Fabrication de profilés en composites par pultrusion par Patrick BINSE Responsable de production Paturle Composites 1. Caractéristiques générales des procédés de pultrusion............... 2. Techniques de fabrication des composites à matrice thermodurcissable................................................................ — 3 3. Pultrusion des composites à matrice thermoplastique ................ — 5 4. Description des constituants ............................................................... — 6 5. Mise en œuvre du procédé .................................................................... — 8 6. Contrôle qualité des produits pultrudés ........................................... — 10 Pour en savoir plus........................................................................................... A 3 730 - 2 Doc. A 3 730 e vocable pultrusion est une contraction des termes anglo-saxons pull (tirer) et extrusion. La pultrusion est un procédé industriel modulable de fabrication de matériaux composites à matrice organique (thermoplastique ou thermodurcissable), qui permet l’obtention en continu de profilés de section géométrique constante. La pultrusion est apparue industriellement en 1948. La croissance de ce procédé a été très limitée pendant de nombreuses années à cause des faibles performances à la fois des matrices thermodurcissables et des machines. Sous l’impulsion des États-Unis, la pultrusion a connu ensuite un essor constant depuis une vingtaine d’années grâce à l’extrême variété des combinaisons réalisables (fibres de renfort, matrices, géométrie). Procédé continu, la pultrusion peut être comparée à l’extrusion des thermoplastiques ou de l’aluminium (filage). Les principaux avantages des produits pultrudés sont : — leur légèreté (70 % du poids d’un profilé en aluminium de propriétés équivalentes) ; — leurs propriétés mécaniques bien meilleures que celles des profilés thermoplastiques non renforcés ; — par rapport aux profilés en aluminium, leurs propriétés supérieures : • de résistance chimique, • de résistance thermique (stabilité dimensionnelle, isolation), • d’isolation électrique ; — la possibilité d’adapter le couple fibre-matrice aux contraintes du cahier des charges ; — les possibilités de renforts locaux et de coloration par pigments. Les principaux inconvénients restent : — le coût encore élevé des profilés, malgré une consommation d’énergie plus faible et une filière moins coûteuse que pour l’extrusion de l’aluminium ; A 3 730 2 - 1995 L Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 1 FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ — la complexité des calculs de structures ; — la longueur de la mise au point et des réglages pour des profilés complexes ; — la nécessité d’une main-d’œuvre qualifiée ; — la conception délicate des outillages. Comme exemples de produits pultrudés, citons : — en génie électrique : chemins de câble, isolateurs pour transformateur, perches isolantes, échelles ; — parmi les applications anticorrosion : conduites pour fluides, garde-corps, échelles, boulonnerie ; — en sports et loisirs : cannes de hockey, bâtons de ski, cannes de golf, flèches, lattes de voile ou de cerf-volant ; — dans le bâtiment : boulons d’ancrage, panneaux de façade, câbles de traction, poutres, signalisations, fenêtres, bancs de stade ; — dans les transports : assemblages de panneaux isolants. 1. Caractéristiques générales des procédés de pultrusion 1.1 Pultrusion des matières thermodurcissables Elle représente 95 % du total des produits pultrudés. Les fibres de renforcement sont préalablement imprégnées d’une résine liquide puis tirées au travers d’une filière (conformateur) qui donne la géométrie du profilé à obtenir. Sous l’action de la chaleur et du catalyseur, la résine, dans la filière, se transforme chimiquement de façon irréversible en une matrice solide, insoluble et infusible (réseau tridimensionnel). 1.2 Pultrusion des thermoplastiques Figure 1 – Schéma de principe d’une ligne de pultrusion Contrairement au cas précédent, la matrice thermoplastique est fluidifiée à chaud dans la filière, ce qui permet d’imprégner les fibres de renforcement de façon à obtenir les profilés en sortie de filière. 1.3 Matériel de pultrusion Dans les deux cas, il est composé de six éléments principaux (figure 1) : — le cantre (présentation des pelotes ou des bobines des fils de renforcement) ; — la zone d’imprégnation (par bain ou par injection) ; — le guidage des renforts ; — la filière ; — le système de traction ; — le système de découpe. La description du fonctionnement de ces éléments est donnée dans le paragraphe 4. A 3 730 − 2 1.4 Limitations géométriques La conception des pièces en pultrusion relève des principes généraux de la mécanique appliquée aux calculs des matériaux composites. Les géométries compatibles avec le procédé de pultrusion sont données dans le tableau 1. 1.5 Séries de fabrication La pultrusion est caractérisée par les vitesses de production (exprimées en mètres linéaires de profilés tirés) les plus élevées de tous les moyens de fabrication des composites. Elle permet, selon la complexité de la géométrie, de produire de 0,3 à 10 m/min (thermodurcissable) et au-delà de 60 m/min (thermoplastique). (0) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites ________________________________________________________________________________ FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION Tableau 1 – Critères géométriques de conception des pièces pultrudées Types de pièces et formes réalisables Exemples Possibilités Rayon minimal de courbure 0,2 mm Évidement et trous de moulage Non recommandés Les principales limitations de la cadence sont, par ordre d’importance décroissante : — le taux de renfort ; — la géométrie de la pièce ; — la quantité à produire d’un même profilé ; — les propriétés finales du matériau à obtenir ; — la réactivité du système thermodurcissable ; — la vitesse d’imprégnation. Comme tous les procédés de fabrication en continu, la pultrusion n’est économiquement valable que dans le cadre de grandes quantités (plus de 5 000 m/an) avec une exploitation en 3/8 (semaine continue de 5 jours) voire en 5/8 (week-end compris). Elle nécessite peu de temps de main-d’œuvre. Ébarbage à la fermeture du moule (pulpress, pulforming) Non Insert en bois ou en mousse polyuréthane Oui 1.6 Aspects économiques Contre-dépouilles Dépouille minimale Sans limite Épaisseur minimale 0,2 mm Épaisseur maximale Sans limite Tolérance dimensionnelle 0,2 mm Variations d’épaisseur Oui Section ondulée Oui Inserts métalliques Oui Voile de surface Oui Dimensions maximales Environ 2 m Insert métallique en bordure Ils sont donnés en fin d’article en [Doc. A 3 730]. 2. Techniques de fabrication des composites à matrice thermodurcissable 2.1 Pultrusion standard La pultrusion la plus courante permet de fabriquer des profilés de section constante hautement renforcés dans le sens longitudinal. Pour ce faire, les fibres de renfort (jusqu’à 60 % en volume) sont tirées à travers un bain d’imprégnation puis dans une filière chauffée, de manière à initier la réaction de réticulation (ou polymérisation). À la sortie de la filière, le profilé solide est refroidi suffisamment de façon à pouvoir être pincé dans la tireuse sans risque de déformation. La vitesse de tirage varie de façon importante en fonction de la matrice utilisée (réactivité), des taux de renfort et de charge, de la section et de la complexité du profilé. On peut donner à titre d’exemple les cadences suivantes : • 10 m/min pour un jonc de 2,5 mm de diamètre, en composite verre/polyester de haute réactivité, avec 55 % de renfort longitudinal ; • 0,6 m/min pour un profilé plat de section 20 mm × 50 mm en composite verre/polyester de haute réactivité, avec 55 % de renfort longitudinal ; • 0,2 m/min pour un profilé plat de section 20 mm × 50 mm, en composite carbone/époxy, avec 70 % de renfort longitudinal. Oui 2.2 Techniques complémentaires Bosses Non Ailettes Oui Sigles Non 2.2.1 Extrusion Non L’extrusion en ligne devient très utilisée pour améliorer le comportement du profilé aux agressions chimiques, et pour transformer l’aspect visuel ou le toucher. Dans le premier cas, la matière Nombres ou lettres en relief CS Les techniques complémentaires (figure 2) ont pour but principal l’obtention d’un composite de propriétés supérieures à celles du profilé pultrudé standard. Ces améliorations portent soit sur le renforcement non axial, soit sur l’aspect et la tenue aux agressions chimiques. Plusieurs techniques sont envisageables. Elles sont brièvement décrites ci-après. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 3 FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ Figure 2 – Pultrusion associée à des techniques complémentaires extrudée se comportera comme un revêtement protecteur à l’intérieur ou à l’extérieur d’un tube. Dans le second, le revêtement confère au profilé pultrudé des caractéristiques combinées d’aspect, de résistance à la rayure, une diversité dans les coloris très difficile à obtenir par pigmentation de la résine. les autres directions. L’enroulement filamentaire est réalisé par bobinage multiple (sur mandrin en règle générale) de fils de mèches ou de rubans avec des angles variables, ce qui apporte une résistance transversale au profilé. Ce renforcement est très souvent utilisé pour la fabrication de tubes sous pression. De la même manière, l’apport d’une couche externe d’élastomère thermoplastique (figure 2) permet une modification du toucher. 2.3 Pulpress 2.2.2 Peinture en ligne Cette technique moins complexe que l’extrusion présente l’intérêt de conférer au profilé un aspect de surface homogène et d’éviter les reprises coûteuses. La peinture est déposée en continu au pistolet entre la tireuse et le poste de sciage. Elle nécessite néanmoins un équipement d’aspiration des solvants important. 2.2.3 Enroulement filamentaire La pultrusion standard ne permet généralement que le renforcement axial (sauf dans le cas de contextures textiles plus complexes, § 4.1). Lorsque l’on doit obtenir des profilés ayant une bonne tenue à l’éclatement, à l’écrasement ou à toute sollicitation autre que traction axiale et flexion, il faut introduire des fibres continues dans A 3 730 − 4 Cette technique, développée par une société norvégienne (Nordic Supply), permet d’obtenir des formes à géométrie évolutive, mais de section constante. Les renforts imprégnés sont tirés en continu par des plateaux porteurs de moules métalliques chauffés. Le moulage à la forme désirée s’effectue par pressage vertical (figure 3). Alors que, dans la pultrusion standard, la vitesse de tirage est fonction de la réactivité de la résine et de la longueur de la filière, ici la cadence de fabrication dépend de l’opération de moulage et, de ce fait, on ne peut agir que sur la réactivité de la résine. Les principales applications sont la fabrication de manches d’outils, de tuiles, etc. Cette technique peut être associée à l’injection en cours de moulage d’une couche de finition IMC (in mold coating). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites ________________________________________________________________________________ FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION Les séries plus faibles que dans le cas de la pultrusion standard entraîne évidemment un prix de revient plus élevé. 2.4 Pulforming Le pulforming (quelquefois appelé pultrusion courbe) est une technique que la société américaine Goldsworthy a inventée et développée pour produire des profilés courbes, de géométrie constante ou non. Les renforts sont tirés, comme dans le procédé pulpress, en continu, mais le pressage discontinu s’effectue horizontalement. Les profilés obtenus ayant un taux de renfort très élevé, ils sont essentiellement destinés à des applications structurelles (lames de ressort pour véhicule). La ligne de pulforming (figure 4) se distingue par une table horizontale supportant un carrousel de moules femelles chauffées. Les parties mâles se referment sur les fibres imprégnées et les compriment de façon à obtenir la forme souhaitée. Figure 3 – Schéma de principe d’une ligne de pulpress 3. Pultrusion des composites à matrice thermoplastique La pultrusion des thermoplastiques est à ce jour peu répandue dans le monde parce que la présentation des fils et tissus n’est maîtrisée au niveau commercial que depuis peu et qu’elle ne permet pas toujours des transformations aisées. Par ailleurs, l’important apport thermique nécessaire pour fluidifier les différentes matrices avant leur introduction dans le conformateur (filière) est une limitation sérieuse. 3.1 Pultrusion à partir de fils préimprégnés Dans ce cas, la pultrusion nécessite deux étapes distinctes : — la préparation des fils préimprégnés ; — le passage de ces fils au travers de la filière. La préimprégnation des fils peut se faire à chaud : les fils sont immergés dans la matrice portée à une température suffisamment élevée pour être fluidifiée (hot-melt). Le FIT (fibre imprégnée de thermoplastique) est un procédé mis au point chez Elf Atochem et faisant l’objet d’une licence européenne accordée à Porcher Textiles, qui permet l’imprégnation à cœur (en lit fluidisé) de fibres de renforcement par des poudres thermoplastiques de faible granulométrie. Ces fibres de renforcement imprégnées sont ensuite gainées dans un thermoplastique (de nature identique à la poudre, ou non). De nouveaux fils préimprégnés de résines thermoplastiques sont apparus ces dernières années tels les : — commingled : fibres constituées de filaments continus mixtes (thermoplastique et renfort) entremêlés ; — bourdonnés : fils uniques bobinés sur une âme ; — guipés : fils multiples bobinés sur une âme. Les technologies par voie chaude permettent l’obtention de fils préimprégnés d’une grande variété (PP/ verre, PA / verre, PEI/carbone, PES/verre, PEEK/aramide, PA/carbone...). Nota : PP : polypropylène, PA : polyamide, PEI : polyétherimide, PES : polyéthersulfone, PEEK : polyétheréthercétone. Ces polymères « techniques » font l’objet d’articles spécialisés dans la rubrique MONOGRAPHIES DES THERMOPLASTIQUES de ce traité. Dans tous les cas, la pultrusion consiste à tirer ces fils imprégnés au travers d’une filière chauffée, afin d’obtenir la fluidification de la matrice donc un enrobage le meilleur possible des fibres de renforcement. Ce type de pultrusion reste expérimental autant à cause du coût très élevé des fibres préimprégnées et du procédé qui nécessite l’apport d’une grande quantité d’énergie, que de la grande difficulté d’obtenir un enrobage parfait de façon continue à des cadences élevées. Figure 4 – Installation de pulforming Cependant, les études ont montré la faisabilité de profilés haut de gamme (PEEK, PEI, PES, associés à des fibres de carbone ou de verre R) et leur compétitivité grâce à des vitesses de tirage très élevées de l’ordre de 30 à 60 m/min. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 5 FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ 3.2 Procédés divers Les composites thermoplastiques présentant des caractéristiques mécaniques élevées (résistance au choc) et une durabilité intéressante, de nombreuses études leur ont été consacrées. Citons, pour la pultrusion, la technique de dépolymérisation partielle par oxydation de la résine, qui, dans le cas du polypropylène, permet de réduire la viscosité à l’état fondu, ce qui a pour effet une meilleure imprégnation des fibres. Citons d’autres fibres imprégnées thermoplastiques obtenues par pultrusion, par les procédés développés par les sociétés Spiflex et Fiberod. 4. Description des constituants 4.1 Renforts pour matrices thermodurcissables On aura intérêt à choisir les renforts les moins chers. Toutefois, la possibilité de réaliser des profilés complexes impose l’utilisation de toutes formes d’architecture textile, même les plus sophistiquées. De nombreux renforts sont disponibles pour l’élaboration des matériaux composites. Ils se présentent sous différentes formes et se caractérisent par la contexture (tissus, fibres coupées, matelas de fibres longues ou de tissus aiguilletés), le grammage (en g/m2), le type de textiles (tricot, tissu, tresse, aiguilleté, complexe...), l’armure, etc. ■ Dès que l’on peut le faire, pour réduire le coût, il faut amener les fils directement à partir des cantres. Ces fils sont des rovings directs pour le renforcement mécanique ou bien des fils texturés (spun roving, bulky, voluminizato...), qui assurent le renforcement mécanique (plus faible d’environ deux tiers avec les fils texturés qu’avec les rovings directs) et l’occupation de l’espace à l’intérieur du profilé. Nota : ROVING DIRECT : ensemble de filaments continus obtenus directement en sortie de four. SPUN ROVING : fil à « bouclettes » permettant l’accrochage tridimensionnel. BULKY : fibre continue texturée. VOLUMINIZATO : fibre discontinue texturée. Les fils texturés permettent également un renforcement dans les trois directions, ce que ne peut pas apporter un roving. On les utilisera donc dès que la cohésion du profilé est menacée par des effets combinés de délaminage. Les fibres (verre, carbone, aramide...), constituées d’un assemblage de filaments continus, sont donc principalement utilisées pour le renforcement longitudinal du profilé, avec des taux de renfort élevés dans les cas du roving (62 % en volume). ■ Quand les contraintes mécaniques ne sont pas très élevées, on utilisera des mats (ensemble de fibres coupées, liées entre elles par un liant chimique). Pour pouvoir tirer sur ce type de renfort, on utilise des mats à liant fortement cohésif (liant en émulsion), de préférence aux mats à liant en poudre. Ces mats se divisent en deux qualités principales : — les mats à fibres longues (type Unifilo...), utilisés pour l’imprégnation par bain, servent à équilibrer les structures et il faut les positionner au centre ou de façon symétrique dans le profilé. A 3 730 − 6 Lorsque le profilé ne nécessite pas un taux de verre important, c’est ce type de renfort que l’on utilise avec, en plus, quelques rovings ou mèches qui supportent les efforts de traction dans la filière ; — les mats à fibres courtes sont moins chers mais ne peuvent pas être utilisés dans l’imprégnation par bain car leur liant est soluble dans le monomère. On choisit des grammages de 300 à 600 g/m2 avec des fils de 100 dtex environ pour les mats et les titres des fils vont de 1 200 à 4 800 (voire 5 000) tex (ou g/km) pour le verre, 12 K ou 24 K (c’est-à-dire 12 000 ou 24 000 filaments) pour le carbone. En ce qui concerne le verre, les ensimages des fils sont spécialement développés pour la pultrusion, par exemple R 25 B et H d’Owens Corning Fiberglas ou P 122 et P 166 de Vetrotex. ■ Les profilés complexes demandent des renforts tissés afin de supporter sans dommage des contraintes mécaniques importantes. Parmi les textures utilisables, on retient surtout les complexes aiguilletés ou non (style Rovimat, Volumat de Chomarat) pour avoir le renforcement dans les directions voulues [autres que le sens longitudinal (0o)], ainsi que l’inertie et l’aspect de surface nécessaires. Toujours pour répondre aux contraintes mécaniques, il faut pultruder des bandes tissées (de préférence bordées, surtout en imprégnation par bain). Il faudra faire attention à ce que ces tissus (toiles, tresses ou sergé), qui peuvent être déséquilibrés, aient suffisamment de chaîne (plus de 20 %) afin d’être tirés au travers de la filière. ■ Enfin, pour améliorer l’aspect de surface, il est possible d’employer des voiles de surface directement liés au tissu ou des renforts non tissés. Ils permettent également de conférer au composite pultrudé la résistance à un environnement agressif. Ces produits textiles sont à base de verre (voile de verre C pour une résistance anticorrosion), ou plus souvent de non-tissé polyester thermoplastique. 4.2 Matrices thermodurcissables La matrice permet de lier entre eux les différents renforts qui composent le profilé. ■ Les matrices les plus utilisées sont les résines polyesters insaturées, du fait de leur moindre coût. Elles se divisent en trois catégories principales : — résine orthophtalique, dite standard : elle suffit à la plupart des applications ; on prendra un système très réactif à taux d’acide maléique élevé ; — résine isophtalique : elle est utilisée pour un meilleur comportement chimique (meilleure résistance à l’hydrolyse) ; — résines téréphtalique, tétrachloro ou tétrabromophtalique : ces multiples combinaisons apportent à la résine de base des particularités intéressantes telles qu’une résistance thermique plus importante, ou un comportement au feu amélioré. ■ Plus chères, les résines vinylesters confèrent aux composites une résistance chimique particulièrement élevée. Elles sont donc utilisées pour les profilés destinés aux milieux fortement corrosifs. ■ Quand les composites doivent avoir des caractéristiques mécaniques, électriques, chimiques particulièrement élevées, on utilise des résines époxydes. Lorsqu’elles sont renforcées avec des fibres appropriées (verre E, R, aramide et carbone), leurs prix élevés sont en rapport avec les hautes performances obtenues. En ce qui concerne la pultrusion, il est nécessaire de travailler par imprégnation en bain avec un préchauffage de la résine époxyde. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites ________________________________________________________________________________ FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION ■ Les résines phénoliques sont les premières à avoir apporté des solutions au problème de comportement au feu [classement M 1 (réaction au feu) et F 1 (émission de fumées)] mais leurs caractéristiques mécaniques sont moyennes et leur mise en œuvre est rendue délicate à cause de la catalyse acide et de la présence d’eau qui rendent les profilés poreux (aspect de surface critique). ■ De nouvelles résines acryliques pour pultrusion, composées de méthacrylate de méthyle et d’oligo-uréthane méthacrylique, sont utilisées depuis peu. Malgré une résistance chimique intermédiaire entre celles des résines orthophtalique et isophtalique, elles sont intéressantes pour des applications exigeant la résistance au feu : chargées à plus de 150 pp d’hydrate d’alumine, elles obtiennent un classement M 1, F 1. Nota : pp : partie pondérale pour 100 parties de résine. Leur réactivité est aussi pour beaucoup dans leur progression sur le marché de la pultrusion, car les vitesses de production (par rapport à celle des résines polyesters) sont en général multipliées par 1,5 à 2 en fonction de la complexité du profil. De plus, le taux de réticulation voisin de 98,5 % confère des performances mécaniques intéressantes (supérieures à celles des résines polyesters). 4.3 Charges et adjuvants des résines thermodurcissables — des agents dispersants utilisés pour maintenir les charges en suspension (de 0,5 à 1 pp) et homogénéiser le mélange ; — des agents mouillants qui facilitent l’imprégnation des renforts et améliorent la mouillabilité des charges (de 0,5 à 1 partie par partie charge). Une formulation de polyester type est donnée ci-dessous à titre d’exemple (en parties pondérales) : — résine M004 (Cray Valley) ...............................................100 pp — styrène................................................................................ 5 pp — antiretrait A 151 (Cray Valley)............................................ 15 pp — anti-UV .............................................................................0,15 pp — mouillant A 515 (BYK Chemie).........................................0,2 pp — démoulant interne (stéarate de zinc) ...............................0,8 pp — carbonate de calcium Millicarb (Omya) ............................ 30 pp — catalyseur Trigonox 21 s (Akzo Nobel) .............................. 1 pp — catalyseur Trigonox C (Akzo Nobel) .................................0,5 pp Les catalyseurs, sous l’action de l’élévation de la température, provoquent la réticulation à chaud de la résine et son durcissement. 4.4 Préparation des formulations thermodurcissables Les résines et les additifs sont choisis en fonction des propriétés requises pour l’objet fini. Les charges utilisées dans les formulations ne doivent pas être incorporées dans le but unique d’abaisser les coûts par économie de résine : en effet, l’homogénéisation coûteuse du mélange et l’obligation de garder une viscosité suffisamment basse (0,4 à 0,6 Pa · s environ pour une formulation de polyester) rendent la formulation plus chère. Les charges améliorent le comportement et l’aspect du profilé : — état de surface : carbonate de calcium (de 20 à 150 pp) ; — coloration dans la masse : pigments minéraux et organiques (de 0,5 à 3 pp) ; — allégement : microsphères creuses de verre (de 5 à 10 pp) ; — conduction thermique ou électrique : noir de carbone, poudre de cuivre ou d’aluminium, etc. (de 1 à 5 pp). Les charges peuvent être incorporées plus facilement en imprégnation par bain. Elles contribuent également à la diminution de l’exothermicité du durcissement de la résine, ce qui favorise l’absence de fissures dans le produit final mais limite la réactivité de la résine et donc la vitesse de tirage. Outre les charges, il y a obligation d’incorporer dans la formulation des additifs de type agent antiretrait pour compenser le retrait dû à la réticulation des résines. Dans le cas des résines polyesters, on utilise des additifs low shrink (polystyrène, polyéthylène, EPDM ou polyuréthane greffé : de 10 à 20 pp). Quand les profilés exigent de satisfaire à la classe A (aspect de surface requis dans l’industrie automobile), on utilisera des formulations low profile en incorporant des additifs plus performants tels que du PVAC dans les mêmes proportions (de 10 à 20 pp). Pour combattre la dégradation due au rayonnement ultraviolet, on utilisera des agents anti-UV dans la proportion de 0,2 à 1 pp. Les autres additifs incorporés sont : — des antioxydants, des antistatiques et des azurants ; — des agents démoulants (liquide ou poudre) dans le but de diminuer l’adhérence et les frottements dans la filière (de 0,5 à 1 pp) ; Leur mélange nécessite un récipient propre avec un mélangeur motorisé comportant un agitateur de diamètre suffisant (environ 1/4 du diamètre du récipient). La vitesse d’agitation doit être supérieure à 2 000 tr/min. L’ordre d’adjonction des additifs à une résine polyester est le suivant : résine, agent antiretrait, styrène, agent mouillant, agent dispersant, démoulant interne, additifs divers, charges, puis accélérateurs. Les catalyseurs sont incorporés juste avant la pultrusion. Avant de procéder à la formulation d’une grande quantité de résine, on aura soin de vérifier sur un échantillon la réactivité, le temps de gel, la viscosité à chaud, ainsi que les propriétés obtenues après réticulation. 4.5 Systèmes thermoplastiques 4.5.1 Renforts Les renforts sont limités à quelques modes de présentation (fils mêlés, FIT...) et peuvent varier légèrement en fonction des procédés de transformation. Toutefois, dans la majeure partie des cas, ce sont les rovings qui sont les plus utilisés (pour raisons économiques). À cause de la viscosité élevée des thermoplastiques, même à chaud, il est quasiment impossible d’utiliser des voiles ou des mats. 4.5.2 Formulations Contrairement aux résines thermodurcissables dont les formulations sont préparées sur place par le pultrudeur, c’est au compoundeur qu’il incombe de fournir le mélange (matière thermoplastique + adjuvants) prêt à l’emploi pour la pultrusion. Les polyamides et les polypropylènes sont les thermoplastiques les plus adaptés à la pultrusion. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 7 FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ 5. Mise en œuvre du procédé La pultrusion est un procédé industriel simple qui nécessite cependant rigueur et maîtrise à toutes les étapes de la fabrication. 5.1 Alimentation en renfort ■ Les cantres sont destinés à recevoir des pelotes (dévidage intérieur vertical) ou des bobines (déroulage extérieur horizontal) de fils de renfort. Les cantres doivent être mis en place le plus près possible de l’axe, afin de faciliter la présentation des fils dans le guidage en tête de ligne. Ils doivent être prévus pour assurer une bonne tension des fils. ■ Le guidage des renforts est un des postes clés du procédé. Il assure le positionnement parfait de tous les renforts (fils, mats, tissus, voiles...) dans l’axe de la filière. Il est en deux parties principales dans le cas d’une imprégnation par bain. La première partie assure le maintien en tension et une répartition correcte des renforts avant imprégnation ; elle est constituée d’une série de plaques en acier usinées et polies ou de plaques en polyéthylène traité par flammage. Après imprégnation (bain), la seconde partie du guidage assure l’essorage des renforts (élimination des excédents de résine) et le maintien en place à l’entrée de la filière. 5.2 Imprégnation des renforts par la résine Deux modes d’imprégnation sont possibles dans le cas de résines thermodurcissables. ■ On choisira l’imprégnation par bain dans les cas de taux élevés de charges ou d’additifs. Cette technique permet d’imprégner mieux et plus rapidement les renforts. En revanche, elle a pour principal inconvénient la nécessité d’une ventilation importante (évacuation des vapeurs de styrène ou de méthacrylate de méthyle utilisés comme agents de réticulation des résines polyesters ou acryliques) et d’un guidage très rigoureux dans les bacs d’imprégnation. De plus, les réparations s’avèrent délicates en cas de casse des fils ou des renforts lors de la pultrusion. ■ L’imprégnation par injection, quant à elle, nécessite des investissements en filière plus importants (environ 30 %). Les avantages sont un faible dégagement de monomère, un guidage aisé des renforts jusqu’à l’entrée de la filière, des réparations facilitées en cas de casse, un démarrage et un arrêt de production plus faciles. Par contre, les résines ne peuvent pas être chargées (problème de filtration des charges à travers les renforts). Elles ne peuvent pas non plus être préchauffées (§ 5.3) et les performances mécaniques du profilé pultrudé restent inférieures à celles obtenues après imprégnation par bain (entre 10 et 15 %). On choisira donc ce mode d’imprégnation pour des profilés en polyester/verre sans caractéristiques trop pointues et fabriqués en grande série. La qualité du produit fini dépend de façon importante de la qualité de l’imprégnation liée à l’ensimage et à la viscosité de la résine. Concrètement, les formules pultrudables doivent avoir une viscosité située entre 400 et 5 000 mPa.s. La qualité du mouillage des fibres de renfort par la matrice dépend en première approximation A 3 730 − 8 de quatre paramètres ; la viscosité initiale à température ambiante (η), le temps d’imprégnation (t), la température du bain (Tb) et la contrainte de cisaillement appliquée aux fibres dans le bain (σs). Le mouillage est d’autant meilleur que t, Tb et σs sont plus élevés et η plus faible. La viscosité de la formulation entre également en jeu lors de l’essorage des renforts (η < 400 mPa · s entraîne une élimination importante de résine) ainsi que lors de l’entrée dans la filière où la pression peut être trop forte si la viscosité est supérieure à 5 000 mPa · s (il y a alors rupture des fils et déplacement des renforts dans le profilé. 5.3 Préchauffage des constituants Le préchauffage se produit à trois niveaux : sur les renforts, sur la résine et enfin sur les renforts imprégnés. ■ Le préchauffage des renforts (souvent par rayonnement infrarouge) sert à ôter l’humidité néfaste à l’imprégnation. La qualité sans cesse améliorée des ensimages tend à rendre inutile cette opération. ■ Le préchauffage de la résine sert essentiellement à abaisser la viscosité de la formulation, lorsque des diluants ne peuvent plus être ajoutés. Le mode de chauffage le plus facile reste la conduction. ■ Lorsque les profilés présentent des sections importantes (supérieures à 500 mm2), on a intérêt à adjoindre un préchauffage des profilés à haute fréquence comprise entre 13 et 70 MHz ou par microondes à 2 450 MHz, de manière à obtenir un profil de température constant dans la section du profilé, ce qui évite fissures, cloques et défauts d’imprégnation, tout en permettant des cadences élevées. Le choix entre microondes ou HF sera déterminé en fonction de la permittivité diélectrique de la matrice et de la surface projetée du profilé (les microondes seront préférées pour des pièces massives). 5.4 Filière 5.4.1 Caractéristiques de la filière La filière dans laquelle réticule la résine est l’élément qui donne au profilé sa conformation. La réalisation de la filière demande une précision maîtrisée pour la rectification de chaque élément la constituant. Sa longueur est fonction du type de résine utilisée pour le profilé (polyester : 1 m, époxyde : 0,5 m). Elle est fabriquée à partir d’un acier dont la résistance à la rupture se situe entre 600 MPa (filière prototype) et 1 400 MPa (filière de production en grande série). La filière, après rectification pour atteindre une rugosité Ra = 0,2, recevra un dépôt de chrome d’environ 30 µm, qui servira de couche d’usure et sera renouvelé après chaque campagne de production. La durée de vie de cette couche varie en fonction de la longueur totale de profilé tirée, du taux de verre, du taux et de la qualité des charges. Usuellement, cette durée de vie va de 30 km de profilé non chargé à 20 km pour les objets pultrudés fortement chargés (80 % en masse de produit fini). 5.4.2 Chauffage de la filière La réticulation, ou la polymérisation de la matrice, est le plus souvent obtenue par élévation de la température (chauffage). D’autres méthodes existent : irradiation sous ultraviolets ou rayons gamma ou microondes, mais elles ne sont pas vraiment développées de façon industrielle à cause du coût des résines et du dispositif d’irradiation. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites ________________________________________________________________________________ FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION Pour améliorer la réticulation, la filière est chauffée en plusieurs parties (de 3 à 5 zones). Un profil de température type est présenté sur la figure 5. Dans la zone 1, la température est maintenue inférieure à la température d’initiation (c’est-à-dire de début de gélification) de la résine pour éviter un durcissement prématuré. Ensuite, on augmente progressivement la température de chauffage dans les zones 2 et 3 de manière à obtenir une réticulation pratiquement complète. La zone 4 n’est pas chauffée pour abaisser la température du profilé jusqu’à une température inférieure à celle de transition vitreuse, pour éviter des problèmes de déformation du profilé en sortie de filière. Ces chauffages par conduction sont électriques ou par fluide caloporteur. Le chauffage électrique est le plus utilisé grâce à sa souplesse d’emploi, sa modularité et la précision de sa mise en place. De plus, il est moins coûteux en termes d’investissement. Les échanges thermiques par fluide caloporteur permettent une régulation très précise du chauffage, une meilleure maîtrise de l’exothermicité de la réticulation chimique et des zones de refroidissement plus performantes, mais leur utilisation reste limitée par leur manque de souplesse. Quel que soit le système, chaque zone de la filière doit être régulée indépendamment. 5.5 Tirage du profilé Deux systèmes de traction sont utilisés. En fonction de la puissance de tirage nécessaire, de la nature du profilé et des opérations complémentaires en ligne, on choisira : — soit le tirage alternatif : ce système simple fonctionne avec des forces de serrage et de tirage élevées ; — soit le tirage par chenille qui permet en revanche de tirer des profilés fragiles tels que des tubes et rend possible une extrusion en ligne sans interruption du revêtement. Dans les deux cas, des patins de traction, revêtus d’une couche de polyuréthane souple, permettront une meilleure préhension du profilé. Quel que soit le système utilisé, il devra avoir une régulation très précise de la vitesse d’avancement (dans une plage de 0,1 à 60 m/min), de façon à assurer la qualité du produit pultrudé. Les forces de traction peuvent être importantes (de 104 N à 12 × 104 N) et l’on aura soin de surdimensionner le système de préhension de manière à ce qu’il soit capable d’assurer le double de la force de tirage nécessaire. Le système de traction doit être placé suffisamment loin de la filière (minimum 3 m), de façon à permettre le refroidissement naturel ou forcé (air pulsé ou eau) du profilé avant son entrée dans le système de tirage. 5.6 Découpe du profilé Une scie équipée d’un disque diamanté, montée sur une table mobile, pince le profilé et le découpe pendant qu’il continue à avancer. La longueur voulue est déterminée soit par un contact actionné par le profilé, soit par une programmation électronique. Figure 5 – Profil de température dans la filière de pultrusion, dans le cas d’une résine polyester 5.7 Instrumentation Comme tout procédé industriel continu, il est utile, en plus des contrôles sur la résine et sur les produits finis (§ 6.4, 6.5 et 6.6), d’avoir des outils permettant une intervention rapide en cas de dérive. On peut donc placer une série de thermocouples à la surface de la filière, qui vont permettre à la fois de suivre le bon fonctionnement de la régulation thermique et de situer le pic exothermique (figure 5) à l’intérieur de la filière. L’instrumentation de la filière reste cependant lourde et l’on peut se contenter de mesures ponctuelles en utilisant des fils de thermocouples perdus, tirés en même temps que les renforts. Par ailleurs, la mesure de la force de traction (en continu) par un capteur placé soit sur la machine de traction, soit sur la filière, permet de détecter les efforts trop importants liés à une gélification précoce, ou à une adhérence trop forte dans la filière, ou à une mauvaise répartition des renforts, ou encore à un taux de renfort trop important. En phase de développement, il peut être envisagé le montage de capteurs de pression dans la filière pour mieux connaître les comportements des nouvelles formulations et des empilements de renforts. Malheureusement, ces capteurs sont très vite dégradés et, en fabrication, il vaut mieux se baser sur la force de tirage à sec (renforts uniquement) que l’on peut considérer égale à 50 à 60 % de la force de tirage totale (renforts + matrice). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 9 FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ 5.8 Maintenance et nettoyage La production est généralement interrompue régulièrement (une fois par semaine) pour entretenir les éléments de guidage et d’imprégnation (bain), ceux-ci ayant tendance à se remplir de bourre engendrée par les renforts. Le nettoyage s’effectue avec des solvants de type cétones ou du chlorure de méthylène. Les solvants sont ensuite recyclés pour limiter leur consommation importante en cas d’imprégnation par bain. La filière sera régulièrement contrôlée pour vérifier l’état du chromage : lorsque c’est possible, on procède à l’arrêt du tirage, puis à l’ouverture de la filière contenant le profilé entièrement réticulé (de manière à faciliter la remise en route de la ligne) ; il suffit ensuite de repousser le profilé en arrière, puis de frotter la surface intérieure de la filière avec du sulfate de cuivre. Le rechromage sera nécessaire si la surface devient jaune (il est préférable, quand les contre-dépouilles dans la filière sont accessibles, de mesurer directement l’épaisseur de chrome restante). Le nettoyage ne doit pas provoquer de chocs sur la filière et devra se faire plutôt à chaud (c’est-à-dire filière non refroidie) en se protégeant avec des gants et une aspiration appropriée. La filière sera remontée avec des vis graissées. Les surfaces externes de la filière et les éléments de chauffage devront être parfaitement propres et correctement plaqués, pour assurer au contact le meilleur transfert thermique possible. 5.9 Qualification du personnel La pultrusion nécessite un personnel ayant une bonne connaissance des mécanismes réactionnels de réticulation des matrices thermodurcissables. L’encadrement, quant à lui, doit impérativement posséder des connaissances précises en physique des matériaux, et en comportement des polymères et des composites. Par ailleurs, il doit avoir une solide expérience du métier de pultrudeur car, bien souvent, le profilé ne sort que grâce à des astuces et des connaissances empiriques que seule la pratique permet d’acquérir. 6. Contrôle qualité des produits pultrudés 6.1 Défauts et actions correctives Avant toute action corrective sur la ligne, il faut définir précisément le problème à résoudre et sa fréquence d’apparition. Les défauts les plus usuels et leurs causes ou remèdes sont : — fissuration : vitesse de tirage trop importante, exothermicité trop forte, trop ou pas assez de catalyseur ; — cloque ou bulle : vitesse de tirage trop élevée ou température de filière trop basse ; — dureté trop faible : réticulation insuffisante en raison de la température de filière trop basse ; — retrait important : formuler le mélange, ajouter de l’agent antiretrait, augmenter le taux de renfort ou de charge ; — blocage en filière : température trop élevée à l’entrée de filière (donc réduire le préchauffage), taux de renfort trop élevé, ou mauvais état de surface de la filière ; — gauchissement du profilé : chauffage dissymétrique, tension importante des renforts, dissymétrie dans le positionnement des renforts ; — rupture des fils : embarrage trop fort (diminuer la tension des fils), bourre trop importante (à nettoyer), qualité de l’ensimage (à améliorer). 6.2 Gestion des rebuts Les rebuts pultrudés à base de résine thermodurcissable sont recyclés après broyage fin, pour servir de charge dans des formulations destinées à la pultrusion ou au moulage par compression des SMC et BMC. Ce recyclage est assuré par des sociétés spécialisées (Valcor...). En ce qui concerne les profilés thermoplastiques, les déchets sont plus facilement recyclables : après broyage grossier, les granulés obtenus, de 5 à 10 mm de diamètre, peuvent être incorporés dans les compounds pour injection à des taux pouvant atteindre 30 % environ en masse. 5.10 Hygiène et sécurité 6.3 « Traçabilité » La conception des postes de travail doit permettre une extraction efficace des vapeurs de monomères et des solvants de nettoyage. Les coûts, tant d’achat des installations d’aspiration des vapeurs, que de leur fonctionnement, restent modestes, car la captation du styrène ou des autres monomères peut être effectuée à la source près des bacs d’imprégnation. En France, la concentration maximale admissible de styrène dans l’air ambiant des ateliers est de 50 ppm en volume (soit 215 mg/m3). Si le mode d’imprégnation choisi est l’injection, les valeurs ambiantes dans les ateliers de pultrusion sont bien inférieures à cette valeur limite. 5.11 Sources d’énergie Les lignes de pultrusion utilisent tous les types d’énergie : — énergie électrique ou hydraulique pour la traction ; — énergie électrique (380 V) ou fluides caloporteurs pour le chauffage ; — air comprimé (6 bar) pour les opérations annexes (injection, découpe, perçage, ponçage, mise en peinture). A 3 730 − 10 Le suivi des profilés est facilité par le marquage au jet d’encre par exemple, ou encore grâce à l’inclusion d’un fil traceur en surface à la condition que celui-ci n’altère pas l’aspect. Une fois les profilés repérés, il est facile d’identifier précisément les différents constituants par les méthodes classiques de contrôle de la qualité des matières premières. 6.4 Contrôle de réception des constituants Malgré un système d’assurance qualité aussi performant que possible (certificats de conformité des fournisseurs), quelques contrôles simples de réception doivent être réalisés : — aspect général des renforts ; — grammage et constituants des tissus de renfort ; — titre des fils ou des mèches et ensimage ; — viscosité de la résine et du durcisseur ; — granulométrie et taux d’humidité des charges. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites ________________________________________________________________________________ FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION 6.5 Contrôle de la formulation C’est l’étape de contrôle essentielle pour la qualité du produit pultrudé. Il faut donc, avant chaque démarrage de fabrication avec un nouveau chargement de résine, impérativement contrôler : — l’homogénéité du mélange (par mesure colorimétrique ou par mesure de la viscosité en différents points du mélange) ; — la viscosité minimale de la résine (à chaud à la température de la filière) ; — la réactivité, le temps et la température d’initiation thermique, le pic exothermique, le temps de gel physique par mesure en continu de la viscosité. 6.6 Contrôle du produit fini En fin de ligne, en plus des contrôles visuels et des contrôles dimensionnels, un contrôle statistique des propriétés des profilés sera effectué pour s’assurer de leur conformité au cahier des charges. Une bonne polymérisation sera contrôlée de préférence par des moyens thermomécaniques ou thermiques (DMA : analyse mécanique dynamique, simulateur de cuisson...) plutôt que par analyse thermique différentielle en raison de l’aspect hétérogène du pultrudé. De même, on évitera le test de dureté qui ne contrôle que la surface et qui marque le profilé. La tendance actuelle est aux contrôles non destructifs systématiques, soit par ultrasons pour vérifier l’homogénéité des profilés (délaminage, bulles), soit par des appareillages simples donnant les caractéristiques en flexion du composite (cf. article Essais des plastiques renforcés [AM 5 405] dans le présent traité). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites A 3 730 − 11 P O U R Fabrication de profilés en composites par pultrusion E N par Patrick BINSE Responsable de production Paturle Composites Aspects économiques Fibres de verre R (1 200 tex) ................................................................≈ 90 F/kg Investissements Le coût d’une ligne de pultrusion était globalement (en 1994) de : • 100 à 500 kF pour le cantre, selon la qualité et le nombre de fils ; • 1 000 kF pour la machine comprenant régulation et systèmes de traction et de découpe. Fibres de carbone de 3 à 12 K .....................................................150 à 500 F/kg La filière coûte de 20 à 500 kF, mais son coût est intégré dans le coût du profilé et ne doit pas être pris en compte dans l’investissement d’une ligne (comme le moule dans les procédés de formage). Tissus de carbone .........................................................................250 à 750 F/kg Prix des résines thermodurcissables Les ordres de grandeur en 1994 étaient les suivants : — résine orthophtalique : 9 à 10 F/kg ; — résine isophtalique : 12 F/kg ; — résines téréphtalique, tétrachlorophtalique ou tétrabromophtalique : 12 F/kg ; — résines vinylesters : 17 F/kg ; — résines époxydes : 25 à 30 F/kg ; — résines phénoliques : 15 F/kg ; — résines acryliques : 20 F/kg. Main-d’œuvre La pultrusion est un procédé économique, nécessitant peu de temps de main-d’œuvre. À titre d’exemple, un profilé plat standard en polyester renforcé de fibres de verre de 50 mm de large, 3 mm d’épaisseur, et 2 000 m de longueur ne demande pas plus de 4 F par kilogramme transformé, ce qui représente environ 25 % du prix de revient du profilé. Fibres d’aramide.................................................................................≈ 300 F/kg Tissus de verre E...............................................................................18 à 30 F/kg Tissus d’aramide...........................................................................350 à 500 F/kg Voile de surface...............................................................................90 à 300 F/kg Prix de revient des profilés pultrudés Ils étaient en 1994 de l’ordre de : • 35 à 40 F/kg pour un composite polyester/fibres de verre (jonc plat d’environ 500 g/m) ; • 60 à 80 F/kg pour un composite polyester/fibres de verre (profilé complexe de 6 kg/m) ; • 60 à 100 F/kg pour un composite époxyde/fibres de verre ; • 150 à 300 F/kg pour un composite époxyde/fibres de carbone ; • 25 à 45 F/kg pour un composite PP/fibres de verre ; • 35 à 80 F/kg pour un composite PA/fibres de verre ; • 400 à 1 000 F/kg pour un composite PEEK/fibres de carbone. PP : polypropylène matrices PA : polyamide thermoplastiques PEEK : polyétheréthercétone En revanche, il est de loin préférable d’utiliser une main-d’œuvre qualifiée. Prix des renforts Ils sont donnés à titre indicatif pour 1994. 2 - 1995 Fibres de verre E (2 400 tex) ................................................................ ≈ 10 F/kg Doc. A 3 730 S A V O I R Bibliographie GAY (D.). – Matériaux composites. 416 p., Hermès, Paris (1987). WEISS (J.) et BORD (C.). – Les matériaux composites. Vol. 1, 640 p., CEP Éditions de l’Usine Nouvelle, Paris (1983). MEYER (R.W.). – Handbook of Pultrusion Technology. 177 p., Chapman and Hall, New York (1985). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites Doc. A 3 730 − 1 P L U S P O U R FABRICATION DE PROFILÉS EN COMPOSITES PAR PULTRUSION _________________________________________________________________________________ Structures professionnelles Pultrudeurs Fournisseurs de matières premières (0) Coflexip SA DX Matériaux Composites. E N Société Epsilon Composite Sàrl GDP (Sté). Paturle Composites. SNPE Sté Nationale des Poudres et Explosifs (filiale Structil). Laboratoires d’essais APAVE Association de Propriétaires d’Appareils à Vapeur et Électriques. S A V O I R Laboratoires Pourquery. Prodemat SA Pultrusion Inc. Technology. Nordic Supply. BMO Composite SNC. Chomarat et Cie (les Fils d’Auguste) Comaip .............................................. Cray Valley ........................................ DSM Résines France SA .................. Fabricants de machines de pultrusion Pultrex Ltd. Akzo Fibers........................................ Akzo Nobel Chemicals Sàrl ............. Ashland Avébène Produits Chimiques.......................... Dupont de Nemours International SA................................ Nesté Polyester SA........................... OCF Owens-Corning Fiberglas SA...................................... Porcher Textile (Sté)......................... Soficar ............................................... Vétrotex France SA .......................... Fournitures Renforts carbone, aramide Catalyseurs Résines polyesters – Résines acryliques Tissus et complexes de renfort Adjuvants – Renforts Résines polyesters – Résines phénoliques Résines polyesters – Résines vinylesters Renforts aramides Résines polyesters Fibres de verre et complexes Tissus et complexes de renforts (verre, carbone, aramide) Fibres et tissus de carbone Fibres de verre, tissus et complexes P L U S Doc. A 3 730 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. − © Techniques de l’Ingénieur, traité Plastiques et Composites
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