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Septembre 2014 / Numéro 6
Spécial santé
Un défi pour le Congo
> Macky Sall : interview
exclusive du Président
du Sénégal
> La BAD : 50 ans au service
du développement de l’Afrique
> Kinshasa la secrète
Édito
Photo : Bernard Poudevigne
« Nous sommes tous des
journalistes américains ! »
Q
ue Jean-Marie Colombani me pardonne de paraphraser son éditorial, publié par Le Monde dans son
édition du 13 septembre 2001. Mais dans la mesure où ce nouveau numéro trimestriel d’Impact France-RDC
«sort» quelques jours à peine après le lâche assassinat du journaliste américain James Foley, toute la rédaction
de notre magazine se devait de lui rendre hommage et de s’associer à la douleur de ses proches.
Comment, en effet, ne pas être horrifié par un tel acte de barbarie ? Comment ne pas se sentir concerné par le
tragique destin de cet homme de quarante ans qui avait fait de l’information son métier ?
L’information et rien que l’information, tel est d’ailleurs l’objectif que nous nous sommes fixés en cette période
de rentrée. Raison pour laquelle nos lecteurs trouveront encore plus de rubriques que dans les numéros précédents.
Fidèle à son esprit d’ouverture, Impact vous emmène au Sénégal, dont le Président nous a fait l’honneur d’une
interview exclusive, mais également au cœur du dispositif européen de coopération avec la RDC, expliqué par
l’ambassadeur, chef de la délégation de l’Union européenne à Kinshasa. Suivez-nous aussi à l’est de la RDC où
l’Honorable Faso et le Mwami Kabare travaillent au rapprochement des peuples de la région des Grands Lacs.
Enfin, le fil conducteur de ce sixième numéro étant la santé, ne soyez pas étonnés de trouver l’interview de
Philippe Douste-Blazy, président d’UNITAID, dans les pages « Politique ».
Une mention spéciale, dans la rubrique « Economie », pour la Banque Africaine de Développement qui fête
cette année son 50ème anniversaire et, dans les pages « Société », pour tous ceux qui œuvrent en faveur de la
paix et pour la défense des opprimés. Retrouvez ainsi Julienne Lusenge, au lendemain de sa participation au
sommet international de Londres sur les violences sexuelles, ainsi qu’A ngélus et Noëlla, les deux lauréats du
prix des droits de l’Homme de l’ambassade de France.
Glamour et détente sont les communs dénominateurs des sections « Culture » et « Vie pratique ». Si l’univers
étrange de Freddy Tsimba vous déconcerte, sachez qu’il le considère comme un hymne à la vie. Hymne à la
vie que vous retrouverez dans le monde de Pitshou et dans les nombreux articles consacrés au théâtre, à la
musique et au cinéma. Quant aux nouveaux arrivants, ils seront heureux de découvrir une autre vision de
Kinshasa, immense capitale qui mérite effectivement d’être revisitée.
Excellente lecture à tous et bonne rentrée !
Philippe Larrieu
Directeur de la publication
Impact est accessible sur www.impact.cd, tablettes et smartphones
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 3
N °
6
/
S E P T E M BR E
2 01 4
Sommaire
06
36
82
46
Éditorial
03 Nous sommes tous des journalistes
américains !
14
Politique
06 Francophonie : la RDC passe
le relais au Sénégal
10 UNITAID : un billet pour l'espoir
14 FESNAG 2014 : le tam-tam plus fort
que les canons
18 La gouvernance : axe majeur
du XIème FED
24 Une ministre française aux
cérémonies du 30 juin
Économie
28 Première Semaine française
de Kinshasa : les raisons d’un succès
32 Un schéma directeur pour les
finances publiques
36 L’Hôpital Monkole : un établissement
de référence
40 La BAD fête ses 50 ans !
44 Le BRGM : un service géologique
national
86
4 / Impact n°6 / Septembre 2014
98 Le genre s’invite au cinéma
Dossier
46 La santé, un autre défi à relever :
la RDC sur tous les fronts de la
maladie
50 L’Unicef s’engage pour réduire
la mortalité des enfants et des
mères en RDC
54 Tout en un : le projet CECFOR
renforce la lutte contre le paludisme
58 L’Initiative 5% en RDC
70 Deux lauréats pour le prix des droits
de l’Homme de l’ambassade de
France en RDC
72 Lancement officiel de l’ENA RDC :
une nouvelle élite pour la Fonction
publique
74 Kisangani ville espoir, ville en
mouvement
78 Lycée Blaise Pascal de Lubumbashi
Histoire d'une renaissance !
Société
60 Journal d'un médecin de campagne
64 Les nouvelles technologies
peuvent-elles valoriser les peuples
autochtones ?
68 Sommet international sur les
violences sexuelles de Londres
Culture
82 Le monde de Pitshou, un Kinshasa
très glamour !
86 Freddy Tsimba : «Mes oeuvres
sont un hymne à la vie...»
88 Yango ! : première biennale
d’art contemporain de Kinshasa
90 RDC et patrimoine mondial
de l’UNESCO : «Mémoire rythmique»
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Directeur de publication
Philippe Larrieu
Vie pratique
100 Kinshasa revisitée
106 Les élections consulaires
et européennes
108 Pas de lézard au Gekko’s
Conseiller spécial du directeur
Bernard Poudevigne
Secrétaire de rédaction
Martin van der Belen
Comité de rédaction
Antoine Yvernault, François Béhue,
Sébastien Dauré, Patrick Botrel, Maurice
Demailly, Alain Masetto, Sabrina Palma,
Gérard Pointe, Matthieu Vuillermet,
Christophe Roussin.
68
92 « C'est un roc, c'est un pic, c'est un
cap, c'est une péninsule! »
96 Vu pour vous à Kinshasa :
de la musique avant toute chose…
En couverture : la tendresse, essentielle
pour la santé (photo : Patricia Willocq/AFD)
32
Ont également participé à ce numéro
Dr Jean-Pierre Lamarque, Mina Catherine
Lakrafi, Albert Kabeya, Jean-Christophe
Maurin, Valéry Alves, Pr Daniel Parzy,
Pr Léon Tshilolo, Dr Charles Ngandote,
Daniel Riveros, Julienne Lusenge, Matthieu
Juin-Levite, Mélanie Sirdey-Coid, José
Kalala Kabundi, Thembo Kash, Jean-Pierre
Guegan, Nicole Gesché, Yves Robert,
Philippe Lecocq et la Faculté d’Architecture
de l’Université Libre de Bruxelles (ULB)
Conception et réalisation graphique
Gédéon Mukendi (IFK)
Impression : Imprimerie AGB
Dépôt légal : BNC N° JE 3.01301-57012
Impact
est un magazine gratuit et ne peut pas être vendu
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 5
POLITIQUE
la Börsenverein.
Voilà autant de facteurs souvent mal appréhendés qui peuvent donner la fausse impression du
recul du français chez nous. Pour nous, le parler français doit être compris, non pas dans une
logique exclusive, mais plutôt dans une dynamique de cohabitation avec nos propres langues
et d’autres; répondant ainsi au rendez-vous du
donner et du recevoir qui préfigure la civilisation
de l’Universel, comme aimait à le dire le Président-poète.
Francophonie
La RDC passe
le relais au Sénégal
Entretien exclusif avec Macky Sall, Président de la
République du Sénégal.
Impact : Monsieur le Président, Joseph
Kabila vient de vous passer le flambeau
de la Francophonie dont vous présiderez le prochain sommet en novembre.
Le Sénégal est l’un des fondateurs de la
Francophonie. Quelles sont pour vous les
valeurs véhiculées par la Francophonie et
quelle portée voulez-vous donner à cette
présidence sénégalaise ?
Macky Sall : Je voudrais d’abord féliciter le Président Kabila et lui rendre hommage pour avoir
accueilli le XIVème Sommet de l’OIF et assuré la
présidence en exercice de l’Organisation pendant deux ans. Au cœur de l’A frique, la République démocratique du Congo, avec ses grandes
ressources humaines et naturelles et sa dimension géographique considérable, est un acteur
important de la communauté francophone.
Au moment où je prends le relais, je veux rendre
hommage à mon illustre prédécesseur, feu
le Président Léopold Sedar Senghor, le Président-poète, un des pères fondateurs de la Francophonie. C’est sur son héritage que nous devons
consolider aujourd’hui les fondements de la
«francophonie historique», c'est-à-dire la communauté linguistique et les autres valeurs partagées : liberté, démocratie, droits de l’Homme,
solidarité, etc. mais aussi adapter résolument la
Francophonie aux réalités de notre époque : la
paix et la sécurité, le combat pour la diversité
culturelle, la sauvegarde de l’environnement, la
gouvernance. Aux origines, on était loin d’imaginer l’OIF s’impliquer dans les dossiers de médiation ou d’observation électorale. C’est devenu
6 / Impact n°6 / Septembre 2014
quasiment une routine aujourd’hui.
Je salue à ce propos l’apport considérable du Président Abdou Diouf, Secrétaire général de l’OIF,
un autre aîné et distingué prédécesseur qui, pendant ses trois mandats à la tête de l’Organisation,
a su imprimer à la Francophonie sa véritable dimension institutionnelle.
D’une certaine façon, pour nous Sénégalais, le
Sommet de Dakar est aussi un hommage au
Président Diouf, en reconnaissance à sa contribution, au moment où il achève son troisième et
dernier mandat.
Bien que pays fondateur de la Francophonie, la langue française, qui y est également langue officielle, connait un déclin
au Sénégal. Comment expliquez-vous
cette tendance et que faites-vous pour y
remédier ?
Il faut saisir les choses dans leur juste mesure,
par-delà les idées reçues. On oublie souvent que
nos pays sont de tradition multilinguistique.
Nous avons d’abord, et c’est important de le
souligner, nos langues maternelles, dont certaines sont codifiées, enseignées à l’Université
et parlées sur l’ensemble du territoire national
La RDC, avec ses grandes ressources
humaines et naturelles et sa dimension
géographique considérable, est un acteur
important de la communauté francophone.
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et au-delà même de nos frontières. Du reste, c’est
dans nos langues nationales que nous communiquons au quotidien.
Deuxièmement, le Sénégal est à 95% un pays
musulman, marqué, de ce fait, par un legs arabo-africain, puisque nous apprenons le Coran à
travers la langue arabe qui est aussi enseignée
dans nos écoles et nos universités. Au demeurant, je viens d’autoriser la réouverture, par voie
de concours, de la filière arabophone de notre
Ecole Nationale d’Administration pour y recevoir des élèves diplomates, titulaires de diplômes
universitaires en arabe agréés et remplissant les
conditions d’accès au concours.
Troisièmement enfin, le Sénégal est un pays ouvert aux apports fécondants de l’extérieur, selon
la formule choisie de Senghor.
Certes, le français, langue officielle, fait partie
de notre héritage historique, mais nous sommes
tout aussi ouverts au plurilinguisme qui fait que
les Sénégalais, grands voyageurs devant l’éternel
et au contact avec l’étranger depuis des siècles,
s’expriment aussi en anglais et dans d’autres langues hors de chez nous.
Senghor, précurseur de la Francophonie était
aussi, ne l’oublions pas, un grand germanophile.
Je vous renvoie à son fameux discours de 1968,
à l’occasion de la réception du Prix de la Paix de
l’Association des éditeurs et libraires allemands,
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L’un des thèmes de la Francophonie cette
année est axé sur les jeunes. Comment
envisagez-vous de faire passer les valeurs
de la Francophonie à la jeune génération
sénégalaise ? Plus généralement, quels
ont été les efforts du Sénégal en matière
d’éducation ?
Suivant une tradition bien établie, c’est le pays
hôte qui propose le thème du sommet. Celui de
Dakar portera sur : «Femmes et jeunes en francophonie, vecteurs de paix et acteurs de développement». Je suis heureux de savoir que ce thème
a tout de suite rencontré l’agrément des Etats
membres. Les jeunes et les femmes, en plus d’être
la composante essentielle de la population mondiale, n’en constituent pas moins une couche
vulnérable dans une large mesure, avec des besoins spécifiques que nous devons prendre en
compte dans nos politiques de développement
économique et social : qu’il s’agisse du respect
des droits humains fondamentaux, de la violence
faite aux femmes et aux enfants (en particulier
en temps de conflit), de la lutte pour l’égalité des
chances et contre certaines pratiques comme
l’excision et les mariages précoces, du phénomène des enfants de la rue, de l’éducation et de
la formation, de l’intégration dans les sphères
décisionnelles, etc.
À Dakar, nous souhaitons mettre en lumière
tous ces facteurs handicapants dans le cadre
d’un dialogue ouvert, orienté vers la recherche de
solutions durables. Mais il s’agira aussi de souligner, comme au marqueur, le formidable potentiel qui réside dans les femmes et les jeunes; toute
cette énergie positive qui mérite d’être valorisée
au service du développement économique et social de nos pays.
Voilà pourquoi au Sénégal, en plus des acquis
de la parité hommes/femmes dans les instances
publiques électives, nous mettons l’accent sur
l’autonomisation des femmes par le financement
massif d’activités génératrices de revenus et une
Impact n°6 / Septembre 2014 / 7
POLITIQUE
Le Sénégal a défini sa trajectoire de développement sur les vingt prochaines années
à travers le Plan Sénégal Émergent. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce PSE, ses
priorités et les résultats attendus ?
Le PSE part d’un diagnostic rigoureux de notre
situation socio-économique, sur plusieurs années, à partir de deux paramètres : le niveau et le
rythme de notre croissance économique.
Nous sommes arrivés à la conclusion que notre
taux de croissance actuel, à 4,6%, est certes relativement appréciable, mais qu’il est encore
bas et erratique pour induire les changements
substantiels de nature à modifier qualitativement les conditions de vie de nos populations.
Nous avons, par conséquent, décidé de changer
de vision et de paradigme, pour relever le niveau
de vie et accélérer le rythme de notre croissance
économique sur la durée. Le PSE repose sur trois
axes principaux :
- Premièrement, susciter la transformation de
la structure de l’économie sénégalaise, en vue
de créer et de soutenir une dynamique de croissance forte, durable et inclusive ;
- Deuxièmement, élargir l’accès aux services sociaux et la couverture sociale ainsi que préserver
les conditions d’un développement durable ;
- Troisièmement, répondre aux exigences de
bonne gouvernance, par le renforcement des institutions et la promotion de la paix, de la sécurité
et de l’intégration africaines.
Quant aux composantes essentielles du Plan,
elles reposent sur l’agriculture, les infrastructures, l’énergie, les mines, le tourisme, les TIC et
l’habitat.
Discours de Macky Sall
à la 68ème session de
l’Assemblée Générale
des Nations Unies
Macky Sall
reçoit au Palais de la République, des jeunes élèves
venus de tout le Sénégal, choisis parmi les meilleurs
des écoles et Daaras du pays.
Comme pour la majorité des pays en développement, la santé reste un grand défi pour le Sénégal, malgré les efforts jusque-là consentis. Il
faut dire que nous avons des acquis appréciables
dans le domaine de la couverture vaccinale pour
les enfants en bas âge, le suivi pré et post-natal et
la lutte contre le paludisme et le VIH / sida avec
un taux de prévalence du VIH / sida de 0,7%, un
des plus bas en Afrique. Mais pour la généralisation de l’accès aux soins, en particulier en milieu
rural, nous avons encore des efforts à faire en
termes de désenclavement de certaines zones
et d’installation de centres secondaires de santé
par l’élargissement de la carte médicale.
En outre, il nous faut former davantage de ressources humaines pour certaines spécialités
et relever le niveau du plateau médical pour réduire le nombre d’évacuations sanitaires coûteuses pour certaines maladies.
Au demeurant, le personnel de santé au Sénégal
recèle d’éminents praticiens dans des spécialités
pointues à qui nous cherchons à offrir les meilleures conditions de travail, par l’équipement
approprié des structures médicales publiques.
N'oublions pas aussi la médecine privée qui
connait un certain essor.
L’une des innovations majeures que je viens d’apporter dans le domaine de la santé réside dans le
lancement de la Couverture Maladie Universelle
(CMU) pour l’accès du plus grand nombre aux
Le fil conducteur de ce sixième numéro
d’Impact est la santé, qui est par ailleurs
un volet important du PSE. Quels sont les
défis et réalisations à mettre à l’actif du
Sénégal dans ce domaine ?
8 / Impact n°6 / Septembre 2014
<
C’est l’occasion pour moi de renouveler
l’attachement du Sénégal à la préservation
de la paix, de la sécurité et de l’intégrité
territoriale de ce pays ami et frère...
soins de santé, en plus de la gratuité des soins
pour les enfants de moins de cinq ans.
Photo : UN Photo/Amanda Voisard
lutte plus soutenue contre le chômage des jeunes.
Sur ce plan, nous avons lancé un programme
pilote de lycées d’enseignement technique et
professionnel pour une formation qualifiante
à des métiers qui ouvrent à nos jeunes la voie à
l’auto-emploi. Nous avons en effet constaté que
le système classique, élitiste par définition, qui
privilégie l’enseignement théorique diplômant
de la base au sommet, ne peut pas répondre à lui
seul aux exigences de l’économie et du marché
du travail.
Géographiquement parlant, le Sénégal
paraît bien loin de la RDC et de l’Afrique
centrale. Quel est le positionnement de
votre pays vis-à-vis de la RDC et de cette
région troublée ? Quel est le rôle du Sénégal, notamment au sein de la MONUSCO ?
Même s’ils sont géographiquement distants, le
Sénégal et la RDC partagent une certaine proximité ; d’abord dans nos efforts d’intégration
africaine, dans la communauté linguistique au
sein de la francophonie et en matière de relations
solidaires entre pays africains. Beaucoup de mes
compatriotes sont établis en RDC depuis des
décennies et nous recevons régulièrement des
étudiants congolais. C’est l’occasion pour moi de
renouveler l’attachement du Sénégal à la préservation de la paix, de la sécurité et de l’intégrité
territoriale de ce pays ami et frère. Je salue les
efforts que déploie le Président Kabila à cet effet. Je rappelle que c’est au Congo, actuelle RDC,
que le Sénégal a pris part à la première mission
de paix de son histoire de pays indépendant avec
l’Opération des Nations Unies au Congo (ONUC)
en 1960, année de notre indépendance. Six cents
hommes de notre jeune armée y avaient alors été
déployés. Notre présence en RDC dans le cadre
de la Mission de l’Organisation des Nation Unies
pour la Stabilisation au Congo (MONUSCO)
s’inscrit donc dans cette tradition de solidarité
inter africaine.
Macky Sall
remettant officiellement
les prix du Concours
général sénégalais au
Grand Théâtre de Dakar.
Ces relations sont particulières, fortes et anciennes compte tenu de tout ce qui lie la France
au Sénégal : les circonstances historiques, parfois douloureuses, il faut le reconnaître, comme
l’esclavage et la colonisation. Mais aussi le compagnonnage dans l’épreuve des deux grandes
guerres mondiales. Combattants sénégalais et
français ont affronté les mêmes périls et célébré la même victoire et aujourd’hui, il existe un
partenariat diversifié et confiant. Au-delà de la
douleur et de l’épreuve, notre long compagnonnage a fini par créer des affinités très fortes, un
brassage humain et socio-culturel et une solidarité mutuelle. Aujourd’hui, nous poursuivons la
relation franco-sénégalaise dans le cadre d’une
coopération rapprochée et multiforme, au plan
bilatéral – la France étant le premier partenaire
économique du Sénégal - et multilatéral, à travers des instances de concertations euro-africaines, la Francophonie et les Nations Unies,
entre autres. C’est tout cela, l’héritage des relations franco-sénégalaises.
Propos recueillis par Mina Catherine Lakrafi
La France est également géographiquement éloignée du Sénégal. Et pourtant, les
relations entre les deux pays sont historiquement très fortes. Comment caractériseriez-vous les rapports franco-sénégalais
aujourd’hui ?
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 9
Photo : Philippe Larrieu
POLITIQUE
Un billet pour l'espoir
Les idées les plus simples sont toujours les meilleures. Le
prélèvement d'un euro sur chaque billet d'avion acheté permet
de mobiliser les fonds pour lutter contre quelques grandes
pandémies. Phillippe Douste-Blazy, président d'UNITAID nous
relate l'histoire de cette belle aventure...
Philippe Douste-Blazy
au Mozambique. Des
nouveaux projets ont été
lancés pour améliorer
le diagnostic du VIH/
sida et de la tuberculose.
Ainsi, 25 000 enfants
ont bénéficié, au
Mozambique, d’un
traitement du VIH
adapté et de qualité,
et ce nombre devrait
atteindre 40 000 dans
les jours à venir...
Photo : Giulio Donini
Impact : Philippe Douste-Blazy, vous avez
été en France, député, maire, ministre,
vous êtes maintenant président d’UNITAID
et Secrétaire Général Adjoint des Nations
Unies chargé des financements innovants.
En quoi ce parcours politique vous a porté
vers ces fonctions ?
Philippe Douste-Blazy : L'idée de servir les
plus démunis m'a été transmise par mon père.
Dans mon enfance, nous allions en famille, le
dimanche matin, apporter des produits de première nécessité aux plus pauvres, au centre de
Toulouse. Ce changement brutal d'environnement économique et social que je vivais en
quelques minutes, entre mon milieu de vie habituel et celui des plus pauvres, m'a, à chaque fois,
profondément bouleversé.
Médecin, ce fut une manière de traiter la souffrance physique et mentale des autres; homme
politique dans «l'arène nationale» ce fut l'occasion d'aider à construire de meilleures conditions
10 / Impact n°6 / Septembre 2014
de vie pour mes concitoyens. Et aujourd'hui, ma
vie est vouée à la lutte contre l'extrême pauvreté
au plan international.
C'est un cheminement naturel que je dois à de
grandes rencontres avec ce que j'appellerais de
vrais humanistes qui m'auront profondément
marqué et accompagné: mon père qui m'aura
transmis des valeurs, Simone Veil qui m'a donné
ma chance en me proposant d'être ministre de
la Santé à ses côtés en 1993, les Présidents Lula
et Chirac, ce dernier m'ayant fait l'honneur de
servir mon pays comme ministre des Affaires
étrangères, Nelson Mandela qui fut le premier
parrain d'UNITAID, et enfin Bill Clinton avec
lequel nous travaillons en permanence et qui est
devenu un grand ami.
De l’idée à la réalisation, comment cela
s’est-il passé ?
C’est en 2006 que le Président Chirac ainsi que
les présidents du Brésil et du Chili ont souhaité
créér UNITAID lors de l’Assemblée Générale
des Nations Unies, avec l'aide de la Norvège et
du Royaume-Uni. L'idée de départ était de créer
des «Financements Innovants pour le Développement» afin d'aider à atteindre les Objectifs du
Millénaire dans un contexte budgétaire de plus
en plus contraint. Nous avons immédiatement
choisi la lutte contre les trois maladies les plus
mortelles que sont le sida, la tuberculose et le paludisme. Il faut souligner que chaque année, ces
trois pandémies causent près de quatre millions
de morts dans le monde ! C'est ainsi que j'ai pu
fonder et présider UNITAID depuis son origine.
Mais sans ces «pères fondateurs», tout particulièrement Jacques Chirac, rien n'aurait pu exister.
Aujourd'hui, nous sommes hébergés par l’Orwww.impact.cd
BIO-EXPRESS
> Naissance le 1er janvier 1953 à Lourdes.
> Diplômé en 1983 de la faculté de médecine
de Toulouse, il poursuit d’abord une carrière de
cardiologue.
> Maire de Lourdes en 1989 sous les couleurs
de l’UDF.
> Ministre de la Culture en 1995.
> Après un court passage à l'Assemblée
nationale en 1993, il retrouve un siège de député
en 1997 avant de conquérir la mairie de Toulouse
en 2001.
> Il retourne au gouvernement en 2004 comme
ministre de la Santé pendant un an, puis ministre
des Affaires étrangères jusqu’en mai 2007.
> Il est actuellement président d'UNITAID depuis
2007 et conseiller spécial du secrétaire général
de l’ONU depuis 2008.
ganisation Mondiale de la Santé, à Genève.
UNITAID bénéficie du soutien de 17 membres
donateurs dans le monde. Ce qui caractérise
UNITAID est son financement, en grande partie fondé sur une micro taxe de solidarité sur les
billets d'avion. Ainsi, nous avons mis en place
l'ébauche de la "première taxe mondiale de solidarité". Le début d'un rêve: celui de l'existence
d'une mondialisation solidaire. Grâce à UNITAID, ce rêve est une réalité !
En quoi donc UNITAID est innovant ?
Déjà par son financement comme je viens de le
dire. Mais surtout, les sommes récoltées permettent de créer des marchés là où ils n'existent
pas ou de les modifier, au profit des plus pauvres,
là où ils existent. Grâce à nos ressources sécurisées à long terme, nous investissons sur les marchés pour rendre les produits plus abordables,
accessibles et adaptés pour les populations les
plus défavorisées. Ceci s’est révélé d’une très
grande efficacité puisque nous avons pu diviser,
parfois par dix, le coût de certains médicaments
UNITAID est un chef de file mondial et
son rôle est unique. C'est « le premier
laboratoire des financements innovants
pour le développement »
www.impact.cd
Photo : Giulio Donini
UNITAID
ou tests de diagnostic.
Enfin, nous avons développé, avec les compagnies pharmaceutiques, les formes pédiatriques
des médicaments contre le sida qui, sans notre
caution, n’auraient pas vu le jour car portées par
un marché trop étroit. En cela UNITAID est un
chef de file mondial et son rôle est unique. C'est
"le premier laboratoire des financements innovants pour le développement".
Certains demanderont pourquoi un nouvel
opérateur pour cette action ?
Justement, nous ne sommes pas opérateur. Nous
travaillons pour les autres. C'est pourquoi les
gens ne nous connaissent pas (rires). Cela aurait
été une faute de créer un nouvel opérateur. Notre
approche consiste à recueillir des données, à étudier les marchés puis à les modifier pour que l'accès aux médicaments et aux tests diagnostiques
soit le plus universel possible. La mise en œuvre
est ensuite confiée aux meilleurs acteurs mondiaux du développement, choisis après un appel
d’offres totalement transparent et indépendant.
Nos opérateurs sont aujourd’hui la Fondation
Clinton, l’Unicef, Médecins sans Frontières,
l'OMS et, pour la France, ESTHER ainsi que
"France Expertise International", dépendant du
Quai d'Orsay.
Ainsi, les résultats obtenus par UNITAID, en
particulier la baisse des prix, bénéficient à tous,
qu'il s'agisse des grandes organisations internaImpact n°6 / Septembre 2014 / 11
POLITIQUE
En trois phrases, comment résumeriez-vous l’action d’UNITAID ?
D’abord, UNITAID optimise l’utilisation des
fonds publics dont nous savons tous qu’ils deviennent de plus en plus rares. Ainsi, les pays et
les acteurs de la santé mondiale peuvent acheter
davantage de traitements et de tests diagnostiques avec la même somme d'argent.
Ensuite, UNITAID augmente l’accès à de meilleures technologies pour suivre l'efficacité des
traitements comme par exemple la charge virale
dans le sida.
Enfin, UNITAID sauve des millions de vies en
procurant des médicaments là où il n'y en a pas,
en les rendant plus abordables là où ils sont trop
chers, en évaluant leur efficacité plus rapidement
et en diminuant leur toxicité. Tous ces résultats
permettent de sauver des vies en améliorant la
qualité de vie !
UNITAID a été lancé en 2006 lors de l’Assemblée
générale des Nations Unies par les gouvernements
du Brésil, du Chili, de la France, de la Norvège et du
Royaume-Uni en vue d’atteindre les Objectifs du
Millénaire pour le Développement relatifs à la santé.
Hébergé par l’Organisation mondiale de la Santé,
UNITAID bénéficie aujourd’hui du soutien de 17
membres donateurs dans le monde.
Un rôle unique
UNITAID utilise les financements innovants afin
de transformer les marchés des produits pour le
diagnostic, le traitement et la prévention du VIH/
sida, du paludisme et de la tuberculose dans les pays
en développement. Avec des ressources provenant
d’une taxe de solidarité sur les billets d’avion et
de contributions gouvernementales à long terme,
UNITAID investit dans des interventions d’une grande
efficacité sur les marchés afin de rendre les produits
plus abordables, accessibles et adaptés pour les
populations les plus défavorisées.
compagnies aériennes qui ont voulu faire croire
le contraire, elle n'a entraîné aucune baisse de
flux de voyageurs. Neuf autres États membres
d’UNITAID ont suivi la France, ayant voté à leur
tour une taxe sur les billets d’avion pour collecter
des fonds au profit d’UNITAID : le Cameroun, le
Chili, le Congo, Madagascar, le Mali, Maurice, le
Niger, le Maroc et la République de Corée.
Ce rôle de précurseur de la France, maintenu
par les gouvernements successifs, est reconnu
aujourd'hui par la communauté internationale.
En mai dernier, le Président Bill Clinton a déclaré: «UNITAID est un don exceptionnel fait par la
France au monde ».
Photo : Unitaid
Nous avons vu que la France était à l’origine d’UNITAID, qu’en est-il aujourd’hui ?
La France aura été le premier pays à instaurer la
taxe sur les billets d’avion. Cette dernière a rapporté, selon la Direction Générale de l’Aviation
Civile (DGAC), plus d’un milliard d’euros depuis
juillet 2006. Totalement indolore pour l'Etat qui
la met en place, imperceptible pour le voyageur
qui la paye, la taxe sur les billets d'avion a prouvé qu'une micro contribution payée par des millions de personnes peut changer concrètement
la donne dans la lutte contre l'extrême pauvreté.
De plus, à aucun moment, malgré le lobby des
12 / Impact n°6 / Septembre 2014
Brève introduction sur UNITAID
Pour conclure cet entretien, au début de
l'année, 73 députés africains, issus de
onze pays, ont proposé votre nom ainsi
que les Financements Innovants pour
le Développement au Prix Nobel de la
Paix, vous êtes donc satisfait du chemin
parcouru ?
Quand on rencontre le regard d'un être humain,
quel que soit son âge, qui va mourir parce qu'il
manque 1 $, on ne peut jamais plus se considérer
comme satisfait.
Le vrai et le seul succès d'UNITAID est d'avoir
prouvé que l'on peut se servir de micro contributions indolores sur les activités économiques
mondiales pour éradiquer la pauvreté. Personne
ne pourra plus dire qu'il ne savait pas !
www.impact.cd
UNITAID dans le monde
> 8 enfants sur 10 atteints de sida traités dans le
monde de 2007 à 2011, date à laquelle d'autres ont
pris le relais. En tout, plus de 700.000 enfants auront
pu bénéficier d'anti rétroviraux anti VIH grâce à cette
organisation ;
> 2 millions de dépistages du sida chez les enfants ;
> 8 millions de dépistages du sida chez les femmes
enceintes pour éviter la transmission du virus de la
mère à l'enfant ;
> 355 millions de traitements contre le paludisme,
> 2 millions de traitements contre la tuberculose, tout
particulièrement la tuberculose multi-résistante.
Sauveur des vies
L’accès à de
meilleurs
produits permet
de réduire la
charge imposée
par le VIH/sida,
le paludisme et
la tuberculose
sur les systèmes
de santé. Des
résultats plus
rapides, des
médicaments
plus faciles à
prendre, des
traitements
moins toxiques...
tous ces
résultats
permettent de
sauver des vies
en améliorant la
qualité de vie !
Photo : Unitaid
Photo : Unitaid
tionales de santé (Fonds mondial de lutte contre
le sida, la tuberculose et le paludisme, PEPFAR
américain, agences onusiennes) mais aussi aux
différents ministères de la santé des pays à revenu faible, aux grandes fondations ou aux ONG.
cation par 11 pays européens. Ici aussi, la France,
en mars 2012, a été le premier pays européen à la
mettre en place. Et surtout, la France a accepté
d'attribuer 15% de son produit aux Objectifs du
Millénaire, dans le domaine de la Santé Globale
et de l'Environnement.
À l’occasion de l’Assemblée générale des Nations
Unies en 2013, le Président François Hollande a
déclaré qu’une telle action avait été rendue possible grâce à la réussite d’UNITAID. Tout ceci
nous oblige à continuer et à nous améliorer.
Notre objectif est de continuer à servir les malades les plus pauvres, ici, en République démocratique du Congo comme ailleurs.
Permettez-moi d'ailleurs de saluer tout particulièrement l'engagement remarquable du ministre de la Santé de RDC que j'ai rencontré encore récemment lors de l'Assemblée mondiale de
la Santé à Genève en mai dernier.
Propos recueillis par Dr. Jean-Pierre Lamarque
UNITAID en RDC
Depuis 2007, une dotation de 32.446.000 USD qui a
permis de :
> Distribuer 5.500.000 moustiquaires imprégnées de
longue durée ;
> Mettre 5.700 enfants sous traitement anti rétro
viral (ARV) ;
> Faire passer 4.200 patients à un traitement ARV de
deuxième ligne ;
> Traiter 600 patients tuberculeux multi résistants.
De plus, ce succès a suscité d’autres initiatives
de financements innovants. C'est en particulier
le cas de la taxe sur les transactions financières,
qui est actuellement en cours de mise en appliwww.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 13
POLITIQUE
Le
tam-tam
plus fort que les canons
La paix dans les Kivu passe
aussi par les symboles. La
manifestation culturelle
qui vient de se dérouler a
réuni des pays qui autrefois
ne se parlaient pas. Le
coordonnateur du FESNAG,
l’honorable Faso et le Mwami
Kabare, coordonnateur
interprovincial, ont répondu
aux questions d’Impact.
14 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
Photos : Bernard Poudevigne
Impact : Mwami Kabare, vous êtes le
coordonnateur interprovincial du FESNAG.
Sa 14ème édition s’achève, quelle est votre
première impression ?
Mwami : Ma première impression est un sentiment de grande satisfaction et de soulagement,
puisque nous avons pu, à Bukavu comme à
Goma, réunir des pays qui nous sont frontaliers.
Nous avons pu rassembler plusieurs communautés ethniques qui, dans le passé, n’acceptaient
pas de cohabiter pacifiquement. Donc pour moi
que ce soit à Bukavu ou à Goma, la 14ème édition
du FESNAG a été une belle réussite.
Cette question s’adresse également
à l’Honorable Faso coordonnateur du
FESNAG. Avez-vous une idée du nombre
de pays représentés, et de la fréquentation
du public ?
Mwami : À mon niveau, ce qui m’intéresse c’est
que dans la région des Grands Lacs, sur les cinq
grands pays invités, à savoir le Rwanda, le Burundi, l’Ouganda, la Tanzanie et le Kenya, quatre ont
répondu, la délégation du cinquième, la Tanzanie, ayant rencontré des problèmes logistiques.
Pour moi, au niveau de la sous région, je vous
parle en tant qu’originaire du Sud-Kivu, c’est déjà
une grande réussite que tous ces pays soient venus.
Un festival sous le signe
de la paix en RDC
Nous pensons que
cette page noire, que
nous avons traversée,
appartient désormais
au passé. Par son rôle,
la France va continuer à
nous appuyer et dire tout
haut ce que certains ne
disent pas.
La 14éme édition du FESNAG est particulière
à double titre : les manifestations ont
eu lieu dans deux provinces et, de plus,
dans une région qui a connu une grande
instabilité. Pourquoi ce double choix ?
Mwami : Vous savez mieux que quiconque que
nous avons les deux Kivu (nord et sud). Au niveau
de l’opinion internationale, nous avons toujours
été considérés comme des provinces où il y a des
tueries, des vols, des viols, des atrocités... Mais
aujourd’hui avec le FESNAG, nous avons donné
une nouvelle image de nous au monde. C’est-àdire que les Kivu sont en train de consolider la
paix, et qu’elles aspirent comme toutes les provinces de RDC, à être visitées. Nous pensons que
cette page noire que nous avons traversée, appartient désormais au passé. Nous voulons avec
force et conviction aller vers l’avenir et que ceux
qui peuvent nous accompagner le fassent en regardant le futur et non le passé.
Au-delà de sa dimension culturelle, cette
édition souhaitait encourager le dialogue
entre les pays de la région des Grands
Lacs. Est-ce que cela a été possible. Et
sous quelle forme ?
Mwami : Cela a été possible. Vous avez vu
se côtoyer différents groupes ethniques qui,
Combien des provinces de RDC auront été
représentées ?
Honorable Faso : Les onze provinces auront
été présentes. Nous avions 450 artistes qui ont
exprimé leurs sentiments sur la consolidation
et la protection de la paix. Nous avons pu témoigner par des chants et des danses notre refus de
la violence faite aux femmes.
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 15
POLITIQUE
hier, ne se fréquentaient pas. Vous avez vu des
pays qui, dans le passé, avaient été considérés
comme «non amis» envers la RDC, partager
leurs cultures. Je crois que ce sont des signes qui
laissent penser que la paix est en train de s’installer petit à petit en RDC, dans les régions dites
«à problèmes» comme les Nord et Sud-Kivu mais
aussi dans la région des Grands Lacs.
^
Anne Gizenga Mbuba
présidente du FESNAG
accompagnée de
l'Honorable Faso,
coordonnateur du
festival.
Vous avez invité l’ambassadeur de France,
qui a bien voulu se déplacer et honorer
votre invitation. Que signifie sa présence
pour l’organisateur du FESNAG ?
Mwami : Vous savez que la France est, dans le
concert des nations, un pays sur lequel il faut
compter. Le fait que l’ambassadeur ait accepté de
faire le déplacement aux Kivu, personnellement,
pour nous honorer et participer au FESNAG,
signifie que la France est attentive à l’évolution
de la question sécuritaire en RDC et plus particulièrement à l’Est. Le rôle que la France tient
au niveau de la communauté internationale est
important. Par son rôle, la France va continuer à
nous appuyer et dire tout haut ce que certains ne
^
L'ambassadeur
de France en RDC,
Luc Hallade
reçoit le tam-tam de
la paix des mains du
Mwami Kabare lors de la
cérémonie de clôture du
FESNAG.
Photos : Bernard Poudevigne
disent pas, et nous comptons sur cette présence
pour que l’ambassadeur présente au Président
de la République et au gouvernement français
notre demande d’accompagnement du processus dans lequel nous sommes engagés et qui sera
long. Ramener la paix n’a jamais été facile, c’est
un processus qui demande, en outre, plusieurs
symboles. Je crois que le FESNAG en est un. Il
faut le consolider et le renforcer par d’autres
symboles tout aussi forts.
16 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Avez-vous une date pour cet évènement ?
Honorable Faso : Cela se passera en juillet,
comme toujours.
Propos recueillis par Bernard Poudevigne
Est-ce que vous avez déjà une idée du lieu
où se tiendra la 15ème édition ?
Honorable Faso : Bien sûr. Gungu, le chef-lieu
du territoire du même nom, dans la province du
Bandundu, va accueillir cette prochaine édition.
C’est un scoop pour le magazine Impact !
Honorable Faso : Oui, Gungu est le berceau
du festival. Sauf sollicitation de dernière minute,
nous pensons effectivement organiser le festival
à Gungu, c’est un retour aux sources.
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 17
POLITIQUE
<
Discours d'inauguration
du nouveau bâtiment
de la Cour des comptes
financé par l'UE à
hauteur de 1,5 million
d'euros.
La gouvernance
ème
axe majeur du XI FED
L’Union européenne est le premier bailleur de fonds
en RDC. Jean-Michel Dumond, son ambassadeur à
Kinshasa, analyse les dernières élections européennes
et dévoile le contenu du XIème Fonds Européen de
Développement (FED).
Impact : Je vais commencer par les dernières élections européennes. Non pas
en tant qu’ambassadeur mais en tant que
citoyen européen, quelle analyse faitesvous de ces élections ?
Jean-Michel Dumond : Ces élections ont clairement montré qu’il y avait un malaise. Nous
pouvons constater qu’il y a une augmentation
importante du nombre de députés eurosceptiques. À titre personnel, je le regrette. Mais c’est
18 / Impact n°6 / Septembre 2014
un signal qu’il faut prendre en considération
pour l’avenir de la construction européenne.
Y-a-il trop d’Europe, comme le disent les
eurosceptiques ?
Non, je dirais au contraire qu’il n’y en a pas assez. Très concrètement, si l’on prend l’union
économique et monétaire, pourquoi y a-t-il des
problèmes ? Fondamentalement, c’est parce que
l’on a voulu construire une monnaie unique,
www.impact.cd
Mais que s’est-il passé par la suite ? Quel
a été notamment le sens de l'opposition
britannique au lendemain des élections ?
Et en définitive pourquoi l’Europe a-t-elle
frôlé une crise politique ?
Tout ceci est lié au Traité de Lisbonne. Ce traité stipule que le président de la Commission est
choisi par le Conseil européen, à la majorité qualifiée, en tenant compte des résultats des élections au Parlement européen. La formule n’est
pas parfaite. Cependant, les partis qui se sont
présentés aux élections européennes en ont tiré
la conclusion qu’il fallait présenter des « champions » européens. C’est ainsi que la plupart
des groupes se sont présentés devant les électeurs. Pour le Parti Populaire Européen c’était
Jean-Claude Juncker, pour le Parti Socialiste
Européen, Martin Schulz, pour les libéraux du
groupe ALDE (Alliance des Libéraux et Démocrates pour l’Europe), Guy Verhofstadt, pour la
gauche c’était le leader d’un parti grec, Alexis
Tsipras et pour le parti des verts Ska Keller.
À la suite de ces élections, le Parti Populaire Européen a obtenu le plus grand nombre d’élus. Il a
donc demandé que son candidat soit choisi par le
Conseil européen pour présider la Commission
européenne. C’est ce qui s’est passé. La règle de
l’unanimité, qui avait prévalu autrefois, ne pouvait plus s’appliquer dès lors qu'au sein du Conseil
européen, on appliquait la majorité qualifiée. De
toute façon, le candidat choisi doit être confirmé
par le Parlement européen. Il me semble que c’est
une bonne chose. Cela marque un progrès dans
la démocratie européenne et évite de conduire
à une situation de crise. Si le Conseil européen
s’était orienté vers une autre voie et que le parlement avait été dépossédé de son droit d'élire le
président de la commission, on se serait retrouvé face à une situation de crise supplémentaire,
inutile compte tenu de la situation politique et
financière dans laquelle se trouve l’Europe.
gion des Grands Lacs ;
- contribuer à une croissance qui bénéficie réellement à la population ;
- contribuer à l’enracinement de la démocratie et
des droits de l’Homme en RDC.
On croit souvent qu’il y a des intérêts cachés de
l’UE en RDC alors que la réalité est tout autre.
D’abord si l’on regarde les relations économiques,
on s’aperçoit que la République démocratique du
Congo pèse très peu. La RDC ne représente que
0,1% des importations de l’Union européenne et
0,3% de ses exportations. C’est réellement très
modeste. Deuxièmement, nous sommes accusés de tirer des profits des industries minières
en RDC. Or la réalité c’est qu’il n’y a pas une
seule grande entreprise minière importante de
l'Union européenne implantée dans ce pays.
Quelles sont les priorités du prochain
Fonds européen de développement en
République démocratique du Congo ?
Le FED représente environ 60% de l’assistance
que l’UE prodigue à la RDC. La principale caractéristique du FED c’est d’être un instrument de
partenariat entre l’Union européenne et la RDC,
puisque ce sont les autorités politiques congolaises qui définissent les grandes orientations et
que sa gestion est assurée par le ministre délégué
aux Finances qui porte le titre d’Ordonnateur
national. Il intervient à travers un organisme qui
s'appelle la COFED. Ce n’est pas quelque chose
qui est décidé unilatéralement à Bruxelles, mais
la décision est prise en commun et à l’instigation
première des autorités congolaises. L’axe majeur fixé par le gouvernement et en particulier
par le Premier Ministre dans son discours d’investiture devant le parlement de la RDC, c’est la
gouvernance. Ce pays dispose de richesses absolument extraordinaires. Evidemment l’on pense
Photo : Presse présidentielle
Photo : Cyprien Banyanga
sans pour autant construire une politique économique, budgétaire et fiscale commune. Donc
si l'on veut poursuivre sur la voie de l’union économique et monétaire, il faut plus d’Europe, ou
plutôt mieux d’Europe.
Comment définir la politique de l’Europe
en République démocratique du Congo ?
La ligne politique de l’Europe vis-à-vis de la République démocratique du Congo est extrêmement claire. Elle est fondée sur trois axes :
- contribuer à la stabilité et à la paix dans la réwww.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 19
POLITIQUE
1) Le premier volet concerne ce que l’on peut
appeler l'appareil d’Etat. Il y a tout d’abord la
défense, il s’agira pour l'essentiel de continuer
l’action entreprise par la mission EUSEC, notamment le renforcement des ressources humaines,
l'amélioration de la chaîne de la dépense budgétaire et la construction d'infrastructures. Ensuite, la police, parce qu’assurer l’ordre et la sécurité dans un cadre républicain qui respecte les
droits des populations est évidemment fondamental. Là aussi il faudra continuer ce qui a été
Jean-Michel Dumond
en compagnie du
ministre des Transports
au port de Kinshasa lors
du lancement du Projet
d'appui à la navigabilité
des voies fluviales et
lacustres en RDC
2) Le deuxième volet porte sur la santé. Notre
approche ne consiste pas à soigner mais à
construire un système avec une offre de prestations de soins que les gens prennent l’habitude
de rémunérer. A partir d’expériences réussies
dans trois provinces, Kasaï, Kivu, Province
Orientale, nous souhaitons bâtir un système de
santé de qualité et viable financièrement. Je crois
que les résultats enregistrés au cours des années
passées sont très concluants, et l’expérience sera
donc poursuivie. Nous couvrons à peu près 4 500
000 habitants de la République démocratique du
Congo.
3) Le troisième volet traite les questions de l’environnement et de l’agriculture dans une perspective d’aide au développement durable. L’environnement pour une raison évidente : la RDC
abrite le deuxième poumon vert de la planète.
Si les conséquences du changement climatique
ne sont pas encore directement perceptibles en
20 / Impact n°6 / Septembre 2014
RDC, celui-ci commence tout de même à se manifester. Au-delà des changements climatiques,
ce qui est important c’est de montrer qu’un développement durable est possible tout en préservant l’environnement. Il n’y a pas de contradiction entre environnement et développement.
Sur l'enveloppe qui va être consacrée à ce volet,
environ un tiers ira directement à la protection
des aires protégées et deux tiers iront au développement des zones périphériques, notamment
en ce qui concerne l’agriculture durable, l’agroforesterie et les énergies renouvelables. Il faut,
en effet, montrer aux populations concernées, à
travers des opérations exemplaires, que l’on peut
vivre en bordure d’un parc naturel tout en profitant du développement.
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4) Le quatrième volet financera les infrastructures. Il est nécessaire de poursuivre la construction de la route nationale numéro 1 (RN1). On
vise la réhabilitation de 150 km supplémentaires
sur un tronçon de 400 km qui ira jusqu'à Kananga dans les années à venir.
Jean-Michel Dumond
procède avec les
ministres des
Infrastructures,
de l'Agriculture, de
l'Enseignement et
du gouverneur de
Bandundu, au lancement
des travaux de la RN1,
tronçon BatshambaPont Loange.
Photo : Kinanga Musatchi
Pourquoi cette situation paradoxale ?
Et quelle réponse y apporter ?
Apparemment, je dis bien apparemment car
cette situation n'est paradoxale qu'en apparence, c’est essentiellement pour des raisons de
mauvaise gouvernance. Tous nos programmes,
quels qu’ils soient, ont pour objectif d’aider le
gouvernement de la République démocratique
du Congo à améliorer la gouvernance. Notre réponse s’organise à travers quatre programmes
principaux; l’un est directement axé sur la bonne
gouvernance et les trois autres intègrent des aspects de gouvernance dans chacun des secteurs.
commencé par la mission EUPOL en matière de
ressources humaines, de chaîne de la dépense...
et ce qui est extrêmement important : la formation. Nous allons contribuer à construire une
académie de police sur le terrain attribué par le
gouvernement congolais, à la sortie de Kinshasa,
à Kimpoko. Elle formera les futures générations
d’inspecteurs de police. C’est extrêmement
important, parce que c’est à travers cet instrument que le gouvernement pourra poursuivre
la réforme engagée et disposer, à terme, d’une
police républicaine, respectueuse des droits des
citoyens. Il suffit de se promener sur le boulevard
du 30 Juin pour constater que ce n’est pas encore
le cas. Enfin, le volet justice, car une justice impartiale pour tous les Congolais est un élément
essentiel du contrat social. Si les citoyens n’ont
pas confiance en leur justice, ils n’auront pas
confiance dans les institutions et ce sera le règne
du contrat privé, de la justice privée et évidemment, cela entrainera la déliquescence de la société. Là aussi ce sont les mêmes appuis que l’on
retrouve, c’est-à-dire, la chaine de la dépense, les
ressources humaines et la formation.
Le dernier thème traitera des finances. En particulier, il s’agira d’accompagner la loi qui va
donner aux ministres la possibilité de décider de
leur budget. Cela se fera à travers le renforcement
des capacités des ministères pour maîtriser la
dépense publique, gérer la chaine de la dépense
avec, en parallèle, un système de comptabilité et
de vérification par les corps de contrôle.
Photos : Cyprien Banyanga
aux mines. Mais ses richesses vont bien au-delà,
en particulier les terres agricoles sont immenses
et largement inexploitées, une immense forêt
également mal exploitée, des ressources en eau
considérables, une terre fertile, et enfin une population entreprenante, plutôt bien éduquée,
si l’on considère le taux d’alphabétisation, qui
est de l’ordre de 62%, soit plus élevé que dans
d’autres pays d’A frique. Or, ce pays se trouve au
dernier rang de l’indice du développement humain (IDH)…
Quelle est la logique profonde
de ce projet ?
Je dirais qu’elle est double. La première est qu’en
regardant la carte de la RDC, on voit des pôles
démographiques ou économiques qui sont en
marge du pays, comme par exemple la zone
Kinshasa/Matadi, la région cuprifère du Katanga. Il faut désormais, dès lors que l’autorité
de l’Etat est rétablie sur l’ensemble du territoire
de la République, traduire physiquement l’unité
de ce pays. Deuxièmement, cette route a une logique parce qu’elle est conçue suivant une vision
des transports multimodaux. Ce que nous prévoyons, c’est une grande boucle entre l’Ouest et
l’Est. D’un côté nous avons un port (Matadi) avec
la route menant jusqu'à Kinshasa, de là, on emprunte le fleuve jusqu'à Kisangani (1 634 km).
À cet égard, le programme d’amélioration de
navigabilité du fleuve durera encore plusieurs
années – puis, on reprendra la route nationale
numéro 3 (RN3) qui mène jusqu'à Goma. Nous
avons déjà effectué sur certaines portions des
travaux avec d’autres partenaires (Banque mondiale). Puis au Sud, la RN1 qui progresse vers
l'Est, croisant à Kananga, le chemin de fer qui
ira à Ilebo lorsqu’il sera définitivement réhabilité
par la Banque mondiale. Nous arrivons au Kasaï
grâce à l'aménagement du fleuve. Vers le sud,
vous retrouvez à nouveau le chemin de fer qui ira
jusqu’au Katanga. Ainsi, l’ensemble des principales zones seront reliées. À terme, le projet RN1
se poursuivra en direction des grands lacs. Je dois
dire que le gouvernement congolais a beaucoup
insisté, et qu’il nous a fallu, nous aussi, beaucoup
insister auprès de la Commission à Bruxelles
pour obtenir ce quatrième volet. Aujourd’hui,
l'UE a eu une certaine réticence à financer des
infrastructures sous forme de dons. Elle préfère
le partenariat public/privé. C’est sans aucun
doute une excellente idée, mais peut-être pas encore envisageable en République démocratique
du Congo avant quelques années.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 21
Photo : Presse présidentielle
POLITIQUE
Dans quel climat dialoguez-vous avec le
gouvernement et les autres partenaires
congolais ?
Je trouve pour ma part que les relations sont excellentes. Nous avons un dialogue nourri, dans
tous les domaines. Nous avons choisi les quatre
secteurs de concentration avec le gouvernement
congolais car c’est lui qui fixe les orientations,
voire les réorientations de programmes lorsque
c’est nécessaire. Je vais vous donner un exemple
tout simple. Nous avons passé plus de quatre
heures avec le ministre des Transports et l’ensemble des intervenants congolais pour étudier
les moyens d’améliorer la navigabilité du fleuve
Congo. Ce fleuve est extrêmement complexe et
un peu capricieux. La pose de balises dans ce
contexte n’est pas simple. Il nous fallait adapter
le projet et nous sommes finalement arrivés à la
conclusion que le système de balisage fixe devait
être réservé aux passages les plus périlleux, les
autres bénéficiant d'une technologie plus moderne. L’idée retenue a été de procéder à la cartographie précise du Congo, y compris en profondeur. Cela revenait à imposer aux armateurs de
se procurer des GPS et de créer un centre de traitement des données. La réussite du projet repose
sur le respect d'un arsenal règlementaire important. Il reviendra à la République démocratique
du Congo de l’appliquer.
^
Par rapport à la réalisation des objectifs
que vous venez de décrire, comment se
comportent les différents Etats membres
de l’Union européenne, également actifs
sur le plan bilatéral ?
On a un dialogue très actif. Il y a aujourd’hui,
selon moi, une bien meilleure contribution des
Aujourd’hui, il y a une certaine réticence à financer
des infrastructures sous forme de dons. Il y a une
certaine préférence pour le partenariat public/
privé. C’est sans aucun doute une excellente idée,
mais peut-être pas encore envisageable en RDC.
22 / Impact n°6 / Septembre 2014
L'ambassadeur
de l'Union européenne
présente ses lettres de
créance au Président
Joseph Kabila.
ambassades bilatérales des Etats membres à la
discussion à Bruxelles, par rapport à ce que j’ai
pu constater voilà encore quelques années. Nous
avons, que ce soit dans le cadre des réunions de
chefs de mission, dans le cadre des réunions de
chefs de coopération ou dans des groupes thématiques, diffusé les différentes ébauches du
projet du XIème FED à chacune des étapes. Les
pays membres ont pu apporter leurs contributions de manière particulièrement utile. Dans
le débat que nous avons eu sur la question des
infrastructures, la contribution bilatérale de la
Belgique fut véritablement importante. L’ambassade et le ministre belge de la Coopération
ont en effet plaidé pour maintenir, encore pour
quelques années, un volet «Infrastructures»
en RDC. La Belgique l’a fait pour articuler l’intervention du FED avec ses propres projets de
construction d’axes routiers ruraux dans le
cadre du développement durable qu’elle finance.
Nous avons là, un bon exemple de complémentarité entre ce que font les Etats membres et ce que
fait l’Union européenne. Je voudrais terminer en
soulignant que ces discussions se font vraiment
dans un excellent état d'esprit.
Propos recueillis par Philippe Larrieu
www.impact.cd
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 23
POLITIQUE
Une ministre française
aux cérémonies du 30 juin
pour accueillir la promotion
Emery Patrice Lumumba
Un moment attendu
Le Premier Ministre
Matata Ponyo inaugure
la nouvelle ENA en
présence de la ministre
française de la Fonction
publique et de son
homologue congolais.
Photo : Freddie Eale/Primature
n ne pouvait imaginer de symbole plus fort que la présence de
la ministre française aux côtés
du Premier Ministre de RDC à l’occasion de ce
double événement. Un échange à la fois ouvert et
très franc a précédé la cérémonie d’ouverture de
la nouvelle ENA congolaise. Impact a pu interroger Marylise Lebranchu sur la coopération entre
la France et la RDC ainsi que sur ses premières
impressions d’un pays qu’elle découvre et qui
déjà la passionne.
24 / Impact n°6 / Septembre 2014
Impact : Marylise Lebranchu, vous
dirigez un ministère important au sein
du gouvernement Valls. Quelles sont les
raisons de votre présence en RDC ?
Marylise Lebranchu : J’avais rencontré à Paris
le ministre de la Fonction publique, M. Kibala.
L’entretien, très chaleureux, a débouché sur une
proposition d’accord portant sur la formation
des fonctionnaires en RDC. Je lui ai expliqué à
quel point mon rôle est difficile mais passionnant, parce que moi-même je travaille sur l’action publique en France.
La première action concrète qui résulte de mon
entretien avec M. Kibala est l’accord entre l’ENA
France et l’ENA RDC nouvellement inaugurée.
Ma présence a été pour moi l’occasion d’assister
aux cérémonies du 30 juin et ce, à double titre.
Premièrement, en tant que représentante d’un
pays européen, pour saluer officiellement l’indépendance d’un pays jeune. Deuxièmement,
pour témoigner de notre propre histoire. En effet, nous avons eu à reconstruire une administration après la deuxième guerre mondiale, nous
nous sommes à l’époque, appuyés sur la fonction
publique de l’Etat en créant l’ENA puis, à partir
des années 1980, en lançant la réforme de la décentralisation et de la déconcentration.
L’inauguration de l’ENA RDC en présence du
Premier ministre était l’occasion de rappeler les
www.impact.cd
Photo : P. Vedrune/Cabinet Lebranchu
O
Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique
et de la Décentralisation témoigne par sa présence de
l’importance que la France accorde à la formation des
hauts fonctionnaires de RDC.
principes fondamentaux de la République Française : impartialité, loyauté, dignité, laïcité. Pour
cela, il est nécessaire de bien former les fonctionnaires. Pour autant, le développement d’un
pays provient de sa cohésion et de son action publique et non pas seulement du soutien apporté
à son administration, voire à ses écoles ou ses
infrastructures. Nous devons vraiment échanger
sur ces thèmes parce que nous sommes confrontés à une crise économique durable. Le ralentissement de la dépense publique nous impose de
trouver un équilibre entre l’action publique et
l’encadrement de la fonction publique.
depuis 1982, cette même France a su penser la
décentralisation en délégant de nombreuses
compétences aux collectivités territoriales notamment en matière de développement économique.
La France peut apporter deux choses. Premièrement, la coopération entre Etats, lorsqu’elle s’appuie sur une action publique de qualité comme
ici à travers l’ENA, INET, IRA, permet aux citoyens d’en bénéficier pleinement.
Deuxièmement, l’aide que peut apporter la
France consiste aussi à faire en sorte que d’autres
ne commettent par nos propres erreurs.
La tradition jacobine de la France et
donc de l’ENA France est-elle conciliable
avec le soutien qu’elle peut apporter à la
décentralisation prévue par la constitution
de la République démocratique du Congo ?
La France jacobine a créé, en effet, un Etat déconcentré reposant sur les Préfets. Mais enfin,
L’inauguration de l’ENA RDC en présence du
Premier Ministre était l’occasion de rappeler
les principes fondamentaux de la République
Française : impartialité, loyauté, dignité, laïcité.
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 25
POLITIQUE
Vous avez été reçue en audience par
le Premier ministre, avez-vous parlé
uniquement de coopération ?
Nous avons parlé de toutes sortes de coopérations, y compris du secteur privé, qui concourent,
elles aussi, au développement de ce pays.
J’ai bien entendu le Premier Ministre, parlant au
nom du Président de la République, nous dire
qu’ici, la relation de confiance passe à travers le
dialogue entre Etats, quand bien même les dossiers porteraient sur des cas particuliers.
Nous avons aussi parlé de coopération culturelle,
où nous avons sans doute beaucoup à proposer.
Plus les crises économiques sont fortes, plus les
conséquences sont graves pour le développement du secteur culturel. Il faut à tout prix le
préserver. Nous avons, en outre, évoqué la région
des Grands Lacs. Ayant moi-même eu l’occasion,
il y a trois ans, de présider une délégation du Parlement français se rendant au Rwanda, c’est un
sujet qui me tient à cœur. Nous avons parlé de la
nécessité pour cette région d’avoir une organisation plus stable qu’elle ne peut l’être aujourd’hui.
À partir de projets privés, nous pouvons partici26 / Impact n°6 / Septembre 2014
per à un développement plus rapide et viable de
la République démocratique du Congo.
Quelques entreprises, nous le savons ici,
ont des difficultés. En avez-vous parlé
avec le Premier Ministre ?
Oui, le Premier Ministre a été très clair à ce sujet.
Il est nécessaire, quand des entreprises ou des
groupes ont des projets et répondent à des appels d’offres, que les représentants de la France
n’oublient pas de prendre contact avec leurs homologues en RDC pour identifier les soucis que
pourraient rencontrer les groupes français.
L’Etat est extrêmement important dans le dialogue avec les groupes concernés.
Revenons à la France si vous le voulez
bien. Comment voyez-vous l’avenir de
la réforme territoriale, quel est l’avenir
de l’administration, des institutions, des
circonscriptions, ou des départements ?
Je pense que dans une société qui n’a plus de
repères, il ne faut pas enlever ceux qui fonctionnent. Nous allons, par exemple, renforcer
l’intercommunalité, pour garder le repère « communal ». Il faut ensuite expliquer que la qualité
de l’action publique dépend du niveau auquel
elle s’exerce. Le principe de subsidiarité est un
principe qui a beaucoup de sens pour l’action
La qualité de l’action publique dépend du
niveau auquel elle s’exerce. Le principe de
subsidiarité est un principe qui a beaucoup de
sens pour l’action publique décentralisée...
www.impact.cd
Photos : Freddie Eale/Primature
La France s’est peut-être trompée, à la fin du
XXème siècles, en choisissant une économie de
services et en se positionnant dans le partage international du travail, sur une économie fondée
sur la connaissance et la recherche, écartant de
ce fait le secteur industriel. La complexité de ces
choix reflète les difficultés auxquelles nous devons faire face au regard de l’équilibre de l’action
publique, avec les grandes stratégies de développement industriel ou des services. Sur tous ces
sujets, nous avons certainement une expérience
à faire partager.
publique décentralisée. Qu’est-ce qui peut être
bien fait au niveau local ? Qu’est-ce qui peut être
mieux fait au niveau départemental, régional ou
Etatique ?
Il faut se poser la question de savoir s’il faut garder ou pas les départements. En réalité, la question ne porte pas sur l’avenir des assemblées
départementales, mais plutôt sur le rôle des départements en matière de redistribution de la solidarité nationale. Car, si vous changez le lieu où
se décide la solidarité, vous changez forcément
l’origine de la ressource.
L’autre réflexion que nous devons mener porte
sur la solidarité entre les territoires.
Avec la loi de modernisation de l’action publique
territoriale et d’affirmation des métropoles
promulguée le 27 janvier dernier, on a créé les
métropoles. Sans pour autant souscrire aux métropoles de type «stratégie de Lisbonne», (c’està-dire une boîte dans laquelle se trouverait une
population avec des moyens comme le CHU,
universités, tous en concurrence les uns contre
les autres). Non, nous avons eu une autre vision:
les métropoles sont responsables de tous les
autres territoires.
D’autre part les régions ont un rôle important,
en tant que coordonnatrices des politiques publiques. C’est pourquoi dans la même loi qui crée
les métropoles nous avons inclus la conférence
territoriale de l’action publique. Cette loi oblige
les exécutifs à se concerter sur l’exercice des
compétences de chacun en fonction du territoire
dans lequel ils se trouvent. C’est à dire que l’Etat,
jacobin comme vous disiez, a reconnu la diversité des territoires de France.
Dans cette diversité nous ne voulons pas oublier
qu’il existe des territoires essentiellement ruraux ou de montagne et donc généralement, loin
d’une métropole.
Il va, de fait, falloir se doter d’une position spécifique pour ces territoires-là, car ils sont tout de
même à la fois facteur de vie (donc ayant besoin
de cohésion sociale) mais aussi facteur de développement économique (donc facteur de production). Comment faire pour que ces territoires
bénéficient de la solidarité ?
Il y a deux réponses possibles : l’une étant la solidarité nationale, c’est la péréquation organisée
au niveau national, non pas par l’exécutif mais
par le parlement qui prélève sur les ressources de
chacun pour redistribuer à ceux qui n’ont pas de
ressources. C’est une «péréquation horizontale».
Par ailleurs, l’Etat doit proposer au parlement de
discuter une « péréquation verticale », c’est-àwww.impact.cd
Plus les crises économiques sont fortes,
plus les conséquences sont graves pour le
développement du secteur culturel.
dire qui recalcule les dotations de l’Etat aux collectivités et cela en fonction de facteurs tels que
la diversité démographique ou la protection des
mètres carrés agricoles par exemple.
Pour finir, Madame la ministre, que
voulez-vous dire aux Français que vous
avez rencontrés en RDC ?
Je tiens d’abord à leur dire qu’ils sont toujours
des citoyens français, même en RDC, et qu’ils représentent toujours leur pays. J’aimerais leur dire
qu’ils sont les ambassadeurs de la République
Française . Il faut leur dire que l’Etat est là, pour
leur venir en aide, s’ils en ont besoin, que ce soit
pour développer des entreprises ou pour accompagner l’action publique, mais tout en gardant à
l’esprit ce que veut l’Etat congolais.
Au fond, les Français de l’étranger peuvent nous
aider en se rassemblant, en se concertant dans
une cohérence d’action. Ils peuvent nous aider à
ce qu’il y ait dans les pays étrangers, en Europe
particulièrement, une tour de contrôle qui soit
l’ambassade.
Il faut œuvrer ensemble pour le progrès. En
sachant comment on échange, comment l’on
se sert des ambassades pour améliorer, pour
construire d’avantage. Il y a une double responsabilité, une responsabilité individuelle mais
aussi une responsabilité collective.
Propos recueillis par Philippe Larrieu
Impact n°6 / Septembre 2014 / 27
ÉCONOMIE
<
Pose de la première pierre
Le Premier Ministre Matata Ponyo a d'abord lancé
le chantier de l'extension du lycée français René
Descartes de Kinshasa
<<
Photo : Gédéon Mukendi
Inauguration de haut rang...
Ensuite, le Premier Ministre a inauguré la première
Semaine française en présence de l'ambassadeur de
France en RDC et de nombreuses personnalités tant
politiques qu'économiques.
Le monde des médias était également bien representé
Première Semaine française de Kinshasa
> Dans les jardins de l’Institut français, aménagés pour la circonstance comme un véritable salon international, les stands des exposants, plus
d’une vingtaine, étaient ouverts de 9h00 à 19h00
tandis que les bus de Transco (RATP International), le camion-citerne de SEP Congo et les véhicules de tourisme de CFAO étaient présentés sur
le parking de l’Institut.
Preuve du succès d’une telle entreprise : près de
10.000 visiteurs ont fréquenté le site de la Halle
de la Gombe du 26 au 31 mai.
Les raisons d’un succès
out a commencé par la pose de
la première pierre de l’extension
du lycée français René Descartes
par un Chef du Gouvernement gé-
néreux de son temps. Nous sommes le lundi 26
mai 2014 à 16h30 et le Premier Ministre Matata
Ponyo Mapon va passer plus de trois heures à la
Halle de la Gombe pour présider aux cérémonies
d’ouverture de la première Semaine française de
Kinshasa. Initiée par la Chambre de commerce
et d’industrie franco-congolaise (CCIFC) avec
le soutien déterminant des services de l’ambassade de France en République démocratique du
Congo, cette importante manifestation présente
plusieurs caractéristiques qui en font à bien des
égards un événement exceptionnel.
Photos : Martin van der Belen
T
En mai dernier, Kinshasa a été le théâtre d'un
événement qui a constitué un temps fort dans
les relations franco-congolaises. Retour sur
cette entreprise originale et réussie.
Une forte implication de tous les acteurs
français en RDC
Le succès de la première Semaine française de
Kinshasa tient aussi à l’engagement résolu de
plusieurs acteurs incontournables :
> Les personnels de l’Institut français : chargés
à la fois du soutien logistique de l’opération et
de la gestion de la « composante culturelle » du
programme, ils ont rempli leur contrat au-delà
de toute espérance.
> Les agents du service de coopération et du
service économique de l’ambassade de France
ainsi que ceux de l’Agence Française de Dévelop-
pement : leur dialogue constant avec les responsables de la CCIFC a permis de mener à bien une
opération compliquée en termes de logistique et
ambitieuse s’agissant des thèmes et objectifs retenus pour les ateliers thématiques (ressources
naturelles, mines, énergie, médias, commerce et
distribution, culture, communication et publicité, responsabilité sociétale des entreprises…).
> La section RDC des Conseillers du Commerce
Extérieur de la France (CCEF) : impliquée très en
amont dans la préparation de l’événement, elle
a notamment contribué, par l’élaboration d’un
dossier « RDC, Terre d’opportunités », à la mobilisation des entreprises et des investisseurs.
> Le Club français des affaires (CFA).
Un programme dense et bien géré
> Chaque journée, du 27 au 30 mai 2014, a été
bâtie autour de deux demi-journées consacrées
à des thématiques sectorielles et d’une soirée
culturelle (avec une alternance de théâtre, de
cinéma, de musique classique et de musique populaire).
> Le programme a fait l’objet d’un numéro spécial de notre revue Impact France-RDC, très
apprécié par les différentes entreprises participantes.
28 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 29
ÉCONOMIE
pourtant vastes, qui leur avaient été réservés et
qu’elles ont parfois été au-delà les horaires convenus (jusqu’au double).
> Les associations de Français : installées dans
un stand commun, elles ont toutes participé à
l’opération (ADFE, UFE, Kinshasa Accueil, Association des parents d’élèves du lycée René Descartes).
Orange Updates
Médiatisation et communication exceptionnelles, mobilisation des opérateurs économiques
français (Air France, Total, Orange, Bureau
Veritas…), rapprochement des communautés
institutionnelles congolaises et françaises des
affaires… On l’aura compris, la première Semaine française de Kinshasa a révélé son utilité
en même temps qu’elle a permis de conforter les
bases d’un partenariat économique fécond entre
deux pays amis qui ont de nombreux atouts à
mettre en commun.
+
découvre toujours
plus d'applis avec Orange
1 an de communication offerte
Philippe Larrieu
Photos : Martin van der Belen
Une mobilisation très appréciée du
gouvernement congolais
Indépendamment de la présence du Premier
Ministre lors des cérémonies d’ouverture, on a
pu remarquer jusqu’à trois ministres par conférence sectorielle.
Rien d’étonnant à ce que les débats mettant en
contact les opérateurs français et les institutionnels congolais et français aient débouché sur
des constats précis assortis, le plus souvent, de
conclusions opérationnelles.
On ajoutera, car cela n’allait pas de soi, que les
conférences ont souvent dépassé, en termes de
fréquentation, les capacités d’accueil des locaux,
Une médiatisation sans précédent
La présence, pendant tout ou partie de la semaine française, de la Présidente de France Médias Monde et des patrons et grands journalistes
de TV5 Monde, France 24 et RFI a permis une
communication exceptionnelle à la fois sur la
RDC mais aussi sur ce que la France et la RDC
peuvent entreprendre en commun.
30 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 31
ÉCONOMIE
a atteint le point d’achèvement de l’Initiative en
faveur des Pays Pauvres Très Endettés (I-PPTE),
au lendemain de la célébration du cinquantenaire de son indépendance. Dans ce contexte,
des efforts très importants restent à déployer
en vue de consolider les acquis en matière de réformes et de minimiser le risque de renouer avec
un cycle d’endettement pouvant compromettre
la réalisation d’une croissance forte et la lutte
contre la pauvreté, dans un environnement où
les recettes extérieures connaissent une forte
volatilité.
Photo : Bikeriderlondon
L’objectif du C2D
Pour ce faire, ces efforts doivent générer une mobilisation accrue des recettes internes, objet du
pilier 2 du Plan Stratégique de Réforme des Finances Publiques, dont s’est doté le ministère des
Finances qui comprend, dans ses actions prioritaires, l’informatisation de la chaîne des recettes
fiscales et non fiscales.
C’est dans ce cadre que l’Agence Française de
Développement, le Service de Coopération et
d’Action Culturelle de l’ambassade de France et
le ministère des Finances de la RDC, ont initié
avec détermination, l’axe « gouvernance financière » du C2D France-RDC.
Il a ainsi été décidé, conjointement avec les autorités congolaises, de retenir parmi les priorités
sectorielles du C2D le secteur de la gouvernance
financière, pour une enveloppe de dix millions
d'euros pour la période allant du 01/07/2013 au
31/12/2016, avec l’objectif de soutenir une réforme globale des finances publiques. Comme
précédemment évoqué, trois grands champs
d’assistance technique institutionnelle ont été
identifiés :
- l’informatisation de la chaîne des recettes (direction générale des impôts, direction générale
des douanes et accises, direction des recettes
administratives et domaniales) ;
Un schéma directeur pour les finances publiques
Les régies financières et les banques
doivent communiquer à travers un
même langage informatique
L’urgence de la situation nécessite la mobilisation d’importants
moyens financiers pour moderniser le fonctionnement
de la chaîne de recettes. Le contrat de désendettementdéveloppement (C2D) prévoit une enveloppe de dix millions
d’euros pour appuyer cet ambitieux projet. Tout passe
préalablement par la conception d’un schéma directeur précis.
L
32 / Impact n°6 / Septembre 2014
e gouvernement de RDC poursuit
depuis 2001 ses efforts de redressement de l’économie à travers
la mise en œuvre de politiques et
de réformes économiques coura-
geuses. Elles ont déjà permis, au-delà des progrès
enregistrés dans la réconciliation nationale et le
rétablissement de la paix, de stabiliser l’économie et de promouvoir la croissance. Grâce à une
rigueur accrue dans l’assainissement de la gestion des finances publiques et l’amélioration de
l’environnement politico-institutionnel, la RDC
www.impact.cd
www.impact.cd
- le soutien au déploiement du nouveau cadre organique relatif aux lois de finances ;
- l’appui à la création de l’ENA-RDC.
Afin de mettre en œuvre les politiques de développement et de réduction de la pauvreté, il est
impératif que l’Etat congolais mobilise davantage de ressources. Pour cela, l’Etat doit :
- disposer d’un système d’information permettant de mieux centraliser les données recueillies
par les régies financières en prévoyant une liaison avec la future Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique (DGT/CP),
les banques agréées pour le recouvrement des
impôts, la Banque Centrale du Congo (BCC) en
charge de la garde des fonds du Trésor public et
le cabinet du ministre des Finances et organiser
un dialogue entre ces régies ;
- rationaliser la collecte des recettes ;
- se doter de structures de contrôle interne efficaces ;
- mettre en place une meilleure formation des
agents des administrations financières.
L’informatisation de la chaîne de la recette
Sous l’impulsion du Premier Ministre Matata
Ponyo Mapon, le gouvernement de RDC a engagé des réformes majeures visant à accroître la
mobilisation des recettes fiscales (introduction
de la TVA en 2012, nouveau code des douanes
en 2010) et d’autres sont en préparation (fiscalité
directe sur les sociétés et les personnes ; réduction des taxes parafiscales). Cette mobilisation
accrue des recettes fiscales doit également passer par la simplification et la codification de la
règlementation. Les procédures de collecte et
de contrôles doivent être revues et sécurisées, les
échanges d’informations renforcées. Plusieurs
chantiers apparaissent : informatisation plus
cohérente, organisation comptable, gestion des
ressources humaines.
En République démocratique du Congo, les systèmes informatiques utilisés par les régies financières sont très hétérogènes, la DGI et la DGDA
s'étant dotées d’applications informatiques autonomes qui, même si elles communiquent entre
elles, ne permettent pas l’échange de données
avec d’autres structures administratives ou le
secteur bancaire comme l’exigerait une informatisation des finances publiques moderne. Quant
à la DGRAD, son informatisation commence
à peine, ce qui pèse sur son fonctionnement au
jour le jour et sur sa capacité à faciliter la réconciliation de ses recettes avec les transactions enregistrées sur les comptes du Trésor et permet
Impact n°6 / Septembre 2014 / 33
Photo : Sergey Nivens
ÉCONOMIE
difficilement un échange électronique d’informations avec les autres régies financières.
La mise en place d’un système informatique
commun aux trois régies permettrait de résoudre les difficultés d’échange d’informations
entre elles. Toutefois, cette option ne peut se
concevoir qu'à plus long terme. De plus, la diversité des métiers ne le permet pas toujours. Aussi
conviendrait-il de définir une base minimale
permettant l’interconnexion et l’exploitation de
fichiers partagés. Il est donc urgent de mettre
en place des protocoles informatiques organisés
autour d’un fichier exhaustif des contribuables
dont la constitution serait facilitée par l’instauration du numéro d’identification fiscale unique
et le partage de données avec d’autres systèmes
(secteur bancaire, comptabilité de l’Etat et des
provinces, etc.).
Il est aussi apparu indispensable de moderniser
la liaison entre les régies de recettes et le système
bancaire, qui est chargé de la perception des impôts et taxes. Une telle évolution présenterait,
en effet, de nombreux avantages, notamment
une information rapide et mieux sécurisée sur
les paiements effectués par les redevables et un
rapprochement automatique avec les données
déclaratives ou les éléments de taxation retenus
par le service.
Pourquoi mettre en place un schéma
directeur des systèmes d'information au
niveau des régies financières du ministère
des Finances ?
La conduite du projet sera assurée par un comité
exécutif, multi institutionnel et interministériel
qui bénéficiera de l’appui technique de la Direc34 / Impact n°6 / Septembre 2014
tion Générale des Finances Publiques française.
Il va de soi que l’évaluation des infrastructures
existantes constituera la première étape ; la seconde étape, cruciale, correspondra à l’élaboration du schéma directeur des régies financières,
autrement dit, l’ossature de la chaîne de la recette
de l’Etat. La définition d’un schéma directeur des
systèmes d’information s’avère essentielle car
chaque ministère prépare et met en œuvre la politique du gouvernement dans son domaine, en
agissant dans un environnement institutionnel
qui requiert de disposer de systèmes d'information fiables, efficients et sécurisés.
Le ministère des Finances doit donc se doter
d'un schéma directeur des systèmes d'information au niveau national définissant les orientations et la stratégie à mettre en œuvre en matière
de développement des systèmes d'information
sectoriels. Le volet «informatisation des régies
financières» du C2D a été validé au conseil d’administration de l’A FD en juillet dernier. Le ministre délégué aux Finances, Patrick Kitebi et
l’ambassadeur de France Luc Hallade ont entériné ce projet lors du comité d’orientation stratégique du C2D qui s’est tenu le 30 juillet dernier.
Le plus difficile reste à faire mais quel défi !
Albert Kabeya
Le ministère des Finances doit donc se doter d'un
schéma directeur des systèmes d'information
au niveau national définissant les orientations
et la stratégie à mettre en œuvre en matière de
développement des systèmes d'information sectoriels.
www.impact.cd
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 35
ÉCONOMIE
<
Le Centre Hospitalier Mère-Enfant Monkole
inauguré le 2 juin 2014, en présence
du ministre de la Santé de RDC et des
ambassadeurs de France et d’Espagne.
en juin 2010, à consacrer 100 millions d’euros par
an jusqu’à 2015, pour la mise en œuvre de programmes de santé maternelle et infantile dans
dix huit pays prioritaires, dont la RDC. L’Agence
Française de Développement (AFD) a été chargée de la mise en œuvre de ce programme en
RDC depuis 2011, avec un financement de huit
millions d’euros. C’est dans le cadre de ce programme que l’A FD a financé le Centre Hospitalier Monkole (CHM).
Le CHM est une structure intégrée dans le système de santé congolais, qui offre des soins accessibles aux plus démunis, dans une zone périphérique pauvre de Kinshasa, mal desservie en
services de santé.
Le CHM est reconnu comme une structure de
qualité. Il est l’une des « initiatives » de l’association sans but lucratif de droit congolais CECFOR
(Centre Congolais de Culture, de Formation et
de Développement), créée en 1986. Les activités du CHM ont débuté en 1991 avec un service
ambulatoire et trois lits d’observation. Un service d’hospitalisation, un centre de traitement
ambulatoire et un centre chirurgical ont par la
suite été ouverts, ainsi que trois antennes médico-sociales dans des quartiers périphériques de
l’hôpital.
L’Hôpital Monkole
Établissement de référence
soutenu par la France pour
moderniser les systèmes
de soins en RDC
36 / Impact n°6 / Septembre 2014
La France s’est engagée lors du sommet du G8 de
Muskoka en juin 2010, à consacrer 100 millions
d’euros par an jusqu’à 2015 pour la mise en
œuvre de programmes de santé maternelle et
infantile dans 18 pays prioritaires, dont la RDC.
www.impact.cd
Photos : AFD-Patricia Willocq
L
a détérioration du niveau de vie,
la destruction des infrastructures
et l’insécurité liées aux années
de conflits, ont contribué à l’aggravation générale de la santé des
Congolais. L’espérance de vie est de 49 ans et les
taux de mortalité infantiles (20% des naissances
vivantes) et maternelles (670 pour 100 000 naissances) sont parmi les plus élevés au monde,
d’après l’OMS. Kinshasa regroupe une population de plus de dix millions d’habitants, dont
plus de 50% a moins de quinze ans. Les affections
les plus courantes (paludisme, fièvre typhoïde,
infections respiratoires aigües, diarrhée) sont
nettement aggravées par les conditions de promiscuité et d’insalubrité de la ville. La France
s’est engagée, lors du sommet du G8 de Muskoka
Depuis 2001, le CHM est intégré au système de
santé national à travers une convention de partenariat signée avec le ministère de la Santé, qui le
reconnaît comme «Hôpital Général de Référence
(HGR) de la Zone de Santé Mont-Ngafula II», qui
rassemble près de 130.000 habitants, majoritairement pauvres, en périphérie de Kinshasa.
Le CHM reçoit aussi les populations de zones
de santé voisines, dont les besoins sont très importants mais qui disposent de centres de santé
peu accessibles, dépourvus d’équipements et de
personnels qualifiés tandis que leur HGR est en
mauvais état ou inexistant. Le CHM couvre ainsi
près de 660.000 habitants.
Un système de tarification différenciée selon les
ressources des patients permet d’assurer une
certaine équité dans l’accès aux soins proposés
par le CHM : plus des deux tiers des patients sont
www.impact.cd
^
Premiers soins
naissance de jumeaux,
centre hospitalier MèreEnfant Monkole
Mère et son enfant
au centre de soins
Moluka, centre
hospitalier Mère-Enfant
Monkole
des pauvres ou indigents qui ne payent que 25% à
50% des tarifs de base, déjà en-dessous des tarifs
pratiqués ailleurs. En parallèle, le CHM a passé
des conventions médicales avec des entreprises,
ambassades, ONG, qui lui permettent de dégager des ressources régulières à des tarifs plus
élevés. Ces conventions compensent, en partie,
la sous-tarification pour les patients pauvres et
indigents, ainsi que les factures impayées !
Le CHM s’est développé grâce à des subventions
importantes de bailleurs et d’ONG. Cependant,
ces appuis étaient en grande majorité affectés à
des projets précis et à son renforcement général.
Conscient de cette limite, la direction du CHM
souhaitait s’affranchir de sa dépendance aux
subventions en développant des ressources pérennes. En particulier, l’hôpital cherchait à augmenter le nombre des conventions médicales et à
étendre une offre de soins de qualité pour attirer
une population plus aisée, à laquelle des tarifs
plus élevés seraient appliqués. Ce modèle écono-
Impact n°6 / Septembre 2014 / 37
ÉCONOMIE
Photo : AFD-Patricia Willocq
Une agence
mique permet aussi d’assurer la prise en charge
des plus pauvres.
L'activité du CHM est en croissance continue
depuis sa création avec le développement de
nouveaux services et l’augmentation des prises
en charge. La capacité d’accueil a néanmoins été
vite saturée au regard de la demande de soins
importante et croissante de la zone de santé couverte par le CHM et des zones voisines : le taux
d’occupation de l’hôpital (114% en 2008 et 134%
en pédiatrie en 2010) contraste avec celui des
hôpitaux publics et la durée moyenne de séjour
a été réduite au maximum.
En conséquence, le CECFOR a entrepris la
construction d’un nouvel établissement : le
Centre Hospitalier Mère-Enfant (CHME), dont
les travaux se sont achevés fin 2013 sur un terrain adjacent à celui de l’hôpital. L’enjeu était
d’étendre les capacités d’accueil (de 55 à 158 lits)
mais aussi d’élever le niveau de soins et de développer une nouvelle offre (néonatalogie, imagerie médicale, salles d’opérations bien équipées,
etc.), susceptible d’attirer une clientèle plus solvable qui recourt actuellement à des structures
privées lucratives ou qui se fait soigner à l’étranger. Le personnel nécessaire à la prise en charge
des nouveaux patients est recruté au fur et à mesure de l’ouverture des services (430 agents médicaux et paramédicaux à horizon 2017, contre
263 en 2011).
Le besoin de financement pour la construction
du CHME s’élevait à 19,5 millions d'euros. La
contribution de la France s’élève à cinq millions
d’euros, à cela s’ajoute des avances de trésorerie
consenties par la «Banco Popular España» et des
38 / Impact n°6 / Septembre 2014
dons privés.
L’A FD a, en particulier, financé la réalisation des
installations techniques par Schneider Electric
France. Elle a également contribué à des actions
de renforcement de capacités du personnel du
CHME par la mise à disposition d’expertises
techniques et l’organisation d’ateliers de formations (gestion hospitalière, modèle économique
et politique tarifaire, appui comptable, projet
d’établissement, maintenance, système d’information, hygiène, etc.).
Le CHME a été inauguré le 2 juin 2014, en présence du ministre de la Santé de la RDC et des
ambassadeurs de France et d’Espagne.
Au-delà du financement de l’extension de l’hôpital Monkole, de son équipement et de la formation de son personnel médical, l’appui de l’A FD
à la définition d’un modèle de gestion alliant
qualité des soins et accès au plus grand nombre,
contribuera à faire de Monkole un établissement
de référence dans le cadre de la nécessaire réforme hospitalière en cours en RDC.
Jean-Christophe Maurin, directeur de l’AFD en RDC
Le besoin de financement pour la construction du
Centre Hospitalier Mère-Enfant s’élevait à 19,5
millions d’euros. La contribution de la France
s’élève à cinq millions d’euros, à cela s’ajoute des
avances de trésorerie consenties par la Banco
Popular España et des dons privés.
www.impact.cd
ouverte
sur le monde
Établissement public, l’Agence Française de Développement (AFD)
agit depuis soixante-dix ans pour combattre la pauvreté et favoriser le
développement dans les pays du Sud et dans les Outre-mer. Elle met en
œuvre la politique définie par le Gouvernement français.
Présente sur quatre continents où elle dispose d’un réseau de 70 agences
et bureaux de représentation dans le monde, dont 9 dans les Outre-mer et
1 à Bruxelles, l’AFD finance et accompagne des projets qui améliorent les
conditions de vie des populations, soutiennent la croissance économique
et protègent la planète : scolarisation, santé maternelle, appui aux
agriculteurs et aux petites entreprises, adduction d’eau, préservation de
la forêt tropicale, lutte contre le réchauffement climatique…
En 2012, l’AFD a consacré près de 7 milliards d’euros au financement
d’actions dans les pays en développement et en faveur des Outre-mer.
Ils contribueront notamment à la scolarisation de 10 millions d’enfants
au niveau primaire et de 3 millions au niveau collège, et à l’amélioration
de l’approvisionnement en eau potable pour 1,79 million de personnes.
Les projets d’efficacité énergétique sur la même année permettront
d’économiser près de 3,6 millions de tonnes d’équivalent CO 2 par an.
www.afd.fr
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 39
ÉCONOMIE
La Banque Africaine de Développement
fête ses 50 ans !
Un tel jubilé justifiait qu’Impact rencontrât Valentin Zongo, son
Représentant Résident en RDC. Economiste de formation, titulaire
d’un MBA obtenu à l’université de Pittsburgh (Pennsylvanie),
Valentin Zongo est un spécialiste du développement, compétence
qu’il a acquise en plus de trente années d’activités, sur le terrain
comme à l’état-major de la BAD. Il livre à Impact sa vision d’un
partenariat au développement aussi utile qu’efficace.
Photo : Martin van der Belen
Impact : Vous avez pris vos fonctions
à Kinshasa en juillet 2012. Pourriezvous nous dire quel a été votre parcours
professionnel avant de représenter la BAD
en République démocratique du Congo ?
Valentin Zongo : Je tiens tout d’abord à vous
remercier pour cette opportunité de m’adresser
à votre lectorat, lectorat que je tiens à saluer chaleureusement. S’agissant de mon parcours, j’ai
été successivement responsable du financement
et du développement du « secteur énergie » pour
l’A frique du nord, l’A frique de l’ouest et l’A frique
centrale puis chef de division de ce même secteur pour l’ensemble des opérations couvertes
par la Banque Africaine de Développement. Au
préalable, j’avais exercé les fonctions de conseiller en infrastructures ; j’ai aussi été l’un des collaborateurs du vice-président de la Banque, chargé
des finances.
Compte tenu de votre longue expérience, à
la fois de terrain mais aussi du siège de la
BAD, quels sont les principaux succès que
vous mettriez à l’actif de cette institution
qui fête ses 50 ans d’existence cette
année?
Je retiendrais deux sujets essentiels.
- Le premier est d’ordre institutionnel. Vous savez
que la Banque a été fondée en septembre 1964. À
l’époque, elle ne comptait que 26 Etats membres,
son capital ne dépassant pas les 250 millions de
dollars. Il s’agissait essentiellement de la réunion
d’un groupe de pays africains animés par l’idée
de fédérer les financements nécessaires au dé40 / Impact n°6 / Septembre 2014
veloppement économique. Aujourd’hui, cette
institution accueille l’ensemble des 54 pays du
continent, auxquels sont venus s’ajouter 26 Etats
non africains. Quant au capital de la Banque, il
est aujourd’hui de 103 milliards de dollars. J’ajouterai qu’au-delà de cette forte croissance, la BAD
est parvenue à maintenir le « triple A » octroyé
par l’ensemble des agences de notation, conséquence à la fois de ses performances et de ses
capacités d’adaptation, notamment en termes
d’outils d’intervention pour contribuer au développement du continent.
- Second sujet, d’ordre technique celui-là : l’approche de la Banque en matière de financement
du développement. Nous sommes partis avec
très peu de moyens ; aujourd’hui nous sommes
en mesure d’offrir des instruments très diversifiés répondant à l’ensemble des besoins y compris ceux relatifs au développement du secteur
privé. Les fonds publics concourant au développement étant loin de suffire, il faut en effet
impliquer le secteur privé dans tout processus
de décollage puis de stabilisation économique à
l’échelle d’une nation.
Pourriez-vous nous donner un exemple
d’appui au secteur privé ?
Prenons l’exemple de la RDC. Ce pays dispose
d’un potentiel inégalé sur le continent, quel que
soit le secteur productif. Pour contribuer à sa
mise en valeur, notre stratégie-pays, qui décline
l’intervention de la Banque sur la période 20132017, a un fil conducteur : celui consistant à
conforter « l’appétit » du privé dans les secteurs
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^
Financement de la
réhabilitation des
turbines du barrage
d’Inga
La Banque africaine
de développement a
engagé jusqu’à ce jour
près de 710 millions
de dollars américains
pour onze opérations
dans plusieurs secteurs
en RDC. Parmi ces
secteurs, il y a l’énergie,
un domaine clé pour le
développement de RDC.
productifs de l’économie de la RDC.
La méthode : nous mettons l’accent sur les infrastructures, car avec des infrastructures routières, aéroportuaires, énergétiques, d’adduction
d’eau et d’assainissement, nous donnons au
secteur privé les moyens de s’épanouir. Parallèlement, nous participons à toute action pertinente
liée à l’amélioration du climat des affaires.
Plus généralement, quels sont les objectifs
de la BAD en RDC ?
Nous travaillons sur une logique de concentration géographique et sectorielle, dans les deux
Les fonds publics concourant au
développement étant loin de suffire, il faut
en effet impliquer le secteur privé dans tout
processus de décollage puis de stabilisation
économique à l’échelle d’une nation.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 41
Kasaï et au nord du Katanga, ce choix résultant
d’une concertation avec les autres partenaires
techniques et financiers (PTF) de la RDC. Dans
ces régions, nous avons tenu compte des leçons
tirées de nos opérations antérieures, ce qui nous
a conduits à concentrer nos interventions en
appui à des réhabilitations d’infrastructures au
niveau routier, en matière de transport aérien,
et enfin en ce qui concerne l’adduction d’eau et
l’assainissement. Ce sont des opérations « intégrées », en ce sens que lorsque nous intervenons
pour réhabiliter une route, par exemple la RN1,
nous mettons aussi en œuvre des programmes
de création d’infrastructures rurales connexes,
telles que des centres de santé, des écoles et des
marchés ruraux. Une telle approche permet à la
population, non seulement de pouvoir échanger
« intra et extra » des biens et services, mais aussi
de bénéficier de solutions contribuant à l’amélioration de sa qualité de vie.
D’un côté le social, de l’autre le
développement ?
Précisément. Car les deux aspects sont indissociablement liés. Nous estimons que notre
approche commence à produire des effets qui
sont remarqués. Pas plus tard que la semaine
dernière, lors de discussions avec les autorités
congolaises du secteur des transports, il a été
envisagé que notre « modèle » soit élargi à l’ensemble du territoire, en liaison avec les autres
42 / Impact n°6 / Septembre 2014
Vous avez parlé d’une stratégie 20132017. Si vous parvenez à la mener à bonne
fin, quel aura été l’apport de la BAD sur
cette période ?
Nous avons commencé ce quinquennat par un
«sans faute», puisque les cinq opérations prévues
pour 2013 ont été réalisées ; pour ce qui est de
2014, nous avons engagé trois programmes, dont
un a été approuvé tandis que les deux autres
sont en cours de finalisation. Si tout se déroule
comme prévu, nous pourrons apporter à la République démocratique du Congo un peu plus de
950 millions de dollars sur la période 2013-2017.
La BAD à l'assaut
des services d’eau et
d’assainissement
Le conseil
d’administration de la
Banque africaine de
développement appuie
le projet de fourniture de
services durables d’eau
et d’assainissement de
la municipalité d’Ezulwini
au Swaziland.
Quand vous parlez de projets approuvés,
vous sous-entendez qu’ils résultent d’un
dialogue avec les autorités congolaises.
Comment pourriez-vous caractériser ce
dialogue ?
Je voudrais, pour vous répondre, remonter à la
fin de l’année 2012, époque à laquelle nous étions
parvenus à un accord avec l’ensemble des parties
prenantes : gouvernement, secteur privé, société
civile, autres partenaires au développement. Cet
accord visait à « aligner » l’appui de la BAD sur
les priorités essentielles du gouvernement et c’est
sur cette base que nous avons ultérieurement décliné l’ensemble de nos opérations. Or cette démarche n’a pas rencontré de sérieuses difficultés
pour deux raisons :
Vous faites donc partie de ceux qui sont
plutôt optimistes quant à l’évolution de la
coordination entre les différents bailleurs
et quant à leur dialogue avec les autorités
congolaises ?
Oui. C’est d’ailleurs un sujet essentiel dès lors que
le gouvernement affiche une vision cohérente.
Nous devons venir en appui à cette vision du développement de la RDC, ce qui suppose des complémentarités et des synergies entre PTF. C’est
d’ailleurs ce que nous recherchons au travers des
Groupes Thématiques Sectoriels (GTS) dans le
cadre desquels nous discutons sur beaucoup de
sujets. Je pense que nous sommes sur la bonne
voie. La BAD est d’ailleurs chef de file du GTS
« Infrastructures et statistiques », groupe qui
fonctionne de mieux en mieux. Il y a davantage
Conférence économique
Afrique-France
Le Président François
Hollande avec Donald
Kaberuka, président de
la BAD.
de contacts, de réflexions… Reste à renforcer les
capacités analytiques au niveau, non seulement
du gouvernement, mais aussi des bailleurs de
fonds pour améliorer nos analyses de prospective économique. Car après la phase de réhabilitation des infrastructures dans laquelle nous
nous trouvons actuellement, il faudra penser à
dégager une vision claire de l’ensemble des questions d’aménagement du territoire.
À travers ces groupes thématiques et grâce aux
appuis que nous allons mobiliser, cette vision
structurante de l’avenir de ce beau pays pourra
être mise en œuvre.
Propos recueillis par Philippe Larrieu
Photo : francediplomatie
partenaires techniques et financiers impliqués
dans ces secteurs.
- la Banque et ses instruments étaient bien
connus des autorités comme du secteur privé et
de la société civile ;
- la conception, l’articulation et la mise en œuvre
de nos opérations allaient de pair avec un dialogue, une approche participative avec l’ensemble des parties prenantes.
Mais au-delà de la concertation avec nos partenaires congolais, nous menons aussi des opérations en liaison avec l’Union européenne, la
Banque mondiale, et bien sûr les bailleurs «bilatéraux» (britanniques, français, etc.). Intéressant
et utile, ce type de coopération ne pose aucun
problème particulier.
Photo : Dominique-Henri Simon
Photo : Reporter 24
ÉCONOMIE
Au-delà de la concertation avec nos
partenaires congolais, nous menons aussi des
opérations en liaison avec l’Union européenne,
la Banque mondiale, et bien sûr les bailleurs
«bilatéraux» (britanniques, français, etc.).
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 43
Photo : BRGM
ÉCONOMIE
Le BRGM
Un service géologique national
Le Bureau de Recherches Géologiques et Minières est l'établissement public
français de référence dans les applications des sciences de la terre pour gérer
les ressources naturelles et les risques du sol et du sous-sol.
Le BRGM vise deux objectifs majeurs :
Il cherche à comprendre les phénomènes géologiques et les risques associés, développer des
méthodologies et des techniques nouvelles, produire et diffuser des données de qualité. Et il vise
aussi à développer et mettre à disposition les outils nécessaires à la gestion du sol, du sous-sol et
des ressources, à la prévention des risques naturels et des pollutions, aux politiques de réponse
au changement climatique.
Ses missions se concentrent sur cinq axes :
Recherche scientifique
La recherche scientifique a pour objectif la
44 / Impact n°6 / Septembre 2014
connaissance géologique et la compréhension
des phénomènes liés au sol et au sous-sol. Avec
un enjeu majeur : répondre aux défis des changements globaux.
Appui aux politiques publiques
Cette mission regroupe l’ensemble des actions
d’expertise, de surveillance et d’étude menées en
soutien des politiques publiques.
Coopération internationale
Avec plus de 200 projets chaque année dans plus
de 40 pays, le BRGM apporte son savoir-faire et
son expertise selon plusieurs axes d’intervention:
- La contribution à la politique de coopération
française ;
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- L’appui et la participation aux actions de l’UE,
de la Banque mondiale et des autres organismes
multilatéraux ;
- Le soutien aux politiques des États ;
- Les prestations aux entreprises ;
- La participation aux travaux des instances
scientifiques internationales.
Sécurité minière
Le BRGM assure la gestion des conditions de
sécurité et d'environnement liées à la déprise
minière. En France, l’État a confié au BRGM la
surveillance et les actions de prévention des pollutions et des risques des anciens sites miniers.
Le BRGM est maître d’ouvrage délégué pour les
travaux de mise en sécurité.
Formation
Le BRGM assure la diffusion de ses compétences
scientifiques et techniques par des actions de
formation :
- formation supérieure diplômante de niveau
master de l’Ecole Nationale d’Applications des
Géosciences (ENAG) en partenariat avec l’université d’Orléans ;
- formation professionnelle continue dans tous
les domaines des géosciences, avec BRGM Formation.
Ses domaines d’activité
Autour de la géologie, son cœur de métier, le
BRGM développe une expertise dans le secteur
de la gestion des ressources, de la maîtrise des
risques et des écotechnologies innovantes.
Il met en œuvre ses compétences dans dix grands
domaines d'activités destinées à répondre aux
différents enjeux industriels et sociétaux : la géologie, les ressources minérales, la géothermie, le
stockage géologie du CO2, l'eau, l'après-mine, les
risques naturels, les sols pollués et déchets, les
laboratoires et l’expérimentation, les systèmes
d'information.
Des atouts pour son activité en Afrique
• Une présence continue en Afrique
• Une excellente réputation technique et un riche
patrimoine documentaire
• Des compétences techniques et une multidisciplinarité reconnues : 80 spécialités dans tous les
domaines
• Une capacité à gérer des opérations « clé en
main » dans des environnements variés
• Une bonne connaissance des acteurs institutionnels et un réseau important (bailleurs de
fonds et partenaires techniques)
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Contact
Christian Braux
Direction commerciale
et de la Coopération
Internationale
Directeur Adjoint –
Directeur Afrique Centrale
[email protected]
www.brgm.fr
Une connaissance importante de la RDC
Cinquante années d’activités en pointillés sur le
territoire avec des prospections dans le Katanga,
le Shaba, le Nord-Kivu, la province de l’Équateur,
de nombreux travaux de cartographie géologique, la découverte du gisement de Dikulushi
(développé par ANVIL Mining), ….
De cette époque, il reste au BRGM un fonds documentaire soigneusement conservé : des références de rapports d’études qui font régulièrement l’objet de demandes de consultation par
des opérateurs miniers privés.
Des projets importants à venir avec notamment
l’assistance au ministère des Mines pour l’organisation d’un Service Géologique National.
Informations recueillies par Valéry Alves
Le BRGM : un établissement public français à
caractère industriel et commercial
Créé en 1959, il est placé sous une triple tutelle ministérielle.
Certifié ISO 9001 (Qualité) depuis 2004, ISO 14001 (Environnement)
depuis 2012. Ses laboratoires sont accrédités par le COFRAC. Le BRGM est
l'un des instituts Carnot.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 45
DOSSIER
reste limité et son utilisation figure parmi les
plus faibles d’A frique sub-saharienne.
Toutefois, la dernière enquête «démographie et
santé», qui porte sur la période 2010-2013, témoigne d'une amélioration des indicateurs de
santé des enfants. En effet, les taux de mortalité
infantile (décès au cours de la première année de
vie) et infanto-juvénile (décès dans période 0 à
5 ans), tout en restant élevés, respectivement 58
et 104 pour mille, confirment une décroissance
accentuée, puisque les précédents (période
2007-2010) étaient de 92 et 148 pour mille. Cette
baisse, qu’il faut saluer, s'explique par plusieurs
facteurs :
1) l’utilisation des moustiquaires imprégnées a
augmenté dans la période (56% des enfants de
moins de 5 ans dormaient sous moustiquaires au
moment de l’enquête contre 6 % lors de la précédente) ;
2) la distribution généralisée de vitamine A, qui
aide les enfants à lutter contre les maladies ;
3) l’amélioration des conditions de vie avec la stabilité sécuritaire accrue ;
4) la croissance économique ;
5) la meilleure instruction des jeunes mères ;
6) l’impact de la téléphonie mobile qui peut réduire le temps de prise en charge, surtout en milieu urbain.
Il est probable que la même tendance se retrouve
aussi en matière de mortalité maternelle. Le
chiffre est de 549 décès de la mère pour 100.000
naissances vivantes. Les nouvelles données ne
sont pas encore disponibles.
Cette enquête montre la stabilité des autres indicateurs. En particulier, le nombre d’enfants
par femmes reste de six. La transition démographique n’est pas encore en cours. Cela va placer
la République démocratique du Congo dans une
situation difficile dans les prochaines décennies,
puisque le nombre d’enfants à soigner, à éduquer,
puis à employer, va augmenter.
La vaccination des enfants se développe nettement, mais les taux de couverture demeurent
bas avec 45% des enfants complètement vaccinés
(contre 42 % auparavant). 6% des enfants n’ont
La santé, un autre défi à relever
La RDC sur tous les
fronts de la maladie
De nombreux acteurs
appuient le gouvernement
de RDC qui connait ses
premiers succès. La priorité
est donnée à la lutte contre
la mortalité infantile.
L'immensité du pays nécéssite
une réponse adaptée à la
répartition géographique
des centres de soins et à
l'accès aux médicaments.
La gouvernance, comme
toujours, se révèle le meilleur
remède.
46 / Impact n°6 / Septembre 2014
Photos : AFD-Patricia Willocq
Une situation sanitaire fragile
Du fait de sa taille, de sa position géographique
et de son climat, la RDC fait face à de nombreux
défis sanitaires. Toutes les maladies infectieuses
tropicales y sont présentes. En premier lieu on
citera le paludisme naturellement, mais aussi la
tuberculose, la maladie du sommeil ou encore
la lèpre. Toutes ces pathologies peuvent toucher
des populations enclavées, comme cela a été le
cas pour Ebola. À cela s’ajoute une transition épidémiologique avec des maladies non transmissibles comme le diabète, l'hypertension, l'obésité, les cancers, qui gagnent du terrain, en raison
de l’urbanisation croissante et du changement
de mode de vie. Comme les autres pays africains,
la République démocratique du Congo a payé un
lourd tribu à l’épidémie de Sida.
Dans un pays où la pauvreté touche plus de 70%
de la population, l’accès aux services de santé
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La vaccination des enfants connait une embellie,
mais les taux de couverture demeurent bas avec
45% des enfants complètement vaccinés (contre
42 % auparavant) et encore 6% des enfants qui
n’ont reçu aucun vaccin (10% avant).
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reçu aucun vaccin contre 10% auparavant.
Cela s’explique par un fort taux de déperdition. Il
est de 25% entre la première et la troisième dose
de vaccin. Les mamans qui viennent pour la première fois ne sont pas motivées pour poursuivre
le protocole jusqu'à son terme.
La même enquête a confirmé que la prévalence
du sida était de 1,2 %. Toutefois, avec un peu plus
de 50.000 patients sous traitement antirétroviral, moins de 50 % des besoins sont couverts.
Un système de santé encore trop faible
Alors que le système de santé était relativement
performant de 1980 à 1990, les années de guerre,
puis l’absence d’investissements (moins de 5%
du budget de l’Etat, majoritairement consacrés
au paiement des salaires) ont fragilisé les centres
de soins primaires comme les infrastructures
hospitalières. Non seulement les effectifs sont
trop faibles (109.000 agents dont 40% d'administratifs), mais la qualification du personnel reste
encore insuffisante. Les ressources humaines se
concentrent, de plus, essentiellement dans les
zones urbaines. Les perspectives de formation
Impact n°6 / Septembre 2014 / 47
DOSSIER
sont faibles, 4.800 étudiants en médecine, alors
que 10% des effectifs doivent bientôt partir en retraite. La modicité des salaires (50 USD de salaire
mensuel plus 150 USD de prime) est un facteur
de désaffection au profit du secteur privé, voire
de la fuite vers l’étranger.
Le secteur du médicament est aussi en difficulté,
avec une production locale très inégale en qualité. Les importations de médicaments génériques
sont freinées. La distribution par le réseau public
est insuffisante.
48 / Impact n°6 / Septembre 2014
C
onformément aux priorités identifiées par les deux pays et
aux divers engagements français, notamment en faveur de
la santé maternelle et infantile (G8 de Muskoka) la France
soutient la République démocratique du Congo à travers :
> Le projet AFD d’appui à la santé Mère-Enfant à Kinshasa, porté
par le ministère de la Santé publique. Il vise à répondre au double
défi de réduction de la mortalité maternelle et infantile et de
couverture des dépenses de santé des ménages les plus pauvres.
Il prévoit d’améliorer les capacités du ministère de la Santé pour
encadrer le système hospitalier, d’accompagner le renforcement des
compétences en gestion des hôpitaux, d’améliorer l’offre de soins de
la Clinique Ngaliema et du Centre Hospitalier Monkolé, deux hôpitaux
qui assurent une mission de service public et sont reconnus pour
leur qualité aussi bien en tant que prestataires de soins spécialisés
(malformations cardiaques, urologiques, maxillo-faciales) qu’en tant
que lieux privilégiés de formation des étudiants en médecine et
en soins paramédicaux. Enfin de faciliter l’accès aux soins des plus
démunis.
> Deux initiatives récentes du ministère des Affaires étrangères :
l’une liée à l’Initiative Muskoka qui appuie le bureau de l’OMS en RDC
pour la formation du personnel de la santé reproductive, pour la
quantification des besoins liés à cette activité et pour la mobilisation
communautaire (470.000 euros par an) ; l’autre est liée au Fonds
mondial contre le Sida, la tuberculose et le paludisme où dans le
cadre de l’Initiative 5%. Dans ce contexte, plusieurs projets devraient
permettre de proposer au ministère de la Santé des stratégies
d’amélioration de la prise en charge des trois maladies.
> De grandes initiatives multilatérales qui concernent toute la
RDC : Fonds mondial contre le Sida, la Tuberculose et le paludisme,
UNITAID, GAVI. Considérant le prorata des contributions françaises,
cela représente un appui financier, en moyenne annuelle, de près de
7 millions d’euros par an.
ressources étant encore insuffisantes, la qualité
et la rigueur de la gestion doivent tirer le meilleur profit des moyens déjà disponibles et ceci
s’applique particulièrement au secteur hospitalier ; la répartition des ressources humaines doit
être améliorée tout en répondant aux nombreux
départs en retraite attendus. La qualité des
nouveaux agents sanitaires sera déterminante,
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Photos : AFD-Patricia Willocq
Des perspectives optimistes d’évolution
La santé demeure l’un des cinq chantiers prioritaires du gouvernement qui a finalisé en 2010
une stratégie de développement de ce secteur,
laquelle figure d'ailleurs comme un indicateur
dans le processus de remise de la dette.
La stratégie nationale de santé pour 2011-2015
fixe trois axes :
- le développement des zones de santé, accompagné du développement des ressources humaines,
de l’appui au secteur du médicament, de la réforme du financement de la santé, de la construction ou de la réhabilitation des infrastructures
sanitaires et de l’amélioration de l’information
sanitaire ;
- le renforcement du leadership et de la gouvernance du secteur ;
- le renforcement de la collaboration intersectorielle.
Le coût estimé de mise en œuvre de cette stratégie est de 9,75 milliards de dollars sur cinq ans.
La mesure la plus emblématique est en cours de
réalisation et concerne la fourniture d’équipements pour remettre à niveau deux cents hôpitaux généraux de référence et mille centres de
santé dans les onze provinces du pays.
Les principaux bailleurs interviennent dans le
secteur de la santé : le système des Nations Unies
et les grands fonds mondiaux (Fonds mondial
contre le Sida , la Tuberculose et le paludisme,
Alliance GAVI pour la vaccination, UNITAID),
mais aussi la Banque mondiale, l’Union européenne, la Belgique, DFID (Grande-Bretagne),
USAID, le Canada, l’A llemagne et le Japon développent des projets ambitieux, mais toutefois
insuffisants, puisqu’il faudrait 14 USD par habitant et par an pour mettre en place un système
de santé vraiment performant.
En conclusion, le système de santé de RDC est en
profonde mutation car ses moyens vont considérablement augmenter, mais il devra faire face à
trois défis et non des moindres ; tout d’abord les
L’appui de la France
la prise en compte de leurs attentes financières
doit être reconsiderée. Enfin, le secteur pharmaceutique, qui ne répond pas aux exigences de disponibilité et de qualité que les populations en attendent, doit être réorganisé. Ces problèmes ne
sont sans doute pas les seuls, mais leur résolution
rapide devrait faciliter l’obtention de nouvelles
ressources qui contribueraient à une amélioration durable, et perceptible par tous, des conditions de santé des populations de RDC.
> La présence d’autres partenaires français sur des thématiques
spécifiques : spécialités pédiatriques (Hôpital Robert Debré), prise
en charge des drépanocytaires (Fondation Pierre Fabre et IECD),
soins de santé mentale aux femmes victimes de violences sexuelles
dans l’Est de la RDC (CHU Toulouse et Médecins du Monde), hygiène
hospitalière (IECD), réduction des risques VIH et enfants des rues à
Kinshasa (Médecins du Monde), appui à la nutrition par la production
locale de tablettes protéinées Nutriset (Comité français de l’Unicef),
appui au réseau des formations sanitaires et à la prise en charge du
VIH (Médecins du Monde, Croix Rouge française, Médecins d’Afrique).
Dr. Jean-Pierre Lamarque
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 49
L
L’Unicef
s’engage pour réduire
la mortalité des enfants
et des mères en RDC
a santé des enfants en RDC est particulièrement préoccupante car chaque
année 465.000 enfants meurent avant
leur cinquième anniversaire, trop souvent de causes facilement évitables
telles que les diarrhées, les pneumonies et le
paludisme. La malnutrition atteint encore des
niveaux très élevés puisque six millions d'enfants
de moins de deux ans souffrent de malnutrition
chronique et près de 4 millions d’enfants âgés de
6 à 59 mois souffrent de malnutrition aiguë autant dans sa forme sévère que modérée.
Ces enfants malnutris ont entre 4 et 9 fois plus de
risques de mourir que des enfants correctement
alimentés.
Photo : Julien Harneis
L'Unicef RDC, en partenariat avec de nombreux autres
acteurs, promeut les droits et le bien-être de chaque enfant,
en déployant des efforts particuliers pour les enfants les
plus vulnérables et les plus marginalisés, et accompagne le
gouvernement congolais dans l'accélération des progrès vers
les Objectifs du Millénaire pour le Développement.
50 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
Initiative « Promesse renouvelée » sauver
430.000 vies d’enfants de 0 à 5 ans et
7.900 vies de mères d’ici fin 2015
Face à l’urgence de la situation, le gouvernement
de RDC a pris en 2012 un engagement historique:
accélérer les progrès vers les Objectifs du Millénaire, afin de sauver 430 000 vies d’enfants de 0 à
5 ans et 7 900 vies de mères d’ici fin 2015.
Cet engagement consiste en des actions concertées qui visent à :
- accroître la couverture et la qualité de la prise
en charge des maladies tueuses d’enfants ;
- développer les consultations prénatales afin de
réduire le taux de faible poids de naissance et la
prématurité et de prévenir le tétanos néo-natal
et maternel ainsi que la transmission mère-enfant du sida ;
- augmenter le nombre des accouchements assistés dans les structures sanitaires en vue de
réduire la mortalité maternelle et néonatales ;
- enfin encourager les vaccinations de routine
tout en introduisant de nouveaux vaccins pour
réduire la mortalité infanto-juvénile.
Les illustrations de cette volonté politique nationale forte de donner un accès à des soins de
qualité pour tous les enfants et leurs mamans,
même ceux des zones les plus reculées du pays,
sont multiples.
Pour la première fois depuis de nombreuses années, le gouvernement a mobilisé un budget pour
l’investissement en santé qu’il a confié à l’Unicef.
Le Projet d’équipement des structures sanitaires (PESS) va couvrir les besoins en matériels
médico-sanitaires de 200 hôpitaux généraux de
référence et 1.000 centres de santé dans les 11
provinces du pays en trois phases d'ici à mi-2015.
À ce stade, plus de 50% du projet est déjà réalisé
grâce à la centrale d’achat de l’Unicef à Copenwww.impact.cd
Photo : Unicef
DOSSIER
La mission du Fonds
des Nations Unies pour
l’Enfance (UNICEF)
est d’aider les enfants à
survivre et à s'épanouir,
de la petite enfance à
l'adolescence. Présent
en RDC depuis 1963,
l’Unicef dispose à
l'heure actuelle de 14
bureaux dans les onze
provinces du pays
et travaille sur sept
«thèmes prioritaires»
pour faire respecter
les droits de l’enfant:
éducation, santé,
nutrition, protection,
eau et assainissement,
urgences et
participation.
hague.
L’adhésion en 2013 de la RDC au mouvement global Scaling Up Nutrition (SUN) offre également
une formidable opportunité de faire reculer la
malnutrition en facilitant la coordination des
partenaires et en mobilisant des ressources pour
des actions à grande échelle. Une politique nationale multisectorielle de lutte contre les diverses
formes de malnutrition au sein des groupes vulnérables a été adoptée en septembre 2013. C’est
un grand pas réalisé pour réduire l’incidence des
diverses formes de malnutrition au cours des
premiers 1.000 jours de la vie d’un enfant.
Le gouvernement a aussi adopté deux stratégies
importantes que l’Unicef soutient avec les autres
partenaires :
Des interventions de masse à haut impact
avec effet immédiat sur la mortalité des
femmes et des enfants
Grâce à ces interventions aucun nouveau cas de
poliomyélite n'a été enregistré depuis fin 2011. De
plus, le nombre d'enfants insuffisamment ou non
vaccinés est passé de 23% à 13%, le vaccin contre
la pneumonie (PCV-13) est maintenant délivré
dans tout le pays.
11,2 millions d’enfants âgés de 6 mois à
10 ans vaccinés contre la rougeole
Ces enfants ont bénéficié de campagnes de vaccination contre la rougeole dans quatre provinces
particulièrement affectées en 2013, contribuant
à rompre le cycle des épidémies.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 51
Chaque année, 11 à 13 millions d'enfants de
moins de cinq ans ont reçu des compléments
en vitamine A et ont été déparasités
systématiquement au Mebendazole à deux
reprises. Depuis 2011, plus de 200.000
enfants de moins de cinq ans affectés par
la malnutrition aigüe sévère bénéficient
d'une prise en charge adéquate. Un Système
National de Surveillance Nutritionnel et
d'Alerte Précoce (SNSAP) pour détection
précoce des crises nutritionnelles et réponse
rapide est effectif et il a progressivement
été étendu à six provinces (Kasaï Occidental,
Kasaï Oriental, Katanga, Bandundu, Province
Orientale, Bas-Congo).
En 2013, avec l'adhésion au mouvement
global Scaling Up Nutrition (SUN), un
processus est enclenché pour rompre le
cercle vicieux de la malnutrition chronique en
République démocratique du Congo :
• Une politique nationale multisectorielle de
nutrition a été validée en septembre 2013
par le gouvernement et tous les partenaires
au développement.
• L'Unicef a été désigné comme point
focal pour la coordination des partenaires
techniques du SUN (et la Banque mondiale
pour la coordination des partenaires
financiers).
En 2014, l'élaboration d'un plan stratégique
budgétisé pour la mise en œuvre de la
stratégie nationale SUN a démarré et est en
cours.
52 / Impact n°6 / Septembre 2014
Approches novatrices expérimentées avec
succès en 2012 et 2013 pour renforcer
durablement le système de santé
Une stratégie de couverture universelle graduelle de prise en charge des maladies tueuses
d'enfants a été conçue à travers la mise en place
de kits familiaux et de soins communautaires.
Elle a été testée dans la province du Bas-Congo
en 2013. Les kits distribués sont composés de médicaments essentiels, de suppléments nutritionnels et d'autres commodités de base. L’approche
inclut l’instauration d’un coupon de remboursement afin de réduire la barrière financière aux
soins des ménages et d’assurer la motivation du
personnel à la bonne performance. L’approche
s’appuie sur les activités de consultations prénatales et de vaccination qui ont une couverture
élevée pour faciliter un passage rapide d’échelle
et une augmentation de la couverture des interventions. Les communautés locales sont habilitées et impliquées à chaque étape du processus.
Durant la phase pilote en 2013, ce sont 93.000
personnes dont 3.800 femmes enceintes et
18.000 enfants de moins de cinq ans qui ont bénéficié de l'expérimentation de l'approche dans
la zone de santé de Mbanza Ngungu.
En plus, 17 millions d'enfants ont reçu au moins
deux doses de vaccin oral contre la polio, contribuant à maintenir l'interruption de la circulation
du virus en RDC depuis fin 2011. L’Unicef appuie
également le gouvernement de RDC dans son
plan de renforcement global de la vaccination de
routine pour consolider ces acquis.
12 millions d’enfants de 6 à 59 mois ont
reçu un supplément de vitamine A et
bénéficié de déparasitage deux fois au
cours de l'année 2013
Par ailleurs, la RDC a mis en place un programme de prise en charge de la malnutrition
aigüe qui élargit sa couverture progressivement
pour atteindre le maximum d’enfants possible.
En 2013, le gouvernement, soutenu par l’Unicef,
www.impact.cd
Infos utiles
Pour plus d’informations
sur l’Unicef et son travail
en RDC, consultez
PonaBana et suivez
l'organisation sur Twitter
et Facebook.
Cornelia Walther, Unicef
Kinshasa
Tél.: + 243 99 100 63 07
[email protected]
Monitorage Amélioré pour l'Action
Depuis 2012, le gouvernement de RDC, appuyé
par l'Unicef, a revitalisé une approche d'amélioration des capacités des acteurs du système de
santé dans l’analyse situationnelle et la planification basée sur les évidences ('Monitorage Amélioré pour l'Action'). En 2014, au moins 55 zones
de santé conduiront deux fois par an l'analyse
des goulots d'étranglement qui entravent l'accès
de la population aux soins de qualité, et mettront
en œuvre des actions correctrices pour y remédier. En conclusion, «Ce n'est pas un rêve d'imaginer que dans ce pays, dans un avenir proche,
la mortalité infanto-juvénile puisse être ramenée
à des niveaux beaucoup plus bas. L'engagement
mondial est renouvelé, les partenaires sont mobilisés. Avec de la créativité et surtout une volonté
politique nationale forte, tous les enfants, même
ceux des zones les plus reculées, peuvent avoir
accès aux interventions permettant de vaincre les
principales causes de mortalité» a déclaré Barbara Bentein, Représentante de l’Unicef en RDC.
Propos recueillis par Dr. Jean-Pierre Lamarque
Photo : British Embassy Kinshasa
Lutte contre la malnutrition :
L'Unicef, partenaire clé du
gouvernement de RDC
a pris en charge 254.009 enfants atteints de malnutrition aiguë sévère. Le financement obtenu
n’a permis de toucher qu’un faible nombre d’enfants affectés, laissant la grande majorité sans
accès au traitement. La malnutrition aiguë et sévère, reste l’urgence oubliée de la RDC. Pourtant,
elle ne met pas seulement en danger la vie des enfants, elle a un impact sur la capacité des enfants
à apprendre et donc sur leur potentiel, ainsi que
sur les progrès économiques et sociaux des pays
dans lesquels ils vivent.
Photo : Unicef
Photo : Julien Harneis
«Promesse renouvelée»
Une initiative
internationale soutenue
par l’Unicef, qui vise
à fédérer les actions
et mobiliser plus de
ressources en faveur de
la santé des femmes et
des enfants. Elle a pour
objectif, à l’horizon 2035,
de réduire la mortalité
infanto juvénile à moins
de 20 décès pour mille
naissances vivantes.
Photo : Julien Harneis
DOSSIER
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 53
Tout en un !
627.000 décès recensés pour l’année 2012.
Même si une baisse notable est enregistrée du
fait de l’utilisation des moustiquaires imprégnées de longue durée, environ 90% de ces cas
et décès surviennent en Afrique sub-saharienne,
principalement chez les femmes enceintes et
les jeunes enfants: le paludisme est responsable
de pratiquement 30% des décès d'enfants de
moins de cinq ans hospitalisés et jusqu’à 60%
des consultations dans les centres de santé lui
sont imputables. Par ailleurs, d’un point de vue
économique, le paludisme épuise les ressources
des pays et des ménages. Ainsi, les plus pauvres
peuvent dépenser jusqu’à 34% de leurs revenus
annuels pour la prévention ou l'achat de traitements antipaludiques, et à l’échelon national,
le paludisme serait responsable d'un déficit de
croissance économique annuel de 1,3%.
Le projet CECFOR renforce
la lutte contre le paludisme
Grâce à un système ingénieux et miniaturisé, les
laboratoires se rapprochent des patients qui sont ainsi pris
en charge dans les meilleurs délais. Une technique qui peut
sauver de nombreuses vies.
54 / Impact n°6 / Septembre 2014
(K-LMP, Société K-Plan) qui permet d’effectuer
les examens au plus près des patients. Il résulte
d’une collaboration entre l’Institut National de
Recherche Biomédicale (INRB) de Kinshasa, le
CEFA/Centre hospitalier Monkole et l’UMRMD3, Université Aix-Marseille, en partenariat
étroit avec le Programme National de Lutte
contre le Paludisme (PNLP).
Pourquoi travailler encore sur le paludisme
en 2014 ?
En dépit d'investissements sans précédent au
cours de la décennie passée, le paludisme reste
l'une des maladies parasitaires les plus répandues et les plus meurtrières au monde, avec, selon
les dernières estimations de l'Organisation Mondiale de la Santé, 207 millions de cas cliniques et
www.impact.cd
Photos : CEFA
Une approche novatrice dans la
surveillance du paludisme en RDC
Un projet original a débuté en République démocratique du Congo depuis novembre 2013. Il
vise à suivre l’évolution de l'endémie palustre et
à évaluer l'efficacité des médicaments utilisés
par les populations, afin de donner des éléments
au programme national de lutte contre le paludisme pour mettre à jour ses stratégies. Il bénéficie d’un financement du ministère des Affaires
étrangères français, dans le cadre de « L'Initiative 5% sida, Tuberculose, Paludisme » qui vient
en complément de la contribution française au
Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le
paludisme.
C’est une approche nouvelle basée sur l'utilisation d'un laboratoire de microbiologie mobile
La situation en RDC
La RDC et le Nigéria sont les deux pays les plus
frappés par cette infection et bien que la RDC se
soit dotée dès la décennie 1970 d’une politique
nationale de lutte contre le paludisme, les efforts
déployés se sont heurtés à l'extension progressive de la résistance du parasite le plus fréquent
et le plus dangereux, le plasmodium falciparum,
aux médicaments antipaludiques courants.
Pour faire face à cette situation, de nouvelles pratiques en matière de traitement ont été instaurées en 2005. Les combinaisons thérapeutiques
à base d’artémisinine, sont aujourd’hui proposées comme traitement de première ligne pour
la prise en charge des accès simples. Cependant,
www.impact.cd
ces dernières années, une résistance à l’artémisinine a été signalée dans différentes régions de
l'Asie du Sud-Est. Si cette résistance progresse et
gagne d’autres régions géographiques, les conséquences pour la santé publique pourraient être
très graves, car aucun autre médicament antipaludique de remplacement ne sera disponible
avant au moins cinq ans. Ainsi, plus que jamais,
il est nécessaire de suivre l’évolution des résistances afin d’adapter au mieux les protocoles
thérapeutiques aux situations particulières rencontrées sur le terrain.
Le projet de recherche
Comme la RDC est un pays important pour la
lutte contre le paludisme, l’Initiative 5% de la
France a financé cette proposition de recherche
opérationnelle émanant du CECFOR. Sous
l'égide du Programme national de lutte contre
le paludisme, le projet associe des tests in vivo,
réalisés par l'Institut National de Recherche Biomédicale (INRB) , pour connaitre les parasites
impliqués dans les épisodes palustres et aussi
pour évaluer par des tests in vitro la sensibilité
de ces parasites aux antipaludiques présents sur
le marché en RDC.
L’originalité du projet
Pour réaliser ces deux tests sur les mêmes parasites, le délai d’exécution doit être le plus rapide
possible car au-delà de quelques heures il est
impossible d’en tirer des résultats ; aussi a-t-il été
décidé de faire les examens sur les lieux même
des prélèvements.
Le paludisme épuise les ressources des pays et
des ménages. Ainsi, les plus pauvres peuvent
dépenser jusqu’à 34% de leurs revenus annuels
pour la prévention ou l'achat de traitements
antipaludiques...
Impact n°6 / Septembre 2014 / 55
DOSSIER
être déployé par deux personnes, sans outils, en
30 minutes. Les éléments de ce laboratoire sont
compatibles au transport par voie aérienne en
respectant les normes IATA.
Déjà opérationnel
Ce projet est développé au niveau de quatre sites
répartis entre les provinces de Kinshasa et du
Bas-Congo. Il doit durer 24 mois et il permettra
de réaliser la cartographie de la résistance du
plasmodium falciparum aux antipaludiques des
sites choisis. La réalisation des études du niveau
de sensibilité des parasites aux antipaludiques
sera associée à une évaluation de la circulation
des médicaments antipaludiques au niveau
des différents points de vente, les habitudes de
consommation des ménages afin d'évaluer la
pression de sélection qui s'exerce sur les parasites, cause principale d'apparition et de développement de la résistance.
Par ailleurs, du fait de sa conception de proximité, ce projet bénéficiera aux personnels des
centres de santé impliqués dans l'étude. Ils verront leurs performances en diagnostic et quant
à la prise en charge du paludisme accrues. Les
malades, pour leur part, seront traités mieux et
plus rapidement.
Débuts encourageants et de belles
perspectives
Les premiers résultats, encore provisoires, ont
montré la faisabilité de l’approche, mais aussi la
réalité d’une grande circulation de médicaments
antipaludiques très divers. Ceci ne correspond
pas aux stratégies nationales de privilégier un
nombre limité de molécules pour prévenir l’apparition des résistances. Les résultats plus précis sont attendus début 2015 mais ces premières
indications sont assez probantes pour envisager
une extension de cette surveillance à tout le territoire national et si possible aux autres pays de la
sous-région où la malaria est endémique.
Pr. Daniel Parzy, Pr. Léon Tshilolo
Dr. Jean-Pierre Lamarque
56 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
Photos : CEFA
L’originalité du projet est donc d’utiliser pour la
première fois en Afrique, un laboratoire transportable qui a déjà fait ses preuves en Asie, et qui
garantit des critères de qualité identiques à ceux
des centres de référence ; donc ses résultats sont
scientifiquement valides et exploitables.
Amener le laboratoire sur le terrain permettra le traitement de prélèvements de plusieurs
centaines de patients, prélèvements qui seront
testés sur 6 à 8 molécules simultanément. Les
spécialistes de l'UMR-MD3 d'A ix-Marseille formeront les médecins et techniciens dédiés au
K-LMP à cette nouvelle approche et apporteront
leur expertise pour la qualification des résultats.
Le laboratoire transportable (K-LMP) a été développé en France par la société K-PLAN et il
permet d'amener auprès des populations, quelle
que soit leur localisation, les moyens nécessaires
au recueil et au traitement des échantillons. En
effet, dans sa version complète (kit laboratoire de
base et kit hématologie-biochimie) il se compose
de six caisses en fibre de carbone qui contiennent
la totalité des éléments d’un laboratoire : incubateur en atmosphère contrôlée, microscope,
hotte, centrifugeuse, appareil pour charge virale
en temps réel, automate d'hématologie tropicalisé et analyseur de chimie sèche mais aussi
groupe électrogène et réfrigérateur, pour garantir l’autonomie énergétique et de chaîne du froid.
Cette autonomie est aussi pratique. Les malles
elles-mêmes vont servir de module de rangement et de coque protectrice aux appareils, et
elles contiennent des tables et des tabourets. Le
tout est transportable dans un mini bus et peut
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 57
DOSSIER
Vous souhaitez en savoir plus sur les modalités
d’intervention de l’Initiative 5 % ?
Consultez notre site internet :
http://www.initiative5pour100.fr
Ou contactez Dehbia Krouk, chargée de projets
Initiative 5% pour la RDC
[email protected]
Pour contacter votre conseiller régional de
coopération en santé :
http://www.initiative5pour100.fr/lengagement-dela-france/le-ministere-des-affaires-etrangeres/
Le Canal 2 : financer des projets
complémentaires des subventions du
Fonds mondial :
Deux appels à projets sur des thématiques spécifiques sont lancés chaque année, pour financer
des projets de deux à trois ans. La RDC bénéficie
à ce jour de sept projets Canal 2 de l’Initiative 5% :
Quatre projets uniquement mis en œuvre
en République démocratique du Congo :
> Un projet de la Croix-Rouge française : «Appui
à la formation continue VIH-sida du personnel
soignant par le tutorat clinique» depuis le 14 janvier 2013.
> Un projet de Médecins du Monde-France :
«Renforcement et promotion du rôle de la société civile dans la coordination des programmes
de lutte contre le VIH financés par le Fonds mondial dans le Nord-Kivu», depuis le 1er novembre
2013.
> Un projet pilote du FDSS (Fonds de Développement des Services de Santé) : «Mise en place d’un
système fonctionnel de gestion de l’information
médicamenteuse et logistique», depuis le 3 février 2014.
> Un projet du CECFOR (Centre Congolais de
Culture, de Formation et de Développement) :
«Amélioration du suivi et de l’évaluation du programme de lutte contre le paludisme» depuis le
11 novembre 2013.
L’Initiative 5% en RDC
Depuis fin 2011, l’Initiative 5%, deuxième modalité de la
contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le
sida, la tuberculose et le paludisme, appuie les pays, notamment
francophones, dans la conception, la mise en œuvre et le suiviévaluation des subventions allouées par le Fonds mondial.
Le Canal 1 : mobiliser une expertise de
court terme pour répondre à des besoins
ponctuels des pays :
Il s’agit ici de mobiliser des experts à la demande
58 / Impact n°6 / Septembre 2014
des gouvernements. La mission des experts ne
peut pas durer plus de douze mois et doit nécessairement avoir un lien avec le Fonds mondial.
En 2014, trois missions Canal 1 ont été approuvées en comité de pilotage dans le cadre du nouveau modèle de financement du Fonds mondial:
une mission de renforcement des capacités des
membres du CCM (instance de coordination nationale), une mission d’appui à la mise en œuvre
du Dialogue National auprès du Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) ainsi
qu’une une mission d’appui à l’élaboration de la
note conceptuelle VIH-TB auprès du CCM.
www.impact.cd
Photos : Croix-Rouge française
D
otée d’une enveloppe annuelle de
18 millions d’euros (soit 5% de la
contribution de la France au Fonds
mondial, qui est de 360 millions
d’euros par an), l’Initiative 5%, mise
en œuvre par France Expertise Internationale
(FEI) sous la tutelle du ministère des Affaires
étrangères et du Développement international
(MAEDI), apporte un appui technique en RDC
selon deux modalités complémentaires :
Trois projets régionaux auxquels la République démocratique du Congo participe :
> Un projet régional de l’Union internationale
contre la tuberculose et les maladies respiratoires : «Un nouveau protocole dans le traitement de la tuberculose multi-résistante», depuis
le 6 mars 2013.
> Un projet régional de l’ACAME (Association
des Centrales d'Achats Africaines des Médicawww.impact.cd
ments Essentiels) visant le renforcement des
systèmes d’assurance qualité de onze centrales
d’achats membres de l’association, en vue d’une
mise en conformité avec la politique d’assurance
qualité du Fonds mondial, depuis le 15 mars
2014.
> Un projet régional de Positive-Generation :
«Gouvernance sanitaire par la mise en place
d’un dispositif communautaire indépendant
du suivi de l’accès aux soins/Treatment Access
Watch (TAW)», en cours de négociation.
FINANCEMENT D’ÉTUDES ÉPIDEMIOLOGIQUES
(CANAL 1 DE L’INITIATIVE 5%)
Avec la mise en place du nouveau modèle de financement du Fonds
mondial, les pays souhaitant obtenir des financements ont une obligation
accrue d’étayer la présentation de la situation épidémiologique du VIH, de
la tuberculose et du paludisme, afin de mieux cibler leurs interventions
et d’augmenter l’impact de chaque investissement. En 2014 et dans le
but de faciliter l’élaboration de notes conceptuelles, le comté de pilotage
de l’Initiative 5% a décidé d’ouvrir le Canal 1 au financement d’études
épidemiologiques.
Éligibilité de la demande
La demande doit être faite par l’organisation qui bénéficiera des résultats
de l’étude (par exemple, le programme national). L’institut de recherche doit
déjà être identifié et l’étude doit être de courte durée uniquement (inférieure
à 12 mois).
Type de dépenses éligibles : mobilisation d’expertise, les petits matériels,
des réactifs et coûts liés à la réalisation des enquêtes sur le terrain.
Exemple d’étude financée par l’Initiative 5% au Laos depuis juin 2014 :
Financement d’une étude permettant d’obtenir des données sur l’épidémie
de paludisme dans le sud du pays.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 59
SOCIÉTÉ
Journal
un paludisme vers 9h du matin s’était retrouvé
en salle d’opération à 16h pour effectuer une césarienne dans le souci d'un sauvetage materno
fœtal.
d'un médecin
de campagne
^
Une salle d’opération
sans équipement dans
hôpital en milieu rural
Photos : Croix-Rouge française
Le médecin congolais en milieu rural
travaille dans des conditions telles que
d’aucuns le qualifieraient de héros ; il
est seul face à ses décisions dans des
situations parfois très difficiles.
De la durée des prestations
Le médecin en milieu rural n’a pas d'horaire.
Il sait quand il arrive à l’hôpital mais il ignore
l'heure à laquelle il rentrera chez lui. Dans certaines circonstances, il peut passer deux à trois
jours à l’hôpital sans retourner à son domicile alors que ce dernier se trouve parfois à 100
mètres de distance... Certains médecins sont privés de leurs congés pour la simple raison qu’ils
ne peuvent pas abandonner les patients qu’ils
considèrent généralement comme « leur raison
d’être ». Plus émouvant encore : on a pu constater qu’un médecin gardé en observation par ses
infirmiers dans une chambre de l’hôpital pour
De la prestation des services
Le champ d’intervention du médecin en milieu
rural est quasi-illimité. Il doit prendre en charge
toutes les pathologies, de quelque domaine
qu'elles relèvent (médecine interne, pédiatrie,
gynéco obstétrique, chirurgie,...).
Généralement les patients arrivent tard à l’hôpital et souvent quand ils ne peuvent plus rien tenter à domicile. Ils n’attendent du médecin qu’une
réponse : «oui, je vais faire quelque chose et ça va
aller mieux après».
Outre ces activités curatives qui lui prennent
beaucoup de temps et exigent de lui un effort
physique et intellectuel particulier, le médecin
s’occupe aussi des activités préventives dont la
vaccination, la distribution des préservatifs pour
la lutte contre le VIH-sida, la distribution des
moustiquaires ou les activités de planification
familiale organisées au niveau de son hôpital ou
dans la zone de santé. En plus de ces multiples
tâches médicales, il répond aussi aux exigences
administratives pour assurer la gestion des ressources humaines, matérielles et financières à sa
disposition ; ce qui suppose un apprentissage au
quotidien et une discipline dans l’organisation
du temps de travail.
Des conditions de travail
Bien souvent, les équipemnts de laboratoire ne
permettent que de simples tests de routine pour
certaines maladies correspondant à l’épidémiologie de la région (tests de malaria, dépistage
de la tuberculose, VIH sida, trypanosomiase,
recherche des parasites dans les selles ou bilan
pour la sécurité transfusionnelle..). La biochimie
est souvent absente et là où elle existe, se pose
souvent le problème de recyclage des réactifs.
Quant à l’imagerie médicale, soit elle n’existe
pas, soit elle existe mais ne sert pas du tout en raison des difficultés d’ordre technique (pas d’électricité) ou d’ordre financier (le patient n’est pas à
mesure de supporter le coût).
Le manque ou l’insuffisance des matériels et
équipements de travail constituent donc un
obstacle majeur pour la pratique médicale en
milieu rural ; cette situation est dangereuse car
souvent source de conflits entre le médecin et
l’équipe gestionnaire. Imaginez par exemple le
manque d’une pince pour gérer une hémorragie
lors d’une césarienne, d’un ballon pour réanimer
un patient en détresse respiratoire, d’une sonde
pour soulager un malade atteint de rétention
urinaire... Le gouvernement, à travers son programme de renforcement du système de santé, et
les partenaires du secteur font un effort considérable pour résoudre le problème dans plusieurs
structures de soins en milieu rural mais il faut
reconnaître que c’est un travail titanesque qui
Du nombre de médecins
Selon l'endroit, le médecin peut se retrouver soit
seul, soit dans une équipe médicale très restreinte composée exclusivement de généralistes.
Il devra résoudre tous les problèmes posés par les
patients sans possibilité de constituer un «staff»
pour discuter des cas. Les interventions de spécialistes sont inenvisageables. Le seul recours
possible, dans certains cas, est l’assistance de
collaborateurs infirmiers expérimentés.
60 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 61
SOCIÉTÉ
CULTURE
prendra du temps vu l’immensité des besoins.
Bio-Express
Amélioration des
conditions de travail
Le gouvernement
de RDC, à travers
son programme
de renforcement du
système de santé,
et les partenaires du
secteur font un effort
considérable pour
résoudre le problème
dans plusieurs
structures de soins en
milieu rural mais il faut
reconnaître que c’est un
travail titanesque qui
prendra du temps vu
l’immensité des besoins.
Photo : Croix-Rouge française
De la vie sociale du médecin
Quelles que soient ses conditions, le médecin
garde toujours la dignité d’un universitaire,
d’un personnage sociable et respecté. Son nom,
sa famille et sa résidence sont connus de toute
la communauté. Il est souvent très écouté par
cette dernière à laquelle il offre aussi d’autres
services non médicaux (par exemple, son téléviseur fonctionnant avec une antenne satellite est
souvent mis à disposition du public pour les informations, le football ou les grands événements;
il peut faciliter le déplacement de certaines personnes de la communauté ou il peut offrir un
repas convenable dans un cadre généralement
agréable). Il bénéficie toujours d'une invitation
pour les manifestations socioculturelles et participe à diverses activités communautaires extra
médicales (président d’associations de jeunes ou
d’équipes de football). Son épouse occupe aussi
une place non négligeable dans l’organisation
des regroupements des femmes de la commu-
Photo : Dr. Dangote
De la rémunération du médecin
Comme son homologue en milieu urbain, le médecin rural bénéficie d’une prime de risque et
dans certains cas d’un salaire payé par le gouvernement. Par contre, les indemnités locales sont
minimes du fait des faibles recettes réalisées
par la structure (la malaria, la tuberculose et le
VIH-sida étant prises en charge gratuitement).
Pour les structures gérées par les institutions
religieuses ou appuyées par les partenaires du
gouvernement, une prime peut être allouée au
médecin suivant les clauses du contrat de collaboration ou de travail.
Le Dr. Charles Ngandote Akikwa est marié
et père d'un enfant. Il est né à Popokabaka
dans la province du Bandundu. Il effectue
ses études de médecine à l'Université de
Kinshasa et obtient un diplôme universitaire
sur le VIH à l'université Denis Diderot (Paris
VII). Il travaille comme médecin traitant puis
comme médecin chef de zone à l'hôpital
général de Kenge. Il devient ensuite,
médecin superviseur technique puis
coordinateur des programmes de santé à la
Croix-Rouge française en RDC.
nauté. Paradoxalement, il peut être victime d’un
traitement xénophobe, du tribalisme de la part
de la communauté sous l'impulsion de certains
leaders locaux, soit par simple jalousie, soit pour
des raisons encore plus inavouables. Ainsi, certains confrères en quête de postes peuvent-ils
manipuler une frange des habitants pour exiger
le départ avec ou sans violence de celui qui a exposé plus d’une fois sa vie pour leur santé. C’est
souvent cette dernière circonstance qui crée
chez le médecin rural un sentiment d’injustice
parce que parfois le départ se fait dans des conditions indignes.
Dr Charles Ngandote
Ancien médecin traitant et médecin chef de zone de
santé de Kenge, province du Bandundu, coordinateur des
programmes santé à la Croix-Rouge française en RDC
62 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
SEP Congo organise la prise en charge
médicale de ses travailleurs, de leurs familles
et de plus de 9000 ayant droits, à travers
3 centres de santé et 5 dispensaires.
Chaque employé, quel que soit son lieu d’activité dans
le pays, dispose d’une ou plusieurs conventions médicales
locales pour sa prise en charge et celle de ses ayants droits.
Les salariés de SEP Congo sont suivis par un dossier
médical personnalisé, ont l’obligation de passer au moins un
contrôle médical par an et bénéficient des traitements et
médicaments fournis par les pharmacies de SEP Congo.
Les centres médicaux SEP Congo administrent
tous les actes de médecine générale comme la consultation,
la vaccination, le suivi des agents à risque – notamment en
matière de diabète, d’hypertension artérielle, de VIH – et
effectuent les interventions de petite chirurgie. Dans les
autres spécialités, les médecins SEP Congo sont appuyés
par des médecins vacataires.
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 63
SOCIÉTÉ
A
vec l’appui de l’«International
Institute for Applied Systems Analysis» - IISA, de
l’«University College London»- UCL, de l’Observatoire Satellital des Forêts d’A frique Centrale
– OSFAC et de l’Observatoire de la Gouvernance
Les peuples autochtones pygmées de RDC sont confrontés
à de nombreux défis afin de conserver leur culture,
particulièrement liée à la nature. Certaines nouvelles
technologies peuvent les aider à mieux conserver les
ressources naturelles et à récupérer leur savoir traditionnel.
64 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
Photos : Leo Bottrill, Gill Conquest
Les nouvelles technologies
peuvent-elles valoriser les
peuples autochtones ?
www.impact.cd
Forestière –OGF, la Ligue Nationale des Associations Autochtones Pygmées du Congo-Linapyco
a débuté un cycle de formation à l’usage de nouveaux outils technologiques. Ceci s’inscrit dans
le cadre du projet « Moabi » qui vise à fournir des
informations sur la déforestation et la conservation des forêts, en impliquant certaines communautés locales en RDC.
Il s’agit d’un exemple novateur de partenariat
entre une organisation sociale, une ONG locale,
un institut technique régional, une université
étrangère et un institut académique international. Chaque entité assume un rôle bien défini
et grâce aux nouvelles technologies, la communication entre ces entités est considérablement
facilitée. Les experts, les techniciens et les habitants des forêts mettent leurs connaissances en
commun dans ce partenariat où se retrouvent le
savoir scientifique et le savoir traditionnel.
Le programme de recherche participative de
l’UCL, dénommée «Extrem Citizen Science»,
vise la participation de communautés dans la recherche scientifique grâce à l’utilisation de Smart
Phones et d'applications géographiques «Apps».
Les nouveaux outils employés dans le cadre de ce
projet novateur sont simples à utiliser et peuvent
permettre aux communautés autochtones, quel
que soit leur niveau de formation, d’identifier
les problèmes liés à la dégradation de la nature,
d’analyser les systèmes productifs (agricultuImpact n°6 / Septembre 2014 / 65
Photo : MVDB
SOCIÉTÉ
La haute voix des pygmées
Pionnier des mouvements autochtones en Afrique centrale, Kapupu Diwa
Mutimanwa est aujourd’hui devenu porte-parole de ces peuples au niveau des
instances internationales. Portrait d’un pygmée aux antipodes des stéréotypes.
P
re, chasse, cueillette et pêche) et de récolter des
données géographiques sur le terrain afin de les
intégrer dans un système d’information géographique-SIG. Par la suite, elles pourront disposer
de cartes afin de les aider à élaborer des plans
d’aménagement forestier, des projets productifs
et de développement et, le cas échéant, à régler
des conflits locaux. Lors d’un atelier de familiarisation aux outils, organisé dans les locaux du
jardin botanique de Kisantu (province du BasCongo), une équipe particulièrement diversifiée
dans sa composition (techniciens d’IISA, d’OS-
as vraiment petit, toujours tiré à quatre épingles, on le surnomme « le Français ».
Et pourtant, il est né d’une famille pygmée originaire de la forêt d’Itombwe, au SudKivu. «Mon père travaillait à la Cour royale Bantou. En tant que dépositaire des droits
sur la terre, on nous avait imposé d’aller chercher le bois ou d’effectuer d’autres tâches
subalternes…Et lors de l’intronisation d’un nouveau souverain, nous devions accepter que
l’un des nôtres soit sacrifié pour assoir son pouvoir», explique Kapupu, aujourd’hui coordonnateur
du REPALEAC, Réseau des peuples autochtones d'Afrique centrale. «Je ne pouvais accepter
cette condition dégradante. La remise en question de ces pratiques m’a valu bien des menaces
d’assassinat», souligne t-il. « Et je conteste aussi les études des anthropologues qui nous enferment
dans une mystification qui les arrange bien. Je mesure 1,70m et non 1,40m ! »
FAC, d’OGF, d’UCL et des membres autochtones
de la Linapyco) s’est rendue dans le territoire
d’Ingende dans la province de l’Equateur. Elle a
testé ces outils en impliquant les communautés
sur place dans le développement et l’adaptation
de l’application géographique à leurs besoins
spécifiques. Les informations ainsi que les données géographiques collectées seront traitées
par OSFAC et OGF puis intégrées dans le projet
Moabi.
Cependant, le but ultime étant la conservation
de la nature et le développement durable des
communautés autochtones qui y vivent, tous ces
efforts de cartographie des problèmes doivent
être suivis d’actions concrètes pour y remédier.
C’est pourquoi la Linapyco recherche des partenaires engagés pour poursuivre ce travail sur le
terrain par la mise en œuvre de projets de développement et de conservation de la biodiversité.
À partir de l’âge de six ans, il a été scolarisé au prix de nombreux sacrifices. Malgré la cruauté
des autres envers lui pour ses origines, il a successivement étudié aux universités de Bukavu et
de Genève, en Suisse, pour devenir licencié en sciences commerciales et financières et expert en
développement. « Je suis le premier universitaire pygmée du monde ! » déclare Kapupu avec malice
et une certaine fierté. .
Du Kivu à New York
En 1991, il crée une association appelée le PIDP, Programme d’intégration et de développement
du peuple pygmée au Kivu. Elle réalise un travail de pionnier en identifiant les pygmées dans
la province. « Personne ne savait où ni combien ils étaient. Le PIDP fut la première structure des
peuples autochtones en RDC. J’ai emmené pour la première fois, en 1994, des autochtones dans
la ville de Bukavu » déclarait Kapupu à un média de la place. En 2000, pendant la guerre civile
qui a entraîné une grande dispersion des pygmées, il crée la LINAPYCO, la Ligue nationale des
associations autochtones pygmées du Congo, réunissant une trentaine d’associations. Son
siège est installé à Kinshasa pour y exercer un plaidoyer envers les autorités. En 2003, naît
l’idée du REPALEAC, créé officiellement en 2006, avec l’aide de l’UICN (Union internationale
pour la conservation de la nature). « Au niveau sous-régional, les peuples autochtones n’avaient
pas de correspondant. C’est pourquoi, le réseau REPALEAC était une nécessité. L’un de nos objectifs
principaux est l’accès et le partage des bénéfices issus de la forêt » précise Kapupu.
Daniel Riveros
Photos : Leo Bottrill, Gill Conquest
« Les autochtones commencent maintenant à comprendre les enjeux du combat. De plus en plus de
gens trouvent qu’il est temps de se réveiller et de s’organiser à tous les niveaux » affirme le leader
qui s’exprimait récemment en leur nom à la tribune des Nation Unies, à New York. Parmi ses
enfants, Kapupu a une fille qui vient de terminer sa licence en droit avec distinction et se montre
fort intéressée par le combat des peuples autochtones, ce qui ravit son père, évidemment.
Tandis qu’un de ses fils a décroché une licence d’environnementaliste.
Et Kapupu de conclure : « Etudier est essentiel pour notre futur. Nous devons former nos jeunes qui
seront capables de prendre la relève... »
66 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Martin van der Belen
« Au niveau sous-régional, les peuples autochtones n’avaient pas de
correspondant. C’est pourquoi, le réseau REPALEAC était une nécessité. L’un de
nos objectifs principaux est l’accès et le partage des bénéfices issus de la forêt »
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 67
SOCIÉTÉ
Lors des ateliers, nous avons donc plaidé pour
une réforme de la justice (notamment pour permettre un accès égalitaire à ce service public) et
pour l’amélioration des conditions de travail des
acteurs judiciaires en République Démocratique
du Congo.
En outre, nous pensons qu’il est nécessaire de
mieux coordonner les actions des organisations
nationales et internationales de la société civile,
d’opérer un meilleur transfert des compétences
entre elles et d’adapter les réparations aux besoins des victimes par des programmes tenant
compte du contexte local.
Toutes les nations représentées ont signé la déclaration d’action de ce sommet. Nous tenons
néanmoins à rester vigilants sur la mise en œuvre
des grandes recommandations formulées :
• Amélioration des législations ;
• Meilleurs soutien et protection aux victimes ;
• Réforme du secteur de sécurité ;
• Promotion de l’égalité des sexes.
La réussite de cette conférence ne sera effective que si elle se traduit par des réalisations
concrètes et une amélioration de la situation sur
le terrain. Pour cela, nous espérons que la voix
des victimes et des organisations « locales » qui
travaillent dans des contextes difficiles et parfois
dangereux sera enfin entendue et surtout prise
en considération. Dans ce sens, le suivi régulier
Sommet international sur les violences
sexuelles de Londres du 10 au 13 juin 2014
E
Les membres de la Solidarité Féminine pour la Paix et le
Développement Intégral (SOFEPADI), ONG soutenue depuis
plusieurs années par la coopération française, ont participé
au Sommet mondial de Londres pour sensibiliser l’opinion
publique internationale à la nécessité de mettre fin aux violences
sexuelles. Par cette tribune, Julienne Lusenge, militante depuis
2002 de la lutte contre les violences sexuelles, nous livre ses
impressions sur cet événement qu’elle espère fondateur.
n premier lieu, nous tenons à
remercier le gouvernement britannique et notamment William
Hague, ancien ministre des Affaires étrangères, pour ce sommet
qui a permis de réunir 117 gouvernements, plus de 2.000 participants et quelques
personnalités médiatiques comme l’actrice
américaine Angelina Jolie. Il était pour nous
important d’être accompagnés de plusieurs victimes de violences sexuelles et de militants de
terrain afin de donner une résonance internationale à leurs témoignages et partager les défis
que nous rencontrons quotidiennement. Nous
68 / Impact n°6 / Septembre 2014
demeurons persuadés qu’on ne peut combattre
les violences sexuelles sans une justice nationale
et internationale. En effet, le rétablissement de la
dignité des victimes passera par la fin de l’impunité, la mobilisation des acteurs publics comme
de la société civile pour traquer et punir les auteurs de violences sexuelles.
Le rétablissement de la dignité des victimes passera
par la fin de l’impunité, la mobilisation des acteurs
publics comme de la société civile pour traquer et
punir les auteurs des violences sexuelles.
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Photos : Stop Rape in Conflict, avec l'aimable autorisation du ministère des Affaires étrangères et du Commonwealth
Tribune de Julienne Lusenge
de l’application des préconisations issues de ce
sommet avec l’ambassade britannique en RDC
est un signal encourageant pour donner enfin de
la consistance aux discours politiques.
Julienne Lusenge
Présidente du CA de Sofepadi et Directrice de FFC
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 69
Photos : Olivier
SOCIÉTÉ
Deux lauréats pour le prix
des droits de l’Homme de
l’ambassade de France
À
Pour contacter ces deux
lauréats : sofepadi@
gmail.com
l’occasion de la célébration de la
fête nationale française du 14 juillet, Luc Hallade a décerné le prix des droits de l’Homme de
l’ambassade à Angélus Kasereka Kavutirwaki
pour sa lutte contre les détentions arbitraires à
Beni dans le Nord-Kivu. L’ambassadeur a également remis un prix spécial à Noëlla Aliswa pour
son engagement auprès des femmes victimes de
violences, au sein de la Sofepadi, à Bunia dans la
Province Orientale. Méconnu du grand public,
l’engagement de ces deux défenseurs a cependant permis de sauver la vie de centaines de personnes. Leur mobilisation pour l’accès au droit,
la lutte contre la détention arbitraire et la lutte
contre les violences faites aux femmes, rejoignent
les priorités défendues par la France dans le
cadre de son élection au Conseil des droits de
l’Homme des Nations Unies, en novembre 2013.
Dans son allocution, l’ambassadeur de France a
rendu hommage à l’engagement humble de ces
70 / Impact n°6 / Septembre 2014
deux acteurs de terrain, mais «impulsant des
changements collectifs, profonds et durables»,
qui correspondent à une «défense des droits de
l’Homme fondée sur des solutions congolaises, novatrices et originales». Angélus Kasereka Kavutirwaki, surnommé «Droits de l’Homme» par la
population de Béni et pour qui «c'est la loi qui les
condamne, non les activistes et encore moins les
victimes», lutte, depuis plus de dix ans, contre les
détentions arbitraires. Facteur de paix et de cohésion sociale, il milite pour le renforcement des
autorités judiciaires locales, la destruction de
l’ancienne prison de Béni et la création d’un nouvel établissement pénitentiaire. Noëlla Aliswa,
institutrice de formation, est active au sein de
l’ONG locale Sofepadi depuis près de quinze
ans, à Bunia. Elle contribue à briser l’image de
la femme congolaise, éternelle victime, pour en
faire une femme forte, non soumise et actrice du
développement.
Grâce à ce prix, Angélus et Noëlla bénéficieront
d’une bourse de stage en France.
Matthieu Vuillermet
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 71
Photo : Freddie Eale/Primature
SOCIÉTÉ
Lancement officiel de l’ENA RDC
La nouvelle élite de la
fonction publique au
service de l’intérêt général
L
’inauguration de l’ENA RDC a eu
lieu le samedi 28 juin 2014, sous
le haut patronage du Premier Ministre, M. Matata Ponyo Mapon, qui a accueilli
lui-même la première promotion de 60 fonctionnaires-stagiaires : la promotion Lumumba. En
effet, ces jeunes futurs administrateurs civils
sont les acteurs-clés du programme d’action
72 / Impact n°6 / Septembre 2014
du gouvernement. Ils devront relever le défi de
la mise en œuvre de la politique de développement des capacités et du rajeunissement de la
fonction publique congolaise et de la politique de
décentralisation. Cette inauguration permet de
mettre en lumière ce qui constitue déjà un indéniable succès. Succès qui est avant tout celui du
ministre de la Fonction publique, Jean-Claude
Kibala, qui a voulu faire de l’ENA le moteur de
la réforme de l'administration congolaise. Un
succès dont a été témoin son homologue française, la ministre de la fonction publique et de la
www.impact.cd
^
Mission accomplie
pour les deux ministres,
l'ambassadeur de France
en RDC et le conseiller
de coopération.
^
Photos : MVDB
Depuis plus d’une décennie, la RDC s’est engagée dans une série de réformes
en vue de moderniser la structure de son économie, dynamiser sa croissance,
renforcer l’autorité de l’Etat et améliorer les conditions de vie de sa population.
La réforme de l’administration publique a été jugée prioritaire dans le cadre du
programme d’action du gouvernement. L’un de ses axes porte sur la relance de
l’Ecole Nationale d’Administration (ENA).
Décentralisation. À cette occasion, Marylise Lebranchu a rappelé l’esprit et l’objectif de la création de l’ENA française en 1945 : un outil majeur
de la reconstruction de la France après les déchirures de la seconde guerre mondiale. La ministre
a également évoqué l’engagement de la France
pour la réforme de l’administration congolaise,
matérialisé par la signature d’une convention de
coopération entre les deux ministères français et
congolais.
Bien entendu, cette réussite collective est également celle de l’équipe dirigeante de l’ENA RDC,
qui a travaillé sans relâche à l’organisation du
premier concours national de cette école. Cette
sélection, marquée par la rigueur et la transparence, a conduit au recrutement de 60 fonctionnaires-stagiaires, parmi 1.473 candidats.
Qui sont ces premiers énarques congolais ? À
coup sûr une élite, mais une élite façonnée par le
mérite et la compétence et non pas par le «passedroit» : la promotion Lumumba reflète la diversité culturelle et territoriale de la RDC (plus de
80% de provinciaux) et est issue, pour 1/3, d’un
milieu modeste ou de la classe moyenne (43%
de parents fonctionnaires, 16% d'enseignants et
16% de familles modestes). Les énarques prônent
l’éthique, la discipline et le patriotisme et s’engagent dans la fonction publique pour servir l’intérêt général.
Tous les moyens sont mis à leur disposition pour
accomplir leur mission : un bâtiment entièrement rénové avec des salles de cours équipées
d’écrans numériques ; une médiathèque et une
bibliothèque modernes, alimentées par l'ambassade de France, sur les mêmes références que
sa «sœur» française. Douze mois de formation,
dont cinq mois de stage effectués aussi bien dans
l’administration congolaise qu’étrangère, seront
articulés autour de trois apprentissages-clés que
sont le management, la politique publique dans
les territoires et la maîtrise des grands enjeux
Une école de pointe
Les officiels visitent la
salle multimédia...
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contemporains. Ecole professionnelle et ouverte
sur le monde, ses enseignements seront pratiques et dispensés par un groupe d’intervenants
congolais et étrangers.
Le succès du lancement officiel de l’ENA RDC est
également celui de la coopération franco-congolaise. Dès le départ, le gouvernement de M. Matata Ponyo Mapon a marqué sa confiance dans
cette coopération qui a su, pour sa part, mobiliser une expertise de haut niveau, notamment
au sein de l’ENA France, dont le rôle a été décisif pour créer une «école d’application», à la fois
pratique et ancrée dans les réalités congolaises
et dotée des meilleurs standards internationaux.
Matthieu Vuillermet
Impact n°6 / Septembre 2014 / 73
SOCIÉTÉ
S
Kisangani ville espoir,
ville en mouvement
ituée à l'endroit où la rivière Lualaba prend le nom de Congo, au
nord des chutes Boyoma, la ville
s'étend du fleuve jusqu’à la rivière
Tshopo. C’est la destination la
plus lointaine que l’on puisse atteindre par bateau en remontant le fleuve depuis
Kinshasa. C’est à cet endroit même que vous découvrirez une ville baignée de lumière, pleine de
charme, conquise sur la forêt vierge où les arbres
qui bordent les avenues de terre ocre et poussent
sur les places, semblent défier le soleil de plomb
qui brille au-dessus de leurs hautes frondaisons.
Rendue célèbre par le livre du Nobel de littérature V. S. Naipaul « À la courbe
du fleuve », Kisangani est l’une des plus anciennes villes du pays. Capitale de
la plus grande des onze provinces que compte la République démocratique du
Congo, sa superficie est comparable à celle de l’Espagne.
Photos : MVDB
Attractivité à fort potentiel touristique
Kisangani et ses environs recèlent de sites et attractions qui valent le détour. Dans la ville même,
on peut observer de nombreux bâtiments et vestiges coloniaux : l’Hôtel de Ville, en pleine restauration ; la cathédrale Notre-Dame et son rosaire,
symboles de la ville ; l’ancienne poste, construite
en 1925 en briques rouge, actuellement en restauration ; l’ancien Hôtel des Chutes, autre édifice emblématique en attente d’une valorisation
patrimoniale ; la Villa Regina où à été tourné
le film « The African Queen » en 1951 ; l’Hôtel
Congo Palace ; le marché central et la 1ère avenue
avec ses bâtiments du XIXème siècle ; la Place des
Martyrs ; la Place de la Femme…
Kisangani abrite aussi d'autres édifices religieux
remarquables dont une mosquée ismaélienne
dans le quartier Kilima ya Bahindi et l’église de
Lubunga construite en 1904 sur la rive gauche.
En dehors de la ville, à seulement quelques kilomètres, on découvre avec stupéfaction la
technique, ancestrale et unique au monde, des
pêcheries des rapides de Wagenia, peuple de
pêcheurs réputés pour leur légendaire habileté
à pêcher à l’aide d’échafaudages en bois, assemblés par des lianes au-dessus des rapides. Un peu
plus en amont, à 90 kilomètres de Kisangani, au
cœur d’une réserve forestière, les yeux du visiteur s’émerveillent devant la cité agronomique
de Yangambi, majestueuse localité fluviale, composée de villas et de grandes allées, vestiges de la
période coloniale. Son herbarium, notamment,
est l'un des plus intéressant au monde.
Mais ce n’est là qu’une infime partie du potentiel touristique de la ville de Kisangani et de ses
environs. En effet, on peut aussi s’émerveiller et
visiter l’île Mbiye et son écosystème forestier protégé ; les pêcheurs Lokele et leurs «villages flottants»; les chutes de la rivière Tshopo sur la route
de Buta et sa plage de sable fort prisée le week74 / Impact n°6 / Septembre 2014
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end par les Boyomais ; les rapides Wanie-Rukula
; les chutes de la Lindi Bengamisa. Sans oublier le
fleuve et ses affluents, sur lesquels il est possible
de se promener en pirogue tout en visitant les villages alentour.
Un dynamisme économique et culturel
enfin retrouvé
Pôle économique important dans cette partie de
la République démocratique du Congo, Kisangani connaît actuellement un dynamisme économique qui aura des retombées sur l’ensemble
de la Province Orientale. Moralisation de la vie
publique, amélioration du climat des affaires,
mobilisation des investisseurs nationaux et internationaux, réhabilitation et modernisation
des infrastructures.... un contexte favorable à
l’épanouissement d’une ville comme Kisangani.
Les acteurs culturels locaux ont aussi un rôle
essentiel à jouer dans le processus de développement de la ville. Parmi eux on compte entre
autres les Studios Kabako, compagnie de danse
contemporaine de Faustin Linyekula et la Compagnie de Théâtre TACCEMS.
Dans ce paysage d’opérateurs culturels, l’un
d’entre eux, l’A lliance française de Kisangani (association sans but lucratif), a la double mission
d’enseigner la langue française et de diffuser les
cultures francophones. Comme chacune des 811
Alliances françaises présentes dans le monde,
elle réunit un nombre important de membres bénévoles désirant s’investir dans la promotion du
français et des valeurs que cette langue véhicule.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 75
Photo : MVDB
SOCIÉTÉ
L’A lliance française de Kisangani, c’est donc
avant tout un lieu d’échange et de partage, ouvert à la diversité.
76 / Impact n°6 / Septembre 2014
Projets structurants pour améliorer les
conditions d’accueil et d’enseignement
Depuis quelques mois, des travaux de réhabilitation, de réparations urgentes et de mise aux
normes sont en cours, afin d’offrir aux usagers de
l’A lliance de meilleures conditions d’utilisation
des services proposés. Des opérations ordinaires
quotidiennes de conservation et de maintenance
participent au maintien du niveau de qualité atteint aujourd’hui.
atelier danse moderne, hip hop et break dance a
été ouvert récemment. Kisangani, c’est aussi une
terre fertile pour le hip hop, slam et rap.
La ville est l’une des scènes musicales les plus
vivantes dans ces disciplines, qui ont émergé
pendant les années de guerre. Le chef de file de
cette nouvelle génération de rappeurs boyomais
est Alesh Kaposo, qui dédie régulièrement ses
chansons à cette ville qui l’a vu naître, et à ses habitants à qui il rend hommage pour leur courage
et leur persévérance. Autour de lui évoluent plusieurs artistes dont les noms commencent à être
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Centre numérique pour enseigner le
français : entre innovation et interactivité
Afin de rendre l’enseignement du français plus
dynamique et renforcer l’interactivité entre le
professeur et l’élève, l’A lliance a ouvert un Centre
Photos : Matthieu Juin-Lévite
L’Alliance française de Kisangani
Elle fêtera son vingtième anniversaire l'an prochain. Seul centre culturel présent en Province
Orientale, la spécificité de cet établissement est
son ancrage local. Ses missions sont multiples.
Il s’agit de promouvoir le dialogue des cultures,
le français et la francophonie en donnant la possibilité aux artistes locaux d’investir ses espaces.
Il s'agit aussi d'accompagner ces artistes, de diffuser et de promouvoir leurs créations auprès de
la population locale, par la mise en œuvre d’une
programmation et d’une offre culturelle et d’animation complète, variée, pertinente et adaptée.
L’A lliance française propose des cours de français général tous niveaux pour les enfants, les
adolescents et adultes, validés par des diplômes
délivrés par le ministère français de l’Education
nationale (le DELF et bientôt le DELF Junior).
Récemment, un cours de français sur objectif
spécifique (FOS) « spécialisation secrétariat de
direction » a été ouvert et dès la rentrée de septembre 2014, un autre cours « spécialisation
hôtellerie, restauration, tourisme » sera proposé
aux Boyomais. En complément de ces formations
linguistiques, l’A lliance propose également des
cours d’informatique permettant d’acquérir des
compétences supplémentaires en bureautique.
L’A .F organise également des ateliers artistiques
tels que la découverte ou l’approfondissement
des techniques plastiques dans leur diversité
(peinture à l’huile, dessin au fusain, modelage,
sculpture…), la pratique théâtrale avec l’approche du jeu et de l’improvisation, la maîtrise
de l’espace, de la voix et de la diction et la découverte des textes, classiques et modernes. Un
connus : Panas, Ridenza, T2B, DJ Patch, Big Joe,
Le Coq, Dr. Deep, Eric Yakuza, Mogay…
Tous ces jeunes talents de Kisangani chantent
la paix, rien que la paix, pour leur ville, pour
leur province, pour leur pays. Mais l’A lliance
française, c’est aussi une bibliothèque de près
de 14.000 ouvrages, du cinéma, des expositions,
des conférence-débats, des concerts, des spectacles de danse et de théâtre et un atelier conte
et lecture pour enfants afin de leur permettre
de découvrir, d’écouter, de voir et de mieux lire.
Une programmation culturelle riche, intense, en
accès libre pour tous.
numérique d’enseignement du français (CNEF)
grâce au soutien de l’ambassade de France en
RDC. Un espace dédié à l’enseignement du français a été mis aux normes, complètement rénové et réaménagé afin d’y accueillir trois salles
de cours équipées chacune d’un tableau blanc
interactif, mettant les nouvelles technologies et
l’innovation au service de l’apprentissage de la
langue. Son usage permet en effet de combiner
les différents supports (audio, vidéo, écrit) pour
mieux s’approprier la langue, d’accéder à différentes ressources en temps réel et de mettre en
place de nouvelles interactions, plus ludiques.
C’est un véritable moyen de motiver les apprenants comme les professeurs.
Le point informationdépôt Campus France
proposera aux étudiants
un accès gratuit à
l’application en ligne
sur poste informatique
connecté à Internet,
ainsi que la possibilité
d’effectuer la procédure
de dépôt formel auprès
du représentant de
l’ambassade de France
en Province Orientale.
Espace Campus France
D’ici la fin de cette année, l’A lliance française de
Kisangani ouvrira une antenne de l’Espace Campus France Kinshasa. L’objectif de cet espace est
de faciliter l’accès aux études en France pour les
étudiants. Avec l’ouverture de son antenne en
Province Orientale, l’objectif est également de
réduire les inégalités géographiques. Cet espace
visera à offrir aux étudiants un service d’accueil, d’information, d’orientation et d’accompagnement dans la constitution des dossiers de
candidatures en ligne et leur dépôt physique au
bureau de Kinshasa. Le point information-dépôt Campus France proposera aux étudiants un
accès gratuit à l’application en ligne sur poste
informatique connecté à Internet, ainsi que la
possibilité d’effectuer la procédure de dépôt formel auprès du représentant de l’ambassade de
France en Province Orientale.
Matthieu Juin-Levite
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 77
SOCIÉTÉ
Lycée Blaise Pascal de Lubumbashi
remis à neuf, dans cette ville qui incarne l’esprit
d’entreprise et l’initiative, un établissement dont
les équipements pédagogiques et les installations illustrent la priorité donnée à la recherche
et à l'innovation. Un établissement qui offre à
ses enseignants comme à ses élèves, un cadre
propice à l'expression de leur compétence et à
l'éclosion de leur talent. Signe du dynamisme de
la communauté française et francophone, l’établissement scolaire français Blaise Pascal est
aussi le symbole de liens profonds qui unissent
Congolais et Français. Sans le soutien enthousiaste de ces acteurs congolais, ce grand projet
n’aurait pas abouti.
Histoire d'une
renaissance !
Il y a quinze ans, le lycée français Blaise Pascal de Lubumbashi,
situé dans le quartier du Golf Terminus, ouvrait ses portes
après dix-huit ans de fermeture.
L'établissement dispense un enseignement de
qualité, de la maternelle au lycée. Plus d’une
quinzaine de nationalités sont aujourd’hui représentées. Ceci montre qu'à Lubumbashi, ville
cosmopolite, la francophonie est une réalité vivante. La maternelle et les cours élémentaires
bénéficient d’un enseignement direct. L'école
primaire est homologuée à partir de la Moyenne
Section par le ministère français de l'Education nationale. Les cours du collège (de la 6ème
à la 3ème) sont dispensés, depuis la rentrée 2014,
directement, alors que le lycée (de la seconde à
la terminale) fonctionne encore avec le Centre
National d’Enseignement à Distance (CNED)
dont les cours sont soutenus par des professeurs
assistants. Les programmes, conformes aux
instructions officielles de l’Éducation nationale,
assurent aux enfants la possibilité de poursuivre
un cursus scolaire en France dans tous les établissements d’enseignement publics ou privés
sous contrat et dans tous les autres établissements scolaires français à l’étranger.
Q
78 / Impact n°6 / Septembre 2014
uelle belle et forte aventure que celle de l’équipe de cet établissement ! Entre 1972
et 1991 et à nouveau depuis 2009, des femmes et des hommes se consacrent à faire
connaître et aimer la langue française et les cultures francophones. L’établissement
scolaire français Blaise Pascal, qui appartient au réseau des établissements français
de l’étranger de la Mission Laïque Française (MLF), est entré dans le XXIème siècle et
sa modernité. L’équipe de direction et le comité de gestion peuvent être fiers d’avoir
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Photos : Paul Bertin
La mission de la MLF, et donc de cet établissement, est de diffuser la langue et la culture françaises à travers le monde par un enseignement
innovant, multilingue et interculturel qui prend
en compte la culture et la langue locale ainsi que
Les programmes, conformes aux instructions
officielles de l’éducation nationale, assurent aux
enfants la possibilité de poursuivre un cursus
scolaire en France dans tous les établissements
d’enseignement public ou privé sous contrat et
dans tous les autres établissements scolaires
français à l’étranger.
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EN BREF
1972-1991
Le lycée français Blaise Pascal de Lubumbashi
a ouvert ses portes en 1972. Il a débuté par
une école maternelle-primaire, dans le centreville, à côté de l’espace culturel français La
Halle de l’Etoile. L’école s’est installée en 1976
sur son site actuel, un terrain agréable de 9ha
dans le quartier du Golf Terminus. En 1978, la
section du secondaire a été ouverte. Le lycée a
accueilli en moyenne 350 élèves, de la maternelle à la terminale. Ses résultats étaient très
bons avec un taux de réussite au Baccalauréat
de 85 à 90%. En 1991, les événements politiques survenus à Lubumbashi ont entrainé la
fermeture du lycée.
2009
Grâce à l'audace et la détermination des dirigeants de l’établissement, la mobilisation de
toute l’équipe d’administrateurs, congolais,
français et d’autres nationalités, le lycée français Blaise Pascal rouvre ses portes en septembre 2009 avec 117 élèves. Une convention d’adhésion est signée le 9 juin 2009 entre
la MLF et l’association des parents d’élèves
constituée en comité de gestion. Il comptait à
la rentrée 2013, 335 élèves.
Juillet 2013
Le lycée change de nom est devient «Établissement Scolaire français Blaise Pascal».
Rentrée 2014
Passage en cours directs pour les classes du
collège.
"La Mission Laïque Française",
qu'est-ce que c'est ?
Créée à Paris en 1902, reconnue d’utilité publique en 1907, la MLF s’inscrit dans le dispositif de l’enseignement français à l’étranger.
Un réseau d’établissement implanté dans 45
pays où 125 écoles MLF scolarisent de la maternelle à la terminale plus de 45 000 élèves.
Ses valeurs sont la laïcité, le plurilinguisme et
le multiculturalisme.
Par Mélanie Sirdey-Coid
Impact n°6 / Septembre 2014 / 79
SOCIÉTÉ
l’apprentissage des langues étrangères. L'accent
est de facto mis sur l'enseignement de l'anglais en
suivant ainsi les instructions officielles de l'éducation nationale française, conformément à la
spécificité des écoles de la MLF «deux cultures
trois langues». L'excellent équipement de la salle
informatique permet aux élèves d'appréhender
au mieux l'outil informatique en validant le B2I
(Brevet Informatique et Internet) à tous les niveaux de classe.
Dans l'esprit qui a toujours été le sien, l’établissement sait allier l'excellence académique française et l'apprentissage de la culture congolaise,
dans une perspective d'ouverture au monde, de
brassage culturel, de dialogue et de tolérance.
Photo : Michèle Deshayes-Cortot
Photos : Paul Bertin
Mélanie Sirdey-Coid
80 / Impact n°6 / Septembre 2014
Michèle Deshayes-Cortot
a d’abord été institutrice puis directrice d'école maternelle dans le Perche,
sa région natale. Avec plus de dix années d’expérience dans l'enseignement
spécialisé en tant que rééducatrice en psycho-pédagogie, portant un grand
intérêt aux élèves en difficulté et mesurant la nécessité du travail en équipe
pluridisciplinaire, Michèle Deshayes-Cortot a ensuite été Professeur des écoles
à l'étranger dans le réseau AEFE au Maroc et en Arabie Saoudite ainsi qu’en
école d'entreprise gérée par la Mission Laïque Française au Turkménistan. De
retour en France, Michèle a été directrice de la Section d’Enseignement Général
et Préapprentissage au collège (SEGPA) et principale adjointe dans plusieurs
collèges en Touraine. Michèle Deshayes-Cortot a rejoint l’établissement scolaire
français Blaise Pascal, en tant que chef d’établissement, à la rentrée scolaire
2013, fonction qu’elle occupe avec sérieux et enthousiasme.
www.impact.cd
CULTURE
Un Kinshasa très glamour !
Parcours d’un photographe amateur, devenu
professionnel. Talent et charme se mêlent dans des
pixels qu’il assaisonne à la sauce kinoise !
Photos : Pitshou
Le monde de Pitshou
J
e m’appelle José Kalala Kabundi, plus
connu sous le sobriquet de «Pitsh», Pitshou et
même « Pitshounet » pour les intimes.
J’ai découvert très récemment que Pitshou
n’était pas uniquement un nom commun dans
la culture kinoise (une version de junior en lingala) mais provient de l’Occitan «pichon» ou «pitchoun» qui signifie «petit».
82 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 83
CULTURE
Du photoreportage aux «photo shoots» en
studio, en passant par les grandes cérémonies
de mariage, je me définis comme un chasseur
d’émotions, un genre de paparazzi des temps
modernes, qui arrive à figer le temps, l’instant
d’une scène avec toutes les émotions qu’elle renferme.
Les photos que je prends, c'est un monde glamour, un mélange subtil de charmes et de beauté
assaisonné à la sauce kinoise.
On appelle dans le midi de la France, avec l’accent et
beaucoup d’affection, «Pitchounet» un petit enfant.
Or ce petit enfant, à Kinshasa, mesure 1,90m et pèse
plus de 110 kilos. La comparaison avec celui de la
France en ferait rire plus d’un...
Propos recueillis par L.R.
84 / Impact n°6 / Septembre 2014
Photos : Pitshou
Je me suis très tôt découvert une vocation pour la
photographie et mes prestations dans les cérémonies familiales ou les fêtes entre amis ont contribué
largement à me faire connaître.
Mais c’est surtout mon parcours dans le milieu de la
pub qui sera un vrai stimulant pour ma créativité.
Au départ ce n’était qu’un hobby, aujourd’hui, c’est
une profession à part entière que j’exerce avec beaucoup de passion.
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 85
CULTURE
Freddy Tsimba
«Mes œuvres
sont un hymne
à la vie...»
montrer qu’artiste plasticien est un vrai métier
qui doit être considéré. Ensuite, c’est sans doute
à l’Etat qu’il appartient de valoriser ses créateurs
quel que soit le domaine d’expression. Si nous
disposions de musées accessibles aux enfants et
si l’art était davantage valorisé dans l’espace public, je pense que cela changerait certainement la
perception populaire du plasticien.
Freddy Tsimba est l’un des sculpteurs congolais les plus
renommés. Du 20 juin au 5 juillet 2014, l’artiste a présenté sa
première exposition individuelle à l’Institut français de Kinshasa.
Avant son départ pour Ostende à l'occasion du festival "Theater
Aan Zee", il a répondu aux questions de la rédaction d’Impact.
Votre installation «Centre fermé, rêve
ouvert», représentant neuf corps
monumentaux de femmes les mains
collées au mur dans une position
humiliante, a beaucoup marqué les
visiteurs : pourriez-vous nous dire ce qui
vous a inspiré cette œuvre d’une si grande
force expressive ?
Cette installation est née d’une expérience
personnelle au centre «INAD» (pour «inadmissible») de l’aéroport de Bruxelles. Mon visa a
été mal interprété et je me suis retrouvé détenu pendant dix jours et ce fut une expérience
éprouvante. J’ai finalement été « renvoyé » vers
Kinshasa. À la suite de ces avanies, j’ai traversé
de longues nuits d’insomnie et de cauchemars
et il m’a fallu des mois pour me remettre de ce
trauma ; la création de cette œuvre monumentale y a d’ailleurs contribué. C’est une œuvre « in
progress », la finalité étant de parvenir à 99 personnages enfants, femmes, hommes en position
d’humiliation. J’ai la conviction que cette œuvre
deviendra très importante dans ma carrière artistique. Quand je lève les yeux, je vois un oiseau
qui traverse le fleuve Congo sans étiquette ni
visa, il peut aller de Kinshasa jusqu’à Bruxelles
sans entrave.
Impact : Freddy Tsimba, vous êtes
sculpteur, diplômé de l’Académie des
Beaux-Arts de Kinshasa depuis 1989,
quels sont les artistes qui ont le plus
influencé votre travail ?
Freddy Tsimba : Parmi mes maîtres, je citerais volontiers Michelangelo Buonarroti (plus
connu sous le diminutif de « Michel-Ange» ndlr)
qui incarnait la puissance dans la volupté mais
surtout, le sculpteur français d’origine russe Ossip Zadkine et notamment son œuvre « la ville
détruite » qui est, à Rotterdam, un réquisitoire
contre les guerres. La découverte de l’œuvre
d’A lberto Giacometti m’a incité à suivre la voie
de l’épuration des formes. Paul Rebeyrolle m’a
beaucoup impressionné par sa rage de créer. Sur
la scène congolaise, Nginamau Lukiesamo et
Beya Tshidi m’ont poussé à créer.
86 / Impact n°6 / Septembre 2014
Photos : Martin van der Belen
Ne trouvez-vous pas paradoxal que vos
œuvres soient très souvent exposées à
l’étranger, y compris dans l’espace public
comme c’est le cas à Bruxelles alors même
qu’elles sont si peu présentes à Kinshasa ?
Même si j’ai une certaine notoriété à Kinshasa,
il est vrai que mon travail est surtout reconnu
à l’étranger. En RDC, l’artiste est directement
assimilé au « musicien » et non au « plasticien ».
Il y a un réel travail d’éducation à faire pour déwww.impact.cd
On interprète souvent votre œuvre comme
une dénonciation de la guerre et de son
cortège de souffrances (viols, meurtres de
masse…), mais ne peut-on pas aussi y voir
un hymne à la vie ?
C’est vrai que les lectures journalistiques de mon
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Son parcours
Freddy Tsimba a
participé à plus de 40
expositions en Europe,
au Canada, en Chine et
sur le continent africain.
Il a obtenu plusieurs
distinctions parmi
lesquelles la médaille
d’argent aux Jeux de la
Francophonie à Ottawa
en 2001, le diplôme
d’honneur du Salon d’art
contemporain de Béziers
et la médaille du mérite
des Arts, Sciences
et Lettres au Congo.
Il réalise également
des décors pour des
spectacles (théâtre,
opéra).
travail accentuent cette dimension morale de dénonciation de la guerre et de ses atrocités. Mais je
n’ai jamais voulu donner des ailes à la souffrance.
Mes œuvres sont un hymne à la vie ; or la vie possède une ombre qui s’appelle la mort. C’est un
travail plastique qui interroge chacun d’entre
nous. Mon langage plastique trouve sa source
au fond de mes entrailles. Je cherche d’abord en
moi-même pour créer et dépasser mes angoisses,
mes inquiétudes…
Quels sont vos projets artistiques ?
Dans le cadre de la rénovation du Musée Royal
de l’A frique Centrale de Tervuren (périphérie de
Bruxelles), j’ai un projet sur la notion de dialogue,
en collaboration avec le Palais des Beaux Arts
et le KVS (Théâtre Royal Flamand) à Bruxelles.
Il y a aussi le projet de création de «Machettes’
house» à Ostende et la poursuite de l’œuvre monumentale «Centre fermé, rêve ouvert… ». Par
ailleurs, une de mes œuvres «Les larmes des oubliés» a été sélectionnée pour faire partie de l’exposition internationale « Divine comédie » dont
Simon Njami est le commissaire artistique et qui
sera prochainement présentée au Smithsonian
Museum (Washington) et au Musée « Reina Sofia» (Madrid).
Propos recueillis par Christophe Roussin
Impact n°6 / Septembre 2014 / 87
CULTURE
« Yango !»*
Première biennale
d’art contemporain
de Kinshasa
dynamique que nous souhaiterions insuffler ici
à Kinshasa.
Du 21 novembre au 19
décembre 2014, se tiendra
la première édition de la
Biennale « Yango ». Plus de
35 artistes sont attendus en
provenance d’une vingtaine
de pays d’Afrique, d’Europe,
mais aussi d’Asie et des
Etats-Unis. Au programme,
des expositions bien sûr
mais aussi des conférences,
des spectacles. Kiripi
Katembo, coordonnateur
général de cette biennale,
s'en explique pour nos
lecteurs.
88 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Photo : Griet Hendrickx
et permettent de tisser un lien social ; j’ai aussi
observé que ces manifestations bénéficient toujours de l’implication financière de nombreux
partenaires institutionnels mais aussi économiques. A contrario, je pense que si la RDC a bien
sûr besoin d’un développement économique,
celui-ci ne trouvera de véritable sens qu'avec un
développement culturel concomitant. Des villes
sinistrées économiquement ont pu renaître de
leurs cendres avec l’ouverture de structures
culturelles d’envergure, comme c’est le cas avec
le musée Guggenheim dans l’ancienne cité industrielle de Bilbao (Espagne).
Toutes proportions gardées, c’est un peu cette
Photos : Kiripi Katembo Siku
*Le terme «Yango»
en lingala signifie
«c'est ça !». Dans le
cadre de la biennale,
Kiripi Katembo a voulu
mettre l’accent sur
l’adhésion des artistes
congolais et étrangers
à ce projet culturel.
Impact : Kiripi, vous êtes photographe,
producteur de cinéma, quelles sont
les motivations qui vous ont poussé à
organiser une biennale d’art contemporain
aussi ambitieuse à Kinshasa ?
Kiripi Katembo : En qualité de producteur, j’ai
souvent été sollicité via ma société « Mutotu »
par des artistes et réalisateurs congolais et j’ai
constaté qu’il y avait un réel besoin d’ouverture
au niveau international.
Par ailleurs, j’ai déjà participé à plusieurs biennales d’art et à des festivals internationaux ; ces
manifestations contribuent, sous bien des aspects, au développement d’une ville et d’un pays
Comment définiriez-vous la situation des
arts visuels à Kinshasa au regard de celle
qui prévaut dans les capitales voisines ?
À Kinshasa, il y a beaucoup d’artistes talentueux
mais le marché de l’art local est quasi inexistant.
«L’art nait du créateur et vit de son public». À l’instar de ce qu’on voit en Afrique du Sud, au Nigeria, au Maroc et en Egypte, je souhaite susciter
l’amour de l’art chez les Kinois et, 70 ans après la
création de l’Académie des Beaux-Art, poser ma
petite pierre pour faire de cette mégapole de dix
millions d’habitants, une capitale régionale des
arts visuels.
Bio-express
Photographe, Kiripi Katembo
Siku fut lauréat de l’image
du plus grand festival des
arts de scène du monde lors
du 67ème Festival d’Avignon
2013, membre du jury du
festival du cinéma «MOOOV»
en Flandre, gagnant du prix de
la fondation Blachère aux 9ème
Rencontres photographiques
de Bamako au Mali. Il est
également producteur et
réalisateur de films.
www.impact.cd
Une biennale d’art contemporain a
naturellement une vocation internationale.
Comment a été réalisée la sélection des
artistes étrangers ?
Nous avons lancé un appel à candidatures en
janvier pour recueillir les candidatures d’artistes
pour le « IN ». La sélection a été faite en mars
sous la présidence de la commissaire Sithabile
Mlotshwa, curatrice indépendante, directrice de
la fondation Thamgidi.
Comment s’articule cette nouvelle
biennale avec les Rencontres Picha de
Lubumbashi ?
« Picha » est une biennale axée essentiellement
sur la photo et la vidéo. « Yango » sera davantage
ouverte sur des modes traditionnels d’expression artistique, la peinture, la sculpture, la photo
mais également sur des disciplines moins représentées telles que le design ou la vidéo.
Quels seront les principaux axes de cette
première édition ?
J’en distingue trois : tout d’abord, une biennale
d’art contemporain ne se conçoit pas sans de
grandes expositions internationales. Elles se
tiendront à l'Académie de Beaux-Arts, à l'Institut français de Kinshasa, au Centre Wallonie-Bruxelles et dans l’espace public, sur la Place
du 30 Juin (esplanade de la Gare centrale).
Ensuite, afin que nous puissions trouver les voies
d’un développement des arts visuels en RDC,
des professionnels viendront échanger lors de
conférences et tables rondes sur des thématiques
fondamentales : «Culture et développement responsable», «Création d'une industrie culturelle en
Afrique centrale», «L’ héritage culturel congolais et
sa transmission».
Enfin, «Yango» sera l’occasion de décerner différents prix aux lauréats. Nous sommes encore
en discussion avec un partenaire local pour l’attribution de plusieurs d’entre eux mais je peux
d’ores et déjà annoncer qu’une bourse de résidence de création sera offerte par la Fondation
Thamgidi et qu’il y aura également un prix du
«OFF» et un prix «Jeune talent».
Propos recueillis par Christophe Roussin
Informations pratiques
La biennale «Yango» se déroulera sur quatre sites : l’Académie des Beaux-Arts de Kinshasa, l’Institut
français de RDC/Halle de la Gombe, le Centre Wallonie-Bruxelles, la Place du 30 Juin (esplanade de la Gare
centrale). L’ensemble des conférences et des expositions programmées seront en accès libre et gratuit.
Site web de l'événement : www.yangobiennale.org
Impact n°6 / Septembre 2014 / 89
CULTURE
RDC et patrimoine mondial de l’UNESCO
«Mémoire rythmique»
Le classement de sites majeurs du patrimoine
congolais pourrait aider à leur connaissance et leur
valorisation. Des experts culturels se mobilisent
pour élargir la liste des cinq sites déjà classés.
M
émoire rythmique, tels sont les
termes utilisés par un spectateur
congolais expatrié au Canada
pour exprimer son émotion devant les chants polyphoniques mongo présentés
au Centre Wallonie-Bruxelles à l’occasion de la
table-ronde sur le patrimoine culturel matériel
et immatériel en République démocratique du
Congo. Le but de cette table ronde, organisée
du 22 au 25 octobre 2013 par la Commission
nationale de la RDC et la Commission belge
francophone et germanophone pour l’UNESCO,
était de sensibiliser les responsables congolais à
l’importance de faire inscrire sur la Liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO, les nombreux
biens culturels de la RDC. Il est en effet étonnant
de ne voir que cinq sites naturels classés (parcs
nationaux des Virunga, de Kahuzi-Biega, de la
Garamba et de la Salonga et la réserve de faune à
okapis) et consternant de savoir qu’ils font partie
aujourd’hui de la Liste du Patrimoine en péril.
Pourtant, la RDC avait été prompte à ratifier, dès
1974, la Convention de l’UNESCO de 1972 pour
le patrimoine culturel et naturel et à classer les
sites naturels aujourd’hui menacés.
Cinq sites proposés au classement
Lors des ateliers de la table ronde, les participants ont choisi cinq biens culturels matériels
ayant déjà fait l’objet d’une première sélection
par l’Institut des Musées nationaux du Congo:
le complexe du massif de Lovo et les sites annexes, comprenant, entre autres, les grottes de
Ndimba et de Ngovo (province du Bas-Congo),
le site d'Ishango (province du Nord Kivu), la cité
de Niangara et son tribunal (Province Orientale), le village artistique de Mushenge, capitale
du royaume Kuba (province du Kasaï Occidental) et la ville de Kasongo/Tongoni, sur la Route
orientale des esclaves (province du Maniema).
Osons espérer que la Commission de classement
des biens culturels, instaurée en avril 2013 par le
ministre de la Jeunesse, Sports, Culture et Arts
et saluée dans l’Appel de Kinshasa pour la sauvegarde et la valorisation du patrimoine culturel
matériel et immatériel, suive cette proposition
de classement, condition préalable à l’inscription
de ces biens sur la Liste indicative du Patrimoine
mondial de l’UNESCO. Le dossier d’introduction
devra alors démontrer la « valeur universelle exceptionnelle » du bien et les mesures qui seront
Valeur universelle exceptionnelle
Pour inscrire un bien culturel sur la Liste du Patrimoine mondial, celui-ci doit revêtir une valeur universelle exceptionnelle établie sur
la base d’au moins un critère sur les dix décrits sur le site du patrimoine mondial (http://whc.unesco.org/fr/criteres) et être inscrit sur
la Liste indicative nationale de l'Etat partie. Le bâton d’Ishango découvert sur les rives du Lac Edouard serait l'une des plus vieilles
machines à calculer remontant à quelque 20.000 ans. Avec les nombreux ossements humains et autres objets dégagés, il témoigne
d’une importante culture établie dans la région des Grands Lacs : il constitue donc bien un «chef-d'œuvre du génie créateur humain»
(critère 1) et un «témoignage unique ou du moins exceptionnel sur une tradition culturelle ou une civilisation vivante ou disparue» (critère
3). Il en va de même pour le complexe du massif de Lovo. Quant au village de Mushenge, berceau de l’art Kuba, à la Route orientale
des esclaves et à la rumba congolaise, ils sont autant de témoins d’un échange d'influences considérable pendant une période
donnée ou dans une aire culturelle déterminée (critère 2).
90 / Impact n°6 / Septembre 2014
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prises pour sa sauvegarde, sa mise en valeur et sa
gestion. Pour ce qui concerne le patrimoine immatériel (Convention de 2003, ratifiée en 2011),
divers thèmes sont à l’étude : la Mukanda (initiation) chez les Yaka, Pende et Tchokwe, Wale
Ekonda, Kikumbi dans le Bas-Congo; certaines
Pour le patrimoine immatériel, la rumba
congolaise semble faire l’unanimité. Elle pourrait
faire l’objet d’un dossier d’introduction auprès de
l’UNESCO aux niveaux régional et interrégional.
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épopées telles que Lianja, ou enfin le rituel Jebola chez les Mongo. La rumba congolaise, quant
à elle, semble faire l’unanimité. Une fois classée
au niveau national, elle pourrait faire l’objet d’un
dossier d’introduction auprès de l’UNESCO aux
niveaux régional (République démocratique du
Congo, République du Congo et Angola) et interrégional (Cuba, Haïti et Amérique latine). Vu
l’importante documentation et les nombreuses
publications sur le sujet, un tel dossier aurait de
fortes chances d’aboutir. Croisons les doigts et,
surtout, les pieds au rythme de la rumba !
Nicole Gesché, historienne de l'art et anthropologue
Impact n°6 / Septembre 2014 / 91
CULTURE
« C'est un roc, c'est
un pic, c'est un cap,
c'est une péninsule! »
Georges Dandin» et «Humilier son enfant permet d’en faire un homme» seront en tournées au
Cameroun, Bénin, Rwanda et Burundi. Au début
de l’année, la troupe était en tournée au Rwanda,
Burundi et à Goma avec deux spectacles. «Le
Cercle de craie» et «Humilier son enfant…» Le
Tarmac organise des lectures-spectacles d'auteurs contemporains à travers le festival «Les
Ecritures kinoises». L’engagement pour le développement des écritures contemporaines en
RDC est total, car le théâtre se régénère toujours
par l’écriture. La troisième édition de ce festival
aura lieu au mois d’octobre prochain. Depuis
2010, nous organisons aussi le festival de théâtre
« Ça se passe à Kin ». Le projet du festival c’est
d’être le lieu de la création contemporaine et de
l'exigence artistique tout en s'adressant au public
le plus large possible. La quatrième édition du
festival a eu lieu cette année du 2 au 7 juin. Une
centaine d’artistes congolais et étrangers ont été
associés à cette fête. Près de quarante représentations ont été organisées à travers toute la ville.
Impact : Présentez-nous le Tarmac des
Auteurs…
Israël Tshipamba : Le Tarmac des Auteurs
est un espace culturel qui milite pour l'accès de
tous aux arts vivants de la scène et aux textes
d'auteurs contemporains par des actions de formation, de diffusion, de création et de sensibilisation. Le Tarmac a été créé en 2003. En 2007,
il se structure et devient un lieu bien connu de
la commune de Kintambo. J'attire les populations des milieux populaires et défavorisés et les
conduis à s'intéresser au théâtre et à la culture.
92 / Impact n°6 / Septembre 2014
C’est un lieu théâtral qui n’a rien de l’image que
l’on se fait du théâtre. On y entend les bruits des
enfants qui jouent dans la rue et la vie quotidienne des ménages d’à côté. Le théâtre est en
symbiose avec son public, au milieu de son noyau
social. Dans ce contexte, une programmation est
prévue chaque mois pour cinq à sept représentations. L’espace sert également de lieu de répétition à certains artistes. Le Tarmac des Auteurs
c’est aussi une troupe qui crée des spectacles
et les diffuse dans le pays et à l’extérieur. Cette
année, deux de nos spectacles : «Masamuna
www.impact.cd
Photos : Martin van der Belen
Cyrano à Kinshasa
est une adaptation
de la célèbre
pièce «Cyrano de
Bergerac» d’Edmond
Rostand. La pièce
a été créée au
festival «Ça se passe
à Kin 2014» par le
Tarmac des Auteurs.
David Ilunga joue
le rôle de Cyrano et
Bavon Diana celui de
Rageneau.
Pour quelles raisons vous êtes-vous orienté vers cette profession et quel parcours
avez-vous suivi pour y accéder ?
J’ai grandi dans un milieu très fermé. La seule
chose que mon père attendait de moi c’était
l’obéissance absolue. Pour me libérer de cette emprise parentale, je me suis mis à écrire : mon premier texte fut « Humilier son enfant permet d’en
faire un homme ». C’est une épopée. L’histoire
d’une famille vraiment congolaise qui forme une
tranche d’humanité où chacun pourra se reconnaître et être, de manière imprévisible, révélé ou
touché à vif. En 1994, j’ai intégré l’Ecurie Maloba,
une troupe cantonnée près de la maison de mes
parents, avec une seule envie : parler pour exister.
Je ressentais un profond besoin de façonner mon
identité et à l’époque, le théâtre me paraissait le
seul moyen d’y parvenir. J’y ai été formé. J’ai joué
dans plusieurs spectacles, effectué plusieurs
tournées sur le continent et en Europe. En 2003,
www.impact.cd
«La Consultation»
de Daniel Defilipi,
adaptation et mise
en scène de Kokou
Yemadje. Un spectacle
béninois joué par
Giovanni Houansou et
Didier Nassegande lors
du festival «Ça se passe
à Kin 2013» au centre
Wallonie-Bruxelles de
Kinshasa.
j’ai créé mon propre théâtre qui est devenu, en
2007, un lieu reconnu d’expression théâtrale. À
travers notre programmation diversifiée, nous
sommes parvenus à modifier les habitudes du
théâtre à Kin. Les enfants, les familles, les amis,
les gens du coin, les expatriés se déplacent au
Tarmac pour passer la soirée ensemble. Ce phénomène permet une évolution des propositions
artistiques : les sujets abordés dans nos pièces
traitent de la politique, des affaires du moment,
de l'histoire du pays… Les thématiques se rapprochent des préoccupations de la population,
et parallèlement atteignent une dimension plus
Photo : Pénélope Déchaufour
Le Tarmac des Auteurs est l'un des théâtres les plus dynamiques
de Kinshasa. Situé non loin de Kintambo Magasin, cet espace aux
allures de garage en plein air nous montre des spectacles qui font
souvent mouche… Rencontre avec Israël Tshipamba Mouckounay,
dit « Tshitshi », artiste et directeur artistique du Tarmac.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 93
>
Elbas Manuanua et
Israël Tshipamba
dans «Masamuna
Georges Dandin»
Quel type de répertoire jouez-vous ?
Du classique et du contemporain. Je m’inscris
dans la pensée du plasticien Antonio Tapiès dans
« La Pratique de l'art » (publié chez Folio Gallimard) qui suggère qu'un art qui ne dérange pas
n'est pas de l'art : « Quand les formes ne sont pas
capables d'agresser la société qui les reçoit, de la
déranger, de l'inciter à la réflexion, de lui dévoiler
son propre retard, quand elles ne sont pas en rupture, il n'y a pas d'art authentique. » Voilà ce qui
motive mes choix artistiques.
Partenaire fondateur des 1ères Francofolies de Kinshasa
8 - 14 septembre 2014
© Dob’s Farm - Fotolia
universelle. Elles incarnent ainsi l'image d'une
culture «démocratisée».
Photo : Benoît van Maele
Photos : Pénélope Déchaufour
Musique
La chaîne culturelle francophone mondiale
Photo : Benoît van Maele
Pensez-vous que le théâtre soit nécessaire
dans la société congolaise ?
Oui, il est nécessaire, et ce pour plusieurs raisons : considérons le théâtre dans son rôle social: l’œuvre théâtrale imbibée des réalités aussi
troublantes que grotesques, éminemment théâtrales, traduit notre cruelle condition qui fait que
le monde tourne, et finalement change si peu.
Le théâtre montre dans quels drames les individus peuvent être jetés ou se jeter eux-mêmes, et
dans quels pièges ils se débattent, parfois jusqu’à
l’épuisement. Qu’il soit tragique ou comique, le
théâtre s’ancre toujours dans la réalité politique,
sociale et culturelle, tout en gardant «sa distance
théâtrale», celle d’artistes et non de politiciens.
Propos recueillis par Martin van der Belen
94 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 95
CULTURE
Photo : MVDB
ont pu découvrir un florilège du vaste répertoire
de musique classique française (Massenet, Bizet,
Berlioz, Gounod) interprété par les musiciens de
l’Orchestre symphonique Kimbanguiste sous la
conduite du maestro Armand Diangienda.
Contraste saisissant, quatre jours plus tard, l’ambiance était cette fois survoltée sous la grande
halle pour le concert du rappeur Youssoupha,
un des enfants prodiges du grand Tabu Ley, venu
spécialement de France pour un concert-événement en clôture de la Semaine française. Les 800
jeunes présents sont encore sous le choc.
Les samedi 31 mai et dimanche 1er juin, le
Théâtre de Verdure a lui aussi fait carton plein à
l’occasion de la 8ème édition du festival de jazz de
Kinshasa « Jazzkif » : près de 4 000 spectateurs
se sont pressés dans l’amphithéâtre du Mont
Ngaliema pour les vingt ans de carrière du grand
musicien congolais Lokua Kanza. À l’occasion,
une pléiade de stars avait tenu à faire le déplacement pour honorer le natif de Bukavu : Richard
Bona, Fally Ipupa, Sara Tavares, Jean Goubald,
Olivier Tshimanga, les groupes «Clarkk and Co»
et «Franco na biso».
Du 3 au 5 juillet dernier à la Halle de la Gombe,
s’est tenue la quatrième édition du festival «aiR
D’iCi» qui a été l’occasion de découvrir le talent
et l’énergie incroyable de nombreux groupes de
danse «hip-hop» qui se sont affrontés artistiquement lors de défis endiablés, pour le plus grand
plaisir des quelques centaines de jeunes présents…and the winner is «Artcon». CR
Vu pour vous à Kinshasa
De la musique
avant toute chose…
C
Les arts urbains en effervescence
L’Institut français
s’engage en faveur
des arts urbains
en soutenant une
nouvelle génération
d’artistes portés
par des labels
kinois dynamiques
suscitant un
engouement
croissant du
public. Les deux
groupes finalistes
d’aiR D’iCi sont
déjà programmés
à la rentrée dans
un spectacle plus
complet.
Photos : Gédéon Mukendi
’est désormais une tradition, avec la saison sèche, vient le temps des festivals.
Cette année encore, Kinshasa a été le
théâtre d’une programmation culturelle intense dès la fin du mois de mai.
Une affiche éclectique avec des stars de la musique
congolaise, de la musique classique, du hip hop. En
ouverture de la première «Semaine française de
Kinshasa», 400 personnes ont profité d’un moment
de grâce le 26 mai sous la grande halle de l’Institut
français : dans une ambiance de recueillement, ils
96 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 97
CULTURE
Le genre
s’invite au cinéma
Après le succès de la première édition du
festival CINEF, cinéma au féminin, à l’Institut
français de Kinshasa au mois de juin, Impact
revient sur la genèse de cet événement
avec la directrice du festival et coordinatrice
de l’association des femmes cinéastes
congolaises, l’AFCC.
Impact : Clarisse Muvuba, vous êtes l’une
des cinéastes à l’origine de la création de
l’association AFCC, quelle en a été l’idée
directrice ?
Clarisse Muvuba : Il y avait un besoin, que chacune d’entre nous ressentait, de se réunir pour
échanger et s’entraider, créer un cadre favorable à
toutes les femmes congolaises désireuses de faire
du cinéma. Il fallait aussi accroître le nombre de
femmes dans ce secteur. Actuellement l’association comprend quatre réalisatrices et deux
comédiennes à Kinshasa, auxquelles s’ajoutent
trois réalisatrices et trois comédiennes de différentes provinces ; d’autres vont bientôt nous
rejoindre.
Pourquoi la création du festival CINEF ?
Le festival CINEF, « Cinéma au féminin », permet de montrer les œuvres des femmes, et offre
un cadre idéal pour l’organisation de rencontres
professionnelles. Il a aussi pour but de former un
réseau de femmes dans le secteur du cinéma et
de l’audiovisuel, de susciter les échanges pour
développer des projets.
La première édition a été consacrée aux films de
femmes congolaises de l’ensemble des provinces,
sans oublier la diaspora. C’est pourquoi nous
avions invité les cinéastes Claude Haffner de
France, et Monique Mbeka Phoba de Belgique.
Photo : MVDB
Bio-express
de la conférence de presse à l’Institut français le
3 juin, nous avons montré des extraits de tous
les films sélectionnés, ce qui a beaucoup impressionné les journalistes. Ces films ont touché
toutes les sensibilités ; de fait, l’association des
journalistes culturels nous a soutenues, notamment avec le concours de Nadia Okako de la
RTNC 2 et Jeannot Matwaki de Radio Okapi.
Les projections et le bilan du festival ?
L’ouverture, le mardi 10 juin, a été une réussite
totale grâce à la venue d’autorités politiques
congolaises, de représentants des ambassades,
de cinéastes, de la presse, des ONG et tout un
public qu’on a peu l’habitude de voir en milieu de
semaine. En tout, plus de 500 personnes étaient
rassemblées pour cet événement! C’était la meilleure occasion d’organiser la première en RDC
Quels sont les prochains projets de
l’association AFCC ? Une deuxième édition
du CINEF ?
À peine finie la première édition du festival,
quatre membres de l’A FCC ont commencé
le tournage de leur film, ce qui va les occuper
jusqu’au mois de novembre. Néanmoins nous
avons déjà avancé sur la deuxième édition du
CINEF, prévue en juin 2015, que nous consacrerons aux différents regards portés sur les cinémas africains. D’ici là, nous allons travailler sur
une production intitulée « Djo Muendo » («c’est
le départ»). C’est un projet de série télévisée sur
les problèmes des femmes en RDC. Nous souhaitons à cette occasion organiser des formations
Quelle a été la réaction des médias
congolais ?
Faire un festival pleinement consacré aux
femmes cinéastes congolaises était un défi. Lors
98 / Impact n°6 / Septembre 2014
du dernier film « Sœur oyo » de Monique Mbeka
Phoba, et du documentaire « Noire ici, blanche
là-bas » de Claude Haffner.
La deuxième journée s’est déroulée à l’Université de Kinshasa (Unikin), avec une master class
et des projections pour les étudiants du département des sciences de l’information et de la
communication. Les projections, les 12 et 13 juin
à Bandalungwa et Masina, ont été riches en rencontres et débats avec des publics nombreux et
très divers. Le 14 juin a été l’occasion de nous retrouver à nouveau à l’Institut français pour une
soirée fiction avec « Notre étrangère », film de la
réalisatrice burkinabé Sarah Bouyain.
Nous sommes ainsi très heureuses d’offrir l’occasion à tout un public congolais de découvrir
le cinéma au féminin que nous souhaitons faire
partager, avec des histoires qui le concernent.
www.impact.cd
www.impact.cd
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Cérémonie de clôture
Cinéastes congolaises
sur la scène de la
Halle de la Gombe le
dernier jour du CINEF
Clarisse Muvuba Mwimbu est née à Kolwezi
(Katanga), le 17 juin 1982. Diplomée en mise en
scène de théâtre à l’Institut National des Arts de
Kinshasa en 2006 et distinguée en réalisation
cinéma au cinécours Canada (via internet) en
2011. Clarisse s’est initiée à plusieurs métiers
de la vidéo afin d’avoir une connaissance de
tous les maillons d’une chaîne de production tels
que : montage, prise de son, habillage sonore à
Technocité à Mons/Belgique et cadrage à l’Institut
Congolais de l’Audiovisuel (ICA) à Kinshasa.
Clarisse est Gérante de Clarimage films, une
nouvelle société de production audiovisuelle.
Elle est aussi présidente de l’Association des
Femmes Cinéastes Congolaises (AFCC).
Tél.: +243 (0)9 97 629 655
E-Mail : [email protected]
professionnelles pour de nouvelles candidates
aux métiers du cinéma. Parmi d’autres idées, il
y a une résidence d’écriture avant la deuxième
édition du CINEF, des états généraux des séries
télévisées africaines... Vous voyez, beaucoup de
projets en perspective !
Propos recueillis par Antoine Yvernault
Le festival CINEF, « Cinéma au féminin », permet
de montrer les œuvres des femmes, et offre un
cadre idéal pour l’organisation de rencontres
professionnelles. Il a aussi pour but de former un
réseau de femmes dans le secteur du cinéma et
de l’audiovisuel, de susciter les échanges pour
développer des projets.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 99
VIE PRATIQUE
Kinshasa revisitée
>
Photo : MVDB
Vous voulez découvrir le patrimoine architectural de
Kinshasa ? Impact vous invite à (re)découvrir quelques sites
remarquables de La Gombe, à l’occasion de la publication
récente d’un guide sur le sujet...
L'âge d'or de Kinshasa...
Le jeu impressionnant de
plaques de cuivre du hall
de la salle de conférence
du ministère des Affaires
étrangères, reflète
l’essor économique du
pays à la fin des années
soixante…
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e guide co-édité par l’ULB (Faculté d’A rchitecture) et le CIVA
(Centre International pour la Ville,
l’A rchitecture et le Paysage) dans la collection
Villes et Architecture, est le fruit d’une riche collaboration entre l’ULB et le Congo, louée par le
président de la Société des Architectes du Congo,
Claudien Mulimilwa. Il fait suite à un important
inventaire de quelque 400 sites et bâtiments repris sur une carte réalisée à l’occasion du sommet de la francophonie en novembre 2012.
Des historiens, des urbanistes, des archivistes,
des paysagistes, tant belges que congolais, ont
pris part à ce projet de recherches urbanistiques
de la ville. Il a nécessité l’étude de nombreuses
archives.
D’une lecture très agréable (courts chapitres
fort bien documentés, constituant chacun des
clés de lecture ; nombreuses cartes et propositions de parcours dans la ville par quartiers),
cet ouvrage, abondamment illustré, comble un
important vide et en réjouira plus d’un désireux
de découvrir cette ville «lieu de vie qui s’écoule
avec la même puissance que le fleuve qui l’a enfanté» (p.9). Il se veut également un outil destiné
à sensibiliser les décideurs politiques afin qu’ils
assurent la sauvegarde du patrimoine architectural de Kinshasa, cette «ville plurielle, creuset de
relations nord-sud, animée par diverses communautés africaines» (p.32) qui peut se targuer d’un
riche passé tant historique, que social, politique
et économique. Ce guide invite donc à s’interroger sur ce passé et à y puiser pour rechercher des
solutions à son développement en particulier sur
les questions de transports ou de tourisme.
Mais face au «building boom» auquel est
confrontée la ville aujourd’hui, «Il n’y a pas de
temps à perdre» : une vraie politique du patrimoine est urgente tant au niveau de sa réappropriation, de sa reconnaissance, de sa valorisation
et sa sensibilisation » (p.38). L’ouvrage, accompagné d’une bibliographie récente et d’un glossaire,
aborde également l’autre rive en se penchant sur
les relations entretenues par Kinshasa avec sa
voisine Brazzaville.
Nicole Gesché, historienne de l’Art
Un ouvrage de référence
Ceux qui veulent en savoir plus sur le patrimoine de la capitale sont invités à consulter
le guide d’architecture « Kinshasa » (Collection Ville et architecture, Ed. CIVA, Bruxelles,
2013), mais également l’ouvrage « Kinshasa. Architecture et paysage urbains », publié en
2010, regroupant 150 sites d’architecture coloniale répertoriés. Cet ouvrage financé
par l’AFD s’était appuyé sur les recherches de divers experts belges du domaine et
a servi comme document de référence pour le nouveau guide. Il est consultable à la
bibliothèque de l’Institut français-Halle de la Gombe.
100 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 101
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Galerie du Fleuve (A3) (6)
Av. de l’Equateur. Bâtiment de
«style éclectique», habillé de
colonnes décoratives, contre
lequel réagira le «modernisme
tropical». (ca 1920)
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Immeuble Forescom (A3) (5)
Remarquable immeuble d’angle
en « style paquebot ». Il fut en
son temps le premier building
de l’Afrique centrale, une fierté
de Léopoldville. Arch : R. Fostier,
1945-1946 (en restauration).
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Eglise du Christ-Roi (A2) (4)
Av. Colonel Lukusa. Un des plus
anciens bâtiments de Kinshasa.
Ce temple protestant témoigne
de la présence précoce au
Congo des missionnaires
baptistes. 1915.
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102 / Impact n°6 / Septembre 2014
Poste centrale (A3) (3)
Bvd du 30 Juin. Bâtiment
associant classicisme (porche
monumental) à des recherches
modernistes (rigueur générale
et volumes d’angle vitrés). Arch.
L. Verschuere, 1949-1952.
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Clinique kinoise (B2) (2)
Av. des Cliniques. Très
remarquable édifice moderniste
en partie sur pilotis. Façade
composée et articulées par des
dispositifs climatiques. Arch. A.
Van Laarhoven, 1953-1954.
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Ambassade de France (B2) (1)
Ancienne maison du directeur
de la Société textile africaine
Texaf, cette demeure de prestige
érigée entre 1925 et 1928 a été
rénovée de façon élégante avec
quelques ajouts modernes…
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La Gombe sous la loupe
Pour illustrer le patrimoine architectural de Kinshasa, nous avons puisé
dans le guide d'architecture «Kinshasa» récemment publié. Il s’agit
d’un échantillon de quelques bâtiments intéressants que nous vous
recommandons de voir. Pour des raisons pratiques nous nous sommes
limités à une sélection dans la commune de La Gombe, mais il est évident
que l’ouvrage est plus exhaustif et va au-delà de ce périmètre.
Immeuble de bureaux de
l’ONATRA (A3) (7)
Av. Wagenia. Bâtiment attestant
des première années de
l’urbanisation de Kinshasa. Très
belles ferronneries de style Art
Nouveau, 1912-1914.
Gare centrale (A3) (8)
Place de la Gare et Rue des
Sénégalais. Bel exemple
d’architecture moderne retenant
l’attention par la rigueur
de la composition cubique,
horizontale et verticale.
Impact n°6 / Septembre 2014 / 103
Couvent et église
du Sacré-Cœur (A2) (12)
Av. Père Boka. Elégante église
néoromane, sur la même
concession que l’actuel Lycée
Bosangani, de style Art Déco,
construit à partir de 1928.
Tour Sozacom (A3) (9)
Bvd 30 Juin. Très remarquable
immeuble cherchant à
concilier «fonctionnalisme»
et «plastique» africaine. Arch.
Claude Strebelle et André
Jacqmain, 1969-1977.
Paroisse Ste-Anne (A3) (10)
Av. Isiro. Ensemble de bâtiments
religieux en style néogothique
dont la cathédrale (Arch. frère
R. Reygearts, 1913-1914) et
une remarquable résidence pour
religieux et visiteurs. Arch. P.
Dequeker, 1970.
Palais de la Nation (A1) (11)
Av. de Lemera. Ancienne
résidence du Gouverneur
général, aujourd’hui bureau du
Président de la République.
Edifice qui clôture une
perspective urbaine structurant
tout le quartier autrefois
dénommé «Kalina».
Supermarché
Michael-African-Lux (A3) (13)
Pl. du Marché. Edifice comptant
parmi les plus anciens
commerces de Kinshasa.
Coupoles orientales. Arch.
Ernest Callebout, 1925.
Casino Bingo Royal (A3) (14)
Av. de l’Equateur. Intéressant
édifice agrémenté d’une
façade rappelant l’architecture
portugaise (fronton) et bel
espace intérieur (mezzanine,
colonnes), 1925-1928.
Min. du Portefeuille (A3) (15)
Av. Wagenia. Architecture
au modernisme classicisant.
Auvent monumental et larges
claustras. Arch. M. Houyoux,
1949-1953.
104 / Impact n°6 / Septembre 2014
Maisons «Cape Dutch» (A3) (16)
Av. Tombalbaye, angle av.
Kasaï. Etonnant lotissement de
maisons à fronton hollandais,
1925-1930.
Ministère des Affaires
étrangères (A1) (17)
Place de l’Indépendance. Dans
cet ensemble de bâtiments
modernes, on retient la grande
salle aux formes audacieuses
qui allient béton brut, wenge et
cuivre. Esthétique et acoustique
réussies. Arch. E. Palumbo et M.
Tolleri, 1963-1973.
Ministère de la Fonction
Publique (A1) (18)
Av. des Héros nationaux.
Ensemble monumental
moderniste classicisant avec
dispositifs climatiques. Arch. J.
Genet, 1954-1955.
Clinique Ngaliema (B1) (20)
Av. des Cliniques. Derrière
l’ensemble des pavillons de
l’ex-hôpital Reine Elisabeth,
attestant d’une architecture
«hygiéniste», on découvre ce
brillant édifice Art Déco.
Immeubles Sabena (B2) (21)
Bld du 30 Juin. Ces deux tours
« ex-Sabena » sur pilotis
rappellent Le Corbusier et
demeurent une des meilleures
expressions du modernisme
tropical. Arch. Claude Laurens,
1952-1954.
Collège Boboto (A2) (22)
Croisement Av. Kisangani et
Av. Pierre Boka. Bâtiments
scolaires, ex-Collège Albert
Ier. Plusieurs sont de «style
paquebot», dont le remarquable
centre culturel éponyme (ici).
Arch. E. Popijn, 1938-1947.
Min. des Transports (A3) (19)
Bld du 30 Juin. Colossal
immeuble au modernisme
classicisant. Arch. A. Van Ackere,
1952-1955.
www.impact.cd
Article réalisé en collaboration avec la Faculté d’Architecture de l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Crédits photos : ULB, Institut Supérieur d’Architecture et d’Urbanisme de Kinshasa (ISAU), Martin van der Belen, archives.
VIE PRATIQUE
www.impact.cd
Impact n°6 / Septembre 2014 / 105
VIE PRATIQUE
Les élections des conseillers à l’Assemblée
des Français de l’étranger (AFE)
Ce scrutin proportionnel à un tour, à la plus forte
moyenne, était organisé dans quinze circonscriptions. 42 listes avaient été enregistrées. 242
conseillers consulaires étaient candidats à ces
élections. Les élections ont été organisées dans
les 15 bureaux de vote ouverts dans les chefslieux de circonscription électorale. 422 électeurs
ont voté, soit un taux de participation de 95% ; 40
votes étaient blancs ou ont été déclarés nuls. Au
total, 382 suffrages ont été reconnus valides.
Les 37 conseillers consulaires de la circonscription électorale «Afrique centrale, australe et
orientale» à laquelle est rattachée la RDC, ont élu
à Libreville le 22 juin dernier, 5 des 90 conseillers
de l’A FE (33 suffrages exprimés). Les élus, dans
l’ordre de présentation des listes, sont :
- M. Bruno Dell’aquila
(5 voix)
- M. Jean-Danier Chaoui
(9 voix)
- M. Hervé Serol
(9 voix)
- Mme Marie-Philippe Giraud (10 voix)
- M. Hervé Fraslin (10 voix)
verts dans le monde ; dix jours avant la possibilité de se rendre dans l’isoloir, un portail de vote
par internet avait été ouvert, pendant six jours
pleins. 1.130.000 électeurs sont inscrits sur les
listes électorales consulaires. Parmi eux, 185.000
ont participé à ces élections, soit un taux de participation de 16,5 % : 80.000 électeurs ont choisi le
vote par internet, soit une participation de 7,08%
et 105.000 électeurs ont préféré le vote traditionnel, en personne ou par procuration, soit 9,39 %.
Les résultats de l’élection dans la circonscription
de la RDC sont les suivants :
- Nombre d’électeurs inscrits : 1.553
- Nombre de votants : 316
- Nombre de votes blancs : 8
- Nombre de bulletins et enveloppes nuls : 5
- Nombre de suffrages exprimés : 303
Suffrages obtenus, sièges obtenus et élus :
- Liste Union pour la France en RDC :
211 (2 sièges)
M. Jean-Claude Olivie
Mme Madeleine Katende Tshikunda
AP RDC A5H-2012:AP RDC A5H-2012 13/12/12 18:21 Page1
- Liste Français Solidaires en RDC : 92 (1 siège)
Mme Michelle Mwenetombwe
Les élections consulaires
et européennes
Jean-Pierre Guegan
L’année 2014 aura été pour les électeurs établis hors de France
une année riche en élections. En effet, en mai et juin il y a eu
trois rendez-vous avec les urnes.
Les élections des conseillers consulaires
Le nouveau dispositif de représentation des
Français de l’étranger est désormais constitué
de deux niveaux de représentants, en plus des
douze sénateurs et onze députés déjà existants.
106 / Impact n°6 / Septembre 2014
• 443 conseillers consulaires (auxquels s’ajoutent
68 délégués consulaires pour l’élection des 12 sénateurs) ;
• 90 conseillers à l’Assemblée des Français de
l’étranger (AFE), élus par les conseillers consulaires en leur sein.
442 conseillers consulaires ont été élus les 24 et
25 mai 2014 (aucun candidat ne s’étant présenté
dans la circonscription de Kiev, le siège prévu en
Ukraine n’a pas été pourvu).
Dans les 108 circonscriptions à scrutin de liste,
346 listes avaient été enregistrées ; dans les 21
circonscriptions à scrutin uninominal majoritaire, 98 candidats s’étaient présentés. Au total,
2.968 Françaises et Français étaient candidats à
ces élections consulaires.
Pour l’élection, 482 bureaux de vote ont été ouwww.impact.cd
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Les élections européennes
Les élections européennes ont eu lieu le dimanche 25 mai. Les 1.063.551 électeurs inscrits
sur les listes électorales consulaires (1.389 à
Kinshasa) ont pu se prononcer pour désigner les
représentants parlementaires de leur choix.
Tous les électeurs de l’étranger étaient rattachés
à la circonscription « Ile de France et Français
hors de France » qui présentait 31 listes de candidatures pour 15 des 74 sièges français au Parlement européen.
Pour en connaître les modalités, nous vous invitons à nous contacter.
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n°6 / Septembre
* 2014 / 107
Move Forward withImpact
Confidence
VIE PRATIQUE
Pas de lézard
au Gekko’s
Non, aucun souci, que de bonnes surprises
vous attendent en poussant la porte de ce
restaurant ou plus exactement de « ces »
restaurants.
C
onnue à l’origine pour ses seuls
sushis, l'offre se diversifie pour proposer un éventail de plats traditionnels et même innovants. Les cinq
chefs s’expriment en fonction de leur
talent. Avant de consulter les cartes, intéressons
nous à l’histoire. Comme toute aventure humaine, celle-ci est extraordinaire.
Une famille veut créer une affaire. Lui, Stephen
Beebee, sélect et avenant comme seuls savent
l’être les hôtes britanniques, est un gestionnaire.
Sa femme, Nathalie Blattner, a suivi une formation de haut niveau en restauration. Très attirée
par la nouvelle cuisine moléculaire et cryogénique, elle veut faire partager sa passion. Par où
commencer ? La réponse est donnée par Michael
Douglas. Vous avez bien lu, Michael Douglas
alias Gordon Gekko, dans le célèbre film «Wall
street». Le héros du film s’associe avec Charlie
Sheen pour vendre des sushis qu’ils fabriquent
Un Vodka Martini
au «shaker pas à la
cuillère»
Contacts
9, avenue Kauka, Gombe
Tél.: +(243) 97 00 02 681
+(243) 82 00 04 200
[email protected]
www.gordonsgekkos.com
à l’aide d’une machine mécanique actionnée
par une manivelle. Voilà l’idée recherchée. Il faut
proposer un concept de restauration rapide à
base de sushis. Le couple se précipite sur internet et veut retrouver cette machine. Elle existe
toujours, mais en vingt ans, elle a bien évolué. Entièrement électronique, elle fabrique, dans une
hygiène parfaite et à une vitesse surprenante, les
sushis que vous dégustez.
Le nom du restaurant rend hommage au personnage du film qui a tant contribué au démarrage
du projet. En Afrique, on trouve ces petits lézards
sympathiques appelés geckos. L’idée d’un jeu de
mot entre le personnage du film et le nom de ce
petit animal, est naturellement venue à l’esprit.
Ce sera le Gekko’s avec la silhouette du lézard
comme emblème.
Dans un premier temps, la réhabilitation des
locaux est une priorité. Plus de deux ans de tra-
Photos : Bernard Poudevigne
Le chef adjoint
Marvin Lattrez
Et bientôt
le Gordon's
108 / Impact n°6 / Septembre 2014
www.impact.cd
vaux sont nécessaires. En février 2013, le Gekko’s
ouvre ses portes et offre un service de livraison
à domicile. Le succès n’est pas tout de suite au
rendez-vous ; pour cela il faudra attendre octobre 2013. Mais cette période permet de roder
le concept et surtout de former les serveurs. Avec
le succès constaté, il convient d’offrir une alternative à la clientèle qui préfère une cuisine plus
traditionnelle. En janvier 2014, une deuxième
carte est alors proposée, c’est « la Terrasse ». Mais
poursuivons.
Bientôt, dans un cadre extrêmement raffiné,
Nathalie Blattner et son chef français, Marvin
Lattrez, vont recevoir les amateurs d’une cuisine
innovante et très haut de gamme. Rendez-vous
au Gordon’s, pour garder une référence au film,
avant la fin de cette année.
La quête de la perfection culinaire ne s'arrête
pas là. Dans une salle privative au décor étudié,
le nec plus ultra est déjà pensé. Ici, pas de carte,
vous prenez place pour un moment de pur plaisir
gustatif. Une variété de plats vous est servie avec
une sélection de vins. Vous vous laissez initier à
l’art de la table. Si vous le souhaitez, ce même service est disponible chez vous.
Impossible de conclure sans parler du mariage
des mets avec les vins. La carte proposée est
essentiellement composée de vins français et
sud-africains. Bientôt un tour du monde des
meilleurs vins sera présenté. Le personnel, formé
à cet effet, vous conseillera pour que votre soirée
soit vécue comme un moment de bonheur mais
aussi de découverte.
Que ce soit les sushis qui vous attirent ou l’envie
d’une cuisine gastronomique, poussez la porte
du Gekko’s et laissez vous surprendre.
Bernard Poudevigne
«Entrez» !
Stephen vous attend
vos idées
comme jamais
imaginées
...
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CARNET
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ils arri
ils partent...
- Premier conseiller : M. Jean-Charles ALLARD succède à M. Olivier HUOT, nommé
premier conseiller à l’ambassade de France à Bogota, en Colombie ;
- Attaché de coopération éducative : M. Patrick DEMOUGIN succède à M. Alain
MASETTO, nommé attaché de coopération à Kaboul en Afghanistan ;
- Proviseur du Lycée français René Descartes : Mme Emmanuelle DAILLANT succède
à M. Maurice DEMAILLY ;
- Conseiller de santé régional : le Dr Hélène DEGUI succède au Dr Jean-Pierre
Lamarque, nommé conseiller de santé à Dakar, au Sénégal ;
- Attaché de sécurité intérieure : le colonel Pierre GAZAN, colonel de gendarmerie à l’Etat-major de la gendarmerie de la région PACA, succèdera au colonel
Philippe LEDOUX ;
- Conseiller du ministre de la Fonction publique : M. Michel CHAMPREDON succède
à M. François BEHUE, nommé conseiller de coopération et d’action culturelle à
l’ambassade de France à Bangui en République centrafricaine ;
- Chef du projet SESAM : départ de M. Gérard Foucault suite à la clôture du
projet ;
- Chef de projet FSP Appui à la maîtrise et à l'usage du français en RDC :
départ de M. Johann Robinet, nommé attaché de coopération à l’ambassade de
France au Kenya ;
- Directeur-adjoint de l’Agence française de développement (AFD) :
M. Philippe Bosse succède à Mme Virginie LEROY ;
- Chargé du secteur privé à l’Agence française de développement (AFD) :
M. Marino PREKA succède à Mlle Clara ARNAUD.
110 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 111
COLIN DELFOSSE
AGENCE FRANÇAISE POUR LA PROMOTION
DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, L’ACCUEIL
ET LA MOBILITÉ INTERNATIONALE
PHOTOGRAPHIES
SORCIERS
DU RING
& CATCHEURS
CONGOLAIS
LES
Réussir vos études en France c’est d’abord faire confiance à Campus France,
pour vous aider à trouver votre formation et à préparer votre séjour.
QU’EST–CE QUE LE CAMPUS FRANCE RDC
Le Campus France RDC est l’interlocuteur unique des étudiants congolais et étrangers résidant sur le sol Congolais,
désireux de poursuivre leurs études supérieures en France.
Il est le point de départ de tout projet d'étude en France
et constitue un passage obligatoire pour effectuer toute
demande de pré-inscription auprès d'établissements d'enseignement supérieur français et réaliser les démarches
préalables au dépôt d'une demande de visa pour étude.
SES MISSIONS
> Il a pour mission d'informer les étudiants sur les études
en France et de les orienter dans leur recherche
> D'organiser la procédure Campus France, d'évaluer la
motivation des étudiants, leur projet pédagogique et la
cohérence entre leur parcours et leur projet d'étude.
> Il met à leur disposition les outils qui leurs permettront de
définir leur projet d'étude et de construire leur parcours de
réussite.
LE PUBLIC CIBLÉ
L'Espace Campus France de Kinshasa s'adresse à tous les
Congolais ou étrangers (non ressortissants de l'Union Eu112 / Impact n°6 / Septembre 2014
ropéenne) résidants en RD Congo (étudiants ou personnes
déjà en activité) qui :
> Souhaitent obtenir une pré inscription en France
> Ont déjà obtenu une pré inscription en France
> Sont des bacheliers français
> Sont boursiers
> Partent dans le cadre d'un échange
> Ont fait leur procédure Campus France dans un pays
étrangers et souhaitent demander un visa depuis la RD
Congo
DU 19 SEP > 18 OCT 2014
www.rdc.campusfrance.org
[email protected]
Tel :(+243)84 39 64 803
(+243)81 51 55 228
Facebook : rdccampusfrance
VERNISSAGE VENDREDI 19 SEPTEMBRE 2014
18H 30 // SALLE D’EXPOSITION
SPECTACLE DE CATCH // 20H // GRANDE HALLE
ENTRÉE LIBRE
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 113
pub
agb
114 / Impact n°6 / Septembre 2014
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Impact n°6 / Septembre 2014 / 115
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