin
qu’elle ne tombe jamais du péché à
la corruption, a été reproposée par le
Pape durant la Messe. En se référant
à la première lecture — extraite du livre de Samuel (11, 1-4.5-10.13-17) —
François a tout de suite fait remarquer: «Nous avons écouté ce péché
de David, ce grave péché du saint
roi David. Car David est saint, mais
aussi pécheur, il a été pécheur». Le
récit biblique, «nous fait voir un David un peu à son aise, un peu tranquille, pas dans le bon sens du terme». Si bien qu’«un jour, en fin
d’après-midi, après la sieste, tandis
qu’il faisait sa promenade sur la terrasse du palais, il voit cette femme et
éprouve de la passion, la tentation
de la luxure et tombe dans le péché». La femme était Bethsabée,
femme d’Urie le Hittite. Il s’agit
donc d’«un péché». Et Dieu «aimait
beaucoup David». Par la suite, «les
choses se sont compliquées car,
après quelque temps, la femme lui
fait savoir qu’elle est enceinte». Son
mari «combattait pour le peuple
d’Israël, pour la gloire du peuple de
Dieu». Tandis que «David a trahi la
loyauté de ce soldat pour la patrie, il
a trahi la fidélité de cette femme à
l’égard de son mari et est tombé très
bas». Et «quand il a su que la femme était enceinte qu’a-t-il fait? Est-il
allé prier, demander pardon?». Il a
convoqué «le mari de la femme et
l’a fait se sentir important». Et en le
remerciant, «il lui a fait remettre un
joli cadeau», en lui recommandant
d’aller chez lui se reposer. De cette
façon, David voulait couvrir l’adultère: ce fils aurait été le fils du mari de
Bethsabée». Mais «cet homme, Urie
était une personne noble d’esprit, il
avait beaucoup d’amour et ne rentra
pas chez lui: il pensa à ses compagnons, il pensa à l’arche de Dieu
sous les tentes, parce qu’ils portaient
l’arche, et passa la nuit avec ses
compagnons, avec les serviteurs, et
n’alla pas tout de suite chez sa femme». Ainsi, «quand l’on avertit David — car tout le monde connaissait
l’histoire, les bruits courent — imaginez un peu!». Alors, «David l’invita
à manger et à boire avec lui, en lui
demandant — et ici le texte est un
peu réduit — “mais pourquoi n’es-tu
pas allé chez toi?”». Et la réponse
de l’homme fut: «Pourrais-je me
permettre, alors que mes compagnons sont sous les tentes, l’arche de
Dieu est sous une tente, en lutte
contre l’ennemi, d’aller chez moi
manger, boire, et me reposer auprès
de ma femme? Non! Je ne peux pas
faire cela». Et ainsi «écrivit-il une
lettre, comme nous l’avons entendu:
“Mettez Urie au commandement,
sur le front de la bataille la plus dure, puis écartez-vous de lui, afin
qu’il soit frappé et meure”». En un
mot, il s’agit d’une «condamnation à
mort: cet homme, fidèle — fidèle à la
loi, fidèle à son peuple, fidèle à son
roi — est condamné à mort». «Je me
demande en lisant ce passage: où est
passé ce David, jeune homme courageux qui va vers le Philistin avec sa
fronde et les cinq pierres et lui dit:
“Ma force est le Seigneur”». La réalité est que «cet homme a changé,
cet homme s’est ramolli». Et «il me
vient à l’esprit un passage du prophète Ezéchiel, chapitre 16, verset 15,
quand Dieu parle à son peuple comme un époux à sa femme, et dit:
“Mais après que je t’ai donné tout
cela, tu t’infatues de ta beauté et en
profitant de ta réputation, tu t’es
prostituée. Tu t’es sentie sûre et tu
m’as oublié”». Et c’est précisément
ce qui s’est passé avec David à ce
moment-là». «C’est un moment
dans la vie de David que nous pourrions appliquer à la nôtre: c’est le
passage du péché à la corruption».
Ici, «David commence, il fait le premier pas vers la corruption: il obtient le pouvoir, la force». C’est
pour cela que «la corruption est un
péché plus facile pour nous tous qui
avons un pouvoir, que ce soit un
pouvoir ecclésiastique, religieux, économique, politique». Mais «le Seigneur aimait tant David, tellement
qu’il envoya quelqu’un refléter son
âme: il envoya le prophète Nathan
pour refléter son âme; et il s’est repenti, il a pleuré — “j’ai péché” — et
il s’en rendit compte». «Je voudrais
aujourd’hui souligner seulement cela: il y a un moment où l’habitude
du péché ou un moment où notre situation est tellement sûre, où nous
sommes bien vus et avons un grand
pouvoir, beaucoup d’argent, je ne
sais pas, tant de choses». Cela peut
également «nous arriver à nous, prêtres: si bien que le péché cesse d’être
péché et devient corruption. Le Seigneur pardonne toujours. Mais une
jeudi 18 février 2016, numéro 7
des choses les plus laides de la corruption est que le corrompu n’a pas
besoin de demander pardon, il ne le
ressent pas». Le Pape a ensuite invité à prier: «Seigneur, sauve-nous,
sauve-nous de la corruption. Pécheurs oui, Seigneur, nous le sommes tous, mais corrompus, jamais!».
Lundi
1er février
Il n’y a pas d’humilité
sans humiliation
Il n’y a pas d’humilité et il n’y a pas
de sainteté sans passer à travers la
voie de l’humiliation: telle est la vérité que François a reproposée, en
rappelant l’histoire de David. «Dans
la première lecture, on poursuit l’histoire du roi David, le saint roi David» (2 S 15, 13-14,30; 16, 5-13), a dit
le Pape en se référant au passage tiré
du second livre de Samuel. «Comme
nous l’avons entendu l’autre jour,
David est à un pas de tomber dans
la corruption». Ainsi, «le saint roi
David, pécheur mais saint, devient
corrompu». Mais voilà que «le prophète Nathan, envoyé par Dieu», lui
fait «comprendre quelle vilaine chose il avait faite, une mauvaise chose:
car un corrompu ne s’en rend pas
compte». Voilà les paroles de Nathan: «Le Seigneur pardonne ton
péché, mais la corruption que tu as
semée grandira. Tu as tué un innocent pour couvrir un adultère.
L’épée ne s’éloignera jamais de ta
maison». Donc, «Dieu pardonne le
péché, David se convertit, mais les
blessures d’une corruption guérissent
difficilement. Nous le voyons dans
de nombreuses parties du monde».
«Dieu infligea un dur châtiment à
David: “L’épée ne s’éloignera jamais
de ta maison”», a rappelé le Pape.
Mais «lui, il défend sa maison et
s’enfuit, il s’en va». Est-ce alors «un
lâche? Non, c’est un père». Et «il
laisse l’arche repartir», il ne se met
pas à «utiliser Dieu pour se défendre». En somme, David «s’en va
pour sauver son peuple: telle est la
route de sainteté que David, après le
moment où il était entré dans la corruption, commence à parcourir». Ce
passage biblique nous présente David alors qu’il gravit, en pleurant, la
montée des Oliviers. Il avait «la tête
voilée», en signe de deuil, et il marchait pieds nus. Il faisait pénitence.
L’Ecriture nous fait également savoir
que «certaines personnes qui ne l’aimaient pas, commencèrent à le suivre et à l’insulter». Parmi celles-ci se
trouve Shiméï, qui l’appelle le «sanguinaire», lui rappelant «le crime
qu’il avait commis contre Urie le
Hittite pour couvrir son adultère».
Abishaï, l’une des personnes les plus
proches de David, «veut le défendre» et voudrait couper la tête à
Shiméï pour le faire taire. Mais David accomplit «un pas de plus: “Si
cet homme me maudit, c’est parce
que le Seigneur lui a dit: maudis
D avid!”». La question est que «David sait voir les signes: c’est le moment de son humiliation, c’est le
moment où il paye sa faute». Au
point qu’il dit: «Peut-être le SeiSUITE À LA PAGE 17
numéro 7, jeudi 18 février 2016
SUITE DE LA PAGE 16
gneur regardera-t-il mon affliction et
me rendra-t-il le bien en échange de
la malédiction d’aujourd’hui». En
substance, «il se remet entre les
mains du Seigneur: cela est le parcours de David, du moment de la
corruption à cette remise entre les
mains du Seigneur. Et cela est la
sainteté. Cela est l’humilité». «L’humilité ne peut arriver à un cœur
qu’à travers les humiliations: il n’y a
pas d’humilité sans humiliations».
Et «si tu n’es pas capable de supporter une humiliation dans ta vie,
tu n’es pas humble. C’est ainsi: je
dirais que c’est si mathématique, si
simple!». C’est pourquoi, «l’unique
voie pour l’humilité est l’humiliation». Donc, «l’objectif de David,
qui est la sainteté, vient à travers
l’humiliation». Même «l’objectif de
la sainteté que Dieu offre à ses enfants, offre à l’Eglise, vient à travers
l’humiliation de son Fils qui se laisse
insulter, qui se laisse mettre sur la
croix, injustement». Et «ce Fils de
Dieu qui s’humilie, est la route de la
sainteté: David, par son attitude,
prophétise cette humiliation de Jésus».
Jeudi
4 février
Le meilleur héritage
«La foi est le plus grand héritage
qu’un homme puisse laisser». Et
précisément la foi nous invite à «ne
pas avoir peur de la mort», qui est
seulement le début d’une autre vie.
Tel est le point central de la réflexion proposée par le Pape. «Au
cours de ces semaines, dans la liturgie, l’Eglise nous a fait réfléchir sur
le saint roi David». Et «aujourd’hui,
elle nous raconte sa mort» (2, 1-41012). «Dans un village du nord de
L’OSSERVATORE ROMANO
l’Italie», précisément «à l’entrée
d’un cimetière, il y a écrit: “Toi qui
passes ici, arrête ton pas, et penses à
tes pas au moment de ton dernier
pas”». Penser, donc: «C’est une lumière qui illumine la vie». Et «la vie
de David a été une vie vécue avec
intensité, puis quand il s’est senti
sûr, il a commencé à pécher et il est
presque, presque tombé dans la corruption». Mais David «s’est ensuite
repenti, il a pleuré, il a péché une
autre fois. C’est ainsi. Mais il a appris à demander pardon pour ses péchés. Et l’Eglise dit: le saint roi David. Pécheur, mais saint». «C’est une
réalité que nous devons avoir toujours devant nous». «Lors de l’une
des audiences du mercredi, il y avait
parmi les malades une sœur âgée,
mais avec un visage pacifique, un regard lumineux». François lui a demandé quel âge elle avait. Et la religieuse a répondu avec un sourire:
«Quatre-vingt trois, mais je suis sur
le point de finir mon parcours dans
cette vie pour commencer l’autre
parcours avec le Seigneur, car j’ai un
cancer au pancréas». Et «ainsi, en
paix, cette femme avait vécu avec intensité sa vie consacrée. Elle n’avait
pas peur de la mort», au point de
dire: «Je finis mon parcours de vie,
et je vais commencer l’autre». Parce
que la mort «est un passage» et «ces
témoignages nous font du bien».
«Lorsque l’on est sur le point de
mourir, la coutume est de laisser un
testament». C’est ce que fait David
aussi en appelant «son fils Salomon». Et «que lui conseille-t-il?
Que laisse-t-il en héritage à son
fils?». Il lui dit: «Sois fort et montre
que tu es un homme». En substance, David reprend ce que le Seigneur
a dit à Moïse, à Josué: sois fort, sois
un homme; observe la loi du Seigneur ton Dieu, en poursuivant sur
ses voies et en accomplissant les lois,
ses commandements, ses normes,
l’instruction, comme il a écrit dans
la loi de Moïse». David aussi «conseille cela» à Salomon. Et «que lui
laisse-t-il en héritage? Il lui laisse un
royaume, un royaume fort». Mais «il
laisse autre chose, qui est l’héritage
plus beau et plus grand qu’un homme ou une femme puisse laisser à
ses enfants: il lui laisse sa foi». Et
«David fait mémoire des promesses
de Dieu, fait mémoire de sa foi dans
ces promesses et les rappelle à son
fils: laisser sa foi en héritage».
«Quand, dans le rite du baptême,
nous donnons la bougie allumée, la
lumière de la foi, nous disons: “Garde-la, conserve-la, fais-la croître dans
ton fils et dans ta fille, et laisse-la en
héritage”». Donc, «laisser la foi
comme héritage: c’est ce que nous
enseigne David. Et il meurt ainsi,
simplement, comme tout homme».
Dans cette perspective, «nous demandons au Seigneur deux choses».
Avant tout, de «ne pas avoir peur de
ce dernier pas, comme la sœur de
l’audience de mercredi». Et la
deuxième chose à demander au Seigneur est «que nous puissions tous
laisser, avec notre vie, comme meilleur héritage, la foi dans ce Dieu fidèle, ce Dieu qui est toujours à nos
côtés, ce Dieu qui est Père et qui ne
déçoit jamais».
Vendredi
5 février
Diminuer, diminuer,
diminuer
Jean-Baptiste, «le plus grand des
prophètes», nous enseigne une règle
fondamentale de la vie chrétienne:
nous faire petits avec humilité pour
que ce soit le Seigneur qui grandisse. C’est le «style de Dieu», différent du «style des hommes». Marc,
dans le passage évangélique d’aujourd’hui (6, 14-29), écrit «que les
gens parlaient de Jésus parce que
“son nom était devenu célèbre”». En
somme, «tous parlaient» et se demandaient qui il était vraiment.
Messe avec les familles au Mexique
SUITE DE LA PAGE 14
pardonner. «Mon Père, une famille
parfaite ne se dispute jamais». Ce
n’est pas vrai, il faut que vous vous
disputiez de temps en temps et que
quelque vaisselle vole; c’est normal,
n’ayez pas peur de cela. L’unique
conseil, c’est que vous ne terminiez
pas la journée sans faire la paix, car
si vous terminez la journée en guerre, vous vous réveillerez en guerre
froide, et la guerre froide est très
dangereuse en famille, parce qu’elle
sape par-dessous les rides de la fidélité conjugale. Merci pour le témoignage de vous aimer pendant
plus de cinquante ans. Merci beaucoup!
Et parlant de rides — pour changer un peu de thème — je me souviens du témoignage d’une grande
actrice — actrice latino-américaine
du cinéma — lorsque à presque 60
ans, elle commence à avoir un visage ridé et on lui a conseillé un
«nettoyage», «un petit nettoyage»
pour pouvoir continuer à bien travailler; sa réponse a été claire: «Ces
rides m’ont coûté beaucoup de tra-
vail, beaucoup d’effort, beaucoup
de douleur et une vie pleine, même
dans le rêve je ne veux pas m’en
débarrasser, ce sont les traces de
mon histoire». Et elle a continué à
être une grande actrice. Il se passe
la même chose dans le mariage. La
vie matrimoniale doit se renouveler
tous les jours. Et comme je l’ai dit
auparavant, je préfère des familles
ridées, avec des blessures, avec des
cicatrices mais qui continuent d’aller de l’avant, parce que ces blessures, ces cicatrices, ces rides sont le
fruit de la fidélité d’un amour qui
ne leur pas été toujours facile.
L’amour n’est pas facile, il n’est pas
facile, non, mais c’est la plus belle
chose qu’un homme et une femme
puissent se donner l’un à l’autre, le
vrai amour, pour toute la vie.
Vous m’avez demandé de prier
pour vous et je voudrais commencer à le faire maintenant même..
Chers Mexicains, vous avez un
atout, vous avez un avantage. Vous
avez une mère; la Guadalupana, la
Guadalupana a voulu visiter cette
terre et cela nous donne la certitude
de bénéficier de son intercession
pour que ce rêve appelé famille ne
se perde pas à cause de la précarité
et de la solitude. Elle est mère et
elle est toujours prête à défendre
nos familles, à défendre notre avenir, elle est toujours prête à «mettre
de l’enthousiasme», en nous donnant à son Fils. Voilà pourquoi je
vous invite, comme vous êtes, sans
bouger beaucoup, à vous tenir par
les mains et à lui dire ensemble:
«Je vous salue Marie...».
Et n’oublions pas saint Joseph,
silencieux, travailleur, mais toujours
au front, protégeant la famille.
Merci, que Dieu vous bénisse; et
priez pour moi.
Et maintenant, je voudrais vous
exhorter, dans ce cadre de fête familiale, à ce que les couples ici présents, en silence, renouvellent les
promesses faites lors de leurs mariages. Et ceux qui sont fiancés, qu’ils
demandent la grâce d’une famille
fidèle et pleine d’amour. En silence,
renouveler les promesses faites lors
du mariage, et les fiancés demander
la grâce d’une famille fidèle et pleine d’amour.
page 17
Alors que le roi Hérode, écrit toujours Marc, était «craintif, angoissé»,
également parce qu’il était «hanté
par le fantôme de Jean» qu’il avait
fait tuer. C’est précisément «dans ce
cadre que l’évangéliste raconte la fin
de Jean-Baptiste, “le plus grand
homme né d’une femme” comme le
dit la formule de canonisation». Et
«cette formule ce n’est pas le Pape
qui l’a dite: Jésus l’a dite!». Vraiment, Jean «est le plus grand homme né d’une femme, le saint le plus
grand: Jésus l’a canonisé ainsi».
Mais Jean «finit en prison, décapité». Et «la dernière phrase» du passage évangélique d’aujourd’hui semble également contenir une note de
«résignation»: «Les disciples de
Jean l’ayant appris, vinrent prendre
son cadavre et le mirent dans un
tombeau». Et c’est ainsi que «finit
“le plus grand homme né d’une femme”: un grand prophète, le dernier
des prophètes, le seul auquel il a été
permis de voir l’espérance d’Israël».
Oui, «le grand Jean qui a appelé à
la conversion: tout le peuple le suivait et lui demandait “que devonsnous faire?”». Il était aussi suivi par
«les soldats, tous allaient à sa suite
pour se faire baptiser, demander pardon, au point que les docteurs de la
loi sont allés lui poser une question:
“Es-tu celui que nous attendons?».
La réponse de Jean est claire: «Non,
non: ce n’est pas moi. Il y en a un
autre qui vient après moi: c’est lui.
Je suis seulement la voix qui crie
dans le désert». Vraiment, «Jean est
grand». Grand quand il dit ne pas
être celui qui est attendu: en particulier «cette phrase est son destin, son
programme de vie: “Lui, celui qui
vient après moi, doit grandir; moi,
en revanche, diminuer”». C’est précisément «ainsi qu’a été la vie de
Jean: diminuer, diminuer, diminuer
et finir de cette manière si prosaïque,
dans l’anonymat». Voilà, Jean a été
«un grand qui n’a pas cherché sa
propre gloire, mais celle de Dieu».
Mais cela ne finit pas là. Jean «a
aussi souffert en personne de la torture intérieure du doute». Au point
qu’«il a envoyé ses disciples demander à Jésus: “Dis la vérité: est-ce toi
qui dois venir?”». Evidemment, «ce
doute le faisait souffrir» et il se demandait: «Me suis-je trompé en annonçant celui qui n’est pas? Ai-je
trompé le peuple?”». Grande a été
«la souffrance, la solitude intérieure
de cet homme». C’est ainsi que reviennent, dans toute leur force, ses
paroles: «Moi, en revanche, je dois
diminuer, mais diminuer ainsi: dans
l’âme, dans le corps, dans tout». Au
doute de Jean, «Jésus répondit: “Regarde ce qui arrive”. Et il a confiance, il ne dit pas: “C’est moi”. Il dit:
“Allez rapporter à Jean ce que vous
avez vu”. Il donne aussi des signes,
et il le laisse seul avec le doute et
l’interprétation des signes». Voilà,
«il est le grand prophète». Mais,
toujours à propos de Jean, «il y a
une dernière chose qui nous laisse à
penser: avec ce comportement de
“diminuer” pour que le Christ puisse
“grandir”, il a préparé la route à Jésus. Et Jésus mourut dans l’angoisse,
seul, sans les disciples». La «grande
gloire» de Jean est donc d’avoir été
«prophète non seulement dans ses
paroles, mais dans sa chair: à travers
sa vie, il a préparé la route à Jésus.
C’est un grand homme!».
L’OSSERVATORE ROMANO
page 18
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Collège épiscopal
Nominations
Le Saint-Père a nommé:
27 janvier
le p. ADILSON PEDRO BUSIN, C.S.,
membre de la Congrégation des missionnaires de Saint-Charles (scalabriniens) jusqu’à présent vicaire régional de la région d’Amérique du Sud
avec siège à Porto Alegre: évêque
auxiliaire de l’archidiocèse de Porto
Alegre (Brésil) lui assignant le siège
épiscopal de Guardialfiera (Italie).
Né le 20 mai 1965 à Sarandi, dans
l’archidiocèse de Passo Fundo, dans
l’Etats de Rio Grande do Sul (Brésil), il a étudié la philosophie à
l’université de Caxias do Sul (19861987) et la théologie à l’institut de
théologie de São Paulo (1989-1993).
Il a obtenu ensuite une licence en
sciences de l’éducation à l’université
pontificale salésienne de Rome
(1996-1999). Il a effectué sa profession religieuse chez les missionnaires
scalabriniens le 31 mai 1992 et a été
ordonné prêtre le 9 janvier 1993.
Dans sa congrégation, il a été animateur vocationnel et recteur du petit séminaire à Ciudad del Este, au
Paraguay (1992-1995); maître des novices à Porto Alegre (2001-2007) et
supérieur provincial (2007-2013). Il
est actuellement vicaire de la région
d’Amérique du Sud, président de
l’association scalabrinienne pour le
service des migrants et maître des
novices.
28 janvier
le p. JOSÉ HIRAÍS ACOSTA BELTRÁN,
administrateur diocésain de Huejutla
(Mexique): évêque de Huejutla
(Mexique).
Né le 22 septembre 1966 à Pezmatlán, dans l’Etat de Hidalgo
(Mexique), il a effectué des études
ecclésiastiques au séminaire régional
de Nuestra Señora de Guadalupe à
Tula et a obtenu une licence de philosophie à l’université pontificale de
Mexico. Ordonné prêtre pour le
diocèse de Huejutla le 11 juin 1993, il
a été vicaire paroissial, vice-recteur
du petit séminaire, professeur et formateur au grand séminaire, défenseur du lien au tribunal diocésain,
membre du collège des consulteurs
et administrateur du diocèse.
Mgr LUIGI MANSI, du clergé du
diocèse de Cerignola-Ascoli Satriano
(Italie), jusqu’à présent président national de l’Union apostolique du
clergé: évêque d’Andria (Italie).
Né à Cerignola, dans la province
de Foggia (Italie), le 6 mai 1952, il a
reçu l’ordination sacerdotale le 29
juin 1975, et a été incardiné dans le
diocèse de Cerignola-Ascoli Satriano. Il a été vice-directeur du séminaire épiscopal de Foggia, recteur du
séminaire diocésain de CerignolaAscoli Satriano, responsable de la
pastorale des vocations, directeur et
professeur des vocations, directeur et
professeur de matières théologiques
à l’institut diocésain des sciences religieuses et à l’institut supérieur de
sciences religieuses de l’université
pontificale du Latran, enseignant de
religion catholique, cérémoniaire
épiscopal, curé du sanctuaire de la
bienheureuse Vierge de Ripalta. En
outre, de 1995 à 2006, il a été curé
de San Rocco à Stornara et de 2006
à 2014, directeur spirituel du séminaire pontifical régional Pie XI de
Molfetta. Depuis 1998, il est assistant diocésain unitaire de l’Action
catholique. Depuis 2011, il est vicaire
épiscopal pour la pastorale et membre du conseil épiscopal, du conseil
presbytéral et du collège des consulteurs. Depuis 2013, il est également
président national de l’Union apostolique du clergé.
pour la formation dans la région
d’Amérique latine (2006); assistant
du maître des novices au noviciat international des Missionnaires oblats
de Marie Immaculée Mauricio Lefebvre à Asunción, au Paraguay
(2008-2011). Il était actuellement vicaire épiscopal du vicariat III de l’archidiocèse de Huancayo, curé de
San Francisco de Asís à Orcotuna et
d’El Señor de la Ascensión à Mito,
archidiocèse de Huancayo, et coordinateur de la commission justice et
paix et intégrité de la création de la
délégation des Missionnaires oblats
de Marie Immaculée au Pérou.
30 janvier
le père VIRGILIO D O CARMO DA
SILVA, S.D.B., provincial des salésiens
au Timor oriental: évêque du diocèse de Dili (Timor oriental).
Né le 27 novembre 1967 à Venilale, dans le diocèse de Baucau (Timor oriental), après avoir fréquenté
les écoles primaires et secondaires
des salésiens à Fatumaca, il est entré
dans la Société salésienne de saint
Jean Bosco. Envoyé à Manille pour
étudier la philosophie et la théologie, il a prononcé sa première profession chez les salésiens le 31 mai
1990 et la profession perpétuelle le
19 mars 1997. Ordonné prêtre le 18
décembre 1998, il a été formateur
des novices (1999-2004), économe de
la maison de formation à Venilale et
vicaire paroissial (2004-2005). De
2005 à 2007, il a accompli ses études
à Rome, obtenant une licence en
spiritualité à l’université pontificale
salésienne. Il a ensuite été maître des
novices (2007-2014) et directeur de
la maison des salésiens et de la Don
Bosco Technical High School à Fatumaca (2009-2014). Depuis 2015, il
est provincial des salésiens.
le père CARLOS ALBERTO SALCED O
OJEDA, O.M.I., jusqu’à présent vicaire
épiscopal et curé de San Francisco
de Asís et de El Señor de la Ascensión dans l’archidiocèse de Huancayo (Pérou): évêque titulaire de
Mattiana et auxiliaire de l’archidiocèse de Huancayo (Pérou).
Il est né le 25 novembre 1960 à
Comas, à cette époque archidiocèse
de Lima et actuellement diocèse de
Carabayllo au Pérou. Il a émis ses
premiers vœux dans la congrégation
des Missionnaires oblats de Marie
Immaculée le 3 février 1989 et ses
vœux solennels le 30 août 1993. Il a
suivi des études de philosophie et de
théologie à l’institut d’études supérieures Juan XXIII de Lima. Il a été
ordonné prêtre le 6 janvier 1996.
Après son ordination, il a exercé les
fonctions suivantes: vicaire paroissial
de San Juan, dans l’archidiocèse de
San Juan à Porto Rico (1996); vicaire paroissial de Nuestra Señora de la
Paz à Comas, dans le diocèse de Carabayllo (1997-1999); curé de San
Francisco de Asís à Orcotuna et d’El
Señor de la Ascensión à Mito, archidiocèse de Huancayo (2000-2004);
conseiller de la délégation des missionnaires oblats de Marie Immaculée au Pérou (2005-2008); directeur
du pré-noviciat San Eugenio Mazenod des Missionnaires oblats de Marie Immaculée à Lima (2006-2007);
secrétaire de l’équipe des Missionnaires oblats de Marie Immaculée
2 février
Mgr ROBERT BOURGON, jusqu’à
présent vicaire général du diocèse de
Sault Sainte Marie (Canada): évêque
du diocèse de Hearst (Canada) et
administrateur apostolique du diocèse de Moosonee.
Né le 10 mars 1956 à Sudbury
(Canada), après des études primaires
et secondaires à Creighton Mine et
au St. Charles College de Sudbury,
il s’est inscrit à la Queen’s University et à la Western University, où il a
obtenu un baccalauréat en psychologie et en philosophie. Il est ensuite
entré au séminaire St. Peter de London, et à la Saint Paul University
(Ottawa), où il a obtenu un master
of divinity et un doctorat en droit
canonique. Il a été ordonné prêtre le
8 mai 1981 pour le diocèse de Sault
Sainte Marie. Après l’ordination, il a
été vicaire de la paroisse Holy Name
of Jesus et assistant de la pro-cathédrale de North Bay (1981-1983); curé
de St. Bartholomew de Levaci (19861992); curé de St. François-Xavier de
Cartier (1988-1996). Depuis 1996, il
était à nouveau curé des paroisses de
Levaci, Cartier et de Bowling, fusionnées entre elles, et d’O naping,
dans la région de Sudbury. A côté
de l’activité pastorale, il a également
accompli des fonctions administratives et curiales: de 1984 à 1986, il a
été «prêté» aux diocèses de London
et à l’arcidiocèse de Kingston pour
réorganiser les tribunaux diocésains.
En 1990, il est entré au collège des
consulteurs. En 1998, il a été nommé
vicaire judiciaire de Sault Sainte
Marie et vicaire judiciaire adjoint du
tribunal régional de Toronto. En
2000, il a été nommé également vicaire épiscopal pour les matières spirituelles et en 2011 chancelier. Depuis le 17 april 2012, il était vicaire
général du diocèse de Sault-SainteMarie.
le père CHRISTUDAS RAJAPPAN, recteur du St. Vincent’s Seminary de
l’archidiocèse de Trivandrum des Latins (Inde): auxiliaire de l’archidiocèse de Trivandrum des Latins (Inde), lui assignant le siège titulaire
épiscopal d’Avitta Bibba.
Né le 25 novembre 1971 à Adimalathura, dans l’archidiocèse de Trivandrum des latins (Inde), il a complété ses études de philosophie et de
théologie au Papal Seminary à Poona, puis a obtenu un doctorat en
missiologie à l’université pontificale
urbanienne de Rome. Il a été ordonné prêtre le 25 novembre 1998 pour
l’archidiocèse de Trivandrum des latins. Après son ordination sacerdota-
le, il a occupé les fonctions suivantes: administrateur paroissial de St.
Nicholas Church, Neerody (19981999); secrétaire de l’évêque et aumônier du Jubilee Memorial Hospital & Catholic Hostel (1999-2001);
directeur du Kerala Catholic Youth
Movement (Kcym), Trivandrum
(2000-2003); aumônier du Catholic
Hostel (2001-2007); curé de la St.
Magdalene
Church,
Parthiyoor
(2002-2004). De 2004 à 2009, il a
suivi des études de doctorat à Rome.
Il a ensuite été directeur spirituel et
professeur au St. Joseph’s Pontifical
Seminary, Alwaye (2010-2013). Depuis 2013, il est recteur du St. Vincent’s Seminary, Menamkulam, directeur du Board of Clergy & Religious et curé de St. Thomas Aquinas Church, Kochuthura.
5 février
Mgr GIUSEPPE FAVALE, du clergé du
diocèse de Castellaneta, jusqu’à présent directeur spirituel du séminaire
pontifical régional des Pouilles (Italie): évêque de Conversano-Monopoli (Italie).
Né à Palagiano, dans la province
de Tarante et le diocèse de Castellaneta (Italie), le 29 février 1960, il a
étudié la théologie au séminaire régional de Molfetta. Il a été ordonné
prêtre le 6 juillet 1985 pour le clergé
du diocèse de Castellaneta. Par la
suite, il a fréquenté l’université pontificale du Latran, où il a obtenu en
2005 une maîtrise in utroque iure. De
1983 à 2000, il a été cérémonier épiscopal. A partir de 1988, il a été premier vicaire, puis curé de la cathédrale, de 2003 à 2011. Après avoir été
chancelier de la curie de 1989 à 1997,
il a été vicaire judiciaire de 2004 à
2010 et vicaire général de 1997 à
2011. Depuis 2011, il était directeur
spirituel au séminaire régional des
Pouilles Pie XI de Molfetta et délégué pour le clergé jeune du diocèse
de Castellaneta. Au cours de la vacance de ce siège, en 2013 il a été élu
administrateur diocésain.
6 février
le père MANUEL EUGENIO SALAZAR
MORA, du clergé de l’archidiocèse
de San José de Costa Rica, jusqu’à
présent curé de la paroisse San Jerónimo à Moravia (Costa Rica):
évêque de Tilarán-Liberia (Costa Rica).
Né à Guadalupe, dans l’archidiocèse de San José de Costa Rica
(Costa Rica), le 9 octobre 1958, il a
suivi des études de philosophie et de
théologie au grand séminaire national et a obtenu une licence en théologie fondamentale à l’université
pontificale grégorienne à Rome. Ordonné prêtre le 4 décembre 1982
pour l’archidiocèse de San José de
Costa Rica, il a été vicaire de la paroisse San Juan à Tibás, administrateur de la paroisse San Ramón Nonato, directeur du département pour
l’éducation religieuse de la Conférence épiscopale, directeur du séminaire propédeutique, recteur du
grand séminaire national, vicaire
épiscopal archidiocésain pour la pastorale prophétique, recteur du sanctuaire national Sagrado Corazón de
Jesús, curé de Medalla Milagrosa à
L’OSSERVATORE ROMANO
numéro 7, jeudi 18 février 2016
San José et, depuis 2014, curé de
San Jerónimo à Moravia.
le père DUNCAN THEOD ORE TSOKE,
vicaire général de l’archidiocèse de
Johannesburg (Afrique du Sud) et
curé: auxiliaire de l’archidiocèse de
Johannesburg (Afrique du Sud), lui
assignant le siège titulaire épiscopal
d’O rreacelia.
Né le 15 avril 1964 à Daveyton,
dans l’archidiocèse de Johannesburg
(Afrique du sud), il a étudié la philosophie au grand séminaire de
Hammanskraal à Pretoria (19881990) et la théologie au grand séminaire national de Saint John Marie
Vianney (1991-1994). Il a obtenu un
diplôme en gestion des biens ecclésiastiques (2010) à Nairobi, au Kenya. Ordonné prêtre le 2 décembre
1995 pour l’archidiocèse de Johannesburg, il a été vicaire paroissial de
Saint Francis of Assisi de Yeoville, à
Johannesburg, et responsable de la
pastorale des jeunes (1995-1999); formateur et professeur de spiritualité
au séminaire Saint Peter de Garsfontein, à Pretoria (1999-2000); vicaire
épiscopal pour l’évangélisation, assistant vicaire pour la pastorale des
vocations (2000-2009) et, dans le
même temps, curé de Saint Albert à
Vosloorus et de la Sainte-Famille à
Ponong, Johannesburg (2000-2004),
administrateur paroissial de Saint
Anthony Pucci (2006-2007). Depuis
2009, il était vicaire général de l’archidiocèse et curé de la SainteFamille à Turffontein.
8 février
le père SHOROT FRANCIS GOMES, vicaire général de l’archidiocèse de
Dhaka (Bangladesh): auxiliaire de
Dhaka (Bangladesh), lui assignant le
siège titulaire épiscopal de Forma.
Né le 15 décembre 1965 à Hashnabad, dans l’archidiocèse de Dhaka
(Bangladesh), après ses études primaires et secondaires à l’école Holy
Cross de Bandura, il est entré au petit séminaire Little Flower de la capitale. Il a poursuivi sa formation au
séminaire intermédiaire Saint Joseph
et a obtenu un diplôme en art au
Notre-Dame College à Dhaka. En
1984, il est entré au grand séminaire
Holy Spirit pour compléter ses études de philosophie et de théologie et
a été ordonné prêtre le 31 mai 1990
pour le clergé de l’archidiocèse. Jusqu’en 1994, il a été vicaire paroissial
de la cathédrale de Dhaka et de Nagari Church, puis recteur du petit
séminaire Little Flower (1994-1998).
Après avoir passé quatre ans à Rome
pour compléter un doctorat en théologie morale à l’Alfonsianum, il est
rentré au Bangladesh, où il est devenu vicaire paroissial de Nagari et
Tejgaon Church (2002-2005). Il a
ensuite été vice-recteur (2005-2009)
et recteur (2009-2012) du grand séminaire Holy Spirit, puis vicaire général du nouveau diocèse de Sylhet
(2012-2015). Depuis 2016, il était vicaire général de l’archidiocèse de
Dhaka.
9 février
S.Exc. Mgr MIGUEL ÁNGEL MORÁN
AQUINO: évêque du diocèse de Santa Ana (Salvador), le transférant du
siège de San Miguel.
Né le 25 mai 1955 à Esquipulas,
dans le diocèse de Santa Ana (Salvador), il est entré en 1967 au petit séminaire diocésain. Il a reçu une formation en philosophie à Santa Ana
et en théologie au grand séminaire
San José de la Montaña. Ordonné
prêtre le 5 décembre 1981, il a obtenu une licence en théologie à l’université pontificale Antonienne. Il a
été curé de Santa Bárbara à Santa
Ana (1986-1988), de San Andrés à
Apaneca et préfet des études au
grand séminaire (1988-1990), curé
pendant six mois de la cathédrale
métropolitaine, curé de San Miguelito à Santa Ana (1990-1996). Il était
vice-recteur du grand séminaire
quand, le 19 juillet 2000, il a été
nommé évêque de San Miguel. Il a
reçu l’ordination épiscopale le 2 septembre suivant. Au sein de la Conférence épiscopale, il est délégué auprès du CELAM et responsable de
l’institut de sécurité sociale du
clergé.
10 février
Mgr LAURO TISI, du clergé de l’archidiocèse métropolitain de Trente
(Italie), jusqu’à présent vicaire général: archevêque métropolitain de
Trente (Italie).
Né à Giustino, Trente (Italie), le
1er novembre 1962, il a suivi des études études classiques au lycée du
collège archiépiscopal comme élève
du petit séminaire, poursuivant ses
études de théologie au séminaire
diocésain de Trente. Ordonné prêtre
le 26 juin 1987, jusqu’en 1988 il a été
vicaire à Levico Terme; de 1988 à
1995, il a été vice-recteur du séminaire de Trente; de 1995 à 2007, il a été
père spirituel et délégué pour les
jeunes prêtres. En 2007, il a été
nommé vicaire général et modérateur de la curie de l’archidiocèse. En
tant que responsable épiscopal, il a
soutenu les activités de la communauté des sœurs camilliennes à hôpital Saint-Camille de Trente.
CARBONI,
le
père
ROBERTO
O.F.M.CONV., secrétaire général pour
la formation dans son ordre: évêque
d’Ales-Terralba (Italie).
Né le 12 octobre 1958 à Scano
Montiferro, dans la province d’O ristano et le diocèse d’Alghero-Bosa
(Italie), il est entré au séminaire des
frères mineurs conventuels de Sassari, et s’est ensuite transféré au collège San Francesco à Oristano, où il a
obtenu son baccalauréat. En 1977, il
a commencé son noviciat au couvent
de la basilique Saint-Antoine à Padoue. Il a étudié la philosophie au
séminaire Saint-Maxime docteur à
Padoue et la théologie à la faculté
de théologie Saint-Bonaventure à
Rome. Le 27 juin 1982, il a émis sa
profession perpétuelle et le 29 sep-
L’OSSERVATORE ROMANO
EDITION HEBDOMADAIRE
Unicuique suum
EN LANGUE FRANÇAISE
Non praevalebunt
GIOVANNI MARIA VIAN
directeur
Giuseppe Fiorentino
vice-directeur
Jean-Michel Coulet
rédacteur en chef de l’édition
Cité du Vatican
[email protected]
www.osservatoreromano.va
Rédaction
tembre 1984, il a été ordonné prêtre.
En 1986, il a obtenu une licence en
psychologie à l’université pontificale
grégorienne. Depuis 1989, il est inscrit à l’ordre des psychologues et
psychothérapeutes de Sardaigne. Il a
collaboré à la revue «Fraternità»,
dont il a été directeur, et est devenu
journaliste à partir de 1997. De 1985
à 1992, il a été directeur spirituel au
Centre national d’orientation des vocations au Saint couvent d’Assise; de
1991 à 1993, professeur de psychologie à l’institut de théologie d’Assise;
de 1993 à 1994, vicaire de Saint-François d’Assise à Cagliari; de 1994 à
1999, recteur du postulandat franciscain au collège Saint-François
d’Oristano; de 1994 à 2001, secrétaire
et vicaire provincial, ainsi que professeur de psychologie à la faculté
pontificale de théologie de Sardaigne. De 2001 à 2013, il a été, avec les
frères des Marche, missionnaire à
Cuba, où il a été directeur spirituel
du séminaire interdiocésain, professeur de psychologie, recteur des postulants et recteur de l’église SaintFrançois à La Havane. Depuis 2013,
il était secrétaire général pour la formation de son ordre.
page 19
bre du centre padouan de la communication sociale, président du
conseil d’administration du mouvement apostolique diocésain, assistant
de la consulte des groupes laïcs de
Padoue et des Trois Vénéties.
Démissions
Le Saint-Père a accepté la démission
de:
29 janvier
S.Exc. Mgr RAFFAELE CALABRO, qui
avait demandé à être relevé de la
charge pastorale du diocèse d’Andria
(Italie), conformément au canon 401
§ 1 du C. de D.C.
2 février
S.Exc. Mgr VINCENT CADIEUX,
O.M.I., qui avait demandé à être relevé de la charge d’évêque de Moosonee et Hearst (Canada), diocèses
unis in persona Episcopi, conformément au canon 401 § 1 du C. de
D.C.
5 février
Mgr RENATO MARANGONI, du clergé du diocèse de Padoue, jusqu’à
présent vicaire épiscopal pour la pastorale du diocèse de Padoue (Italie):
évêque de Belluno-Feltre (Italie).
Né à Crespano del Grappa, dans
la province de Trévise et le diocèse
de Padoue (Italie), le 25 mai 1958, il
est entré au petit séminaire de Thiene en 1969. Après des études de
théologie au séminaire épiscopal de
Padoue, il a fréquenté l’université
pontificale grégorienne, obtenant un
doctorat en théologie. Ordonné prêtre le 4 juin 1983 à Padoue, il a été
vicaire paroissial du Carmine à Padoue (1983-1985) et à San Gregorio
Barbarigo à Rome (1985-1987); assistant à Villa Nazareth (1987-1992); assistant au petit séminaire à Tencarola
di Salvazzano Dentro et coopérateur
dans la paroisse de San Bartolomeo
in Gallio, à Padoue (1993- 1995); vice
directeur au collège Gregorianum de
Padoue et coopérateur dans la paroisse Sant’Andrea in Pontelongo
(1995-2005); secrétaire de la commission pour la formation permanente
du clergé (2000-2003); délégué épiscopal pour la pastorale familiale et
président de la commission pour la
famille, (2001-2008); modérateur du
conseil presbytéral diocésain (20032008). Il a été vice-directeur de l’institut San Luca pour la formation
permanente du clergé (2003-2012).
Depuis 2008, il était vicaire épiscopal pour l’apostolat des laïcs et chanoine honoraire du chapitre de la
cathédrale, depuis 2013, membre de
droit du conseil presbytéral diocésain et président délégué du conseil
pastoral diocésain, et depuis 2015, vicaire pour la pastorale. En 2012, il a
été secrétaire du deuxième congrès
ecclésial des Trois Vénéties à Aquileia. Il est directeur de la coordination diocésaine de pastorale, mem-
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S.Exc. Mgr D OMENICO PAD OVANO,
qui avait demandé à être relevé de la
charge du diocèse de ConversanoMonopoli, conformément au canon
401 § 1 du C. de D.C.
6 février
S.Exc. Mgr VITTORINO GIRARDI
STELLIN, M.C.C.J., qui avait demandé
à être relevé de la charge du diocèse
de Tilarán-Liberia (Costa Rica),
conformément au canon 401 § 1 du
C. de D.C.
9 février
S.Exc. Mgr ROMEO TOVAR ASTORGA, O.F.M., qui avait demandé à être
relevé de la charge du diocèse de
Santa Ana (Salvador), conformément au canon 401 § 1 du C. de
D.C.
10 février
S.Exc. Mgr LUIGI BRESSAN, qui
avait demandé à être relevé de la
charge de l’archidiocèse métropolitain de Trente (Italie), conformément au canon 401 § 1 du C. de
D.C.
S.Exc. Mgr GIOVANNI DETTORI, qui
avait demandé à être relevé de la
charge du diocèse d’Ales-Terralba
(Italie), conformément au canon 401
§ 1 du C. de D.C.
S.Exc. Mgr GIUSEPPE ANDRICH, qui
avait demandé à être relevé de la
charge du diocèse de Belluno-Feltre
(Italie), conformément au canon 401
§ 1 du C. de D.C.
S.Exc. Mgr GUID O FIANDINO,
évêque titulaire d’Aleria, qui avait
demandé à être relevé de la charge
d’auxiliaire du diocèse de Turin (Italie), conformément au canon 401 § 1
du C. de D.C.
Abonnements: Italie, Vatican: 58,00 €; Europe: 100,00 € 148,00 $ U.S. 160,oo FS; Amérique latine, Afrique,
Asie: 110,00 € 160,00 $ U.S. 180,00 FS; Amérique du Nord, Océanie: 162,00 € 240,00 $ U.S. 260,00 FS. Renseignements:
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Belgique: Editions Jésuites 7, rue Blondeau 5000 Namur (IBAN: BE97 0688 9989 0649 BIC: GKCCBEBB);
téléphone o81 22 15 51; fax 081 22 08 97; [email protected] France: Bayard-Ser 14, rue d’Assas,
75006 Paris; téléphone + 33 1 44 39 48 48; [email protected] - Editions de L’Homme Nouveau 10, rue de
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Suisse: Editions Saint - Augustin, casepostale 51, CH - 1890 Saint-Maurice, téléphone + 41 24 486 05 04,
fax + 41 24 486 05 23, [email protected] - Editions Parole et Silence, Le Muveran, 1880 Les Plans sur Bex
(C.C.P. 17-336720-5); téléphone + 41 24 498 23 01; [email protected] Canada et Amérique du Nord: Editions
de la CECC (Conférence des Evêques catholiques du Canada) 2500, promenade Don Reid, Ottawa (Ontario)
K1H 2J2; téléphone 1 800 769 1147; [email protected]
L’OSSERVATORE ROMANO
page 20
jeudi 18 février 2016, numéro 7
Les sœurs carmélites de Sainte-Thérèse de
Florence sont présentes dans les favelas au Brésil
Message pour la campagne de fraternité au Brésil
Nous sommes tous responsables
de la maison commune
Un appel «à s’engager à travers des politiques publiques et des attitudes
responsables qui garantissent l’intégrité et l’avenir de notre maison commune» a
été lancé par François dans le traditionnel message aux fidèles du Brésil — rendu
public le 11 février — à l’occasion de la campagne de fraternité pour le Carême.
Nous en publions une traduction ci-dessous:
Chers frères et sœurs du Brésil!
Dans sa grande miséricorde, Dieu ne
se lasse jamais de nous offrir sa bénédiction et sa grâce et de nous inviter à la conversion et à la croissance
dans la foi. Au Brésil, depuis 1963,
au cours du Carême se déroule la
Campagne de fraternité. Elle propose chaque année une motivation
communautaire pour la conversion
et un changement de vie. En cette
année 2016, la Campagne de fraternité concerne l’assistance médicale
de base. Elle a pour thème: «Mais
que le droit coule comme l’eau, et la
justice, comme torrent qui ne tarit
pas» (Am 5, 24).
C’est la quatrième fois que la
Campagne de fraternité se déroule
avec les Eglises qui appartiennent au
Conseil national des Eglises chrétiennes du Brésil (CONIC). Mais cette fois-ci elle franchit les frontières:
elle a lieu avec Misereor, une initiative des catholiques allemands qui
réalise la Campagne de Carême depuis 1958. L’objectif principal de cette année est de contribuer à faire en
sorte que soit assuré le droit fondamental de tous à l’assistance médicale de base. Elle fait donc appel à
toutes les personnes, en les invitant
à s’engager à travers des politiques
publiques et des attitudes responsa-
bles qui garantissent l’intégrité et
l’avenir de notre maison commune.
Nous sommes tous responsables
de notre maison commune, qui comprend les gouvernants et toute la société. Au moyen de cette Campagne
de fraternité, les personnes et les
communautés sont invitées à se mobiliser, à partir des lieux où elles vivent. Elles sont appelées à prendre
des initiatives dans lesquelles s’unissent les Eglises et les diverses expressions religieuses, ainsi que toutes
les personnes de bonne volonté dans
la promotion de la justice et du droit
à l’assistance médicale de base. L’accès à l’eau potable et au réseau des
égouts est la condition nécessaire
pour dépasser l’injustice sociale et
déraciner la pauvreté et la faim,
pour réduire les taux élevés de mortalité infantile et de maladies évitables, et pour un environnement durable.
Treizième réunion
du Conseil des cardinaux
Synodalité, décentralisation, réorganisation des dicastères, protection
des mineurs, réforme dans le domaine de l’économie et du procès
canonique sur la validité du mariage: tels sont les thèmes qui ont été
l’objet de débats lors de la treizième réunion du Conseil des cardinaux avec le Pape, qui s’est déroulée pendant toute la journée du
lundi 8 février et dans la matinée
du mardi 9 février, après que les
cardinaux ont concélébré la Messe
présidée par François pour les frères capucins dans la basilique vaticane. Comme l’a rapporté le directeur de la salle de presse du SaintSiège, le père Federico Lombardi,
le cardinal Gracias n’a pas participé
aux travaux en raison d’une intervention chirurgicale prévue depuis
longtemps.
Comme cela avait déjà été prévu
au terme de la précédente rencon-
tre, au cours de la première session
ont été approfondis les thèmes du
discours prononcé par le Pape le 17
octobre dernier, lors de la commémoration du cinquantième anniversaire du synode des évêques. Un
discours dans lequel François a développé amplement le thème de la
synodalité, en rappelant dans le
même temps «la nécessité de poursuivre une décentralisation salutaire». Il s’agit d’indications qui constituent une référence importante
pour la réforme de la Curie.
Par la suite, s’est déroulée la lecture «finale» des propositions du
Conseil à propos des deux nouveaux dicastères dont il a été question auparavant: celui concernant
«laïcs, famille et vie» et celui sur
«justice, paix, migrations». Ces
propositions ont été confiées au Pape dans l’attente de décisions de sa
part.
Un échange de considérations
supplémentaires a également eu lieu
à propos de la secrétairerie d’Etat et
de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements.
Le cardinal américain Sean Patrick O’Malley a ensuite parlé des
activités de la Commission pour la
protection des mineurs, qu’il a présidée. En ce qui concerne en revanche les questions juridiques et disciplinaires qui touchent la compétence de dicastères de la Curie, cellesci devront être ultérieurement approfondies.
Enfin, le cardinal George Pell a
informé de l’état et de l’application
des réformes dans le domaine économique. Les cardinaux ont reçu
une documentation sur le «vademecum» préparé par le Tribunal de la
Rote romaine pour l’application de
la réforme du procès canonique sur
la validité du mariage.
Dans l’encyclique Laudato si’, j’ai
rappelé que «l’accès à l’eau potable
et sûre est un droit humain primordial, fondamental et universel, parce
qu’il détermine la survie des personnes, et par conséquent il est une
condition pour l’exercice des autres
droits humains» (n. 30) et que la
grande dette sociale envers les pauvres est partiellement recouvrée lorsque sont réalisés des programmes
pour fournir de l’eau potable et une
assistance médicale aux populations
les plus pauvres (cf. ibid.). Et, dans
une perspective d’écologie intégrale,
j’ai cherché à mettre en évidence le
lien existant entre la dégradation de
l’environnement et la dégradation
humaine et sociale, en avertissant
que «la détérioration de l’environnement et celle de la société affectent
d’une manière spéciale les plus faibles de la planète» (n. 48).
Approfondissons la culture écologique. Celle-ci ne peut pas se limiter
à des réponses partielles, comme si
les problèmes étaient isolés. «Elle
devrait être un regard différent, une
pensée, une politique, un programme éducatif, un style de vie et une
spiritualité qui constitueraient une
résistance face à l’avancée du paradigme technocratique» (Laudato si’,
n. 11). Chers frères et sœurs, j’insiste
en disant que le riche patrimoine de
spiritualité chrétienne peut apporter
une magnifique contribution à l’effort de renouveler l’humanité. Je
vous invite, en particulier au cours
de ce Carême, motivés par la Campagne de fraternité œcuménique, à
redécouvrir que notre spiritualité
s’approfondit quand nous dépassons
la «tentation d’être des chrétiens qui
se maintiennent à une prudente distance des plaies du Seigneur» et que
nous découvrons que Jésus veut
«que nous touchions la chair souffrante des autres» (Evangelii gaudium, n. 270) en nous consacrant au
«soin généreux et plein de tendresse» (Laudato si’, n. 220) de nos frères et sœurs et de toute la création.
Je m’unis à tous les chrétiens du
Brésil et à ceux qui, en Allemagne,
sont engagés dans cette Campagne
de fraternité œcuménique, en demandant à Dieu: «Apprends-nous à
découvrir la valeur de chaque chose,
à contempler, émerveillés, à reconnaître que nous sommes profondément unis à toutes les créatures sur
notre chemin vers ta lumière infinie.
Merci parce que tu es avec nous
tous les jours. Soutiens-nous, nous
t’en prions, dans notre lutte pour la
justice, l’amour et la paix» (Laudato
si’, n. 246). Je saisis l’occasion pour
adresser à tous mes salutations cordiales, en vous souhaitant tout le
bien possible en Jésus Christ,
unique Sauveur de l’humanité et en
vous demandant, s’il vous plaît, de
ne pas cesser de prier pour moi!
Du Vatican, 22 janvier 2016
FRANCISCUS
PP.