Fabrication de profilés en composites par pultrusion

Fabrication de profilés
en composites par pultrusion
par
Patrick BINSE
Responsable de production
Paturle Composites
1.
Caractéristiques générales des procédés de pultrusion...............
2.
Techniques de fabrication des composites
à matrice thermodurcissable................................................................
—
3
3.
Pultrusion des composites à matrice thermoplastique ................
—
5
4.
Description des constituants ...............................................................
—
6
5.
Mise en œuvre du procédé ....................................................................
—
8
6.
Contrôle qualité des produits pultrudés ...........................................
—
10
Pour en savoir plus...........................................................................................
A 3 730 - 2
Doc. A 3 730
e vocable pultrusion est une contraction des termes anglo-saxons pull
(tirer) et extrusion. La pultrusion est un procédé industriel modulable de
fabrication de matériaux composites à matrice organique (thermoplastique
ou thermodurcissable), qui permet l’obtention en continu de profilés de section géométrique constante.
La pultrusion est apparue industriellement en 1948. La croissance de ce procédé
a été très limitée pendant de nombreuses années à cause des faibles performances à la fois des matrices thermodurcissables et des machines. Sous l’impulsion des États-Unis, la pultrusion a connu ensuite un essor constant depuis une
vingtaine d’années grâce à l’extrême variété des combinaisons réalisables (fibres
de renfort, matrices, géométrie).
Procédé continu, la pultrusion peut être comparée à l’extrusion des thermoplastiques ou de l’aluminium (filage).
Les principaux avantages des produits pultrudés sont :
— leur légèreté (70 % du poids d’un profilé en aluminium de propriétés
équivalentes) ;
— leurs propriétés mécaniques bien meilleures que celles des profilés thermoplastiques non renforcés ;
— par rapport aux profilés en aluminium, leurs propriétés supérieures :
• de résistance chimique,
• de résistance thermique (stabilité dimensionnelle, isolation),
• d’isolation électrique ;
— la possibilité d’adapter le couple fibre-matrice aux contraintes du cahier des
charges ;
— les possibilités de renforts locaux et de coloration par pigments.
Les principaux inconvénients restent :
— le coût encore élevé des profilés, malgré une consommation d’énergie plus
faible et une filière moins coûteuse que pour l’extrusion de l’aluminium ;
A 3 730
2 - 1995
L
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A 3 730 − 1
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— la complexité des calculs de structures ;
— la longueur de la mise au point et des réglages pour des profilés complexes ;
— la nécessité d’une main-d’œuvre qualifiée ;
— la conception délicate des outillages.
Comme exemples de produits pultrudés, citons :
— en génie électrique : chemins de câble, isolateurs pour transformateur,
perches isolantes, échelles ;
— parmi les applications anticorrosion : conduites pour fluides, garde-corps,
échelles, boulonnerie ;
— en sports et loisirs : cannes de hockey, bâtons de ski, cannes de golf, flèches,
lattes de voile ou de cerf-volant ;
— dans le bâtiment : boulons d’ancrage, panneaux de façade, câbles de traction, poutres, signalisations, fenêtres, bancs de stade ;
— dans les transports : assemblages de panneaux isolants.
1. Caractéristiques générales
des procédés de pultrusion
1.1 Pultrusion des matières
thermodurcissables
Elle représente 95 % du total des produits pultrudés.
Les fibres de renforcement sont préalablement imprégnées d’une
résine liquide puis tirées au travers d’une filière (conformateur) qui
donne la géométrie du profilé à obtenir.
Sous l’action de la chaleur et du catalyseur, la résine, dans la
filière, se transforme chimiquement de façon irréversible en une
matrice solide, insoluble et infusible (réseau tridimensionnel).
1.2 Pultrusion des thermoplastiques
Figure 1 – Schéma de principe d’une ligne de pultrusion
Contrairement au cas précédent, la matrice thermoplastique est
fluidifiée à chaud dans la filière, ce qui permet d’imprégner les
fibres de renforcement de façon à obtenir les profilés en sortie de
filière.
1.3 Matériel de pultrusion
Dans les deux cas, il est composé de six éléments principaux
(figure 1) :
— le cantre (présentation des pelotes ou des bobines des fils de
renforcement) ;
— la zone d’imprégnation (par bain ou par injection) ;
— le guidage des renforts ;
— la filière ;
— le système de traction ;
— le système de découpe.
La description du fonctionnement de ces éléments est donnée
dans le paragraphe 4.
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1.4 Limitations géométriques
La conception des pièces en pultrusion relève des principes
généraux de la mécanique appliquée aux calculs des matériaux
composites. Les géométries compatibles avec le procédé de pultrusion sont données dans le tableau 1.
1.5 Séries de fabrication
La pultrusion est caractérisée par les vitesses de production
(exprimées en mètres linéaires de profilés tirés) les plus élevées de
tous les moyens de fabrication des composites. Elle permet, selon
la complexité de la géométrie, de produire de 0,3 à 10 m/min (thermodurcissable) et au-delà de 60 m/min (thermoplastique).
(0)
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Tableau 1 – Critères géométriques de conception
des pièces pultrudées
Types de pièces et formes
réalisables
Exemples
Possibilités
Rayon minimal de courbure
0,2 mm
Évidement et trous de moulage
Non recommandés
Les principales limitations de la cadence sont, par ordre d’importance décroissante :
— le taux de renfort ;
— la géométrie de la pièce ;
— la quantité à produire d’un même profilé ;
— les propriétés finales du matériau à obtenir ;
— la réactivité du système thermodurcissable ;
— la vitesse d’imprégnation.
Comme tous les procédés de fabrication en continu, la pultrusion n’est économiquement valable que dans le cadre de grandes
quantités (plus de 5 000 m/an) avec une exploitation en 3/8
(semaine continue de 5 jours) voire en 5/8 (week-end compris).
Elle nécessite peu de temps de main-d’œuvre.
Ébarbage à la fermeture du
moule (pulpress, pulforming)
Non
Insert en bois ou en mousse
polyuréthane
Oui
1.6 Aspects économiques
Contre-dépouilles
Dépouille minimale
Sans limite
Épaisseur minimale
0,2 mm
Épaisseur maximale
Sans limite
Tolérance dimensionnelle
0,2 mm
Variations d’épaisseur
Oui
Section ondulée
Oui
Inserts métalliques
Oui
Voile de surface
Oui
Dimensions maximales
Environ 2 m
Insert métallique en bordure
Ils sont donnés en fin d’article en [Doc. A 3 730].
2. Techniques de fabrication
des composites à matrice
thermodurcissable
2.1 Pultrusion standard
La pultrusion la plus courante permet de fabriquer des profilés
de section constante hautement renforcés dans le sens longitudinal. Pour ce faire, les fibres de renfort (jusqu’à 60 % en volume) sont
tirées à travers un bain d’imprégnation puis dans une filière
chauffée, de manière à initier la réaction de réticulation (ou polymérisation). À la sortie de la filière, le profilé solide est refroidi
suffisamment de façon à pouvoir être pincé dans la tireuse sans
risque de déformation. La vitesse de tirage varie de façon importante en fonction de la matrice utilisée (réactivité), des taux de
renfort et de charge, de la section et de la complexité du profilé.
On peut donner à titre d’exemple les cadences suivantes :
• 10 m/min pour un jonc de 2,5 mm de diamètre, en composite
verre/polyester de haute réactivité, avec 55 % de renfort
longitudinal ;
• 0,6 m/min pour un profilé plat de section 20 mm × 50 mm en
composite verre/polyester de haute réactivité, avec 55 % de renfort
longitudinal ;
• 0,2 m/min pour un profilé plat de section 20 mm × 50 mm, en
composite carbone/époxy, avec 70 % de renfort longitudinal.
Oui
2.2 Techniques complémentaires
Bosses
Non
Ailettes
Oui
Sigles
Non
2.2.1 Extrusion
Non
L’extrusion en ligne devient très utilisée pour améliorer le
comportement du profilé aux agressions chimiques, et pour transformer l’aspect visuel ou le toucher. Dans le premier cas, la matière
Nombres ou lettres en relief
CS
Les techniques complémentaires (figure 2) ont pour but principal
l’obtention d’un composite de propriétés supérieures à celles du
profilé pultrudé standard. Ces améliorations portent soit sur le
renforcement non axial, soit sur l’aspect et la tenue aux agressions
chimiques. Plusieurs techniques sont envisageables. Elles sont
brièvement décrites ci-après.
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Figure 2 – Pultrusion associée à des techniques complémentaires
extrudée se comportera comme un revêtement protecteur à l’intérieur ou à l’extérieur d’un tube. Dans le second, le revêtement
confère au profilé pultrudé des caractéristiques combinées d’aspect,
de résistance à la rayure, une diversité dans les coloris très difficile
à obtenir par pigmentation de la résine.
les autres directions. L’enroulement filamentaire est réalisé par
bobinage multiple (sur mandrin en règle générale) de fils de mèches
ou de rubans avec des angles variables, ce qui apporte une résistance transversale au profilé. Ce renforcement est très souvent
utilisé pour la fabrication de tubes sous pression.
De la même manière, l’apport d’une couche externe d’élastomère
thermoplastique (figure 2) permet une modification du toucher.
2.3 Pulpress
2.2.2 Peinture en ligne
Cette technique moins complexe que l’extrusion présente l’intérêt
de conférer au profilé un aspect de surface homogène et d’éviter
les reprises coûteuses. La peinture est déposée en continu au
pistolet entre la tireuse et le poste de sciage. Elle nécessite néanmoins un équipement d’aspiration des solvants important.
2.2.3 Enroulement filamentaire
La pultrusion standard ne permet généralement que le renforcement axial (sauf dans le cas de contextures textiles plus complexes,
§ 4.1). Lorsque l’on doit obtenir des profilés ayant une bonne tenue
à l’éclatement, à l’écrasement ou à toute sollicitation autre que
traction axiale et flexion, il faut introduire des fibres continues dans
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Cette technique, développée par une société norvégienne (Nordic
Supply), permet d’obtenir des formes à géométrie évolutive, mais
de section constante.
Les renforts imprégnés sont tirés en continu par des plateaux
porteurs de moules métalliques chauffés. Le moulage à la forme
désirée s’effectue par pressage vertical (figure 3).
Alors que, dans la pultrusion standard, la vitesse de tirage est
fonction de la réactivité de la résine et de la longueur de la filière,
ici la cadence de fabrication dépend de l’opération de moulage et,
de ce fait, on ne peut agir que sur la réactivité de la résine.
Les principales applications sont la fabrication de manches
d’outils, de tuiles, etc.
Cette technique peut être associée à l’injection en cours de moulage d’une couche de finition IMC (in mold coating).
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Les séries plus faibles que dans le cas de la pultrusion standard
entraîne évidemment un prix de revient plus élevé.
2.4 Pulforming
Le pulforming (quelquefois appelé pultrusion courbe) est une
technique que la société américaine Goldsworthy a inventée et
développée pour produire des profilés courbes, de géométrie
constante ou non.
Les renforts sont tirés, comme dans le procédé pulpress, en
continu, mais le pressage discontinu s’effectue horizontalement.
Les profilés obtenus ayant un taux de renfort très élevé, ils sont
essentiellement destinés à des applications structurelles (lames de
ressort pour véhicule).
La ligne de pulforming (figure 4) se distingue par une table horizontale supportant un carrousel de moules femelles chauffées. Les
parties mâles se referment sur les fibres imprégnées et les
compriment de façon à obtenir la forme souhaitée.
Figure 3 – Schéma de principe d’une ligne de pulpress
3. Pultrusion des composites
à matrice thermoplastique
La pultrusion des thermoplastiques est à ce jour peu répandue
dans le monde parce que la présentation des fils et tissus n’est maîtrisée au niveau commercial que depuis peu et qu’elle ne permet
pas toujours des transformations aisées. Par ailleurs, l’important
apport thermique nécessaire pour fluidifier les différentes matrices
avant leur introduction dans le conformateur (filière) est une limitation sérieuse.
3.1 Pultrusion à partir de fils
préimprégnés
Dans ce cas, la pultrusion nécessite deux étapes distinctes :
— la préparation des fils préimprégnés ;
— le passage de ces fils au travers de la filière.
La préimprégnation des fils peut se faire à chaud : les fils sont
immergés dans la matrice portée à une température suffisamment
élevée pour être fluidifiée (hot-melt).
Le FIT (fibre imprégnée de thermoplastique) est un procédé mis
au point chez Elf Atochem et faisant l’objet d’une licence européenne accordée à Porcher Textiles, qui permet l’imprégnation à
cœur (en lit fluidisé) de fibres de renforcement par des poudres
thermoplastiques de faible granulométrie. Ces fibres de renforcement imprégnées sont ensuite gainées dans un thermoplastique
(de nature identique à la poudre, ou non).
De nouveaux fils préimprégnés de résines thermoplastiques
sont apparus ces dernières années tels les :
— commingled : fibres constituées de filaments continus mixtes
(thermoplastique et renfort) entremêlés ;
— bourdonnés : fils uniques bobinés sur une âme ;
— guipés : fils multiples bobinés sur une âme.
Les technologies par voie chaude permettent l’obtention de fils
préimprégnés d’une grande variété (PP/ verre, PA / verre,
PEI/carbone, PES/verre, PEEK/aramide, PA/carbone...).
Nota : PP : polypropylène,
PA : polyamide,
PEI : polyétherimide,
PES : polyéthersulfone,
PEEK : polyétheréthercétone.
Ces polymères « techniques » font l’objet d’articles spécialisés dans la rubrique
MONOGRAPHIES DES THERMOPLASTIQUES de ce traité.
Dans tous les cas, la pultrusion consiste à tirer ces fils imprégnés
au travers d’une filière chauffée, afin d’obtenir la fluidification de la
matrice donc un enrobage le meilleur possible des fibres de renforcement.
Ce type de pultrusion reste expérimental autant à cause du coût
très élevé des fibres préimprégnées et du procédé qui nécessite
l’apport d’une grande quantité d’énergie, que de la grande
difficulté d’obtenir un enrobage parfait de façon continue à des
cadences élevées.
Figure 4 – Installation de pulforming
Cependant, les études ont montré la faisabilité de profilés haut
de gamme (PEEK, PEI, PES, associés à des fibres de carbone ou de
verre R) et leur compétitivité grâce à des vitesses de tirage très
élevées de l’ordre de 30 à 60 m/min.
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3.2 Procédés divers
Les composites thermoplastiques présentant des caractéristiques
mécaniques élevées (résistance au choc) et une durabilité intéressante, de nombreuses études leur ont été consacrées. Citons, pour
la pultrusion, la technique de dépolymérisation partielle par oxydation de la résine, qui, dans le cas du polypropylène, permet de
réduire la viscosité à l’état fondu, ce qui a pour effet une meilleure
imprégnation des fibres.
Citons d’autres fibres imprégnées thermoplastiques obtenues
par pultrusion, par les procédés développés par les sociétés Spiflex
et Fiberod.
4. Description
des constituants
4.1 Renforts pour matrices
thermodurcissables
On aura intérêt à choisir les renforts les moins chers. Toutefois,
la possibilité de réaliser des profilés complexes impose l’utilisation
de toutes formes d’architecture textile, même les plus
sophistiquées.
De nombreux renforts sont disponibles pour l’élaboration des
matériaux composites. Ils se présentent sous différentes formes et
se caractérisent par la contexture (tissus, fibres coupées, matelas
de fibres longues ou de tissus aiguilletés), le grammage (en g/m2),
le type de textiles (tricot, tissu, tresse, aiguilleté, complexe...),
l’armure, etc.
■ Dès que l’on peut le faire, pour réduire le coût, il faut amener les
fils directement à partir des cantres. Ces fils sont des rovings directs
pour le renforcement mécanique ou bien des fils texturés (spun
roving, bulky, voluminizato...), qui assurent le renforcement
mécanique (plus faible d’environ deux tiers avec les fils texturés
qu’avec les rovings directs) et l’occupation de l’espace à l’intérieur
du profilé.
Nota : ROVING DIRECT : ensemble de filaments continus obtenus directement en sortie
de four.
SPUN ROVING : fil à « bouclettes » permettant l’accrochage tridimensionnel.
BULKY : fibre continue texturée.
VOLUMINIZATO : fibre discontinue texturée.
Les fils texturés permettent également un renforcement dans les
trois directions, ce que ne peut pas apporter un roving. On les
utilisera donc dès que la cohésion du profilé est menacée par des
effets combinés de délaminage.
Les fibres (verre, carbone, aramide...), constituées d’un assemblage de filaments continus, sont donc principalement utilisées pour
le renforcement longitudinal du profilé, avec des taux de renfort
élevés dans les cas du roving (62 % en volume).
■ Quand les contraintes mécaniques ne sont pas très élevées, on
utilisera des mats (ensemble de fibres coupées, liées entre elles par
un liant chimique).
Pour pouvoir tirer sur ce type de renfort, on utilise des mats à
liant fortement cohésif (liant en émulsion), de préférence aux mats
à liant en poudre.
Ces mats se divisent en deux qualités principales :
— les mats à fibres longues (type Unifilo...), utilisés pour
l’imprégnation par bain, servent à équilibrer les structures et il faut
les positionner au centre ou de façon symétrique dans le profilé.
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Lorsque le profilé ne nécessite pas un taux de verre important,
c’est ce type de renfort que l’on utilise avec, en plus, quelques
rovings ou mèches qui supportent les efforts de traction dans la
filière ;
— les mats à fibres courtes sont moins chers mais ne peuvent
pas être utilisés dans l’imprégnation par bain car leur liant est
soluble dans le monomère.
On choisit des grammages de 300 à 600 g/m2 avec des fils de
100 dtex environ pour les mats et les titres des fils vont de 1 200 à
4 800 (voire 5 000) tex (ou g/km) pour le verre, 12 K ou 24 K
(c’est-à-dire 12 000 ou 24 000 filaments) pour le carbone.
En ce qui concerne le verre, les ensimages des fils sont spécialement développés pour la pultrusion, par exemple R 25 B et H
d’Owens Corning Fiberglas ou P 122 et P 166 de Vetrotex.
■ Les profilés complexes demandent des renforts tissés afin de
supporter sans dommage des contraintes mécaniques importantes.
Parmi les textures utilisables, on retient surtout les complexes
aiguilletés ou non (style Rovimat, Volumat de Chomarat) pour avoir
le renforcement dans les directions voulues [autres que le sens longitudinal (0o)], ainsi que l’inertie et l’aspect de surface nécessaires.
Toujours pour répondre aux contraintes mécaniques, il faut pultruder des bandes tissées (de préférence bordées, surtout en
imprégnation par bain).
Il faudra faire attention à ce que ces tissus (toiles, tresses ou
sergé), qui peuvent être déséquilibrés, aient suffisamment de chaîne
(plus de 20 %) afin d’être tirés au travers de la filière.
■ Enfin, pour améliorer l’aspect de surface, il est possible
d’employer des voiles de surface directement liés au tissu ou des
renforts non tissés. Ils permettent également de conférer au
composite pultrudé la résistance à un environnement agressif.
Ces produits textiles sont à base de verre (voile de verre C pour
une résistance anticorrosion), ou plus souvent de non-tissé polyester thermoplastique.
4.2 Matrices thermodurcissables
La matrice permet de lier entre eux les différents renforts qui
composent le profilé.
■ Les matrices les plus utilisées sont les résines polyesters
insaturées, du fait de leur moindre coût.
Elles se divisent en trois catégories principales :
— résine orthophtalique, dite standard : elle suffit à la plupart
des applications ; on prendra un système très réactif à taux d’acide
maléique élevé ;
— résine isophtalique : elle est utilisée pour un meilleur
comportement chimique (meilleure résistance à l’hydrolyse) ;
— résines téréphtalique, tétrachloro ou tétrabromophtalique :
ces multiples combinaisons apportent à la résine de base des particularités intéressantes telles qu’une résistance thermique plus
importante, ou un comportement au feu amélioré.
■ Plus chères, les résines vinylesters confèrent aux composites une
résistance chimique particulièrement élevée. Elles sont donc utilisées pour les profilés destinés aux milieux fortement corrosifs.
■ Quand les composites doivent avoir des caractéristiques
mécaniques, électriques, chimiques particulièrement élevées, on
utilise des résines époxydes. Lorsqu’elles sont renforcées avec des
fibres appropriées (verre E, R, aramide et carbone), leurs prix élevés
sont en rapport avec les hautes performances obtenues.
En ce qui concerne la pultrusion, il est nécessaire de travailler
par imprégnation en bain avec un préchauffage de la résine
époxyde.
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■ Les résines phénoliques sont les premières à avoir apporté des
solutions au problème de comportement au feu [classement M 1
(réaction au feu) et F 1 (émission de fumées)] mais leurs caractéristiques mécaniques sont moyennes et leur mise en œuvre est rendue
délicate à cause de la catalyse acide et de la présence d’eau qui
rendent les profilés poreux (aspect de surface critique).
■ De nouvelles résines acryliques pour pultrusion, composées de
méthacrylate de méthyle et d’oligo-uréthane méthacrylique, sont
utilisées depuis peu. Malgré une résistance chimique intermédiaire
entre celles des résines orthophtalique et isophtalique, elles sont
intéressantes pour des applications exigeant la résistance au feu :
chargées à plus de 150 pp d’hydrate d’alumine, elles obtiennent un
classement M 1, F 1.
Nota : pp : partie pondérale pour 100 parties de résine.
Leur réactivité est aussi pour beaucoup dans leur progression
sur le marché de la pultrusion, car les vitesses de production (par
rapport à celle des résines polyesters) sont en général multipliées
par 1,5 à 2 en fonction de la complexité du profil. De plus, le taux
de réticulation voisin de 98,5 % confère des performances
mécaniques intéressantes (supérieures à celles des résines polyesters).
4.3 Charges et adjuvants des résines
thermodurcissables
— des agents dispersants utilisés pour maintenir les charges en
suspension (de 0,5 à 1 pp) et homogénéiser le mélange ;
— des agents mouillants qui facilitent l’imprégnation des renforts et améliorent la mouillabilité des charges (de 0,5 à 1 partie
par partie charge).
Une formulation de polyester type est donnée ci-dessous à titre
d’exemple (en parties pondérales) :
— résine M004 (Cray Valley) ...............................................100 pp
— styrène................................................................................ 5 pp
— antiretrait A 151 (Cray Valley)............................................ 15 pp
— anti-UV .............................................................................0,15 pp
— mouillant A 515 (BYK Chemie).........................................0,2 pp
— démoulant interne (stéarate de zinc) ...............................0,8 pp
— carbonate de calcium Millicarb (Omya) ............................ 30 pp
— catalyseur Trigonox 21 s (Akzo Nobel) .............................. 1 pp
— catalyseur Trigonox C (Akzo Nobel) .................................0,5 pp
Les catalyseurs, sous l’action de l’élévation de la température,
provoquent la réticulation à chaud de la résine et son durcissement.
4.4 Préparation des formulations
thermodurcissables
Les résines et les additifs sont choisis en fonction des propriétés
requises pour l’objet fini.
Les charges utilisées dans les formulations ne doivent pas être
incorporées dans le but unique d’abaisser les coûts par économie
de résine : en effet, l’homogénéisation coûteuse du mélange et
l’obligation de garder une viscosité suffisamment basse (0,4
à 0,6 Pa · s environ pour une formulation de polyester) rendent la
formulation plus chère.
Les charges améliorent le comportement et l’aspect du profilé :
— état de surface : carbonate de calcium (de 20 à 150 pp) ;
— coloration dans la masse : pigments minéraux et organiques
(de 0,5 à 3 pp) ;
— allégement : microsphères creuses de verre (de 5 à 10 pp) ;
— conduction thermique ou électrique : noir de carbone, poudre
de cuivre ou d’aluminium, etc. (de 1 à 5 pp).
Les charges peuvent être incorporées plus facilement en imprégnation par bain. Elles contribuent également à la diminution de
l’exothermicité du durcissement de la résine, ce qui favorise
l’absence de fissures dans le produit final mais limite la réactivité
de la résine et donc la vitesse de tirage.
Outre les charges, il y a obligation d’incorporer dans la formulation des additifs de type agent antiretrait pour compenser le retrait
dû à la réticulation des résines. Dans le cas des résines polyesters,
on utilise des additifs low shrink (polystyrène, polyéthylène, EPDM
ou polyuréthane greffé : de 10 à 20 pp). Quand les profilés exigent
de satisfaire à la classe A (aspect de surface requis dans l’industrie
automobile), on utilisera des formulations low profile en incorporant des additifs plus performants tels que du PVAC dans les
mêmes proportions (de 10 à 20 pp).
Pour combattre la dégradation due au rayonnement ultraviolet,
on utilisera des agents anti-UV dans la proportion de 0,2 à 1 pp.
Les autres additifs incorporés sont :
— des antioxydants, des antistatiques et des azurants ;
— des agents démoulants (liquide ou poudre) dans le but de
diminuer l’adhérence et les frottements dans la filière (de 0,5 à
1 pp) ;
Leur mélange nécessite un récipient propre avec un mélangeur
motorisé comportant un agitateur de diamètre suffisant (environ 1/4
du diamètre du récipient). La vitesse d’agitation doit être supérieure
à 2 000 tr/min.
L’ordre d’adjonction des additifs à une résine polyester est le
suivant : résine, agent antiretrait, styrène, agent mouillant, agent
dispersant, démoulant interne, additifs divers, charges, puis accélérateurs. Les catalyseurs sont incorporés juste avant la pultrusion.
Avant de procéder à la formulation d’une grande quantité de
résine, on aura soin de vérifier sur un échantillon la réactivité, le
temps de gel, la viscosité à chaud, ainsi que les propriétés obtenues
après réticulation.
4.5 Systèmes thermoplastiques
4.5.1 Renforts
Les renforts sont limités à quelques modes de présentation (fils
mêlés, FIT...) et peuvent varier légèrement en fonction des procédés
de transformation. Toutefois, dans la majeure partie des cas, ce sont
les rovings qui sont les plus utilisés (pour raisons économiques). À
cause de la viscosité élevée des thermoplastiques, même à chaud,
il est quasiment impossible d’utiliser des voiles ou des mats.
4.5.2 Formulations
Contrairement aux résines thermodurcissables dont les formulations sont préparées sur place par le pultrudeur, c’est au
compoundeur qu’il incombe de fournir le mélange (matière
thermoplastique + adjuvants) prêt à l’emploi pour la pultrusion.
Les polyamides et les polypropylènes sont les thermoplastiques
les plus adaptés à la pultrusion.
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5. Mise en œuvre du procédé
La pultrusion est un procédé industriel simple qui nécessite
cependant rigueur et maîtrise à toutes les étapes de la fabrication.
5.1 Alimentation en renfort
■ Les cantres sont destinés à recevoir des pelotes (dévidage intérieur vertical) ou des bobines (déroulage extérieur horizontal) de fils
de renfort.
Les cantres doivent être mis en place le plus près possible de
l’axe, afin de faciliter la présentation des fils dans le guidage en tête
de ligne. Ils doivent être prévus pour assurer une bonne tension des
fils.
■ Le guidage des renforts est un des postes clés du procédé. Il
assure le positionnement parfait de tous les renforts (fils, mats, tissus, voiles...) dans l’axe de la filière. Il est en deux parties principales
dans le cas d’une imprégnation par bain. La première partie assure
le maintien en tension et une répartition correcte des renforts avant
imprégnation ; elle est constituée d’une série de plaques en acier
usinées et polies ou de plaques en polyéthylène traité par flammage. Après imprégnation (bain), la seconde partie du guidage
assure l’essorage des renforts (élimination des excédents de résine)
et le maintien en place à l’entrée de la filière.
5.2 Imprégnation des renforts
par la résine
Deux modes d’imprégnation sont possibles dans le cas de résines
thermodurcissables.
■ On choisira l’imprégnation par bain dans les cas de taux élevés
de charges ou d’additifs. Cette technique permet d’imprégner mieux
et plus rapidement les renforts. En revanche, elle a pour principal
inconvénient la nécessité d’une ventilation importante (évacuation
des vapeurs de styrène ou de méthacrylate de méthyle utilisés
comme agents de réticulation des résines polyesters ou acryliques)
et d’un guidage très rigoureux dans les bacs d’imprégnation. De
plus, les réparations s’avèrent délicates en cas de casse des fils ou
des renforts lors de la pultrusion.
■ L’imprégnation par injection, quant à elle, nécessite des investissements en filière plus importants (environ 30 %). Les avantages
sont un faible dégagement de monomère, un guidage aisé des
renforts jusqu’à l’entrée de la filière, des réparations facilitées en cas
de casse, un démarrage et un arrêt de production plus faciles. Par
contre, les résines ne peuvent pas être chargées (problème de filtration des charges à travers les renforts). Elles ne peuvent pas non
plus être préchauffées (§ 5.3) et les performances mécaniques du
profilé pultrudé restent inférieures à celles obtenues après imprégnation par bain (entre 10 et 15 %).
On choisira donc ce mode d’imprégnation pour des profilés en
polyester/verre sans caractéristiques trop pointues et fabriqués en
grande série.
La qualité du produit fini dépend de façon importante de la qualité de l’imprégnation liée à l’ensimage et à la viscosité de la
résine.
Concrètement, les formules pultrudables doivent avoir une viscosité située entre 400 et 5 000 mPa.s. La qualité du mouillage des
fibres de renfort par la matrice dépend en première approximation
A 3 730 − 8
de quatre paramètres ; la viscosité initiale à température ambiante
(η), le temps d’imprégnation (t), la température du bain (Tb) et la
contrainte de cisaillement appliquée aux fibres dans le bain (σs).
Le mouillage est d’autant meilleur que t, Tb et σs sont plus élevés
et η plus faible.
La viscosité de la formulation entre également en jeu lors de l’essorage des renforts (η < 400 mPa · s entraîne une élimination importante de résine) ainsi que lors de l’entrée dans la filière où la pression
peut être trop forte si la viscosité est supérieure à 5 000 mPa · s (il
y a alors rupture des fils et déplacement des renforts dans le profilé.
5.3 Préchauffage des constituants
Le préchauffage se produit à trois niveaux : sur les renforts, sur
la résine et enfin sur les renforts imprégnés.
■ Le préchauffage des renforts (souvent par rayonnement infrarouge) sert à ôter l’humidité néfaste à l’imprégnation. La qualité
sans cesse améliorée des ensimages tend à rendre inutile cette opération.
■ Le préchauffage de la résine sert essentiellement à abaisser la
viscosité de la formulation, lorsque des diluants ne peuvent plus
être ajoutés. Le mode de chauffage le plus facile reste la conduction.
■ Lorsque les profilés présentent des sections importantes
(supérieures à 500 mm2), on a intérêt à adjoindre un préchauffage
des profilés à haute fréquence comprise entre 13 et 70 MHz ou par
microondes à 2 450 MHz, de manière à obtenir un profil de température constant dans la section du profilé, ce qui évite fissures,
cloques et défauts d’imprégnation, tout en permettant des cadences
élevées. Le choix entre microondes ou HF sera déterminé en fonction de la permittivité diélectrique de la matrice et de la surface projetée du profilé (les microondes seront préférées pour des pièces
massives).
5.4 Filière
5.4.1 Caractéristiques de la filière
La filière dans laquelle réticule la résine est l’élément qui donne
au profilé sa conformation.
La réalisation de la filière demande une précision maîtrisée pour
la rectification de chaque élément la constituant. Sa longueur est
fonction du type de résine utilisée pour le profilé (polyester : 1 m,
époxyde : 0,5 m). Elle est fabriquée à partir d’un acier dont la résistance à la rupture se situe entre 600 MPa (filière prototype) et
1 400 MPa (filière de production en grande série). La filière, après
rectification pour atteindre une rugosité Ra = 0,2, recevra un dépôt
de chrome d’environ 30 µm, qui servira de couche d’usure et sera
renouvelé après chaque campagne de production. La durée de vie
de cette couche varie en fonction de la longueur totale de profilé
tirée, du taux de verre, du taux et de la qualité des charges. Usuellement, cette durée de vie va de 30 km de profilé non chargé à
20 km pour les objets pultrudés fortement chargés (80 % en masse
de produit fini).
5.4.2 Chauffage de la filière
La réticulation, ou la polymérisation de la matrice, est le plus
souvent obtenue par élévation de la température (chauffage).
D’autres méthodes existent : irradiation sous ultraviolets ou rayons
gamma ou microondes, mais elles ne sont pas vraiment développées
de façon industrielle à cause du coût des résines et du dispositif
d’irradiation.
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Pour améliorer la réticulation, la filière est chauffée en plusieurs
parties (de 3 à 5 zones). Un profil de température type est présenté
sur la figure 5.
Dans la zone 1, la température est maintenue inférieure à la température d’initiation (c’est-à-dire de début de gélification) de la
résine pour éviter un durcissement prématuré.
Ensuite, on augmente progressivement la température de chauffage dans les zones 2 et 3 de manière à obtenir une réticulation
pratiquement complète.
La zone 4 n’est pas chauffée pour abaisser la température du
profilé jusqu’à une température inférieure à celle de transition
vitreuse, pour éviter des problèmes de déformation du profilé en
sortie de filière.
Ces chauffages par conduction sont électriques ou par fluide
caloporteur.
Le chauffage électrique est le plus utilisé grâce à sa souplesse
d’emploi, sa modularité et la précision de sa mise en place. De
plus, il est moins coûteux en termes d’investissement.
Les échanges thermiques par fluide caloporteur permettent une
régulation très précise du chauffage, une meilleure maîtrise de l’exothermicité de la réticulation chimique et des zones de refroidissement plus performantes, mais leur utilisation reste limitée par leur
manque de souplesse.
Quel que soit le système, chaque zone de la filière doit être régulée indépendamment.
5.5 Tirage du profilé
Deux systèmes de traction sont utilisés. En fonction de la puissance de tirage nécessaire, de la nature du profilé et des opérations complémentaires en ligne, on choisira :
— soit le tirage alternatif : ce système simple fonctionne avec
des forces de serrage et de tirage élevées ;
— soit le tirage par chenille qui permet en revanche de tirer des
profilés fragiles tels que des tubes et rend possible une extrusion
en ligne sans interruption du revêtement.
Dans les deux cas, des patins de traction, revêtus d’une couche
de polyuréthane souple, permettront une meilleure préhension du
profilé. Quel que soit le système utilisé, il devra avoir une régulation
très précise de la vitesse d’avancement (dans une plage de 0,1
à 60 m/min), de façon à assurer la qualité du produit pultrudé.
Les forces de traction peuvent être importantes (de 104 N
à 12 × 104 N) et l’on aura soin de surdimensionner le système de
préhension de manière à ce qu’il soit capable d’assurer le double
de la force de tirage nécessaire. Le système de traction doit être
placé suffisamment loin de la filière (minimum 3 m), de façon à
permettre le refroidissement naturel ou forcé (air pulsé ou eau) du
profilé avant son entrée dans le système de tirage.
5.6 Découpe du profilé
Une scie équipée d’un disque diamanté, montée sur une table
mobile, pince le profilé et le découpe pendant qu’il continue à avancer. La longueur voulue est déterminée soit par un contact actionné
par le profilé, soit par une programmation électronique.
Figure 5 – Profil de température dans la filière de pultrusion,
dans le cas d’une résine polyester
5.7 Instrumentation
Comme tout procédé industriel continu, il est utile, en plus des
contrôles sur la résine et sur les produits finis (§ 6.4, 6.5 et 6.6),
d’avoir des outils permettant une intervention rapide en cas de
dérive.
On peut donc placer une série de thermocouples à la surface de
la filière, qui vont permettre à la fois de suivre le bon fonctionnement de la régulation thermique et de situer le pic exothermique
(figure 5) à l’intérieur de la filière. L’instrumentation de la filière
reste cependant lourde et l’on peut se contenter de mesures ponctuelles en utilisant des fils de thermocouples perdus, tirés en même
temps que les renforts. Par ailleurs, la mesure de la force de traction
(en continu) par un capteur placé soit sur la machine de traction,
soit sur la filière, permet de détecter les efforts trop importants liés
à une gélification précoce, ou à une adhérence trop forte dans la
filière, ou à une mauvaise répartition des renforts, ou encore à un
taux de renfort trop important.
En phase de développement, il peut être envisagé le montage de
capteurs de pression dans la filière pour mieux connaître les
comportements des nouvelles formulations et des empilements de
renforts. Malheureusement, ces capteurs sont très vite dégradés et,
en fabrication, il vaut mieux se baser sur la force de tirage à sec
(renforts uniquement) que l’on peut considérer égale à 50 à 60 %
de la force de tirage totale (renforts + matrice).
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5.8 Maintenance et nettoyage
La production est généralement interrompue régulièrement (une
fois par semaine) pour entretenir les éléments de guidage et
d’imprégnation (bain), ceux-ci ayant tendance à se remplir de
bourre engendrée par les renforts. Le nettoyage s’effectue avec
des solvants de type cétones ou du chlorure de méthylène. Les solvants sont ensuite recyclés pour limiter leur consommation importante en cas d’imprégnation par bain.
La filière sera régulièrement contrôlée pour vérifier l’état du
chromage : lorsque c’est possible, on procède à l’arrêt du tirage,
puis à l’ouverture de la filière contenant le profilé entièrement réticulé (de manière à faciliter la remise en route de la ligne) ; il suffit
ensuite de repousser le profilé en arrière, puis de frotter la surface
intérieure de la filière avec du sulfate de cuivre. Le rechromage
sera nécessaire si la surface devient jaune (il est préférable, quand
les contre-dépouilles dans la filière sont accessibles, de mesurer
directement l’épaisseur de chrome restante).
Le nettoyage ne doit pas provoquer de chocs sur la filière et devra
se faire plutôt à chaud (c’est-à-dire filière non refroidie) en se
protégeant avec des gants et une aspiration appropriée. La filière
sera remontée avec des vis graissées. Les surfaces externes de la
filière et les éléments de chauffage devront être parfaitement
propres et correctement plaqués, pour assurer au contact le
meilleur transfert thermique possible.
5.9 Qualification du personnel
La pultrusion nécessite un personnel ayant une bonne
connaissance des mécanismes réactionnels de réticulation des
matrices thermodurcissables. L’encadrement, quant à lui, doit
impérativement posséder des connaissances précises en physique
des matériaux, et en comportement des polymères et des
composites. Par ailleurs, il doit avoir une solide expérience du métier
de pultrudeur car, bien souvent, le profilé ne sort que grâce à des
astuces et des connaissances empiriques que seule la pratique
permet d’acquérir.
6. Contrôle qualité
des produits pultrudés
6.1 Défauts et actions correctives
Avant toute action corrective sur la ligne, il faut définir précisément le problème à résoudre et sa fréquence d’apparition.
Les défauts les plus usuels et leurs causes ou remèdes sont :
— fissuration : vitesse de tirage trop importante, exothermicité
trop forte, trop ou pas assez de catalyseur ;
— cloque ou bulle : vitesse de tirage trop élevée ou température
de filière trop basse ;
— dureté trop faible : réticulation insuffisante en raison de la
température de filière trop basse ;
— retrait important : formuler le mélange, ajouter de l’agent antiretrait, augmenter le taux de renfort ou de charge ;
— blocage en filière : température trop élevée à l’entrée de filière
(donc réduire le préchauffage), taux de renfort trop élevé, ou mauvais état de surface de la filière ;
— gauchissement du profilé : chauffage dissymétrique, tension
importante des renforts, dissymétrie dans le positionnement des
renforts ;
— rupture des fils : embarrage trop fort (diminuer la tension des
fils), bourre trop importante (à nettoyer), qualité de l’ensimage (à
améliorer).
6.2 Gestion des rebuts
Les rebuts pultrudés à base de résine thermodurcissable sont
recyclés après broyage fin, pour servir de charge dans des formulations destinées à la pultrusion ou au moulage par compression
des SMC et BMC. Ce recyclage est assuré par des sociétés spécialisées (Valcor...).
En ce qui concerne les profilés thermoplastiques, les déchets
sont plus facilement recyclables : après broyage grossier, les granulés obtenus, de 5 à 10 mm de diamètre, peuvent être incorporés
dans les compounds pour injection à des taux pouvant atteindre
30 % environ en masse.
5.10 Hygiène et sécurité
6.3 « Traçabilité »
La conception des postes de travail doit permettre une extraction
efficace des vapeurs de monomères et des solvants de nettoyage.
Les coûts, tant d’achat des installations d’aspiration des vapeurs,
que de leur fonctionnement, restent modestes, car la captation du
styrène ou des autres monomères peut être effectuée à la source
près des bacs d’imprégnation.
En France, la concentration maximale admissible de styrène dans
l’air ambiant des ateliers est de 50 ppm en volume (soit 215 mg/m3).
Si le mode d’imprégnation choisi est l’injection, les valeurs
ambiantes dans les ateliers de pultrusion sont bien inférieures à
cette valeur limite.
5.11 Sources d’énergie
Les lignes de pultrusion utilisent tous les types d’énergie :
— énergie électrique ou hydraulique pour la traction ;
— énergie électrique (380 V) ou fluides caloporteurs pour le
chauffage ;
— air comprimé (6 bar) pour les opérations annexes (injection,
découpe, perçage, ponçage, mise en peinture).
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Le suivi des profilés est facilité par le marquage au jet d’encre
par exemple, ou encore grâce à l’inclusion d’un fil traceur en surface à la condition que celui-ci n’altère pas l’aspect.
Une fois les profilés repérés, il est facile d’identifier précisément
les différents constituants par les méthodes classiques de contrôle
de la qualité des matières premières.
6.4 Contrôle de réception
des constituants
Malgré un système d’assurance qualité aussi performant que
possible (certificats de conformité des fournisseurs), quelques
contrôles simples de réception doivent être réalisés :
— aspect général des renforts ;
— grammage et constituants des tissus de renfort ;
— titre des fils ou des mèches et ensimage ;
— viscosité de la résine et du durcisseur ;
— granulométrie et taux d’humidité des charges.
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6.5 Contrôle de la formulation
C’est l’étape de contrôle essentielle pour la qualité du produit
pultrudé.
Il faut donc, avant chaque démarrage de fabrication avec un nouveau chargement de résine, impérativement contrôler :
— l’homogénéité du mélange (par mesure colorimétrique ou par
mesure de la viscosité en différents points du mélange) ;
— la viscosité minimale de la résine (à chaud à la température
de la filière) ;
— la réactivité, le temps et la température d’initiation thermique,
le pic exothermique, le temps de gel physique par mesure en
continu de la viscosité.
6.6 Contrôle du produit fini
En fin de ligne, en plus des contrôles visuels et des contrôles
dimensionnels, un contrôle statistique des propriétés des profilés
sera effectué pour s’assurer de leur conformité au cahier des
charges.
Une bonne polymérisation sera contrôlée de préférence par des
moyens thermomécaniques ou thermiques (DMA : analyse
mécanique dynamique, simulateur de cuisson...) plutôt que par
analyse thermique différentielle en raison de l’aspect hétérogène du
pultrudé. De même, on évitera le test de dureté qui ne contrôle que
la surface et qui marque le profilé.
La tendance actuelle est aux contrôles non destructifs
systématiques, soit par ultrasons pour vérifier l’homogénéité des
profilés (délaminage, bulles), soit par des appareillages simples donnant les caractéristiques en flexion du composite (cf. article Essais
des plastiques renforcés [AM 5 405] dans le présent traité).
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R
Fabrication de profilés
en composites par pultrusion
E
N
par
Patrick BINSE
Responsable de production
Paturle Composites
Aspects économiques
Fibres de verre R (1 200 tex) ................................................................≈ 90 F/kg
Investissements
Le coût d’une ligne de pultrusion était globalement (en 1994) de :
• 100 à 500 kF pour le cantre, selon la qualité et le nombre de fils ;
• 1 000 kF pour la machine comprenant régulation et systèmes de traction
et de découpe.
Fibres de carbone de 3 à 12 K .....................................................150 à 500 F/kg
La filière coûte de 20 à 500 kF, mais son coût est intégré dans le coût du profilé
et ne doit pas être pris en compte dans l’investissement d’une ligne (comme
le moule dans les procédés de formage).
Tissus de carbone .........................................................................250 à 750 F/kg
Prix des résines thermodurcissables
Les ordres de grandeur en 1994 étaient les suivants :
— résine orthophtalique : 9 à 10 F/kg ;
— résine isophtalique : 12 F/kg ;
— résines téréphtalique, tétrachlorophtalique ou tétrabromophtalique :
12 F/kg ;
— résines vinylesters : 17 F/kg ;
— résines époxydes : 25 à 30 F/kg ;
— résines phénoliques : 15 F/kg ;
— résines acryliques : 20 F/kg.
Main-d’œuvre
La pultrusion est un procédé économique, nécessitant peu de temps de
main-d’œuvre.
À titre d’exemple, un profilé plat standard en polyester renforcé de fibres de
verre de 50 mm de large, 3 mm d’épaisseur, et 2 000 m de longueur ne demande
pas plus de 4 F par kilogramme transformé, ce qui représente environ 25 % du
prix de revient du profilé.
Fibres d’aramide.................................................................................≈ 300 F/kg
Tissus de verre E...............................................................................18 à 30 F/kg
Tissus d’aramide...........................................................................350 à 500 F/kg
Voile de surface...............................................................................90 à 300 F/kg
Prix de revient des profilés pultrudés
Ils étaient en 1994 de l’ordre de :
• 35 à 40 F/kg pour un composite polyester/fibres de verre (jonc plat
d’environ 500 g/m) ;
• 60 à 80 F/kg pour un composite polyester/fibres de verre (profilé
complexe de 6 kg/m) ;
• 60 à 100 F/kg pour un composite époxyde/fibres de verre ;
• 150 à 300 F/kg pour un composite époxyde/fibres de carbone ;
• 25 à 45 F/kg pour un composite PP/fibres de verre ;
• 35 à 80 F/kg pour un composite PA/fibres de verre ;
• 400 à 1 000 F/kg pour un composite PEEK/fibres de carbone.

PP : polypropylène
 matrices
PA : polyamide

thermoplastiques

PEEK : polyétheréthercétone 
En revanche, il est de loin préférable d’utiliser une main-d’œuvre qualifiée.
Prix des renforts
Ils sont donnés à titre indicatif pour 1994.
2 - 1995
Fibres de verre E (2 400 tex) ................................................................ ≈ 10 F/kg
Doc. A 3 730
S
A
V
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I
R
Bibliographie
GAY (D.). – Matériaux composites. 416 p., Hermès,
Paris (1987).
WEISS (J.) et BORD (C.). – Les matériaux
composites. Vol. 1, 640 p., CEP Éditions de
l’Usine Nouvelle, Paris (1983).
MEYER (R.W.). – Handbook of Pultrusion Technology. 177 p., Chapman and Hall, New York
(1985).
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Doc. A 3 730 − 1
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FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________
Structures professionnelles
Pultrudeurs
Fournisseurs de matières premières
(0)
Coflexip SA
DX Matériaux Composites.
E
N
Société
Epsilon Composite Sàrl
GDP (Sté).
Paturle Composites.
SNPE Sté Nationale des Poudres et Explosifs (filiale Structil).
Laboratoires d’essais
APAVE Association de Propriétaires d’Appareils à Vapeur et Électriques.
S
A
V
O
I
R
Laboratoires Pourquery.
Prodemat SA
Pultrusion Inc. Technology.
Nordic Supply.
BMO Composite SNC.
Chomarat et Cie (les Fils d’Auguste)
Comaip ..............................................
Cray Valley ........................................
DSM Résines France SA ..................
Fabricants de machines de pultrusion
Pultrex Ltd.
Akzo Fibers........................................
Akzo Nobel Chemicals Sàrl .............
Ashland Avébène
Produits Chimiques..........................
Dupont de Nemours
International SA................................
Nesté Polyester SA...........................
OCF Owens-Corning
Fiberglas SA......................................
Porcher Textile (Sté).........................
Soficar ...............................................
Vétrotex France SA ..........................
Fournitures
Renforts carbone, aramide
Catalyseurs
Résines polyesters – Résines
acryliques
Tissus et complexes de renfort
Adjuvants – Renforts
Résines polyesters – Résines phénoliques
Résines polyesters – Résines vinylesters
Renforts aramides
Résines polyesters
Fibres de verre et complexes
Tissus et complexes de renforts
(verre, carbone, aramide)
Fibres et tissus de carbone
Fibres de verre, tissus et complexes
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Doc. A 3 730 − 2
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