1,00 € Numéros précédents 2,00 € L’OSSERVATORE ROMANO EDITION HEBDOMADAIRE Unicuique suum e EN LANGUE FRANÇAISE Non praevalebunt Cité du Vatican LXVI année, numéro 53 (3.411) jeudi 31 décembre 2015 Dans son message de Noël François souligne que la paix est un don à invoquer et à construire La miséricorde source d’espérance «Seule la miséricorde de Dieu peut libérer l’humanité de tant de formes de mal, parfois monstrueuses, que l’égoïsme engendre». En ce Noël de l’année sainte consacrée à la miséricorde, adressant le traditionnel message urbi et orbi à la ville et au monde, le Pape François a réaffirmé l’importance de la grâce divine, l’unique qui «peut convertir les cœurs et ouvrir des issues aux situations humainement insolubles». En se présentant à midi à la loggia des Bénédictions de la basilique vaticane, le 25 décembre, le Pape a rappelé que «là où Dieu naît; naît l’espérance». Et de la même manière «là où Dieu naît, naît la paix». Malgré cela, toutefois, les situations de conflit que François a voulu citer ne manquent pas, en allant par la pensée aux situations les plus douloureuses dont l’humanité fait l’expérience dans diverses régions de la planète. A commencer par le lieu «où le Fils de Dieu est venu au monde», cette Terre Sainte où «se poursuivent les tensions et les violences. Puissent les Israéliens et les Palestiniens reprendre un dialogue direct et parvenir à une entente qui permette aux deux peuples de cohabiter dans l’harmonie, en surmontant un conflit qui a de graves répercussions sur la région tout entière». Une invocation au Seigneur a suivi, afin que «l’entente atteinte au sein des Nations unies parvienne au plus tôt à faire taire le fracas des armes en Syrie et à porter remède à la très grave situation humanitaire de la population épuisée». De même qu’il est «tout aussi urgent que l’accord sur la Libye obtienne le soutien de tous». Il a ensuite appelé l’attention de la communauté internationale afin que cessent les atrocités en Irak, au Yémen et en Afrique subsaharienne. Après avoir réévoqué «les récents attentats qui ont eu lieu sous les cieux d’Egypte, à Beyrouth, Paris, Bamako et Tunis», François a souhaité un avenir de concorde pour la République démocratique du Congo, le Burundi, le Sud-Soudan, mais aussi pour l’Ukraine et la Colombie. Il a ensuite exprimé sa «proximité envers les plus démunis, en particulier les enfants-soldats, les femmes qui subissent des violences, les victimes de la traite des personnes et du trafic de drogue», ainsi que «ceux qui fuient la misère ou la guerre» et les détenus. La nuit du 24, lors de la Veillée, le Pape avait invité à vivre Noël dans la sobriété et dans la simplicité, comme un retour à l’essentiel. PAGES 2 ET 3 DANS CE NUMÉRO Page 2: Dans la chaude étreinte d’une peau de brebis, par Lucetta Scaraffia. Pages 4 et 5: Angelus des 20, 26 et 27 décembre. Page 6: Le Pape ouvre la porte sainte de la Caritas à la gare Termini. Un manuel sur la pauvreté extrême. A un mois de la visite en Afrique. Page 7: Audience aux employés du Vatican. Créances des ambassadeurs du Pérou et de Hongrie. Page 8: Rencontre avec les enfants de l’Action catholique italienne. Audience pour le don de l’arbre et de la crèche. Page 9: Audience générale du 30 décembre. Appels du Pape. Pages 10 à 12: Audience à la Curie romaine à l’occasion des vœux de Noël. Salut du doyen du Collège cardinalice. Le devoir de l’exemplarité, par Giovanni Maria Vian. Page 13: Créances des ambassadeurs de Guinée, Lettonie, Inde et Bahrein. Page 14: Messes à SainteMarthe. Page 15: Rencontre avec l’AGESC. Page 16: Entretien du Pape avec la revue «Credere». Page 17: Message de Noël du patriarche latin de Jérusalem. Pages 18 et 19: Informations. Promulgation de décrets. Page 20: Messe pour le jubilé des familles. page 2 L’OSSERVATORE ROMANO jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Messe de la nuit de Noël Retour à l’essentiel Vivre ces journées dans la sobriété et dans la simplicité pour être capables de «saisir et de vivre l’essentiel»: c’est ce qu’a recommandé le Pape François en célébrant, dans la soirée du jeudi 24 décembre, la Messe de la nuit de Noël dans la basilique vaticane. En cette nuit, resplendit une «grande lumière» (Is 9, 1); sur nous tous brille la lumière de la naissance de Jésus. Comme les paroles du prophète Isaïe que nous avons écoutées sont vraies et actuelles: «Tu as prodigué la joie, tu as fait grandir l’allégresse» (9, 2)! Notre cœur était déjà rempli de joie par l’attente de ce moment, mais maintenant, ce sen- timent est multiplié et surabonde, parce que la promesse s’est accomplie, finalement elle s’est réalisée. Joie et allégresse nous assurent que le message contenu dans le mystère de cette nuit vient vraiment de Dieu. Il n’y a pas de place pour le doute; laissons-le aux sceptiques qui, pour interroger seulement la raison, ne trouvent jamais la vérité. Il n’y a pas de place pour l’indifférence qui domine dans le cœur de celui qui ne réussit pas à aimer parce qu’il a peur de perdre quelque chose. Toute tristesse est bannie, parce que l’Enfant Jésus est le véritable consolateur du cœur. Aujourd’hui, le Fils de Dieu est né: tout change. Le Sauveur du monde vient pour se faire participant de notre nature humaine; nous ne sommes plus seuls ni abandonnés. La Vierge nous offre son Fils comme principe d’une vie nouvelle. La lumière vient éclairer notre existence, souvent enfermée dans l’ombre du péché. Aujourd’hui découvrons d’une façon nouvelle qui nous sommes! En cette nuit, nous est rendu manifeste le chemin à parcourir pour rejoindre le but. Maintenant, toute peur et toute frayeur doivent cesser, parce que la lumière nous indique la route vers Bethléem. Nous ne pouvons demeurer inertes. Il ne nous est pas permis de rester arrêtés. Nous devons aller voir notre Sauveur déposé dans une mangeoire. Voilà le motif de la joie et de l’allégresse: cet Enfant est «né pour nous», il nous est «donné à nous», comme l’annonce Isaïe (cf. 9, 5). À un peuple qui depuis deux mille ans parcourt toutes les routes du monde pour rendre chaque homme participant de cette joie, est confiée la mission de faire connaître le «Prince de la paix» et devenir son instrument efficace au milieu des nations. Et donc, quand nous entendons parler de la naissance du Christ, restons en silence et laissons parler cet Enfant; imprimons dans notre cœur ses paroles sans détourner notre regard de son visage. Si nous le prenons dans nos bras et si nous nous laissons embrasser par lui, il nous apportera la paix du cœur qui n’aura jamais de fin. Cet Enfant nous enseigne quelle est la chose vraiment essentielle dans notre vie. Il naît dans la pauvreté du monde, parce qu’il n’y a pas de place à l’hôtellerie pour lui et sa famille. Il trouve abri et soutien dans une étable, et il est déposé dans une mangeoire pour animaux. Pourtant, de ce rien, émerge la lumière de la gloire de Dieu. A partir de là, pour les hommes au cœur simple, commence le chemin de la libération véritable et du rachat éternel. De cet Enfant, qui porte imprimés sur son visage les traits de la bonté, de la miséricorde et de l’amour de Dieu le Père, jaillit pour nous tous, ses disciples, comme l’enseigne l’apôtre Paul, l’engagement à «renoncer à l’impiété» et à la richesse du monde, pour vivre «de manière raisonnable, avec justice et piété» (Tt 2, 12). Dans une société souvent éprise de consommation et de plaisir, d’abondance et de luxe, d’apparence et de narcissisme, Lui nous appelle à un comportement sobre, c’est-à-dire simple, équilibré, cohérent, capable de saisir et de vivre l’essentiel. Dans un monde qui est trop souvent dur avec le pécheur et mou avec le péché, il faut cultiver un sens fort de la justice, de la recherche et de la mise en pratique de la volonté de Dieu. Dans une culture de l’indifférence qui finit souvent par être impitoyable, que notre style de vie soit au contraire plein de piété, d’empathie, de compassion, de miséricorde, puisées chaque jour au puits de la prière. Comme pour les bergers de Bethléem, que nos yeux puissent aussi être pleins d’étonnement et d’émerveillement, contemplant dans l’Enfant-Jésus le Fils de Dieu. Et, devant Lui, que jaillisse de nos cœurs l’invocation: «Montre-nous, Seigneur, ta miséricorde, et donnenous ton salut» (Ps 85, 8). Dans la chaude étreinte d’une peau de brebis LUCETTA SCARAFFIA Que s’est-il vraiment passé dans la nuit où Dieu se faisait homme dans une étable? Qu’ont pu percevoir ses contemporains dans l'air, surtout les plus proches géographiquement de la grotte, tels que les bergers? Il devait certainement y avoir un courant spécial dans l’air, quelque chose de fortement perturbant, pour qu’encore aujourd'hui, la nuit de Noël soit considérée comme une charge de magie dans les récits populaires. Ce sont des questions auxquelles les traditions populaires ont répondu de manières différentes, et une grande écrivaine suédoise, Selma Lagerlöf — première femme récompensée du prix Nobel de littérature pour «sa vive imagination et sa perception spirituelle» — les a retranscrites admirablement, en ajoutant souvent la touche mystérieuse du paysage nordeuropéen: le silence ouaté de la neige, les animaux des forêts, la très longue nuit (Le livre de Noël, Actes Sud, 2007, 112 pages, 6,60€). Une chose paraît certaine: les animaux, les plantes, les étoiles et les pierres s’en aperçurent avant les êtres humains. Et un berger hargneux également, qui se demanda: «Mais quel est ce genre de nuit, où les chiens ne mordent pas, les brebis n’ont pas peur, le bâton ne tue pas et le feu ne brûle pas? (…) Quelle est cette nuit et comment peut-il arriver que toute chose te manifeste de la compassion?». Ainsi, lui aussi s’est dirigé vers le point indiqué par une étoile, il vit une femme et un enfant dans une grotte froide, il pensa que ce pauvre enfant innocent pouvait mourir de froid, et, tout homme dur qu’il était, s’émut et eut envie de l'aider. Il offrit une peau de brebis douce et immaculée afin d'y faire dormir l'enfant. numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 L’OSSERVATORE ROMANO page 3 Message de Noël à la ville et au monde Là où renaît l’espérance Une lecture des pages les plus dramatiques de l’année 2015 a été présentée par le Pape François dans le traditionnel message de Noël «urbi et orbi» adressé à la ville et au monde, le 25 décembre à midi, de la Loggia des bénédictions de la basilique vaticane. Chers frères et sœurs, joyeux Noël! Christ est né pour nous, exultons en ce jour de notre salut! Ouvrons nos cœurs pour recevoir la grâce de ce jour, qu’il est lui-même: Jésus est le «jour» lumineux qui est apparu à l’horizon de l’humanité. Jour de miséricorde, dans lequel Dieu le Père a révélé à l’humanité son immense tendresse. Jour de lumière qui dissipe les ténèbres de la peur et de l’angoisse. Jour de paix, où il devient possible de se rencontrer, de dialoguer, et surtout de se réconcilier. Jour de joie: une «grande joie» pour les petits et les humbles, et pour tout le peuple (cf. Lc 2, 10). En ce jour, de la Vierge Marie, est né Jésus, le Sauveur. La crèche nous fait voir le «signe» que Dieu nous a donné: «un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire» (Lc 2, 12). Comme les bergers de Bethléem, nous aussi allons voir ce signe, cet événement qui se renouvelle dans l’Eglise chaque année. Noël est un événement qui se renouvelle dans chaque famille, dans chaque paroisse, dans chaque communauté qui accueille l’amour de Dieu incarné en Jésus Christ. Comme Marie, l’Eglise montre à tous le «signe» de Dieu: l’Enfant qu’elle a porté dans son sein et a enfanté, mais qui est le Fils du Très-Haut, parce qu’«il vient de l’Esprit Saint» (Mt 1, 20). C’est pourquoi il est le Sauveur, parce qu’il est l’Agneau de Dieu qui prend sur lui le péché du monde (cf. Jn 1, 29). Avec les bergers, prosternonsnous devant l’Agneau, adorons la Bonté de Dieu faite chair, et laissons des larmes de repentir remplir nos yeux et laver notre cœur. Nous en avons tous besoin. Lui seul, Lui seul peut nous sauver. Seule la miséricorde de Dieu peut libérer l’humanité de nombreuses formes de mal, parfois monstrueux, que l’égoïsme engendre en elle. La grâce de Dieu peut convertir les cœurs et ouvrir des voies de sortie de situations humainement insolubles. Là où naît Dieu, naît l’espérance: Il apporte l’espérance. Là où naît Dieu, naît la paix. Et là où naît la paix, il n’y a plus de place pour la haine et pour la guerre. Pourtant, même là où est venu au monde le Fils de Dieu fait chair, des tensions et des violences continuent et la paix reste un don à invoquer et à construire. Qu’Israéliens et Palestiniens puissent reprendre un dialogue direct et arriver à une entente qui permette aux deux peuples de vivre en harmonie, dépassant un conflit qui les a longuement opposés, avec de graves répercussions sur toute la région. Au Seigneur, nous demandons que l’entente intervenue au sein des Nations unies parvienne le plus tôt possible à faire taire le vacarme des armes en Syrie et à remédier à la très grave situation humanitaire de la population épuisée. Il est aussi urgent que l’accord sur la Libye obtienne le soutien de tous, afin que soient dépassées les graves divisions et les violences qui affligent le pays. Que l’attention de la Communauté internationale soit unanimement dirigée à faire cesser les atrocités qui, aussi bien dans ces pays qu’en Irak, au Yémen et dans l’Afrique subsaharienne, fauchent encore de nombreuses victimes, causent d’effroyables souffrances et n’épargnent pas non plus le patrimoine historique et culturel de peuples entiers. Ma pensée va aussi à tous ceux qui ont été touchés par d’atroces actions terroristes, particulièrement par les récents attentats survenus sous les cieux d’Egypte, à Beyrouth, Paris, Bamako et Tunis. A nos frères, persécutés dans de nombreuses parties du monde à cause de leur foi, que l’Enfant-Jésus donne consolation et force. Ce sont nos martyrs d’aujourd’hui. Nous demandons paix et concorde pour les chères populations de la République démocratique du Congo, du Burundi et du Sud Soudan afin que, par le dialogue, se renforce l’engagement commun pour l’édification de sociétés civiles animées d’un esprit sincère de réconciliation et de compréhension réciproque. Que Noël apporte aussi une paix véritable à l’Ukraine, offre soulagement à ceux qui subissent les conséquences du conflit et inspire la volonté de porter à leur achèvement les accords pris, pour rétablir la concorde dans le pays tout entier. Que la joie de ce jour illumine les efforts du peuple colombien pour que, animé par l’espérance, il continue avec ardeur à poursuivre la paix désirée. Là où naît Dieu, naît l’espérance; et là où naît l’espérance, les personnes retrouvent la dignité. Pourtant, encore aujourd’hui de nombreux hommes et femmes sont privés de leur dignité humaine et, comme l’Enfant-Jésus, souffrent du froid, de la pauvreté et du refus des hommes. Que notre proximité rejoigne aujourd’hui ceux qui sont le plus sans défense, surtout les enfants-soldats, les femmes qui subissent des violences, les victimes de la traite des personnes et du narcotrafic. Que notre réconfort ne manque pas à tous ceux qui fuient la misère ou la guerre, voyageant dans des conditions trop souvent inhumaines et risquant souvent leur vie. Que soient récompensés avec d’abondantes bénédictions tous ceux qui, simples personnes et Etats, s’emploient avec générosité à secourir et à accueillir les nombreux migrants et réfugiés, les aidant à construire un avenir digne pour eux et pour leurs proches et à s’intégrer à l’intérieur des sociétés qui les reçoivent. En ce jour de fête, que le Seigneur redonne espérance à tous ceux qui n’ont pas de travail — et ils sont nombreux —, et soutienne l’engagement de tous ceux qui ont des responsabilités publiques dans le domaine politique et économique pour qu’ils mettent tout en œuvre afin de poursuivre le bien commun et protéger la dignité de toute vie humaine. Là où naît Dieu, fleurit la miséricorde. Elle est le don le plus précieux que Dieu nous fait, particulièrement en cette année jubilaire, durant laquelle nous sommes appelés à découvrir la tendresse que Notre Père céleste a envers chacun de nous. Que le Seigneur donne particulièrement aux détenus de faire l’expérience de son amour miséricordieux qui soigne les blessures et vainc le mal. Et ainsi aujourd’hui ensemble, exultons dans le jour de notre salut. En contemplant la crèche, fixons notre regard sur les bras ouverts de Jésus qui nous montrent l’étreinte miséricordieuse de Dieu, tandis que nous écoutons les vagissements de l’Enfant qui nous murmure: «A cause de mes frères et de mes proches, je dirai: “Paix sur toi!”» (Ps 121 [122], 8). A l’issue du message de Noël, le Pape a adressé les vœux suivants aux fidèles du monde entier: A vous, frères et sœurs, venus de toutes les parties du monde sur cette place, et à toutes les personnes de divers pays qui êtes reliées par la radio, la télévision et les autres moyens de communication, j’adresse mes vœux les plus cordiaux. C’est le Noël de l’année sainte de la miséricorde, aussi je vous souhaite à tous de pouvoir accueillir dans votre vie la miséricorde de Dieu, que Jésus Christ nous a donnée, pour être miséricordieux avec nos frères. Ainsi nous ferons grandir la paix! Joyeux Noël! L’OSSERVATORE ROMANO page 4 jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Angelus du 20 décembre Trois émerveillements Chers frères et sœurs, bonjour! L’Evangile de ce dimanche d’Avent met en évidence la figure de Marie. Nous la voyons quand, immédiatement après avoir conçu dans la foi le Fils de Dieu, elle affronte le long voyage de Nazareth en Galilée jusqu’aux monts de Judée pour aller rendre visite à Elisabeth et l’aider. L’ange Gabriel lui avait révélé que sa parente âgée, qui n’avait pas d’enfants, était au sixième mois de grossesse (cf. Lc 1, 26.36). C’est pourquoi la Vierge, qui porte en elle un don et un mystère encore plus grand, va rendre visite à Elisabeth et reste chez elle pendant trois mois. Lors de la rencontre entre les deux femmes — imaginez: l’une est âgée et l’autre jeune, c’est la jeune, Marie, qui la salue la première. L’Evangile dit ceci: «Elle entra chez Zacharie et salua Elisabeth» (Lc 1, 40). Et, après ce salut, Elisabeth se sent enveloppée d’un grand émerveillement — n’oubliez pas ce mot: émerveillement. L’émerveillement. Elisabeth se sent enveloppée d’un grand émerveillement qui retentit dans ses paroles: «Et comment m’est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur?» (v. 43). Et ces deux femmes s’étreignent, s’embrassent, joyeuses: celle qui est âgée et la jeune, toutes les deux enceintes. Pour célébrer Noël de manière féconde, nous sommes appelés à nous arrêter sur les «lieux» de l’émerveillement. Et quels sont ces lieux de l’émerveillement dans la vie quotidienne? Il y en a trois. Le premier lieu est l’autre, en qui reconnaître un frère, car depuis que le Noël de Jésus a eu lieu, il porte à chaque fois imprimé en lui l’apparence du Fils de Dieu. En particulier quand il s’agit du visage du pauvre, car c’est pauvre que Dieu est entré dans le monde et c’est tout d’abord par les pauvres qu’il s’est laissé approcher. Un autre lieu de l’émerveillement — le deuxième — où, si nous regardons avec foi, nous éprouvons précisément de l’émerveillement, est l’histoire. Très souvent, nous croyons la voir du bon côté et, en revanche, nous risquons de la lire à l’envers. Cela arrive, par exemple, quand celle-ci nous semble déterminée par l’économie de marché, réglementée par la finance et par les affaires, dominée par les puissants en place. Le Dieu de Noël est en revanche un Dieu qui «brouille les cartes»: Il aime le faire! Comme le chante Marie dans le Magnificat, c’est le Seigneur qui renverse les puissants de leurs trônes et qui élève les humbles, qui comble de bien les affamés et qui renvoie les riches les mains vides (cf. Lc 1, 52-53). Cela est le deuxième émerveillement, l’émerveillement de l’histoire. Un troisième lieu d’émerveillement est l’Eglise: la regarder avec l’émerveillement de la foi signifie ne pas se limiter à la considérer uniquement comme une institution religieuse, même si elle l’est; mais la sentir comme une Mère qui, malgré les taches et les rides — nous en avons tant! — laisse transparaître les traits de l’Epouse aimée et purifiée par le Christ Seigneur. Une Eglise qui sait reconnaître les nombreux signes d’amour fidèle que Dieu lui envoie sans cesse. Une Eglise pour laquelle le Seigneur Jésus ne sera jamais une possession à défendre jalousement, ceux qui font cela com- mettent une erreur; mais sera toujours Celui qui vient à sa rencontre et qu’elle sait attendre avec confiance et joie, en donnant voix à l’espérance du monde. L’Eglise qui appelle le Seigneur: «Viens, Seigneur Jésus!». L’Eglise mère qui garde toujours les portes et les bras ouverts pour accueillir tout le monde. Plus encore, l’Eglise mère qui sort de ses propres portes pour chercher avec un sourire de mère tous ceux qui sont éloignés et les conduire à la miséricorde de Dieu. Cela est l’émerveillement de Noël! A Noël, Dieu se donne entièrement à nous en donnant son Fils, l’Unique, qui est toute sa joie. Et ce n’est qu’avec le cœur de Marie, l’humble et pauvre fille de Sion, devenue Mère du Fils du Très-Haut qu’il est possible d’exulter et de se réjouir pour le grand don de Dieu et pour son imprévisible surprise. Qu’Elle nous aide à percevoir l’émerveillement — ces trois émerveillements, l’autre, l’histoire et l’Eglise — pour la naissance de Jésus, le don des dons, le cadeau immérité qui nous apporte le salut. La rencontre avec Jésus nous fera sentir à nous aussi ce grand émerveillement. Mais nous ne pouvons pas avoir cet émerveillement, nous ne pouvons pas rencontrer Jésus si nous ne le ren- Angelus du 26 décembre, fête de la Saint-Etienne La force du pardon Chers frères et sœurs, bonjour! Nous célébrons aujourd’hui la fête de la Saint-Etienne. Le souvenir du premier martyr suit immédiatement la solennité de Noël. Hier, nous avons contemplé l’amour miséricordieux de Dieu, qui s’est fait chair pour nous; aujourd’hui nous voyons la réponse cohérente du disciple de Jésus, qui donne la vie. Hier le Sauveur est né sur la terre; aujourd’hui son témoin fidèle naît au ciel. Hier comme aujourd’hui apparaissent les ténèbres du refus de la vie, mais les lumières de l’amour, qui vainc la haine et inaugure un monde nouveau brillent encore plus fort . Il existe un aspect particulier, dans le récit d’aujourd’hui des Actes des Apôtres, qui rapproche saint Etienne du Seigneur. C’est son pardon avant de mourir lapidé. Cloué sur la croix, Jésus avait dit: «Père, pardonne-leur parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font» (Lc 23, 34); de la même manière, Etienne «fléchit les genoux et dit, dans un grand cri: “Seigneur, ne leur impute pas ce péché”» (Ac 7, 60). Etienne est donc un martyr, ce qui signifie témoin, parce qu’il fait comme Jésus; c’est en effet un témoin véritable qui se comporte comme Lui: qui prie, qui aime, qui donne, mais surtout qui pardonne, car le pardon, comme le dit le mot lui-même, est l’expression la plus élevée du don. Mais — pourrions-nous nous demander — à quoi cela sert-il de pardonner? Est-ce seulement une bonSUITE À LA PAGE 5 controns pas chez les autres, dans l’histoire et dans l’Eglise. A l’issue de l’Angelus, le Pape a ajouté les paroles suivantes: Chers frères et sœurs, Aujourd’hui aussi, j’ai à cœur d’adresser une pensée à la Syrie bien-aimée, en exprimant ma vive satisfaction pour l’entente qui vient d’être trouvée par la communauté internationale. J’encourage tout le monde à poursuivre avec un élan généreux le chemin vers la fin des violences et une solution négociée qui conduise à la paix. De même, je pense à la proche Libye, où le récent engagement pris entre les parties pour un gouvernement d’unité nationale invite à l’espérance pour l’avenir. Je désire également soutenir l’engagement de collaboration auquel sont appelés le Costa Rica et le Nicaragua. Je souhaite qu’un esprit renouvelé de fraternité renforce davantage le dialogue et la coopération réciproque, ainsi qu’entre tous les pays de la région. Ma pensée va en ce moment vers les chères populations d’Inde, récemment frappées par une grave inondation. Prions pour ces frères et sœurs, qui souffrent à cause de cette catastrophe, et confions les âmes des défunts à la miséricorde de Dieu. Récitons pour tous nos frères d’Inde un «Je vous salue Marie» à la Vierge. Je vous salue tous avec affection, chers pèlerins provenant de divers pays pour participer à cette rencontre de prière. Aujourd’hui, le premier salut est réservé aux enfants de Rome. Mais ces enfants savent faire du bruit! Ils sont venus pour la traditionnelle bénédiction des «Petits Jésus», organisée par le centre des aumôneries romaines. Chers enfants, écoutez bien: quand vous prierez devant votre crèche, rappelez-vous aussi de moi, comme moi je me rappelle de vous. Je vous remercie et joyeux Noël! Je vous souhaite à tous un bon dimanche et un Noël d’espérance et plein d’émerveillement, de l’émerveillement que nous donne Jésus, plein d’amour et de paix. N’oubliez pas de prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir! L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 5 Angelus du 27 décembre La famille levain de la société Chers frères et sœurs, bonjour! Comme ces enfants chantent bien. Bravo! [ndlr: Un chœur d’enfants de tous âges chante sur la place]. Dans l’atmosphère de joie qui est propre à Noël, nous célébrons en ce dimanche la fête de la Sainte Famille. Je repense à la grande rencontre de Philadelphie, en septembre dernier; aux nombreuses familles rencontrées pendant les voyages apostoliques; et à celles du monde entier. Je voudrais les saluer toutes avec affection et reconnaissance; en particulier à notre époque, où la famille est sujette à des incompréhensions et des difficultés de divers genres qui l’affaiblissent. L’Evangile d’aujourd’hui invite les familles à saisir la lumière d’espérance provenant de la maison de Nazareth, dans laquelle s’est déroulée dans la joie l’enfance de Jésus, qui — dit saint Luc — «croissait en sagesse, en taille et en grâce devant Dieu et devant les hommes» (2, 52). Le noyau familial de Jésus, Marie et Joseph est pour chaque croyant, et en particulier pour les familles, une authentique école d’Evangile. Là, nous admirons l’accomplissement du dessein divin de faire de la famille une communauté spéciale de vie et d’amour. Là, nous apprenons que chaque noyau familial chrétien est appelé à être une «église domestique», pour faire resplendir les vertus évangéliques et devenir un ferment de bien dans la société. Les caractéristiques typiques de la Sainte Famille sont: recueillement en prière, compréhension et respect réciproques, esprit de sacrifice, travail et solidarité. De l’exemple et du témoignage de la Sainte Famille, chaque famille peut tirer des indications précieuses pour son style et son choix de vie, et elle peut y puiser la force et la sagesse pour le chemin de chaque jour. La Vierge et saint Joseph enseignent à accueillir les enfants comme un don de Dieu, à les engendrer et les éduquer en coopérant de manière merveilleuse à l’œuvre du Créateur et en donnant au monde, en chaque enfant, un nouveau sourire. C’est dans une famille unie que les enfants portent à maturation leur existence, en vivant l’expérience significative et concrète de l’amour gratuit, de la tendresse, du respect réciproque, de la compréhension mutuelle, du pardon et de la joie. Je voudrais surtout m’arrêter sur la joie. La joie véritable dont on fait l’expérience dans la famille n’est pas une chose due à un hasard ou fortuite. C’est une joie fruit de l’harmonie profonde entre les personnes, qui fait goûter la beauté d’être ensemble, Prière mariale du 26 décembre SUITE DE LA PAGE 4 ne action ou cela apporte-t-il des résultats? Nous trouvons une réponse précisément dans le martyre d’Etienne. Parmi ceux pour qui il implora le pardon se trouvait un jeune du nom de Saul; celui-ci persécutait l’Eglise et cherchait à la détruire (cf. Ac 8, 3). Peu après Saul devint Paul, le grand saint, l’apôtre des nations. Il avait reçu le pardon d’Etienne. Nous pouvons dire que Paul naît de la grâce de Dieu et du pardon d’Etienne. Nous aussi, nous naissons du pardon de Dieu. Pas seulement dans le baptême, mais chaque fois que nous sommes pardonnés notre cœur renaît, il est régénéré. Chaque pas en avant dans la vie de foi porte imprimé au début le signe de la miséricorde divine. Car ce n’est que quand nous sommes aimés que nous pouvons aimer à notre tour. Rappelons-le, cela nous fera du bien: si nous voulons avancer dans la foi, il faut avant tout recevoir le pardon de Dieu; rencontrer le Père, qui est prêt à toujours pardonner pour tout, et qui précisément en pardonnant guérit le cœur et ravive l’amour. Nous ne devons jamais nous lasser de demander le pardon divin, car ce n’est que quand nous sommes pardonnés, quand nous nous sentons pardonnés, que nous apprenons à pardonner. Mais pardonner n’est pas une chose facile, c’est toujours très difficile. Comment pouvons-nous imiter Jésus? Par où commencer pour excuser les petits ou les grands torts que nous subissons chaque jour? Avant tout par la prière, comme l’a fait Etienne. Il faut commencer précisément par le cœur: nous pouvons affronter par la prière le ressentiment que nous éprouvons, en confiant celui qui nous a fait du mal à la miséricorde de Dieu: «Seigneur, je te demande pour lui, je te demande pour elle». On découvre ensuite que cette lutte intérieure pour pardonner purifie du mal et que la prière et l’amour nous libèrent des chaînes intérieures de la rancœur. Il est tellement laid de vivre dans la rancœur! Nous avons chaque jour l’occasion de nous entraîner à pardonner, pour vivre ce geste si élevé qui rapproche l’homme de Dieu. Comme notre Père céleste, devenons nous aussi miséricordieux, car à travers le pardon, nous vainquons le mal par le bien, nous transformons la haine en amour et nous rendons ainsi le monde plus propre. Que la Vierge Marie, à laquelle nous confions ceux qui — et ils sont malheureusement très nombreux — comme saint Etienne subissent des persécutions au nom de leur foi, nos nombreux martyrs d’aujourd’hui, oriente notre prière pour recevoir et donner le pardon. Recevoir et donner le pardon. A l’issue de l’Angelus, le Saint-Père a ajouté les paroles suivantes: Chers frères et sœurs, Je vous salue tous, pèlerins provenant d’Italie et de divers pays. Je renouvelle à vous tous le souhait que la contemplation de l’Enfant Jésus, entouré de Marie et de Joseph, puisse susciter une attitude de miséricorde et d’amour réciproque dans les familles, dans les communautés paroissiales et religieuses, dans les mouvements et dans les associations, chez tous les fidèles et les personnes de bonne volonté. Ces dernières semaines, j’ai reçu de nombreux messages de vœux de Rome et d’autres lieux. Il ne m’est pas possible de répondre à chacun. C’est pourquoi je vous exprime aujourd’hui, et à tous, mes vifs remerciements, en particulier pour le don de la prière. Bonne fête de la Saint-Etienne et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir! de se soutenir mutuellement sur le chemin de la vie. Mais à la base de la joie, il y a toujours la présence de Dieu, son amour accueillant, miséricordieux et patient envers tous. Si l’on n’ouvre pas la porte de la famille à la présence de Dieu et à son amour, la famille perd son harmonie, les individualismes prévalent, et la joie s’éteint. En revanche, la famille qui vit la joie, la joie de la vie, la joie de la foi, la communique spontanément, elle est le sel de la terre et la lumière du monde, elle est levain pour toute la société. Que Jésus, Marie et Joseph bénissent et protègent toutes les familles du monde, pour qu’en elles règnent la sérénité et la joie, la justice et la paix, que le Christ en naissant a apporté comme don à l’humanité. A l’issue de l’Angelus, le Saint-Père a prononcé les paroles suivantes: Chers frères et sœurs, Ma pensée va en ce moment aux nombreux migrants cubains qui se trouvent en difficulté en Amérique centrale, dont un grand nombre sont victimes du trafic d’êtres humains. J’invite les pays de la région à renouveler avec générosité tous les efforts nécessaires pour trouver une solution rapide à ce drame humanitaire. Mon salut chaleureux s’adresse aujourd’hui aux familles présentes sur la place, à vous tous! Merci de votre témoignage. Que le Seigneur vous accompagne de sa grâce et vous soutienne sur votre chemin quotidien. Je vous salue tous, pèlerins venus de toutes les parties du monde. En particulier les enfants du diocèse de Bergame, qui ont reçu la confirmation. Et je remercie également tous les jeunes et les enfants qui ont si bien chanté et qui continueront à le faire... Un chant de Noël en l’honneur des familles. Je souhaite à tous un bon dimanche. Je vous remercie encore de vos vœux et de vos prières: et s’il vous plaît continuez à prier pour moi. Bon déjeuner et au revoir! page 6 L’OSSERVATORE ROMANO jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 sont le plus dans le besoin, car c’est sur ce rapprochement que nous serons tous jugés. Que le Seigneur aujourd’hui, en ouvrant cette porte, donne cette grâce à tout Rome, à chaque habitant de Rome, pour pouvoir avancer dans cette étreinte de la miséricorde, où le père prend son fils blessé, mais c’est le père qui est blessé: Dieu est blessé d’amour, et c’est pour cela qu’il est capable de tous nous sauver. Que le Seigneur nous donne cette grâce. Le Pape ouvre la porte sainte de la Caritas à la gare Termini Ceux qui ont la clé «Les plus pauvres, les malades, les détenus, les plus grands pécheurs, s’ils se repentent, nous précèderont au Ciel. Ils possèdent la clé». C’est ce qu’a rappelé le Pape François lors de l’homélie de la Messe célébrée dans la cantine de la maison d’accueil de la Caritas de Rome, à la gare Termini où il s’est rendu dans l’après-midi du vendredi 18 décembre, pour ouvrir la porte sainte de la charité. Dieu vient nous sauver, et ne trouve pas de meilleure façon pour le faire que de marcher avec nous, de mener la vie que nous menons. Et au moment de choisir la façon de conduire sa vie, Il ne choisit pas une grande ville d’un grand empire, il ne choisit pas une princesse, une comtesse pour mère, une personne importante, il ne choisit pas un palais luxueux. Il semble que tout soit fait presque de façon cachée, intentionnellement. Marie était une jeune fille de 16 ou 17 ans, pas plus, dans un village perdu des périphéries de l’empire romain; et très certainement personne ne connaissait ce village. Joseph était un jeune homme qui l’aimait et voulait l’épouser, un charpentier qui gagnait son pain quotidien. Dans une totale simplicité, dans le secret. Et aussi la répudiation... — car ils étaient fiancés, et dans un village si petit, vous savez comment sont les bavardages, ils circulent —; et Joseph s’est aperçu qu’elle était enceinte, mais il était juste. Tout dans le secret, malgré la calomnie et les bavardages. Et l’Ange explique le mystère à Joseph: «Cet enfant que ta fiancée porte en elle est l’œuvre de Dieu, c’est l’œuvre de l’Esprit Saint». «Une fois réveillé, Joseph fit comme l’Ange du Seigneur lui avait prescrit», et il prit chez lui sa femme (cf. Mt 1, 18-25). Mais dans le secret, avec la plus grande humilité. Les grandes villes du monde ne savaient rien. Et c’est ainsi que Dieu est parmi nous. Si tu veux trouver Dieu, cherche-le dans l’humilité, cherche-le dans la pauvreté, cherche-le là où il est caché: parmi les nécessiteux, parmi les plus indigents, parmi les malades, ceux qui ont faim, les détenus. Et Jésus, lorsqu’il nous prêche la vie, nous dit comment sera notre jugement. Il ne dira pas: toi, viens avec moi car tu as fait tant de grands dons à l’Eglise, tu es un bienfaiteur de l’Eglise, viens, viens au Ciel. Non. L’entrée au Ciel ne se paye pas avec de l’argent. Il ne dira pas: tu es très important, tu as beaucoup étudié et as obtenu de nombreuses distinctions honorifiques, viens au Ciel. Non. Les distinctions honorifiques n’ouvrent pas la porte du Ciel. Que nous dira Jésus pour nous ouvrir la porte du Ciel? «J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli, malade et vous m’avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir» (cf. Mt 25, 35-36). Jésus est dans l’humilité. L’amour de Jésus est grand. Aujourd’hui, en ouvrant cette porte sainte, je voudrais que l’Esprit Saint ouvre le cœur de tous les romains, et leur montre la voie du salut! Ce n’est pas le luxe, ce n’est pas le chemin des grandes richesses, ce n’est pas le chemin du pouvoir. C’est le chemin de l’humilité. Et les plus pauvres, les malades, les prisonniers — Jésus dit encore plus — les plus grands pécheurs, s’ils se repentent, nous précéderont au Ciel. Ils possèdent la clé. Celui qui fait la charité est celui qui se laisse embrasser par la miséricorde du Seigneur. Nous ouvrons aujourd’hui cette porte et nous demandons deux choses. Tout d’abord, que le Seigneur ouvre la porte de notre cœur, à tous. Nous en avons tous besoin, nous sommes tous pécheurs, nous avons tous besoin d’entendre la Parole du Seigneur et que la Parole du Seigneur vienne à nous. Deuxièmement, que le Seigneur nous fasse comprendre que le chemin de la présomption, le chemin des richesses, le chemin de la vanité, le chemin de l’orgueil, ne sont pas des chemins de salut. Que le Seigneur nous fasse comprendre que sa caresse de Père, sa miséricorde, son pardon, est quand nous nous approchons de ceux qui souffrent, des exclus de la société: c’est là qu’est Jésus. Que cette porte, qui est la porte de la charité, la porte où sont assistés de très nombreux exclus, nous fasse comprendre qu’il serait bon que chacun d’entre nous, chaque romain, tous les romains, se sentent mis au rebut, et ressentent le besoin de l’aide de Dieu. Aujourd’hui, nous prions pour Rome, pour tous les habitants de Rome, pour tous, à commencer par moi, afin que le Seigneur nous donne la grâce de nous A l’issue de la Messe, le Saint-Père a prononcé les paroles suivantes: sentir exclus; afin que nous n’ayons aucun mérite: il n’y a que Lui qui nous donne la miséricorde et la grâce. Et pour nous approcher de cette grâce, nous devons nous approcher des exclus, des pauvres, de ceux qui A un mois de la visite du Pape en Afrique Messager de paix «Cela a été une véritable bénédiction pour les Kenyans, non seulement pour les catholiques, mais aussi pour les personnes de toutes les religions». C’est ce qu’écrit le cardinal John Njue, archevêque de Nairobi, rappelant le voyage du Pape François en Afrique à un mois de distance. «Dans le sillage de la visite papale — dit-il — l’Eglise au Kenya est déterminée à faire en sorte que la flamme d’amour, d’espérance, de sollicitude pour les pauvres et l’environnement porte des fruits. De fait, la prochaine fois que le Pape reviendra nous voir — et nous prions pour que cela arrive au plus tôt — il trouvera un pays plus Présentation d’un manuel sur la pauvreté extrême Un devoir moral une obligation juridique La pauvreté n’est pas une fatalité. Comment trouver les voies pour sortir de la spirale d’injustice, de résignation, de complicité et d’égoïsme qui alimentent la pauvreté? Nous pouvons trouver plusieurs indications dans le manuel Making human rights work for people living in extreme poverty. A handbook for implementing the UN guiding principles on extreme Poverty and human rights («Faire des droits humains une réalité pour les personnes qui vivent dans la pauvreté extrême. Manuel pour l’application des principes directeurs des Nations unies sur la pauvreté extrême et les droits de l’homme»), réalisé par le mouvement Noël est proche, le Seigneur est proche. Et le Seigneur, quand il est né, était là dans cette mangeoire, personne ne se rendait compte que c’était Dieu. En ce Noël, je voudrais que le Seigneur naisse dans le cœur de chacun de nous, caché... De sorte que personne ne s’en rende compte, mais que le Seigneur soit là. Je vous souhaite cela, ce bonheur de la proximité du Seigneur. Priez pour moi et je prierai pour vous. Merci. international Agir tous pour la dignité ATD quart monde et Franciscans international, avec la collaboration de Caritas Internationalis. L’ouvrage a été présenté à la salle de presse du Saint-Siège dans la matinée du jeudi 17 décembre. Sont intervenus Mgr Bernardo Johannes Bahlmann, évêque d’Óbidos dans le nord-est du Brésil, Michel Roy, secrétaire général de Caritas internationalis, le père Michael A. Perry, ministre général de l’ordre des frères mineurs; Francesca Restifo, international advocacy director de la Franciscans international, et Jean Tonglet, délégué pour l’Italie et pour les relations avec le Saint-Siège d’ATD quart monde. vert, plus vibrant et plus attentif par rapport à celui qu’il a laissé». En Ouganda, «comment et combien de temps durera “l’effet François”?» se demande Mgr Giuseppe Franzelli, évêque de Lira. «Il est naïf de tenter de répondre», écrit le prélat. «Ce qui est certain c’est qu’aujourd’hui encore des milliers d’Ougandais conservent dans leur cœur ses paroles et ses gestes. Des paroles et des gestes qui ont jailli du cœur, de l’écoute des situations et des personnes». En République centrafricaine, l’archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga écrit dans son message de Noël: «Le Pape François, comme les prophètes, est venu pour nous aider à préparer la venue du Messie, dont nous célébrons la naissance à Noël. Il est venu comme le “messager de paix”. Si nous ouvrons notre cœur à la miséricorde, la paix arrivera ici aussi». Depuis l’arrivée du Pape, en effet, on n’enregistre pas d’affrontements à Bangui entre les milices des factions opposées, le climat général a considérablement changé, l’accès à tous les quartiers est libre et le traditionnel marché du «Km5» a également repris vie. En comparant son pays à la Terre Sainte au temps de Jésus, l’archevêque explique que malgré tout «c’est dans ce pays pauvre que le Saint-Père, comme l’ange aux pasteurs, a choisi d’apporter la bonne nouvelle de la gloire et de la miséricorde de Dieu. La visite avait été présentée — ajoute-t-il — comme un “voyage à haut risque”, avec des dangers qui auraient pu lui coûter la vie. Mais, se remettant au Seigneur et assuré de son amour protecteur, le messager de paix, surmontant la peur et le doute, est venu parmi nous». L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 7 Audience aux employés du Vatican Prenez soin de votre mariage et de vos enfants Dans la matinée du lundi 14 décembre, le Pape François a reçu en audience dans la salle Paul VI les employés du Vatican et leur famille. A cette occasion, il leur a adressé le discours suivant: Chers frères et sœurs, bienvenue! Noël, qui est désormais proche, nous offre la belle opportunité de nous retrouver et d’échanger nos vœux. Avant tout chose, je désire vous remercier pour votre travail, pour la peine que vous vous donnez afin de bien faire les choses, toujours, même quand il n’y a aucune reconnaissance en retour: bien souvent, l’on fait bien une chose et cela n’est pas reconnu... Je voudrais remercier de façon particulière ceux d’entre vous qui, depuis tant d’années, font le même type de travail, un travail souvent caché, et qui essayent de faire les choses comme il le faut. Nous savons que cela est normal, cela revient à faire son devoir; mais nous savons également que pour nous, êtres humains, ce n’est pas facile, nous ne sommes pas des machines — grâce à Dieu! — et parfois, nous avons besoin d’un encouragement, ou de changer un peu... Je me félicite que vous ressentiez une juste fierté de faire au mieux les choses normales de chaque jour. Merci! Avançons, dans les différents domaines professionnels, en collaborant ensemble, avec patience, en essayant de nous aider mutuellement. Et en vous remerciant, je veux aussi vous demander pardon pour les scandales qu’il y a eu au Vatican. Mais je voudrais que mon attitude et la vôtre, particulièrement en ces jours, soit surtout celle de prier, prier pour que les personnes impliquées dans ces scandales, pour que ceux qui ont commis des erreurs se repentent et puissent retrouver la bonne voie. Je veux vous dire une autre chose, sans doute la plus importante: je vous encourage à prendre soin de votre mariage et de vos enfants. Prendre soin, ne pas négliger: jouer avec les enfants, ses enfants. Le mariage est comme une plante. Ce n’est pas comme une armoire, que l’on place là, dans la chambre, et qu’il suffit de dépoussiérer de temps à autre. Une plante est vivante, elle doit être soignée chaque jour: il faut voir comment elle va, l’arroser, et ainsi de suite. Le mariage est une réalité vivante: la vie de couple ne doit jamais être prise pour une chose acquise, dans aucune des phases du parcours d’une famille. Rappelons- Lettres de Créance de l’ambassadeure du Pérou Dans la matinée du lundi 7 décembre, le Pape François a reçu en audience S.E. Mme María Elvira Velásquez Rivas-Plata, ambassadeure du Pérou à l’occasion de la présentation de ses Lettres de Créance. Née le 5 mai 1956 à Lima, elle est célibataire. Elle est diplômée en relations internationales (Académie diplomatique du Pérou, 1982) et a obtenu un master en sciences (London School of Economics, 1993). Elle a en outre obtenu le certificat d’études diplomatiques d’Oxford University — Foreign Service Programme (1987). Entrée dans le service diplomatique en 1985, elle a occupé les fonctions suivantes: troisième secrétaire au ministère des affaires étrangères (MAE) (1985); troisième, puis deuxième secrétaire d’ambassade en Grande-Bretagne et représentant permanent en alternance auprès de l’Organisation maritime internationale (1989-1997); conseiller d’am- bassade et successivement ministre conseiller aux Etats-Unis (19972002); ministre conseiller en Autriche et représentant permanent auprès des organisations internationales à Vienne (2006-2009); consul général à Loja, Equateur (20092012). Durant son service au MAE, elle a également été directrice des affaire maritimes, antartique et directeur général des Traités. Depuis 2013, elle prête service au MAE avec le rang d’ambassadeure. nous que le don le plus précieux pour les enfants ne sont pas les objets, mais l’amour des parents. Et je n’entends pas seulement l’amour des parents envers leurs enfants, mais précisément l’amour des parents entre eux, à savoir la relation conjugale. Cela vous fait tant de bien à vous, mais aussi à vos enfants! Ne négligez pas la famille! Ainsi, avant toute chose, cultiver la «plante» du mariage, que vous êtes vous, les époux, et dans le même temps soigner la relation avec vos enfants, là aussi, en misant davantage sur la relation humaine que sur les objets. Parler avec les enfants, les écouter, leur demander ce qu’ils pensent. Ce dialogue entre les parents et les enfants fait tant de bien! Il fait grandir les enfants en maturité. Orientons-nous vers la miséricorde, dans les relations quotidiennes, entre mari et femme, entre parents et enfants, entre frères et sœurs; et prenons soin des grands-parents: les grands-parents sont si importants au sein de la famille. Les grandsparents détiennent la mémoire, ils ont la sagesse. Ne pas laisser les grands-parents à l’écart! Ils sont très importants. Une jeune femme me disait qu’elle a un enfant de 7 ans, et sa grand-mère de quatre-vingt-dix ans vit avec elle: cette dernière ne va pas très bien et on lui a conseillé de la placer dans une maison de retraite. Et cette femme sage, qui n’a pas étudié à l’université, a répondu à ceux qui lui conseillait de placer sa grand-mère en maison de retraite: «Non! Je veux que mon fils grandisse à côté de sa grand-mère!». Elle savait le bien que les grands-parents font à leurs petits-enfants. Préserver la paix dans la famille: l’on se dispute dans la famille, nous le savons tous. Mais lorsque dans un mariage on ne se dispute pas, cela semble anormal. L’important est que l’on ne termine pas la journée sans faire la paix. Des frères qui ne se disputent pas? Mais, toujours! Mais il faut faire la paix. Et vous, parents, quand vos enfants se sont disputés, avant d’aller se coucher, dites-leur: «Faites la paix, donnez-vous la main, embrassez-vous». Il faut apprendre cette sagesse de faire la paix. Avez-vous fait la guerre durant la journée? Cette guerre est-elle encore chaude? Ne la laissez pas devenir froide: car la «guerre froide» du jour d’après est plus dangereuse que la «guerre chaude». Avez-vous compris? Faire la paix le soir, toujours! Le jubilé doit être vécu aussi dans l’église domestique, pas uniquement dans les grands événements! Au contraire, le Seigneur aime ceux qui pratiquent la miséricorde dans les circonstances ordinaires. C’est cela que je veux vous souhaiter: de faire l’expérience de la joie de la miséricorde, en commençant par votre famille. Merci de votre travail, pardon pour les scandales et continuez. Continuez dans cette communauté et transmettez mes salutations et mes vœux à vos proches, aux personnes âgées et aux malades. Et continuez, s’il vous plaît, à prier pour moi. Merci encore et bon Noël! Lettres de Créance de l’ambassadeur de Hongrie Dans la matinée du lundi 7 décembre, le Pape François a reçu en audience S.E. M. Eduard Habsburg-Lothringen, ambassadeur de Hongrie, à l’occasion de la présentation de ses Lettres de Créance. Né à Munich, en Allemagne, le 12 janvier 1967, il est marié et a six enfants. Il est titulaire d’une maîtrise de philosophie (université catholique d’Eichstätt, 1988-1995). Il a successivement obtenu un master et un doctorat dans la même matière (université St Thomas and Albert the Great). Il a occupé, entre autres, les fonctions suivantes: producteur de dessins animés (Trickompany Hamburg/Köln, 1996-2001), scénariste pour la télévision ZDF/ORF (2002); porte-parole de Mgr Klaus Küng, évêque de Sankt Pölten (2009-2014); acteur/écrivain Wo Grafen schlafen (Servus TV, Autriche, 2012-2014); responsable des communications pour la famille Habsburg (2014); acteur/écrivain (2012-2014). L’OSSERVATORE ROMANO page 8 Rencontre avec les jeunes de l’Action catholique italienne Deux amis et un bonbon L’invitation à «partager le nécessaire avec les autres enfants qui en sont privés» a été adressée par le Pape François aux enfants de l’Action catholique italienne qui ont participé à la traditionnelle audience pour l’échange des vœux de Noël, qui s’est déroulée dans la matinée du jeudi 17 décembre, jour du 79e anniversaire du Saint-Père, dans la salle du Consistoire. Chers enfants, Il est toujours beau pour moi de vous rencontrer à l’approche de Noël pour échanger nos vœux. Merci pour le gâteau! Je vous souhaite affectueusement la bienvenue et, à travers vous, je désire adresser mes salutations et mes vœux de Noël et de Nouvel An à tous ceux qui font partie de l’Action catholique des enfants ou, comme vous préférez l’appeler, l’ACR (Azione cattolica ragazzi). Il y a beaucoup d’enfants et de jeunes qui, grâce à votre association, ont la possibilité de connaître Jésus de plus près et sont aidés à vivre l’Evangile en famille, à l’école, à la paroisse, au sport… En participant à l’ACR, ils se sentent plus impliqués dans l’Eglise, ils sentent que Jésus n’est pas loin, mais qu’il est proche, au milieu de nous, et cela procure beaucoup de joie! Et ainsi, vous participez mieux au catéchisme et à la Messe, vous apprenez à lire et à suivre l’Evangile et, petit à petit, vous devenez vous aussi missionnaires, c’est-à-dire capables d’amener Jésus aux autres. Je sais que cette année la devise de votre chemin de formation est: «En voyageant vers toi». C’est très beau! C’est vrai: nous sommes tous en voyage vers le Seigneur, mais beaucoup n’y pensent pas! En revanche, vous voulez vivre pleinement ce «voyage». Mais que signifie «voyager vers le Seigneur»? Cela signifie emprunter le chemin du bien, et non celui du mal; le chemin du pardon, et non celui de la vengeance; le chemin de la paix, et non celui de la guerre; le chemin de la solidarité, et non celui de l’égoïsme. A ce propos, l’initiative de charité que vous accomplirez en faveur des migrants, avec l’aide de Dieu, dans le diocèse d’Agrigente, est très bonne. Que le Seigneur bénisse ce projet, qui aidera cette communauté engagée de manière exemplaire dans l’accueil de tous ces frères et sœurs qui arrivent, chargés d’espérance mais aussi de tant de blessures et de tant de besoins, en quête de paix et de pain. Hier lors de l’Audience, des parents m’ont présenté un enfant de couleur, un enfant qui devait avoir cinq mois, et ils m’ont dit: «Il est né sur un bateau au large de la Sicile…». Beaucoup, beaucoup… Beaucoup d’enfants réussissent à arriver, d’autres non. Et tout ce que vous ferez pour ces personnes est bon, merci de le faire. Vous pouvez apporter une contribution spéciale à cette initiative, avec votre enthousiasme et votre prière, que je vous conseille jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 d’accompagner de quelques renoncements, pour partager le nécessaire avec d’autres enfants qui en sont privés. A propos de renoncement, je voudrais vous poser une question, mais répondez, vous les enfants, pas les grands. Si vous avez deux bonbons et que tu as à côté de toi ton ami(e) qui n’en a pas, que fais-tu? Que faitesvous? [Un enfant répond: «Je lui en donne un] Vous lui en donner un. Et si vous avez un bonbon et lui rien, que faites-vous? [Un enfant répond: «moitié-moitié»] La moitié! Très bien! Avance de cette façon! Je vois que vous êtes accompagnés par les responsables, les «grands» de l’Action catholique italienne. Je les salue cordialement et je les remercie pour l’engagement avec lequel ils se consacrent à votre éducation chrétienne. Je vous souhaite à tous, de tout cœur, un joyeux et saint Noël. J’étends ces vœux à vos familles et à toute l’Action catholique, dans tous les diocèses d’Italie. Que le Seigneur vous bénisse et que la Vierge Marie vous protège. S’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Maintenant, tous ensemble, prions la Vierge Marie. [Je vous salue Marie…] Paroles aux fidèles allemands et de Trente pour le don de l’arbre et de la crèche Simplicité, pauvreté, humilité Devant la crèche, on peut contempler «la tendresse de Dieu» et «la miséricorde divine qui s’est faite chair humaine». C’est ce qu’a dit le Pape François en s’adressant, dans la matinée du vendredi 18 décembre, aux délégations venues de Bavière et de Trente pour les dons de l’arbre de Noël et de la crèche, qui ont été inaugurés sur la place Saint-Pierre dans l’après-midi du même jour. Chers frères et sœurs, bonjour! Je vous souhaite une cordiale bienvenue et je vous remercie pour les dons que vous avez préparés. Ils sont très beaux; et il est réjouissant de penser que vous ne le présentez pas seulement au Pape et aux pèlerins qui pourront les admirer, mais surtout au Seigneur Jésus: car c’est Lui qui est fêté! Je remercie pour leurs aimables intentions, pour leur aide et pour leurs projets, Mgr Voderholzer et Mgr Bressan, Mme Merk, M. Falk et M. Thun. Et je vous salue tous: les autorités des communes bavaroises de Hirschau, Schnaittenbach et Freudenberg, qui ont donné l’arbre de Noël; les représentants de la province de Trente, qui avec l’archidiocèse ont installé la crèche. Je voudrais également remercier les petits «artistes» qui ont décoré l’arbre et les féliciter: vous êtes encore très jeunes, mais vous exposez déjà vos œuvres sur la place Sainte-Pierre! Et cela est beau. Courage, allez de l’avant! Michel-Ange a commencé ainsi! Les décorations que, grâce à l’œuvre de la «Fondazione Lene Thun» vous avez installées, représentent vos rêves. Ces désirs que vous portez dans votre cœur sont à présent à l’endroit le plus adapté, car ils sont proches de l’Enfant de Bethléem: ils sont confiés à Lui, qui est venu pour «habiter parmi nous» (Jn 1, 14). En effet, Jésus n’est pas simplement apparu sur terre, il ne nous a pas consacré un peu de son temps, mais il est venu partager notre vie, accueillir nos désirs. Car il a voulu, et veut toujours, vivre ici, avec nous et pour nous. Notre monde, qui a Noël est devenu son monde, lui tient à cœur. La crèche nous rappelle cela: Dieu, avec sa grande miséricorde, est descendu vers nous pour demeurer de manière stable avec nous. La crèche nous dit en outre qu’Il ne s’impose jamais par la force. Rappelez-vous bien cela, vous les enfants et les jeunes: le Seigneur ne s’impose jamais par la force. Pour nous sauver, il n’a pas changé l’histoire en accomplissant un miracle grandiose. Il est en revanche venu en toute simplicité, humilité, douceur. Dieu n’aime pas les imposantes révolutions des puissants de l’histoire, et il n’utilise pas une baguette magique pour changer les situations. Il se fait en revanche petit, il se fait enfant, pour nous attirer avec amour, pour toucher nos cœurs de son humble bonté; pour ébranler, par sa pauvreté, ceux qui s’acharnent à accumuler les faux trésors de ce monde. Ces intentions étaient également celles de saint François, quand il in- venta la crèche. Il désirait — nous disent les Sources franciscaines — «faire mémoire de cet enfant qui est né à Bethléem», pour pouvoir «d’une certaine manière entrevoir avec les yeux du corps les difficultés face auxquelles il s’est trouvé, en raison du manque des choses nécessaires à un nouveau-né». Dans cette scène, en effet, «on honore la simplicité, on exalte la pauvreté, on loue l’humilité» (468-469). Je vous invite donc à vous arrêter devant la crèche, car là la tendresse de Dieu nous parle. Là, on contemple la miséricorde divine, qui s’est faite chair humaine et qui peut attendrir nos regards. Mais, surtout, elle désire émouvoir nos cœurs. Il est beau que soit présente dans cette crèche une figure qui saisit immédiatement le mystère de Noël. C’est ce personnage qui accomplit une œuvre de bien, en s’inclinant pour venir en aide à une personne âgée. Non seulement il regarde Dieu, mais il l’imite aussi, car, comme Dieu, il se penche avec miséricorde sur celui qui en a besoin. Que vos dons, qui ce soir seront illuminés, puissent attirer de nombreux regards et en particulier raviver dans la vie la véritable lumière de Noël. Je vous remercie! Et, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. Merci. L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 9 Audience générale du 30 décembre Sauvés par un enfant Frères et sœurs, bonjour! En ces jours de Noël, l’Enfant-Jésus est placé devant nous. Je suis certain que dans nos maisons, encore de nombreuses familles ont fait la crèche, en suivant cette belle tradition qui remonte à saint François d’Assise et qui garde vivant dans nos cœurs le mystère de Dieu qui se fait homme. La dévotion à l’Enfant-Jésus est très répandue. De nombreux saints et saintes l’ont cultivée dans leur prière quotidienne, et ont désiré modeler leur vie sur celle de l’EnfantJésus. Je pense en particulier à Sainte-Thérèse de Lisieux, qui en tant que moniale carmélite a porté le nom de Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face. Elle — qui est également docteur de l’Eglise — a su vivre et témoigner cette «enfance spirituelle» que l’on assimile précisément en méditant, à l’école de la Vierge Marie, l’humilité de Dieu qui s’est fait petit pour nous. Et cela est un grand mystère, Dieu est humble! Nous qui sommes orgueilleux, pleins de vanité et croyons être une grande chose, nous ne sommes rien! Lui, le grand, est humble et se fait enfant. Cela est un véritable mystère! Dieu est humble. Cela est beau! Il y a eu un temps où, dans la Personne divino-humaine du Christ, Dieu a été un enfant, et cela doit avoir une signification particulière pour notre foi. Il est vrai que sa mort sur la croix et sa résurrection sont la plus haute expression de son amour rédempteur, mais n’oublions pas que toute sa vie terrestre est révélation et enseignement. Pendant la période de Noël nous rappelons son enfance. Pour grandir dans la foi, nous aurions besoin de contempler plus souvent Jésus enfant. Il est vrai que nous ne connaissons rien de cet- te période. Les rares indications que nous possédons font référence à l’imposition du nom huit jours après sa naissance et à la présentation au Temple (cf. Lc 2, 21-28); et en outre à la visite des Mages et à la fuite en Egypte qui suivit (cf. Mt 2, 1-23). On fait ensuite un grand saut jusqu’à ses douze ans, quand avec Marie et Joseph il se rend en pèlerinage à Jérusalem pour la Pâque, et au lieu de revenir avec ses parents il s’arrête dans le Temple pour parler avec les docteurs de la loi. Comme on le voit, nous connaissons peu de choses à propos de Jésus enfant, mais nous pouvons beaucoup apprendre de Lui si nous regardons la vie des enfants. C’est une belle habitude que les parents, que les grands-parents ont, celle de regarder les enfants, ce qu’ils font. Nous découvrons tout d’abord que les enfants veulent notre attention. Ils doivent être au centre de l’attention, pourquoi? Parce qu’ils sont orgueilleux? Non! Parce qu’ils ont besoin de se sentir protégés. Il est également nécessaire pour nous de placer Jésus au centre de notre vie et de savoir, même si cela peut sembler paradoxal, que nous avons la responsabilité de le protéger. Il veut être dans nos bras, il désire que l’on s’occupe de lui et pouvoir fixer son regard dans le nôtre. Et plus encore, faire sourire Jésus enfant pour lui démontrer notre amour et notre joie, parce qu’Il est parmi nous. Son sourire est signe de l’amour qui nous donne la certitude d’être aimés. Ensuite, les enfants aiment jouer. Mais faire jouer un enfant signifie abandonner notre logique pour entrer dans la sienne. Si nous voulons qu’il s’amuse, il est nécessaire de comprendre ce qui lui plaît, de ne pas être égoïstes et ne pas lui faire Massacre de chrétiens aux Philippines Des miliciens jihadistes issus des Combattants pour la liberté Bangsamoro — groupe considéré proche du pseudo Etat islamique (EI) — ont attaqué et tué dix personnes entre la veille et le jour de Noël. D’après les éléments fournis par les autorités locales, un groupe de 200 miliciens a lancé huit attaques contre des objectifs chrétiens. La réaction des militaires, en alerte pour les festivités de Noël, a été immédiate, et cinq terroristes ont été tués dans les combats. Le Pape François a exprimé sa profonde douleur pour les victimes de violences si atroces dans un télégramme signé par son secrétaire d’Etat, le cardinal Pietro Parolin, envoyé à Mgr Giuseppe Pinto, nonce apostolique aux Philippines. Se disant «profondément attristé» en apprenant «le massacre insensé de personnes innocentes sur l’île de Mindanao», le Souverain Pontife «adresse ses condoléances aux familles des victimes des attentats», peut-on lire dans le message. Le Pape — poursuit le texte — «prie afin que la protection et la sécurité soient rétablies pour tous dans la région», de façon à ce que «le dialogue, la tolérance et la paix fassent que chacun puisse vivre libéré de la peur». François «demande à tous les croyants de rejeter la violence au nom de Dieu qui est amour» et invoque «l’abondance de dons de réconfort, de miséricorde et de force pour ceux qui ont été frappés par la tragédie» des attaques. Appel suite aux catastrophes naturelles A l’issue de l’Audience générale du 30 décembre, le Pape a lancé un appel suite aux graves catastrophes qui ont lieu dans le monde: J’invite à prier pour les victimes des catastrophes qui, ces jours derniers, ont frappé les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Amérique du Sud, en particulier le Paraguay, causant des victimes, de nombreuses personnes déplacées et des dégâts importants. Que le Seigneur apporte son réconfort à ces populations, et que la solidarité fraternelle les secoure dans leurs nécessités. faire les choses qui nous plaisent. C’est un enseignement pour nous. Face à Jésus, nous sommes appelés à abandonner notre prétention d’autonomie — et tel est le noyau du problème: notre prétention d’autonomie —, pour accueillir en revanche la véritable forme de liberté, qui consiste à connaître celui que nous avons devant nous et à le servir. Lui, enfant, est le Fils de Dieu qui vient nous sauver. Il est venu parmi nous pour nous montrer le visage du Père riche d’amour et de miséricorde. Serrons donc entre nos bras l’Enfant-Jésus, mettons-nous à son service: Il est source d’amour et de sérénité. Et ce sera une belle chose, aujourd’hui, quand nous rentrerons à la maison, d’aller près de la crèche et d’embrasser l’Enfant-Jésus et dire: «Jésus, je veux être humble comme toi, humble comme Dieu», et lui demander cette grâce. Parmi les pèlerins qui assistaient à l’Audience générale du 30 décembre, se trouvaient les groupes francophones suivants: De France: Paroisse de Pacy-surEure; paroisse Sainte-Suzanne, de l'Ile de la Réunion; paroisse NotreDame de l'Assomption, de Passy; groupe Spes, de Méry-sur-Marne; association Louis Carlesimo, de Paray-Vieil-le-Poste. Du Liban: Paroisse Saint-JeanBaptiste, de Mijdlaya. Frères et sœurs, en ce temps de Noël, nous nous retrouvons devant la crèche. La dévotion à l’Enfant- Jésus est très répandue. Je pense en particulier à sainte Thérèse de Lisieux qui a voulu porter le nom de Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face. Elle a su vivre et témoigner de l’enfance spirituelle qui s’assimile en méditant, à l’école de la Vierge Marie, l’humilité de Dieu qui, pour nous, s’est fait petit. Que Dieu se soit fait petit enfant doit avoir un sens particulier pour notre foi. Il est vrai que nous connaissons peu de choses sur l’enfance de Jésus. Mais nous pouvons apprendre beaucoup de Jésus enfant si nous regardons la vie des enfants. Nous découvrons d’abord que les enfants veulent notre attention. Ils doivent être au centre parce qu’ils ont besoin de se sentir protégés. Il est donc nécessaire de mettre Jésus au centre de notre vie et de savoir, même si cela peut sembler paradoxal, que nous avons la responsabilité de le protéger. Il veut être entre nos bras et pouvoir fixer son regard dans le nôtre. Prenons l’Enfant-Jésus entre nos bras et mettons-nous à son service, pour lui montrer notre amour et notre joie. Il est venu parmi nous pour nous montrer le visage du Père riche d’amour et de miséricorde. Je suis heureux d’accueillir les personnes de langue française, en particulier les enfants malades et les personnes qui leur sont proches ainsi que les autres pèlerins venus de France. Je souhaite qu’en ce temps de Noël, chacun de vous puisse se mettre au service des plus petits et découvrir en eux le visage de Jésus, source d’amour et de sérénité. Que Dieu vous bénisse! L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 pages 10/11 Audience à la Curie romaine à l’occasion des vœux de Noël Catalogue des vertus nécessaires «Un catalogue des vertus nécessaires pour qui prête service à la Curie et pour tous ceux qui veulent rendre féconde leur consécration ou leur service à l’Eglise»: c’est ce qu’a proposé le Pape François en rencontrant dans la salle Clémentine, dans la matinée du lundi 21 décembre, les membres de la Curie romaine à l’occasion de la traditionnelle rencontre pour l’échange des vœux de Noël. Chers frères et sœurs, Veuillez m’excuser de ne pas parler debout, mais depuis quelques jours, je suis grippé et je ne me sens pas très fort. Avec votre permission, je vous parlerai assis. Je suis heureux de vous adresser mes vœux les plus cordiaux de saint Noël et d’heureuse nouvelle année, que j’étends à tous les collaborateurs, aux représentants pontificaux et particulièrement à ceux qui, au cours de l’année passée, ont terminé leur service pour avoir atteint la limite d’âge. Nous nous souvenons aussi des personnes qui ont été rappelées à Dieu. Ma pensée et ma gratitude vont à vous tous et à vos proches. Lors de ma première rencontre avec vous, en 2013, j’ai voulu souligner deux aspects importants et inséparables du travail curial: le professionnalisme et le service, indiquant la figure de saint Joseph comme modèle à imiter. Par contre, l’an passé, pour nous préparer au sacrement de la réconciliation, nous avons affronté quelques tentations et «maladies» — le «catalogue des maladies curiales»; aujourd’hui je devrais au contraire parler des «antibiotiques curiaux» — qui pourraient frapper chaque chrétien, curie, communauté, congrégation, paroisse et mouvement ecclésial. Maladies qui demandent prévention, vigilance, soin et, malheureusement dans certains cas, interventions douloureuses et prolongées. Certaines de ces maladies se sont manifestées au cours de cette année, causant beaucoup de douleur à tout le corps et blessant beaucoup d’âmes, avec le scandale également. Il semble juste d’affirmer que cela a été — et le sera toujours — l’objet d’une sincère réflexion et de mesures déterminantes. La réforme ira de l’avant avec détermination, lucidité et résolution, parce que Ecclesia semper reformanda. Toutefois, les maladies et même les scandales ne pourront pas cacher l’efficacité des services que la Curie romaine avec effort, avec responsabilité, avec engagement et dévouement, rend au Pape et à toute l’Eglise, et cela est une vraie consolation. Saint Ignace enseignait que «c’est le propre du mauvais esprit de tourmenter, de causer de la tristesse, d’élever des obstacles, de troubler par de fausses raisons, afin d’empêcher de progresser; au contraire, c’est le propre du bon esprit de donner courage et forces, donner consolations et larmes, inspirations et sérénité, diminuant et écartant toute difficulté, afin d’avancer sur le chemin du bien»1. Ce serait une grande injustice de ne pas exprimer une vive gratitude et un juste encouragement à toutes les personnes saines et honnêtes qui travaillent avec dévouement, dévotion, fidélité et professionnalisme, offrant à l’Eglise et au Successeur de Pierre le réconfort de leur solidarité et de leur obéissance ainsi que de leurs prières généreuses. Le devoir de l’exemplarité GIOVANNI MARIA VIAN Dans le discours de Noël du Pape François à la Curie ne pouvait manquer le rappel au discours fondateur de Paul VI en 1963. Adressé à ses collaborateurs le 21 septembre, exactement trois ans après l’élection et à la veille de la reprise du Concile suspendu à la mort de Jean XXIII, le texte très pondéré de Giovanni Montini sur le devoir de l’exemplarité a certainement soutenu la réflexion de son successeur qui, de toute évidence, a longuement médité pour préparer son intervention complexe, reliée de façon explicite à celles des années précédentes. Et comme les discours précédents, ce catalogue de vertus que chaque membre de la Curie doit se proposer d’avoir, peut également être appliqué, comme l’a dit le Pape Bergoglio, à «chaque chrétien, curie, communauté, congrégation, paroisse et mouvement ecclésial». Douze couples de vertus, dont les initiales en italien forment le terme «misericordia» et que le Pape a présentées comme «antibiotiques» pour les maladies spirituelles: le caractère missionnaire et pastoral, l’aptitude et la sagacité, la spiritualité et l’humanité, l’exemplarité et la fidélité, la rationalité et l’amabilité, l’innocuité et la détermination, la charité et la vérité, l’honnêteté et la maturité, la déférence et l’humilité, l’«abondancité» et l’attention, l’impavidité et la promptitude, la fiabilité et la sobriété. Des antidotes, donc, dont il y a un besoin évident, au point que lors de la rencontre successive avec les employés du Vatican, le Pape a demandé pardon pour les scandales provoqués par les événements, véritablement pénibles, des derniers temps. En assurant dans le même temps que ce qui est arrivé a constitué et constituera «un objet de sincère réflexion et de mesures décisives. La réforme ira de l’avant avec détermination, lucidité et résolution, parce que Ecclesia semper reformanda». Ce n’est pas un hasard si, à l’heure du Concile, Paul VI adressa aux membres de la Curie des paroles qu’il vaut la peine de rappeler également aujourd’hui: «De tout côté on regarde vers la Rome catholique, le pontificat romain, la curie romaine. Le devoir d’être authentiquement chrétiens est ici suprêmement exigeant. Nous ne vous rappellerions pas ce devoir, si nous ne nous le rappelions pas à nous-mêmes chaque jour. A Rome, tout fait école: la lettre et l’esprit. La manière dont on pense, on étudie, on parle, on sent, on agit, on souffre, on prie, on sert, on aime; chaque moment, chaque aspect de notre vie possède autour de nous un rayonnement, qui peut être bénéfique, s’il est fidèle à ce que le Christ veut de nous; maléfique s’il est infidèle». C’est en effet sous cette même lumière que doit être lu le discours du Pape: François a ainsi répété, avec son prédécesseur, la gratitude et l’appréciation pour «l’efficacité des services que la Curie romaine, avec difficulté, avec responsabilité, avec engagement et dévouement, rend au Pape et à toute l’Eglise», en ajoutant dans le sillage de la spiritualité ignatienne que cela est un «véritable réconfort», qui soutient la volonté d’«aller de l’avant sur la voie du bien». Avec la conscience chrétienne du caractère limité de chaque effort personnel, que le Souverain Pontife a exprimé en citant une prière que répétait une grande figure du catholicisme américain, le cardinal John Francis Dearden. De plus, les résistances, les fatigues et les chutes des personnes et des ministres sont aussi des leçons et des occasions de croissance, et jamais de découragement. Ce sont des opportunités pour revenir à l’essentiel qui consiste à faire le point avec la conscience que nous avons de nous-mêmes, de Dieu, de notre prochain, du sensus Ecclesiae et du sensus fidei. C’est de ce retour à l’essentiel que je voudrais vous parler aujourd’hui alors que nous sommes au début du pèlerinage de l’année sainte de la miséricorde, ouverte par l’Eglise il y a peu de temps, et qui représente pour elle et pour nous tous un fort appel à la gratitude, à la conversion, au renouveau, à la pénitence et à la réconciliation. En réalité, Noël est la fête de la miséricorde infinie de Dieu. Saint Augustin d’Hippone a dit: «Quelle miséricorde saurait l’emporter pour des malheureux sur celle qui a fait descendre du ciel le Créateur du ciel, qui a revêtu d’un corps de terre le Fondateur de la terre, égalé à nous dans notre nature mortelle Celui qui demeure l’égal de son Père dans son éternelle nature, donné une nature d’esclave au Maître du monde, condamné le Pain même à avoir faim, la Plénitude à avoir soif, réduit la Puissance à la faiblesse, la Santé à la souffrance, la Vie à la mort; et cela pour apaiser en nous la faim, étancher la soif, soulager nos souffrances, éteindre l’iniquité, enflammer la charité?»2. Donc, dans le contexte de cette année de la miséricorde et de la préparation à Noël désormais à nos portes, je voudrais vous présenter une aide pratique pour pouvoir vivre fructueusement ce temps de grâce. Il s’agit d’un «catalogue des vertus nécessaires» nonexhaustif, pour qui prête service à la Curie et pour tous ceux qui veulent rendre féconde leur consécration ou leur service à l’Eglise. J’invite les chefs de dicastères et les supérieurs à l’approfondir, à l’enrichir et à le compléter. C’est une liste qui part d’une analyse acrostiche (ndlr: l’analyse acrostiche a été effectuée sur le terme miséricorde en italien, mais ne peut être appliquée au français) de la parole «Miséricorde» — le père Ricci, en Chine, faisait cela — afin qu’elle soit notre guide et notre phare: 1. Le caractère missionnaire et pastoral. Le caractère missionnaire est ce qui rend, et montre la curie fructueuse et féconde; elle est la preuve de la vigueur, de l’efficacité et de l’authenticité de notre action. La foi est un don, mais la mesure de notre foi se prouve aussi par la capacité que nous avons de la communiquer3. Chaque baptisé est missionnaire de la Bonne Nouvelle avant tout par sa vie, par son travail et par son témoignage joyeux et convaincu. Le caractère pastoral sain est une vertu indispensable spécialement pour chaque prêtre. C’est l’engagement quotidien à suivre le Bon Pasteur qui prend soin de ses brebis et donne sa vie pour sauver la vie des autres. C’est la mesure de notre activité curiale et sacerdotale. Sans ces deux ailes, nous ne pourrons jamais voler ni atteindre la béatitude du serviteur fidèle (cf. Mt 25, 14-30). 2. Aptitude et sagacité. L’aptitude demande l’effort personnel d’acquérir les qualités nécessaires et requises pour exercer au mieux ses propres tâches et activités, avec l’intelligence et l’intuition. Elle s’oppose aux recommandations et aux faveurs. La sagacité est la rapidité d’esprit à comprendre et à affronter les situations avec sagesse et créativité. Aptitude et sagacité représentent aussi la réponse humaine à la grâce divine, quand chacun de nous suit ce célèbre dicton: «Tout faire comme si Dieu n’existait pas et, ensuite, laisser tout à Dieu comme si je n’existais pas». C’est le comportement du disciple qui s’adresse au Seigneur tous les jours avec ces paroles de la très belle Prière universelle attribuée au Pape Clément XI: «Guide-moi par ta sagesse, soutiens-moi par ta justice, encouragemoi par ta bonté, protège-moi par ta puissance. Je t’offre, ô Seigneur: mes pensées, pour qu’elles soient dirigées vers toi; mes paroles, pour qu’elles soient de toi; mes actions, pour qu’elles soient selon toi; mes tribulations, pour qu’elles soient pour toi» 4. 3. Spiritualité et humanité. La spiritualité est la colonne vertébrale de tout service dans l’Eglise et dans la vie chrétienne. Elle est ce qui nourrit toute notre conduite, la soutient et la protège de la fragilité humaine et des tentations quotidiennes. L’humanité est ce qui incarne la véridicité de notre foi. Celui qui renonce à son humanité renonce à tout. L’humanité est ce qui nous rend différents des machines et des robots qui n’entendent pas et ne s’émeuvent pas. Quand il nous est difficile de pleurer sincèrement ou de rire passionnément — ce sont deux signes — alors notre déclin a commencé ainsi que notre processus de transformation d’«hommes» en autre chose. L’humanité, c’est savoir montrer tendresse et familiarité, courtoisie envers tous (cf. Ph 4, 5). Spiritualité et humanité, tout en étant des qualités innées, sont toutefois des potentialités à réaliser entièrement, à atteindre continuellement et à manifester quotidiennement. 4. Exemplarité et fidélité. Le bienheureux Paul VI a rappelé à la Curie — en 1963 — «sa vocation à l’exemplarité»5. Exemplarité pour éviter les scandales qui blessent les âmes et menacent la crédibilité de notre témoignage. Fidélité à notre consécration, à notre voca- tion, rappelant toujours les paroles du Christ: «Qui est fidèle en très peu de chose est fidèle aussi en beaucoup, et qui est malhonnête en très peu est malhonnête aussi en beaucoup» (Lc 16, 10). Et «mais si quelqu’un doit scandaliser l’un de ces petits qui croient en moi, il serait préférable pour lui de se voir suspendre autour du cou une de ces meules que tournent les ânes et d’être englouti en pleine mer. Malheur au monde à cause des scandales! Il est fatal, certes, qu’il arrive des scandales, mais malheur à l’homme par qui le scandale arrive!» (Mt 18, 6-7). 5. Rationalité et amabilité. La rationalité sert à éviter les excès émotifs et l’amabilité à éviter les excès de la bureaucratie et des programmations et planifications. Ce sont des talents nécessaires pour l’équilibre de la personnalité: «L’ennemi — je cite saint Ignace une nouvelle fois, excusez-moi — considère attentivement si une âme est grossière, ou si elle est délicate. Si elle est grossière, il tâche de la rendre délicate à l’extrême pour la jeter plus facilement dans le trouble et l’abattre»6. Tout excès est l’indice de quelque déséquilibre, un excès de rationalité ou un excès d’amabilité. 6. Innocuité et détermination. L’innocuité qui nous rend prudents dans notre jugement, capables de nous abstenir d’actions impulsives et précipitées. C’est la capacité de faire émerger le meilleur de nous-mêmes, des autres et des situations en agissant avec attention et compréhension. C’est faire aux autres ce que tu voudrais qu’il te soit fait (cf. Mt 7, 12 et Lc 6, 31). La détermination, c’est agir avec une volonté résolue, avec une vision claire et dans l’obéissance à Dieu, et seulement pour la loi suprême SUITE À LA PAGE 12 Salut du doyen du Collège cardinalice Corps et âme au service de Pierre Au début de l’audience, le cardinal-doyen Angelo Sodano a salué le Pape au nom des cardinaux présents et de ceux qui n’ont pas pu participer pour des raisons de santé liées à l’âge, mentionnant en particulier le vice-doyen, le cardinal Roger Etchegaray. Saint-Père, Noël est proche et nous ferons bientôt nôtre le chant des anges: «Gloire à Dieu au plus des cieux et paix sur terre aux hommes de bonne volonté!». Dans cette circonstance, la famille pontificale veut se rassembler autour de vous, pour vous renouveler ses sentiments de profonde communion et vous souhaiter de joyeuses fêtes. Ce sont les vœux qui vous parviennent tout d’abord des cardinaux présents à Rome. En tant qu’évêques et successeurs des apôtres, ils se rassemblent autour du Successeur de Pierre, renouvelant ces liens profonds de communion qui liaient entre eux les membres du collège apostolique. Certains d’entre nous sont déjà très âgés, mais notre engagement de service à la sainte Eglise, tant qu’il plaira au Seigneur, est commun. Du reste, telle est l’exhortation qui nous vient de l’apôtre Pierre dans sa première Lettre aux Romains: «Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, comme de bons gérants de la grâce de Dieu» (1 P 4, 10). Saint-Père, avec les vœux des cardinaux présents, veuillez également accepter ceux des autres représentants de la curie romaine et du gouvernorat de l’Etat de la Cité du Vatican, qui se sentent animés par le même esprit de service, souvent humble et caché. Ils pourraient répéter les paroles que Michel-Ange, désormais âgé de quatrevingt sept ans, écrivit au Pape Paul IV qui lui demandait de mener plus rapidement à bien les travaux de la basilique Saint-Pierre: «Saint-Père, je me consacre corps et âme pour saint Pierre». Avec l’engagement de nous mettre nous aussi corps et âme au service du Successeur de Pierre, nous nous rassemblons aujourd’hui avec affection autour de vous, pour vous souhaiter tout le bien possible. Dans le même temps, nous désirons vous remercier pour tout le travail apostolique que vous avez accompli au cours de cette année, avec l’ardeur de l’apôtre Paul qui disait: «Omnia propter Evangelium», «Tout pour l’Evangile» (1 Co 9, 23). Merci en particulier pour le don du jubilé de la miséricorde! Nous collaborerons nous aussi pour que cette année de grâce porte des fruits abondants pour l’Eglise et pour le monde entier. Saint-Père, felices fiestas de Navidad y próspero Año Nuevo! L’OSSERVATORE ROMANO page 12 jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Discours à la Curie SUITE DE LA PAGE 10 de la salus animarum (cf. CIC, can. 1725). 7. Charité et vérité. Deux vertus indissolubles de l’existence chrétienne: «Faire la vérité dans la charité et vivre la charité dans la vérité» (cf. Ep 4, 15)7; au point que la charité sans vérité devient idéologie d’un «bonnisme» destructeur et la vérité sans charité devient justice aveugle. 8. Honnêteté et maturité. L’honnêteté est la rectitude, la cohérence et le fait d’agir avec sincérité absolue envers soi-même et envers Dieu. Celui qui est honnête n’agit pas avec droiture seulement sous le regard du surveillant ou du supérieur; celui qui est honnête ne craint pas d’être surpris, parce qu’il ne trompe jamais celui qui lui fait confiance. Celui qui est honnête ne se comporte jamais en maître sur les personnes ou sur les choses qui lui ont été confiées à administrer, comme le «mauvais serviteur» (Mt 24, 48). L’honnêteté est la base sur laquelle s’appuient toutes les autres qualités. La maturité vise à atteindre l’harmonie entre nos capacités physiques, psychiques et spirituelles. Elle est le but et l’aboutissement d’un processus de développement qui ne cesse jamais et qui ne dépend pas de l’âge que nous avons. 9. Déférence et humilité. La déférence est le talent des âmes nobles et délicates; des personnes qui cherchent toujours à manifester un respect authentique envers les autres, de leur propre rôle, envers les supérieurs, les subordonnés, les dossiers, les papiers, le secret et la confidentialité; les personnes qui savent écouter attentivement et parler poliment. L’humilité, de son côté, est la vertu des saints et des personnes remplies de Dieu qui, plus elles acquièrent de l’importance, plus grandit en elles la conscience de n’être rien et de ne rien pouvoir faire sans la grâce de Dieu (cf. Jn 15, 8). 10. Abondancité — j’ai le vice des néologismes — et attention. Plus nous avons confiance en Dieu et dans sa providence plus nous sommes généreux d’âme et plus nous sommes ouverts à donner, sachant que plus on donne plus on reçoit. En réalité il est inutile d’ouvrir toutes les portes saintes de toutes les basiliques du monde si la porte de notre cœur est fermée à l’amour, si nos mains sont fermées au don, si nos maisons sont fermées à l’hébergement, si nos églises sont fermées à l’accueil. L’attention, c’est soigner les détails et offrir le meilleur de nous-mêmes, et ne jamais baisser la garde sur nos vices et nos manques. Saint Vincent de Paul priait ainsi: «Seigneur aide-moi à m’apercevoir tout de suite: de ceux qui sont à côté de moi, de ceux qui sont inquiets et désorientés, de ceux qui souffrent sans le montrer, de ceux qui se sentent isolés sans le vouloir». 11. Impavidité et promptitude. Etre impavide signifie ne pas se laisser effrayer face aux difficultés comme Daniel dans la fosse aux lions, comme David face à Goliath; cela signifie agir avec audace et détermination et sans tiédeur «comme un bon soldat» (2 Tm 2, 3-4); cela signifie savoir faire le premier pas sans tergiverser, comme Abraham et comme Marie. De son côté, la promptitude c’est savoir agir avec liberté et agilité sans s’attacher aux choses matérielles provisoires. Le Psaume dit: «Aux richesses quand elles s’accroissent n’attachez pas votre cœur» (61, 11). Etre prompt veut dire être toujours en chemin, sans jamais s’alourdir en accumulant des choses inutiles et en se fermant sur ses propres projets et sans se laisser dominer par l’ambition. 12. Et enfin, fiabilité et sobriété. Celui qui est fiable est celui qui sait maintenir ses engagements avec sérieux et crédibilité quand il est observé mais surtout quand il se trouve seul; c’est celui qui répand autour de lui un climat de tranquillité parce qu’il ne trahit jamais la confiance qui lui a été accordée. La sobriété — dernière vertu de cette liste, mais pas en importance — est la capacité de renoncer au superflu et de résister à la logique consumériste dominante. La sobriété est prudence, simplicité, concision, équilibre et tempérance. La sobriété, c’est regarder le monde avec les yeux de Dieu et avec le regard des pauvres et de la part des pauvres. La sobriété est un style de vie8, qui indique le primat de l’autre comme principe hiérarchique et exprime l’existence comme empressement et service envers les autres. Celui qui est sobre est une personne cohérente et essentielle en tout, parce qu’elle sait réduire, récupérer, recycler, réparer, et vivre avec le sens de la mesure. Chers frères, La miséricorde n’est pas un sentiment passager, mais elle est la synthèse de la Bonne Nouvelle, elle est le choix de celui qui veut avoir les sentiments du «Cœur de Jésus»,9 de celui qui veut suivre sérieusement le Seigneur qui nous demande: «Soyez miséricordieux comme votre Père» (Lc 6, 36; cf. Mt 5, 48). Le père Ermes Ronchi affirme: «Miséricorde: scandale pour la justice, folie pour l’intelligence, consolation pour nous qui avons une dette. La dette d’exister, la dette d’être aimés se paie seulement par la miséricorde». Donc, que la miséricorde guide nos pas, inspire nos réformes, éclaire nos décisions. Qu’elle soit la colonne vertébrale de notre action. Qu’elle nous enseigne quand nous devons avancer et quand nous devons faire un pas en arrière. Qu’elle nous fasse lire la petitesse de nos actions dans le grand projet de salut de Dieu et dans la majesté et le mystère de son œuvre. Pour nous aider à comprendre cela, laissons-nous fasciner par la splendide prière communément attribuée au bienheureux Oscar Arnulfo Romero, mais qui a été prononcée pour la première fois par le cardinal John Dearden: Il est bon parfois de prendre du recul et de regarder derrière soi. Le Royaume n’est pas seulement audelà de nos efforts, il est aussi audelà de notre regard. Durant notre vie, nous n’arrivons à accomplir qu’une petite partie de cette entreprise magnifique qui est l’œuvre de Dieu. Rien de ce que nous faisons n’est complet. C’est dire que le Royaume se trouve toujours au-delà de nous-mêmes. Aucune affirmation ne dit tout ce que l’on peut dire. Aucune prière n’exprime complètement la foi. Aucun credo n’apporte la perfection. Aucune visite pastorale n’apporte avec elle toutes les solutions. Aucun programme n’accomplit pleinement la mission de l’Église. Aucun but ni objectif n’atteint la plénitude. Voilà de quoi il s’agit: Nous plantons des graines qui un jour germeront Nous arrosons les graines déjà plantées sachant que d’autres en prendront soin. Nous posons les bases de ce qui se développera. Nous mettons le levain qui multipliera nos capacités. Nous ne pouvons pas tout faire, mais commencer nous apporte un sentiment de libération. Cela nous donne la force de faire quelque chose, et de la faire bien. Cela peut rester incomplet, mais c’est un début, un pas sur un chemin. Une opportunité pour que la grâce de Dieu entre et fasse le reste. Nous pouvons ne jamais voir son achèvement, mais c’est la différence entre le contremaître et l’ouvrier. Nous sommes des ouvriers, non pas des contremaîtres, des serviteurs, non pas le Messie. Nous sommes les prophètes d’un avenir qui ne nous appartient pas. Et avec ces pensées, avec ces sentiments, je vous souhaite un bon et saint Noël, et vous demande de prier pour moi. Merci. 1 Exercices spirituels, 315. cf. Sermon 207, 1 PL 38, 1042. 3 «Le caractère missionnaire n’est pas seulement une question de territoires géographiques mais de peuples, de cultures et de personnes, parce que justement les “frontières” de la foi ne traversent pas seulement des lieux et des traditions humaines mais le cœur de tout homme et de toute femme. Le Concile Vatican II a souligné de façon particulière la manière dont le devoir missionnaire, le devoir d’élargir les frontières de la foi, est le propre de tout baptisé et de toutes les communautés chrétien2 nes» (Message pour la Journée mondiale des missions 2013, n. 2). 4 Missale Romanum de 2002. 5 Pape Paul VI, discours à la Curie romaine, 21 septembre 1963, AAS 55 (1963), 793-800. 6 Exercices spirituels, 349. 7 «L’amour dans la vérité, dont Jésus s’est fait le témoin dans sa vie terrestre et surtout par sa mort et sa résurrection, est la force dynamique essentielle du vrai développement de chaque personne et de l’humanité tout entière [...] C’est une force qui a son origine en Dieu, Amour éternel et Vérité absolue» (Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate, 29 juin 2009, n. 1: AAS 101 [2009], 641), C’est pourquoi il faut «conjuguer l’amour avec la vérité non seulement selon la direction indiquée par saint Paul: celle de la “veritas in caritate” (Ep 4, 15), mais aussi, dans celle inverse et complémentaire, de la “caritas in veritate”. La vérité doit être cherchée, découverte et exprimée dans l’“économie” de l’amour, mais l’amour à son tour doit être compris, vérifié et pratiqué à la lumière de la vérité» (ibid. n. 2). 8 Un style de vie empreint de sobriété restitue à l’homme cette «attitude désintéressée, faite de gratuité et de sens esthétique, suscitée par l’émerveillement pour l’être et pour la splendeur qui permet de percevoir dans les choses visibles le message de Dieu invisible qui les a créées» (Centesimus annus n. 37); cf. AA.VV. Nouveaux styles de vie au temps de la globalisation, Fond. Apostolicam actuositatem, Rome 2002. 9 Jean-Paul II, Angelus du 9 juillet 1989: «L’expression “Cœur de Jésus” fait immédiatement venir à l’esprit l’humanité du Christ et en souligne la richesse des sentiments, la compassion envers les infirmes; la prédilection pour les pauvres; la miséricorde envers les pécheurs; la tendresse envers les enfants; la force dans la dénonciation de l’hypocrisie, de l’orgueil, de la violence; la mansuétude devant les adversaires; le zèle pour la gloire du Père et la joie pour ses desseins de grâce, mystérieux et providentiels à elle rappelle ensuite la tristesse du Christ pour la trahison de Judas, son désarroi dans la solitude, l’angoisse devant la mort, l’abandon filial et obéissant entre les mains du Père. L’expression renferme surtout l’amour qui jaillit sans cesse de ce cœur: l’amour infini envers le Père et l’amour sans limite envers l’homme». L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 13 Présentation de Lettres de Créance La réponse de la non violence Il est important que dans les consciences mûrisse «une réaction non-violente, mais spirituelle et morale» à la multiplication des conflits et du terrorisme dans le monde. C’est ce qu’a souligné, dans la matinée du jeudi 17 décembre, le Pape en recevant en audience, dans la salle Clémentine, les nouveaux ambassadeurs de Guinée, Lettonie, Inde et Bahrein, à l’occasion de la présentation de leurs Lettres de Créance. Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, Je vous accueille avec plaisir à l’occasion de la présentation des Lettres qui vous accréditent comme ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires de vos pays près le SaintSiège: la Guinée, la Lettonie, l’Inde, le Bahrein. Je vous remercie pour les salutations que nous m’avez transmises de la part de vos chefs d’Etat respectifs, et en retour je désire leur faire parvenir, par votre courtois in- termédiaire, mes meilleurs vœux pour leurs personnes et pour l’accomplissement de la haute charge qui leur est confiée. Je prie Dieu d’accorder à tous vos concitoyens de vivre dans la paix et la prospérité. Il y a deux jours a été publié le Message pour la prochaine Journée mondiale de la paix, pour laquelle j’ai choisi le thème: «Gagne sur l’indifférence et remporte la paix!» Je suis heureux de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui de partager avec vous l’attention à ce défi qui est si important: collaborer ensemble pour promouvoir dans le monde une culture de la solidarité qui puisse contrer celle de la globalisation de l’indifférence qui est malheureusement une des tendances négatives de notre époque. Les formes dans lesquelles cette attitude d’indifférence se manifeste sont multiples, et les causes qui contribuent à l’alimenter sont aussi diverses, mais elles se ramènent essentiellement à un humanisme déséquilibré, où l’homme a pris la place de Dieu et, donc, a été à son tour victime de différentes formes d’idolâtrie. La très grave crise écologique que nous traversons peut aussi conduire à ce déséquilibre anthropologique (cf. Enc. Laudato si’, nn. 115121). L’indifférence envers Dieu, l’indifférence envers le prochain et l’indifférence envers l’environnement sont liées entre elles et s’alimentent mutuellement; et par conséquent on ne SUITE À LA PAGE 15 Les quatre ambassadeurs Guinée, Lettonie, Inde, Bahrein sont les quatre pays d’origine des nouveaux ambassadeurs qui, dans la matinée du jeudi 17 décembre, ont présenté au Pape François les Lettres par lesquelles ils sont accrédités près le Saint-Siège. Il s’agit de trois femmes et d’un homme: Fatoumata Balde, Veronika Erte, Smita Purushottam et Muhammad Abdul Ghaffar. Durant l’audience, qui s’est déroulée dans la salle Clémentine, le Souverain Pontife a reçu les Lettres de Créance de chaque représentant diplomatique; ensuite, en s’adressant à ces derniers, à leurs collaborateurs et à leurs familles, il a prononcé le discours ci-dessous. Au terme de l’audience, les ambassadeurs ont également salué le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat, qui les a rencontrés individuellement, ainsi que Mgr José Avelino Bettencourt, chef du protocole. Guinée S.E. Mme Fatoumata Balde, nouvelle ambassadeure de Guinée près le Saint-Siège, est née le 20 octobre 1962. Elle est diplômée en littérature (université Gamal Abdel Nasser, Conakry 1985) et a fréquenté un cours de «Gestion de projets» (Atalanta Management Institute, Etats-Unis d’Amérique, 1991) et un cours de leadership and management (Washington International Management Institute, Washington D C, Etats-Unis d’Amérique, 2001). Elle a occupé, entre autres, les fonctions suivantes: chef de la section de coordination pour les aides extérieures au ministère de la coopération internationale (2000-2006); chef de la division partenariat, financements pour l’innovation et coordinatrice pour les aides au ministère de la coopération (2006-2010); conseiller du président de la République, responsable de la coopération internationale (2010-2014); ministre, conseiller du président de la République, responsable de la Coopération internationale (2014). Depuis le 23 février 2015, elle est ambassadeure en Allemagne. Lettonie S.E. Mme Veronika Erte, nouvel ambassadeure de Lettonie près le Saint-Siège, est née le 19 juin 1957. Elle est diplômée en langues étrangères (université de Lettonie, 1980). Par la suite, elle a obtenu le «Magister philologiae» à la même université (1996). Elle a occupé, entre autres, les fonctions suivantes: fonctionnaire au ministère des affaires étrangères (1995); deuxième secrétaire d’ambassade à Bonn (1996-1999); premier secrétaire au ministère des affaires étrangères, département pays d’Europe centrale (1999-2002); premier secrétaire d’ambassade à Vienne (2002-2005); directrice-adjointe du département pour l’Union européenne au ministère des affaires étrangères (2005-2006); directrice du département pour l’Union européenne au ministère des affaires étrangères (2006-2008); ambassadeure en Hongrie (2008-2012); directrice du département pour l’Union européenne du ministère des affaires étrangères (2012-2013); chef du Protocole au ministère des affaires étrangères (2013). Inde S.E. Mme Smita Purushottam, nouvelle ambassadeure de l’Inde près le Saint-Siège, est née le 19 octobre 1957. Diplômée en histoire, elle a occupé, entre autres, les fonctions suivantes: troisième secrétaire puis deuxième secrétaire d’ambassade à Moscou (1982-1983); deuxième secrétaire d’ambassade à New York (19831985); secrétaire-adjoint d’ambassade à New Delhi (1985-1991); premier secrétaire puis conseiller d’ambassade à Bruxelles (1991-1994); conseiller d’ambassade à Pékin, Chine (19941997); directrice à New Delhi (19972000); directrice de formation à l’université d’Harvard, Etats-Unis d’Amérique (2000-2001); secrétaireadjoint à New Delhi (2002); ministre d’ambassade à Londres (20032006); chef-adjoint de mission d’ambassade à Berlin (2007-2009); secrétaire-adjoint à New Delhi (2009); professeure non titulaire à l’Institute for Defence Studies and Analyses (Idsa) de New Delhi (2010-2012); ambassadeure à Caracas (2012-2015). Bahreïn S.E. M. Muhammad Abdul Ghaffar, nouvel ambassadeur du Royaume du Bahreïn près le Saint-Siège, est né le 15 janvier 1949 à Manama. Il est diplômé en sciences politiques (université de Poona, Inde 1974) et a obtenu un master en sciences politiques (New School for Social Research, New York 1981). Il a en outre obtenu un doctorat dans la même matière à la State University of New York (Binghamton, 1991). Il a entrepris sa carrière diplomatique en 1975, en occupant, entre autres, les fonctions suivantes: ministre d’ambassade en Jordanie (1977-1979); membre de la délégation permanente aux Nations unies (1979-1984); ambassadeur et représentant permanent aux Nations unies à New York (19901994); ambassadeur aux Etats-Unis (1994-2001); ministre des Affaires étrangères (2001-2006); ministre pour l’information (2005-2007); ambassadeur en Belgique (2008-2009); conseiller du roi pour les affaires diplomatiques (2009-2014). Depuis 2015, il est ambassadeur à Paris, où il réside. L’OSSERVATORE ROMANO page 14 Jeudi 10 décembre Caresse de père Un père ou une mère qui dit à son enfant: «N’aies pas peur, je suis là» et le câline en lui faisant une caresse. Telle est la condition privilégiée de l’homme: petit, faible, mais rassuré, soutenu et pardonné par un Dieu qui est plein d’amour pour lui. Au début du chemin jubilaire, le Pape François a trouvé dans la liturgie du jour l’occasion pour parler à nouveau de la miséricorde du Père. La méditation s’est inspirée du psaume responsorial dans lequel a été répété: «Le Seigneur est miséricordieux et grand dans l’amour». C’est «une confession de foi» dans laquelle le chrétien reconnaît que Dieu «est miséricorde et qu’il est grand, mais grand dans son amour». Une affirmation qui n’est simple qu’en apparence car «comprendre la miséricorde de Dieu est un mystère, c’est un chemin que l’on doit accomplir pendant toute sa vie». Pour aider à mieux pénétrer ce mystère, le Pape a cité la lecture tirée du livre du prophète Isaïe (41, 13-20). «Nous connaissons tous les caresses des pères et des mères, quand les enfants sont inquiets en raison d’une frayeur». Eux aussi disent: «N’aies pas peur, je suis là». Le Seigneur rappelle tendrement à chacun de nous: «Je suis amoureux de ta petitesse, de ton néant» et il nous répète: «Ne crains pas tes péchés, je t’aime beaucoup, je suis ici pour te pardonner». Cela est en synthèse «la miséricorde de Dieu». En poursuivant sa méditation, François a ensuite rappelé un exemple tiré d’une hagiographie («Je crois qu’il s’agissait de saint Jérôme, mais je n’en suis pas sûr» a-til confié) et il a rappelé qu’à propos de ce saint, on disait que c’était un grand pénitent pendant sa vie, qu’il faisait des sacrifices, des prières et que le Seigneur lui demandait toujours davantage. Le saint continuait à demander: «Seigneur que puis-je te donner?», jusqu’à ce qu’il dise: «Mais Seigneur, je n’ai rien de plus à te donner, je t’ai tout donné». Et la réponse fut: «Non, il manque une chose» — «Que te manque-t-il Seigneur?» — «Donne-moi tes péchés». Avec cet épisode, le Pape a voulu souligner que «le Seigneur a envie de prendre sur lui nos faiblesses, nos fatigues». Je te donnerai la force. Donne-moi tout et je te pardonnerai, je te donnerai la paix». Ce sont là «les caresses de Dieu», les caresses «de Notre Père, quand il s’exprime avec sa miséricorde». Nous les hommes, «nous sommes très nerveux» et «quand quelque chose ne va pas bien, nous crions, nous sommes impatients». En revanche, Dieu nous console: «Sois tranquille, tu as fait une grosse bêtise, oui, mais sois tranquille; ne crains rien, je te pardonne». Et ainsi, il nous accueille en tout, également avec nos erreurs, nos péchés. C’est précisément cela que signifie ce que l’on répète dans le psaume: «Le Seigneur est miséricordieux et grand dans l’amour». François a conclu en invitant tout le monde à demander au Seigneur «de jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Messes à Sainte-Marthe réveiller en chacun d’entre nous et dans tout le peuple, la foi dans cette paternité, dans cette miséricorde, dans son cœur». Lundi 14 décembre La leçon d’une grand-mère «Dieu pardonne tout, sinon le monde n’existerait pas»: les paroles qu’une vieille dame adressa en 1992 à Jorge Mario Bergoglio sont une véritable «leçon» au début de l’année sainte de la miséricorde. Elles mettent en garde contre le danger de tomber dans la «rigidité cléricale», en suggérant d’emprunter la voie de l’espérance et de la miséricorde qui nous rend «libres». Le Pape a invité à avoir «un regard pénétrant», qui sait aller au-delà pour voir et dire la vérité. «Dans la première lecture, nous avons écouté un passage du livre des Nombres» (24, 2-7,15-17) sur «l’histoire de Balaam: c’était un prophète, mais c’était également un homme qui avait des défauts, et même des péchés». «Balaam a été “loué” par un certain Balaq, général et roi, qui voulut détruire le peuple de Dieu. Il l’envoya prophétiser contre le peuple de Dieu». Mais «sur le chemin, Balaam rencontre l’ange du Seigneur et s’opère une conversion de son cœur, qui voit la vérité». Mais «qu’est-il arrivé au cœur de Balaam?». «Il a ouvert son cœur et le Seigneur lui a donné la vertu de l’espérance». Et «l’espérance est cette vertu chrétienne que nous avons comme un grand don du Seigneur et qui nous fait voir loin, au-delà des problèmes, des douleurs, des difficultés, au-delà de nos péchés». Elle nous fait «voir la beauté de Dieu». «Espérance», donc, est la parole clé. «Quand je suis avec une personne qui possède cette vertu de l’espérance et qui se trouve à un moment difficile de sa vie — que ce soit à cause de la maladie, de la préoccupation pour un fils ou une fille ou quelqu’un de la famille, quelle que soit la raison — mais qu’elle a cette vertu, dans la douleur, elle a l’œil pénétrant, elle a la liberté de voir audelà, toujours au-delà». Et cela est précisément «l’espérance, c’est la prophétie que nous donne aujourd’hui l’Eglise: elle veut des hommes et des femmes d’espérance, même au milieu des problèmes». Parce que «l’espérance ouvre des horizons, l’espérance est libre, elle n’est pas esclave, elle trouve une place pour résoudre une situation». Dans le passage de l’Evangile de Matthieu (21, 23-27) proposé par la liturgie, «nous voyons en revanche les hommes qui n’ont pas cette liberté, ils n’ont pas d’horizons, ce sont des hommes fixés sur leurs calculs». Mais «les calculs humains ferment le cœur, ferment la liberté». C’est «l’espérance» qui «nous rend légers». «Cette hypocrisie des docteurs de la loi, qui est dans l’Evangile et qui ferme le cœur, nous rend esclaves: c’était des esclaves». «Comme la liberté, la magnanimité, l’espérance d’un homme et d’une femme d’Eglise sont belles». Et «au contraire, comme la rigidité d’une femme et d’un homme d’Eglise est mauvaise et fait du mal: la rigidité cléricale, qui n’a pas d’espérance». «En cette année de la miséricorde, deux voies se présentent». D’une part, il y a «ceux qui placent leur espérance dans la miséricorde de Dieu et qui savent que Dieu est le Père», que «Dieu pardonne toujours, et tout» et que «au-delà du désert, il y a le baiser du Père, le pardon». De l’autre côté, «il y a également ceux qui se réfugient dans leur esclavage, dans leur rigidité, et qui ne savent rien de la miséricorde de Dieu». Ceux dont parle l’Evangile de Matthieu «étaient des docteurs, avaient étudié, mais leur science ne les a pas sauvés». «Je voudrais conclure par une anecdote qui m’est arrivée, en 1992. L’image de la Vierge de Fatima était arrivée dans mon diocèse. Lors d’une grande Messe pour les malades, je suis allé confesser. J’ai confessé de midi à 18h00, lorsque la Messe a fini. Il y avait beaucoup de confesseurs». Quand je me suis levé pour aller célébrer une confirmation ailleurs, une vieille dame, âgée de 80 ans, s’est approchée avec les yeux qui voyaient au-delà, ces yeux pleins d’espérance. Et «je lui ai dit: “Grand-mère, vous venez vous confesser? Mais vous n’avez pas péché!”». A la réponse de la femme — «Père, nous en avons tous!» — Jorge Mario Bergoglio a relancé le dialogue: «Mais le Seigneur ne les pardonne-t-il pas?». Et la dame, forte de son espérance, dit: «Dieu pardonne tout, parce que si Dieu ne pardonnait pas tout, le monde n’existerait pas!». Mardi 15 décembre Trois traces Quelles sont les caractéristiques du peuple de Dieu? Comment l’Eglise doit-elle être? Proposant l’extrait de l’Evangile de Matthieu (21, 28-32) dans lequel Jésus, en s’adressant aux chefs des prêtres et aux membres âgés du peuple, affirme: «En vérité je vous le dis, les publicains et les prostituées arrivent avant vous au Royaume de Dieu», le Pape a souligné «l’énergie» avec laquelle il reproche à ceux qui étaient considérés comme les maîtres leur «façon de penser, de juger, de vivre». Jésus «avait ce courage de dire la vérité». Mais alors, face à certains reproches, nous nous demandons: «Comment l’Eglise doit-elle être?». Face à cela, le prophète Sophonie communique au peuple une promesse du Seigneur: «Je te pardonnerai». Et après la promesse du pardon, il y a l’explication «de la façon dont l’Eglise doit être: “Je ne laisserai subsister en ton sein qu’un peuple humble et modeste, et c’est dans le nom de Yahvé qu’il cherchera refuge”». Le peuple de Dieu fidèle doit ainsi «avoir ces trois traces: humble, pauvre, confiant dans le Seigneur». L’Eglise doit avant tout être «hum- ble». En d’autres termes, une Eglise «qui ne se glorifie pas de ses pouvoirs, de ses grandeurs». Mais attention: «l’humilité n’implique pas une personne molle, faible», avec l’expression défaite, car «cela n’est pas de l’humilité, c’est du théâtre! C’est un simulacre d’humilité». La véritable humilité, au contraire, part «d’un premier pas: je suis pécheur». Si «tu n’es pas capable de te dire à toi-même que tu es pécheur et que les autres sont meilleurs que toi, tu n’es pas humble». Par conséquent, «le premier pas dans l’Eglise humble est de se sentir pécheresse» et cela vaut pour «nous tous». Si «certains d’entre nous ont l’habitude de regarder les défauts des autres et de médire», ils ne sont pas humbles mais «se croient les juges des autres». «Nous devons demander cette grâce, que l’Eglise soit humble, que je sois humble, chacun de nous, humble». La deuxième trace: le peuple de Dieu «est pauvre». François a rappelé que la pauvreté est «la première des béatitudes». Mais que veut dire «pauvre d’esprit»? Cela signifie «uniquement attaché aux richesses de Dieu». «Une Eglise qui vit attachée à l’argent, qui pense à l’argent, qui pense à des moyens de gagner de l’argent...» ne l’est certainement pas. Par exemple, il y a ceux qui, «naïvement», disaient aux gens que pour passer la porte sainte, «il fallait faire un don»: cela «n’est pas l’Eglise de Jésus, c’est l’Eglise de ces chefs des prêtres, attachée à l’argent». Pour mieux faire comprendre sa pensée, François a également rappelé l’épisode du diacre Laurent — «le trésorier du diocèse» — qui, lorsque l’empereur lui demanda «d’apporter les richesses du diocèse» pour payer quelque chose et éviter d’être tué, «se présenta avec les pauvres». Les «richesses de l’Eglise» sont donc précisément les pauvres. La «pauvreté est caractérisée précisément par «cette distance» qui nous conduit à «servir les gens dans le besoin». Et le Pape a conclu par une question adressée à chacun: «Suis-je ou non pauvre?». Enfin, la troisième trace: le peuple de Dieu «cherchera refuge dans le nom de Yahvé». Il y a là aussi une question très directe: «Où est ma confiance? Dans le pouvoir, les amis, l’argent? Dans le Seigneur!». C’est donc cet «héritage que nous promet le Seigneur: “Je ne laisserai subsister en ton sein qu’un peuple humble et modeste, et c’est dans le nom de Yahvé qu’il cherchera refuge”. Humble car il se sent pécheur; pauvre car son cœur est attaché aux richesses de Dieu et s’il en a, c’est pour les administrer; confiant dans le Seigneur car il sait que seul le Seigneur peut garantir une chose qui lui fasse du bien». L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 15 Rencontre avec l’AGESC Critères pour une véritable école catholique Dans la matinée du samedi 5 décembre, le Pape François a reçu en audience dans la salle Clémentine les membres de l’association des parents des écoles catholiques (AGESC), à l’occasion du quarantième anniversaire de leur fondation. A cette occasion, le Pape a prononcé le discours suivant: Chers frères et sœurs, C’est avec plaisir que je vous souhaite la bienvenue à tous, représentants de l’Association des parents des écoles catholiques, à l’occasion du quarantième anniversaire de votre fondation. Vous êtes ici non seulement pour être confirmés sur votre chemin de foi, mais aussi pour exprimer la vérité de l’engagement qui vous caractérise: celui, librement assumé, d’être des éducateurs selon le cœur de Dieu et de l’Eglise. Récemment s’est tenu un important congrès mondial organisé par la Congrégation pour l’éducation catholique. A cette occasion, j’ai souligné l’importance de promouvoir une éducation à la plénitude de l’humanité, parce que parler d’éducation catholique équivaut à parler d’humain, d’humanisme. J’ai exhorté à une éducation inclusive, une éducation qui fasse une place à tous et qui ne sélectionne pas de manière élitiste les destinataires de son engagement. C’est le même défi qui se présente aujourd’hui à vous. Votre association se place au service de l’école et de la famille, en contribuant à la tâche délicate de jeter des ponts entre l’école et le territoire, entre l’école et la famille, entre l’école et les institutions civiles. Restaurer le pacte éducatif, parce que le pacte éducatif s’est écroulé, parce que le pacte éducatif s’est rompu! Et nous devons le restaurer. Jeter des ponts: il n’y a pas de défi plus noble! Construire l’union là où progresse la division, engendrer l’harmonie quand la logique de l’exclusion et de la marginalisation semble l’emporter. En tant qu’association ecclésiale, vous puisez au cœur même de l’Eglise l’abondance de la miséricorde, qui fait de votre travail un service quotidien pour les autres. En tant que parents, vous êtes dépositaires du devoir et du droit fondamentaux et incontournables d’éduquer les enfants, en aidant en ce sens de manière positive et constante la tâche de l’école. C’est à vous que revient le droit de demander une éducation convenable pour vos enfants, une éducation intégrale et ouverte aux valeurs humaines et chrétiennes les plus authentiques. Cependant, c’est également à vous de faire en sorte que l’école soit à la hauteur de la mission éducative qui lui est confiée, en particulier quand l’éducation qu’elle propose se dit «catholique». Je prie le Seigneur pour que l’école catholique ne considère jamais comme acquise la signification de cet adjectif! En fait, être éducateurs catholiques fait la différence. Nous devons alors nous demander: quels sont les critères pour qu’une une école puisse se dire véritablement catholique? Ceci peut être un bon travail à faire dans votre association. Vous l’avez certainement fait et vous le faites; mais les résultats ne sont jamais acquis une fois pour toutes. Par exemple: nous savons que l’école catholique doit transmettre une culture intégrale, non idéologique. Mais que signifie cela concrètement? Ou encore, nous sommes convaincus que l’école catholique est appelée à favoriser l’harmonie des diversités. Comment peuton réaliser cela concrètement? C’est un défi qui n’a rien de facile. Grâce à Dieu il y a, en Italie et dans le monde, beaucoup d’expériences positives que l’on peut connaître et partager. Au cours de la rencontre qu’il eut Discours aux ambassadeurs SUITE DE LA PAGE 13 peut s’y opposer que par une réponse qui les affronte toutes ensemble, c’est-à-dire par un humanisme renouvelé, qui replace l’être humain dans sa juste relation avec le Créateur, avec les autres et avec la création. Il s’agit, comme je le disais, de promouvoir une culture de solidarité et de partage, et cela demande l’engagement de tous ceux qui ont une responsabilité dans le domaine politique, social, culturel et éducatif. Un rôle décisif, dans ce défi, revient aussi aux mass-média, qui de nos jours influencent dans une mesure importante les attitudes personnelles et sociales. Il est donc nécessaire de viser à la qualification professionnelle et éthique des opérateurs de ce secteur. En même temps, il est indispensable de continuer à investir sur l’école, non pas conçue de manière isolée mais en relation constante avec les familles et avec le contexte social, collaborant pour renforcer une alliance éducative qui s’est beaucoup affaiblie dans divers pays. Tout cela est nécessaire pour vaincre l’indifférence et construire la paix. L’année qui s’achève a été marquée, malheureusement, par une multiplication de conflits vio- lents, aussi bien de guerres que de terrorisme. D’autre part, cette situation provoque toujours plus une réaction non pas violente, mais spirituelle et morale dans les consciences les plus mûres. C’est ce que nous voulons et devons alimenter avec les moyens à notre disposition et selon nos responsabilités. L’Eglise catholique, selon sa mission propre, avec le jubilé de la miséricorde commencé depuis peu, se propose de diffuser dans le monde entier l’esprit de pardon et de réconciliation, appelant les fidèles et les hommes et les femmes de bonne volonté à s’ouvrir au don de la grâce de Dieu et à pratiquer ce que dans notre tradition nous appelons les «œuvres de miséricorde spirituelles et corporelles». «Les Etats sont aussi appelés à des gestes concrets, et à des actes de courage à l’égard des personnes les plus fragiles de leurs sociétés, comme les prisonniers, les migrants, les chômeurs et les malades» (Message pour la Journée mondiale de la paix 2016, n. 8). En outre, en cette année jubilaire, je désire formuler «un appel pressant aux responsables des Etats à accomplir des gestes concrets en faveur de nos frères et sœurs qui souffrent à cause du manque de travail, de terre et de toit» (ibid.). Sur le plan internatio- nal, je souhaite vivement que chaque nation s’engage à renouveler ses relations avec les autres, coopérant efficacement à faire grandir aussi la fraternité dans la grande famille des peuples (cf. ibid.). Mesdames et Messieurs les ambassadeurs, avant de conclure ces réflexions, je voudrais adresser, par votre intermédiaire, mon salut fraternel aux pasteurs et aux fidèles des communautés catholiques présentes dans vos pays. Je les encourage cordialement à collaborer de manière toujours plus loyale au bien commun de la société tout entière. Et plus et mieux elles pourront le faire, plus leur sera reconnue effectivement la pleine liberté religieuse. Le Saint-Siège, pour sa part, s’honore de pouvoir instaurer avec chacun de vous et avec les pays que vous représentez un dialogue ouvert et respectueux et une collaboration constructive. Dans cette perspective, alors que commence officiellement votre nouvelle mission, je vous adresse mes meilleurs vœux, vous assurant du soutien constant des divers bureaux de la Curie romaine pour l’accomplissement de votre fonction. Sur chacun de vous, sur vos familles et sur vos collaborateurs, j’invoque l’abondance des Bénédictions divines. avec vous en juin 1998, saint JeanPaul II répéta l’importance du «pont» qui doit exister entre école et société. N’oubliez jamais l’exigence de construire une communauté éducative dans laquelle, avec les enseignants, les divers interlocuteurs et les étudiants, vous, parents, vous pouvez être protagonistes du processus éducatif. Ne soyez pas en dehors du monde, mais vivants, comme le levain dans la pâte. L’invitation que je vous adresse est simple, mais audacieuse: sachez faire la différence à travers la qualité de la formation. Sachez trouver des modes et des voies pour ne pas passer inaperçus dans les coulisses de la société et de la culture. Sans susciter de clameurs, sans projets emplis de rhétorique. Sachez vous distinguer par votre attention constante à la personne, spécialement aux derniers, à ceux qui sont écartés, rejetés, oubliés. Sachez vous faire remarquer non pour la «façade», mais à travers une cohérence éducative enracinée dans la vision chrétienne de l’homme et de la société. A un moment où la crise économique se fait sentir lourdement même sur les écoles publiques, dont un grand nombre sont contraintes de fermer, la tentation des «chiffres» se fait plus insistante et, avec elle, celle du découragement. Mais malgré tout, je vous répète: la différence se fait par la qualité de votre présence et non par la quantité des ressources que l’on est en mesure de mettre en œuvre. La qualité de votre présence là, pour faire des ponts. Cela m’a plu qu’en parlant de l’école [le Pape s’adresse au président], vous ayez parlé des enfants, des parents et aussi des grands-parents. Parce que les grands-parents ont beaucoup à faire! Ne mettez pas au rebut les grandsparents qui sont la mémoire vivante du peuple! Ne dévalorisez jamais les valeurs humaines et chrétiennes dont vous êtes les témoins en famille, à l’école, dans la société. Apportez généreusement votre contribution afin que l’école catholique ne devienne jamais un «repli», ou une alternative insignifiante parmi les diverses institutions de formation. Collaborez afin que l’éducation catholique ait le visage de ce nouvel humanisme, qui est apparu lors du Congrès ecclésial de Florence. Engagez-vous afin que les écoles catholiques soient véritablement ouvertes à tous. Que le Seigneur Jésus, qui dans la Sainte Famille de Nazareth a grandi en âge, en sagesse et en grâce (cf. Lc 2,52), accompagne vos pas et bénisse votre engagement quotidien. Merci pour cette rencontre, merci pour votre travail et pour votre témoignage. Je vous assure de mon souvenir dans la prière. Et vous, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi. L’OSSERVATORE ROMANO page 16 jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Entretien du Pape avec l’hebdomadaire «Credere» Un homme pardonné Nous publions l’entretien que le Pape François a accordée à l’hebdomadaire italien «Credere», lancé dès l’annonce du jubilé de la miséricorde. Le texte a été publié sur le numéro 49 en date du 6 décembre. Saint-Père, à présent que nous allons entrer dans le vif du jubilé, pouveznous nous expliquer quel mouvement du cœur vous a poussé à mettre en relief précisément le thème de la miséricorde? Quelle urgence percevez-vous à cet égard dans la situation actuelle du monde et de l’Eglise? Le thème de la miséricorde s’est accentué avec force dans la vie de l’Eglise depuis Paul VI. C’est JeanPaul II qui l’a souligné avec insistance avec Dives in misericordia, la canonisation de sainte Faustine et l’institution de la fête de la Divine miséricorde en l’octave de Pâques. Dans cette ligne, j’ai senti qu’il y avait comme un désir du Seigneur de montrer aux hommes sa miséricorde. Ce n’est donc pas quelque chose qui m’est venu à l’esprit, mais qui reprend une tradition relativement récente bien qu’elle ait toujours existé. Et je me suis rendu compte qu’il fallait faire quelque chose pour continuer cette tradition. Mon premier Angelus, en tant que Pape, fut sur la miséricorde de Dieu et, à cette occasion, j’ai aussi parlé d’un livre sur la miséricorde qui m’avait été offert par le cardinal Walter Kasper pendant le conclave; de même, dans ma première homélie en tant que Pape, dimanche 17 mars, dans la paroisse SainteAnne, j’ai parlé de la miséricorde. Ce n’était pas une stratégie, cela m’est venu de l’intérieur: l’Esprit Saint veut quelque chose. Il est évident que le monde d’aujourd’hui a besoin de miséricorde, a besoin de compassion, c’est-à-dire de «pâtir avec». Nous sommes habitués aux mauvaises nouvelles, aux nouvelles cruelles et aux pires atrocités qui offensent le nom et la vie de Dieu. Le monde a besoin de découvrir que Dieu est Père, que la miséricorde existe, que la cruauté n’est pas la bonne voie, que la condamnation n’est pas la bonne voie, parce que l’Eglise elle-même suit parfois une ligne dure, tombe dans la tentation de suivre une ligne dure, dans la tentation de souligner uniquement les normes morales, mais il y a tellement de personnes qui restent dehors. Il m’est venu à l’esprit cette image de l’Eglise comme un hôpital de campagne après la bataille; c’est la vérité: que de personnes blessées et détruites! Il faut soigner les blessés, les aider à guérir, ne pas les soumettre aux analyses pour le cholestérol. Je crois que le temps de la miséricorde est venu. Nous sommes tous pécheurs, nous portons tous des fardeaux intérieurs. J’ai senti que Jésus voulait ouvrir la porte de son cœur, que le Père veut montrer ses entrailles de miséricorde et que, pour cette raison, il nous envoie l’Esprit: pour nous faire bouger et pour nous se- couer. C’est l’année du pardon, l’année de la réconciliation. D’un côté, nous voyons le trafic d’armes, la production d’armes qui tuent, l’assassinat d’innocents sous les formes les plus cruelles possibles, l’exploitation de personnes, de mineurs, d’enfants: nous assistons, permettez-moi l’expression, à un sacrilège contre l’humanité, parce que l’homme est sacré, il est l’image du Dieu vivant. Voilà, le Père dit: «Arrêtez-vous et venez à moi». C’est ce que je vois dans le monde. Vous avez dit que, comme tous les croyants, vous vous sentez comme un pécheur, qui a besoin de la miséricorde de Dieu. Quelle importance a revêtu la miséricorde divine dans votre cheminement de prêtre et d’évêque? Vous rappelez-vous en particulier un moment où vous avez senti de façon limpide le regard miséricordieux du Seigneur dans votre vie? Je suis pécheur, je me sens pécheur, je suis sûr de l’être; je suis un pécheur que le Seigneur a regardé avec miséricorde. Je suis, comme je l’ai dit aux détenus en Bolivie, un homme pardonné. Je suis un homme pardonné, Dieu m’a regardé avec miséricorde et il m’a pardonné. Aujourd’hui encore, je commets des erreurs et des péchés et je me confesse tous les quinze ou vingt jours. Et si je me confesse, c’est parce que j’ai besoin de sentir que la miséricorde de Dieu est encore sur moi. Je me souviens — je l’ai déjà dit de nombreuses fois — quand le Seigneur m’a regardé avec miséricorde. J’ai toujours eu la sensation qu’il prenait tout spécialement soin de moi, mais le moment le plus important a eu lieu le 21 septembre 1953, quand j’avais 17 ans. C’était le jour de la fête du printemps et des étudiants en Argentine, et je devais le passer avec les autres étudiants; j’étais catholique pratiquant, j’allais à la Messe le dimanche, mais sans plus... J’étais dans l’Action catholique, mais je ne faisais rien, j’étais uniquement un catholique pratiquant. Dans la rue qui va à la gare ferroviaire de Flores, je suis passé près de la paroisse que je fréquentais, et je me suis senti poussé à entrer: je suis entré et j’ai vu venir un prêtre que je ne connaissais pas. A ce moment-là, je ne sais pas ce qui m’est arrivé, mais j’ai éprouvé le besoin de me confesser, dans le premier confessionnal à gauche — beaucoup de gens allaient prier là. Et je ne sais pas ce qui s’est passé, j’en suis sorti différent, changé. Je suis rentré chez moi avec la certitude que je devais me consacrer au Seigneur et ce prêtre m’a accompagné pendant presqu’un an. C’était un prêtre de Corrientes, don Carlos Benito Duarte Ibarra, qui vivait à la maison du clergé, à Flores. Il avait une leucémie et il était soigné à l’hôpital. Il est mort l’année suivante. Après son enterrement, j’ai beaucoup pleuré, je me sentais complètement perdu, comme rempli de la crainte d’avoir été abandonné par Le Pape François au cours de la visite à la prison de Palmasola en Bolivie (10 juillet 2015) Dieu. C’est à ce moment que j’ai rencontré la miséricorde de Dieu et cela est très lié à ma devise épiscopale: le 21 septembre est le jour de Saint-Matthieu, et Bède le Vénérable, en parlant de la conversion de Matthieu, dit que Jésus regarda Matthieu miserando atque eligendo. C’est une expression qui n’est pas traduisible, parce qu’en italien, un des deux verbes n’a pas de gérondif, et en espagnol non plus. La traduction littérale serait «en miséricordiant et en choisissant», presque comme un travail artisanal. «Il le miséricordia»: voilà la traduction littérale du texte. Lorsque, des années plus tard, en récitant le bréviaire en latin, j’ai découvert cette lecture, je me suis aperçu que le Seigneur m’avait modelé de façon artisanale avec sa miséricorde. Chaque fois que je venais à Rome, comme je logeais via della Scrofa, j’allais dans l’église SaintLouis-des-Français prier devant le tableau du Caravage, justement La vocation de saint Matthieu. Selon la Bible, le lieu où demeure la miséricorde de Dieu est le sein, les entrailles maternelles, de Dieu. Qui s’émeuvent au point de pardonner le péché. Le jubilé de la miséricorde peutil être une occasion de redécouvrir la «maternité» de Dieu? Existe-t-il aussi un aspect plus «féminin» de l’Eglise à valoriser? Oui, Dieu lui-même l’affirme quand il dit dans Isaïe qu’une mère oublierait-elle son enfant, et que même une mère peut oublier... «moi, en revanche, je ne t’oublierai jamais». On voit ici la dimension maternelle de Dieu. Tous ne comprennent pas quand on parle de la «maternité» de Dieu, ce n’est pas un langage populaire — dans le bon sens du terme — cela semble un langage un peu électif; c’est pourquoi je préfère parler de la tendresse, qui est le propre d’une mère, la tendresse de Dieu, la tendresse naît des entrailles paternelles. Dieu est père et mère. La miséricorde, toujours si l’on se réfère à la Bible, nous fait connaître un Dieu plus «émotif» que celui que nous imaginons parfois. Découvrir un Dieu qui se laisse émouvoir et attendrir par l’homme peut changer aussi notre attitude envers nos frères? Découvrir cela nous conduira à avoir une attitude plus tolérante, plus patiente, plus tendre. En 1994, au cours du synode, lors d’une réu- nion de groupes, j’ai dit qu’il fallait instaurer la révolution de la tendresse et un père synodal — un homme bon, que je respecte et que j’aime bien — déjà très âgé, m’a dit qu’il ne fallait pas employer ce langage et il m’a donné des explications raisonnables, en homme intelligent, mais je continue de dire qu’aujourd’hui, la révolution est celle de la tendresse parce que c’est de là que découle la justice et tout le reste. Si un entrepreneur embauche un employé de septembre à juillet, lui ai-je dit, ce qu’il fait n’est pas juste parce qu’il le congédie pour les vacances de juillet pour le reprendre après avec un nouveau contrat de septembre à juillet, et de cette façon, le travailleur n’a pas droit aux indemnités, ni à la retraite, ni à la sécurité sociale. Il n’a droit à rien. L’entrepreneur ne fait pas preuve de tendresse, mais il traite l’employé comme un objet — pour donner un exemple de manque de tendresse. Si on se met à la place de cette personne, au lieu de penser à ses propres poches pour avoir un peu d’argent en plus, alors les choses changent. La révolution de la tendresse est ce que nous devons cultiver aujourd’hui comme fruit de cette année de la miséricorde: la tendresse de Dieu envers chacun de nous. Chacun de nous doit dire: «Je suis un pauvre, mais Dieu m’aime ainsi; alors moi aussi je dois aimer les autres de la même façon». Le «discours à la lune» du Pape Jean XXIII, lorsqu’un soir il salua les fidèles en disant: «Donnez une caresse à vos enfants» est célèbre. Cette image est devenue une icône de l’Eglise de la tendresse. De quelle manière le thème de la miséricorde pourra-t-il aider les communautés chrétiennes à se convertir et à se renouveler? Quand je vois les malades, les personnes âgées, ce qui me vient spontanément à l’esprit, c’est la caresse. La caresse est un geste qui peut être interprété de façon ambiguë, mais c’est le premier geste que font la maman et le papa avec leur enfant nouveau-né, le geste qui dit «je t’aime beaucoup», «je t’aime», «je veux que tu ailles de l’avant». Pouvez-vous nous révéler un geste que vous avez l’intention d’accomplir pendant le jubilé pour témoigner de la miséricorde de Dieu? Il y aura de nombreux gestes, mais un vendredi par mois, je ferai un geste différent. L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 page 17 Message de Noël du patriarche latin de Jérusalem Paix, miséricorde et action Peu de pèlerins, des arbres et des lampadaires à moitié éteints: Noël en Terre Sainte s’est présenté également comme une occasion pour revenir à l'essentiel d'une fête qui risque souvent d'être dénaturée par son pur aspect extérieur. C’est ce qu’avait suggéré le patriarche de Jérusalem des Latins, Mgr Fouad Twal, qui dans l'aprèsmidi de la veillée, après une étape au monastère de Mar Elias, est arrivé en procession à Bethléem, où avant la Messe de minuit, il a présidé le rite d'ouverture de la porte sainte de la basilique de la Nativité. Le rite a ensuite été renouvelé à Nazareth le 27 déChers amis, chers peuples de Terre Sainte, A vous tous et à ceux qui vous sont chers, je souhaite un Noël plein de joie et de bénédictions! Chers amis journalistes, merci de votre présence; merci également pour votre travail, si précieux. Qu’il s’exerce avec franchise, liberté, et sagesse, et qu’il soit surtout toujours guidé par un souci constant de vérité. Dans quelques jours, nous fêterons la naissance du Christ; Noël, mystère de l’Incarnation, mystère du Verbe Eternel qui «s’est fait chair et a demeuré parmi nous»; Noël, fête de la lumière qui brille dans la nuit, fête de la joie, de l’espérance et de la paix. Les enfants du monde rêvent d’une fête merveilleuse, de cadeaux, de lumières, d’arbres décorés et de crèches. Cependant, et je reprends les mots mêmes du Pape François, «tout est faussé, car le monde continue à faire la guerre»... Cette fameuse «troisième guerre mondiale par morceaux» dont il nous parle si souvent, se déroule sous nos yeux, en partie dans notre région, sur notre terre. Quelle douleur de voir, une fois encore, notre bien-aimée Terre Sainte prise dans le cycle infernal et sanglant de la violence! Quelle douleur de voir, une fois encore, la haine prendre le pas sur la raison et le dialogue! La souffrance des peuples de cette terre est la nôtre, nous ne pouvons l’ignorer. Cela suffit. Nous sommes fatigués de ce conflit, et de voir la Terre Sainte ensanglantée. Aux dirigeants israéliens et palestiniens, nous disons qu’il est temps de faire preuve de courage, et de travailler à l’établissement d’une paix juste. Assez de procrastination, d’hésitations, de faux prétextes! Respectez les résolutions internationales, écoutez la voix de vos peuples qui aspirent à la paix, et agissez dans leur intérêt. Chacun des deux peuples de la Terre Sainte, les Israéliens et les Palestiniens, a droit à la dignité, à un Etat indépendant et à une sécurité durable. La situation que nous vivons en Terre Sainte fait écho, hélas, à celle du monde, confrontée à une menace terroriste sans précédent. Une idéologie mortifère, fondée sur le fanatisme et l’intransigeance religieuse, répand la terreur et la barbarie au milieu d’innocents. Elle visait hier le Liban, la France, la Russie, les Etats-Unis, mais sévit depuis des années en Irak, et en Syrie. Le cas syrien est d’ailleurs au centre de cette crise actuelle ; de la résolution de ce conflit dépend le futur du MoyenO rient. Ces terribles guerres sont alimentées par le commerce des armes, le- cembre, dans la basilique de l'Annonciation. «La situation actuelle — a écrit Mgr Fouad Twal dans son message de Noël — nous suggère de limiter les aspects les plus visibles des célébrations en faveur d'un approfondissement de leur signification spirituelle». Le sinistre climat de souffrance causé par le conflit israélo-palestinien a également constitué un cadre inévitable à la visite que le patriarche Twal a effectuée le dimanche 20 décembre dans la Bande de Gaza pour l'ouverture de la porte sainte dans la paroisse consacrée à la Sainte-Famille. Là, la petite communauté chrétienne locale — environ 1300 personnes — s’est quel implique plusieurs puissances internationales. Nous sommes face à une absurdité et une duplicité totales: certains parlent, d’un côté, de dialogue, de justice, de paix et promeuvent, de l’autre, la vente d’armes aux belligérants! A ces trafiquants d’armes sans scrupules et sans conscience, nous disons: convertissezvous. Votre responsabilité est grande dans ces tragédies qui nous accablent et vous aurez à répondre devant Dieu du sang de vos frères. La réponse militaire et la voie de la force ne peuvent pas résoudre les problèmes de l’humanité. Il faut trouver quelles sont les causes et les racines de ce fléau, et s’y attaquer. Il faut lutter contre la pauvreté et l’injustice, qui peuvent constituer un terreau favorable au terrorisme; de même, il faut promouvoir l’éducation à la tolérance et l’acceptation de l’autre. L’Eglise et la communauté des croyants ont également une réponse à apporter à la situation actuelle. Cette réponse est celle du jubilé de la miséricorde, inauguré le 8 décembre par le Pape François. La miséricorde est le remède aux maux de notre temps. C’est par elle que nous rendrons visibles au monde la tendresse et la proximité de Dieu. La miséricorde ne se limite pas aux relations individuelles, mais devrait embrasser la vie publique dans tous ses secteurs (politique, économique, culturel, social), à tous les niveaux (international, régional et local) et dans toutes les directions (entre Etats, peuples, ethnies, religions et confessions). Quand la miséricorde deviendra une composante de l’action publique, elle sera alors capable de transférer le monde de la sphère des intérêts égoïstes à celle des valeurs humaines. La miséricorde est un acte politique par excellence, à condition de définir la politique dans son sens le plus noble, c’est-à-dire la prise en charge de la famille humaine à partir des valeurs éthiques, dont la miséricorde est une composante principale, qui s’opposent à la violence, l’oppression, l’injustice et l’esprit de domination. A l’occasion de cette année de la miséricorde, nous invitons les pèlerins à visiter la Terre Sainte. Selon l’invitation du Saint-Père, nous avons ouvert une porte sainte, une porte de miséricorde, dans plusieurs églises du diocèse, à Jérusalem (basilique de Gethsémani), Nazareth (basilique de l’Annonciation) et Bethléem (basilique de la Nativité). Les pèlerins ne devraient pas avoir peur de venir. Malgré la situation tendue en cette Terre, leur itinéraire est sans risque. De plus, ils sont res- préparée aux festivités avec la nostalgie de temps pas si lointains, durant lesquels il était permis de célébrer Noël en public. «Il n'est pas facile d'être chrétiens à Gaza», regrette un représentant de la communauté, Zuheir Michael Jawadat, pour lequel «l'atmosphère n'est pas agréable. Le Hamas n'autorise plus les célébrations de Noël dans les espaces publics». Nous publions ci-dessous le message de Noël du patriarche latin de Jérusalem, Sa Béatitude Mgr Fouad Twal, présenté lors de la traditionnelle conférence de presse qui s’est tenue le 16 décembre au patriarcat latin. pectés et appréciés par toutes les composantes de la Terre Sainte. Nous croyons en la valeur fondamentale de l’éducation. Et ici justement, comment ne pas rappeler l’âpre lutte menée pour préserver nos écoles chrétiennes en Israël? Comment ne pas remercier ceux qui y ont pris part, parents, enfants et professeurs? Beaucoup de politiques, parmi lesquels le président israélien Reuven Rivlin et plusieurs membres de la Knesset, ont œuvré à cette noble cause. Leur engagement nous a montré un attachement certain à l’éducation proposée par ces écoles, ouvertes à tous les citoyens sans distinction, fondées sur des principes de fraternité, de dialogue et de paix. Cette perspective interreligieuse m’amène à évoquer le 50e anniversaire de Nostra aetate, probablement le texte le plus révolutionnaire du Concile Vatican II. Cette déclaration pose les bases du dialogue entre l’Eglise et les religions non-chrétiennes. Ici, en Terre Sainte, ce dialogue revêt une importance capitale; les difficultés existent certes, mais il est nécessaire de continuer d’espérer, plus que jamais, à la viabilité d’un dialogue judéo-islamo-chrétien. Je tiens d’ailleurs à saluer notre vicariat Saint-Jacques pour les catholiques de langue hébraïque, qui a fêté cette année ses soixante ans d’existence, qui ne cesse d’œuvrer pour le dialogue judéo-chrétien, et de se donner avec générosité au service des migrants. La situation politique actuelle nous suggère de modérer l’éclat des célébrations, et d’en approfondir plutôt le sens spirituel. Pour cette raison, nous invitons chaque paroisse à éteindre pendant cinq minutes les lumières de l’arbre de Noël, en signe de solidarité avec toutes les victimes de la violence et du terrorisme. De même, la Messe de Noël sera offerte pour les victimes et leurs familles, afin que celles-ci reprennent courage, et participent à la joie et à la paix de Noël. Je voudrais conclure ce message en remerciant le Saint-Père, pour plusieurs raisons: d’abord pour la canonisation en mai dernier des deux saintes palestiniennes, pour le synode des évêques sur la famille, auquel j’ai eu la joie de participer, pour le motuproprio simplifiant la procédure de nullité du mariage; pour l’accord bilatéral historique entre l’Etat de Palestine et le Saint-Siège; enfin pour son encyclique Laudato si’, sur la sauvegarde de la création et de l’environnement, sujets majeurs pour notre planète et pour l’humanité. «Un enfant nous est né, un fils nous a été donné! Sur son épaule est le signe du pouvoir; son nom est proclamé: Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-dela-Paix» (Is 9, 5). Chers amis, la naissance du Christ est signe de la miséricorde du Père, et promesse de joie pour nous tous. Que ce message rayonne sur notre monde blessé, console les affligés, les opprimés, et convertisse les cœurs des violents. Saint et joyeux Noël à tous! L’OSSERVATORE ROMANO page 18 Congrégation pour les causes des saints Promulgation de décrets 14 décembre Le 14 décembre 2015, le Saint-Père a reçu en audience privée S.Em. le cardinal Angelo Amato, S.D.B., préfet de la Congrégation pour les causes des saints. Au cours de l’audience, le Saint-Père a autorisé la Congrégation à promulguer les décrets concernant: — le miracle, attribué à l’intercession de la bienheureuse MARIE ELISABETH HESSELBLAD, fondatrice de l’ordre du Très-Saint Sauveur de Sainte-Brigitte; née à Flågavik (Suède) le 4 juin 1870 et morte à Rome le 24 avril 1957; — le miracle, attribué à l’intercession du serviteur de Dieu LADISLAW BUKOWIŃSKI, prêtre diocésian; né à Berdyczów (Ukraine) le 22 décembre 1904 et mort à Karaganda (Kazakhstan) le 3 décembre 1974; — le miracle, attribué à l’intercession de la vénérable servante de Dieu MARIAE CELESTE CROSTAROSA (dans le siècle: Giulia), moniale fondatrice des sœurs du Très Saint Rédempteur; née à Naples (Italie) le 31 octobre 1696 et morte à Foggia (Italie) le 14 septembre 1755; — le miracle, attribué à l’intercession de la vénérable servante de Dieu MARIE DE JÉSUS (dans le siècle: Carolina Santocanale), fondatrice de la Congrégation des sœurs capucines de l’Immaculée de Lourdes; née à Palerme le 2 octobre 1852 et morte à Cinisi (Italie) le 27 janvier 1923; — le miracle, attribué à l’intercession de la vénérable servante de Dieu ITALA MELA, oblate bénédictine du monastère de San Paolo à Rome; née à La Spezia (Italie) le 28 août 1904 et morte au même endroit le 29 avril 1957; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu ANGELO RAMAZZOTTI, patriarche de Venise, fondateur de l’Institut pour les missions étrangères; né à Milan (Italie) le 3 août 1800 et mort à Crespano del Grappa (Italie) le 24 septembre 1861; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu JOSEPH VITHAYATHIL, prêtre diocésain, fondateur de la Congrégation des sœurs de la Sainte-Famille; né à Puthenpally (Inde) le 23 juillet 1865 et mort à Kuzhikkattussery (Inde) le 8 juin 1964; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu JOSÉ MARÍA ARIZMENDIARRIETA, prêtre diocésain; né à Markina (Espagne) le 22 avril 1915 et mort à Mondragón le 29 novembre 1976 (Espagne); — les vertus héroïques du serviteur de Dieu GIOVANNI SCHIAVO, prêtre profès de la Congrégation de Saint-Joseph; né à Sant’Urbano (Italie) le 8 juillet 1903 et mort à Caxias di Sul (Brésil) le 27 janvier 1967; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu VENANZIO MARIA QUADRI (dans le siècle: Antonio), religieux profès de l’ordre des Serviteurs de Marie; né à Vado de Setta (Italie) le 9 décembre 1916 et mort à Rome le 2 novembre 1937; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu WILLIAM GAGNON, religieux profès de l’ordre hospitalier de Saint-Jean-de-Dieu; né à Dover (Etats-Unis d’Amérique) le 16 mai 1905 et mort à Hô Chi Minh City (anciennement Saïgon, Vietnam) le 28 février 1972; — les vertus héroïques de la servante de Dieu TERESA ROSA FERDINANDA DE SALDANHA OLIVEIRA E SOUSA, du Tiers-Ordre de SaintDominique, fondatrice de la Congrégation du Portugal des sœurs dominicaines de Sainte-Catherine de Sienne; née le 4 septembre 1837 Curie romaine Le Saint-Père a nommé: 19 décembre Mgr PAUL TIGHE, jusqu’à présent secrétaire du Conseil pontifical pour les communications sociales: secrétaire-adjoint du Conseil pontifical de la culture, l’élevant dans le même temps au siège épiscopal de Drivasto. Né à Dublin (Irlande) le 12 février 1958, il a fréquenté la De La Salle Primary School à Navan, puis le Summerhill College de Sligo. En 1979, il a obtenu une maîtrise en droit civil à l’University College de Dublin. Après s’être préparé au sacerdoce à l’Holy Cross College de Dublin et au Collège pontifical irlandais à Rome, le 10 juillet 1983, il a été ordonné prêtre pour l’archidiocèse de Dublin. Sa première fonction a été celle d’aumônier paroissial et d’enseignant à Ballyfermot. Il a ensuite été envoyé à Rome pour étudier la théologie morale à l’université pontificale grégorienne. De retour à Dublin, à partir de 1990, il a enseigné la théologie morale au Mater Dei Institute of Education et à l’Holy Cross College. En 2004, il a été nommé directeur du Communications Office de l’archidiocèse de Dublin et, en 2005, il a institué l’Office for Public Affairs, pour promouvoir la collaboration du diocèse avec les institutions publiques et la société civile. En novembre 2007, il a été nommé secrétaire du Conseil pontifical pour les communications sociales. En juin 2014, il a été nommé secrétaire du Comité pour les médias vaticans présidé par Lord Christopher Patten et constitué pour développer un projet de restructuration des ressources pour la communication du SaintSiège, qui a été présenté au Pape en mars 2015. à Lisbonne (Portugal) et morte au même endroit le 8 janvier 1916; — les vertus héroïques de la servante de Dieu MARÍA EMILIA RIQUELME ZAYAS, fondatrice de l’institut des missionnaires du TrèsSaint-Sacrement et de la bienheureuse Vierge Marie Immaculée; née à Grenade (Espagne) le 15 août 1847 et morte au même endroit le 10 décembre 1940; — les vertus héroïques de la servante de Dieu MARÍA ESPERANZA DE LA CRUZ (dans le siècle: Salustiana Antonia Ayerbe Castillo), co-fondatrice des missionnaires augustines récollectines; née à Monteagudo (Espagne) le 8 juin 1890 et morte au même endroit le 23 mai 1967; — les vertus héroïques de la servante de Dieu EMANUELA MARIA MAGDALENA KALB (dans le siècle: Elena), sœur professe de la Congrégation des sœurs chanoinesses du Saint-Esprit in Sassia; née à Jarosław (aujourd’hui Pologne) le 26 août 1899 et morte à Cracovie (Pologne) le 18 janvier 1986; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu NIKLAUS WOLF, laïc et père de famille; né à Neuenkirch (Suisse) le 1er mai 1756 et mort à Sant’Urbano (Suisse) le 18 septembre 1832; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu TERESIO OLIVELLI, laïc; né à Bellagio (Italie) le 7 janvier 1916 et mort dans le camp de concentration de Hersbruck (Allemagne) le 17 janvier 1945. 17 décembre Le 17 décembre 2015, le Pape François a reçu en audience privée S.Em. le cardinal Angelo Amato, S.D.B., préfet de la Congrégation pour les causes des saints. Au cours de l’audience, le Saint-Père a autorisé la Congrégation à promulguer les décrets concernant: — le miracle, attribué à l’intercession de la bienheureuse TERESA DE CALCUTTA (dans le siècle: Agnese Gonxha Bojaxhiu), fondatrice des Congrégations des Missionnaires de la charité; née le 26 août 1910 et morte le 5 septembre 1997; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu GIUSEPPE AMBROSOLI, prêtre profès des Missionnaires comboniens du Cœur de Jésus; né le 25 juillet 1923 et mort le 27 mars 1987; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu AD OLFO (dans le siècle: Leonardo Lanzuela Martínez), religieux profès de l’Institut des Frères des écoles chrétiennes; né le 8 novembre 1894 et mort le 14 mars 1976; — les vertus héroïques du serviteur de Dieu ENRICO HAHN, laïc; né le 29 août 1800 et mort le 11 mars 1882. jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Nominations dans la communication vaticane Deux laïcs ont été nommés le 21 décembre à des charges de responsabilité dans l’information vaticane: le Pape a en effet choisi le nouveau directeur du Centre de télévision du Vatican (CTV) et le Saint-Siège a annoncé qu’à compter du 1er février 2016, la salle de presse aura un nouveau directeur-adjoint. Il s’agit respectivement de STEFANO D’AGOSTINI, cinquante-sept ans, jusqu’alors responsable technique du CTV, et de GREG BURKE, cinquante-six ans, actuellement «advisor» pour la communication de la secrétairerie d’Etat. Stefano D’Agostini, qui travaille au Centre de télévision du Vatican depuis sa fondation, en 1983, succède donc à Mgr Dario Edoardo Viganò — qui est depuis le 27 juin dernier préfet du Secrétariat pour la communication. Ces dernières années, il a suivi et effectué la production et la réalisation de tous les plus grands événements qui ont concerné la mission des Papes et la vie de l’Eglise. L’histoire de M. D’Agostini est quant à elle particulière. Il est né en effet le 28 octobre 1958, précisément dans l’Etat de la Cité du Vatican, à 17h30, et donc au moment de la fumée blanche de l’élection de Jean XXIII. Si bien que le Pape le compta tout de suite parmi les enfants qu’il aimait appeler affectueusement «roncallini» et par le biais de son secrétaire particulier, Loris Francesco Capovilla, aujourd’hui cardinal, il lui fit parvenir une médaille-souvenir. Et en ce 28 octobre 1958, précisément, son père Franco qui était sediario pontificio, était en service dans l’antichambre papale. Et Fausto, son grand-père, était lui aussi employé de l’antichambre papale. Sa mère, pour sa part, est la fille du lieutenant de gendarmerie, Biagio Lassen. Marié avec Rossella, il a deux enfants. Le nouveau directeur-adjoint de la salle de presse du Saint-Siège est l’Américain au passeport italien Greg Burke. Né le 8 novembre 1959 à Saint-Louis, Missouri, dans un quartier germanoirlandais et dans une famille catholique pratiquante, après avoir étudié dans un lycée des jésuites de la ville, s’est diplômé en littérature comparée à la Columbia University (1983). Au cours de ces années, il est entré dans l’Opus Dei, dont il est ensuite devenu membre numéraire. Spécialisé en journalisme (1984), il a effectué des stages dans la rubrique des faits divers d’un petit quotidien de New York avant d’entrer à l’agence United Press International au siège de Chicago. Après des collaborations également avec l’agence Reuters et avec l’hebdomadaire «Metropolitan», en 1988 il est arrivé à Rome en tant qu’envoyé spécial de l’hebdomadaire «National Catholic Register». Collaborateur durant quatre ans, et à partir de 1994 correspondant permanent du «Time», après le journalisme d’agence et celui de la presse papier, est arrivé, avec le 11 septembre 2001, le temps de la télévision chez Fox News. Pendant onze ans, il a en effet suivi depuis Rome les événements qui concernaient l’Italie, le Vatican, le Proche et Moyen-Orient, l’Europe. Enfin, en juin 2012, il a été appelé par le Saint-Siège à occuper une toute nouvelle fonction d’«advisor» pour la communication de la secrétairerie d’Etat. L’OSSERVATORE ROMANO numéro 53, jeudi 31 décembre 2015 Audiences pontificales Le Saint-Père a reçu en audience: Collège épiscopal Nominations Le Saint-Père a nommé: 14 décembre S.E. M. MAITHRIPALA SIRISENA, président de la République socialiste du Sri Lanka, avec sa suite. S.Exc. Mgr CHRISTOPHE PIERRE, archevêque titulaire de Gunela, nonce apostolique au Mexique. la Commission de direction de l’«Asociación de Magistrados y Funcionarios del Ministerio público de la Defensa de la República Argentina». Leurs Eminences MM. les cardinaux: ANGELO AMATO, préfet de la Congrégation pour les causes des saints; WALTER KASPER, président émérite du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. 17 décembre S.Em. le cardinal FERNAND O FILONI, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples; Leurs Excellences NN.SS.: ALESSANDRO D’ERRICO, archevêque titulaire de Carini, nonce apostolique en Croatie; ALD O CAVALLI, archevêque titulaire de Vibo Valentia, nonce apostolique aux Pays-Bas. M. CARL A. ANDERSON, chevalier suprême des Chevaliers de Colomb, avec S.Exc. Mgr WILLIAM EDWARD LORI, archevêque de Baltimore (Etats-Unis d’Amérique). S.Em. le cardinal ANGELO AMATO, préfet de la Congrégation pour les causes des saints. 18 décembre S.Exc. Mgr FABIO MARTÍNEZ CASTILLA, archevêque de Tuxtla Gutiérrez (Mexique), avec l’évêque auxiliaire, S.Exc. Mgr JOSÉ LUIS MEND OZA CORZO, évêque titulaire de Lamiggiga, et avec S.Exc. Mgr FELIPE ARIZMENDI ESQUIVEL, évêque de San Cristóbal de Las Casas. 19 décembre S.Em. le cardinal MARC OUELLET, préfet de la Congrégation pour les évêques; Leurs Excellences NN.SS.: SALVATORE PENNACCHIO, archevêque titulaire de Montemarano, nonce apostolique en Inde et au Népal; NIKOLA ETEROVIĆ, archevêque titulaire de Cibale, nonce apostolique en République fédérale d’Allemagne. L’OSSERVATORE ROMANO EDITION HEBDOMADAIRE Unicuique suum EN LANGUE FRANÇAISE Non praevalebunt 15 décembre le père JAMES PATRICK POWERS, du clergé du diocèse de Superior, jusqu’à présent administrateur diocésain de Superior et curé de la Saint Joseph Parish à Rice Lake (EtatsUnis d’Amérique): évêque de Superior (Etats-Unis d’Amérique). Né le 6 février 1953 à Baldwin (Wisconsin, Etats-Unis d’Amérique), il a fréquenté la Hammond Grade School et la Saint Croix Central High School. Il a été pendant plusieurs années propriétaire d’une compagnie d’assurance. Entré au séminaire, il a suivi ses études ecclésiastiques au Saint John Vianney et au Saint Paul Seminary à Saint Paul (Minnesota), et des études en droit canonique (1996) à la Saint Paul’s University à Ottawa (Canada). Il a été ordonné prêtre pour le diocèse de Superior le 20 mai 1990. Après l’ordination, il a exercé les fonctions suivantes: vicaire paroissial de la Saint Joseph à Rice Lake (19901992); administrateur paroissial de Saint John the Baptist à Webster, des Sacred Hearts of Jesus and Mary à Crescent Lake et de Our Lady of Perpetual Help à Danbury (19931994); curé de Saint Bridget à River Falls (1994-1998), de Saint Pius X à Solon Springs, Saint Mary à Minong et Saint Anthony of Padua à Gordon (1998-2003); vicaire judiciaire adjoint (1998-2010); administrateur paroissial de Saint Pius X à Solon Springs, Saint Anthony of Padua à Gordon et Saint Mary à Minong (2003-2014); vicaire général (20102014). Depuis 2003, il est curé de la Saint Joseph Parish à Rice Lake et administrateur paroissial de Our Lady of Lourdes à Dobie, Saint John the Evangelist à Birchwood et Holy Trinity à Haugen et, depuis 2014, il est administrateur diocésain. Il a également été père spirituel du groupe Teens Encounter Christ et membre du Priest Personnel Board. (1982) de l’université de Dallas à Irving, Texas. Ordonné prêtre pour le diocèse de Dallas le 15 mai 1982, il a été vicaire paroissial de All Saints (1982-1986); aumônier à la University of Dallas (1986-1996); curé de Saint Gabriel à McKinney (19962008). Il a également été directeur des vocations sacerdotales, doyen, recteur ad interim du séminaire Holy Trinity et membre du collège des consulteurs, du conseil presbytéral et du board of directors de l’université de Dallas. Depuis 2008, il était vicaire pour le clergé. Mgr JOHN GREGORY KELLY, du clergé du diocèse de Dallas, jusqu’à présent vicaire pour le clergé (EtatsUnis d’Amérique): évêque auxiliaire de Dallas (Etats-Unis d’Amérique), lui assignant le siège titulaire épiscopal de Jamestown. Né le 15 février 1956 à LeMars, Iowa, dans le diocèse de Sioux City (Etats-Unis d’Amérique), il a fréquenté la Sacred Heart Elementary School (1962-1970) et la Saint Mary High School (1970-1974) à Colorado Springs et la Colorado State University (1974-1976) à Fort Collins. Entré au séminaire Holy Trinity, il a obtenu le baccalauréat en philosophie (1978) et le master of divinity Mgr LESZEK LESZKIEWICZ, jusqu’à présent doyen et curé de la paroisse Saint-Nicolas à Bochnia (Pologne): évêque auxiliaire de Tarnów (Pologne), lui assignant le siège titulaire de Bossa. Né le 10 mai 1970 à Görlitz, dans le diocèse de Tarnów (Pologne), après son baccalauréat, en 1989 il a été admis au grand séminaire. Le 25 mai 1996, il a reçu l’ordination sa- 16 décembre GIOVANNI MARIA VIAN directeur Giuseppe Fiorentino vice-directeur rédacteur en chef de l’édition Rédaction cerdotale et a été vicaire paroissial à Szczucin (1996-2000). Après des cours au centre de formation missionnaire à Varsovie (2001), il a prêté service en Equateur, dans le diocèse de Babhoyo (jusqu’en 2006). De 2006 à 2009, il a étudié à l’université pontificale, où il a obtenu une licence en missiologie. Il a été pendant un an vice-directeur du département pour les missions du diocèse de Tarnów. De 2010 à 2015, il a été préfet de discipline au grand séminaire. Il était actuellement doyen, curé de Saint-Nicolas et custode du sanctuaire marial à Bochnia. 19 décembre le père JOSEPH RAJA RAO THELEGATHOTI, S.M.M., provincial des Missionnaires montfortains à Bangalore (Inde): évêque de Vijayawada (Inde). Né le 8 mars 1952, à Peddautapally, dans le diocèse de Vijayawada (Inde), après des études à l’Andhra Loyola College, il a fréquenté le petit séminaire Saint Ambrose à Nuzvid. Il a ensuite étudié la philosophie au Saint Peter’s Papal Seminary de Bangalore, comme novice de la compagnie de Marie (montfortains), et la théologie à l’université pontificale grégorienne. Il a obtenu une licence en théologie biblique au Dharmaram Vidya Kshetram de Bangalore et un doctorat en théologie spirituelle à la Grégorienne. Après avoir émis sa profession solennelle le 31 janvier 1980, il a été ordonné prêtre montfortain le 7 juin suivant. Jusqu’en 1984, il a été recteur du petit séminaire de sa congrégation à Mysore, puis recteur du théologat de Bangalore et dans le même temps conseiller provincial (1984-1990). Devenu supérieur provincial (1990-1997), il a été dans le même temps vice-président de la conférence des religieux de l’Inde (1993-1997). A Rome, de 1997 à 2004, il s’est occupé d’une nouvelle fondation et a complété sa formation. De retour dans son pays, il a dirigé un institut pour jeunes filles pauvres à Anugraha (2004-2008), puis le Monfortian Marian Centre à Bangalore (2006-2011). Dans le même temps, il était conseiller provincial et recteur du théologat montfortain à Bangalore (2008-2011). De 2011 à 2015, il a été procureur général et postulateur de sa congrégation à Rome et actuellement, il était provincial à Bangalore. Jean-Michel Coulet Cité du Vatican [email protected] www.osservatoreromano.va page 19 TIPO GRAFIA VATICANA EDITRICE L’OSSERVATORE ROMANO don Sergio Pellini S.D.B. directeur général Service photo: [email protected] Agence de publicité Il Sole 24 Ore S.p.A, System Comunicazione Pubblicitaria via del Pellegrino, 00120 Cité du Vatican Via Monte Rosa, 91, 20149 Milano téléphone + 39 06 698 99400 fax + 39 06 698 83675 [email protected] Démission Le Saint-Père a accepté la démission de: 16 décembre S.Exc. Mgr PAULO SÉRGIO MACHAD O, qui avait demandé à être relevé de la charge pastorale du diocèse de São Carlos (Brésil), conformément au canon 401 § 2 du C. de D.C. IOR 24 novembre Le Saint-Père s’est rendu à l’institut pour les œuvres de religion, et a nommé directeur général de l’institut M. GIAN FRANCO MAMMÌ, jusqu’à présent vice-directeur. Représentation pontificale Nomination Le Saint-Père a nommé: 12 décembre S.Exc. Mgr VITO RALLO, archevêque titulaire d’Alba: nonce apostolique au Maroc. Né à Mazara del Vallo (Italie) le 30 mai 1953, il a été ordonné prêtre le 1er avril 1979 dans sa ville et a obtenu une maîtrise in utroque iure. En 1988 il est entré au service diplomatique du SaintSiège, accomplissant sa mission dans les nonciatures de Corée, Sénégal, Mexique, Canada, Liban, Espagne. En 2004, il a été appelé à occuper la charge d’envoyé spécial et d’observateur permanent du Saint-Siège auprès du Conseil de l’Europe à Strasbourg jusqu’au 12 juin 2007, où il a été nommé archevêque titulaire d’Alba et nonce apostolique au Burkina Faso et au Niger. Il a reçu l’ordination épiscopale le 28 octobre suivant. Abonnements: Italie, Vatican: 58,00 €; Europe: 100,00 € 148,00 $ U.S. 160,oo FS; Amérique latine, Afrique, Asie: 110,00 € 160,00 $ U.S. 180,00 FS; Amérique du Nord, Océanie: 162,00 € 240,00 $ U.S. 260,00 FS. Renseignements: téléphone + 39 06 698 99489; fax + 39 06 698 85164; courriel: [email protected] Belgique: Editions Jésuites 7, rue Blondeau 5000 Namur (IBAN: BE97 0688 9989 0649 BIC: GKCCBEBB); téléphone o81 22 15 51; fax 081 22 08 97; [email protected] France: Bayard-Ser 14, rue d’Assas, 75006 Paris; téléphone + 33 1 44 39 48 48; [email protected] - Editions de L’Homme Nouveau 10, rue de Rosenwald 75015 Paris (C.C.P. Paris 55 58 06T); téléphone + 33 1 53 68 99 77 [email protected]. Suisse: Editions Saint - Augustin, casepostale 51, CH - 1890 Saint-Maurice, téléphone + 41 24 486 05 04, fax + 41 24 486 05 23, [email protected] - Editions Parole et Silence, Le Muveran, 1880 Les Plans sur Bex (C.C.P. 17-336720-5); téléphone + 41 24 498 23 01; [email protected] Canada et Amérique du Nord: Editions de la CECC (Conférence des Evêques catholiques du Canada) 2500, promenade Don Reid, Ottawa (Ontario) K1H 2J2; téléphone 1 800 769 1147; [email protected] L’OSSERVATORE ROMANO page 20 jeudi 31 décembre 2015, numéro 53 Messe du 27 décembre La famille est nécessaire Il est important pour les familles de marcher ensemble. C’est ce qu’a souligné le Pape François lors de la Messe présidée à l’autel de la Confession de la basilique vaticane, dans la matinée du dimanche 27 décembre, fête de la Sainte-Famille de Jésus. A cette occasion, célébrant le jubilé des familles dans le cadre de l’année sainte extraordinaire de la miséricorde, le Pape a prononcé l’homélie suivante: Les lectures bibliques que nous avons écoutées nous ont présenté l’image de deux familles qui accomplissent leur pèlerinage vers la maison de Dieu. Elkana et Anne portent leur fils Samuel au temple de Silo et le consacrent au Seigneur (cf. 1 S 1, 20-22.24-28). De la même manière, Joseph et Marie, pour la fête de la Pâque, se font pèlerins à Jérusalem avec Jésus (cf. Lc 2, 41-52). Nous avons souvent sous les yeux les pèlerins qui se rendent dans les sanctuaires et dans les lieux chers à la piété populaire. En ces jours, beaucoup se sont mis en chemin pour rejoindre la porte sainte ouverte dans toutes les cathédrales du monde et aussi dans de nombreux sanctuaires. Mais la chose la plus belle mise en relief aujourd’hui par la Parole de Dieu est que toute la famille accomplit le pèlerinage. Papa, maman et les enfants, ensemble, se rendent à la maison du Seigneur pour sanctifier la fête par la prière. C’est un enseignement important qui est offert aussi à nos familles. Nous pouvons même dire que la vie de la famille est un ensemble de petits et de grands pèlerinages. Comme cela nous fait du bien par exemple, de penser que Marie et Joseph ont enseigné à Jésus à réciter les prières! Et cela est un pèlerinage, le pèlerinage de l’éducation à la prière. Et cela nous fait aussi du bien de savoir que durant la journée ils priaient ensemble; et qu’ensuite le samedi, ils allaient ensemble à la synagogue pour écouter les Ecritures de la Loi et des Prophètes et louer le Seigneur avec tout le peuple. Et certainement durant le pèlerinage vers Jérusalem, ils ont prié en chantant avec les paroles du Psaume: «Quelle joie quand on m’a dit: “Nous irons à la maison du Seigneur!”. Maintenant notre marche prend fin devant tes portes, Jérusalem!» (122, 1-2). Comme il est important pour nos familles de marcher ensemble et d’avoir un même but à atteindre! Nous savons que nous avons un parcours commun à accomplir; une route où nous rencontrons des difficultés mais aussi des moments de joie et de réconfort. Dans ce pèlerinage de la vie, nous partageons aussi le moment de la prière. Qu’y-a-t-il de plus beau pour un papa et une maman que de bénir leurs enfants au début de la journée et à sa conclusion? Tracer sur leur front le signe de la croix comme le jour du baptême. N’est-ce pas peut-être la prière la plus simple des parents pour leurs enfants? Les bénir, c’est-à-dire les confier au Seigneur, comme l’ont fait Elkana et Anne, Joseph et Marie, pour qu’il soit leur protection et leur soutien dans les différents moments de la journée. Comme il est important pour la famille de se retrouver aussi pour un bref temps de prière avant de prendre ensemble les repas, pour remercier le Seigneur de ces dons, et pour apprendre à partager ce qui est reçu avec celui qui est davantage dans le besoin. Ce sont de tout-petits gestes qui expriment cependant le rôle de formation que possède la famille dans le pèlerinage de tous les jours. Au terme de ce pèlerinage, Jésus retourne à Nazareth et il était soumis à ses parents (cf. Lc 2, 51). Cette image contient aussi un bel ensei- gnement pour nos familles. Le pèlerinage, en effet, ne finit pas quand on arrive au but qu’est le sanctuaire, mais quand on revient à la maison et qu’on reprend la vie de tous les jours, mettant en acte les fruits spirituels de l’expérience vécue. Nous savons ce que Jésus avait fait cette fois. Au lieu de revenir à la maison avec les siens, il s’était arrêté à Jérusalem dans le Temple, causant une grande peine à Marie et à Joseph qui ne le trouvaient plus. Pour cette «escapade», Jésus a dû aussi probablement présenter des excuses à ses parents. L’Evangile ne le dit pas, mais je crois que nous pouvons le supposer. La question de Marie, d’ailleurs, manifeste une certaine réprobation, rendant évidente sa préoccupation et son angoisse ainsi que celle de Joseph. Revenant à la maison, Jésus s’est certainement soumis à eux pour montrer toute son affection et son obéissance. Ces moments qui, avec le Seigneur, se transforment en opportunité de croissance, en occasion de demander pardon et de le recevoir, de montrer l’amour et l’obéissance, font aussi partie du pèlerinage de la famille. Au cours de l’année de la miséricorde, que chaque famille chrétienne puisse devenir un lieu privilégié de ce pèlerinage où s’expérimente la joie du pardon. Le pardon est l’essence de l’amour qui sait comprendre l’erreur et y porter remède. Pauvres de nous si Dieu ne nous pardonnait pas! C’est au sein de la famille qu’on s’éduque au pardon, parce qu’on a la certitude d’être compris et soutenus malgré les erreurs qui peuvent être commises. Ne perdons pas confiance dans la famille! Il est beau d’ouvrir toujours le cœur les uns aux autres, sans rien cacher. Là où il y a l’amour, là aussi il y a compréhension et pardon. Je confie à vous toutes, chères familles, ce pèlerinage domestique de tous les jours, cette mission si importante, dont le monde et l’Eglise ont plus que jamais besoin. Des familles de pèlerins franchissent la porte sainte de Saint-Pierre
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