LE CAMEROUN DE 1884 A 1939

LE CAMEROUN DE 1884 A 1939
02 février 2014
CHAP. 17
LE MANDAT BRITANNIQUE ET SES CONSEQUENCES
- Présenter et apprécier l’œuvre réellement accomplie par la Grande-Bretagne durant la
période 1916-1939
- Présenter la réaction des populations locales
INTRODUCTION
Le 4 février 1916, Anglais et Français se partagèrent le territoire du Cameroun qu'ils venaient
d'arracher aux Allemands. Alors que les Français s'arrogeaient les 4/5e du territoire, les
Anglais se contentèrent du 1/5e, soit une superficie de 53 000 km², située à l’ouest. Cette
modestie dans les prétentions britanniques confirme une fois de plus que les Anglais
estimaient n'avoir pas grand-chose à tirer de ce territoire, tout comme au XIXe siècle lorsque
les correspondances adressées par les chefs Douala aux autorités de Londres, les invitant à
faire du Cameroun un protectorat britannique, restèrent sans réponse. L’accord de partage
ainsi établi sera finalisé en 1919 par l’accord Simon-Milner qui recommandait l’adoption
d’une frontière entre les deux parties ; ce qui octroyait à la Grande-Bretagne une portion
séparée du Cameroun. En janvier 1920, le Cameroun devenait un territoire sous mandat « B »
de la SDN par l’article 22 de son pacte. En 1922, la SDN signait avec la France et la GrandeBretagne des accords leur confiant son mandat sur le Cameroun. Ainsi, le territoire sous
mandat de la Société des Nations confié à l'empire britannique devint-il le Cameroun
britannique (en anglais Cameroons) et les Britanniques s’empressèrent de le rattacher à
l’administration de leur colonie nigériane.
I- LA POLITIQUE ADMINISTRATIVE DE LA GRANDE BRETAGNE AU CAMEROUN
BRITANNIQUE
Pour son administration, les Anglais n'adoptèrent pas une politique uniforme. Ils divisèrent ce
territoire en deux parties séparées par une bande de 72 km, le long de la Bénoué. avec deux
administrations différentes:
La partie Nord de ce territoire, peuplée de Peul, le Northern Cameroons, fut rattachée au
Nigeria septentrional tandis que la partie Sud, peuplée de Bamilékés, le Southern Cameroons,
était intégrée au Nigeria oriental.
Le Southern Cameroons, par la volonté des autorités britanniques, fut annexé au Nigeria
oriental et administré comme une partie intégrante de cette colonie. Jusqu'en 1949, la capitale
de ce territoire se trouvait à Lagos puis elle fut transférée à Buéa. A partir de cette date,
Southern Cameroons était placé sous l'autorité d'un résident qui rendait lui-même compte au
Lieutenant-gouverneur des provinces orientales du Nigeria.
Entre 1916 et 1945, les autorités anglaises des provinces orientales du Nigeria divisèrent le
Southern Cameroons en 4 unités administratives (les districts) ayant chacune à leur tête un
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« district officer». Les chefs-lieux étaient Victoria, Kumba, Mamfé et Bamenda. Les « district
officers » étaient assistés dans les unités administratives plus petites par des « assistant district
officers. »
Le système d'administration pratiqué dans ce territoire fut celui formalisé par Lord Lugard
dans son ouvrage resté célèbre, The Dual Mandate in British Tropical Africa. Il s'agit de
l'administration indirecte encore appelée indirect rule1. Elle consistait à laisser aux autorités
indigènes (native-authorities) le soin d'administrer leurs populations selon leurs traditions à
condition que celles-ci ne heurtent pas les principes de la civilisation britannique. A l'endroit
de ces native-authorities, les autorités britanniques jouaient plutôt le rôle de guide, consacrant
l'essentiel de leurs efforts au commerce, à l'exploitation des ressources économiques et
minières du territoire et à la soumission des populations à la législation britannique.
Dans la Southern Cameroons, il y avait des paramount chiefs à Buéa et Victoria tandis qu'on
parlait de fons à Bali, Bafut, Kom, Bum, Nso et Bangwa. Ces chefs et fons reçurent des
autorités britanniques les moyens d'exercer leur commandement. Ils disposaient ainsi d'un
tribunal et d'une trésorerie traditionnels, assumant à la fois des fonctions administratives et
fiscales. Il leur était demandé de s'occuper de la santé et de l'éducation de leurs populations,
de la répression, de la criminalité, et en général, de promouvoir le développement de leur
localité.
De 1916 à 1939, le Southern Cameroons avait le même destin que le Nigeria. Avec la
Constitution Clifford de 1922, le Southern Cameroons n’était pas représenté au conseil
législatif du Nigéria et était administré comme une partie et une parcelle des provinces
méridionales du Nigéria.
Les Britanniques créèrent une force de police en 1916. Initialement composée de des
personnes ayant servi dans les forces de police allemandes, elle finit par comprendre
majoritairement des Haoussa, Bamilékés, Bamoun et les populations Yola. Elle avait à sa tête
un commissaire de police assisté d’un commissaire adjoint. Les recrues étaient entraînées et
équipées dans les provinces du Sud Nigéria. En 192à, le Cameroun britannique avait 154
officiers de police dont 60 pour Buéa, 14 pour Victoria, 2 pour Tiko, 7 pour Kumba, 2 pour
Rio Del Rey, 29 pour Mamfé, 10 pour Bamenda, 10 pour les plantations.
Sur le plan sanitaire, le Cameroun britannique fut marqué par des épidémies, surtout entre
1916 et 1945. Le chef de l’administration sanitaire ici était le directeur des services sanitaires
et médicaux qui résidait à Enugu. Le Cameroun britannique manquait cruellement de
personnel médical qualifié. A titre illustratif, en 1938, après 22 ans d’administration
britannique, le Cameroun britannique n’avait que 6 médecins sans aucun médecin indigène.
1
Des autorités indigènes (native-authorities) avaient le soin d'administrer les populations locales selon leurs
coutumes sauf lorsque celles-ci étaient en contradiction avec les principes de la civilisation britannique. Les
autorités britanniques déterminaient les grandes orientations et en laissaient la mise en œuvre aux autorités
indigènes. Par ailleurs, les autorités britanniques gardaient la mainmise sur le commerce, l'exploitation des
ressources économiques et minières et l'administration des Européens.
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A l’effet, de faciliter l’administration du Northern Cameroons comme partie intégrante de la
région Nord du Nigéria, les Britanniques n’hésitèrent pas à déposer les chefs Foulani
tyranniques qui s’opposèrent à cette politique d’intégration. Aussi, formèrent-ils les princes
Foulani et certains indigènes qui n’avaient pas de sang royal dans le modèle de
l’administration occidentale.
II- UN TERRITOIRE NEGLIGE PAR LES BRITANNIQUES
C'est parce que les Anglais abandonnèrent les populations du Southern Cameroons aux seuls
soins des autorités indigènes, alors qu'ils exploitaient les ressources agricoles, minières et
commerciales de ce territoire, qu'ils furent accusés de négliger leur colonie. En effet entre
1916 et 1945, les Anglais ne dotèrent le Southern Cameroons d'aucune infrastructure de
communication viable. Au niveau de l'enseignement, tous les camerounais méridionaux
étaient obligés d'aller poursuivre leurs études secondaires au Nigeria soit au Government
College Umuahia à l'Est du Nigeria, soit au King's college ou au Queen's college de Lagos. Il
n'y avait même pas suffisamment d'écoles primaires dans le Southern Cameroons. Il faudra
attendre 1939 pour voir la mission catholique ouvrir une école secondaire à Sassé dans la
préfecture de Victoria. Pourtant, les Anglais percevaient des impôts auprès des indigènes du
Southern Cameroons et en 1939 ceux-ci rapportèrent $ 3600.
C'est certainement cette attitude des Anglais qui poussa les Camerounais méridionaux à créer
leur tout premier mouvement de pression. Il s’agissait de la Cameroons Welfare Unions
(CWU) créée en 1939 à Victoria et dirigée par G.J. Mbene. Son objectif fut de remédier à
cette négligence : la représentation de la Southern Cameroons dans le conseil législatif du
Nigéria à Lagos et son devéloppement aussi longtemps qu’il va demeurer dans le Nigéria.
La Cameroons Youth League, CYL est créée le 27 mars 1940, par Emmanuel Mbela Lifate
Endeley. La CYL était essentiellement composé des élèves du Southern Cameroons qui
étudiaient dans les différentes institutions du Nigeria. Son objectif était d'amener les autorités
anglaises à réparer le tort causé aux Camerounais méridionaux sur les plans économique,
éducatif, politique et social.
Le Cameroons Youth League, premier syndicat du Cameroun anglophone, deviendra bientôt
le Kamerun National Congress, qui devait revendiquer l'érection du Southern Cameroons en
région autonome.
CONCLUSION
L’administration du Cameroun britannique est un indicateur du système colonial en général et
du système colonial britannique en particulier.
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