Tapage 27

2 euros
JOURNAL BIMESTRIEL D’EXPRESSION LIBRE du nord seine-et-marne
Sale temps pour négocier…
Soulcié - Iconovox
Dans ce numéro d’ avril 2014
Il existe des pratiques politiques, ancrées
dans la réalité sociale, qui s’opposent radicalement au libéralisme (p 8 et 9) et
cette vérité simple fait peur aux grandes
féodalités de notre époque et à leurs dirigeants. Alors ils tentent de discréditer les
régimes populaires (p 12) et de récupérer l’héritage de ceux qui ont lutté pour
une république sociale : Jaurès d’abord
(p10 et 11) puis ceux qui ont perpétué
son engagement politique dans le CNR
(p 6 et 7). Ensuite, cette oligarchie de
pacotille - quand elle ne sombre pas
dans le ridicule des « Big magouilles »
(p 2) - met toute son énergie à affaiblir
la sécurité sociale (p 14), la recherche
(p 16), et à précariser la jeunesse (p17).
Heureusement, à Meaux, cette jeunesse
est de moins en moins crédule devant
les médias officiels et reste inventive et
dynamique (p 15).
#27
édito
Anniversaires
Il y a cent ans, Jaurès était
assassiné. Sa faute : avoir
compris avant les autres
que les contradictions du
capitalisme trouveraient
une tragique et inévitable
résolution dans une guerre
dévastatrice pour la classe
ouvrière. Les lecteurs de
Tapage ne manqueront pas
de venir à la réunion publique
du 31 mai à Chauconin pour
s’informer et débattre sur
l’œuvre toujours actuelle de
ce grand pacifiste.
Local
Des poubelles
dans le compost
> Page 3
Il y a soixante dix ans, le
15 mars 1944, le Conseil
National de la résistance
adoptait un programme
ambitieux. Son but : préparer
pour la société future un
modèle de justice sociale
fidèle à l’esprit de Jaurès
et ne pas hésiter pour cela
à évincer les féodalités
financières de la direction
de l’économie. Pendant les
trente ans qui ont suivi, les
citoyens français - protégés
par des services publics performants dont la précieuse
sécurité sociale - ont vu
leur niveau de vie s’améliorer.
Il y a un an, Shila Begum,
ouvrière du textile à Dacca
au Bangladesh, tentait de
survivre au milieu des
décombres d’un immeuble
vétuste dont l’effondrement
venait de causer la mort de
plus de mille autres salariés
des ateliers de confection.
Sa faute : travailler dans des
ateliers vétustes et dans des
conditions misérables pour
Dossier
D’ autres modèles
économiques
> Pages 6 à 13
des multinationales du textile
dont les dirigeants n’ont
qu’une obsession. Celle de
recréer de nouvelles féodalités
financières au dessus des
nations et défaire méthodiquement, par des réformes
adaptées, le programme du
CNR, bien trop conforme au
modèle de Jaurès, bien trop
avantageux pour les classes
populaires et donc
incompatible avec leur profit.
Local
Conférence-débat
JAURES, le 31 mai
> Page 5
> Retrouvez votre journal préféré, tous les deux mois sur : www.tapageameaux.fr
ça se passe près de chez vous
Machine de com’
La tragique
mésaventure
de l’équipe
des « Copé
boys »
Bygmalion est une société de
communication qui manifestement cultive un sens aigu de la
gratitude et de la fidélité amicale.
Mieux : l’équipe qui la constitue
semble développer un sens du
collectif, de l’entraide financière
et de la cohésion de classe qui
ferait pâlir d’envie une mutuelle
ouvrière du milieu du XIXeme
siècle. C’est un peu compliqué,
mais essayons de suivre, peuple
inculte et incorrigible dépensier
que nous sommes…
Cette société est donc créée en 2008
avec deux actionnaires , anciens collaborateurs de JFC, Guy Alves et Mastien Millot . Leur objectif est le rachat
de la société Ideepole, travaillant entre
autres pour des collectivités locales de
droite et des personnalités politiques,
dont JFC. Dès fin 2008 l’opération de
rachat est bouclée, et financée en grande partie par la holding « Paris Luxembourg Participation » dirigée par Emmanuel Limino, un ancien membre du
cabinet de JFC au budget.
Ensuite, il leur arrive ce qui frappe la
plupart des services publics qui n’écoutent que leur sens du devoir et l’intérêt
général. Malgré les huit millions d’euros
2
qu’ils
reçoivent de
l’UMP, l’organisation des
meetings pour
Sarkozy
et
quelques menus frais de
fonctionnement
annexes gonflent certes leur chiffre d’affaires à 3.5 millions
d’euros mais n’empêche pas un déficit
structurel de 1.3 million d’euros en
2012. Comble de malchance, la justice -qui ne connaît rien aux cruelles
nécessités de l’économie et à l’adaptation incontournable aux contraintes
inhérentes à la compétitivité concurrentielle – leur cherche des poux dans
la tête. Il y aurait eu un trop perçu de
la ville de St Maur de 250 000 euros
pour des guides commandés et non
réalisés et des soupçons de favoritisme à France télévisions ( Là on ne
comprend pas bien mais on va se renseigner).
faisait beaucoup
pour le reclassement des petites
mains de l’UMP.
Plusieurs stagiaires
du groupe à l’Assemblée Nationale
ou de la direction
de communication
du parti ont ainsi décroché
leur premier emploi chez Bygmalion,
comme consultants ou commerciaux.
Une « assistante chef de projet » du
Premier Cercle - la structure chargée
des donateurs les plus fortunés - a été
recrutée comme « chargée de communication ». Et parmi la trentaine de
salariés on retrouve une attachée de
presse de Michèle Tabarot, ancienne
présidente de la commission des affaires culturelles à l’Assemblée ou encore deux collaborateurs d’Yves Jego,
après son départ du secrétariat d’Etat
à l’outre-mer et enfin des anciens collègues des nombreux cabinets ministériels de …JFC.
Les conséquences sont tragiques. Bygmalion a dû se refaire une nouvelle
virginité au pied levé, si on peut dire,
avec un nouveau logo et un nouveau
site. Bastien Millot, chroniqueur expert
en médias sur Europe 1 et enseignant
à sciences-po a dû démissionner pour
prêter serment au barreau de Marseille. On dit même qu’il va consacrer
son prochain livre au « lynchage médiatique » en toute connaissance de
cause. Il avait pourtant laisser un souvenir ému au personnel de la mairie
de Meaux en 1995 lorsqu’il régnait en
valet zélé de JFC et menaçait les anciens de les « casser »
Erratum de dernière minute :
En fait Bygmalion ne recrute pas exclusivement à l’UMP. Quatre de ses
cadres avaient travaillé avec B Millot
à …France Television et un autre avait
déjà rendu sa carte depuis longtemps :
il s’agit de Amine Benalia-Brouch, ex
militant auvergnat d’origine algérienne
qui en 2009 était l’objet de la fameuse
et subtile remarque de Brice Hortefeux « Quand il y en a un, ça va. C’est
quand il y en a beaucoup qu’il y a des
problèmes » Une remarque finalement plutôt judicieuse si on l’applique
aux « Copé boys » …
Mais pire, en cette période de chômage généralisé, on peut légitimement
s’inquiéter de l’avenir d’une société qui
Sources : Médiapart
Note : Pour ne pas alourdir inutilement cet
article nous désignons notre bon maire
par ses initiales JFC. Qu’il veuille bien nous
en excuser.
ça se passe près de chez vous
Cultures
Des poubelles dans le compost…
En bordures des champs cultivés des alentours de Meaux on peut observer actuellement des tas de
«compost» d’une nature plutôt inquiétante… bienvenue au pays du TMB !!
La dernière inovation technologique
: le TRI-MECANO-BIOLOGIQUE
débarque en force dans les champs
de brie (et d’ailleurs…). Les professionnels du traitement des déchets
en sont très fiers ! Désormais, comme l’indique l’encart publicitaire extrait du site de Sita-France avec une
tonne de dechets on produit 350 kg
de compost !
On croit rêver… plutôt cauchemarder ! Ainsi on arriverait désormais
à extraire de nos poubelles, (après
avoir été écrasées dans le camionbenne puis manipulées au bulldozer)
chaque élément organique de tout le
reste et à en faire du compost ? sain ?
On aurait trouvé la formule magique
pour transformer nos poubelles en
engrais !! C’est vraiment nous prendre pour des crétins.
Comme l’explique le CNIID «En
France, le TMB est surtout «vendu»
comme un moyen de produire du
compost. Or, cette pratique entraîne
des effets dommageables sur l’environnement notamment la dissémination dans nos sols de contaminants contenus dans les poubelles en
mélange».
Pourtant, cette pratique est encadrée
par la loi : La norme française (NFU
44051) dite « de qualité » autorise
même pour chaque mètre cube de
compost produit : 2,7 kg de plastiques et 5 kg de verres et métaux. Ce
sont donc tous ces contaminants qui
s’accumulent dans les sols dédiés à
la production de notre alimentation.
Cette norme est bien plus laxiste que
la norme européenne qui refuse que
les composts issus de TMB sortent
du statut de déchets. La seule filière
possible est la valorisation en biogaz puis l’enfouissement en décharge
mais en aucun cas servir d’engrais
pour les terres cultivables.
+d’info
http://jeveuxmonbacbio.org
http://www.cniid.org
http://www.sita.fr/solutions/valoriser-les-biodechets/
Gros plan d’un tas de «compost»,
prise en mars 2014 à quelques mêtres de la Tombe Militaire de Charles Peguy, entre Chauconin-Neufmontiers et Villeroy
Sculptures
Marcel Creac’h expose
A Coulommiers
Du19 avril au 4 mai, salle «le Valentin», Parc des
capucins. tous les jours sauf mardi de 14h à 19h
A La Ferté-sous-Jouarre
Les 10 et 11 mai,
Centre d’Art de l’Ancienne Synagogue
Samedi 10 de 15h à 18h - Dimanche 11 de 10h à
13h et 15h à 18h ET Galerie L’Atelier, 20 bis rue du
Gal Leclerc, Samedi 10 de 14h à 19h - Dimanche
de 11h à 18h
3
ça se passe près de chez vous
Crayon
L’œuvre de Degas est immense :
peintures, sculptures, fusains…
mais c’est peut-être dans ses
dessins qu’il manifeste sa plus
grande faculté de saisir l’humain
dans sa parfaite simplicité.
Edgar Degas. Femme nue, assise
par terre, se peignant.
Entre 1886 et 1890 pastel et fusain
sur papier vergé beige ; Musée
d’Orsay, Paris
Festival d’expressions artistiques
Beau comme un printemps
plein de paroles
Comme chaque année au milieu du printemps, le parc Culturel de
Rentilly, propose le «festival PrinTemps de paroles». Un florilège de
talents issus des «arts de la rue» : artistes, comédiens, musiciens,
danseurs, acrobates, circassiens, vont mettre le territoire de Marneet-Gondoire en ébullition du 19 au 25 mai 2014. Extraits :
EN AVANT-GOÛT :
Ça cartonne à Washington
Spectacle de cirque atypique et burlesque, mené
par un duo dont la virtuosité n’a d’égale que la
décontraction,
> Samedi 17 mai, au centre commercial Bay 2,
place des rencontres, à 14h30 et 16h30
Le cri du vin/chansonsàboire
une promenade vagabonde, voluptueuse et joyeuse au pays du vin et de l’ivresse que vous convie le
SAMU. Maintes jolies choses, au cours des siècles,
ont été écrites sur ce fabuleux nectar.
> Samedi 24 mai, 19h40 - Dimanche 25 :
12h15 et 17h55
LE WEEK-END DES 23 ET 24 MAI :
Parc culturel de Rentilly : (selection aléatoire, de
nombreux autres spectacles seront proposés ! )
Entre serre et jardin/théatredejardin
En voilà deux que tout oppose : leurs apparences,
leurs caractères et leurs buts… L’un se prélasse
tandis que l’autre s’active, l’outil favori de l’un est
le hamac quand l’autre s’affaire dans un lancer de
fourche spectaculaire…
> Samedi 24 mai, 14h30 - Dimanche 25 : 16h30
Aux p’tits oignons/comédie sans
paroles
Quand une femme, belle et désirable mais désespérément seule, se lance à la recherche du grand
Amour et dans une préparation culinaires « aux
p’tits oignons », il vaut mieux rester prudent…
> Samedi 24 mai, 17h40 - Dimanche 25 :
12h15 et 17h55
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Idéaux Beurre noir/boxecircus
Un ring, une fille, cinq gars, des cordes et de
l’acier ; a priori le rituel d’un combat... sauf qu’il
est immédiatement détourné par un présentateur
diabolique…
Toute la programmation :
http://www.marneetgondoire.fr/
parc-culturel-de-rentilly/festivalprintemps-de-paroles-858.html
> Samedi 24 mai, 16h35 - Dimanche 25 :
17h35
Métamorf’Ose/théatrederêve
Métamorf ’Ose est une pièce de théâtre vocal et
corporel dans laquelle deux comédiennes-chanteuses créent un univers onirique et décalé en
perpétuelle transformation.
> Samedi 24 mai, 15h20 et 17h30 - Dimanche
25 : 12h45 et 16h05
Mobile Homme/aérien
Ne ratez pas ce spectacle déambulatoire et
aérien, attraction aérienne inédite de grande
envergure intégrant prouesse, arts plastiques et
musique.
> Dimanche 25 : 18h30
ça se passe près de chez vous
Débat-conférence public
JAURES aujourd’hui
Samedi 31mai
> à Chauconin-Neufmontiers,
Salle de la convivialité (face Mairie)
En présence de :
J F. TALON . Agrégé d’histoire .
B. TEPER. Président du Réseau
d’Education Populaire
Trois séances-débat et une
projection d’un court-métrage
sur la vie de Jean Jaurès.
- Buvette (boissons- sandwichs)
Séance 1 : 14h – 15h30:
Jaurès et la nation, l’armée, la
guerre. - Animateur : J F TALON
Réunion publique organisée par le journal Tapage,
pour s’informer et débattre sur l’œuvre de Jaurès à
l’occasion du centième anniversaire de sa mort.
Séance 2 : 15h 45 –17h 15:
Jaurès et l’éducation, la laïcité, la culture - Animateur :
B TEPER
Séance 3 : 18h – 19h30
Le modèle de Jaurès : la République sociale. Jaurès et Marx.
- Animateurs : B TEPER. J F TALON
Film : 17h30 – 17h 50 (durée 20 min)
Hommage à Jean Jaurès de
Jean LODS (1959)
(Ciné-archives, fonds audiovisuel du
PCF- Mouvement ouvrier et démocratique)
Inscription : sur place : 5 euros
les 3 séances-débats.
Payée avant le 25 mai, l’inscription
vous donnera droit aux trois séances-débat, à un en-cas, une boisson
(sans alcool) et à 5 anciens numéros
du journal Tapage
Renseignements complémentaires et inscription à : [email protected]
Chèques à l’ordre de APPEL, 10, rue de la Loi 77230 Montgé-en-Goële, avec votre adresse mail et/ou votre téléphone.
AGENDA avril>mai
> Sorties natures Boissise-le-Roi
Le mercredi 23 avril à l’Espace Naturel Sensible de la Prairie Malécot, découverte des fleurs sauvages. Par Seine-etMarne environnement - Animateur : Guillaume Larregle
> Lectures Feuilletons les jardins
Dimanche 27 avril, 11h, Orangerie. Parc Culturel de Rentilly
Venez écouter une lecture de textes tout droit sortis des livres disponibles au centre de ressources documentaires,
mis en voix par la comédienne Odile Billard. Ces mots parlent de botanique, racontent des histoires d’arbres et de jardins. Ce rendez-vous est à partager en famille.Vous pourrez ensuite flâner dans l’Orangerie et dans parc pour profiter
des nombreux ouvrages passionnants qui s’y trouvent.
> Cinéma Les jours heureux
Dimanche 27 avril, 18h, salle polyvalente de Quincy-Voisins
Film documentaire de Gilles Perret « quand l’utopie des résistants devint réalité ». Entre mai 1943 et mars 1944, sur le territoire
français encore occupé, 16 hommes appartenant à tous les partis politiques, tous les syndicats et tous les mouvements de résistance vont changer durablement le visage de la France en rédigeant le programme du Conseil National de la Résistance.
> Musiques Du profane au sacré
Le mardi 13 mai à 20h45 à L’église de Lognes. F.J. Haydn
Retour de la famille Arties à l’Église de Lognes avec un récital imaginé spécialement pour la singularité du lieu. François
Castang, récitant, accompagne la famille pour interpréter Les sept dernières paroles du Christ en croix.
> Cirque en famille Le bal des intouchables
Vendredi 16 mai 20h45, sam 17 mai 17h, dim 18 mai 17h, La Ferme du Buisson, Noisiel
Ils sont douze, acrobates et musiciens, suspendus entre ciel et terre pour cette pièce de cirque qui en se dégageant des
images convenues, fait l’éloge de la prouesse choisie et de la poésie du geste lent.
5
Dossier : d’autres modèles économiques
Résistance
Buster Salgan
Le CNR
Le 27 mai 1943, en pleine
occupation allemande, au
premier étage d’une maison
parisienne, une vingtaine de
résistants se réunissent pour
constituer, sous l’égide de Jean
Moulin, le C.N.R. (Conseil
National de la Résistance)
Soixante dix ans plus tard,
leur action reste un modèle de
courage individuel et de rigueur
politique
Évoquer la période de la résistance
est un exercice toujours salutaire mais
périlleux. Salutaire, évidemment, parce
qu’il remet en lumière l’action d’hommes et de femmes qui, dans un contexte très sombre où tout semblait perdu,
ont su dire non à l’ignominie du régime
collaborationniste de Vichy mais aussi
périlleux car il met en scène une certaine mythologie souvent entretenue
pour camoufler la réalité historique.
Essayons ici, très modestement, de
relativiser deux approches très répandues de cette période.
Tout d’abord, il n’est pas rare de lire
que la défaite de 1940 est due à l’incurie des dirigeants de cette époque,
incapables d’anticiper politiquement et
militairement la menace allemande. En
fait il faut rappeler, à la suite des ouvrages de Marc Bloch ou d’Annie LacroixRiz, que les oligarques des années 30
vantaient la réussite économique de
l’Allemagne depuis l’arrivée d’Hitler au
pouvoir. Ces mêmes fameuses « cent
familles » exécraient le modèle français surtout depuis les avancées sociales du Front Populaire. Car les luttes
sociales et les grandes grèves de 1936
avaient obligé les classes dirigeantes dans un rapport de forces initié par la
6
base - à des concessions importantes
qui mettaient les profits capitalistes en
péril. Cette disposition d’esprit, résumée dans la célèbre phrase « Mieux
vaut Hitler que le Front Populaire »
explique en partie le « choix de la
défaite » de nos élites et ses conséquences logiques : la drôle de guerre,
la débâcle de 1940, les villes ouvertes,
l’armistice, les pleins pouvoirs à Pétain et la collaboration dont l’intérêt
immédiat se satisfaisait parfaitement
d’une classe ouvrière écrasée.
Ensuite, un deuxième mythe voudrait
que la résistance ait été politiquement
homogène, républicaine par principe,
impulsée et pilotée d’en haut, principalement depuis Londres par le général
De Gaulle. En réalité, à ses débuts, la
résistance est complètement hétérogène. Elle est faite d’initiatives courageuses mais politiquement disparates
et désorganisées. L’Histoire a retenu
l’appel du 18 juin 1940 du général de
Gaulle mais peu de gens savent que le
17 juin (la veille) Daniel Cordier lance
un appel à résister à Pau, Edmond Michelet fait de même à Brive, Germaine
Tillion à Paris, le communiste Charles
Tillon à Bordeaux etc. Et le principal rôle de Jean Moulin - après avoir
convaincu de Gaulle de la nécessité
de réunir le peuple français dans une
perspective républicaine (ce qui n’était
pas du tout évident) - a été justement
d’unifier et de « pacifier » les antagonismes naturels des différentes composantes de la résistance française.
Le C.N.R. constitué
En janvier 1942 Jean Moulin obtient
donc que les trois grands mouvements
de résistance de la zone sud reconnaissent en De Gaulle le chef militaire
relativement incontesté de la France
Combattante. On y trouve le mouvement « Libération » composé de
socialistes, et « Francs- tireurs », celui
des résistants communistes, mais aussi
le mouvement « Combat », politiquement à droite, qui rassemble un certain milieu intellectuel et universitaire
de « Libération nationale » et des militaires de « Liberté ». Le 27 mai 1943,
en présence donc des représentants
de ces mouvements, de divers partis
politiques et syndicats, Jean Moulin
préside la première réunion qui va
donner naissance au Conseil National
de la Résistance.
Il est difficile d’imaginer l’ambiance qui
devait baigner une telle confrontation
entre ces dix-neuf personnes au 1er
étage de la maison du 48 avenue du
Four à Paris. La moindre indiscrétion
- sans parler même de trahison - de
l’un entre eux signifiait, pour les autres,
la certitude d’une arrestation suivie de
Dossier : d’autres modèles économiques
torture et de mort (comme l’a cruellement montré la fin tragique de Jean
Moulin arrêté moins d’un mois plus
tard, le 21 juin1943 à Caluire) Mais ce
qui est frappant et appelle de notre part
une certaine admiration, c’est, dans un
tel contexte, la capacité qu’ont eue ces
hommes à envisager une construction
politique générale valable pour la suite
c’est-à-dire pour les générations futures qui auraient la chance de vivre
dans l’après-guerre.Ainsi le texte qu’ils
adoptent ce jour là à l’unanimité ne se
résume pas à un plan d’action pour libérer le territoire ; il prévoit de rendre
la parole au peuple français, de rétablir
les libertés républicaines dans un État
de justice sociale qui aura le sens de la
grandeur, et de travailler avec les Alliés
à une nouvelle coopération internationale dans un monde où la France aura
regagné son prestige.
«
lnstauration d’une véritable
démocratie économique et
sociale impliquant l’éviction
des grandes féodalités
financières de la direction de
l’économie…
«
Le programme du C.N.R.
Fort heureusement cette unité péniblement acquise va survivre à l’arrestation de Jean Moulin et l’outil qu’il a créé
va se perfectionner jusqu’à la veille de
la libération pour finalement adopter
(dans la clandestinité, le 15 mars 1944
à Paris) le programme du Conseil National de la Résistance intitulé, dans sa
première édition clandestine :« Les
jours heureux ». Peu de textes peuvent se prévaloir de réunir en aussi
peu de pages les grands principes de
la République Sociale théorisée quarante ans plus tôt par Jaurès. Et notre
classe politique - occupée à caresser
les multinationales dans le sens du poil
compétitif pour quémander une ébauche de croissance - serait bien inspirée
d’en relire quelques paragraphes pour
retrouver des repères idéologiques.
Parmi les mesures d’urgence à appli-
quer dès la libération du territoire on
trouve en effet : l’instauration d’une
véritable démocratie économique et
sociale impliquant l’éviction des grandes féodalités financières de la direction de l’économie, le retour à la nation des grands moyens de production,
des compagnies d’assurances et des
banques, le droit au travail et la garantie d’un niveau de salaire qui assure à
chaque travailleur et à sa famille la sécurité, la dignité et la possibilité d’une
vie pleinement humaine et, enfin, un
plan complet de sécurité sociale avec
gestion des représentants et de l’État.
Un programme appliqué ?
Il faut d’abord remarquer que ce programme nous a évité l’Amgot (le gouvernement militaire allié des territoires occupés) qui aurait mis de fait la
France sous protectorat américain. Ensuite, au risque de faire des simplifications excessives, on peut estimer que
l’histoire de la France d’après guerre
se scinde en deux grandes périodes. Il
y a celle des fameuses « trente glorieuses » qui a vu l’application partielle du
programme du C.N.R. et la suite que
l’on connaît avec sa remise en cause
progressive sous l’égide du nouveau
dogme du libéralisme économique.
Ainsi La Poste, la S.N.C.F., l’E.D.F., l’Hôpital public, la sécurité sociale et même
l’école… Tous ces services ont vu leur
mode d’organisation passer d’une
conception collective et socialisée
à une conception « marchandisée »
c’est-à-dire ouverte aux marchés et
aux opérateurs privés.
Cette évolution, justifiée économiquement par la concurrence libre et non
faussée, et appuyée juridiquement par
les traités européens de libre échange n’est d’ailleurs pas spécifique à la
France. On la retrouve par exemple en
Grande-Bretagne où elle a été menée
de main de fer par M.Thatcher comme
le montre le dernier film de Ken Loach
« L’esprit de 45 » qui complète utilement celui de G. Perret : « Les jours
heureux ».
Le C.N.R. aujourd’hui
Il est toujours délicat de vouloir transposer une situation historique donnée
dans le contexte complètement diffé-
rent de notre actualité politique, et la
nouvelle résistance qu’il faut engager
envers les nouvelles féodalités économiques et financières est d’une autre
nature. Nous ne risquons plus directement notre vie et le cadre juridique en
vigueur dans nos sociétés occidentales
respecte la liberté de conscience, le
multipartisme et le droit à l’expression
libre. Mais ce sont les classes dirigeantes elles-mêmes, en le prenant comme
ennemi principal, qui soulignent la pertinence toujours actuelle du programme du C.N.R. de 1944.
Il suffit de relire cet entretien trop
connu de l’ancien N°2 du M.E.D.E.F.
(Denis Kessler, « Challenge », oct.
2007) dont Raymond Aubrac a dit
-non sans humour -- qu’il a dû être
fabriqué par la gauche radicale tant il
est caricatural : « …L’architecture de
la Libération s’identifie à des conquêtes sociales qui continuent à marquer
la société française : la sécurité sociale,
la nationalisation de l’énergie, la droit
de vote des femmes, les nouveaux
pouvoirs pour le monde du travail…
Elle est à l’évidence complètement dépassée, inefficace et datée. La France
doit s’adapter aux exigences internationales nouvelles …».
Il est aussi légitime de remarquer que
la période que nous traversons présente des analogies troublantes avec
d’autres périodes sombres de notre
histoire. Sur le plan économique, les
conséquences de différentes crises ont
amené du chômage de masse et de la
pauvreté généralisée. Sur le plan politique, une certaine corruption a gagné
nos dirigeants. Et sur le plan « idéologique » on peut être troublé par la référence permanente au modèle allemand
pour imposer des régressions sociales
à l’ensemble de la classe ouvrière.
Mais pour rester résolument optimiste, laissons la parole à Jean Jaurès :
« …Il y a dans notre France, sur les
problèmes vitaux, une inertie de la
pensée, une somnolence de l’esprit qui
nous exposent à toutes les surprises
jusqu’au jour où se produisent ces réveils qui viennent heureusement quoique à de trop longs intervalles, sauver
notre pays …».
7
Dossier : d’autres modèles économiques
Paix
Jaurès, c’est pas
une station de
métro ?
Manuella Fuster
Jean Jaurès est, pour beaucoup d’entre
nous, un nom de rue ou d’école. Mais peu
de gens savent à quel point il est connu
dans le monde entier pour avoir donné un
cadre juridique de référence à une composante essentielle de la liberté individuelle :
la liberté de conscience.
En1905, la loi de séparation des
églises et de l’État a permis à chacun d’exister avec ses croyances, ses
valeurs, sa religion ou sa non-religion, et d’avoir sa place de citoyen
en s’exprimant à l’abri des pressions
exercées par le groupe (ethnique ou
religieux) auquel il appartient, volontairement ou non.
Nous qui pensons, depuis plus d’un
siècle, avec la protection de cette loi,
nous avons oublié le calvaire que vivent ceux qui ne l’ont pas. Pour s’en
convaincre, il suffit de remarquer
que, lorsque les pressions religieuses
sont liberticides et écrasantes, les
populations réinventent localement
une forme de laïcité pour retrouver
la vie en commun.
Ainsi, à Belfast, Betty Williams et
Mairead Corrigan créèrent le mouvement « Peace People » (vers 1976)
où catholiques et protestants manifestaient ensemble contre la violence et pour une vie de paix pour
leurs enfants. En Israël a été fondé,
en 1970, un village sur une colline
entre Jérusalem et Tel-Aviv : « Neve
Shalom-Wahat Al Salam » (Oasis
de Paix) où musulmans, chrétiens
et juifs (soixante familles environ
et trois-cents sur liste d’attente)
8
décident de vivre ensemble. Depuis
1979 crèches et écoles mixtes sont
la base du dialogue et du respect
mutuel. Plus de quarante-cinq-mille
jeunes et cinq-mille adultes ont pris
part à des rencontres organisées
dans ce village. On peut aussi évoquer Sylvie Berkowitsch qui dirige le
département de la coexistence pour
les jeunes (une centaine de cinq à
seize ans) au Jérusalem International
Y.M.C.A. Des enfants israéliens, juifs,
chrétiens, musulmans, jordaniens, palestiniens chantent dans une chorale
et participent à des ateliers d’art.
Une quarantaine d’adolescents (filles
et garçons) dialoguent en groupes
(quinze à vingt séances de deux heures par an pendant deux ans)
Tous ces projets ont été imaginés
et portés par des gens qui ont pris
beaucoup de risques pour refuser
que leurs enfants et ceux des autres
périssent dans des violences qu’engendrent les guerres. Comme on le
voit, la religion n’est pas un obstacle
à la vie en commun, c’est seulement
l’intérêt économique ou politique
(ou les deux) qui s’appuient sur la
séparation des communautés.
De nombreux êtres humains rêvent de la France pour la protection
qu’elle assure aux croyants de toutes
sortes. Ici pas de persécution, d’interdiction, pas de rejet à priori quelle
que soit la conviction, religieuse ou
non. Les femmes sont nombreuses à
souffrir des dictats religieux et sexistes leur refusant le libre arbitre et
auxquels elles ne peuvent échapper
faute de lois qui les protègent. Ces
femmes rêvent aussi de libertés : de
penser, d’apprendre, de choisir sa
vie.
Ceux qui, avides d’argent et de pouvoir, n’œuvrent que pour se faciliter
la tâche et détrousser tant les peuples que la planète, ceux là ont un
rêve : « …quand la terre sera redevenue plate et que l’on pourra interpréter les brouillards qui l’entourent,
à notre façon chacun sera redevenu
docile et craintif, le parfait esclave à
notre service …» (cf. Jaume Cabre
dans son livre Confiteor)
N’oublions pas ce que nous devons à
Jaurès. Avant de revendiquer la liberté d’afficher sa différence coûte que
coûte et où que ce soit, souvenons
nous que la liberté de conscience est
la première des libertés, c’est aussi
celle qui permet la solidarité, l’union
et donc la force de s’opposer. Le
droit à la différence n’est définitivement pas la différence des droits.
Dossier : d’autres modèles économiques
Handicap
Hugues Aurade
Quand social et solidaire prend tout
son sens
Le chômage frappe deux fois
plus les personnes en situation
de handicap que l’ensemble de
la population active. 21%
d’entre elles sont à la
recherche d’un emploi.
C’est dire l’enjeu face auquel
notre société se trouve. Et dans
un monde où la calculette sert
de cerveau à bien des
managers - et des politiques,
mais c’est une autre histoire il est intéressant de s’arrêter
quelques instants, sur une
initiative intelligente et qui
fonctionne depuis 32 ans !
J’ai découvert ce petit bijou d’entreprise à l’occasion de la remise des
4èmes Trophées du C.C.A.H. (Comité national Coordination Action
Handicap) Le C.C.A.H. est une association créée il y a plus de 40 ans par
les caisses de retraite et qui réunit
aujourd’hui les principaux groupes
de protection sociale, des mutuelles, des comités d’entreprise et des
associations nationales du handicap.
La finalité du C.C.A.H. est de faire
évoluer le regard porté sur le handicap et les mentalités à son sujet.
Pour cela, entre autres activités, il
finance des projets innovants d’établissements, de services ou de solutions technologiques, qui facilitent la
vie quotidienne des personnes handicapées et concourent à façonner
une société inclusive conforme aux
obligations que la France s’est donné
en ratifiant en 2010 la convention de
l’O.N.U. relative aux droits des personnes handicapées. Ce sont ainsi
quinze millions d’euros par an qui
sont mobilisés à cette fin. Les Trophées du C.C.A.H. servent à mettre
en avant quelques-uns des projets
qu’il a accompagnés. C’est là que
l’entreprise Artibois pointe le bout
de son nez.
Comme son nom le laisse entendre,
c’est une menuiserie.Vingt-neuf salariés dont quatorze sont en situation
de handicap et d’exclusion liée à des
difficultés psychiques. Oui, oui, vous
avez bien lu : psychique ! Vous en
doutiez ? Mais non, mais non, allons.
Si les déficiences psychiques font encore peur du fait de représentations
erronées véhiculées le plus souvent
par les médias, elles n’empêchent pas
toujours de travailler, surtout lorsque
l’entreprise choisit de s’adapter.
Et c’est ce que fait Artibois.
cette entreprise a des statuts associatifs, c’est-à-dire que son activité
est à but non lucratif et s’inscrit dans
le cadre de l’économie sociale et solidaire. Ajoutons enfin que, comme
sept-cent-vingt autres entreprises en
France dont six en Seine-et-Marne,
elle bénéficie d’un agrément « entreprise adaptée » qui lui permet de
percevoir une aide financière pour
chaque poste de travailleur handicapé créé. C’est un cercle vertueux :
cette aide au poste est inférieure au
salaire versé qui lui-même ne peut
pas être inférieur au S.M.I.C. et est
soumis à cotisations sociales, finançant donc la sécurité sociale d’une
part, le travailleur handicapé n’a plus
besoin de percevoir l’Allocation aux
Adultes Handicapés (A.A.H.) d’autre
part.
Comment ? L’entreprise utilise le
compagnonnage pour accompagner
la formation des travailleurs handicapés. Chaque menuisier redonne
ainsi confiance à un aide-menuisier,
l’aide à sortir de son isolement et lui
apprend à réaliser les mêmes tâches
que les autres salariés. C’est exemplaire, ça marche depuis 32 ans ! Il
suffit de s’y mettre. Remarquons que
Artibois méritait bien son trophée
remis dans la catégorie « Changer
les pratiques ».
Bravo à eux !
Pour en savoir plus :
www.ccah.fr
www.artibois.asso.fr
www.unea.fr
9
Dossier : d’autres modèles économiques
Phare
Si Jaures m’était conté
Le 31 mai prochain, l’équipe de Tapage organise à Chauconin-Neufmontiers une réunion publique pour évoquer l’action
politique de Jaurès, à l’occasion du centième anniversaire de
sa mort le 31 juillet 1914. Nous comptons sur votre présence
nombreuse, tant il serait désolant de laisser cette commémoration aux mains de ceux qui n’ont de cesse de mettre à mal
les principes pour lesquels Jaurès s’est battu toute sa vie : ceux
de la République Sociale. Quelques éléments de réflexion pour
aborder cette journée…
Nul doute que de très nombreuses
commémorations officielles de la
mort de Jaurès seront organisées
dans les mois qui vont venir. Jaurès
est en effet incontournable dans
l’espace par ailleurs assez limité
des grandes références historiques
de notre pays. Jaurès a été « panthéonisé » Au sens strict du terme
ce fut en 1924 lors d’une cérémonie d’ailleurs très contestée. Et dans
la plupart des esprits républicains,
Jaurès reste figé, statufié, comme le
grand pacifiste de 1914, le fondateur
du journal l’ « Humanité », l’architecte de la loi de séparation de 1905
et l’unificateur de socialistes.
Mais le risque, dans cette quasi sacralisation consensuelle de l’action
et l’œuvre de Jaurès, c’est de camou-
fler une entreprise de récupération
et de neutralisation de sa pensée qui
tente de la confiner dans un musée
sympathique mais révolu de notre
histoire nationale. Car au contraire, il
est tout à fait légitime de croire que
la pensée de Jaurès peut être une
sorte de phare pour éclairer notre
période et éviter de se perdre dans
la crise actuelle. En effet, pour tout
citoyen épris de justice sociale, un
triste constat s’impose : le modèle
communiste semble sérieusement
plombé par ses avatars soviétique et
chinois, le modèle social-démocrate
est en pleine contradiction suite aux
crises à répétition et le modèle keynesien des trente glorieuses apparaît
difficilement reproductible car lié à
des circonstances historiques très
spécifiques (l’après guerre). Il paraît
donc naturel de se tourner vers celui que Jaurès
nous a légué, autrement
dit : la république sociale.
Rappelons en rapidement
les principales orientations. La république sociale c’est d’abord les
grands principes républicains. Puis la prise en
compte des ruptures
nécessaires avec l’ordre
dominant – l’éviction des
grandes féodalités de la
direction de l’économie,
comme l’écrira trente ans
10
plus tard le CNR - et les exigences
indispensables qui y sont liées. Enfin
une stratégie, l’ « évolution révolutionnaire » qui implique de traiter
tous les problèmes de front en évitant la prééminence surplombante
d’une question particulière. C’est la
globalisation des luttes et la liaison
constante du combat laïque et du
combat social.
Samedi 31 mai, en compagnie de J F
Talon, agrégé d’histoire et spécialiste
du XIXeme siècle et de B Teper qui
vient d’écrire deux livres sur Jaurès,
nous aurons juste le temps d’évoquer les grands axes de cette œuvre
magistrale tant l’étendue des domaines qu’elle recouvre est vaste. Car
Jaurès était à la fois un philosophe
enseignant, un historien de la Révolution Française, un homme de terrain
auprès des mineurs de Carmaux, un
député engagé pour la laïcité, le droit
des femmes et les retraites ouvrières et paysannes, un journaliste, un
critique littéraire et un critique d’art
etc…On est étourdi devant une
telle profusion de textes toujours
exigeants, érudits et engagés. Chers
lecteurs, venez vous y confronter,
mais sachez par avance que vous
n’en sortirez pas indemnes…
Dossier : d’autres modèles économiques
Jaurès en paroles…
L’armée nouvelle (1910)
…Quand un syndicaliste révolutionnaire s’écrie au récent congrès de Toulouse « À bas les patries ! Vive la
patrie universelle ! » il n’appelle pas de ses vœux la disparition, l’extinction des patries dans une médiocrité
immense, où les caractères et les esprits perdraient leur relief et leur couleur.
Encore moins appelle-t-il de ses vœux l’absorption des patries dans une énorme servitude, la domestication
de toutes les patries par la patrie la plus brutale, et l’unification humaine par l’unité d’un militarisme colossal. En criant « À bas les patries ! » il crie « À bas l’égoïsme et l’antagonisme des patries, À bas les préjugés
chauvins et les haines aveugles ! À bas les guerres fratricides, À bas les patries d’oppression et de destruction » Il appelle à plein cœur l’Universelle patrie des travailleurs libres, des nations indépendantes et amies.
Discours parlementaire
du 7 mars 1895
…Et voilà comment, Messieurs, vous
aboutissez à cette double contradiction :
d’une part, tandis que tous les peuples et
tous les gouvernements veulent la paix,
malgré tous les congrès de philanthropie internationale, la guerre peut naître
toujours d’un hasard toujours possible ;
et d’autre part, alors que s’est développé
partout l’esprit de démocratie et de
liberté, se développent aussi les grands
organismes militaires qui, au jugement des
penseurs républicains qui ont fait doctrine,
sont toujours un péril chronique pour la
liberté des démocraties.Toujours votre
société violente et chaotique, même quand
elle veut la paix, même quand elle est à
l’état d’apparent repos, porte en elle la
guerre, comme la nuée porte l’orage.
Messieurs, il n’y a qu’un moyen d’abolir
enfin la guerre entre les peuples, c’est
d’abolir la guerre entre les individus,
c’est d’abolir la guerre économique, le
désordre de la société présente, c’est de
substituer à la lutte universelle pour la
vie - qui aboutit à la lutte universelle sur
les champs de bataille - un régime de
concorde sociale et d‘unité.
Socialisme et liberté (1898)
…Il ne faut pas s’imaginer que le mot de grève
générale a une vertu magique et que la grève
générale elle-même a une efficacité absolue et
inconditionnée. La grève générale est pratique ou
chimérique, utile ou funeste, suivant les conditions où
elle se produit, la méthode qu’elle emploie et le but
qu’elle se propose. Il y a, à mon sens, trois conditions
indispensables pour qu’une grève générale puisse
être utile : il faut que l’objet en vue duquel elle est
déclarée passionne réellement, profondément la
classe ouvrière. Il faut qu’une grande partie de
l’opinion soit préparée à reconnaître la légitimité
de cet objet. Il faut que la grève générale
n’apparaisse point comme un déguisement de la
violence et qu’elle soit simplement l’exercice du droit
légal de grève, mais plus systématique et plus vaste,
et avec un caractère de classe plus marqué.
Laïcité et république sociale
…Ouvriers de cette cité, ouvriers de la France
républicaine, vous ne préparerez l’avenir, vous
n’affranchirez votre classe que par l’école laïque,
par l’école de la république et de la raison..
11
Dossier : d’autres modèles économiques
Vénézuela :
Desiré Goghnot
Ni « fascisme rouge »
ni « félicité suprême »
Où l’on tente d’évoquer le Venezuela et ses
émeutes en contournant le discours dominant
(Maduro = Pol Pot), et sans tomber dans le
dithyrambe plein de majuscules d’un régime
qui a inventé le « Sous-Ministère de la Félicité
Sociale Suprême du Peuple Vénézuélien ».
Les faits
Des manifestations anti-gouvernementales ont lieu depuis plusieurs semaines au Venezuela. Le bilan est lourd
(trente-trois morts, de tous bords)
et l’on signale des cas de torture. Le
mécontentement part d’un constat
indéniable : une très forte criminalité,
une économie qui n’a pas su tirer un
profit durable de la manne pétrolière, la corruption. On proteste aussi
contre le style parfois musclé de Maduro : ainsi, le pouvoir a récemment
encadré (militairement) le pillage des
supermarchés Daka, accusés (à juste
titre, mais quand même) de pratiquer
des prix outranciers.
D’autres faits (généralement
oubliés par la presse)
Si l’on s’en tient à la presse européenne, l’affaire est entendue : Chavez et son disciple Maduro sont des
dictateurs. Étrange réputation pour
des dirigeants sur-légitimes (rappelons entre autres les six référendums
organisés par Chavez et toutes les
élections gagnées, ainsi que la - courte mais réelle - victoire de Maduro
aux élections de 2013, et les récentes
élections régionales, véritable plébiscite pour le pouvoir en place qui fait
76% des voix !) Chavez, au même titre que Lula au Brésil, a sorti de la
misère des millions de Vénézuéliens,
12
et son successeur bénéfice toujours
d’un soutien massif de la population,
comme en témoignent les manifestations pro-gouvernementales largement suivies.
Émeutes
En 2002, un coup d’état est organisé
par les opposants à Chavez. Il est soutenu et instantanément reconnu par
les États-Unis (en la personne de l’ambassadeur Charles Shapiro) bien qu’il
ne dure que quarante-sept heures. La
situation actuelle rappelle cette époque : les meneurs des manifestations
sont les mêmes (Leopoldo López, le
plus connu, avait appuyé le putsch)
les E.U. soutiennent (trois diplomates
américains ont été expulsés récemment pour avoir coordonné des manifestations). Il y a cependant bel et
bien des protestations estudiantines,
même si l’on oublie souvent de dire
qu’il s’agit essentiellement d’étudiants
des universités privées sises dans les
beaux quartiers de la capitale, et qu’il
y a une scission avec les étudiants du
public, plutôt favorables à Maduro.
Ces manifestations sont parfois extrêmement violentes : ainsi, à l’issue
d’une attaque contre un bâtiment du
Ministère de l’éducation, trois personnes sont tuées - de la même façon :
une balle dans la tête… La télévision
publique est attaquée les armes à la
main, tout comme les supermarchés
d’état Mercal (à prix réduits)
Nouvelle tentative de coup
d’état ?
La théorie n’est pas absurde. Elle
semble confirmée par les discours de
López, appelant ouvertement au soulèvement, et qui trouvent écho chez
les autres opposants (Maria Machado
en particulier) qui poussent à mettre
à bas la « tyrannie ». Même la pénurie
semble organisée, sous forme de rétention de milliers de tonnes de produits alimentaires, parfois retrouvés
par les autorités.
Bilan
On peut se demander pour quelle raison les médias européens abondent
en faveur des émeutiers. Un élément
de réponse simple : au Venezuela, les
médias sont majoritairement tenus
par l’opposition (puisque l’on vous
dit que c’est une dictature !) ; l’information serait donc filtrée à la base…
Et surtout, n’oublions pas le double
péché originel des Vénézuéliens, souvent allégué par les journalistes : les
chavistes sont anti-américains (même
s’ils vendent 50% de leur pétrole aux
E.U.) et donc ennemis de la liberté,
et ce sont communistes genre soviétiques (faux, ils sont socialistes et acceptent l’économie libérale)
Dossier : d’autres modèles économiques
Philo
Charles Max
Qu’est-ce qu’une utopie ?
Dans le langage courant,
une utopie est synonyme de
chimère, de rêve impossible
car irréaliste.
Le terme d’origine grecque signifie
littéralement lieu qui n’existe nulle
part, ou-topos. Il naît, en littérature,
sous la plume de Thomas More,
philosophe anglais du 15eme siècle,
qui donne un titre éponyme à sa
description d’une île communiste
imaginaire. Mais on le retrouve dès
l’antiquité avec le mythe platonicien
de l’Atlantide, autre Cité insulaire
illustrant les thèses sociale du philosophe athénien.
L’utopie a pour vocation de décrire
un monde parfait, une société idéale
où s’incarne la justice, la vertu ou
l’égalité. Les hommes, emprunts de
sagesse, ont su y construire un monde affranchi des vices et des maux
qui corrompent nos idéaux. C’est
pourquoi son principe d’écriture
structurant est le miroir: il s’agit de
refléter, de manière sous-jacente, les
défauts de la société réelle afin de
mieux prôner une rupture sociale et
La Presse est libre
Profitez-en !
Un journal/revue qui affirme haut et fort son
« désir d’aller à rebours
de l’écrasante cuistrerie
ambiante ». Des interviews, des chroniques,
des nouvelles et des illustrations de haut vol,
le tout emballé dans
une maquette graphique
étincelante… (Atelier
Formes Vives). BRAVO !
Vous pourrez déguster
le blog à volonté mais
pour savourer la version papier, il est incontournable de s’abonner,
comme tous les médias
libres qui veulent le rester…
www.article11.info
politique. Dans cette mesure, l’utopie
s’insère dans le registre de l’apologue moral, à connotation volontiers
révolutionnaire.
La fiction possède donc une vertu
heuristique, qui remet en question
le poids ontologique de la réalité:
d’autres mondes sont possibles. Pour
le philosophe, l’utopie n’est donc pas
négative, elle traduit au contraire la
riche relation entre imaginaire et
idée, qui fait sens par un rapport critique au réel, bien plus que par un
plat constat d’une réalité réputée
intangible.
Journal bimestriel
d’expression libre du Nord
Seine-et-Marne - ISSN : 19692722 - Dépot légal : Avril
2014 - Directeur de publication : Patrice Hemet - Édité et
imprimé par : Association pour
la Promotion de l’Expression
Libre dans la région meldoise
(APEL de la région meldoise),
Association Loi de 1901, JO
du 24 janvier 2009 - Siège
social : 10, rue de la Loi 77230
Montgé-en-Goële.
[email protected] Site : www.tapageameaux.fr
13
Nos droits sociaux
Jean Arthaud
La sécu déshabillée par le pacte
Le Pacte de responsabilité,
même habillé en « Pacte de
solidarité » c’est la mort
programmée de la sécurité
sociale de 1945.
La grève interprofessionnelle à laquelle ont appelé, le 18 mars, les
confédérations syndicales C.G.T et
C.G.T-Force Ouvrière, ainsi que la
F.S.U. et Solidaires contre l’austérité,
pour le retrait du pacte de responsabilité, et les cent-quarante manifestations qu’elles ont convoquées
dans tout le pays ont rassemblé des
dizaines de milliers de salariés du
privé et du public, des retraités, des
chômeurs et des jeunes. La grande
presse aux ordres s’en est fait très
timidement l’écho.
Élections sanction
Les élections municipales des 23 et 30
mars constituent pourtant un cinglant
désaveu politique du gouvernement
Hollande-Ayrault : taux d’abstention
sans précédent (36,45% au premier
tour, 38,3 au second)
Débâcle électorale du P.S., la droite
et l’extrême-droite s’abstenant de
tout triomphalisme (par exemple, à
Meaux, J.-F. Copé a été élu au premier
tour avec 64,30% des suffrages exprimés mais, comme les abstentions,
les blancs et les nuls représentent
49,45%, son résultat réel est de 32,5%
des inscrits) On notera que les plus
forts taux d’abstention sont dans les
bureaux de vote des quartiers populaires (par exemple 62% dans certains
bureaux de Beauval).Tirant, à sa façon,
le bilan de cette déroute, Hollande
décide-t-il d’écouter la voix d’en bas ?
En aucun cas ! Il maintient le cap réactionnaire en modifiant l’habillage du
pacte de responsabilité. Il faut encore
et surtout ne pas désobéir aux diktats de la troïka : Union Européenne,
Banque Centrale Européenne, Fond
Monétaire International.
14
Un pacte scélérat
Le journal Le Figaro du 31 mars,
peu susceptible de sympathie pour
le mouvement ouvrier, détaille les
nouveaux habits du pacte scélérat.
Il s’agit, écrit-il, de « …mettre une
dose de social dans le pacte de responsabilité …» à savoir :
- Une baisse des cotisations payées
par les salariés qui - selon un « groupe de travail » de parlementaires de
la majorité - consisterait à alléger les
cotisations salariales de deux milliards d’euros jusqu’à 1,3 S.M.I.C.
« …De quoi redonner cinquante
euros de pouvoir d’achat aux personnes au S.M.I.C. …» explique un
député P.S., membre du groupe de
travail.
- Pour financer cette baisse des cotisations, il est envisagé de supprimer
la P.P.E. (Prime Pour l’Emploi) de
cinq-cents euros versés suite à la dé-
claration fiscale « aux foyers les plus
modestes » et qui a représenté 2,4
milliards d’euros en 2013.
Le Figaro poursuit : « …Arithmétiquement la balance continuera donc
à pencher en faveur des entreprises,
d’autant que le reste du « pacte
de solidarité » est vague… De fait,
l’exécutif a promis aux entreprises,
dans le cadre du pacte de responsabilité, dix milliards d’euros d’allègement supplémentaire du coût du
travail, auxquels s’ajouteront jusqu’à
huit milliards de baisse de leur fiscalité …». Il n’est pas nécessaire de
poursuivre, personne ne peut être
trompé ! Que Hollande reprenne les
mêmes astuces que Sarkozy lorsqu’il
annonçait une baisse des cotisations
salariales et patronales en même
temps qu’il voulait instaurer la « TVA
sociale » ne surprendra personne.
Une mort programmée
Le Pacte de Responsabilité,
même habillé en « Pacte de
solidarité » c’est la mort programmée de la sécurité sociale
de 1945. En effet si on prive la
Sécu de recettes provenant des
cotisations patronales et salariales, il faudra diminuer les dépenses c’est-à-dire baisser les
prestations : remboursement
des dépenses d’assurance maladie, prestations familiale, etc.
La « douloureuse » pour les
« ménages », salariés, chômeurs,
retraités, étudiants… sera inévitablement bien supérieure à
cinquante euros mensuels dans
ce système de « vases communicants » d’où disparaît la solidarité ouvrière propre à notre
système de Sécurité Sociale.
Personne ne peut croire que
l’on va redonner du pouvoir
d’achat aux ménages modestes
ou moins modestes. Au bout
du bout, si cette politique arrivait à son terme ce serait la fin
du système de la Sécurité Sociale « à la française » financée
par des cotisations assises sur
les salaires et constituant notre
salaire différé.
Gattaz et Kessler, caciques du
M.E.D.E.F. qui veulent en finir
avec tous les acquis de 1945,
Hollande, Valls et Touraine
n’auront pas raison : le peuple ne les laissera pas faire. Ce
pacte de responsabilité, inacceptable et inamendable, doit
être retiré. L’unité qui s’est
réalisée le 18 mars 2014 dans
la grève interprofessionnelle
et les manifestations à Paris et
en province doit se poursuivre
jusqu’au retrait de ce pacte scélérat !
Médias-libres
Un blog pour témoigner
Clémence, 20 ans, meldoise
et étudiante, est attirée par le
journalisme. Elle s’est rendue
à Kiev peu de temps après
les événements tragiques de
la place Maidan et a livré ses
impressions sur un blog qui
vaut le détour. Entretien.
Tapage : Dites nous, Clémence, ce
qui vous plait dans le journalisme. Clémence : Avant tout, c’est l’idée
du terrain pour appréhender la réalité des différentes sociétés, la manière dont les gens vivent. La perspective d’établir des contacts avec
les populations est centrale. Mais je
constate que la grande majorité des
médias procède par simplification
abusive. Je suis lassée des dépêches
de l’A.F.P. reproduites à l’identique
dans la presse, déçue des chroniques
expéditives qui ne retiennent que
les aspects spectaculaires de l’information et des conclusions hâtives
de certains journalistes. J’éprouve le
besoin de m’immerger dans l’événement, pour le comprendre de l’intérieur en quelque sorte.
Tapage : Le blog est-il un support
adapté à votre démarche ? Clémence : Je cherche d’abord
à toucher la population jeune et
connectée ; c’est donc le support
idéal. Je veux aussi montrer aux
jeunes en général que le blog est
un moyen simple de s’engager individuellement et en toute indépendance. Cet aspect interactif me
paraît important. Bien utilisé, il peut
combattre le désintérêt et parfois
la suspicion de la jeunesse pour les
questions politiques. Mais je suis
cependant ravie d’être lue par des
gens de tout âge !
Tapage : Pourquoi l’Ukraine ?
Clémence : Dans le cadre de mes
études, je devais faire un mémoire
sur un sujet d’actualité. J’avais choisi
le thème du rapport entre les réseaux sociaux et les insurrections
populaires. L’idée de l’Ukraine s’est
donc imposée naturellement. Je dois
dire qu’il n’était pas du tout obligatoire pour ce travail de se rendre sur
place. Mais je l’ai fait croire à mon
entourage… L’envie était trop forte
d’aller sur place ne serait-ce que
pour mettre en doute les certitudes
que j’entendais dans les médias.
Tapage : Comment ça s’est passé ? Clémence : Vous saurez tout en
allant sur mon blog ! J’y raconte mes
rencontres et mes observations mais
j’ai aussi tenu à y faire figurer une
présentation générale de la situation
ukrainienne afin d’offrir un maximum
de clefs de compréhension des événements récents. Nous sommes restés, mon camarade et moi, cinq jours
sur place, et nous avons rencontré des
Ukrainiens, contactés sur les réseaux
sociaux pour la plupart. C’était une
semaine après la tuerie et Ianoukovitch venait d’être déchu. Il était très
émouvant de percevoir l’effervescence d’un peuple qui a réussi à peser sur
le cours de son destin mais qui reste
en proie à une incertitude perceptible
quant à son avenir. Des photographies
illustrent mes écrits. Tapage : Des projets pour la suite ?
Clémence : Mon travail sur
l’Ukraine s’enrichit d’un article par
semaine dans un ordre chronologique. Pour la suite je souhaite renouveler ce genre d’expérience mais en
attendant je pars cet été avec interrail à la rencontre des différents aspects de la jeunesse européenne…
Pour encourager Clemence,
allez sur son blog http://clemencebistufertig.tumblr.
com/
15
Apparences scientifiques :
Emmanuel Médard
Fausses références et vrais bobards
Sans doute moins cocasse qu’une
balade nocturne à dos de scooter présidentiel en mal d’amour,
moins inquiétante que des mouvements de troupe - et d’extrême
droite - d’une Ukraine qui replonge avec nous dans la guerre
froide... l’incroyable nouvelle n’a
guère connu la joie des Unes ou
des gros titres et c’est bien dommage car l’histoire en question
est à tiroirs et dévoile, à son corps
défendant, le profond malaise
qui s’est installé dans les milieux
scientifiques internationaux.
Mais de quoi s’agit-il, au juste ?
Et bien depuis plus de 5 ans déjà,
des revues scientifiques renommées
ouvrent leurs colonnes à des articles
faussement hyper-spécialisés mais
réellement incohérents et falsifiés.
De la même façon que ces amateurs
de peintures impressionnistes ridiculisés par la toile exécutée par la queue
d’Aliboron, l’âne artiste ami de Dorgelès, ces éminentes revues se sont faites
berner, non par un animal rusé en mal
de carottes, ni par un savant fou et revanchard, mais par un « simple » programme informatique qui génère des
textes, dénués de sens, mais reprenant
le jargon et le vocabulaire scientifique
les plus incompréhensibles. Ainsi a-ton pu lire que « …la technologie à
constante de temps et à point d’accès
a suscité un vif intérêt chez les futurologues et les physiciens ces dernières
années. …» Car « …après des années
de recherches intensives sur les super
pages, nous confirmons l’unification
appropriée d’architectures 128 bits et
de sommes de contrôle(*) …». Évidemment, je vous invite à bien retenir
ces phrases et à les ressortir lors d’un
dîner mondain... si vous êtes de ceux
qui en fréquentent encore. Le succès
16
est assuré. De toute part les yeux se
tourneront vers vous, teintés d’un
cocktail d’admiration et de gêne. Admiration devant tant d’érudition. Gêne
de n’avoir rien compris. Deux solutions s’offriront alors à vous : dévoiler
la supercherie et lancer la conversation sur les malheurs de la science, ou
taire la vérité et déambuler en jouant
le modeste.
Pour les plus honnêtes - vous tous il me semble que cette anecdote est
éclairante sur au moins deux points.
D’abord le manque d’intérêt des
« médias populaires » pour tous ces
sujets liés à la science dure. Une greffe
de cœur artificiel qui prend plus ou
moins, une polémique sur la vitesse
de la lumière... Cela, d’accord, mais
pour un débat de fond, on laisse cela
aux revues spécialisées. Et, justement,
celles-ci sont pour le moins questionnées par cette énorme défaillance qui
les a amenées à publier du charabia
pseudo-scientifique sans même s’en
apercevoir. Une explication est à chercher du côté de l’hyper spécialisation.
En effet, la « …technologie à constante
de temps et à point d’accès …» semble presque accessible comparée aux
travaux d’Elon Lindenstrauss sur « …
les systèmes dynamiques, en théorie
ergodique et ses applications à la théorie des nombres …» - ou bien ceux
de Ngô B-o Châu sur la « …preuve
du lemme fondamental(en) pour les
groupes unitaires …» - ou encore les
premières réflexions de Cédric Vilani
et ses « …estimations de convergence vers l’équilibre pour l’équation de
Boltzmann dans un contexte non per-
turbatif, sous l’hypothèse de régularité
uniforme …». Or, tous ces travaux
dont le simple énoncé donne le tournis sont, quant à eux, tous estampillés
du sceau de la science et consacrés,
de surcroît, par la médaille Fields des
mathématiques, autrement dit le prix
Nobel des matheux. C’est dire si c’est
sérieux... et complexe. Si complexe
qu’ils ne doivent pas être nombreux
celles et ceux en mesure de comprendre de quoi il est question. Combien
de journalistes spécialisés sont capables de comprendre et valider de tels
sujets ? (Peu d’après moi...) d’autant
que sur tous les thèmes (technologies,
physique des fluides, électronique...)
la spécialisation gagne du terrain. Or,
selon les critères fondamentaux d’une
publication en milieu libéral, pour vivre,
une revue doit publier !
Alors elle publie... mais, n’ayant pas
forcément les journalistes formés, elle
publie en ne s’attachant plus qu’à l’apparence de la science, comptant sur les savants pour lui donner des sujets sérieux
et plein de références. C’est justement
ce qu’offre le programme « SCIgen »,
lequel produit, en un seul clic, une étude
truffée de termes techniques avec graphiques, citations et références à l’appui(*). Comme quoi on peut s’appuyer
sérieusement sur de fausses références
et de vrais bobards.
Reste une question fondamentale...
comment de véritables savants, de
vrais chercheurs en viennent à utiliser
de tels biais pour publier de fausses recherches ? C’est ce que nous verrons
au prochain numéro !
(*) Sciences et vie, 3 mars 2014
Emploi : le désert !
Nina Waldhorf
« Je cherche un CDI …et un peu d’eau… »
Cher étudiant, le grand jour
est arrivé. Après plusieurs années d’études et de longues
heures de cours, affalé dans
l’amphi…
…à prendre frénétiquement des
notes sur ton ordinateur, tes professeurs viennent de te faire une annonce capitale : il est temps que tu te
professionnalises, que tu prépares ton
grand saut dans la vie active, bref tu
dois obligatoirement trouver un stage pour valider ton année et accessoirement savoir quoi faire de ta vie.
Au départ tu trouveras ça sûrement
excitant ; tu quitteras enfin ta fac de
banlieue pour la grande aventure et te
verras déjà dans ton bureau avec vue
sur la tour Eiffel, un Mac dernier cri
et un téléphone professionnel. Mais je
dois mettre à l’épreuve ton ingénuité :
en réalité tu t’embarqueras dans un
réel parcours du combattant. Comme
tu as été mis au courant fin octobre
que tu devais trouver un stage pour
début septembre ce n’est pas le moment de faire le difficile et il faut postuler en masse à toutes les offres que
tu trouves (au fait, pour la rubrique
stage ce n’est pas compliqué, c’est la
colonne où il y a deux-cent-soixantequatorze annonces ; celle où il y en a
trois c’est celle des C.D.I.)
Disponible et performant
Là tu découvriras un fait étrange : la
majorité des entreprises recherchent
un étudiant disponible six mois et à
temps plein. Certes, normalement
quand tu es étudiant, tu es censé avoir
cours de temps en temps et, aux dernières nouvelles, ils n’ont toujours pas
inventé la fac de nuit mais passons, ce
n’est pas un petit détail de ce genre
qui va t’arrêter dans ta quête. En regardant en détail les offres tu pourras
être quelque peu surpris par les profils
recherchés : Bac + 5, trilingue, grande
expérience, disponible neuf mois à
temps plein, horaires flexibles, permis
B, non rémunéré… Surtout ne perds
pas confiance en toi et continue à y
croire, sur un malentendu ça pourrait
passer. Après quelques tentatives infructueuses, tu réussis enfin à vendre
ta « non-expérience » avec brio et tu
décroches ton premier stage : champagne ! Si ton stage dure plus de deux
mois et que ton entreprise n’essaye
pas de te rouler en te faisant quatre conventions différentes tu auras
la chance d’être payé quatre-centtrente-six euros par mois (et peut
être même des tickets restaurants)
La grande vie ! À peine le loyer pour
un 7m2 mansardé à Pantin… Pour
ton premier jour tu n’es pas trop angoissé ; de toute façon, tout le monde
te l’a dit : les stagiaires font le café et
les photocopies, ça parait plutôt simple comme tâche, tu devrais y arriver.
Mais tu découvriras bien vite que le
stagiaire-glandeur n’est en réalité
qu’une énième légende urbaine.
Formation express
À ton arrivée tu auras le droit à trente
minutes de formation express sur les
huit logiciels internes à l’entreprise
dont tu n’as jamais entendu parler : la
messagerie, le standard, l’organigramme complet de la direction, l’historique de l’agence, Photoshop, Indesign,
Excel et le scanneur/photocopieur/
fax - le tout effectué par un collègue
très jeune et plutôt sympa dont tu
apprendras, par la suite, qu’il est stagiaire lui aussi (comme tous les autres
membres de ton bureau) mais depuis
tellement longtemps qu’il a le privilège de former les petits nouveaux en
plus de ses quarante dossiers à gérer
seul. La classe ! - À ce moment-là, petit stagiaire, je te conseille de prendre
des notes sinon tu risques de le regretter très vite. Au bout de quelques
jours tu rencontreras quand même le
directeur, le vrai, qui t’expliquera que
« …tu es hyper chanceux parce que,
ici justement, les stagiaires ne sont
pas traités comme tels : on leur donne vraiment du travail, des dossiers,
des responsabilités …» Super tu te
dis… Du coup n’espère pas partir
avant vingt heures le soir, la pause de
midi c’est trente minutes (mais si tu
peux la prendre devant ton ordinateur c’est encore mieux) et si tu es
capable de te débrouiller tout seul
c’est bien parce que vraiment tout le
monde est débordé de travail ici et,
si tu as des questions, demande aux
autres stagiaires, ils sont passés par là
eux aussi.
Les joies du terrain
Bon, c’est raté pour la formation approfondie mais quoi de mieux que le
terrain pour apprendre ? Après six
mois de travail acharné dans la jungle
de l’entreprise, à prouver au directeur
ta motivation par tes cinquante heures de boulot par semaine, et grâce à
l’entraide entre camarades stagiaires,
ça y est : tu commences enfin à maîtriser les rouages du métier, tu te sens
à l’aise dans tes missions, tu commences même à former les nouveaux arrivants. Bref, tu es au top ! Pour ton
pot de départ, le directeur a même
eu un petit mot pour toi : « …On
est vraiment content de ton travail,
tu as été un super élément ; tu comprendras bien sûr qu’on ne peut pas
te proposer ni de C.D.I., ni de C.D.D.
C’est la crise… Par contre je peux te
recommander auprès de l’entreprise
de mon beau-frère… il cherche un
stagiaire ! …».
17
Bouquins
Richard Marelle
Edouard Louis « En finir avec Eddy
Bellegueule »
« …Ce n’est pas une auto-fiction mais des confessions autobiographiques …» dit E. Pierrat C’est
aussi une lecture sociologique, cet écrit ne rentre pas dans une case précise.
Il a un corps de bourgeois (efféminé !) donc il rejoint la langue bourgeoise. Il a voulu devenir un auteur en
dépit de toute la violence qu’exerçait
la bourgeoisie qui exclut les autres
classes sociales. Mais la langue de la
bourgeoisie - langue de l’ennemi celle de la littérature lui a permis de
s’émanciper. Il n’a pas renié sa classe
sociale mais il est renié par sa classe
sociale ; il subit les conséquences de
la honte de son milieu pour lui mais
pas l’inverse.
« …Écrire c’était écrire aussi contre
soi-même, la littérature doit dire l’indicible. Les expériences intimes sont
aussi politiques. Il faut se réinventer et ne pas être ce qu’on a fait de
nous …». C’est ainsi qu’Eddy Bellegueule devient Édouard Louis.
Ce livre appelle à la révolte contre les
normes sociales imposées, comme ce
qu’il convient de faire lorsqu’on est
un homme. Qu’est ce que c’est que
d’être un enfant « différent » : gros,
petit, noir, en difficulté ou brillant, efféminé ? Alors que chacun rêve d’être
« comme tout le monde ».
« …La littérature peut faire bouger
les lignes, derrière mon roman il y a
une volonté politique …».
Édouard Louis est en colère contre
un système. Il veut faire de la violence
un espace littéraire. Les individus sont
rendus violents par leurs conditions
de vie. Son livre est un tribunal contre
la société mais pas contre les personnages ; il met en avant des réalités
qui sont à l’origine de ces attitudes,
un milieu social qui a contraint à des
attitudes. Il refuse les plateaux télé
car il a peur de la fascination malsaine
et d’une condescendance bourgeoise
qui ramène les individus à des anecdotes alors que son travail est de justement remettre les individus dans un
ensemble.
Parfois l’école publique, qui s’écroule
lentement, permet - par ses fonctionnements les plus républicains (Bourses, Normale Sup) - à certains (dont
on était loin de s’imaginer les capacités) de s’émanciper et de se réaliser.
À lire (Le Seuil, 17 €)
>> Vous appréciez une parole libre, surtout à Meaux, vous aimez les structures
coopératives, vous croyez encore dans l’action collective et vous détestez la logique
financière, les gaz de shistes et les OGM…
18
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Toutes les infos page 20
Les mots croisés du maître
Grille n°27
Horizontalement
I - Risque de se retrouver en 1 vertical
II - Relatif à l’œil. Boite
III - Retenir contre sa volonté
IV - C’est le début de l’urgence. Rivière alpestre.
V - Broyées. Possessif.
VI - Concrétions minérales arrondies. Au bout de la nuit
VII - On les aime chauds. Miner
VIII - Onze pour César. En plus. Cubitus
IX - Prévenait - Personnel amical.
X - Son étoile n’est pas dans le ciel. Début d’erreur.
XI - Fera disparaître
XII - Roman de Zola. Me déplacerais
Verticalement
1 - Risque d’arriver au I horizontal (trois mots)
2 - Petite surface. Donnera envie.
3 - Façon de monnayer un service. Ne donne plus sa langue
au chah
4 - On espère de telles fins. Renfort d’affirmation
5 - Un anglais. Au bout du tunnel. A sec.
6 - Situées. Plus il est élevé, mieux c’est.
7 - Précis. Un insecte comme la puce.
8 - Individus. Début de plainte. Cria dans les bois
9 - Mettraient fin à la vie. Rigolé.
10 - Irlande. Blessures psychiques
Solutions grille 26
Horizontalement
I - climatique
II - Oiselets
III - Unanime - SF
IV - Cg - Fée
V - Hériteront
VI - Es - Serin
VII - Essartée
VIII - Orne - Taels
IX - Zoo - Lui - Ae
X - Ourler - Mer
XI - Némo - Epair
XII - Erebus - Ise
Verticalement
1 - Couche d’ozone
2 - Linges - Rouer
3 - Isa - Enorme
4 - Mentisse - Lob
5 - Ali -Tés - Le
6 - Températures
7 - Ite - Rirai
8 - Qs - Fonte - Mai
9 - Sen - Elaeis
10 - Effet de serre
La recette de Mémère Germaine
Une salade d’une fraîcheur extrême…
Il faut, pour quatre personnes :
- 6 feuilles de romaine,
- 4 tomates de Marmande,
- 4 concombres nains,
- 2 petits navets violets nouveaux,
- 2 poivrons grillés (un rouge et un
vert) sans la peau (on en trouve en
conserve au naturel)
- 6 radis rouges,
- 2 gousses d’ail frais épluchées,
- 3 oignons blancs frais ou cébettes,
- 1 botte de fines herbes, une de coriandre, une de menthe,
- 3 brins de persil plat,
Sel, poivre, huile d’olive (trois cuillères à soupe) vinaigre balsamique (une
cuillère à soupe) le jus d’un citron
jaune et celui d’un citron vert.
Pour le poivron grillé : les mettre sur
un plaque à four chaud, les retourner
jusqu’à ce qu’ils soient noirs sur tous
leurs côtés. Éplucher tant qu’ils sont
chauds (on se brûle les doigts) et enlever les graines et le pédoncule.
Couper en fines lamelles. Laver tous
les légumes et les herbes, éplucher
l’oignon blanc, préparer les radis.
Verser, dans un grand saladier :
- La romaine émincée en rubans de ½
cm de large et 3 cm de long
- Les tomates, les navets et les
concombres coupés en cubes de ½
cm de côté
- Les radis en fines rondelles recoupées en quatre
- Les poivrons
Hacher finement les herbes, l’ail et la
cébette
Ajouter le jus des citrons, l’huile et le
vinaigre et mélanger avec précaution.
Saler, poivrer et placer bien au frais
jusqu’au moment de servir.
Saveurs très fortes qui accompagneront grillades et poissons crus.
Bonap !
19
Sur nos murs
Culture loisirs
Ai Weiwei : vers un art sociétal ?
Sortir nos petits
Cette illustration
de Shepard Fairey
rend hommage à
l’artiste «activiste» le plus influent
et le plus controversé. de Chine
Populaire. Emprisonné puis relaché sous caution,
il vit aujourd’hui
à Pékin mais sans
passeport. Il lui
est donc impossible de quitter la
Chine. Il utilise le
pouvoir des (nouveaux) médias et
l’impact de son
art pour confronter la Chine à ses
propres contradictions.
A la question :
« Ai Weiwei est-il
toujours un artiste ? », il répond :
«Ça me convient, ça signifie qu’il va falloir réfléchir à une nouvelle définition de l’art. On
ne peut pas se contenter de dire que l’art, c’est de la peinture qu’on accroche au mur,
une sculpture éclairée par un projecteur ; l’art peut être ce qu’on veut, ça peut être la
nourriture, vos vêtements, la télévision, une conversation, tout peut être de l’art. Mais ça
peut être aussi la politique.» >>> http://www.obeygiant.com
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à télécharger tous les deux mois sur le site : www.tapageameaux.fr
L’art raconté
à ma fille
16 avril/Bussy-SaintMartin/
Parc culturel de Rentilly.
L’art contemporain, qu’est-ce que
c’est ? Et puis, ça date de quand
au juste ? On dit que c’est une
expression un peu fourre-tout...,
mais tout c’est quoi ? Vous avez
des questions ? Vous cherchez des
réponses ? Vous êtes sur la bonne
voie ! Soyez-en sûrs La Bande à
Grimaud va vous faire aimer l’art
contemporain grâce à cette conférence déjantée.
Espace des arts vivants, 15 h
À partir de 7 ans - Durée : 30 min
Entrée libre - Nombre de places
limité - réservation conseillée au
01 60 35 46 72
Atelier découverte
du street art/
23 avril/Bussy-SaintMartin/
Parc culturel de Rentilly.
Le courant artistique du Street-art
sera présenté par une bibliothécaire du centre de ressources
documentaires, accompagnée d’une
médiatrice. Après une présentation
d’ouvrages, place à la pratique !
Tous les codes du street art seront
décortiqués et les enfants pourront
s’y essayer, à la manière des artistes
présentés.
Orangerie,15 h - À partir de 6 ans
Durée : environ 2h - Entrée libre
Nombre de places limité - réservation conseillée au 01 60 35 46 72