JOURNEES PARISIENNES DE PEDIATRIE Comité d’organisation : A. BARUCHEL, S. BLANCHE, P. BOUGNERES, B. CHABROL, G. CHERON, C. DELACOUR, G. DESCHENES, D. DEVICTOR, A. FAYE, J. GAUDELUS, E. GRIMPREL, I. KONE-PAUT, P. LABRUNE, G. LEVERGER, D. MITANCHEZ, D.TURCK Journées Parisiennes de Pédiatrie 2013 Vendredi 4 et Samedi 5 octobre 2013 Les textes qui vont suivre ne sont pas téléchargeables directement depuis cette clé. Néanmoins ils le seront après le congrès des Journées Parisiennes de Pédiatrie via le site web : http://www.jppediatrie.com/ SOMMAIRE TABLE RONDE 1 Enseignement par simulation Introduction J-L . HAROUSSEAU Enseignement aux étudiants hospitaliers de l'arrêt cardiaque et des situations d'urgence A. PETIT Enseignement aux internes et aux praticiens des urgences pédiatriques G. CHERON Enseignement de la réanimation en salle de naissance par simulation J.-L . CHABERNAUD ; G. JOURDAIN, C. BOITHIAS, N. LODE, C. BOOTISSIN, A. AYACHI TABLE RONDE 2 Quoi de neuf sur le syndrome hémolytique et urémique ? Syndrome hemolytique et uremique à verotoxine - epidemiologie G. DESCHÊNES, P. MARIANI-KURKDJIAN, L. KING Aspects cliniques du SHU-D+, formes severes et leurs facteurs de risque R. SALOMON, S. PIERREPONT, M. OUALHA Le syndrome hemolytique et uremique a STEC – traitement et perspectives T. ULINSKI TABLE RONDE 3 L’enfant retardé Evaluation clinique V. DES PORTES L’enfant retardé : contribution de l’imagerie N. BODDAERT , D.GREVENT, F. BRUNELLE, BAHI-BUISSON, A. MUNNICH Exploration clinique, génétique et moléculaire des retards mentaux de l’enfant A. MUNNICH , M. RIO, L. COLLEAUX, A.CURIE, V. DES PORTES TABLE RONDE 4 Travaux des Lauréats de DES de Pédiatrie - Ile de France Travaux ayant reçu les félicitations du jury à la session d’octobre 2012. Comparaison des caractéristiques cliniques et biologiques des arthrites à Kingella kingae et Staphylococcus aureus R. BASMACI, M. LORROT, P. BIDET, C. DOIT, C. VITOUX, G. PENNECOT, K. MAZDA, E. BINGEN, B. ILHARREBORDE, S. BONACORSI Devenir moteur et neuropsychologique des enfants présentant une hypoplasie unilatérale congénitale isolée A. BENEZIT Diabete neonatal dans une cohorte de 174 patients : association fréquente avec des malformations et des troubles neuropsychologiques K. BUSIAH Etude de la relation entre radiographie de thorax et antibiothérapie dans les infections respiratoires basses de l'enfant : analyse par score de propension E. ECOCHARD DUGELAY Implantation de l'échographie rénale d'urgence dans un service d'urgence pédiatrique et difficultés associées R. GUEDJ BCGites chez les patients atteints d'un déficit immunitaire combiné sévère : étude rétrospective M. KIENER MISES AU POINT 1 Devant un souffle précordial, quand faut-il demander une échocardiographie ? F. GODARD Les pièges des migraines et des céphalées chez l'enfant et l’adolescent D. ANNEQUIN, B. TOURNIAIRE Association entre migraine de l'enfant et coliques du nourrisson L. TITOMANLIO, J.-C. MERCIER Chirurgie bariatrique et esthétique chez l’adolescent obèse P. TOUNIAN MISES AU POINT 2 Le retard vaccinal chez l'enfant : fréquence et implications F. DUBOS, A. MARTINOT, P.GRAS, P. DEBACKER, M. LAGREE Comment analyser les délais diagnostiques en pédiatrie ? M. CHALUMEAU, E.LAUNAY, J.-F. BRASME, C. DENEUX-THARAUX, D. GENDREL, J. COHEN PALIPED, bilan de deux années d'activité d'une équipe ressource en soins palliatifs pédiatriques A. AUVRIGNON, I. DESGUERRE, B. LESCOEUR, N. NISENBAUM, B. PELLEGRINO L’annonce d’un évènement indésirable grave D. DEVICTOR MISES AU POINT 3 Infections ostéo-articulaires de l'enfant : aspects microbiologiques et médicaux M. LORROT, C. DOIT, S. DUGUE, E. LITZELMANN, S. BONACORSI, B. ILHARREBORDE, A. FAYE Nouveaux visages des infections ostéo-articulaires de l'enfant : aspects orthopédiques C. THEVENIN-LEMOINE Artesunate et paludisme sévère de l'enfant A. FAYE, P. IMBERT, F. SORGE, N. GUERIN, A. BARNEJEE, M.-C. BOTTINEAU, P. MINODIER, D. GENDREL L'asthme de l'enfant, des phénotypes à la prise en charge J. JUST, F. AMAT, N. GUILLEMOT-LAMBERT MISES AU POINT 4 Les enteroviroses severes du nourisson C. ARRIUBERGE, E. GRIMPREL, B. QUINET L'ECMO en Pédiatrie. Indications actuelles S. RENOLLEAU Hématologie de l'enfant trisomique 21 A. BARUCHEL Syndromes d’activation lymphohistiocytaires constitutionnels D. MOSHOUS, G. DE SAINT BASILE, G. CROS, S. HERITIER, M. CHOMTON, B. NEVEN, C. PICARD, A. FISCHER, S. BLANCHE Le rétinoblastome : actualités du rétinoblastome I. AERTS, L. LUMBROSO-LE ROUIC, M. GAUTHIER-VILLARS, H. BRISSE, F. DOZ MISES AU POINT 5 Prises en charge chirurgicales des lithiases urinaires de l'enfant A. EL GHONEIMI, A. PAYE-JAOUEN, T . KWON, V. BAUDOUIN Les nouveaux traitements de la sclérose en plaque de l’enfant M. TARDIEU, K. DEIVA Troubles cognitifs et autisme I. DESGUERRE Le syndrome d’Asperger : à l’heure du passage des troubles envahissants du développement aux troubles du spectre autistique A. TONUS, M.-C. MOUREN, N. CHABANE Autisme et auto immunité L. DE PONTUAL, M. DUBREL, J. GAUDELUS, B. HERON, E. LACHASSINNE MISES AU POINT 6 Risques fœtaux du diabète gestationnel D. MITANCHEZ Traiter moins mais traiter mieux les nouveau-nés suspects d'infection materno-fœtale : vers de nouvelles recommandations C. GRAS-LEGUEN, J.-B. MULLER, E. LAUNAY, J. CAILLON, J.-C . ROZE Les défauts du développement testiculaire : quelles décisions prendre ? P. BOUGNERES, C. BOUVATTIER Hyponatrémies du nouveau-né : un sujet salé ? L. MARTINERIE, D. ZENATY, D. SIMON, J. LEGER, J.-C. CAREL Nouvelles techniques d'imagerie non invasive en néonatologie O. BAUD, C. DEMENE, M. PERNOT, M. TANTER, V. BIRAN MISES AU POINT 7 Anaphylaxie sévère et prise en charge B. CHEVALLIER, E. BIDAT, M. EL ZOOBI Maladie de Kawasaki : peut-on prédire la réponse aux immunoglobulines ? J.-B. ARMENGAUD, M. LE ROCH, I. KONE-PAUT, Maladie de Kawasaki : que faire après échec des immunoglobulines intraveineuses ? I. KONE-PAUT MISES AU POINT 8 Histoire naturelle des malformations pulmonaires A. HADCHOUEL, C. DELACOURT Faut-il opérer les malformations pulmonaires asymptomatiques Y. REVILLON Utilisation du latex en Pédiatrie : est-ce bien raisonnable ? M. CHABAUD-WILLIAMSON, F. AUBER, G. AUDRY TABLE RONDE 1 Enseignement par simulation ENSEIGNEMENT AUX ETUDIANTS HOSPITALIERS DE L'ARRET CARDIAQUE ET DES SITUATIONS D'URGENCE Par A. PETIT Nathalie de Suremain 1,+, Cécile Arnaud 1,+, Romain Guedj 1,*, Marie-Christine Renaud *, Emmanuel Grimprel Alexandre Duguet 5,*, Guillaume Thouvenin 3,*, +, Arnaud Petit 4,*, +. 2,* , 1 Urgences Pédiatriques, 2 Pédiatrie Générale, 3 Pneumologie Pédiatrique, 4 Hématologie et Oncologie Pédiatrique, Hôpital Armand Trousseau, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, 26 avenue Arnold Netter, 75012 Paris ; 5 Pneumologie et Réanimation médicale – Hôpital Pitié Salpétrière - Assistance Publique – Hôpitaux de Paris * Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie, UPMC Univ Paris 6 + PEPITE « Programme d’Enseignement de la Pédiatrie par Internet et les Technologies Electroniques » Introduction Le deuxième cycle des études médicales a pour objectif l’acquisition des compétences cliniques et thérapeutiques, et de capacités d’adaptation permettant aux étudiants, d’exercer les fonctions hospitalières du troisième cycle et d’acquérir les compétences professionnelles de la filière dans laquelle ils s’engageront 1. Durant les études médicales, le temps consacré à la médecine pédiatrique est assez court, rendant difficile l’apprentissage des situations d’urgence, qui sont rares, mais qui nécessitent pour une efficacité maximale, une réactivité quasi-immédiate. Les innovations technologiques et électroniques ont permis le développement d’approches pédagogiques nouvelles utilisant notamment la simulation avec des mannequins hautes fidélités. Elles ont d’abord été utilisées auprès de praticiens « qualifiés » dans le cadre de programme d’enseignements post-universitaires ou du développement professionnel continu (DPC). Cette démarche est désormais largement encouragée par la Haute Autorité de Santé (HAS), qui a rédigé un dossier sur ce sujet , afin de promouvoir l’enseignement par la simulation en santé à toutes les étapes de la formation des professionnels de santé, qu’elle soit initiale ou dans le cadre du DPC 2, 3. Cette approche pédagogique pour les étudiants en médecine est émergente. En outre, elle fait apparaître une éthique nouvelle dans la formation des futurs médecins avec un apprentissage premier sur mannequin et autant que possible devra appliquer le concept suivant : « jamais la première fois sur le patient » 2. La Faculté de Médecine de l’Université Pierre et Marie Curie (UPMC) accueille annuellement environ 400 étudiants en 3ème année du deuxième cycle des études médicales (DCEM3). Durant cette année, les étudiants bénéficient d’un enseignement de pédiatrie intégré à leur stage hospitalier. Compte tenu du nombre d’étudiants, des terrains de stage diverses, assurer un enseignement homogène de la pédiatrie est complexe. Néanmoins dispenser un enseignement de qualité en pédiatrie est une priorité, en particulier dans le domaine de l’urgence, notamment pour la prise en charge d’arrêt cardiaque de l’enfant. Cet objectif a conduit la faculté de médecine à faire un choix pédagogique innovant dans l’enseignement de la pédiatrie d’urgence, par l’utilisation d’un mannequin de simulation haute-fidélité. Un groupe de travail a été créé fin 2011 afin de mettre en place pour l’année universitaire 2012-2013, un enseignement innovant de pédiatrie d’urgence, destiné aux étudiants en DCEM3. Cet enseignement en trois temps, comprend notamment la visualisation d’un film sur la prise en charge de l’arrêt cardiaque de l’enfant, réalisé spécifiquement pour les étudiants, suivi des 3 ateliers « pratiques », dont l’un est réalisé à l’aide du mannequin de simulation haute-fidélité. Afin d’évaluer la pertinence de cette nouvelle approche pédagogique, les connaissances des étudiants ont été évaluées à plusieurs reprises durant cet enseignement, puis comparées aux étudiants de 4ème année du deuxième cycle des études médicales (DCEM4) de la même année universitaire, n’ayant pas reçu cet enseignement. Une enquête de satisfaction a été réalisée auprès des étudiants ayant suivi ce module. I- Méthodologie de l’enseignement Population concernée L’enseignement mis en place est destiné aux étudiants DCEM3. L’année universitaire est divisée en 3 quadrimestres successifs. A chaque quadrimestre, un tiers des étudiants réalise le stage de pédiatrie, associé à l’enseignement de la pédiatrie dans le cadre du certificat intégré de pédiatrie. Le module de pédiatrie d’urgence mis en place à partir de l’année universitaire 2012-2013 est obligatoire pour tous les étudiants, néanmoins leur absence n’était pas sanctionnée. Les étudiants de DCEM4 de cette même année universitaire constituent un groupe « contrôle » car ils n’ont pas bénéficié de ce module d’enseignement. Encadrement pédagogique L’enseignement a été dispensé par des pédiatres : chefs de clinique – assistants (CCA), maîtres de conférence universitaire – praticien hospitalier (MCU-PH), praticiens hospitaliers (PH), de la faculté de médecine et/ou de l’hôpital Armand Trousseau (Paris) ; et par une infirmière anesthésiste (IADE). Un livret instructeur est remis aux enseignants avant les ateliers. Chaque enseignant réalise au minimum deux demi-journées du même atelier. Lors de la 1ère demi-journée, l’enseignant « naïf » est encadré par un enseignant « instructeur ». Lors de la demi-journée suivante, il devient enseignant « instructeur », encadrant un enseignant « naïf ». La formation des instructeurs est ainsi réalisée par rotation successive des enseignants. Film pédagogique « Arrêt cardiaque de l’enfant » Afin d’optimiser la compréhension et la mémorisation de l’algorithme de prise en charge de l’arrêt cardiaque de l’enfant, un film pédagogique a été écrit par 5 pédiatres hospitaliers et hospitalo-universitaire, dont 2 urgentistes et 1 réanimateur, reprenant la conférence de consensus 2010 de l’ERC 4, 5 . Ce film de 23 minutes, comprend 3 parties : la première partie est une fiction non commentée d’un arrêt cardiaque chez un enfant de moins d’un an; la 2ème partie est un film pédagogique reprenant de manière didactique les différentes étapes à effectuer pour reconnaître l’arrêt cardiaque et débuter efficacement la réanimation ; la 3ème partie reprend ces différentes étapes dans la chaîne de survie internationale. Ce film a été validé par les enseignants pédiatre de l’UPMC, Université Paris 6, ainsi que la Société Française de Pédiatrie. Son accès est gratuit et libre sur internet via la vidéothèque de l’université (http://video.upmc.fr) ou la plateforme iTunes U 6. Organisation de l'enseignement Préalablement à cet enseignement « nouvelle formule », tous les étudiants ont également reçu un enseignement sur l’arrêt cardiaque de l’enfant en 2 temps. Un temps pratique sur mannequins standards, de type « Basic Life Support » en 2ème année du premier cycle des études médicales et un 2ème temps théorique en amphithéâtre en DCEM3, dans le cadre du stage intégré de pédiatrie. L’enseignement « nouvelle formule » a été réalisé durant chacun des 3 quadrimestres, par période de 5 jours (décembre 2012, avril 2013, juin 2013). Il était divisé en 3 temps (Figure 1). Le premier temps concerne la projection du film en amphithéâtre, 1 mois environ avant l’enseignement pratique. Au terme de la projection, les étudiants peuvent poser leurs questions aux 2 enseignants présents. La durée de cette séance dure 1 heure. Une semaine avant l’enseignement en atelier, les étudiants reçoivent une alerte, les invitant à revoir le film de manière autonome, afin d’être plus efficace lors des ateliers pratiques. Le 3ème temps comprend 3 ateliers pratiques d’une durée d’une heure chacun, réalisés successivement auprès de 3 groupes de 9 étudiants, encadrés chacun par 2 enseignants. Le 1er atelier consiste à reconnaitre et savoir prendre en charge la détresse respiratoire. Le 2ème atelier consiste à revoir le « Basic Life Support » et à l’exécuter par binôme sur mannequins standards. Le 3ème atelier est un atelier de simulation utilisant le mannequin haute-fidélité « SimBaby » de Laerdal. Durant cette séance, 3 scénarii de gravité croissante sont réalisés. Un enseignant « facilitateur » joue le rôle de parent, un enseignant pilote le mannequin et enregistre les actions des étudiants. Chacun des scénarii dure 9 minutes et est exécuté par trois étudiants du groupe. A son terme, les 2 enseignants animent un débriefing de 9 minutes. Evaluation des connaissances des étudiants Un test des connaissances a été réalisé à visée pédagogique et afin d’évaluer l’enseignement. Ce test, fait de 10 questions à choix multiples (QCM), couvre les étapes clés de l’algorithme de la prise en charge de l’arrêt cardiaque de l’enfant. Cette évaluation, a été réalisée, avant le film, après le film et après les ateliers pratiques. Elle permet à l’étudiant d’identifier précocement ses lacunes et d’être plus réceptif aux messages diffusés dans le film, et de visualiser la progression de ses connaissances. Les étudiants de DCEM4 du « groupe contrôle » ont été soumis à ce même test en décembre 2012. Enquête de satisfaction Au terme des ateliers, les étudiants sont invités à répondre à une enquête de satisfaction sur internet, via l’outil Google Drive. Les échelles de satisfaction sont numérotées de 1 à 10 (inutile à indispensable). Le lien de l’enquête est envoyé par email. Un suivi des réponses est réalisé au 3ème jour de l’enseignement et au 6ème (24 heures après les derniers ateliers). Si le taux de réponse est inférieur à 50% à ces différents temps, une relance est effectuée par email. L’enquête est fermée 7 jours après le dernier atelier (15ème jour). Statistiques Les données sont générées par l’outil Google Drive, puis exportées dans le tableau Excel 2010 de Microsoft. Les moyennes sont comparées par le test de Student à l’aide du logiciel PSPP. II- Résultats Population d’étudiants, effectif enseignants Durant l’année universitaire 2012-2013, la promotion d’étudiants de DCEM3 était composée de 403 étudiants. 385 étudiants (95%) ont participé à l’enseignement obligatoire en ateliers. 423 étudiants étaient en DCEM4, 398 ont participé au test de connaissance. L’effectif enseignant pour la réalisation des 90 demi-journées d’enseignement en ateliers a mobilisé 14 CCA, 6 PH, 2 MCU-PH et une IADE. Chacun des enseignants a réalisé une médiane de 3 enseignants sur l’année universitaire. Le niveau de connaissance des étudiants en DCEM4 ayant reçu un enseignement classique est inférieur aux étudiants de DCEM3. Les connaissances des étudiants de DCEM4 « groupe contrôle » ont été évaluées en décembre de leur année universitaire, après avoir reçu un enseignement classique sur l’arrêt cardiaque de l’enfant (Tableau 1). La moyenne de bonne réponse des étudiants de DCEM4 est significativement moins bonne (p<0,001) comparée aux étudiants de DCEM3 qui n’ont pas encore reçu l’enseignement « nouvelle formule ». Les connaissances des étudiants de DCEM3 progressent pendant l’enseignement La moyenne des bonnes réponses des étudiants de DCEM3 avant le début de l’enseignement est de 4. Elle augmente significativement à 7 (p<0,001) après la projection du film et à 8 (p<0,001) après la réalisation des ateliers. Au terme de cet enseignement, le niveau de connaissance des étudiants de DCEM3 est significativement supérieur (p<0,001) à celui des étudiants de DCEM4 (Tableau 1). Le film « Arrêt cardiaque chez l’enfant » est plus pédagogique qu’un enseignement classique A l’issu de l’enseignement, 273 étudiants de DCEM3 sur les 385 ayant participé à l’enseignement, soit 71%, ont participé à l’enquête de satisfaction après avoir suivi l’ensemble de l’enseignement. 87% des étudiants ont trouvé la projection du film utile, 88% disent avoir mieux compris la prise en charge de l’arrêt cardiaque, 69% disent avoir identifié plus vite les points importants à retenir et 67% ont mieux identifié les particularités pédiatriques de l’arrêt cardiaque. Au total, 79% jugent ce film plus pédagogique qu’un enseignement classique en amphithéâtre. Les étudiants ont été interrogés sur l’utilité de ce film dans leur formation. Sur une échelle de 1 à 10 (inutile à indispensable), 93% ont noté 7 ou plus, 79% 8 ou plus. Avant l’enseignement par ateliers, 64% déclarent avoir revu le film. Les ateliers sont jugés utiles par les étudiants. Les étudiants souhaitent refaire de la simulation. Sur la même échelle d’utilité, chacun des 3 ateliers a été évalués. Pour l’atelier n°1 « reconnaissance et prise en charge de la détresse respiratoire », 83% des étudiants ont noté 7 ou plus, 64% 8 ou plus. Pour l’atelier n°2 « Basic Life Support », 93% des étudiants ont noté 7 ou plus, 79% 8 ou plus. Concernant l’atelier n°3 « Simulation », 92% ont noté 7 ou plus, 81% 8 ou plus. Durant cet atelier, 56% des étudiants ont ressenti un stress, 11% ont été mis en difficulté par le regard de leurs collègues, 89% ont trouvé cet atelier utile et 79% aimeraient renouveler cette expérience. Les étudiants ressentent qu’ils ont progressé. Au terme de cet enseignement, 98% des étudiants déclarent avoir progressé. Concernant l’utilité pour leur pratique future, 91% ont noté 7 ou plus, 83% 8 ou plus. Concernant l’utilité pour la préparation à l’ECN des items 183 et 193, qui concernent respectivement l’arrêt cardio-respiratoire et les détresses respiratoires aiguës de l'enfant, 83% ont noté 7 ou plus, 61% 8 ou plus. III- Discussion Afin d’améliorer la qualité de l’enseignement, un choix pédagogique innovant a été expérimenté en pédiatrie au sein de la faculté de médecine UPMC Paris 6. En effet, l’enseignement classique sur l’arrêt cardiaque de l’enfant ne permet pas de maintenir un niveau de connaissance satisfaisant chez les étudiants de DCEM4, comme en témoigne l’évaluation de leurs connaissances. Cet enseignement avait pour objectif de faire progresser les étudiants dans la reconnaissance et la prise en charge de la détresse grave de l’enfant, en particulier l’arrêt cardiaque, grâce à l’utilisation notamment de la simulation haute-fidélité. En effet, de nombreux travaux ont montré que l’enseignement par simulation améliore les performances techniques individuelles des cliniciens et des équipes dans les situations critiques ou lors des procédures complexes 7. Malgré le nombre important d’étudiants au sein de notre université, cette expérience prouve qu’un enseignement pratique à « large échelle », par petits groupes d’étudiants est réalisable. Un encadrement enseignant permettant d’avoir un rapport étudiants / enseignants adéquat permet de dispenser un enseignement de qualité au prix d’un volume horaire supportable pour chaque enseignant, qui a réalisé une médiane de 3 demi-journées de 3 heures durant l’année universitaire. L’organisation des ateliers en binôme avec un enseignant « naïf » en duo avec un enseignant « instructeur », ainsi que l’organisation d’un planning d’enseignants par rotation, ont permis de former de manière originale un grand nombre d’enseignants. Chacun des enseignants ayant déjà une expérience de l’enseignement, ainsi que la répétition des ateliers, réalisés au moins 6 fois pour chaque enseignant, ont permis une transmission correcte de la réalisation des ateliers d’enseignant en enseignant. En effet, l’évaluation des étudiants au terme des ateliers n’est pas significativement différente pour l’ensemble des 15 groupes d’étudiants entre le début et la fin des 3 cycles d’enseignements (données non montrées). L’utilisation d’un film pédagogique pour l’apprentissage d’un algorithme complexe, celui de l’arrêt cardiaque de l’enfant, est intéressante. Ce support permet de faire progresser les connaissances des étudiants sur ce sujet. Il est fortement apprécié, ludique et répond aux attentes des étudiants, qui sont désormais habitués à l’apprentissage multimédia, qu’ils peuvent embarquer sur leurs ordinateurs personnels, leurs téléphones et visualiser quand ils le souhaitent. L’usage de l’image, des animations, de messages courts à l’écran et d’un texte synthétique, peuvent permettre d’améliorer le processus de compréhension et de mémorisation. Un enseignement par simulation a pu être mis en place pour des étudiants en médecine de 5ème année. Cette innovation répond aux exigences de la HAS en matière d’enseignement. Néanmoins, la simulation mise en place a été adaptée, en particulier en ce qui concerne le temps de débriefing, pour permettre à l’ensemble des étudiants de bénéficier de cet enseignement dans un volume horaire acceptable. Le thème choisi, qui était celui de l’urgence pédiatrique, et notamment de l’arrêt cardiaque de l’enfant, avait pour objectif d’augmenter le niveau de qualification des étudiants dans une prise en charge rare, nécessitant un savoir-faire immédiat. Ce contexte est le modèle idéal pour une mise en situation des étudiants afin qu’ils puissent mettre en pratique leur connaissance, qu’il puisse ressentir la dynamique d’un groupe et l’effet du stress dans une situation complexe. Tous ses éléments sont impossibles à transmettre par un enseignement classique. En outre, l’introduction précoce de la simulation dans la formation des futurs professionnels, va leur permettre de se familiariser très tôt à une pratique, souvent ressentie comme difficile pour les professionnels les plus âgés. En effet, ces derniers sont peu habitués à être évalués depuis l’obtention de leur qualification. L’évaluation par la simulation peut mettre en difficulté les professionnels qui sont soumis au regard d’autres professionnels et se sentent jugés. La simulation sera très certainement amenée à s’étendre et se « démocratiser » dans les années à venir, pour la revalidation régulière de certaines qualifications dans le cadre du développement professionnel continu. Au terme de cet enseignement, l’évaluation des connaissances des étudiants de DCEM3 tout au long de leur processus d’apprentissage a montré une progression continue. Les évaluations répétées ont également une fonction pédagogique. Ils participent pleinement au processus de mémorisation, en permettant à l’étudiant d’identifier préalablement ses lacunes et d’aller chercher dans l’enseignement dispensé les réponses à ses questions. Néanmoins, ces connaissances devront être réévaluées au terme de cette année universitaire, durant leur année de DCEM4, afin de savoir si ces étudiants ont conservé de manière durable et significative leur connaissance à distance de l’enseignement. Enfin, une évaluation des compétences des étudiants en situation de simulation est nécessaire afin de montrer que les étudiants ayant suivi ce module ont acquis un savoir-faire supérieur, comparativement aux étudiants n’ayant pas bénéficié de cet enseignement. IV- Conclusion Cet enseignement innovant de pédiatrie d’urgence, centré sur la prise en charge de l’arrêt cardiaque de l’enfant, associant un film pédagogique et trois ateliers pratiques dont un par simulation haute-fidélité, a été majoritairement suivi, apprécié et jugé utile par les étudiants. Il permet d’améliorer le niveau de connaissance des étudiants de 5ème année de médecine et devrait optimiser leur efficience dans cette situation rare. Il permet également de préparer les futurs médecins à l’utilisation de la simulation, dont le champ s’étendra dans l’avenir dans le cadre de la formation initiale et du DPC, conformément aux souhaits de la HAS. Evaluation n°1 Projection du film Temps n°1 « Arrêt cardiaque chez l’enfant » Evaluation n°2 Alerte par email pour revoir le film de manière autonome sur internet Temps n°2 1 semaine avant les ateliers 3 ateliers (dont 1 de simulation) Par groupes de 9 étudiants Encadrés de 2 enseignants Temps n°3 Evaluation n°3 Etude de satisfaction Figure 1 : Schéma des 3 temps d’enseignement et des évaluations Temps de l’évaluation Moyenne Ecart-type Etudiants de DCEM4 « Contrôles » n=398 Début de DCEM4 2,7 1,8 Etudiants de DCEM3 ayant reçu le nouvel enseignement n=375 Avant le film Après le film 4 1,9 7 1,5 Tableau 1 : Evaluations des connaissances des étudiants Les résultats sont rendus en nombre de bonnes réponses sur 10 QCM Après les ateliers 8 1,6 V- Références 1. Arrêté du 2 mai 2007, relatif à l'organisation de la deuxième partie du deuxième cycle des études médicales. Journal Officiel 2007. 2. HAS. État de l’art (national et international) en matière de pratiques de simulation dans le domaine de la santé. 2012. 3. HAS. Guide de bonnes pratiques en matière de simulation en santé. 2012. 4. Biarent D, Bingham R, Eich C, et al. European Resuscitation Council Guidelines for Resuscitation 2010 Section 6. Paediatric life support. Resuscitation 2010;81:1364-88. 5. Nolan JP, Soar J, Zideman DA, et al. European Resuscitation Council Guidelines for Resuscitation 2010 Section 1. Executive summary. Resuscitation 2010;81:1219-76. 6. PEPITE. L'arrêt cardiaque chez l'enfant. In: Vidéothèque UPMC; 2012. 7. Schmidt E, Goldhaber-Fiebert SN, Ho LA, et al. Simulation exercises as a patient safety strategy: a systematic review. Ann Intern Med 2013;158:426-32. ENSEIGNEMENT AUX INTERNES ET AUX PRATICIENS DES URGENCES PEDIATRIQUES Par G.CHERON Chéron G, Bocquet N, Nouyrigat V, Timsit S, Saint Blanquat L. Service des urgences pédiatriques, hôpital Necker Enfants Malades, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris Mail [email protected] Téléphone 01 44 49 42 92 Fax 01 44 49 42 99 Les urgences sont une des principales portes d’entrée dans le système de santé et leur fréquentation ne fait que croître. Les professionnels de santé, médecins et non médecins, dont la fonction est d’accueillir les consultants doivent être en mesure, en toutes circonstances, c'est-à-dire quel que soit le motif de consultation, d’identifier prioritairement les enfants dont l’état de santé est le plus instable, et risque de s’altérer à court terme, mettant en cause le pronostic fonctionnel ou vital. Une prise en charge structurée est nécessaire pour atteindre cet objectif. Bien qu’indispensables, les compétences individuelles doivent se fondre dans le travail d’une équipe dans laquelle chaque membre doit partager un savoir et un savoir faire similaires. L’enseignement doit avoir pour objectifs non seulement la formation individuelle (le savoir) de chaque acteur de soins mais également l’apprentissage d’un travail d’équipe où chacun a sa place, agit et interagit avec les membres de l’équipe de manière coordonnée. L’enseignement par simulation constitue un complément de l’enseignement théorique. Il permet la mise en situation individuelle et collective des acteurs et une préparation au travail d’équipe. Enseignement théorique et enseignement par simulation explorent des aptitudes différentes [1] L’enseignement par simulation est déjà présent dans les deux tiers des programmes de formation universitaires à la médecine d’urgence pédiatrique en Amérique du Nord [2]. Son évaluation en termes de bénéfice pour les patients reste l’objectif principal. Justifications d’un enseignement par simulation. La reconnaissance des enfants les plus malades n’est pas toujours aisée et les erreurs entrainent une augmentation de la mortalité et de la morbidité. Launay E et al. identifiaient à posteriori dans 76% des cas quatre types de difficultés ayant pu contribuer au décès par sepsis de 21 nourrissons et enfants âgés de plus de 3 mois de 2000 à 2006. Outre le retard à consulter, il s’agissait de la non reconnaissance des signes de choc (38%), d’un retard à l’administration des antibiotiques ou à la correction du choc (38%), d’une sous estimation du choc et de sa correction (24%). Médecin libéraux, médecins du SMUR, médecins des urgences étaient également concernés [3]. Le bénéfice du suivi des recommandations internationales est largement démontré dans la littérature. L’adhésion aux recommandations internationales de prise en charge du sepsis s’accompagnait d’une réduction significative de la durée d’hospitalisation [4]. Dans une étude pédiatrique multicentrique, deux facteurs permettaient une diminution significative de la mortalité et de la morbidité : la correction rapide du choc, quelle que soit son étiologie, (5,1% vs 16,4, et 1,6% vs 4,1%) et une prise en charge d’emblée suivant les recommandations internationales d’analyse clinique et de traitement s’accompagnait d’une réduction de la mortalité (8,7% vs 15%) et de la morbidité (1,2% vs 4,2%) [5]. L’évaluation de la prise en charge de 90 enfants admis en réanimation pour sepsis ou choc septique montrait une diminution de la mortalité lorsqu’ils avaient reçu au moins 40 ml/kg de cristalloïdes au cours de la première heure par rapport à ceux qui avaient reçu moins de 20 ml/kg, si le traitement était institué dans les trente premières minutes versus au-delà de la première heure. Les principaux obstacles à une prise en charge optimale étaient la nonreconnaissance précoce du choc, le délai pour mettre une voie d’abord veineuse, l’absence de protocoles et d’objectifs thérapeutiques précis [6] . Ces données allaient dans le sens de celles de Rivers dont le travail portait sur 236 adultes en sepsis sévère ou en choc septique randomisés aux urgences entre un protocole directif et une prise en charge standard. La mortalité par collapsus était presque le double dans le groupe standard [7]. Le nombre de situations vitales aux urgences n’est pas élevé et il est donc difficile non seulement d’enseigner aux juniors les gestes de réanimation mais également de maintenir ultérieurement un niveau de compétences techniques pour des gestes rarement réalisés. Les deux tiers des résidents de pédiatrie aux urgences du Children’s Hospital Medical Center de Cincinnati n’avaient jamais eu l’occasion de faire un geste de réanimation en un an alors que l’activité était de plus de 90.000 passages annuels [8]. L’acquisition des compétences ne doit pas menacer la qualité des soins et les gestes de réanimation qui doivent être réalisés par la personne la plus compétente présente dans l’établissement. Il est donc nécessaire d’offrir aux plus jeunes un enseignement théorique associé à un entrainement pratique et aux seniors une opportunité de maintenir leurs compétences pratiques. L’enseignement des manœuvres de réanimation Il est souhaitable que tous les professionnels de santé exerçant dans un service d’urgences pédiatriques aient validé une formation théorique et pratique à la réanimation. Cette exigence existe aux USA, en Grande Bretagne, en Nouvelle Zélande, en Australie et de façon plus récente dans nombre de pays européens (Belgique, Italie, Espagne). Les étudiants ayant bénéficié d’un enseignement par simulation associé à l’enseignement théorique ont de meilleurs résultats lors des épreuves d’évaluation théorique et pratiques. Pour l’Académie Américaine de Pédiatrie la simulation est devenu une composante obligatoire de l’enseignement de la réanimation néonatale [9]. Toutefois les connaissances diminuent rapidement pour des situations peu fréquentes [10]. La répétition des enseignements est nécessaire pour maintenir un niveau de compétences élevé [11] , une plus grande réactivité face à un arrêt cardiaque et un enchainement sans perte de temps des séquences de réanimation [12] . L’enseignement des gestes pratiques. La simulation peut être la seule occasion pour un nombre important d’internes ou de résidents de réaliser certains gestes de réanimation (maniement d’un défibrillateur, intubation, drain pleural, pose d’une intra osseuse…). Quatre semaines après une formation théorique les résidents ayant reçu un enseignement complémentaire par la simulation ouvraient plus surement les voies aériennes et intubaient plus aisément que ceux n’ayant reçu que le seul enseignement théorique et leurs pratiques restaient encore supérieure 10 mois plus tard [13]. La validation de ce type d’enseignement confère aux bénéficiaires une plus grande confiance en soi pour les gestes pratiques de réanimation. Cette confiance n’est pas synonyme de qualité de la réalisation, mais elle s’accompagne d’une plus grande initiative à les entreprendre lorsque ils sont nécessaires [14]. Le travail d’équipe L’optimisation au bénéfice des patients des compétences individuelles, théoriques et pratiques, de chaque membre d’une équipe nécessite un apprentissage et un entrainement au travail d’équipe. Cet apprentissage repose sur les notions de leadership et de communication. Dans le monde de la santé, en raison de la complexité des situations, les connaissances et les compétences, le savoir et le savoir-faire, sont nécessaires mais insuffisants. Le travail d’équipe est essentiel et tient à la capacité de chacun à anticiper les besoins des autres, à s’adapter aux réactions de chacun, et à partager sans restriction une même conception de ce qui doit être fait et la manière dont cela doit être fait. Chaque situation potentielle doit être travaillée spécifiquement [15]. Une équipe se trompe moins souvent que des individus isolés [16]. Les communications insuffisantes entre membres d’une même équipe rendaient compte de 70% des événements sentinelles déclarés [17]. Au cours d’un enseignement par simulation à l’aide de trois scénarios consécutifs, la collaboration entre médecins et infirmières s’améliorait progressivement [18]. La répétition des séances et la diversité des scénarios présentés permettaient une amélioration significative des comportements, des différents acteurs de santé, restant stable à 6 mois [19]. Parmi 35 services d’urgences dont l’évaluation initiale s’avérait similaire en terme de prise en charge des polytraumatisés, une meilleure adhésion aux recommandations internationales de réanimation pédiatrique et aux guidelines de prise en charge des polytraumatisés persistait avec un recul de 6 mois au sein des 18 services ayant bénéficié d’une formation par simulation [20-21]. Enseignement par simulation et évaluation. La simulation est certes un outil d’enseignement mais c’est également un outil pertinent d’évaluation des compétences [22-23] Patterson MD et al rapportaient la mise en place dans le service des urgences pédiatriques du Children’s Hospital Medical Center de Cincinnati de séances de 15 minutes de simulation bi hebdomadaires pendant une année, décidées inopinément, réunissant une équipe multidisciplinaire. Les scénarios concernaient des détresses médicales ou chirurgicales (traumatisés). L’objectif était d’identifier les dysfonctionnements (médicaments / équipement / ressource humaine / organisation hospitalière). Et un dysfonctionnement était signalé en moyenne chaque 1,2 scénario. Le débriefing était l’occasion de discuter de la notion de leadership et d’instituer une fonction d’infirmière leader. Les participants insistaient sur la nécessité de partager un même modèle de raisonnement [24]. Une question majeure est l’évaluation du bénéfice pour les patients de la formation des professionnels de santé par la simulation. Theilen et al. ont analysé le délai entre les premiers signes d’aggravation d’enfants hospitalisés dans un centre hospitalier universitaire et leur admission en réanimation avant et après l’introduction d’une formation par la simulation à la reconnaissance de l’enfant malade et sa prise en charge, formation hebdomadaire, obligatoire, assurée dans tous les services de l’hôpital, destinée aux médecins et aux infirmières. Avec un recul de trois ans, les patients s’aggravant étaient dépistés plus rapidement, leur prise en charge était plus souvent séniorisée, le passage en soins continus plus fréquent et la mortalité intra hospitalière avait diminuée de manière significative [25]. La mise en place d’un enseignement mensuel multidisciplinaire par simulation de la prise en charge de l’arrêt cardiaque pédiatrique, avec l’objectif d’une amélioration du travail d’équipe, de la communication, de la formation de chefs d’équipe médicale s’accompagnait dans la première année d’une augmentation des retours à une circulation spontanée lors des arrêts cardiaques des enfants hospitalisés (50 vs 33%) [26]. En 2005 nous avons introduit le cours européen de réanimation dans le cursus des DES de pédiatrie, afin de former à la fin de leur premier semestre la totalité des nouveaux internes. En novembre et décembre 2007, les internes de seconde et troisième années avaient validé ce cours tandis que ceux qui débutaient leur DES et les internes de quatrième année n’avaient pas été formés. Nous avons recueilli pour chaque interne participant à l’accueil des urgences, cinq observations de diarrhée aiguë correspondant à deux enfants ayant été perfusés et trois ayant été réhydratés par un SRO. Deux lecteurs ont analysé les observations : évaluation de l’état d’hydratation, et hémodynamique de l’enfant et pertinence de la prescription au regard de l’évaluation clinique. Dans la notion de pertinence de la prescription, nous avons inclus l’identification d’un objectif thérapeutique. Ce travail multicentrique a réuni 240 observations rédigées par 48 internes dont 26 ayant validé le cours européen. De manière très significative les DES formés par le cours de réanimation rédigeaient des observations plus complètes, repéraient et corrigeaient plus souvent le choc, prescrivaient avec un objectif thérapeutique exprimé et réévaluaient les enfants plus souvent. Le faible nombre d’items cliniques renseignés, nécessaires à l’évaluation de l’état hémodynamique des enfants examinés par les DES non formés par le cours de réanimation conduisaient même à questionner la pertinence de la conclusion portée au dossier [27]. Conclusion. L’enseignement par simulation est complémentaire de l’apprentissage théorique et il prolonge la rétention de ce dernier. Il développe le savoir faire individuel et permet l’entrainement au travail d’équipe. Chaque situation particulière à une activité médicale spécifique (réanimation, urgences, anesthésie, salle d’opération, salle de naissance…) doit être travaillée en équipe par les professionnels de santé qui les prendront en charge. Le partage des connaissances, des compétences, des objectifs, la définition des rôles et l’échange d’informations sont des conditions importantes pour la réussite de ces prises en charge particulières. Les personnels des urgences et les internes de pédiatrie dès le début de leur cursus, parce qu’ils sont exposés à des conditions de travail difficiles, doivent bénéficier de ce type de formation. Références. 1 Rodgers DL, Bhanji F, McKee BR. Written evaluation is not a predictor for skills performance in an Advanced Cardiovascular Life Support course. Resuscitation 2010;81:453-6. 2 Eppich WJ, Nypaver MM, Mahajan P, Denmark KT, Kennedy C, Joseph MM et al. The role of high-fidelity simulation in training pediatric emergency medicine fellows in the United States and Canada. Pediatr Emerg Care 2013;29:1-7. 3 Launay E, Gras-Le Guen C, Martinot A, Assathiany R, Blanchais T, Mourdi N, et al. Suboptimal care in the initial management of children who died from severe bacterial infection: a population-based confidential inquiry. Pediatr Crit Care Med 2010;11:469-74. 4 Paul R, Neuman MI, Monuteaux MC, Melendez E. Adherence to PALS Sepsis Guidelines and Hospital Length of Stay. Pediatrics 2012;130:e273-80. 5 Carcillo JA, Kuch BA, Han YY, Day S, Greenwald BM, McCloskey KA, et al. Mortality and functional morbidity after use of PALS/APLS by community physicians. Pediatrics 2009;124:500-8. 6 Oliveira CF, Nogueira de Sá FR, Oliveira DS, Gottschald AF, Moura JD, Shibata AR, et al. Time- and fluidsensitive resuscitation for hemodynamic support of children in septic shock: barriers to the implementation of the American College of Critical Care Medicine/Pediatric Advanced Life Support Guidelines in a pediatric intensive care unit in a developing world. Pediatr Emerg Care 2008;24:810-5. 7 Rivers E, Nguyen B, Havstad S, Ressler J, Muzzin A, Knoblich B, et al. Early goal-directed therapy in the treatment of severe sepsis and septic shock. N Engl J Med 2001;345:1368-77. 8 Mittiga MR, Geis GL, Kerrey BT, Rinderknecht AS. The spectrum and frequency of critical procedures performed in a pediatric emergency department: implications of a provider-level view. Ann Emerg Med 2013;61:263-70. 9 Zaichkin J, Weiner GM. Neonatal Resuscitation Program (NRP) 2011: new science, new strategies. Neonatal Netw 2011;30:5-13. 10 Sutton RM, Niles D, Meaney PA, Aplenc R, French B, Abella BS, et al. "Booster" training: evaluation of instructor-led bedside cardiopulmonary resuscitation skill training and automated corrective feedback to improve cardiopulmonary resuscitation compliance of Pediatric Basic Life Support providers during simulated cardiac arrest. Pediatr Crit Care Med 2011;12:e116-21. 11 Sutton RM, Niles D, Meaney PA, Aplenc R, French B, Abella BS, et al. Low-dose, high-frequency CPR training improves skill retention of in-hospital pediatric providers. Pediatrics 2011;128:e145-51. 12 Niles D, Sutton RM, Donoghue A, Kalsi MS, Roberts K, Boyle L, et al. "Rolling Refreshers": a novel approach to maintain CPR psychomotor skill competence. Resuscitation 2009;80:909-12. 13 Mayo PH, Hackney JE, Mueck JT, Ribaudo V, Schneider RF. Achieving house staff competence in emergency airway management: results of a teaching program using a computerized patient simulator. Crit Care Med 2004;32:2422-7. 14 Turner NM, Lukkassen I, Bakker N, Draaisma J, ten Cate OT. The effect of the APLS-course on self-efficacy and its relationship to behavioural decisions in paediatric resuscitation. Resuscitation 2009;80:913-8. 15 Baker DP, Day R, Salas E. Teamwork as an Essential Component of High-Reliability Organizations. Health Serv Res 2006; 41(4 Pt 2): 1576–98. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1955345/ 16 Baker DT, Gustafson S, Beaubien J, Salas E, Barach P. Medical Teamwork and Patient Safety. The Evidencebased Relation. Agency for Healthcare Research and Quality. http://www.ahrq.gov/research/findings/final-reports/medteam/index.html). 17 Salas E, DiazGranados D, Weaver SJ, King H. Does team training work? Principles for health care. Acad Emerg Med 2008;15:1002-9. 18 Messmer PR. Enhancing nurse-physician collaboration using pediatric simulation. J Contin Educ Nurs 2008;39:319-27. 19 Gilfoyle E, Gottesman, RRazack S. Development of a leadership skills workshop in paediatric advanced resuscitation. Med Teach 2007;29:e276-83. 20 Hunt EA, Heine M, Hohenhaus SM, Luo X, Frush KS. Simulated pediatric trauma team management: assessment of an educational intervention. Pediatr Emerg Care 2007;23:796-804. 21 Hunt EA, Hohenhaus SM, Luo X, Frush KS. Simulation of pediatric trauma stabilization in 35 North Carolina emergency departments: identification of targets for performance improvement. Pediatrics 2006;117:641-8. 22 Donoghue A, Ventre K, Boulet J, Brett-Fleegler M, Nishisaki A, Overly F, et al. Design, implementation, and psychometric analysis of a scoring instrument for simulated pediatric resuscitation: a report from the EXPRESS pediatric investigators. Simul Healthc 2011;6:71-7. 23 Brett-Fleegler MB, Vinci RJ, Weiner DL, Harris SK, Shih MC, Kleinman ME. A simulator-based tool that assesses pediatric resident resuscitation competency. Pediatrics 2008;121:e597-603. 24 Patterson MD, Geis GL, Falcone RA, LeMaster T, Wears RL. In situ simulation: detection of safety threats and teamwork training in a high risk emergency department. BMJ Qual Saf 2013;22:468-77. 25 Theilen U, Leonard P, Jones P, Ardill R, Weitz J, Agrawal D, Simpson D. Regular in situ simulation training of paediatric medical emergency team improves hospital response to deteriorating patients. Resuscitation 2013;84:21822. 26 Andreatta P, Saxton E, Thompson M, Annich G. Simulation-based mock codes significantly correlate with improved pediatric patient cardiopulmonary arrest survival rates. Pediatr Crit Care Med 2011;12:33-8. 27 Chéron G, Jais JP, Cojocaru B, Parez N, Biarent D. The European Paediatric Life Support course improves assessment and care of dehydrated children in the emergency department. Eur J Pediatr 2011;170:1151-7. ENSEIGNEMENT DE LA REANIMATION EN SALLE DE NAISSANCE PAR SIMULATION Par J.-L. CHABERNAUD, G. JOURDAIN, C. BOITHIAS, N. LODE, C. BOOTISSIN, A. AYACHI Jean-Louis Chabernaud1, Gilles Jourdain1, Claire Boithias2, Noella Lodé3, Christine Boissinot4, Azedine Ayachi5 1SMUR pédiatrique, Pôle FCEE - Hôpital A. Béclère (AP-HP), 157 Rue de la Porte de Trivaux, 92141 Clamart cedex 2 Maternité et réanimation néonatale - CHU de Bicêtre (AP-HP), 94270 Bicêtre 3 SMUR pédiatrique - CHU Robert Debré (AP-HP), 75019 Paris 4 Maternité - CHU Robert Debré (AP-HP), 75019 Paris 5 SMUR pédiatrique - Hôpital Avicenne (AP-HP) – 93105 Montreuil cedex Jean-Louis Chabernaud, SMUR pédiatrique, Pôle FCEE - Hôpital A. Béclère (AP-HP), 157 Rue de la Porte de Trivaux, 92141 Clamart cedex - Email: [email protected] INTRODUCTION La simulation médicale connaît un développement majeur depuis une vingtaine d’années à travers le monde et la simulation pédiatrique « haute fidélité » représente l’ultime innovation en la matière [1]. Les techniques de simulation à l’aide de « mannequins haute fidélité » (reproduisant des perturbations des fonctions vitales grâce à l’informatique) sont actuellement recommandées en complément des méthodes traditionnelles de formation (formation théorique et pratique sur mannequin inerte) pour la formation à la réanimation du nouveau-né en salle de naissance [2]. Ceci est particulièrement vrai pour la formation initiale (« ne jamais réaliser la première fois le geste sur un patient ») mais également pour le maintien et l’amélioration des compétences des personnels exerçant en salle de naissance [3]. Elles sont actuellement disponibles dans plusieurs régions françaises et proposées sous l’impulsion de la Société Française de Néonatalogie (SFN) aux personnels des réseaux périnatals. POURQUOI LA SIMULATION EN NEONATALOGIE ? La naissance d’un nouveau-né est un des moments les plus délicats après la vie intra-utérine et les besoins en réanimation néonatale en salle de naissance concernent 10 à 15 % des naissances [4]. En cas de graves difficultés d’adaptation à la vie extra-utérine une réanimation néonatale réalisée en urgence s’impose. Elle implique en salle de naissance la participation d’une équipe pluridisciplinaire comprenant sur le plan obstérical : sages-femmes, obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, personnel du bloc obstétrical et/ou opératoire et sur le plan néonatal : pédiatre de maternité et infirmières de néonatalogie [5]. Le succès de la réanimation dépend non seulement des connaissances individuelles de chacun des différents intervenants, mais aussi et surtout de la bonne collaboration entre tous les membres de cette équipe. En terme d’organisation des soins périnatals, la réanimation en salle de naissance impose de former un nombre très important de professionnels de santé́ aux premiers gestes de réanimation de base du nouveau-né. La régionalisation des soins périnatals en centralisant les grossesses à haut risque dans les centres périnatals de type III permet d’améliorer la disponibilité́ et la compétence des équipes en cas de réanimation néonatale lourde prévisible [6]. En réalité, un peu moins de 0,1 % des nouveau-nés naissent de façon inopinée avec de graves difficultés d’adaptation à la vie extra-utérine [2]. Beaucoup de pathologies néonatales complexes sont exceptionnelles et les professionnels intervenant dans les centres périnatals sont très nombreux. Il n’est donc pas possible que chacun y soit exposé avec une fréquence suffisamment élevée pour leur permettre l’acquisition d’une expérience individuelle suffisante. De plus, alors même que la synchronisation des interventions multidisciplinaires est fondamentale, le personnel médical et surtout infirmier, est soumis à de fréquentes rotations ou à un renouvellement important. BUTS DE LA SIMULATION EN NEONATALOGIE La simulation médicale en néonatalogie a une place indiscutable dans la formation initiale et continue des personnels de la naissance. Elle s’oriente selon trois axes principaux : l’acquisition de compétences de base, la gestion des erreurs les plus communes (ceci s’applique plutôt aux “juniors”), la prise en charge d’évènements rares mais graves (évènements exceptionnels y compris pour des médecins chevronnés), la gestion du travail en équipe et ses dysfonctionnements : gestion de crise ou CRM (crew resources management ou crisis resources management). Elle s’intègre dans une politique nationale de prévention des risques liés aux soins. La formation à̀ la réanimation du nouveau-né à la naissance par la simulation médicale permet l’enseignement et l’apprentissage de la réanimation de base selon l’algorithme de l’International Consensus on Cardiopulmonary Resuscitation (ILCOR), mais aussi un apprentissage plus complexe avec analyse des comportements et des interactions au sein des équipes périnatales intervenant en salle de naissance [7-9]. L’objectif essentiel de cette formation est d’abord d’améliorer la qualité́ et la sécurité́ des soins aux nouveau-nés autour de la naissance tout en diminuant le stress pour les équipes périnatales qui la pratiquent. Elle peut aussi devenir un outil de recherche (Tableau I). PERSONNELS CONCERNES La simulation médicale pour la réanimation néonatale en salle de naissance est utilisable pour la formation des étudiants en médecine, des internes de pédiatrie et d’anesthésie, mais aussi pour le développement professionnel continu (DPC) des médecins hospitaliers comme les pédiatres exerçant en maternité ou au sein des unités de néonatalogie. Elle n’a pas seulement une vocation de formation hautement spécialisée en périnatalogie (enseignement d’une équipe périnatale universitaire) mais est également appropriée pour la formation des équipes non universitaires des centres périnatals de type I et II ou des pays émergents (Tableau I). CENTRES DE SIMULATION EN EUROPE En 2005, Bressan et al. comptaient seulement trois centres de simulation médicale en France, pour 60 centres en Europe [10]. En 2009, une enquête montrait que sur les 110 centres de simulation déclarés en Europe, 38 (30 %) déclaraient une activité de simulation pédiatrique [11]. La simulation pédiatrique était peu développée en France et aucun centre français n’avait pu répondre à cette enquête par absence ou insuffisance d’activité pédiatrique. Malgré une littérature internationale recommandant son emploi pour la réanimation néonatale seulement 25 % des centres de simulation pédiatriques (CSP) français avaient un programme de néonatalogie [11]. La majorité des centres répondeurs étaient principalement universitaires et avaient préalablement acquis une solide expérience en simulation médicale adulte pour secondairement développer une activité de simulation pédiatrique. Ces CSP étaient majoritairement liés à une faculté de médecine centralisant cette technique coûteuse, permettant ainsi d’en tirer un rendement optimal, tant en terme de formation initiale ou continue qu’en terme de recherche. La distribution géographique des centres (50 % des centres répondeurs étaient au Royaume-Uni) est hétérogène, ce qui souligne les divergences des politiques de prévention des risques médicaux des différents systèmes de santé. L’Angleterre a, depuis plusieurs années, choisi de privilégier la prévention des risques liés aux actes médicaux. Elle suit ainsi le phénomène initié aux Etats-Unis par le rapport de l’« Institut of Medicine » : To err is human, qui rapportait 44000 décès par an attribuables aux erreurs médicales et proposait la simulation médicale comme solution à ce problème [12]. Ainsi, les autorités stratégiques de santé anglo-saxonnes participent politiquement et financièrement au développement de la simulation médicale en Grande-Bretagne [13]. Selon Lasalle et al. il y aurait un grand intérêt à proposer un plan de développement, national et européen, des centres de simulation afin de créer un réseau performant, d’exploiter au mieux cette technique, et d’inciter la création de centres en France et dans les autres pays d’Europe, tout comme cela a été réalisé aux USA sous l’égide de l’American Society of Anesthesiologists [11,14]. BENEFICES POUR LA NEONATALOGIE Les bénéfices de l’enseignement par simulation en complément des méthodes traditionnelles de formation (formation théorique et pratique sur mannequin inerte) pour la formation à la réanimation du nouveau-né en salle de naissance sont nombreux (Tableau II). Au Royaume-Uni, l’analyse périodique des décès en obstétrique a montré que plus de la moitié des morts maternelles et néonatales auraient pu être évitées si la qualité technique de la réanimation avait été optimale et que les problèmes de communication jouaient un rôle particulièrement essentiel [15]. Ces résultats sont concordants avec ceux rapportés parallèlement aux Etats-Unis, montrant que la qualité de la communication dans l’équipe obstétrico-pédiatrique et anesthésique est en cause dans plus de 70 % des cas de morbi-mortalité périnatale [16,17]. Même si la nécessité de mieux former les équipes obstétrico-pédiatriques aux urgences périnatales est bien établie, la meilleure façon d’atteindre cet objectif reste encore à définir [18]. En revanche de nombreuses autorités médicales ont recommandé l’adoption de formations aux facteurs humains, au travail en équipe, ainsi que l’intégration d’exercices pratiques de simulation d’urgence obstétricale et néonatale, en s’inspirant des méthodes de formation déjà utilisées dans des secteurs d’activité à risque élevé (aéronautique, industrie de l’énergie nucléaire) [15,16,19,20]. Les preuves de l’efficacité de l’utilisation de la simulation pour la réanimation néonatale sur la réduction de la morbimortalité semblent confirmées dans de larges études, même si elles ne sont pas toutes prospectives [21-23]. L’apprentissage médical sur simulateur « haute fidélité » (HF) paraît aujourd’hui fondamental : une étude récente retrouve une meilleure application des recommandations, et, pour la première fois, une tendance à un meilleur devenir des patients en arrêt cardio-respiratoire traités par des médecins juniors entraînés sur un simulateur H.F. par rapport à ceux ayant bénéficié de l’apprentissage classique [2]. PRINCIPES PEDAGOGIQUES Les principes pédagogiques de base reposent sur un enseignement avec un cycle d’apprentissage « expérientiel » intégrant théorie, pratique, analyse, feed-back et réflexion sur la performance (« cycle d’apprentissage ») dans lequel le retour d’information ou feed-back joue un rôle essentiel (Tableau III) [16]. Cependant l’effet de la simulation, hormis la réminiscence des acquis de base, semble s’estomper après un durée de 6 mois. Cela souligne l’importance de la répétition régulière des séances de formation [17,18]. RECOMMANDATIONS DE LA HAUTE AUTORITE EN SANTE (HAS) Le Pr Jean-Claude Granry et le Dr Marie-Christine Moll, chargés d’une mission sur la simulation en santé par la HAS, ont remis en début d’année 2012 un rapport dans lequel ils dressent un état des lieux des initiatives existantes au niveau national et international et formulent des propositions pour favoriser le déploiement de la simulation en santé́ dans le cadre du développement professionnel continu (DPC) [24]. Des recommandations, auxquelles a participé le Pr E. Saliba président de la Société Française de Néonatalogie (SFN), ont ensuite été publiées en décembre 2012 [25]. Quelle que soit la technique de simulation utilisée, les séances doivent répondre aux mêmes impératifs. Les scénarios sont rédigés suivant un plan formalisé qui permet de cibler les apprenants, de définir des objectifs pédagogiques et de détailler le matériel à utiliser ainsi que les moyens humains à engager (tableaux III et IV). Chaque séance sera composée de plusieurs scénarios qui s’enchaînent. La séance est structurée en 3 parties : un briefing avec présentation du matériel, énoncé des objectifs et rappel de la théorie. La réalisation des scénarios par les apprenants vient ensuite. Enfin il y a une période de débriefing avec une phase descriptive puis une phase analytique et enfin une synthèse. Le double objectif de ces séances est un retour d’expérience immédiat pour les apprenants et une évaluation des acquis par les formateurs. LE ROLE ESSENTIEL DE LA SOCIETE FRANCAISE DE NEONATALOGIE Les techniques de simulation à l’aide de mannequins « haute fidélité » sont actuellement disponibles dans plusieurs régions françaises et proposées sous l’impulsion de la Société Française de Néonatalogie (SFN) aux personnels des réseaux périnatals. Un groupe intitulé : « Enseignement de la réanimation en salle de naissance et simulation » s’est créé au sein de la SFN en 2011. Le centre de simulation néonatale d’Aix Marseille y a joué un rôle de pionnier dès février 2010. Ce groupe national regroupe plusieurs régions universitaires : Aix-Marseille (U. Siméoni, V. Andrès, Y. Rimet), Amiens (P. Tourneux), Angers (F. Beringue-Daures), Bordeaux (J. Naud, C. Elleau, O. Tandonnet), Brest (V. Laparra), Caen (B. Guillois, A. Bellot), Dijon (F. Godde), Ile de France (GEN-IF: Paris V/Ilumens® et Paris XI/LabForSIMS ®), Lille (J-F Diependaele), Lyon (G. Putet, S. Blanc, S. Rubio-Gurung), Montpellier (M. Badr), Poitiers (K. Husseini), Quimper (C. Quiennec), Rennes (P. Pladys), La Réunion (J-B Gouyon), Rouen (T. Blanc), Strasbourg (D. Astruc) ,Toulouse (C. Casper, C. Assouline) et Tours (E. Saliba, K. Norbert). Un fascicule pédagogique (distribué aux cours des formations) et un diaporama (réservé aux instructeurs) communs au niveau national concernant la réanimation du nouveau-né à la naissance ont été rédigés et validés de façon consensuelle par l’ensemble du groupe, et sont disponibles depuis la mi 2013. Des critères de labellisation ont été élaborés pour les centres de simulation, l’enseignement par simulation et les formateurs des centres. Ces critères ont été discutés puis adoptés lors des conseils d’administration de la SFN. Reste en discussion l’élaboration de scénarios communs. Un elearning sur la réanimation en salle de naissance a été élaboré par le Pr P. Pladys à la Faculté de Rennes. Plusieurs membres et formateurs du groupe ont suivi ou vont suivre le DU d’enseignement par simulation d’une des trois facultés l’organisant (Paris V, Brest et Dijon) selon les places disponibles en 2012-2013. Un “DIU de formation à la simulation en sciences de la santé avec application à la périnatalité et la pédiatrie” organisé par les trois facultés d’Angers, Poitiers et Tours a également été créé début 2013. Le centre de l’Université Paris-Sud (LabForSIMS®) en Ile de France, déjà opérationnel pour l’enfant et l’adulte et dont la partie néonatalogie a été confiée au groupe de simulation du Groupe d’Etudes en Néonatalogie de l’Ile de France (GEN-IF) sous la responsabilité des Dr Claire Boithias (Bicêtre) et Gilles Jourdain (A. Béclère). Le mannequin a été acheté en 2012 par la Faculté de médecine de l’Université Paris-Sud (Paris XI) et une formation de 3 jours a été organisée à la mi 2013 pour les membres du groupe simulation du GEN-IF (Drs Claire Boithias, Jean-Louis Chabernaud, Gilles Jourdain, Noella Lodé, Christine Boissinot, Aazzedine Ayachi et Juliana Patkai : maniement du mannequin et du programme informatique, élaboration de scénarios) pour les DES de pédiatrie de la région Ile de France (1er ou 2ème semestre). MATERIEL ET PERSONNELS NECESSAIRES Mannequin simulateur Le modèle SimNewB Advanced® de Laerdal est actuellement le plus répandu dans notre pays. Il s’agit d’un mannequin grandeur nature, très réaliste qui fonctionne avec son propre moniteur et un ordinateur de gestion. Il peut être branché sur les fluides muraux ou fonctionner à l’aide d’un compresseur. Le mannequin obéit à un scénario préétabli « basique » ou « avancé ». Les situations cliniques, vécues le plus souvent en équipe, sont extrêmement proches de la réalité. Ce mannequin simule différents types de ventilation spontanée (normale ou pathologique) et peut être ventilé en pression positive au masque ou sur tube endotrachéal après intubation (Photos 1 et 2). Le cordon ombilical présente un pouls et peut être cathétérisé (Photo 3). Il existe un site pour exsuffler un pneumothorax. Le formateur peut faire varier les constantes vitales et l‘état clinique du mannequin. La programmation des variables vitales affichées permet ensuite une navigation simplifiée d’un stade à l’autre durant le scénario utilisé, en fonction des mesures appliquées par les apprenants. D’autres types de mannequins néonatals existent proposés par deux sociétés américaines Gaumard (Baby Hall®) et Meti (Baby SIM®) moins répandus en France. Des études permettant de comparer les mannequins pédiatriques HF disponibles sont nécessaires pour rendre plus claire l’offre des industriels et permettre aux centres volontaires de s’équiper en toute connaissance des avantages et inconvénients des différents types de mannequins. Equipement audio-visuel pour débriefing Il est également nécessaire de disposer d’un équipement audio-visuel permettant l’utilisation de la vidéo en particulier au cours du débriefing post-simulation. Une table de mixage audio et vidéo intègre les données du monitorage ainsi que les images prises par les caméras avec le son pour les stocker ensuite sur un disque dur. Un programme informatique permet ensuite de sélectionner une séquence pour la revoir à la vitesse désirée. Il est ainsi possible de projeter « en direct » des séquences de la séance de simulation à une partie des apprenants. Personnel Les formateurs font en général partie des équipes médicales des unités de réanimation néonatale ou des SMUR pédiatriques des centres universitaires français. Ils doivent présenter d’excellentes qualités cliniques et pédagogiques et être formés (idéalement par un DIU) aussi bien aux méthodes de formation et d’utilisation du matériel de simulation qu’au débriefing. Il est également nécessaire qu’une personne soit affectée au fonctionnement du centre de formation pour assurer le maintien du mannequin et de l’informatique en état de fonctionnement, la bonne marche du matériel audio-visuel et aussi pour participer aux séances de formation. CONCLUSION En France la simulation est encore émergente mais sa diffusion en néonatalogie pour la formation à la prise en charge et à la réanimation du nouveau-né en salle de naissance est en cours et va croître au cours des dix prochaines années dans les régions françaises. Elle présente de nombreux avantages théoriques et son efficacité sur la qualité des soins périnatals et la sécurité des nouveau-nés est aujourd’hui démontrée. Cependant, comme l’a montré l’enquête effectuée pour établir les recommandations de l’HAS, cette activité est marquée par des difficultés de financement, des équipements insuffisants et un manque d’harmonisation des pratiques. Tout comme dans les autres spécialités, il est donc absolument nécessaire, en néonatalogie, d’encadrer ce type d’enseignement avec des règles bien définies. Tableau I : Objectifs d’un programme de simulation à la réanimation néonatale en salle de naissance. Inspiré de Gaba et Pfister [5,9]. Objectifs : Enseignement Entraînement Evaluation/certification Recherche Public : Etudiant en formation (formation initiale ou secondaire) Professions de la naissance (sage-femme, médecin, infirmière) Spécialités (néonatalogiste, obstétricien, anesthésiste-réanimateur, etc) Equipe (professionnels de la périnatalité) Population (région géographique) Type de connaissance : Conceptuelle Technique « Leadership » Attitude et comportement d’équipe Outils : Théorie (ex. physiopathologie, recommandations et algorithmes de l’ILCOR/ERC) Simulation partielle (ex. intubation d’urgence) Simulation « basse fidélité » (mannequin inerte) Simulation « haute fidélité́ ». Tableau II : Avantages de la simulation en néonatalogie, d’après Pfister [5] Absence de risque pour le patient Apprentissage dans un milieu constructif et détendu (erreur « permise » – apprentissage par l’erreur) Apprentissage de compétences « techniques » et « non-techniques » (communication, leadership, etc) Répétition à volonté de situations à haut risque et de faible incidence Possibilité de standardiser l’enseignement Possibilité du « feed-back » par soi-même (enregistrement vidéo) et par l’instructeur (« débriefing ») Entraînement de l’approche individuelle ou d’équipe. Tableau III : Cycle d’apprentissage de l’enseignement par simulation (d’après Pfister) [5] 1- Préparation : enseignement traditionnel (théorie : document écrit, diaporama, enseignement en ligne etc.) 2- Briefing de l’exercice en simulation (explication du contexte, des objectifs et du déroulement) 3- Expérience pratique sur le simulateur (enregistrement) 4- Débriefing avec soutien audio-visuel : feed-back par les apprenants et l’instructeur 5- Réflexion sur la pratique/performance permettant l’acquisition/intégration de nouvelles connaissances 6- Répétition pratique sur le simulateur d’un scénario identique/similaire. 7- Débriefing avec soutien audio-visuel 8- Elaboration des acquisitions et de la théorie par l’apprenant et identification des objectifs d’apprentissage futurs (lacunes à combler). Tableau IV : Bonnes pratiques d’une séance de simulation selon l’HAS (mise en œuvre par un formateur formé à la simulation) [25] : Identification des objectifs pédagogiques Rédaction du scénario visant ces objectifs Définition d’un environnement réaliste permettant d’atteindre les objectifs pédagogiques Définition et préparation des équipements, du matériel, du mannequin, etc. Préparation du matériel vidéo si nécessaire Structuration de la séquence préparatoire de présentation du contexte et de l’équipement : briefing Déroulement du scénario Structuration de la séquence de synthèse et d’évaluation encadrée : debriefing Définition du document de fin de séance proposant des actions d’amélioration. photo 1 – ventilation au masque photo 2 : intubation endotracheale Photo 3 : pose catheter veineux ombilical REFERENCES 1. Halamek LP, Kaegi DM, Gaba DM et al. Time for a new paradigm in pediatric medical education: teaching neonatal resuscitation in a simulated delivery room environment. 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Décembre 2012 TABLE RONDE 2 Quoi de neuf sur le syndrome hémolytique et urémique ? SYNDROME HEMOLYTIQUE ET UREMIQUE A VEROTOXINE EPIDEMIOLOGIE Par Georges Deschênes (1), Patricia Mariani-Kurkdjian (1), Lisa King (2) (1) APHP Robert-Debré (2) Institut National de Veille Sanitaire Le syndrome hémolytique et urémique est une maladie rénale acquise marquée par l’association entre une hémolyse mécanique et une insuffisance rénale aiguë. Il est secondaire à une infection digestive par Escherichia coli producteurs de vérotoxine (Shigatoxins E. coli ou STEC) capables d’induire l’apoptose des cellules endothéliales. Le SHU à E. coli à vérotoxines est la première cause d’insuffisance rénale aiguë chez l’enfant de moins de 3 ans [1]. La situation endémique en France Le syndrome hémolytique et urémique à E. coli à vérotoxine fait l’objet d’une surveillance annuelle par l’Institut de Veille Sanitaire depuis 1996. Les principaux éléments à retenir sont [1,2] : • L’incidence des cas répertoriés n’a jamais été aussi élevée que dans les 5 dernières années 2008-2012 avec des chiffres compris entre 0,91 et 1,32 nouveaux cas/an/100 000 enfants de moins de 15 ans soit entre 109 et 162 cas/an. • La répartition territoriale des cas est hétérogène et épargne relativement (incidence annuelle < 0.70) le pourtour méditerranéen et une zone nord-sud continue comprenant l’Ile-de-France, la Touraine, le Poitou et l’Aquitaine. Les départements les plus touchés (incidence > 1,50) sont le Finistère, la Manche, toute la région Franche-Comté (Doubs et Jura), la Meuse et le Puy de Dôme. La Creuse et les Hautes Alpes sont les deux seuls départements sans cas de SHU à vérotoxines en 25 ans de surveillance. • La recrudescence estivale est significative tous les ans avec 50 % des cas ou plus survenant entre juillet et septembre. • Un E. coli à vérotoxines ou la présence d’un des gènes codant une et/ou les deux vérotoxines (VT1, VT2 ou shigatoxines stx1, stx2 ; les deux terminologies désignent les mêmes molécules) a été retrouvé chez 71 % des enfants diagnostiqués en 2012. Le sérogroupe majoritaire est E. coli O157 (48 % des cas totaux) mais plusieurs autres sérogroupes sont également présents sur le territoire français : O26 (14 %), O121 (10 %), O145 (5 %), et O111 (7 %) ; ces 4 sérogroupes représentent 36 % des cas totaux de l’année. Le sérogroupe O104, célèbre depuis l’épidémie allemande en 2011, n’a été retrouvé que dans un seul cas en 2012 en France. • La répartition des cas selon l’âge des malades montre une incidence 23 fois plus élevée entre 0 et 2 ans [2,3] qu’entre 11 et 15 ans (0,1). 97 % des cas sont observés avant l’âge de 10 ans. Le sex-ratio est très proche de 1. • Aucun signe clinique ou biologique est constant dans la série qui regroupe maintenant plus de 1680 cas : la diarrhée est présente dans 95 % des cas et sanglante dans 60 % des cas, l’anémie est présente dans 98 % des cas, nécessitant une transfusion de culot globulaire dans 86 % des cas, la présence de schizocytes est observée dans 97 % des cas, d’une thrombopénie dans 96 % des cas, l’insuffisance rénale dans 97 % des cas. L’absence d’un signe biologique cardinal n’élimine donc pas le diagnostic. Toute suspicion de SHU même avec un tableau incomplet doit être investiguée par la recherche d’E. coli à vérotoxine ou de vérotoxine dans un écouvillonnage rectal prélevé dès l’arrivée du malade [3]. Les épidémies en France Elles sont assez peu nombreuses et les plus notables sont répertoriées dans le tableau suivant [2] Région Année Cas de diarrhée Cas de SHU Aliment vecteur Serogroupe E. coli Cher 1991 nd 5 Fromage de chèvre Nd Oise 1992 nd 10 Non identifié O111* Aquitaine 2005 67 17 Viande hachée O157 Normandie 2005 nd 16 Laitages O26 Aquitaine 2011 24 7 Graines germées O104 Nord 2011 nd 18 Viande hachée O157 Aquitaine Charentes 2012 15 9 Viande hachée O157 * E.coli O111 porteur du gène Aggr et STX2 Les aliments impliqués dans la transmission épidémique de la maladie sont emblématiques. Le principal réservoir des STEC est le tube digestif des bovins. La très grande majorité des sources de contamination par les STEC d’E. coli à vérotoxines sont toutes les viandes d’élevage insuffisamment cuites et tous les produits dérivés du lait de vache ou de chèvre non pasteurisés. La transmission par les aliments végétaux est plus rare mais connue de longue date, en particulier depuis la description de cas groupés après l’ingestion de jus de pomme non pasteurisé, de pousses de radis et récemment des graines de fénugrec…. En France, les coquillages, moules et huitres, sont également des vecteurs potentiels d’E. coli à vérotoxines en raison de leur consommation sous forme crue. La baignade sauvage en eau douce (lac, piscine, mare) et la transmission interhumaine ou par contact direct avec des animaux de ferme ont été régulièrement rapportés dans la littérature comme des facteurs de contamination des E. coli à vérotoxines. L’épidémie allemande en 2011 Entre le 1er mai et le 4 juillet 2011, 2987 cas de gastro-entérites, 855 cas de SHU et 53 morts on été rapportés à une infection digestive par E. coli O104:H4 sur le territoire allemand. Hors Allemagne, 83 cas de gastroentérite et 54 cas de SHU secondaire à une infection avec le même E. coli O104:H4 ont été recensés après une contamination en Allemagne du nord au cours du mois de mai 2011. Vingt-quatre de ces cas ont été observés en Aquitaine, 7 d’entre eux ayant développé un SHU. Le seul aliment commun à tous les cas était des graines de fenugrec provenant d’un seul producteur de la vallée du Nil. Cependant, la souche incriminée dans l’épidémie n’a jamais pu être mise en évidence dans un échantillon alimentaire. Plusieurs particularités méritent d’être soulignées [4-6] : • La prévalence du SHU était de 22 % des infections digestives • La majorité des malades étaient des adultes et plus particulièrement des femmes • Le taux de décès était particulièrement important (6,2 %), et probablement en rapport avec l’âge des malades et la fréquence des complications neurologiques. Les trois hôpitaux de Hambourg ont reçu 217 cas de SHU en 2 mois dont 48 % avaient une atteinte neurologique à type de convulsions, d’aphasie ou de troubles graves de la cognition. • La durée moyenne de portage colique était de 34 jours avec une durée maximale supérieure à 1 an, liée à la présence d’un plasmide contenant le gène d’adhésion aggr. • Cette souche de E. coli O104:H4 est un pathogène hybride possédant à la fois des facteurs de virulence d’EHEC (gène stx2 importé dans le génome chromosomique par un bactériophage), des facteurs d’adhésion des EAEC (aggr+, importé dans le génome extrachromosomique par le plasmide AAF/I) et des facteurs de pathogénicité des E. coli extra-intestinaux ExPEC (HPI, aérobactine présents dans le génome chromosomique). La souche avait acquis un deuxième plasmide (TEM-CTXM15) conférant à la souche une résistance par bêta-lactamase à spectre étendu. L’origine de la souche a été associée à une souche humaine EAEC O104 :H4 isolée en 1989 en Centrafrique chez un patient VIH. En effet, la souche de 2011 présente 93 % d’homologie avec la souche de 1989 qui, au cours de son évolution, a perdu des facteurs de virulence (plasmide AAF/III) et en a acquis d’autres (plasmide AAF/I, plasmide TEM-CTXM15, HPI, phage stx2a). Bibliographie 1. L King, M Macé, P Mariani Kurkdjian, M Gouali, V Vaillant. Surveillance du syndrome hémolytique et urémique post diarrhéique chez les enfants de moins de 15 ans en France en 2011. Site Institut de Veille Sanitaire INVS www.invs.sante.fr 2. Actualités – épidémie. Site Institut de Veille Sanitaire www.invs.sante.fr 3. Rosales A, Hofer J, Zimmerhackl LB, Jungraithmayr TC, Riedl M, Giner T, Strasak A, Orth-Höller D, Würzner R, Karch H; German-Austrian HUS Study Group Need for long-term follow-up in enterohemorrhagic Escherichia coliassociated hemolytic uremic syndrome due to late-emerging sequelae. 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Oualha Introduction Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) est une maladie de l’endothélium vasculaire de type microangiopathie thrombotique (MAT). Son diagnostic repose sur une triade biologique associant une anémie aiguë hémolytique (taux d’haptoglobine effondré, taux de lactate déshydrogénase (LDH) élevé) avec schizocytose, une thrombopénie périphérique et une insuffisance rénale aiguë (IRA). Il représente la principale cause d’IRA chez l’enfant de moins de 3 ans. Les SHU (90-95 %) sont aigus et secondaires à une infection bactérienne. En France, le SHU survient dans 90 % des cas après une infection digestive à Escherichia coli (E. coli) producteur de Shiga-toxine (Stx) ou Stx producing enterohaemorrhagic E. coli (STEC), cette forme de SHU est dite typique post-diarrhéique (SHU-D+). Le SHU postinfectieux peut aussi survenir après une infection à pneumocoque ou après une infection digestive à Shigella dysenteriae dans les zones d’endémie. Les SHU aigus post-infectieux se manifestent essentiellement par des signes rénaux et hématologiques [1,2]. Les SHU chroniques ou atypiques sont beaucoup plus rares (5-10 %), ne sont pas précédés classiquement d’une phase prodromale infectieuse et sont plus fréquemment associés à des manifestations extra-rénales. Ils peuvent être secondaires à différentes anomalies constitutionnelles [3–5] La forme habituelle du SHU-D+ associe à la phase aiguë les signes de la triade biologique : anémie hémolytique (100 % des cas) avec schizocytose (97 % des cas), thrombopénie (96 % des cas) et IRA (97 % des cas), et survient 1 à 10 jours après une phase prodromale digestive [6]. Des complications extra-rénales sont notées dans 20 % des cas. Le pronostic du SHU-D+ est favorable (survie sans séquelle dans 80-85 % des cas) mais des formes sévères sont associées à un risque de décès à la phase aiguë (2 à 4 % des cas) et à des séquelles, essentiellement rénales, dans 20 à 25 % des cas [7]. La phase prodromale Evolution d'une infection à STEC [8] Les voies de contamination sont alimentaires (viandes bovines peu cuites, produits au lait cru) dans 45 % des cas, interhumaines ou par contact avec des ruminants contaminés. La durée médiane de l’incubation est de 3 jours (2-10). Les différentes manifestations cliniques d’une infection à STEC sont une diarrhée (90 % des cas) souvent glairosanglante (60-90 % des cas) et parfois fébrile (40 % des cas), des vomissements, des douleurs abdominales. La durée de la phase prodromale est de 7 jours. Les fréquences des différents symptômes de la phase prodromale ne sont pas souvent décrites dans la littérature, et sont assez hétérogènes d’une série à l’autre. L’InVS ne précise pas ces données. La phase d’état Nous rapportons les résultats de notre série des 49 SHU-D+ hospitalisés à Necker entre 2000 et 2011 et les comparons à ceux décrits dans la littérature et/ou rapportés par l’InVS [6]. L’atteinte rénale L’atteinte rénale du SHU-D+ peut se manifester par une IRA, une protéinurie qui peut être néphrotique, une hématurie, une HTA. Dans notre cohorte, tous les patients avaient présenté une atteinte rénale, 45 patients (92 %) avaient eu une IRA dont 32 (71 %) avaient été dialysés pour une durée de 9 jours (1-47). Vingt patients (41 %) avaient été traités pour HTA, pour 8 d’entre eux seulement au cours de l’hospitalisation initiale pendant une durée de 5,5 jours (2-24), et pour 10 d’entre eux, les antihypertenseurs avaient été poursuivis après la sortie. La présentation rénale du SHU-D+ à la phase aiguë était plus sévère dans notre cohorte que celles décrites par l’InVS [6] et la littérature [9–11] , on retrouvait un taux plus important de dialyse (65 % versus 46 %), surtout de dialyse prolongée, d’HTA nécessitant un traitement anti-hypertenseur. L’atteinte hématologique Dans notre cohorte, tous les patients avaient présenté une atteinte hématologique, tous avaient eu une anémie dont 42 (85 %) avaient reçu au moins une transfusion de culots globulaires et 48 patients (98 %) avaient eu une thrombopénie dont 8 (17 %) avaient reçu au moins une transfusion de culots plaquettaires. Les taux de transfusions en culots globulaires et/ou plaquettaires de notre série sont proches de ceux rapportés par l’InVS (87 % versus 89 %) [6]. Les atteintes autres extra-rénales Environ 20 à 30 % des patients atteints de SHU-D+ ont au moins une atteinte extra-rénale associée à la phase aiguë, ce qui augmente la mortalité et le risque de séquelle. Les atteintes extra-rénales ne sont pas rapportées par l’InVS, nous comparons les résultats de notre cohorte à ceux de la série de Loirat et al. en 2001 [9]. Tableau I : Atteintes extra-rénales du SHU-D+ Atteintes extrarénales Neurologique Littérature Loirat 2001 [9] Manifestations Fréquence Série Necker 2000-2011 Manifestations Fréquence 15-20 % convulsions coma ischémie cérébrale Pancréatique convulsions brèves convulsions prolongées confusion signes de localisation coma troubles oculaires syndrome cérébelleux 20 % pancréatite aiguë intolérance glycémique Hépatique pancréatite aiguë intolérance glycémique 40 % cytolyse cholestase Digestive cytolyse cholestase 20 % colite sévère nécrose colique Cardiaque invagination intestinale aiguë colite hémorragique iléite appendicite 1-3 % myocardite cardiomyopathie dilatée ischémie myocardique péricardite dysfonction myocardique ischémie myocardique sans dysfonction atteinte vasoplégique 39 % 5/49 9/49 9/49 2/49 8/49 6/49 1/49 25 % 9/49 3/49 48 % 30/49 0 16 % 1/49 4/49 2/49 1/49 14 % 4/49 1/49 2/49 Dans notre cohorte, la présentation du SHU-D+ à la phase aiguë était plus sévère que celles décrites par l’InVS et la littérature, on retrouvait un taux plus important de dialyse (65 % versus 46 %), surtout de dialyse prolongée, d’HTA nécessitant un traitement anti-hypertenseur, d’atteintes extrarénales neurologique (39 % versus 20-30 %), pancréatique (34 % versus 20 %), hépatique (61 % versus 40 %), et cardiovasculaire (14 % versus 1-3 %), et de décès (6 % versus 4 %). Le taux de complications digestives sévères est par contre proche de celui rapporté dans la littérature (16 % versus 20 %). Ces différences peuvent être expliquées en partie par le biais de sélection lié au fait que les patients étaient adressés dans les services spécialisés de réanimation et néphrologie pédiatriques de l’hôpital Necker Enfants Malades devant la gravité initiale ou potentielle de la symptomatologie. De plus, on peut supposer que ces patients avaient eu lors de leur hospitalisation dans ces services spécialisés plus d’explorations cliniques et paracliniques à la recherche des différentes atteintes extra-rénales. L’InVS ne précise pas la fréquence des différentes atteintes extra-rénales et les séries de la littérature ne décrivaient ni les critères diagnostiques et ni la fréquence de la recherche de ces atteintes. Les complications cardiologiques et pancréatiques en particulier n’étaient que peu décrites. Ces séries sont anciennes, il est possible qu’il y ait eu une sousestimation de la fréquence des différentes atteintes extra-rénales, à la fois quant aux critères diagnostiques car les examens paracliniques étaient moins performants, mais également quant à l’évolution épidémiologique récente. Un recueil de données annuel sur toutes les atteintes extra-rénales du SHU-D+ par l’InVS pourrait permettre une exploration plus exhaustive de ces atteintes et ainsi une évaluation précise de leurs fréquences. Les séquelles Elles sont observées dans 25 % des cas. Les séquelles rénales sont une protéinurie pathologique (15 % des cas dans la littérature, 22 % dans notre cohorte), une HTA (10 % des cas dans la littérature, 15 % dans notre cohorte) ou une insuffisance rénale chronique (IRC) (5 % des cas dans la littérature comme dans notre cohorte) [12,13]. Les séquelles neurologiques concernent dans la littérature environ 30 % des enfants atteints de SHU-D+ avec signes neurologiques à la phase aiguë et sont sévères dans 1/3 des cas [14] . Aucun patient de notre cohorte n’a de séquelle neurologique. Le diabète insulino-dépendant représente la seule séquelle pancréatique rapportée dans une méta-analyse de 2005 [15]. Les séquelles cardiaques, comme l’atteinte cardiaque à la phase aiguë, sont peu décrites dans la littérature et essentiellement sous la forme d’observations cliniques [16–18]. Dans notre cohorte, 7 patients avaient présenté une atteinte cardiaque à la phase, 3 sont décédés et les 4 autres ne semblent pas avoir de séquelle. Formes sévères Les formes sévères de SHU-D+ sont rares, leur définition n’est pas consensuelle. Elles associent, selon les études, les décès, les atteintes neurologiques aiguës et/ou persistantes et les séquelles. Le taux de décès à la phase aiguë du SHU-D+ est de 4 % dans la littérature et 6 % dans notre cohorte, les causes sont essentiellement neurologiques et/ou cardiovasculaires. Les facteurs rapportés comme associés au risque de décès sont l’atteinte neurologique, l’anurie, la déshydratation et l’hyperleucocytose supérieure à 20 000/mm3 [19]. Les formes sévères à la phase aiguë sont moins décrites. Une série japonaise récente a rapporté 127 cas de SHU-D+ et analysé les formes graves, définies comme celles avec une atteinte neurologique -quels qu’en soient les symptômes- et/ou avec un recours à la dialyse. Ces formes n’étaient pas graves d’emblée mais se compliquaient au cours du séjour. A l’admission, les facteurs de risque de formes graves étaient une cytolyse hépatique, un syndrome inflammatoire et une hyponatrémie inférieure à 130 mmol/L [20]. D’autres études avaient souligné, à la phase d’état, la relation entre le recours à la dialyse et l’atteinte neurologique [21,22]. La série de Greinhacher et al. de 2011 rapporte les formes sévères comme celles avec une atteinte neurologique sévère - définie par la survenue d’une désorientation, d’hallucinations, d’une aphasie, d’une parésie, d’un déficit sensitivo-moteur, de convulsions ou d’un état de mal épileptique - était survenue à J5 (3,75-6) soit avec un délai de 8 jours (5-15) par rapport au début des symptômes digestifs [23]. Dans notre cohorte, nous avons défini les formes sévères à la phase aiguë comme celles avec une menace du pronostic vital par les atteintes neurologiques sévères ou cardiovasculaires ou celles ayant conduit au décès. L’atteinte neurologique avait débuté à J1 soit 7 jours après le début des symptômes digestifs, le coma était survenu 4 jours après le diagnostic de SHU-D+ soit 11 jours après le début des symptômes digestifs avec nécessité d’une ventilation mécanique pendant 4 jours. L’atteinte cardiovasculaire (n = 7) était survenue 5 jours après le diagnostic de SHU-D+ soit 12 jours après le début des symptômes digestifs. Délai d’apparition des atteintes d’organes sévères J1=jour du diagnostic du SHU-D+, M=délai médian, Q1/Q3=délais quartiles Atteinte rénale (n=49) Atteinte hématologique (n=49) Atteinte neurologique (n=19) Coma (n=13) Atteinte cardiologique (n=7) Temps en jours (Jn) Q1,M,Q3 Q1,M,Q3 Q1,M J1 Q3 Q1 J2 J3 M Q1 J4 M J5 Q3 Q3 J6 J7 J8 A l’admission, le risque d’atteinte neurologique au cours du séjour était corrélé au syndrome inflammatoire (fièvre à la phase prodromale, et à l’examen clinique initial, élévation de la CRP et l’hyperleucocytose), à la sévérité de l’atteinte rénale (anurie, indication à la dialyse, clairance de la créatinine, taux d’urée, hyponatrémie, et à la cytolyse hépatique. A l’admission, les facteurs de risque d’atteinte cardiovasculaire étaient l’âge plus élevé et la notion de vomissements à la phase prodromale, mais le faible effectif du groupe atteint (n = 7/49) et la rareté de l’exploration paraclinique de l’atteinte cardiovasculaire rendent difficile l’interprétation de ces données. Ces différents résultats illustrent la difficulté de définir les formes aiguës sévères. Par ailleurs, les formes graves le sont rarement d’emblée, il est donc important d’identifier dès l’admission les éléments permettant de prédire le risque d’évolution vers une forme grave afin de discuter rapidement les traitements spécifiques. Les facteurs de risque qui apparaissent sur les différentes études sont le syndrome inflammatoire, la cytolyse hépatique et la sévérité de l’atteinte rénale. Des séquelles sont observées dans 25 % des cas. Dans notre cohorte, le risque de séquelles rénales était corrélé, à la phase aiguë, à la sévérité de l’atteinte rénale (recours et durée de la dialyse), aux paramètres inflammatoires (fièvre prodromale, pic de CRP ≥ 87 mg/L, pic de leucocytes ≥ 20 000/mm3), et aux atteintes extra-rénales neurologique, cardiovasculaire et hépatique, avec une augmentation du risque selon le nombre d’atteintes extra-rénales. Il faut noter que l’atteinte pancréatique aiguë n’est pas associée à une augmentation du risque de séquelle rénale. Dans une métaanalyse de 2003 portant sur 49 études, les facteurs de risque de séquelles rénales étaient l’atteinte neurologique, une durée d’anurie supérieure à 8 jours et une hyperleucocytose supérieure 20 000/mm3 à polynucléaires neutrophiles (PNN) [23]. Les séquelles neurologiques concernent dans la littérature environ 30 % des enfants atteints de SHU-D+ dans l’étude rétrospective de Nathanson et al. de 2010, où l’évolution neurologique n’avait de lien ni avec la gravité de l’atteinte neurologique initiale, notamment avec le score de Glasgow, ni avec le type de manifestations neurologiques, ni avec la topographie des lésions mais était liée à une sévérité globale de l’atteinte initiale [14]. Les séquelles pancréatiques, rapportées dans une méta-analyse de 2005, sont un diabète insulino-dépendant, observé dans 6 % des cas et favorisé à la phase aiguë par l’intolérance glucidique, l’atteinte neurologique et l’atteinte rénale sévère avec dialyse, l’insuffisance pancréatique exocrine est plus rare, il n’y a pas de publication décrivant ces facteurs de risque [15]. Conclusion Le SHU-D+ de l’enfant associe à la phase aiguë les signes de la triade biologique et est de pronostic favorable dans la majorité des cas mais des formes sévères sont associées à un risque de décès à la phase aiguë (2 à 4 % des cas) et à des séquelles, essentiellement rénales, dans 20 à 25 % des cas. Les formes graves le sont rarement d’emblée et les paramètres à l’admission associés à l’évolution défavorable du SHU-D+ de l’enfant sont l’inflammation (fièvre, hyperleucocytose, taux de CRP), et la sévérité de l’atteinte rénale initiale (déshydratation, anurie, taux de créatinine et anurie). Pouvoir prédire dès l’admission les formes sévères du SHU-D+ permettrait d’optimiser la prise en charge thérapeutique, d’une part par un transfert vers un centre spécialisé et d’autre part par l’utilisation éventuelle de nouvelles thérapeutiques spécifiques dirigées contre cette réaction inflammatoire comme l’eculizumab et l’immunoadsorption. Abréviations AINS CRP E. coli HTA InVS IRA, IRC LDH MAT PNN SHU, SHU-D+ STEC Anti-inflammatoires non stéroïdiens Protéine C reactive Escherichia coli Hypertension artérielle Institut de veille sanitaire Insuffisance rénale aiguë, chronique Lactate déshydrogénase Microangiopathie thrombotique Polynucléaires neutrophiles Syndrome hémolytique et urémique, typique post-diarrhéique Shiga toxin producing enterohaemorrhagic E.coli Références 1. Bertholet-Thomas A, Ranchin B, King L-A, Bacchetta J, Belot A, Gillet Y, et al. [Post-diarrheal haemolytic uremic syndrome: when shall we consider it? Which follow-up?]. Arch. Pédiatrie Organe Off. Sociéte Française Pédiatrie. juill 2011;18(7):823‑830. 2. Boyer O, Niaudet P. Hemolytic Uremic Syndrome: New Developments in Pathogenesis and Treatment. Int. J. Nephrol. [Internet]. 2011 [cité 1 août 2012];2011. Disponible sur: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3159990/ 3. Kavanagh D, Goodship THJ. 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Nathanson S, Kwon T, Elmaleh M, Charbit M, Launay EA, Harambat J, et al. Acute neurological involvement in diarrhea-associated hemolytic uremic syndrome. Clin. J. Am. Soc. Nephrol. Cjasn. juill 2010;5(7):1218‑1228. 15. Suri RS, Clark WF, Barrowman N, Mahon JL, Thiessen-Philbrook HR, Rosas-Arellano MP, et al. Diabetes during diarrhea-associated hemolytic uremic syndrome: a systematic review and meta-analysis. Diabetes Care. oct 2005;28(10):2556‑2562. 16. Eckart P, Guillot M, Jokic M, Maragnes P, Boudailliez B, Palcoux JB, et al. [Cardiac involvement during classic hemolytic uremic syndrome]. Arch. Pédiatrie Organe Off. Sociéte Française Pédiatrie. avr 1999;6(4):430‑433. 17. Poulton J, Taylor CM, De Giovanni JV. Dilated cardiomyopathy associated with haemolytic uraemic syndrome. Br. Heart J. 1 févr 1987;57(2):181‑183. 18. Thayu M, Chandler W, Jelacic S, Gordon C, Rosenthal G, Tarr P. Cardiac ischemia during hemolytic uremic syndrome. Pediatic Nephrol. 2003;18(3):286‑289. 19. 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LE SYNDROME HEMOLYTIQUE ET UREMIQUE A STEC – TRAITEMENT ET PERSPECTIVES Par Tim Ulinski Néphrologie pédiatrique, Hôpital Trousseau, APHP et Université Pierre et Marie Curie, Paris 6 1. Traitement symptomatique (dialyse et transfusion sanguine) La prise en charge de l’insuffisance rénale aiguë dans le syndrome hémolytique et urémique (SHU) doit être rapide et en cas de nécessité une dialyse (dialyse péritonéale ou hémodialyse) doit être débutée sans attendre le dernier moment. La gestion médicamenteuse de l’hyperkaliémie (multifactorielle entre insuffisance rénale et hémolyse) est souvent insuffisante. En cas d’anémie, des transfusions de culot globulaires doivent être débutées rapidement en tenant compte de l’hyperkaliémie et de la volémie. L’évolution de l’anémie peut être très rapide et nécessite un monitorage intensif (environ toutes les 12 h) surtout au début de la maladie. La gestion de la volémie en cas d’oligo- ou d’anurie n’est souvent pas possible sans dialyse, étant donné les apports de volume important par les transfusions sanguines et la nutrition. La transfusion de plaquettes est contre-indiquée sauf en cas d’hémorragie qui est exceptionnelle dans les microangiopathies thrombotiques. 2. Antibiotiques bactériostatiques Au stade de la diarrhée à Escherichia coli producteur de vérotoxine (STEC), les antibiotiques bactéricides tels que les β-lactamines - par libération de vérotoxine (ou shiga-like toxine, stx) lors de la lyse bactérienne - augmentent le risque de syndrome hémolytique et urémique (SHU). Ceci n’est pas le cas pour les antibiotiques bactériostatiques comme l’azythromycine [1,2]. En utilisant ce traitement la durée de présence de la bactérie en cause peut être significativement diminuée. Trois jours d’azythromycine orale permettent habituellement d’éradiquer le STEC [3]. L’azythromycine, le meropenem, le rifaximin et le tigecycline, n’entraînent pas de libération de Stx in vitro, contrairement à la ciprofloxacine [4]. Malgré cet effet in vitro de la ciprofloxacine, la comparaison de 246 patients non traités à 52 traités par ciprofloxacine et meropenem a indiqué un taux plus important de convulsions (15 % versus 2 %, p = 0,03) et de décès (5 % versus 0, p = 0,02) dans le groupe non traité, parallèlement à une durée plus longue d’excrétion de la bactérie (22,6 ± 11,3 jours versus 14,8 ± 10,6, p < 0,001) [5]. Une étude prospective sur l’effet de l’azythromycine au stade de la diarrhée ou au début du SHU à STEC est nécessaire. 3. Analogues du récepteur des Stx Le Synsorb- Pk®, analogue synthétique du récepteur globotriaosylceramide (Gb3) des Stx, lié à un transporteur inerte, a été donné per os dans un essai prospectif contrôlé à des enfants atteints de SHU post-diarrhéique. Il n’a pas été observé de différence du taux de décès, de complications extrarénales et de fréquence de dialyse entre le groupe traité et le groupe placebo [2]. D’autres analogues de Gb3 à très forte capacité de liaison, administrés par voie orale ou systémique, ou des E. coli exprimant un récepteur Gb3 génétiquement modifié mais capable de fixer Stx, et divers probiotiques, sont en développement [2]. 4. Les traitements pour neutraliser les Stx au stade de la diarrhée - anticorps monoclonaux anti-Stx L’administration à des souris modèles de SHU à STEC d’anticorps monoclonaux anti-stx2 dans les 3 jours suivant l’administration orale de doses létales de STEC ou de Stx2 protège l’animal des complications hématologiques et rénales. La bonne tolérance d’anticorps monoclonaux anti- Stx1 et anti-Stx2 chez des adultes sains et des enfants atteints de colite à STEC a été démontrée. Un essai de phase II est en cours en Amérique du Sud, testant l’efficacité d’anticorps anti- Stx1 et anti-Stx2 (Thallion Pharmaceuticals) chez des enfants ayant une diarrhée hémorragique à STEC, en prévention du SHU [2]. 5. Possibilité d’un traitement antithrombotique – anticoagulant ou antiagrégant ou anti-inflammatoire ? La thrombomoduline (TM) a des propriétés anticoagulantes et anti-inflammatoires et un rôle régulateur de l’activation du complément. Trois enfants atteints de SHU à STEC ont reçu de la TM recombinante humaine et se sont rapidement améliorés [6]. L’héparine, l’urokinase, le dipyridamole et les corticoïdes n’ont pas d’effets bénéfiques et ne sont pas recommandés. 6. Echanges plasmatique Les échanges plasmatiques (EP) (avec restitution par du plasma) n’ont pas d’effet bénéfique prouvé dans le SHU à STEC de l’enfant [7]. Toutefois, des EP ont été réalisés par la plupart des équipes en cas d’atteinte neurologique. Une étude récente au cours de l’épidémie au Danemark de 2011 a montré des effets bénéfiques [8] chez des patients adultes surtout si les EP ont été débutés rapidement. Au cours de l’épidémie allemande, l’évolution des patients traités par EP ou traitement symptomatique n’a pas été différente dans deux cohortes comportant respectivement 298 patients dont 72 % ont eu des EP (5) et 491 patients dont 49 % ont eu des EP [9]. Néanmoins un biais de sélection dans ces études pourrait être interpréter en faveur des échanges plasmatiques. Aucune étude n’a démontré clairement un effet favorable ou défavorable des EP dans le SHU à STEC. 7. Immuno-adsorption Au cours de l’épidémie allemande, 12 adultes avec atteinte neurologique sévère, résistants aux EP, ont été traités par des séances d’immuno-adsorption. Un effet spectaculaire a été observé dans les 1 à 3 jours, tous les patients ont survécu et 10 sur 12 ont récupéré une fonction rénale et un état neurologique normal [10]. Cette approche thérapeutique est donc à considérer chez l’enfant en cas d’atteinte neurologique sévère. 8. Manganèse Le manganèse bloque le trafic intracellulaire de la shigatoxine au niveau de l’appareil de Golgi, protégeant ainsi la cellule de la toxicité. La survie des souris (ayant reçu de la shigatoxine) traitées par des doses croissantes de manganèse était très significativement améliorée. Le manganèse pourrait permettre soit d’empêcher l’apparition d’un SHU dans un contexte de diarrhée à STEC, soit de diminuer la sévérité d’un SHU-STEC déjà installé [11]. 9. Eculizumab Une activation de la voie alterne du complément a été constatée chez des patients à la phase aiguë du SHU à STEC. Des études in vitro et dans un modèle murin de SHU ont confirmé que les Stx (particulièrement Stx2, la plus toxique) activent la voie alterne du complément, se lient au facteur H en l’inhibant. Ceci entraîne une activation locale du complément et le dépôt de complément (C3 ± C9) sur les cellules endothéliales microvasculaires humaines et les complexes plaquettes- leucocytes et la formation de thrombi à la surface des cellules endothéliales [2]. Ceci a conduit à proposer l’eculizumab – anticorps monoclonal bloquant la fraction C5 du complément et donc l’activation de la voie terminale d’activation du complément. Il semble donc exister éventuellement un chevauchement entre le SHU à STEC et le SHU atypique dû à un dysfonctionnement génétique ou immunologique des facteurs qui contrôlent la voie alterne du système de complément. Lapeyraque et al ont été les premiers à rapporter, chez 3 enfants atteints de SHU à STEC O157 : H7 sévère, avec atteinte neurologique (3/3), défaillance cardiaque ischémique et diabète (1/3), une amélioration spectaculaire dès la première injection d’eculizumab [12]. Toutefois, bien que plusieurs centaines de patients aient été traités par l’eculizumab au cours de l’épidémie à STEC O104:H4, le bénéfice de ce traitement reste incertain. L’eculizumab n’a pas permis une amélioration du taux de manifestations neurologiques, de créatinine et du besoin de dialyse significativement différente chez 67 patients traités par eculizumab comparés à 65 patients de gravité similaire traités par EP [5], ni dans une autre cohorte de patients traités de manière symptomatique (n = 57), par EP (n = 241) ou par eculizumab (n = 193) [9], ni enfin dans une cohorte de 90 enfants dont 6 traités par eculizumab [7]. Malgré ces incertitudes, il semble justifié de proposer ce traitement en cas d’atteinte neurologique, cardiaque ou multiviscérale menaçant le pronostic vital. Dans les cas sans atteinte extrarénale, seule une étude prospective randomisée permettra de savoir si l’eculizumab administré à la phase aiguë est bénéfique sur le pronostic rénal à long terme [13]. 10. Conclusion Le potentiel des nouvelles stratégies thérapeutiques semble bien réel, mais le bénéfice ne pourra être démontré que par des essais thérapeutiques prospectifs. En attendant il est évident que beaucoup de cas de SHU postdiarrhéique pourraient être évités en interdisant le contact des enfants < 5 ans avec la viande de bœuf mal cuite et les fromages au lait cru. Références 1. Hauswaldt S, Nitschke M, Sayk F, et al. Lessons Learned From Outbreaks of Shiga Toxin Producing Escherichia coli. Curr Infect Dis Rep 15:4-9. 2. Keir LS, Marks SD, Kim JJ. Shigatoxin-associated hemolytic uremic syndrome: current molecular mechanisms and future therapies. Drug Des Devel Ther 6:195-208. 3. Nitschke M, Sayk F, Hartel C, et al. Association between azithromycin therapy and duration of bacterial shedding among patients with Shiga toxin-producing enteroaggregative Escherichia coli O104:H4. Jama 307:1046-52. 4. Bielaszewska M, Idelevich EA, Zhang W, et al. 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TABLE RONDE 3 L’enfant retardé L’ENFANT RETARDE : CONTRIBUTION DE L’IMAGERIE Par Dr David Grévent1, Francis Brunelle1, Dr Bahi-Buisson2, A Munnich2, Pr Nathalie Boddaert1 1 Université Paris Descartes, AP-HP Hôpital Necker-Enfants Malades, Radiologie pédiatrique, et Inserm U1000, Paris F-75015 France 2 Université Paris Descartes, AP-HP Hôpital Necker-Enfants Malades, Neurologie pédiatrique, Paris F-75015 France Correspondance: Dr N Boddaert, Hôpital Necker-Enfants Malades, Radiologie pédiatrique, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris, France. [email protected]; tel: 01 44 49 51 72, fax: 01.44.49.51.70 La déficience intellectuelle, très hétérogène au plan étiologique, est un problème majeur de santé publique et une cause commune de consultation de pédiatrie, de neuropédiatrie, de neuro-métabolisme et de génétique. L'IRM cérébrale est réalisée dans l'exploration de la déficience intellectuelle, soit au cours du premier bilan en cas de signes d'appels neurologiques, en cas de retard moteur marqué (absence de marche à 2 ans ½), d’anomalie de l’examen neurologique, d’épilepsie, de macrocéphalie ou microcéphalie, soit de façon systématique au cours du deuxième bilan si les résultats du 1er bilan ne permettent pas d'obtenir le diagnostic (conférence de consensus 2012) [1]. L’objectif principal de ce bilan étiologique est avant tout de rechercher une cause curable ou une cause récurrente impliquant un conseil génétique. Nous allons discuter de l’apport de l’imagerie pour le diagnostic de déficience intellectuelle selon que l'IRM met en évidence : 1/ une anomalie spectroscopique (créatine ou lactate), 2/ une accumulation de fer dans le cerveau, 3/ des malformations cérébrales corticales ou 4/ une leucodystrophie. 1. Apports de l’imagerie cérébrale L’IRM cérébrale serait anormale dans 30 % des cas de déficience intellectuelle [2]. Le rendement est d'autant plus élevé que la déficience intellectuelle est sévère [3]. Des anomalies à l’IRM sont présentes dans plus de 40 % des cas lorsqu’il y a une symptomatologie neurologique, mais dans moins de 15 % quand il n’y a pas de signe d’appel. Toutefois, les anomalies observées ne fournissent la clé du diagnostic étiologique que dans 2 à 4 % des cas. L'IRM cérébrale est l'examen d'imagerie le plus performant dans l'exploration du système nerveux central, en raison du très fort contraste obtenu entre les différentes structures. De plus, c'est un outil d'exploration in vivo du métabolisme grâce à la réalisation simultanée de la spectroscopie par résonance magnétique (SRM) qui doit être systématique dans l'exploration des déficiences intellectuelles. Pour autant, l'IRM ne doit pas minimiser l'intérêt du scanner cérébral qui reste l'examen le plus sensible pour la détection des calcifications parenchymateuses, laquelle peut s'avérer utile en cas de microcéphalie ou d’anomalies de la substance blanche (syndrome d’Aicardi–Goutières, fœtopathie, sclérose tubéreuse de Bourneville…). L'exploration IRM des déficiences intellectuelles est bien standardisée. Elle comprend des séquences systématiques et des séquences orientées par la clinique. Le protocole d’imagerie doit comporter au minimum : - a. Une séquence 3D volumique pondérée en T1 Le premier avantage de cette séquence est de présenter un excellent contraste entre substance blanche et substance grise, sensibilisant ainsi la détection de malformation du cortex cérébral et de trouble de la migration. Le deuxième avantage de cette séquence est de permettre des reconstructions dans n’importe quel plan, facilitant ainsi la détection des anomalies de la ligne médiane, en particulier le corps calleux et le vermis. - b. Deux séquences axiale et coronale (la séquence coronale doit être perpendiculaire par rapport à l’axe des hippocampes) pondérées en T2 et une séquence pondérée en FLAIR. Ces séquences sont indispensables pour apprécier la myélinisation et ses troubles, et les anomalies de signal des noyaux gris centraux. - c. une séquence de spectroscopie (SRM) sur les noyaux gris centraux à Temps d'Echo (TE) long (TE=144 ms), à la recherche d'anomalies du pic de créatine, de la présence anormale d'un pic de lactate, ou pour l'aide à la caractérisation d'une leucodystrophie. Selon les résultats, une deuxième acquisition à TE court peut également être réalisée (doute sur la présence d’un pic de lactate, détection d’autres métabolites). - d. une séquence 3DT1 avec injection en cas de détection lors d'un premier bilan IRM d'une lésion sur les séquences T1, T2 ou FLAIR. - Séquences supplémentaires en fonction de la clinique : - a. Une séquence en T2* en cas de régression psychomotrice ou d’atteinte de la corne antérieure de la moelle cliniquement. - b. Des coupes fines coronales T2, FLAIR, T1 IR dans un plan perpendiculaire à l’axe des hippocampes pour l’étude de ces derniers s’il existe une épilepsie associée. - c. Une séquence de perfusion ASL (Arterial Spin Labelling) en cas d'épilepsie pour sensibiliser la détection de lésion épileptogène. - Deuxième contrôle IRM à distance : Si la première IRM est normale, il peut être utile de refaire une IRM à distance à un âge plus avancé, par exemple à la fin de la myélinisation (≈ 3 ans). Une deuxième IRM peut aussi être prescrite pour étudier le caractère fixé ou progressif d’une atrophie cérébrale ou cérébelleuse. Nous allons discuter de l’apport de l’IRM dans l’exploration de la déficience intellectuelle selon les 4 types d’anomalies suivantes qu'elle peut mettre en évidence : 1/ spectroscopie anormale (créatine ou lactate) ; 2/ d’accumulation de fer dans le cerveau; 3/ de malformations cérébrales corticales et 4/ Leucodystrophie. I/ Spectroscopie anormale a/ Déficit en créatine Les syndromes de déficit en créatine constituent un nouveau groupe de maladies héréditaires du métabolisme. Ils rassemblent le déficit en guanidinoacétate méthyltransférase (GAMT), le déficit en arginine glycine amidinotransférase (AGAT) et le déficit en transporteur membranaire de la créatine (CRTR). Ces syndromes sont caractérisés par un déficit intra-cérébral en créatine et se présentent sous la forme d’une déficience intellectuelle plus ou moins marquée, avec un retard de langage sévère, auxquels peuvent s’associer de façon plus hétérogène une épilepsie, un syndrome extra-pyramidal et des troubles du comportement. Le diagnostic repose sur le dosage du guanidinoacétate et de la créatine dans l’urine et le plasma et sur la spectroscopie par résonance magnétique, cette dernière mettant en évidence une absence du pic de créatine/phosphocréatine intra-cérébrale. Les déficits en GAMT et en AGAT sont traitables de façon efficace par la créatine orale, alors que le déficit en transporteur ne semble pas répondre à ce traitement. L’IRM morphologique est normale. Seule la séquence SRM est anormale [4]. b/ Détection d'un pic de lactate Un pic de lactate à la spectroscopie orientera vers une maladie métabolique en particulier vers une maladie mitochondriale. - SRM et cytopathies mitochondriales Les maladies mitochondriales regroupent une grande variété de pathologies dont le dénominateur commun est un déficit de la chaîne respiratoire (CR) mitochondriale. L’apport de l’IRM cérébrale est de plus en plus important pour le diagnostic de maladie mitochondriale et permet parfois d’orienter le diagnostic génétique. - Le cas des déficits isolés en complexe I en est un exemple [5]. Dans une étude que nous avons réalisée sur une cohorte de 30 patients porteurs d'une mutation bien identifiée de gènes impliqués dans le complexe I, l'IRM a montré une atteinte constante du tronc cérébral, la présence constante d'un pic de lactate en SRM, et une anomalie très fréquente des putamen (23/30). C'est ainsi que, désormais, en cas de suspicion clinico-biologique de cytopathie mitochondriale, la présence de ces anomalies oriente d'emblée très fortement les généticiens vers un déficit en complexe I. Plus pertinent encore, si ces images s'accompagnent de stroke-like (phénomène paroxystique aigu associé à des signes cliniques neurologiques focaux ± régressifs suivi secondairement de crises dont les anomalies IRM ne respectent pas un territoire artériel) : on s'orientera vers une mutation de l'ADN mitochondrial (mtDNA), alors que si les anomalies IRM s'accompagnent d'une leucodystrophie, on s'orientera vers une mutation de l'ADN nucléaire (nDNA). - la mutation MELAS (Mitochondrial Encephalomyopathy, Lactic Acidosis) est un autre exemple de cytopathie mitochondriale où l'IRM est fortement évocatrice associant des lésions de stroke-like dans les territoires postérieurs, des calcifications des noyaux gris centraux et une atrophie cérébelleuse. 2/ Accumulation de fer pathologique dans le cerveau (T2*) Les séquences T2* et SWI (Susceptibility-Weighted MRI: IRM de susceptibilité magnétique) sont très sensibles pour la détection de substances induisant des artefacts de susceptibilité magnétique, dont l'accumulation de fer, se traduisant localement par une chute du signal. La surcharge en fer dans les noyaux gris centraux est un bon exemple où l'IRM joue un rôle clé dans l'orientation diagnostique devant une déficience intellectuelle. On pourra évoquer : - Une dystrophie neuro-axonale infantile (DNAI) : devant un tableau de régression neurologique, avec cliniquement la présence d’une atteinte de la corne antérieure de la moelle et de rythmes rapides à l’EEG. La DNAI est une maladie rare d’origine génétique et d’évolution rapide. Elle fait partie des maladies neuro-dégénératives avec accumulation de fer intracérébral comme dans la neuro-dégénérescence associée à la Panthothénate Kinase (PKAN2). Cliniquement, les enfants atteints de DNAI présentent un développement psychomoteur initial normal, puis entre 6 mois et 3 ans, apparaît un syndrome neurodégénératif sévère (perte des acquisitions psychomotrices, atrophie optique, neuropathie périphérique et épilepsie) aboutissant au décès avant l’âge de 10 ans pour les formes les plus graves. Cette maladie génétique est de transmission autosomique récessive, liée à une mutation du gène PLA2G6 (chromosome 22q). En IRM, elle se caractérise par des dépôts ferromagnétiques au niveau des globi pallidi, de la substancia nigra en hyposignal sur les séquences T2, mais surtout T2* et SWI, ainsi que par une atrophie cérébelleuse globale. Il peut y coexister un hypersignal périventriculaire postérieur et des hypersignaux des noyaux dentelés. Sur les séquences spectroscopiques, il a été décrit des pics de lactate au niveau des ganglions de la base ainsi qu'une diminution du rapport NAA/Cr et une augmentation [6] ou une diminution du rapport Cho/Cr [7]. L’accumulation de fer dans le pallidum se fait progressivement et sera visible classiquement à partir de 5 ans. - La Pantothenate-kinase-associated neurodegeneration (PKAN). Précédemment appelée la maladie d’Hallervorden Spatz, il s’agit d’une maladie neurodégénérative d'origine génétique liée à une mutation du gène PKAN2 sur le bras court du chromosome 20. L'imagerie est caractéristique. La surcharge en fer se traduit par un hyposignal T2 et T2* des pallidi mais au sein duquel il existe un hypersignal T2 central réalisant la classique image en "œil de tigre" [810]. 3/ Malformations corticales Les malformations du développement cortical sont une cause commune de retard du développement et d'épilepsie. L'évolution rapide et récente de la biologie moléculaire, de la génétique et de l'imagerie a permis une augmentation rapide de notre connaissance du développement du cortex cérébral. Aussi, le nombre et les types de malformations rapportés ont eux aussi considérablement augmenté, rendant nécessaire une classification. Le rôle de l'IRM dans l'orientation diagnostique des malformations corticales est majeur. S'il est illusoire de tester tous les gènes de malformation corticale, l'IRM permet fortement d'orienter le diagnostic moléculaire des gènes à tester. Nous allons voir successivement le rôle stratégique de l'IRM dans 1/ les lissencéphalies, 2/ les polymicrogyries et 3/ les hétérotopies nodulaires. 1/ Les lissencéphalies et hétérotopies laminaires sous-corticales (HLSC) font partie d’un spectre malformatif commun lié à deux gènes majeurs LIS1 et DCX. La lissencéphalie, qui signifie étymologiquement « cerveau lisse », est une malformation cérébrale qui consiste en une agyrie ou une pachygyrie diffuse. - Dans la lissencéphalie classique – anciennement lissencéphalie de type 1 – le cortex apparaît anormalement épais en raison d’une large zone de neurones hétérotopiques dans la profondeur de la plaque corticale normale. - Les HLSC, encore appelées double cortex ou hétérotopies en bandes, sont considérées comme des formes frontières de la lissencéphalie, où les neurones hétérotopiques n’ont pas migré jusqu’à la plaque corticale et forment alors des bandes de substance grise bilatérales et symétriques situées dans la substance blanche et à distance de la paroi ventriculaire [11]. La classification actuellement reconnue des lissencéphalies, proposée par Dobyns et al. [12], repose sur l’aspect radiologique de la lissencéphalie [13-14]. Aujourd’hui, les principaux gènes responsables du spectre agyrie-pachygyrie-HLSC sont les gènes LIS1 et double-cortine – DCX –, dont les mutations et les délétions intragéniques rendent compte de 75-80 % des lissencéphalies classiques isolées [15]. Dans les 2 cas (LIS1 comme DCX), le cortex est très épais (10-20 mm). Elles diffèrent cependant par leur répartition antérieure ou postérieure. Dans les lissencéphalies liées à LIS1, il existe un maximum d’anomalies dans la région postérieure (encore appelé gradient postéro-antérieur [p > a] des anomalies), alors que dans les lissencéphalies liées à DCX, les anomalies sont à prédominance antérieure (a > p). De plus, le phénotype radiologique des mutations du gène DCX comporte des particularités en fonction du sexe, ce gène étant localisé sur le chromosome X. Ainsi, les mutations de DCX chez le garçon (« monosomie X ») sont responsables d’un phénotype sévère avec une lissencéphalie (anciennement appelé XLIS), avec un cortex très épais [16-17]. Chez la fille (hétérozygote pour la mutation), les mutations dans DCX sont à l’origine d’un phénotype souvent moins grave, de type HLSC. De nouveaux gènes responsables de dysgénésie corticale ont été identifiés plus récemment. Les mutations dans le gène TUB1A1 sont responsables d’une pachygyrie à prédominance périsylvienne avec une dysmorphie très caractéristique des noyaux gris centraux et, de façon inconstante, une dysmorphie du corps calleux et une dysgénésie cérébelleuse [18-19]. Au total, l'IRM apparaît comme un outil extrêmement simple pour classer ce type de malformations corticales. L'analyse fine de l'IRM est une étape décisive qui guidera les examens moléculaires de façon adaptée et augmentera la rentabilité du diagnostic étiologique. Le message qu'il faut retenir ici est que devant toute malformation corticale du spectre agyrie-pachygyrie-HLSC, le radiologue doit rechercher successivement : un gradient antéropostérieur de l'anomalie puis s’il existe d'autres anomalies cérébrales associées. 2/ Les polymicrogyries (PMG) sont un type de malformations corticales définies parfois comme un aspect "festonné" du cortex cérébral, ou encore comme un aspect "brûlé". Les polymicrogyries consistent en une continuité de multiples petites boules de cortex avec lesquelles la limite avec la substance blanche est mal définie. Cliniquement, les polymicrogyries sont associées à un groupe hétérogène de maladies avec retard mental et épilepsie. L'IRM joue là encore un rôle prépondérant dans l'orientation étiologie. - L'identification de l'aspect uni ou bilatéral et celle du caractère symétrique ou non des polymicrogyries est primordial. Les polymicrogyries unilatérales et/ou asymétriques sont la plupart du temps dues à des infections maternofœtales (groupe TORCH) ou plus rarement des AVC anténataux. La réalisation d'un scanner à la recherche de calcifications est un élément essentiel pour renforcer le diagnostic. - la recherche d'anomalies de la substance blanche associées est importante dans la classification des polymicrogyries bilatérales et symétriques. Lorsqu'elles sont présentes, le bilan métabolique est essentiel, à la recherche de troubles de la O-glycolysation (Muscle Eye Brain disease MEB, Walker Warburg Syndrome WWS et Fukuyama-type Congenital Muscular Dystrophy FCMD), de maladies péroxisomales (Zellweger) ou d'autres maladies énergétiques (syndrome de Smith-Lemli-Opitz, déficit en PDH, déficit en fumarase). Si ce bilan métabolique est négatif, alors l'association de polymicrogyries et d'anomalies de la substance blanche devra faire évoquer une mutation du gène GPR56. En l'absence d'anomalie de la substance blanche, les polymicrogyries bilatérales et symétriques orientent vers d’autres anomalies génétiques (Xq28, Xq22, délétion 22q11, gène TUBB2B). - la recherche d'autres malformations cérébrales associées est décisive. L'association classique d’une agénésie du corps calleux à des hétérotopies et des polymicrogyries doit faire évoquer le syndrome d'Aicardi. Ainsi, l'IRM apparaît comme un outil essentiel pour classer les polymicrogyries et orienter le diagnostic génétique et le radiologue doit : - identifier le caractère unilatéral et asymétrique ou non - rechercher une anomalie de la substance - préciser la topographie (frontale, périsylvienne, …) des polymicrogyries - rechercher d'autres malformations cérébrales (corps calleux…). 3/ Les hétérotopies nodulaires périventriculaires bilatérales (PVNH) sont définies par la présence de nodules hétérotopiques de substances grises le long des parois ventriculaires souvent confluents. Le tableau clinique est aussi éminemment variable avec un retard mental et une épilepsie plus ou moins sévère. Cette variabilité semble liée aux malformations associées aux PVNH [20]. Les bases moléculaires sont mal connues, avec toutefois un gène majeur, le gène FILA, dont les mutations sont responsables de formes familiales de PVNH (64 % de cas familiaux), touchant principalement les filles (93 %). Ces mutations, responsables d’une perte de fonction de FILA, sont transmises selon un mode dominant lié avec l’X. Les PVNH liées aux mutations de FILA sont de formes bilatérales, diffuses avec nodules contigus. Cliniquement, ces patientes ont une intelligence normale ou subnormale, une épilepsie souvent tardive et pharmacosensible. Sur le plan radiologique, la présence d’une méga-grande citerne associée aux PVNH est un argument supplémentaire pour orienter vers la recherche de mutation dans FILA. Enfin, il peut exister certaines anomalies du tissu conjonctif et vasculaire assez caractéristiques (comme dans le syndrome d’Ehlers-Danlos), des anomalies cardiaques (persistance du canal artériel, insuffisance valvulaire aortique) et d'autres anomalies vasculaires responsables parfois d’accidents ischémiques. Finalement, là encore, l'IRM est un élément essentiel pour classer les hétérotopies nodulaires périventriculaires et en orienter le diagnostic génétique. Le radiologue devra également confronter ses résultats avec certains éléments cliniques comme le périmètre crânien. Il distinguera ainsi les PVNH avec microcéphalies (ARFGEF2, ASPM, MCPH1, CDKRAP5, STILL, …) et les PVNH sans microcéphalie, avec notamment les mutations du gène FILA et un nombre considérable de délétions et duplications. 4/ Leucodystrophies Les leucodystrophies sont une cause fréquente de déficience intellectuelle. Elles appartiennent à un certain type d’affection de la substance blanche dont la définition a été largement discutée. « Démyélinisation », « dysmyélinisation », « leucoencéphalopathies », « troubles démyélinisants », « troubles myélinoclastiques », « leucodystrophies », « retard de myélinisation », etc., sont autant de termes pour catégoriser des affections de la substance blanche. La définition actuellement la plus reconnue est celle de la dernière révision proposée par Van Der Knaap en 2005 : on appelle leucodystrophie toute pathologie congénitale de la substance blanche, d’origine métabolique et/ou génétique, atteignant INITIALEMENT les oligodendrocytes ou la myéline, induisant : - soit un retard ou un arrêt de myélinisation (HYPO / A-MYELINISATION) - soit un métabolisme myélinique anormal (DYSMYELINISATION), aboutissant secondairement à la perte d’une myéline devenue instable (DEMYELINISATION). L’IRM joue un rôle clé dans l’orientation étiologique des leucodystrophies, à condition d’intégrer les principaux éléments cliniques suivants : âge, sexe, micro ou macrocéphalie et le tableau neurologique. L’analyse IRM d’une leucodystrophie se fait en deux temps : 1/ catégorisation du type de lésion de la substance blanche. 2/ recherche des anomalies associées de la substance grise 1/ Types d’atteinte de la substance blanche 1. Hypomyélinisation. Elles se distinguent des anomalies de myélinisation par leur caractère fixé sur deux IRM successives. L’exemple le plus typique est celui de la maladie de Pelizeaus-Merzbacher (PLP) diagnostiquée en période périnatale et caractérisée par un arrêt de la myélinisation à l’âge de 3 mois. D’autres maladies, regroupées sous le nom de PLP-like, se caractérisent par une hypomyélinisation variable secondaire à des anomalies génétiques bien identifiées: MCT8 (anomalie du transporteur de l’hormone thyroïdienne), GJA12 (connexine 47), POLR3B, AGC1 et hyccin deficiency (association à une cataracte). 2. Atteinte prédominant en périventriculaire. La topographie des lésions de leucodystrophie a une forte valeur d’orientation étiologique. On distingue schématiquement les leucodystrophies avec atteinte de la substance blanche profonde, volontiers périventriculaire épargnant initialement les fibres en U (substance blanche sous-corticale) des leucodystrophies avec atteinte d’emblée des fibres en U (paragraphe suivant). Les principales leucodystrophies de topographie périventriculaire respectant les fibres en U sont les suivantes : - adrénoleucodystrophie : lésions postérieures, d’extension centrifuge et symétrique avec rehaussement du front de progression (dosage des acides gras à très longues chaines, test génétique moléculaire du gène ABCD1). - leucodystrophie métachromatique : lésions confluentes vers les ventricules avec stries radiaires réalisant l’aspect caractéristique en « ailes de papillon » (dosage de la sulfatidurie, test génétique moléculaire du gène ARSA) - maladie de Krabbe : lésions périventriculaires intéressant initialement la corona radiata et la substance blanche sous-tentorielle (déficit de l’activité enzymatique de la galactocerebrosidase (GALC) testé sur leucocytes ou fibroblastes). - certaines cytopathies mitochondriales (DARS2, mutations de l’ADNmt …) 3. Atteinte intéressant d’emblée les fibres en U - Maladie d’Alexander : prédominance frontale des lésions et atteinte associée des noyaux gris centraux, macrocéphalie très évocatrice (GFAP). - Maladie de Canavan : toute la substance blanche est atteinte, sus- et sous-tentorielle. Les noyaux gris centraux et ceux du tronc cérébral également. La spectroscopie est caractéristique révélant une élévation majeure du pic de NAA. L’association à une macrocéphalie est là encore évocatrice (dosage du NAA urinaire et gène ASPA). - Leucoencéphalopathie mégalencéphalique avec kystes sous-corticaux (MLC) : l’atteinte prédomine en temporal sous forme d’une leucodystrophie kystique sous-corticale. Macrocéphalie associée classique (test génétique moléculaire des gènes MLC1 et HEPACAM). - Ataxie infantile avec hypomyélinisation centrale (CACH/VWM) appelée également maladie avec disparition de la substance blanche (Vanished White Matter disease) ou encore maladie de Van Der Knaap. Elle se caractérise par la disparition progressive de l’intégralité de la substance blanche qui se nécrose et disparaît peu à peu avec une étonnante absence de collapsus du cortex cérébral. L’ataxie est au premier plan. (test génétique moléculaire des gènes EIF2B1, EIF2B2, EIF2B3, EIF2B4, EIF2B5). - Autres : acidurie glutarique (bilan métabolique), polyols (bilan métabolique, SRM). 4. Leucodystrophies nécrosantes - Leucoencéphalopathie mégalencéphalique avec kystes sous-corticaux (MLC). - Ataxie infantile avec hypomyélinisation centrale (CACH/VWM). - Certaines cytopathies mitochondriales notamment celles avec mutation de l’ADNn (complexes I, II et IV). La spectroscopie est évocatrice (lactate) (voir plus haut). 5. Leucodystrophies avec microcéphalie et/ou calcifications - Foetopathies virales (à CMV) : prédominance temporale des lésions. - Mutations dans le gène RNASET2 : même lésions que le CMV, mais d'étiologie génétique. - Syndrome d’Aicardi-Goutieres : kystes temporaux également mais avec calcifications grossières et confluentes (gènes TREX1, RNASEH2A, RNASEH2B, RNASEH2C, et SAMHD1). - Syndrome de Cockayne : calcification en motte des noyaux gris centraux avec atrophie cérébelleuse (gènes ERCC6 [75%] and ERCC8 [25%]). 2/ Recherche de lésions associées de la substance grise 1. Atteintes des noyaux gris centraux - Maladie d’Alexander (voir plus haut) - Maladie de Canavan (voir plus haut) - Cytopathies mitochondriales (voir plus haut) 2. Polymicrogyries Déjà abordées dans le chapitre des malformations corticales, on rappelle ici que les leucodystrophies associées à des polymicrogyries regroupent : - Les troubles de la O-glycolysation (MEB, WWS, FCMD) - Les anomalies des peroxysomes (Zellweger, …) - Certaines maladies énergétiques (fumarase, PDH, SLO…) Comme nous venons de le voir, la découverte à l’IRM d’une leucodystrophie et sa classification en neuro-imagerie orientent très fortement le diagnostic étiologique d’un retard mental. Ainsi, l’IRM peut conduire parfois, quand la clinique est concordante ou encore trop frustre, à tester directement un gène particulier. Conclusion La déficience intellectuelle repose sur une définition précise et unique mais dont les étiologies sont extrêmement variées. La stratégie diagnostique est bien encadrée, au sein de laquelle l'IRM cérébrale joue un rôle fondamental. Le protocole de base de cette IRM cérébrale comporte des séquences morphologiques classiques (3DT1, axiales T2 et FLAIR), auxquelles il convient d'ajouter systématiquement la spectroscopie. D'autres séquences plus spécifiques seront ajoutées en fonction du tableau clinique et des premiers résultats du bilan systématique (T2* etc…). L'IRM pourra être renouvelée en fonction de l'apparition d'une nouvelle donnée clinique, ou en fin de myélinisation ou encore pour évaluer le caractère progressif ou fixé des lésions. Enfin, un complément scannographique cérébral devra être systématiquement réalisé en cas de microcéphalie associée à des anomalies de la gyration pour rechercher des calcifications. Les principales anomalies radiologiques retrouvées dans l'exploration de la déficience intellectuelle sont les suivantes : 1/ anomalie spectroscopique, 2/ accumulation de fer dans les noyaux gris, 3/ malformations corticales et 4/leucodystrophie. L'IRM permet de classer ces lésions en différents phénotypes radiologiques, orientant ainsi les examens moléculaires à réaliser voire parfois de donner la clé du diagnostic génétique. En l'absence de diagnostic, cette classification en sous-groupes de patients aux phénotypes clinico-radiologiques homogènes pourra conduire, dans un second temps avec notamment les techniques d'exploration de l'exome, à la découverte de nouveaux gènes impliqués dans les déficiences intellectuelles. Biliographie [1] Verloes A, Héron D, Billette de Villemeur T, Afenjar A, Baumann C, Bahi-Buisson N, Charles P, Faudet A, Jacquette A, Mignot C, Moutard ML, Passemard S, Rio M, Robel L, Rougeot C, Ville D, Burglen L, des Portes et le Réseau DéfiScience. Diagnostic investigations for an unexplained developmental disability. Arch Pediatr. 2012 Feb;19(2):194-207 [2] Van Karnebeek C.D, Jansweijer M.C, Leenders A.G. et al. 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Brain 2006 ; 129 : 1892-906 EXPLORATION CLINIQUE, GENETIQUE ET MOLECULAIRE DES RETARDS MENTAUX DE L’ENFANT Par Marlène Rio, Laurence Colleaux, Aurore Curie*, Vincent Des Portes*, Arnold Munnich ** Département de Génétique, Institut Imagine et Université Paris Descartes Hôpital Necker-Enfants Malades, 75743 Paris Cedex 15 *Service de Neuropédiatrie, Hôpital Femme-Mère-Enfant, Université Claude Bernard Lyon 1 Centre HospitaloUniversitaire, 69200 Lyon ** Auteur correspondant Département de Génétique, hôpital Necker-Enfants malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris Cedex 15, France E-mail : [email protected] Tel : 0144381507, Fax : 0144495150 Résumé La déficience intellectuelle (DI) se définit comme une limitation significative du fonctionnement mental et du comportement adaptatif survenant avant l’âge de 18 ans. Elle concerne près de 2 % de la population générale. Ses causes sont diverses mais une origine génétique est incriminée chez plus d’un tiers des patients. Ces dernières années, le développement des techniques d’hybridation génomique comparative (CGH-array) a permis d’augmenter le taux de détection d’anomalies chromosomiques chez les patients déficients intellectuels. Plus récemment, la puissance des outils de séquençage à très haut débit a permis des progrès importants dans l’identification des formes monogéniques de déficience intellectuelle, récessives liées à l’X mais également dominantes et récessives autosomiques. Si établir un diagnostic étiologique est nécessaire pour préciser le risque de récidive familiale, affiner la prise en charge et préciser le pronostic représentent un immense défi eu égard à l’extrême hétérogénéité étiologique des DI et au nombre d’examens complémentaires à mettre en œuvre. Mots-clés Retard mental, déficience intellectuelle, CGH-array, déficience intellectuelle liée à l’X, Déficience intellectuelle autosomique. 1. Définition, évaluation et prévalence de la déficience intellectuelle L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), dans sa classification internationale des maladies (CIM-10) définit le retard mental comme « un arrêt du développement mental ou un développement mental incomplet, caractérisé essentiellement par une altération, durant la période du développement, des facultés qui déterminent le niveau global d’intelligence, c'est-à-dire des fonctions cognitives, du langage, de la motricité et des capacités sociales » [1]. D’autres définitions ont été proposées, notamment par l’American Association on Intellectual and Developmental Disabilities (AAIDD), qui définit la déficience intellectuelle comme une limitation significative du fonctionnement intellectuel et du comportement adaptatif survenant avant l’âge de 18 ans [2]. Ces définitions se basent sur les mesures du fonctionnement intellectuel et des compétences adaptatives. L’évaluation du fonctionnement intellectuel est réalisée à l’aide de tests psychométriques standardisés dont le résultat est exprimé sous forme de score, le quotient intellectuel (QI). Les tests les plus couramment utilisés sont le WISC-IV (Weschler Intelligence Scale for Children) pour les enfants entre 6 et 15 ans 11 mois, et le WAIS-III (Weschler Adult Intelligence Scale) à partir de 16 ans. La distribution du QI dans la population générale suit une courbe gaussienne, avec une moyenne à 100 et une déviation standard de 15 (DS). La déficience intellectuelle se définit par un QI inférieur à 70, soit -2DS. L’OMS distingue 4 degrés de sévérité du retard mental : le retard léger : QI entre 50 et 69, le retard modéré : QI entre 35-49, le retard sévère : QI entre 20-34 et le retard profond : QI< 20. Les compétences adaptatives regroupent les aptitudes conceptuelles, sociales et pratiques de l’individu. Elles sont également évaluées par des tests standardisés, comme l’échelle de comportement adaptatif de Vineland (Vineland Adaptative Behavior Scale). Il est à noter que si l’OMS conserve la dénomination de retard mental (RM), d’autres, comme l’AAIDD préfèrent celle de déficience intellectuelle (DI). Concernant le terme de « retard de développement », il est utilisé pour des enfants âgés de moins de 5 ans. La DI peut être associée à un autre trouble mental ou physique ou survenir isolément. Lorsque la DI est associée à un autre trouble mental ou physique, elle est qualifiée de syndromique. Isolée, la DI est qualifiée de non syndromique ou non spécifique (NS). Selon des études récentes, la prévalence de la DI varie entre 1 et 2 % [3, 4, 5]. 2. Etiologie de la déficience intellectuelle Les causes de la DI sont multiples [6]. On estime qu’environ 1/3 des 25 000 gènes humains sont exprimés au niveau du cerveau où ils jouent un rôle dans le développement et le fonctionnement cérébral. C’est sans doute l’une des raisons de l’extrême hétérogénéité génétique des déficiences intellectuelles, l’altération de l’un quelconque de ces gènes pouvant avoir un effet sur le développement cognitif. De nombreuses études ont été menées pour évaluer la fréquence des différentes étiologies de DI. L’étude de Stevenson porte sur 10 997 patients. Une cause génétique est incriminée chez 28 % d’entre eux, une cause environnementale chez 16 % , le RM restant inexpliqué dans 56 % des cas [7]. Dans une étude norvégienne publiée plus récemment, la répartition des causes est la suivante [3] : Anomalies chromosomiques 12 % ; Syndromes génétiques connus et microdélétions 12 % ; Encéphalopathie dégénérative 3 % ; DI familiale 8 % ; Syndrome malformatif non classé et malformations cérébrales 19 % ; Causes acquises et environnementales 12 % ; DI idiopathiques non syndromiques 20 % ; DI idiopathiques syndromiques 14 %. Il faut souligner que, dans ces études relativement anciennes, les anomalies génomiques de petite taille, à l’exception des micro-délétions classiques, n’étaient pas détectables. Dans une étude plus récente utilisant l’hybridation génomique comparative (CGH-array) et portant sur 670 patients, la fréquence des anomalies chromosomiques détectées est de 29 % [8]. 2.1 Les anomalies chromosomiques Les anomalies chromosomiques sont les plus fréquentes causes génétiques identifiée de DI. Les anomalies chromosomiques, de nombre ou de structure, détectées par le caryotype, concernent environ 10 % des DI [7]. A la fin des années 80, le développement des techniques de haute résolution chromosomique cytogénétiques et moléculaires, notamment les techniques de FISH (Fluorescent In Situ Hybridization) a permis de mettre en évidence des délétions de petite taille, non visibles sur le caryotype, comme nouvelle cause chromosomique de DI. Ces micro-délétions récurrentes s’associent à une DI syndromique comportant des particularités cliniques, développementales et comportementales reconnaissables par un clinicien averti. Pour expliquer l’ensemble des signes cliniques associés à une micro-délétion, Schmickel introduit dès 1986 la notion de « syndrome de gènes contigus ». Il propose que le phénotype observé chez ces patients soit la conséquence de « l’haplo-insuffisance » de l’ensemble des gènes contenus dans le segment manquant [9]. Cette notion est validée pour certains syndromes, comme le syndrome WAGR (tumeur de Wilms, Aniridie, anomalie Génitales, Retard mental) ou le syndrome de Williams. Elle est démentie quand l’anomalie d’un seul gène (délétion ou mutation ponctuelle) suffit à entraîner le phénotype, comme par exemple le syndrome d’Angelman. Les données issues du séquençage du génome ont permis d’expliquer la récurrence de ces micro-délétions, qui est liée à l’architecture du génome. En effet, ces anomalies sont déclenchées par des structures génomiques appelées duplicons ou LCRs (Low copy repeats) [10]. Ces répétitions segmentaires correspondent à des séquences d’ADN de 10 kb à 400 kb de longueur, présentes en plusieurs copies dans le génome, espacées de 500 kb à 4 Mb et dotées d’une grande homologie (95-99 %). Elles sont particulièrement présentes dans les régions centromériques et télomériques. Lors de la méiose, la grande homologie de séquence de ces blocs d’ADN favorise les recombinaisons homologues non-alléliques. Ainsi, la région comprise entre deux duplicons de même orientation sera délétée ou dupliquée par recombinaison illégitime. Lorsque ce mécanisme est à l’origine d’un déséquilibre chromosomique, la taille du segment remanié est toujours identique d’un patient à l’autre et les points de cassure se situent dans les duplicons. Le phénotype clinique de ces remaniements génomiques résulte vraisemblablement d’un effet de dosage anormal des gènes localisés dans le fragment génomique remanié. Dans les années 2000, l’avènement de la technique de l’hybridation génomique comparative (CGH-array) a permis de doubler le nombre d’anomalies chromosomiques détectées chez les patients avec DI, en mettant en évidence des remaniements sub-microscopiques, délétions ou duplications non visibles sur caryotype. Ces segments polymorphes du génome, de taille variable, sont appelés CNV pour Copy Number Variation. La résolution de la CGH-array a rapidement progressé et les dernières CGH-array présentent jusqu’à 2 millions de sondes permettant de visualiser des délétions et duplications d’une taille de 10 Kb [6,11]. La recherche systématique d’anomalies chromosomiques par CGH-array chez les patients présentant une DI idiopathique a permis, par l’analyse clinique rétrospective, de décrire de nouveaux syndromes récurrents associés à des micro-délétions ou des micro-duplications. En effet, les syndromes ont été initialement décrits cliniquement et leurs bases génétiques ont été élucidées secondairement. La CGH array permet un processus inverse : l’identification de l’anomalie chromosomique précède la description phénotypique. La reconnaissance clinique de ces syndromes permet ensuite une recherche ciblée du remaniement chez d’autres patients par des techniques de FISH ou de biologie moléculaire (PCR quantitative). Plusieurs dizaines de syndromes ont été décrits à ce jour [12]. La majorité de ces syndromes a une prévalence faible, de l’ordre de 1/10 000. Certains de ces CNV récurrents responsables de DI ont également été rapportés comme cause d’autisme et/ou de troubles psychiatriques et/ou d’épilepsie, et ont aussi été identifiés dans des populations contrôles avec une fréquence plus faible. Ceci illustre l’expression variable et la pénétrance incomplète de certains CNV [13]. Ces CNV récurrents représentent moins de la moitié de tous les CNV identifiés chez les patients ayant une DI inexpliquée [14]. On estime que la CGH-array permet d’identifier 10 à 20 % de remaniements génomiques significatifs dans une population d’enfants avec DI et un caryotype normal [15,16,17]. Une publication américaine portant sur 16 000 patients ayant une DI ou des malformations rapporte un taux de 14, 2 % de remaniements pathogènes de plus de 400kb [18]. La CGH a cependant deux limites : elle ne détecte ni les anomalies de structure équilibrée, ni les faibles mosaïques. 2.2 Les formes monogéniques de DI 2.2.1 Les déficiences intellectuelles liées au chromosome X (DILX) Il existe au sein des DI un excès de formes masculines, avec un sex ratio entre 1,3 et 1,4 [19,20]. Cette surreprésentation masculine peut s’expliquer, du moins en partie, par le caractère hémizygote des garçons pour les gènes localisés sur le chromosome X. La prévalence des DILX est estimée à 2,6/1 000 et 2/3 de ces formes sont non syndromiques. Cet excès de garçons atteints a suscité un intérêt accru de la part de la communauté scientifique pour les gènes situés sur le chromosome X. Le syndrome de l’X-fragile est la cause la plus fréquente de DI héréditaire et la première dont les bases génétiques aient été identifiées. Son incidence est estimée à environ 1/4000 chez les hommes, mais il est également responsable d’une déficience légère à modérée chez une femme sur 7 000 environ. Les garçons atteints ont un phénotype caractérisé par une DI, des signes dysmorphiques et une macro-orchidie [21]. L’existence d’un site fragile folatesensible à l’extrémité du bras long du chromosome X (Xq27.3) chez les sujets atteints a permis la localisation du gène en cause dans ce syndrome et lui a donné son nom. En 1991, le clonage du gène FMR1 (Fragile X Mental Retardation), localisé en Xq27.3, a révélé que ce syndrome était dû à l'inhibition de la transcription du gène FMR1 en rapport avec une expansion d’une répétition de triplets CGG dans sa région 5' non traduite, suivi de méthylation [22]. La deuxième avancée majeure est liée à la constitution dès 1995 du consortium européen « EuroMRX » dont la contribution à la compréhension des bases moléculaires des DILX a été remarquable. Cet effort de regroupement des données cliniques et génétiques en vue d’études de cartographie et de clonage positionnel, combiné à la description de grandes familles multiplex avec un mode de transmission récessif lié au chromosome X a grandement accéléré la découverte de gènes de DILX [23,24,25]. Plus récemment, les recherches étiologiques ont bénéficié de l’amélioration des technologies de séquençage, permettant l’étude de plusieurs dizaines de gènes chez un grand nombre de malades. L’EuroMRX a ainsi entrepris le séquençage systématique de 90 gènes connus ou prédits de DILX dans une cohorte de 600 familles. Ainsi ont été identifiée 73 mutations dans 21 gènes distincts [24]. De même, l’étude IGOLD (International Genetics of Learning Disability), dédiée au reséquençage des exons codants pour 718 gènes du chromosome X dans une cohorte de 208 familles de DILX, a permis l’identification de nouveaux gènes de DILX [26,27]. A ce jour, plus de 100 gènes responsables de DILX ont été décrits. Plusieurs études ont également démontré qu’environ 10 % des cas de DILX étaient liés à des délétions ou duplications génomiques de petite taille [28]. Un site internet regroupe l’ensemble des données moléculaires concernant les DILX (www.ggc.org/xlmr.htm). Ces études démontrent clairement que chacun des gènes ainsi identifiés ne rend compte que d’un très petit nombre de cas, ce qui pose le problème de leur diagnostic moléculaire. Outre l’extrême hétérogénéité génétique des DILX, ces travaux ont démontré la variabilité phénotypique intra/inter-familiale de ces mutations. Un même phénotype peut ainsi résulter de l’effet de gènes différents sur le chromosome X et, inversement, un même gène peut occasionner différents phénotypes. Des gènes tenus pour responsables de formes syndromiques de DI peuvent ainsi être également impliqués dans des DI non ou peu syndromiques. C’est par exemple le cas du gène RSK2, habituellement muté dans le syndrome de Coffin Lowry caractérisé notamment par une dysmorphie faciale et des anomalies des extrémités [29], dont une mutation faux-sens a été retrouvée dans une famille de DILX non spécifique [30]. De même, chez trois frères atteints de DI non spécifique, une mutation a été retrouvée dans le gène FGD1 [31], responsable du syndrome d’Aarskog [32]. Ces frères avaient certes une petite taille et de petits pieds mais pas les anomalies cranio-faciales, osseuses ni génitales caractéristiques de ce syndrome, et leur déficit cognitif était plus sévère que celui observé habituellement dans le syndrome d’Aarskog. Dans le même registre, une mutation non-sens a été décrite dans une famille de retard léger à modéré isolé dans le gène XNP, impliqué généralement dans des formes syndromiques de déficience mentale, le syndrome ATR-X associant alpha-thalassémie, retard mental sévère, hypogénitalisme, et dysmorphie faciale caractéristique [33,34]. Inversement, des gènes initialement classés comme responsables de DILX non syndromiques ont été requalifiés en gènes responsables de DILX syndromiques, après un examen clinique approfondi. Il en est ainsi de l’oligophrénine 1 (OPHN1), gène décrit en 1998 comme responsable de DI non syndromique liée au chromosome X [35]. Trois groupes indépendants ont par la suite rapporté des mutations d’OPHN1 dans des formes syndromiques de DI caractérisées par une hypoplasie du cervelet avec fente, une dilatation des ventricules, une épilepsie, une ataxie, un strabisme et un hypogénitalisme [36,37,38]. Malgré les progrès importants, de nombreux cas restent encore inexpliqués. Il est probable que le séquençage à grande échelle, autorisant le criblage simultané de plusieurs dizaines de gènes, permettra à l’avenir d’améliorer le diagnostic moléculaire des formes de DI liées au chromosome X. Cependant, un criblage moléculaire tous azimuts ne remplacera jamais un bon examen clinique à la recherche de signes d’orientation évocateurs d’un gène donné. 2.2.2 Les formes dominantes autosomiques (DIAD) Le déficit intellectuel fait fréquemment partie de syndromes polymalformatifs. Dans l’immense majorité des cas, ces syndromes surviennent de façon sporadique. Cette prépondérance de cas sporadiques suggère la survenue d’une mutation hétérozygote de novo. Cependant, devant l’extrême hétérogénéité clinique et probablement génétique de tels syndromes, peu d’études ont tenté d’identifier leurs bases génétiques. C’est grâce à la cytogénétique que les premiers gènes de DIAD ont été identifiés. Il s’agissait d’analyser les points de cassure de translocations apparemment équilibrées à phénotype anormal [39], ou de séquencer les gènes contenus dans des micro-délétions chez un grand nombre de patients ayant une DI (SHANK2 ou ARID1B par exemple) [40,41]. Toutefois, seuls quelques gènes ont pu être identifiés par ces approches. Ce sont sans doute les DIAD qui ont le plus bénéficié des développements technologiques en matière de séquençage de l’ADN. Le projet canadien « Synapse to Disease » (S2D), qui a débuté en 2006, a été le premier à utiliser une stratégie de séquençage systématique de gènes candidats. Il portait sur l’analyse de 500 gènes codant des protéines synaptiques dans une cohorte comprenant 95 sujets avec DI-NS, non syndromiques 142 autistes non-syndromiques, 134 schizophrènes et 190 individus contrôles. Ceci a permis l’identification, chez des patients ayant une DI non syndromique, de mutations délétères survenues de novo dans des gènes codant des protéines du système glutamatergique : SYNGAP1, STXBP1, SHANK3, KIF1A, GRIN1, CACNG2, and EPB41L1 [42,43]. Depuis 5 ans, la révolution génomique a conduit au développement de nouveaux outils de séquençage à très haut débit. Ainsi, si la dernière génération des séquenceurs à capillaires, utilisant la technique Sanger, permet aujourd’hui de lire jusqu’à 2 millions de bases en une demi-journée, de nouvelles machines dotées de débits de 50 à 1 000 fois supérieurs sont apparues sur le marché en 2007. Ces séquenceurs de « nouvelle » génération ont permis de s'affranchir d'un certain nombre de biais de la méthode Sanger comme la nécessité de cloner l'ADN à séquencer. C'est grâce notamment à la lecture de plusieurs millions de séquences en parallèle que ces nouveaux séquenceurs à « haut débit » ont pu révolutionner les analyses en génomique en permettant, entre autre, le reséquençage massif de tout ou partie d’un génome pour en identifier les variations. Si les régions régulatrices de l’ADN, les microARN et autres éléments modulateurs suscitent aujourd’hui beaucoup d’intérêt, il n’en reste pas moins que la majorité des mutations impliquées dans des maladies génétiques mendéliennes ont été trouvées dans les régions codantes. L’exome, qui correspond à l’ensemble des exons codant du génome, représente 1-2 % de notre ADN. Il semble donc particulièrement intéressant à analyser pour identifier de nouveaux gènes responsables de maladies génétiques. L’intérêt d’une approche combinée d’enrichissement par hybridation et de séquençage d’exome pour identifier des mutations rares dans des pathologies humaines est aujourd’hui largement démontré [44,45]. Ces deux dernières années ont vu le développement de plusieurs projets très ambitieux visant à séquencer l’exome de dizaines de patients présentant une DI et de leur parents sains afin d’identifier l’ensemble des mutations survenues de novo [46,47,48]. Plusieurs informations essentielles résultent de ces travaux. Tout d’abord, ils démontrent que environ 20 % des DI ont une origine génétique autosomique dominante. D’autre part, comme observé dans le cas des formes liées au chromosome X, les résultats obtenus attestent de l’extrême hétérogénéité génétique de ces anomalies et du très petit nombre de patients souffrant de mutations d’un même gène. Enfin, ils apportent une nouvelle démonstration de la variabilité de l’expression clinique des mutations de gènes de DI. 2.2.3 Les formes autosomiques récessives (DIAR) Bien qu’un effort considérable ait été consenti pour l’étude des gènes du chromosome X, il n’en reste pas moins que les formes autosomiques récessives sont considérées comme de beaucoup les plus fréquentes. Elles représenteraient environ un quart des DI [49]. L’extrême hétérogénéité génétique/clinique des formes récessives autosomiques et la taille souvent restreinte des fratries ont cependant longtemps freiné l’identification des gènes associés à des formes autosomiques récessives de DI. L’utilisation de la méthode de cartographie par autozygotie (ou homozygotie par filiation) a néanmoins permis de s’affranchir de ces limites et de réaliser des avancées importantes dans le domaine des DIAR, notamment non syndromiques. La consanguinité fait en effet émerger de nombreuses pathologies récessives et augmente de manière significative le risque d’avoir un enfant avec une DI de 0,012 pour un couple aléatoire à 0,062 pour un couple de cousins germains [50,51]. La méthode de cartographie par autozygotie, décrite en 1987 par Lander et Bostein [52], consiste à utiliser des familles consanguines multiplex pour localiser des gènes de maladies autosomiques récessives rares. Les sujets atteints sont homozygotes par descendance pour l'allèle porteur de la maladie. Les malades sont également homozygotes par descendance pour le fragment de chromosome flanquant le locus morbide. D'autres régions sont également homozygotes par descendance, mais sont différentes d'un individu atteint à l'autre. Cette stratégie a donc pour but d’identifier des régions homozygotes communes aux enfants atteints et génodifférentes des enfants sains (homozygotes sauvages ou hétérozygotes). L’efficacité de cette méthode dépend de deux paramètres importants : le nombre total d’enfants dans la famille et le degré de consanguinité. Plus celui-ci est éloigné, plus le nombre de recombinaisons augmente et plus la région suspecte est réduite. L’étude se poursuit alors par l’analyse de gènes candidats qui consiste à étudier les gènes présents dans l’intervalle critique et dont le dysfonctionnement pourrait rendre compte du phénotype observé. C’est grâce à cette stratégie que le premier gène impliqué dans une DIAR non syndromique a été identifié en 2002 [53]. Depuis une dizaine de gènes ont été identifiés par la même stratégie [54-58]. Plus récemment, la possibilité de combiner l’approche de cartographie par autozygotie à la puissance des outils de séquençage à très haut débit a donné un remarquable coup d’accélérateur à l’identification des gènes responsables de DIAR. L’étude irano-allemande de Ropers et al. illustre bien les forces et les faiblesses de ce nouvel outil d’analyse dans le domaine des DI [59]. Ce travail a débuté par une étude de liaison utilisant la cartographie par autozygotie chez 138 familles consanguines atteintes de DIAR, afin d’identifier les régions homozygotes. Dans un second temps, une puce de capture couvrant l’ensemble des régions candidates a été développée pour le séquençage de la totalité de ces régions chez le probant de chaque famille. Pour 78 de ces familles, l’analyse a permis d’identifier une variation prédite pathogène et pouvant expliquer la pathologie. Parmi les 78 familles, 26 d’entre elles correspondent à des mutations géniques précédemment identifiées et liées à des DIAR principalement syndromiques (ex : WDR62, SRD5A3, AHI). Les 50 autres variants sont autant de nouveaux gènes candidats de DIAR. Cependant, en l’absence d’autres patients et de toute analyse fonctionnelle, l’imputabilité de ces variants dans le DIAR reste non démontrée. Enfin, 37 familles présentent plusieurs mutations prédites pathogènes, suggérant soit que l’association de ces variations est à l’origine de la DI (polygénisme) soit qu’un d’entre eux seulement est le variant causal. 2.2.4 Les erreurs innées du métabolisme Diverses études rapportent une fréquence de 1 à 5 % des maladies métaboliques dans la DI [60,61]. Entités nombreuses, mais rares individuellement, leur présentation clinique est très polymorphe. Elles sont responsables d’une DI rarement isolée et/ou fixée. Atteinte auditive, visuelle, viscérale, squelettique et des signes neurologiques comme une régression des acquisitions, ataxie, convulsions, mouvements anormaux et troubles du comportement sont souvent présents. Toutefois, l’anomalie de certaines voies métaboliques peut être responsable d’une DI fixée, non syndromique ou associée à des signes cliniques peu spécifiques, comme la phénylcétonurie, le déficit en créatine, le défaut de synthèse des purines, l’acidurie 4-hydroxybutyrique [62]. La plupart de ces maladies sont d’hérédité récessive autosomique, mais quelques unes sont d’hérédité récessive liée à l’X, notamment le déficit du transporteur de la créatine (gène SLC6A8), le syndrome d’Allan-Herndon-Dudley (gène MCT8) et le syndrome des cornes occipitales (gène ATP7A), variant modéré de la maladie de Menkes [63-65]. 3. Explorations Le diagnostic étiologique de la DI est essentiel car il permet de mieux répondre aux questions posées par les parents sur la cause, le pronostic, les possibilités de traitement, le risque de récidive familiale et les perspectives de diagnostic prénatal [66]. De plus, la connaissance de la cause de la DI est souvent une première étape vers l’acceptation du handicap. Le diagnostic étiologique est un véritable défi, eu égard à l’extrême hétérogénéité étiologique des DI et au grand nombre d’examens complémentaires nécessaires. Il relève d’une collaboration multidisciplinaire entre pédiatres, neuropédiatres, généticiens et radiologues. Dans cette perspective, l’enquête généalogique et anamnestique et l’examen clinique du patient par des cliniciens avertis sont les piliers de l’évaluation diagnostique de la DI. Ils guident le choix des examens complémentaires. En l’absence d’argument clinique pour une aneuploidie ou aneusomie, la CGH-array de moyenne résolution (500 kb) est aujourd’hui l’un des examens incontournables de l’évaluation diagnostique de l’enfant atteint d’une DI. De nombreux laboratoires proposent de ne plus réaliser de caryotype de première intention mais de réaliser d’abord une CGH-array pour l’exploration d’une DI. Toute anomalie détectée par CGH-array doit être confirmée, par FISH lorsque la taille du remaniement est suffisante, ou par PCR quantitative. L’étude des parents doit être réalisée afin de déterminer le caractère de novo ou hérité du CNV, souvent nécessaire à l’interprétation du résultat, notamment quand le CNV n’est pas répertorié. Il est d’usage de proposer la recherche d’un syndrome de l’X fragile par biologie moléculaire, aux garçons et aux filles atteints d’une DI inexpliquée non syndromique, même en l’absence d’antécédents familiaux, en raison du phénotype clinique frustre de certains individus, du faible coût de l’analyse, et des nombreuses implications en terme de conseil génétique d’un résultat positif. Des explorations de biologie générale peuvent être utiles pour orienter le diagnostic étiologique : - numération Formule Sanguine : recherche d’une neutropénie pour le syndrome de Cohen, - bilan thyroïdien chez le garçon : un taux élevé d’hormone de la T3 alors que la valeur de la TSH est normale et celle de T4 est basse ou normale oriente vers un déficit du transporteur des hormones thyroïdiennes (syndrome d’Allan-Herndon-Dudley, gène MCT8). La DI est sévère ; elle s’associe souvent à une hypotonie axiale, une spasticité et une anomalie de la myélinisation à l’IRM cérébrale [67]. - Dosage du cuivre et de la céruloplasmine sérique chez le garçon, notamment s’il existe une hyperlaxité, des anomalies cutanées, des anomalies des cheveux, des anomalies vasculaires. Une cuprémie et une céruloplasminémie basses feront rechercher le syndrome des cornes occipitales (gène ATP7A) [65]. - Augmentation des CPK chez le garçon pour une dystrophie musculaire congénitale ou une myopathie de Duchenne. - Recherche de corps de Heinz sur le frottis sanguin pour un syndrome ATR-X - Recherche de lymphocytes vacuolés pour une maladie de surcharge - Recherche d’une oroticurie chez une fille, ou d’une hyperammoniémie pour un déficit du cycle de l’urée - recherche d’une hyperuricemie pour le syndrome de Lesh Nyhan. Il n’y a pas de consensus clair sur la réalisation du bilan métabolique, terme générique qui recouvre un grand nombre d’explorations. Par contre, le bilan métabolique à la recherche d’une maladie lysosomale, péroxysomale, du métabolisme intermédiaire ou de la glycosylation des protéines (CDG), doit faire partie de l’évaluation du sujet atteint de DI dans certaines situations : atteinte multiviscérale, régression des acquisitions, signes neurologiques, symptomatologie fluctuante, viscéromégalie, manifestations psychiatriques, notion d’évolution par accès, à rechutes, ou d’intervalle libre, traits grossiers, cataracte, ophtalmoplégie, rétinopathie, surdité, arachnodactylie, anomalie des cheveux. Il est également d’usage de réaliser les examens métaboliques suivants dans l’exploration d’une DI fixée, non syndromique ou associée à des signes cliniques peu spécifiques : - dosage de la créatine et du guanidino-acétate urinaires (ou réalisation d’une spectroscopie lors de l’IRM cérébrale) pour dépister un déficit en créatine responsable d’une DI peu spécifique, pouvant s’associer à une épilepsie et à des troubles du comportement du spectre autistique [63]. Une élévation du rapport créatine/créatinine urinaire sans modification du taux de guanidino-acétate urinaire, et/ou un pic faible de créatine à la spectroscopie évoquent un déficit du transporteur de la créatine ; - dosage du succinyladenosine et SAICA riboside pour dépister un déficit de la synthèse des purines, responsable d’une DI qui peut s’associer à une épilepsie et des troubles du comportement du spectre autistique [68] ; - chromatographie des acides organiques urinaires pour dépister une acidurie 4 hydroxybutyrique, évocatrice d’un déficit en succinate semi-aldehyde deshydrogénase [69]. La DI peut être modérée à sévère, sans acquisition du langage et souvent associée à des troubles neuropsychiatriques. - isoélectrophorèse de la transferrine et de l’apoC3 pour le dépistage des anomalies de la N- et O-glycosylation des protéines qui peuvent être responsables de formes rares de syndrome CDG, n’ayant pas de signes d’appel spécifiques [70]. Une ponction lombaire peut être proposée dans certaines situations, notamment lorsqu’une maladie de De Vivo (glycorrachie), un déficit en pyruvate deshydrogénase ou une maladie mitochondriale sont suspectées (dosage du lactate et du pyruvate). Une hyperproteinorrachie chez le garçon pourra orienter le diagnostic vers une DILX et faire rechercher une mutation du gène AP1S2 [71]. L’imagerie cérébrale est particulièrement indiquée si la DI intellectuelle s’associe à une micro ou macrocéphalie, une épilepsie, des signes neurologiques. Elle doit être associée dans la mesure du possible à une séquence de spectroscopie qui détecte les anomalies du métabolisme de la créatine et permet également l’étude du métabolisme énergétique. L’IRM cérébrale peut être un élément-clé dans la démarche diagnostique. Il en est ainsi de la mise en évidence d’une fente vermienne, évocatrice d’une mutation du gène OPHN1 [37-38], d’une anomalie de gyration antérieure, évocatrice d’une mutation de Double cortine chez une fille. Le scanner cérébral viendra compléter l’IRM cérébrale à la recherche de calcifications devant une microcéphalie ou des anomalies de la substance blanche. Le tracé électro-encéphalographique peut, dans quelques situations, orienter le diagnostic étiologique, comme c’est le cas dans le syndrome d’Angelman où il existe un profil électro-encéphalographique caractéristique. Le bilan malformatif (échographie cardiaque, rénale, radiographies de squelette) est nécessaire lorsque la DI s’associe à des malformations majeures ou une dysmorphie faciale et des extrémités. Des examens audiologiques et ophtalmologiques doivent être réalisés du fait de l’association fréquente de déficits sensoriels à la DI. Ils peuvent majorer les difficultés de l’enfant et vont particulièrement orienter vers une pathologie métabolique. 4. Conclusion Les causes de DI sont multiples et plus d’un tiers sont d’origine génétique. Les progrès spectaculaires de la cytogénétique et de la génétique moléculaires, de l’imagerie et de la bio-informatique ont eu pour conséquences une fantastique accélération dans la découverte de gènes de maladies en particulier dans le contexte des DI. Il s’en est suivi un bouleversement des stratégies d’investigations de la DI, l’étude chromosomique par CGH-array devenant ainsi un examen incontournable de l’évaluation diagnostique. Dans un avenir plus ou moins proche, l’exome trouvera également sa place dans l’évaluation diagnostique. Toutefois, l’enquête généalogique et anamnestique et l’examen clinique du patient par des cliniciens avertis doivent rester les piliers de l’évaluation diagnostique de la DI et guider le choix des examens complémentaires. Au-delà de la caractérisation de nouveaux gènes responsables de DI, les défis de demain seront de mieux comprendre l’ensemble des mécanismes physiopathologiques sous-jacents et d’identifier des processus cellulaires communs dans lesquels interviennent les produits de ces gènes, qui pourraient donc représenter autant de potentielles cibles thérapeutiques. References bibliographiques 1. World Health Organization. Chapter V: mental retardation (F70-F79). The ICD-10. Classification of mental and behavioral disorders, 10th Revision 2007. 2. Luckasson R, Borthwick-Duffy S, Buntinx WGE, et al. Mental retardation, definition, classification and systems of supports, 10th ed., Washington, DC: American Association on Mental Retardation; 2002. 3. Strømme P. Aetiology in severe and mild mental retardation: a population-based study of Norwegian children. Dev Med Child Neurol. 2000; 42:76-86. 4. Heikura U, Taanila A, Olsen P, Hartikainen AL, von Wendt L, Järvelin MR. 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COMPARAISON DES CARACTERISTIQUES CLINIQUES ET BIOLOGIQUES DES ARTHRITES A KINGELLA KINGAE ET STAPHYLOCOCCUS AUREUS Par Dr Romain Basmaci, Dr Mathie Lorrot, Dr Philippe Bidet, Dr Catherine Doit, Dr Christine Vitoux, Pr Georges Penneçot, Pr Keyvan Mazda, Pr Edouard Bingen, Dr Brice Ilharreborde, Dr Stéphane Bonacorsi (Sous la direction du Dr Mathie Lorrot) Depuis l’avènement des techniques de biologie moléculaire, Kingella kingae apparaît être le premier pathogène des infections ostéo-articulaires (IOA) de l’enfant de moins de 3 ans [1, 2], devançant Staphylococcus aureus. Les arthrites à S. aureus peuvent être sévères du fait du tableau septique et des complications souvent associées. L’émergence de S. aureus communautaires résistant à la méticilline (SARM) peut mettre en échec le traitement antibiotique probabiliste [3]. Inversement, K. kingae est presque toujours sensible aux bêta-lactamines, et les IOA à K. kingae semblent être moins graves avec peu de complications [1]. Cependant, aucune étude n’avait comparé les arthrites à K. kingae et à S. aureus. Nous avons conduit une étude rétrospective afin de décrire et de comparer les caractéristiques cliniques et biologiques des enfants hospitalisés pour une arthrite à K. kingae et à S. aureus lors du diagnostic et au cours de leur évolution sous traitement. Patients et méthodes Nous avons inclus tous les patients hospitalisés entre 2000 et 2009 qui présentaient les critères suivants : âge inférieur à 18 ans ; arthrite évoluant depuis moins de 14 jours définie par une douleur et/ou une limitation des amplitudes articulaires avec la présence d’un épanchement articulaire et la mise en évidence dans le liquide articulaire de S. aureus ou de K. kingae par culture ou polymerase chain reaction (PCR) [2]. Nous n’avons inclus que les patients traités dans la journée suivant le diagnostic par un lavage articulaire et une antibiothérapie intraveineuse probabiliste efficace sur ces 2 germes. Les patients présentant au diagnostic une ostéomyélite ou un abcès sous-périosté associé étaient exclus. Les données cliniques et biologiques étaient recueillies au diagnostic, puis à 3, 5 et 7 jours après le début du traitement. Les durées d’hospitalisation, de la fièvre et la survenue de complications (reprise chirurgicale, passage en réanimation pour choc septique) ont également été recueillies. Les médianes ont été comparées par le t-test de Student ou le test U de Mann-Whitney et les fréquences par le test exact de Fisher ou le Chi-2, en fonction de la taille des groupes. Une valeur de P < 0.05 était considérée comme dénotant une différence significative. Résultats 90 patients ont été inclus : 64 patients présentaient une arthrite à K. kingae, 9 diagnostiquées par culture et 55 par PCR ; et 26 patients présentaient une arthrite à S. aureus, diagnostiquées par culture, dont 2 à SARM. Les caractéristiques démographiques, cliniques et biologiques initiales sont rapportées dans le tableau 1. Les enfants avec une arthrite à K. kingae étaient significativement plus jeunes. Aucun autre critère étudié au diagnostic n’était différent entre les 2 groupes (tableau 1). Dans le groupe K. kingae, la valeur maximale initiale de la protéine C réactive (CRP) était de 151 mg/L alors que 7/26 patients (26,9 %) du groupe S. aureus avaient une CRP initiale plus élevée, avec un maximum de 650 mg/L. Le pourcentage de patients ayant une CRP ≤ 10 mg/L était de 7,9 % dans le groupe K. kingae (5/63) et de 15,4 % dans le groupe S. aureus (5/26). Les articulations atteintes étaient similaires dans les 2 groupes (genoux : 57,8 % vs. 38,5 % et hanches : 23,4 % vs. 38,5 % des arthrites à K. kingae et S. aureus, respectivement). Les traitements chirurgicaux étaient comparables dans les 2 groupes et consistaient en une arthrotomie (49/64 vs. 16/26), une arthroscopie (8/64 vs. 7/26), ou une aspiration-lavage (7/64 vs. 3/26). Toutes les souches isolées étaient sensibles à l’antibiothérapie probabiliste initiale. Au cours de l’évolution, les médianes des CRP étaient significativement plus basses dans le groupe K. kingae à 3, 5 et 7 jours (figure 1). Les médianes des valeurs de fibrinogène étaient également plus basses dans le groupe K. kingae que dans le groupe S. aureus aux jours 3 et 7 (5,63 vs. 7,26 g/L, p<0,001 et 4,55 vs. 6,01g/L, p < 0,001, respectivement). Les durées moyennes de fièvre et d’hospitalisation étaient plus courtes dans le groupe K. kingae que dans le groupe S. aureus (0,2 [0-3] vs. 3,5 [0-27] jours (p = 0,0001) et 6,6 [3-11] vs. 13,8 [7-39] jours (p = 0,0001), respectivement). 9/26 patients (34,6%) avec une arthrite à S. aureus et 1/64 (1,6 %) avec une arthrite à K. kingae étaient fébriles plus de 2 jours. Les complications étaient plus fréquentes dans le groupe S. aureus (6/26 vs. 1/64 ; p = 0,002). Un seul patient traité pour une arthrite à K. kingae a nécessité une reprise chirurgicale de son arthrite, alors que dans le groupe S. aureus, 4 patients ont été réopérés en raison d’une rechute de l’arthrite, d’un abcès sous périosté ou d’une seconde localisation infectieuse ostéo-articulaire, 1 a été transféré en réanimation, et 1 a été réopéré pour une nécrose cutanée en regard de l’arthrite et hospitalisé en réanimation. Discussion Dans notre étude, les patients avec une arthrite à K. kingae présentaient un tableau initial peu sévère proche de celui rapporté dans la plus grande série publiée regroupant 140 patients présentant une arthrite à K. kingae [4]. Cependant, excepté l’âge, aucun critère clinique ni biologique initial n’était significativement différent entre les groupes K. kingae et S. aureus. Toutefois, la répartition des valeurs de CRP était plus vaste dans le groupe S. aureus. Une CRP initiale supérieure à 150 mg/L, proche de la plus haute valeur de CRP à 170 mg/L retrouvée par l’équipe de Yagupsky [4], pourrait permettre d’éliminer une arthrite à K. kingae. Par ailleurs, selon nos résultats, une CRP initiale ≤ 10 mg/L n’élimine pas la possibilité d’une arthrite septique à S. aureus ou à K. kingae. Au cours de l’évolution, la fièvre et les valeurs de CRP et de fibrinogène se normalisaient plus rapidement dans le groupe K. kingae. Un tiers des patients présentant une arthrite septique à S. aureus restaient fébriles plus de 2 jours après le début du traitement (35,5 % dans la série de Carrillo-Marquez et al. [3] et 34,6 % dans notre série), contre seulement 1,6 % des patients infectés par K. kingae dans notre série. Enfin, la moindre virulence de K. kingae comparée à S. aureus dans les arthrites est clairement mise en évidence par la durée d’hospitalisation plus courte et le moindre taux de complications. Notre étude confirme le rôle majeur de K. kingae dans les arthrites de l’enfant et l’apport de la biologie moléculaire dans le diagnostic de ces infections. Nous montrons que malgré la moindre virulence de K. kingae, aucun critère ne peut être utilisé de manière fiable pour distinguer, au moment du diagnostic, les arthrites septiques à K. kingae et à S. aureus. Ainsi, l’antibiothérapie probabiliste des arthrites septiques des jeunes enfants doit prendre en compte ces 2 pathogènes, et selon les propositions thérapeutiques du groupe de pathologie infectieuse pédiatrique (GPIP), le cefamandole, l’amoxicillineacide clavulanique ou le céfuroxime peuvent être utilisés [5]. Le relais oral sera adapté au germe et à son antibiogramme : amoxicilline en cas d’arthrite à K. kingae, et association amoxicilline-acide clavulanique en cas d’arthrite à S. aureus sensible à la méticilline [5]. Tableau 1. Données cliniques et biologiques initiales des enfants hospitalisés pour arthrite à Kingella kingae et Staphylococcus aureus Kingella kingae (n = 64) Staphylococcus aureus (n = 26) p Age (année) Médiane (extrêmes) 1,43 (0,57-5,56) 7,91 (1,11-15,88) e e 10 -90 percentiles 0,92-3,02 2,3-13,88 Genre Masculin 32 15 Féminin 32 11 Durée des symptômes avant diagnostic (jours) Médiane (extrêmes) 2 (0,5-10) 2 (0,5-15) e e 10 -90 percentiles 0,5-7,8 0,5-8,8 Température (°C) Médiane (extrêmes) 37,7 (36,3-39,9) 38 (36,1-40,4) 10e-90e percentiles 36,9-38,8 36,8-39,5 Température < 38°C (%) 58,7 50 CRP (mg/L) Médiane (extrêmes) 39 (9-151) 56 (9-650) e e 10 -90 percentiles 14,4-90,2 9-319,5 Fibrinogène (g/L) Médiane (extrêmes) 5,69 (3,6-9,13) 5,45 (3,36-13,28) 10e-90e percentiles 4,54-7,48 3,98-9,13 9 Leucocytes sanguins (x10 /L) Médiane (extrêmes) 12,4 (7,8-27,9) 12,2 (5,1-21,7) e 10 -90e percentiles 9,4-17,2 7,5-18,5 9 Neutrophiles sanguins (x10 /L) Médiane (extrêmes) 5,1 (2-14,8) 7,2 (3,7-18,2) e e 10 -90 percentiles 2,7-10,1 4,6-14,8 Leucocytes articulaires (x103/mm3) Médiane (extrêmes) 137 (5,9-3200)* 48 (0,2-730)† 10e-90e percentiles 18-580 0,6-473 NS: non significatif * : données disponibles pour 33 patients; † : données disponibles pour 12 patients < 0,0001 NS NS NS NS NS NS NS NS 0,0527 Figure 1 : Evolution des valeurs de CRP des patients avec une arthrite à Kingella kingae (cercles) et Staphylococcus aureus (triangles) aux jours (J) 0, 3, 5 et 7 après traitement. Les barres représentent les médianes et les interquartiles. * : p < 0.05, ** : p < 0.001, K. kingae vs. S. aureus Références 1. Yagupsky P. Kingella kingae: from medical rarity to an emerging paediatric pathogen. Lancet Infect Dis. 2004 ; 4 : 358-67. 2. Ilharreborde B, Bidet P, Lorrot M, et al. New Real-Time PCR-Based Method for Kingella kingae DNA Detection: Application to Samples Collected from 89 Children with Acute Arthritis. J Clin Microbiol. 2009 ; 47 : 1837-41. 3. Carrillo-Marquez MA, Hulten KG, Hammerman W, et al. USA300 is the predominant genotype causing Staphylococcus aureus septic arthritis in children. Pediatr Infect Dis J. 2009 ; 28 : 1076-80. 4. Dubnov-Raz G, Ephros M, Garty BZ, et al. Invasive pediatric Kingella kingae Infections: a nationwide collaborative study. Pediatr Infect Dis J. 2010 ; 29 : 639-43. 5. Lorrot M, Doit C, Ilharreborde B, et al. Antibiothérapie des infections ostéo-articulaires de l’enfant : ce qui a changé. Arch Ped. 2011 ; 18 : 1016-8. DEVENIR MOTEUR ET NEUROPSYCHOLOGIQUE DES ENFANTS PRESENTANT UNE HYPOPLASIE UNILATERALE CONGENITALE ISOLEE Par Audrey Bénézit. (sous la direction du Professeur Vincent des Portes, en collaboration avec le Docteur Christelle Rougeot et le Docteur Alice Roy). L’hypoplasie cérébelleuse unilatérale isolée congénitale est une anomalie acquise et rare du cervelet [1], dont le pronostic reste mal connu. La vaste connectivité du cervelet lui confère une grande hétérogénéité fonctionnelle. Il est impliqué à la fois dans le contrôle de la motricité et dans les fonctions cognitives et affectives, avec une organisation anatomo-fonctionnelle bien définie malgré une cyto-architecture uniforme [2]. Des troubles moteurs et cognitifs sont décrits en cas de lésion acquise en postnatal d’un hémisphère cérébelleux chez l’enfant [3] comme chez l’adulte. Lorsque l’anomalie est diagnostiquée durant la grossesse, le risque de trouble moteur, cognitif et des apprentissages demeure incertain (Image 1) [4,5]. Nous décrivons le devenir moteur et neuropsychologique chez dix enfants nés entre 2003 et 2010 présentant une hypoplasie cérébelleuse unilatérale isolée de découverte anténatale et dont les données ont été analysées pour la première fois en 2012 (cinq filles et cinq garçons ; âge moyen 4 ans 5 mois [extrêmes 2 ans - 8 ans 7mois]). Le mécanisme à l’origine de l’hypoplasie cérébelleuse unilatérale a été dit clastique (ischémique ou hémorragique) pour l’ensemble des enfants. Un diagnostic postnatal de syndrome PHACE a été posé chez deux enfants. Tous sont nés à terme avec une bonne adaptation à la vie extra-utérine. Chaque enfant a bénéficié d’une ou plusieurs évaluations cliniques, et un bilan neuropsychologique leur a été proposé (Brunet Lézine, WPPSI-III, WISC-IV, Vineland). Afin d’apprécier la motricité fine avec précision, le mouvement de préhension d’un objet a été enregistré en cinématique chez trois enfants. Tous les patients ont acquis la marche avant l’âge de deux ans. Aucun ne présentait de syndrome cérébelleux statique. Une patiente présentait un syndrome cérébelleux cinétique de l’hémicorps ipsilatéral à la lésion ayant disparu ultérieurement. Tous les enfants en âge scolaire suivaient un parcours en milieu ordinaire ; un seul patient bénéficiait d’une auxiliaire de vie scolaire. Aucun trouble de sociabilisation ou de comportement n’était noté. Aucun enfant ne présentait de déficience intellectuelle. Des troubles du langage expressif étaient observés chez six enfants. Parmi les plus âgés, une dyspraxie visuo-constructive légère était retrouvée chez un enfant. Un trouble attentionnel était suspecté chez deux enfants et confirmé chez un enfant. Ces troubles pouvaient être en lien avec des difficultés scolaires. Il n’a pas été retrouvé de corrélation anatomofonctionelle. Chez trois patients, l’étude des paramètres cinématiques du mouvement de préhension d’un objet retrouvait des anomalies de programmation du mouvement. Ces anomalies touchaient des points cardinaux de la préhension telle que l’adaptation de la vitesse du poignet en fonction de la distance à parcourir ou l’ajustement de la pince pouce-index en fonction de la taille de l’objet. Dans cette petite série, il n’a pas été retrouvé de trouble moteur ou cognitif majeur. Cependant un retard de langage, un déficit attentionnel et une dyspraxie sont notés. De plus, des anomalies de programmation de la motricité fine sont mises en évidence en enregistrant le mouvement de préhension d’un objet en cinématique. Un suivi neuropédiatrique ainsi qu’un dépistage précoce des déficits neurocognitifs sont nécessaires afin de mettre en place les mesures de rééducation adaptées aux besoins de l’enfant dans le but d’optimiser son pronostic. Un suivi à plus long terme d’une plus grande série de patients est nécessaire avant d’établir une conclusion définitive. Image 1 : Bibliographie : (1) : Poretti A, Prayer D, Boltshauser E. Morphological spectrum of prenatal cerebellar disruptions. Eur. J. Paediatr. Neurol. 2009 ; 13(5) :397-407. (2) : Stoodley CJ, Schmahmann JD. Functional topography in the human cerebellum : a meta-analysis of neuroimaging studies. Neuroimage. 2009 ; 44(2) :489-501 (3) : Schmahmann JD. Disorders of the cerebellum : ataxia, dysmetria of thought, and the cerebellar cognitive affective syndrome. J Neuropsychiatry Clin Neurosci. 2004 ; 16(3) :367-78 (4) : Tavano A, Grasso R, Gagliardi C, Triulzi F, Bresolin N, Fabbro F, et al. Disorders of cognitive and affective development in cerebellar malformations. Brain. 2007 ; 130(Pt10) : 2646-60. (5) : Poretti A, Limperopoulos C, Roulet-Perez E, Wolf NI, Rauscher C, Prayer D, et al. Outcome of severe unilateral cerebellar hypoplasia. Dev Med Child Neurol. 2010 ; 52(8) :718-24 DIABETE NEONATAL DANS UNE COHORTE DE 174 PATIENTS : ASSOCIATION FREQUENTE AVEC DES MALFORMATIONS ET DES TROUBLES NEUROPSYCHOLOGIQUES Par Dr Kanetee BUSIAH (MD, MSc) (sous la direction du Pr Polak) Contexte : Le Diabète Néonatal (DNN) est une forme génétique rare de dysfonctionnement de la cellule bêtapancréatique regroupant des patients avec malformation du pancréas et des patients avec défaut de fonctionnement de la cellule bêta-pancréatique. L’élucidation génétique des formes sans malformation du pancréas a permis de comprendre des causes de diabète plus fréquent de l’adulte. Depuis une dizaine d’années, plusieurs causes génétiques ont été retrouvées : les anomalies du chromosome 6q24 [1], les mutations des gènes du canal potassique ATP dépendant (canal KATP) (ABCC8 et KCNJ11) [2,3] et preproinsulin (INS) [4]. Les anomalies du chromosome 6q24 sont des anomalies liées à l’empreinte parentale conduisant à une surexpression des gènes situés dans le locus 6q24 [5]. Les phénotypes cliniques précis associés à ces formes génétiques sont peu connus. But : Nous avons réalisé une corrélation phénotype/génotype au sein d’une cohorte de patients atteints de DNN diagnostiqué avant l’âge de un an, sans auto-immunité anticellule bêta-pancréatique et avec pancréas de morphologie normale. Méthodes : Nous avons recueilli, de façon prospective, les données d'examens initiaux et de suivi de patients de 20 pays qui ont été adressés au Groupe français d'Étude du DNN entre 1995 et 2010. Nous avons réalisé les analyses génétiques à la recherche d’anomalies du chromosome 6q24, et de mutations des gènes du canal KATP (ABCC8 et KCNJ11) et preproinsulin (INS). Résultats : Nous avons identifié des anomalies génétiques chez 127/174 (74 %) cas index. Ces anomalies sont : anomalies du chromosome 6q24 (n = 40, 31 %), mutations des gènes KCNJ11 (n = 43, 34 %), ABCC8 (n = 31, 24 %) ou INS (n = 13, 10 %). Les données phénotypiques en fonction des groupes génétiques sont détaillées dans le tableau 1. Concernant les patients avec une mutation des gènes du canal KATP, nous retrouvons un retard mental associé ou non à une épilepsie (syndromes de DEND et iDEND) chez 13 (18 %) cas index avec mutation du canal KATP. Nous avons réalisé chez 27 cas index dits normaux sur le plan neurologique un bilan neuropsychomoteur et neuropsychologique détaillé (âge médian à l’examen : 7 ans [0,4-19]). Nous avons mis en évidence une dyspraxie (en particulier une dyspraxie visuospatiale) (81 % des cas index) ou des déficits de l'attention (100 % des cas index). Concernant les patients avec une anomalie du chromosome 6q24, ils ont des caractéristiques cliniques spécifiques qui sont plus fréquentes dans ce groupe quand on le compare au groupe canal KATP. Cela concerne des malformations du cœur, des reins et/ou des voies urinaires (8/37, 22 % contre 2/71, 3 %, p = 0,002), le retard de croissance intra-utérine (34/37, 92 % contre 33/69, 48 %, p < 0,001) et l’âge au diagnostic (âge médian, 5 jours [1-120] contre 45,5 jours [1278], p < 0,001). Concernant les patients avec mutation du gène de l’INS, nous n’avons pas de données statistiquement significatives probablement du faible nombre de patients dans ce groupe. Quatre-vingt neuf (51 %) cas index entrent en rémission à un âge médian de 17 semaines (suivi médian : 4,1 ans [49 jours-34.3 ans]). La récidive du diabète est fréquente, sans différence entre le groupe 6q24 et des groupes de canal KATP (82 % contre 86 %, p = 0,36, respectivement). Interprétation : Le DNN est souvent associé au dysfonctionnement neuropsychologique et à des malformations. Ces signes cliniques sont spécifiques de l'anomalie génétique sous-jacente. Une évaluation et prise en charge pluridisciplinaire est donc essentielle chez ces patients. Tableau 1: Phénotype des 174 cas index avec diabète néonatal en fonction des groupes génétiques p value, 6q24 vs. canal KATP p value, 6q24 vs. INS p value, INS vs. canal KATP 0·007 0·004 0·35 0·6 <0·001 <0·001 0·5 0·016 <0·001 <0·001 0·63 0·037 <0·001 <0·001 0·04 <0·001 <0·001 <0·001 0·01 <0·001 9/12 (75%) <0·001 <0·001 0·1 0·2 24/70 (34%) 7/12 (58%) <0·001 <0·001 0·1 0·2 5 [1-120] 45 5 [1-278] 61 [1-256] <0·001 <0·001 0·013 0·98 7/39 (18%) 13/74 (18%) 3/13 (23%) 0·8 1/39 (3%) 13/74 (18%) 1/13 (8%) 0·04 0·09 0·7 0·7 0/40 (0%) 1/39 (3%) 1/36 (3%) 4/74 (5%) 19/74 (26%) 22/27 (81%) 2/13 (15%) 0/13 (0%) 0/13 (0%) 0·07 <0·001 <0·001 0·005 <0·001 1 1 0·09 <0·001 20/38 (53%) 2/71 (3%) 0/13 (0%) <0·001 <0·001 0·002 1 12/38 (31%) 0/71 (0%) 0/13 (0%) <0·001 <0·001 0·02 1 3/36 (8%) 0/71 (0%) 0/13 (0%) 0·057 6/38 (16%) 2/71 (3%) 0/13 (0%) 0·03 0·07 0·5 1 40/40 (100%) 31/71 (44%) 0/40 (0%) 40/71 (56%) 2/13 (15%) 11/13 (85%) <0·001 <0·001 <0·001 0·1 14·4 [1-156·4] 39 4 [1·3-230·6] 14·1 [6·9-21·4] 0·01 0·009 0·9 0·5 13 [0·1-152·1] 32 [0·6-221] 13·9 [6·6-21·3] 0·08 Anomalies de 6q24 Canal K ATP (KCNJ11 or ABCC8) INS 40 1 11/13 (85%) 38 [28-41] 74 1·6 38/63 (60%) 39 [26-41] 13 1 5/11 (45%) 39·5 [28-41] g (médiane [range]) 1810 [720-2820] 2720 [880-3570] percentile (médiane [range]) Taille de naissance cm (médiane [range]) percentile (médiane [range]) RCIU e PN<10 percentile : n (%) e PN<3 percentile : n (%) Age au diagnostic (jours) (médiane [range]) Troubles Neurologiques Au moins un : n (%) Retard mental : n (%) Epilepsie : n (%) Hypotonie : n (%) Dyspraxie : n (%) Malformations Au moins un : n (%) Macroglossie : n (%) Cœur : n (%) Rein et/ou voies urinaires : n (%) Evolution Transitoire : n (%) Permanent : n (%) 0·15 [0-24·5] 10·6 [0-75·8] 1820 [14003200] 0·34 [0-97·4] 45 [38-50] 5·15 [0-77·1] 49 [34-52] 27·7 [0·06-98·4] 42 [40-45] 0·07 [0-0·8] 34/37 (92%) 34/70 (48·6%) 30/37 (81%) n Sexe ratio (M/F) De novo (%) Age gestationnel (médiane [range]) Poids de naissance Age à la rémission (sem) (médiane [range]) Durée initiale de l’insulinothérapie (sem) (médiane [range]) p value comparaison globale 0·5 0·12 Bibliographie : 1/ Temple IK, Shield JP. 6q24 transient neonatal diabetes. Rev Endocr Metab Disord 2010;11:199-204. 2/ Vaxillaire M, Populaire C, Busiah K, Cave H, Gloyn AL, Hattersley AT et al. Kir6.2 mutations are a common cause of permanent neonatal diabetes in a large cohort of French patients. Diabetes 2004;53:2719-22. 3/ Babenko AP, Polak M, Cave H, Busiah K, Czernichow P, Scharfmann R et al. Activating mutations in the ABCC8 gene in neonatal diabetes mellitus. N Engl J Med 2006 3;355:456-66. 4/ Polak M, Dechaume A, Cave H, Nimri R, Crosnier H, Sulmont V et al. Heterozygous Missense Mutations in the Insulin Gene are linked to Permanent Diabetes appearing in the Neonatal Period or in Early-Infancy: A report from the French ND Study Group. Diabetes 2008 57:1115-9 5/ Polak M, Cave H. Neonatal diabetes mellitus: a disease linked to multiple mechanisms. Orphanet J Rare Dis 2007 9;2:12.:12. ETUDE DE LA RELATION ENTRE RADIOGRAPHIE DE THORAX ET ANTIBIOTHERAPIE DANS LES INFECTIONS RESPIRATOIRES BASSES DE L’ENFANT : ANALYSE PAR SCORE DE PROPENSION Par Dr Emmanuelle Dugelay-Ecochard, chef de clinique, service des maladies digestives et respiratoires, Hopital Robert Debré, Paris (sous la direction du Pr Vincent Gajdos) Introduction La bronchiolite aiguë est l’affection respiratoire basse la plus fréquente chez l’enfant âgé de moins de deux ans. Elle constitue ainsi l’une des principales causes d’hospitalisation en pédiatrie en période hivernale. Les infections respiratoires basses du nourrisson sont le plus souvent d’origine virale. L’antibiothérapie est alors inutile, voire déconseillée dans un contexte où l’émergence de résistances bactériennes est de plus en plus préoccupante. La radiographie de thorax est largement réalisée dans ce contexte, bien que ses indications soient peu précises [1,2]. La rationalisation de la prise en charge des dyspnées du nourrisson est donc un objectif majeur de santé publique. Il est en particulier important d’évaluer les pratiques en termes de prescription d’examens complémentaires et de traitement. La conduite d’un essai randomisé apparaît comme le meilleur moyen méthodologique d’étudier la relation entre radiographie de thorax et prescription d’antibiotiques mais, outre les inévitables contraintes économiques et organisationnelles, le tirage au sort de la réalisation d’une radiographie de thorax implique une irradiation parfois inutile ce qui est éthiquement discutable. L’étude des conséquences de la réalisation d’une radiographie de thorax en pratique courante sur la prescription d’antibiotiques passe donc par des études observationnelles, caractérisées par une absence de plan expérimental, et donc susceptibles de présenter des biais. Objectif L’objectif de ce travail est de déterminer s’il existe un lien propre entre la réalisation d’une radiographie de thorax et la prescription d’antibiotiques, c'est-à-dire un lien indépendant des critères cliniques ayant conduit à la réalisation de cette radiographie, en limitant au mieux le biais d’indication inhérent aux études d’observation. Population et méthodes Diverses méthodes d’ajustement peuvent être utilisées pour limiter les biais dans les études d’observation. Une première méthode consiste à analyser directement l’association entre les variables pronostiques à l’inclusion et le résultat du traitement ou de l’intervention à l’aide d’un modèle multivarié classique ajusté sur les facteurs de confusion. Une seconde méthode consiste à procéder en deux temps : analyser d'abord la relation entre les variables pronostiques à l’inclusion et l’allocation du traitement ou de l’intervention en construisant un score d'allocation du traitement (dit score de propension), puis utiliser ce score pour constituer a posteriori des groupes de patients comparables et dégager l’effet propre du traitement ou de l’intervention. Nous avons choisi d’utiliser un score de propension pour estimer l'effet de la radiographie selon trois méthodes : l’ajustement, l’appariement et la stratification [3]. L'analyse porte sur 697 nourrissons ayant consulté dans un centre d’urgences pédiatriques pour une infection respiratoire basse. Résultats Les trois méthodes utilisées montrent un lien propre significatif entre la radiographie de thorax et la prescription d’antibiotiques. L’OR ajusté associé à la radiographie est de 2,3 (IC95% [1,3-4,1] ; p = 0,004). Les diverses techniques d’appariement concluent à une augmentation de 16,2 à 18,6 % de la fréquence de prescription d’antibiotiques lorsqu’une radiographie de thorax est réalisée. L’association est également significative lorsque l’on estime l’OR associé à la radiographie par stratification sur les quintiles du score (OR = 2,5 ; p < 0,001 ; IC95% [1,4-4,7]). Conclusion Dans notre population, il existe une augmentation de la prescription d’antibiotiques lorsqu’une radiographie de thorax est réalisée, ce qui doit inciter à respecter au mieux les indications de la radiographie de thorax. 1. American Academy of Pediatrics Subcommittee on Diagnosis and Management of Bronchiolitis. Diagnosis and management of bronchiolitis. Pediatrics. 2006 Oct;118(4):1774-93. 2. Conférence de consensus sur la prise en charge de la bronchiolite du nourrisson. Arch Pediatr. 2001 Jan;8 Suppl 1:1s-196s. 3. D'Agostino RB, Jr. Propensity score methods for bias reduction in the comparison of a treatment to a nonrandomized control group. Statistics in medicine. 1998 Oct 15;17(19):2265-81. IMPLANTATION DE L’ECHOGRAPHIE RENALE D’URGENCE DANS UN SERVICE D’URGENCE PEDIATRIQUE ET DIFFICULTES ASSOCIEES Par Romain GUEDJ. Service des Urgences Pédiatriques – Hôpital Armand Trousseau Sous la direction du Professeur Gérard Chéron, chef de service des Urgences Pédiatriques - Hôpital Necker Enfants Malades L’échographie d’urgence (EU), une échographie réalisée au lit du malade par un médecin non radiologue, est un examen dont l’objectif est de répondre à une question spécifique, la conduite diagnostique et/ou thérapeutique dépendant directement de cette réponse donnée. De nombreuses publications ont montré son intérêt dans différentes applications aux urgences adultes et pédiatriques [1]. Tandis qu’aux Etats-Unis l’implantation de l’EU dans les services d’urgences pédiatriques a été un succès, la situation est bien plus contrastée dans le reste du monde. En France, l’EU commence à être utilisée dans les services d’urgences adultes mais est quasi inexistante dans les services d’urgences pédiatriques, malgré la publication de plusieurs guidelines décrivant des moyens pouvant aider à son implantation [2]. Les modalités du traitement de la pyélonéphrite chez l’enfant sont fonction de l’existence ou non d’une malformation ou d’une complication (abcès parenchymateux) sous-jacente que l’échographie rénale et des voies urinaires permet de dépister. Les questions posées au clinicien pour guider sa décision thérapeutique sont simples : existence ou non de deux reins, de taille normale pour l’âge, d’une image d’abcès parenchymateux, d’une dilatation pyélique et/ou urétérale. L’implantation de l’EU rénale dans la prise en charge des patients ayant une pyélonéphrite dans le service des urgences de l’hôpital Necker-Enfants Malades a été motivée par l’acquisition d’un appareil échographique portable et la présence dans l’équipe médicale d’un médecin ayant suivi une formation à l’EU. L’objectif de cette étude était d’analyser l’implantation de l’EU rénale dans le service et les difficultés associées. Méthodologie Toutes les consultations aux urgences de l’Hôpital Necker-Enfants Malades avec un diagnostic final de pyélonéphrite entre novembre 2009 et avril 2011 étaient incluses. Après une courte formation de l’ensemble de l’équipe médicale (18 médecins) au cours de l’année 2009, les médecins du service étaient encouragés à réaliser une EU rénale au cours de ces consultations. L’EU rénale incluait la visualisation des 2 reins, l’estimation de la taille des reins, la recherche et la mesure d’une dilatation pyélo-calicielle et la recherche d’un abcès rénal. Dans les 24 heures qui suivaient la visite aux urgences, un contrôle échographique était réalisé en aveugle des résultats de l’EU par un radiologue. Nous avons calculé le pourcentage des consultations incluses au cours desquelles une EU était réalisée et les facteurs associés à sa réalisation. Enfin, nous avons calculé la valeur diagnostique de l’EU rénale à détecter une hydronéphrose, définie par une dilatation pyélo-calicielle de plus de 10 mm (le gold standard étant défini par le résultat de l’échographie réalisée par le radiologue). Résultats Entre novembre 2009 et avril 2011, 433 consultations pour pyélonéphrite ont eu lieu. Comme montré sur la figure 1, une EU était réalisée lors de 382 de ces consultations (88,2 %). Le nombre total d’EU réalisées par chaque médecin variait de 0 à 75. Ainsi, 3 médecins avaient effectué à eux seuls 50 % des EU réalisées tandis que 9 médecins (sur 18) avaient effectué moins de 10 % des EU. En analyse multivariée, la réalisation d’une EU était moins fréquente lorsque la consultation avait lieu au cours de la soirée ou de la nuit (cf. tableau 1). Comme montré dans la figure 1, les performances diagnostiques de l’EU ont été analysées sur 344 consultations (79,4 %). La prévalence de l’hydronéphrose était de 4,94 % [2.65−7,23 %]. La sensibilité de l’EU pour diagnostiquer une hydronéphrose était de 76,5 % [58,1−94,6 %] ; la spécificité de 97,2 % [95,2−99,2 %], la valeur prédictive positive de 59,1 % [36,4−79,3 %]; et la valeur prédictive négative de 98,8 % [97,7−99,9 %]. Il y avait 9 faux positifs et 4 faux négatifs. Un patient avait un abcès rénal, diagnostiqué sur l’EU et sur l’échographie réalisée par le radiologue. Nous avons revu qualitativement les dossiers des 4 faux négatifs. Chez ces 4 patients, les radiologues retrouvaient des dilatations comprises entre 10 et 17 mm. L’EU n’était considérée normale que pour un seul de ces patients. Chez les 3 autres patients, une dilatation était diagnostiquée mais mesurée à moins de 10 mm. Discussion L’implantation de l’EU rénale a été un succès dans le service puisque durant les 18 mois de l’étude, une EU a été réalisée lors de 90 % des consultations pour pyélonéphrite. L’EU était moins réalisée la nuit que le jour. Une affluence plus importante des patients durant la soirée associée à un effectif médical réduit la nuit peut en partie expliquer cette difficulté à la réalisation de l’EU la nuit. Une difficulté majeure à l’implantation de l’EU était l’adhésion très hétérogène à cette nouvelle technique par l’équipe médicale. Trois médecins avaient réalisé 50 % des EU tandis que 50 % de l’équipe médicale en avaient réalisées moins de 10 %. Ceci reflète la cinétique habituelle d’adoption d’une nouvelle technique ou technologie par une population, décrite par Roger [3]. Selon cette théorie, 10 à 20 % des individus y adhèrent immédiatement, environ 30 % s’y intéressent rapidement tandis que près d’un individu sur deux y est hostile. L’adoption d’une nouvelle technique par 50 % d’une population facilite alors l’adhésion pour les 50 % restants, en renforçant l’idée de son utilité et de sa faisabilité. L’implantation durable d’une nouvelle technique dans un service, nécessitant l’adhésion de l’ensemble de l’équipe médicale, est donc un processus long. Concernant l’EU, certains auteurs ont estimé ce temps à 3 ans. Une implantation réussie de l’EU rénale nécessite que les performances diagnostiques à détecter une hydronéphrose chez l’enfant soient bonnes. Avec un seuil de 10 mm de diamètre définissant l’hydronéphrose, la sensibilité était de 76,5 %, avec 4 faux négatifs. Avec un seuil de 5 mm, la sensibilité aurait été de 94,1 % et un seul faux négatif. De plus, 3 EU sur les 4 faux négatifs n’étaient pas considérées comme « normales » (dilatation pyélo-calicielle, mais < 10mm). Si un suivi échographique n’avait pas été systématique dans notre service, ces 3 patients auraient tout de même eu un contrôle échographique par un radiologue devant l’ « anormalité » de l’EU. Ainsi, le médecin qui réalise une EU peut considérer que les faux négatifs sont rares mais pas impossibles. La principale limite de cette étude est son caractère monocentrique, sa généralisation dans d’autres services est donc limitée. Cependant, elle montre que l’EU peut être implantée avec succès dans un service sans expérience, après une formation de courte durée. Cette implantation prend du temps, en partie car l’adoption d’une nouvelle technique dans une équipe médicale ne peut se faire que progressivement. Une évaluation des pratiques professionnelles est indispensable lors de la mise en place d’un tel programme. Tableau 1 : Facteurs associés à la réalisation d’un echographie d’urgence lors d’une consultation pour une polyonéphrite aux urgences pédiatriques. Analyse univariée Pourcentage de visites incluant une EU* n/N Analyse multivariée** Valeur du p OR p %* Total 382 / 433 88,2 % Femme Homme 224 / 262 158 / 171 85,5 % 92,4 % Enfant (≥ 24 mois) Nourrisson (0−23 mois) 304 /337 78 / 96 < 3 mois 3 mois-2 ans 69 / 74 235 / 263 93,2 % 89,4 % 0,320 170 / 185 212 / 248 91,9 % 85,5 % <0,05 Journée Nuit 241 / 262 141 / 171 92,0 % 82,5 % <0,005 Jour de semaine Week-end 277 / 313 105 / 120 88,5 % 87,5 % 0,773 Journée en semaine Nuit en semaine Journée en weekend Nuit en weekend 170 / 185 107 / 128 71 / 77 34 / 43 91,9 % 83,6 % 92,2 % 79,1 % <0,05 336 / 376 46 / 57 89,4 % 80,7 % Pas d’infection urinaire Infection urinaire 294/ 328 88 / 105 Bactérie à la culture de l’ECBU E. coli Autre Traitement antibiotique Monothérapie Bithérapie Sexe <0,05 1 1,99 [1,00–4,00] 0,05 <0,05 1 1,85 [0,93-3,69] 0,54 1 0,38 [0,21-0,70] 0,002 0,06 1 0,97 [0,39-2,46] 0,943 89,6 % 83,8 % 0,107 1 1,05 [0,47-2,36] 0,901 330 / 375 52 / 58 88,0 % 89,7 % 0,716 286 / 316 96 / 117 90,5 % 82,1 % <0,05 1 0,47 0,071 Age Moment de la journée Heures ouvrables Heures non ouvrables Antécédents Pas d’anomalie urologique Anomalie urologique 90,2 % 81,3 % [0,21-1,07] *n = Nombre de consultations pour pyélonéphrite au cours desquelles une EU a été réalisée N = Nombre de consultations pour pyélonéphrite % = ratio entre n and N ** Modèle multivarié avec les variables ayant un p < 0,2 en analyse univariée : sexe, âge, jour/nuit, antécédent urologique, antécédent de pyélonéphrite, type de traitement antibiotique figure 1 jpp 2013.pdf [1] Levy JA, Noble VE. Bedside ultrasound in pediatric emergency medicine. Pediatrics 2008;121:e1404– 1412. [2] Emergency ultrasound guidelines. Ann Emerg Med 2009;53:550–70. [3] Kim IK, Cross K, Horowitz R, Warkentine F. Eight Secrets to Implementing Bedside Ultrasonography in Pediatric Emergency Medicine. Clinical Pediatric Emergency Medicine 2011;12:65–72. BCGites CHEZ LES PATIENTS ATTEINTS D’UN DEFICIT IMMUNITAIRE COMBINE SEVERE : ETUDE RETROSPECTIVE Par Mélusine Kiener (sous la direction du Dr Bénédicte Neven) Introduction Le bacille de Calmette-Guérin (BCG), variant atténué issu de la souche Mycobacterium bovis, est le seul vaccin antituberculeux actuellement disponible. La vaccination peut entrainer entraîner une BCGite locale (17,8 % des cas), régionale (0,01 % des cas) et très rarement une BCGite disséminée (0,1 à 4,3 cas par million d’enfants vaccinés), infection au pronostic sombre avec un taux de mortalité de 50 à 71 % ([1, 2). ]. Trois principaux déficits immunitaires primitifs prédisposent aux infections sévères par le BCG: le déficit immunitaire combiné sévère (DICS) et plus rarement la granulomatose septique chronique et le syndrome de susceptibilité mendélienne aux infections mycobactériennes (2, 3)[2, 3]. Le DICS (1 sur 50 000 naissances) regroupe un ensemble de maladies caractérisées par l’absence de développement de cellules T. C’est le déficit immunitaire primitif le plus sévère. Il peut être T-B+ s’il y a présence de cellules B dans le sang ou T-B- s’il y a absence de cellules B circulantes. Les patients ont des infections récurrentes, particulièrement sévères ou opportunistes conduisant généralement au décès dans la première année de vie en l’absence de transplantation de cellules souches hématopoïétiques. Les seuls traitements curatifs possibles sont l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques et la thérapie génique (4)[4]. L’allogreffe peut être HLA-identique (issue d’un donneur intrafamilial ou d’un donneur non apparenté) ou haplo-identique (issue d’un des deux parents). En cours d’étude, la thérapie génique est une alternative pour les patients n’ayant pas de donneur HLA-identique. Elle est proposée depuis 1999 pour les déficits en γc et depuis 2000 pour les déficits en ADA dans un nombre de centres limité. Elle consiste à transférer ex vivo le gène déficient dans les précurseurs médullaires CD34+ du patient à l’aide d’un vecteur rétroviral ([4). ]. Une BCGite étant retrouvée chez 36 % des patients avec un DICS vaccinés par le BCG (5)[5], l’objectif de cette étude est de rechercher les facteurs de risque de BCGite chez ces patients et d’étudier les caractéristiques, l’évolution et les traitements de ces BCGites. Patients et méthodes Notre étude, rétrospective et monocentrique porte sur tous les patients atteints de DICS et pris en charge entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2011 à l’hôpital Necker-Enfants-Malades à Paris. Résultats Parmi les 101 patients inclus, 43 ont été vaccinés par le BCG et 13 sur 43 ont développé une BCGite, soit un tiers des vaccinés. Chez 9 patients sur 13 avec une BCGite, un déficit immunitaire primitif pouvait être suspecté à l’interrogatoire au moment de la vaccination (antécédent personnel d’infection sévère, lymphopénie connue, antécédent familial de décès dans la première année de vie chez un oncle maternel ou dans la fratrie). Le délai de survenue entre la vaccination et les premiers signes cliniques ou microbiologiques de BCGite allait de 2 à 8,.5 mois. La BCGite était régionale chez 2 patients et disséminée chez les 11 autres. Facteurs de risque de BCGite chez les patients vaccinés Par analyse univariée, nous avons constaté chez les patients avec un DICS T-B+ significativement plus de BCGites que chez les patients avec un DICS T-B- (62,5 % versus 12 %, p = 0,01). Le taux était encore plus important chez ceux avec un déficit en γc. Quatre-vingt-deux pour cents d’entre eux (9 sur 11) ont développé une BCGite versus 12,5 % (4 sur 32) chez ceux avec un autre diagnostic moléculaire (p = 6,.10-5). Les patients avec une BCGite avaient par ailleurs un taux plus faible de cellules NK (médiane de 9/mm3 versus 339/mm3, p = 0,.023), un âge plus jeune au moment de la vaccination par le BCG (29 jours versus 60 jours, p = 4,.10-44) et ont plus souvent été vaccinés par injection intradermique que par multiponcture (73 % versus 27 %, p = 1.,10-55). Caractéristiques initiales des BCGites disséminées (n = 11) La fièvre était présente chez 9 patients et des signes loco-régionaux chez 8 patients (7 avec des signes locaux, 1 avec des signes régionaux). Les localisations à distance étaient cutanées (n = 9), hépatiques (n = 10), spléniques (n = 7), pulmonaires (n = 6), médullaires (n = 5 sur 6 recherchées), osseuses (n = 4 sur 6 recherchées), ganglionnaires (n = 3) et digestives (n = 2). Suivi des patients avec une BCGite disséminée (n = 11) Trois patients sur 11 sont décédés entre 1 et 9,5 mois post-greffe, 2 en rapport avec la BCGite. Les 8 patients survivants ont un suivi compris entre 10 mois et 10 ans 9 mois post-greffe. Les Ils ont tous un DICS lié à un déficit en γc. Quatre ont bénéficié d’une allogreffe haplo-identique avec un suivi médian post-greffe de 69,.5 mois et 4 d’une thérapie génique avec un suivi médian post-greffe de 18,.5 mois. Sept patients ont eu plusieurs poussées de BCGite (jusqu’à 7 poussées). Ces poussées, caractérisées par de la fièvre, des lésions cutanées évolutives et un syndrome inflammatoire avec parfois avec progression d’une hépatomégalie, d’une splénomégalie ou de lésions osseuses, ont duré quelques jours à plusieurs mois (maximum 16 mois) et ont été objectivées jusqu’à 30 mois postgreffe. Quatre patients sont toujours sous traitement antituberculeux entre 10 et 34 mois post-greffe et 4 sont guéris après une antibiothérapie de 10,5 mois à 43 mois post-greffe (médiane : 30,5 mois). Les patients ayant reçu une thérapie génique avaient à 6 mois post-greffe un taux médian de CD4 à 1586/mm3 versus 440/mm3 après une greffe haplo-identique et des cellules NK à 130/mm3 versus 26/mm3. Ils ont normalisé leur prolifération lymphocytaire en à la phytohémagglutinine dans un délai médian post-greffe de 7,.5 mois versus 14,.5 mois. Deux ont normalisé leur prolifération lymphocytaire à la tuberculine à 6 et 7 mois post-greffe versus 2 patients à 9 et 25 mois. Leur BCGite a nécessité une quadri-antibiothérapie d’une durée médiane de 6,.5 mois sans nécessité d’interféron γ-1b ou de splénectomie. En revanche, les patients allogreffés ont reçu une quadri-antibiothérapie avec une durée médiane de 20 mois, les 4 ont reçu de l’interféron γ-1b et 2 ont été splénectomisés. Discussion Les BCGites chez les patients atteints de DICS sont le plus souvent disséminées avec des atteintes multiples et une évolution prolongée marquée par différentes poussées. Plus de la moitié des BCGites de notre étude auraient pu être évitées par un court interrogatoire ciblé sur les antécédents personnels et familiaux contre-indiquant la vaccination par le BCG. Après vaccination, des facteurs semblent influer sur le risque de survenue d’une BCGite chez les patients atteints d’un DICS. Ceux-ci doivent être confirmés par une analyse multivariée. Les BCGites chez les patients atteints de DICS sont le plus souvent disséminées avec des atteintes multiples et une évolution prolongée marquée par différentes poussées. La thérapie génique a été suivie dans cette étude d’une meilleure reconstitution immunitaire post-greffe, d’une BCGite moins sévère et d’un traitement antituberculeux moins lourd que la greffe haplo-identique. Même si nos résultats doivent être interprétés avec prudence car notre effectif de patients est faible et le recul post-thérapie génique encore trop court, la thérapie génique est actuellement une alternative prometteuse pour les patients atteints d’un déficit en γc. 1- Dommergues MA, de La Rocque F, Guy C et al. Local and regional adverse reactions to BCG-SSI vaccination: a 12-month cohort follow-up study. Vaccine 2009 ; 27: 6967–73. 2 -Casanova JL, Blanche S, Emile JF et al. Idiopathic disseminated bacillus Calmette-Guérin infection: a French national retrospective study. Pediatrics 1996; 98: 774–8. 3- Reichenbach J, Rosenzweig S, Döffinger R et al. Mycobacterial diseases in primary immunodeficiencies. Curr Opin Allergy Clin Immunol. 2001; 1: 503–11. 4- Fischer A, Le Deist F, Hacein-Bey-Abina S et al. Severe combined immunodeficiency. A model disease for molecular immunology and therapy. Immunol. Rev. 2005; 203: 98–109. 5- Stephan JL, Vlekova V, Le Deist F et al. Severe combined immunodeficiency: a retrospective single-center study of clinical presentation and outcome in 117 patients. J. Pediatr. 1993; 123: 564–72. MISES AU POINT 1 LES PIEGES DES MIGRAINES ET DES CEPHALEES CHEZ L’ENFANT ET L’ADOLESCENT Par Dr Daniel Annequin, Dr Barbara Tourniaire Centre de référence de la migraine de l’enfant et de l’adolescent. Hôpital Armand Trousseau 75012 Paris. [email protected] Les migraines sont très fréquentes chez l’enfant : 5 à 10 % sont touchés [1]. Tous les examens, scanner, IRM, radiographie, EEG, bilan sanguin, bilan ophtalmologique sont normaux. Alors que la migraine est la première cause de céphalée primaire à évoquer chez l’enfant, la plupart des professionnels cherchent vainement une cause : « ce sont les yeux, c’est psy, c’est une gastro, ce sont les sinus… » Les contrariétés, les émotions, l’excitation associée à une fête d'anniversaire, une colère, une dispute avec les parents ou la fratrie, la crainte des contrôles scolaires, la pression familiale sur les résultats, la rentrée des classes … sont régulièrement retrouvés comme facteur déclenchant de la crise de migraine. Bien souvent ces enfants ne sont pas pris au sérieux, une suspicion (voire une conviction) de simulation (« il le fait exprès, c’est du cinéma »…) entoure les crises. La sémiologie de la migraine de l’enfant reste méconnue par les professionnels qui souvent croient que la migraine n’est pas une entité pédiatrique. Leur premier et seul souci étant de ne pas « passer à côté » d’une pathologie grave, ils se concentrent uniquement sur la recherche d’une tumeur cérébrale. 1 Les céphalées primaires 1.1 1.1.1 Migraine Critères diagnostiques Migraine sans aura En 2013, l'International Headache Society (IHS) a actualisé la troisième version des critères diagnostiques des céphalées de la migraine de l’adulte et de l'enfant (ICHD3) [2]. Chez l’enfant, il existe 2 différences par rapport aux critères de l’adulte sont : le seuil de la une durée minimale des crises est plus courte (2 heures versus 4 heures chez l’adulte) ; et la localisation de la céphalée qui est le plus souvent bilatérale contrairement à l'unilatéralité observée chez l'adulte. En pratique , la migraine est une céphalée sévère, la majorité des enfants cessent ou diminuent leur activité, s’allongent, s’isolent. AssezSouvent, Souvent des douleurs abdominales sont associées ainsi que des vertiges. La diminution des seuils de tolérance sensoriels ( phono-photophobie) peuvent également concerner les odeurs (osmophobie). Le sommeil est bien souvent réparateur. Une pâleur avec des cernes oculaires sont très souvent décrits par les parents. Critères migraine sans aura A Au moins 5 crises répondant aux critères B – D B Crise d'une durée de 2 à 48 heures C La céphalée présente au moins deux des caractéristiques suivantes : Localisation unilatérale ou bilatérale (enfant) Pulsatile Intensité modérée ou sévère Aggravation ou déclenchée par une activité physique habituelle (marcher, monter des marches) D Durant la céphalée, au moins une des caractéristiques suivantes : Nausée ou vomissement Photophobie ou phonophobie E. Pas de meilleure explication par un autre diagnostic ICHD La durée minimum de la crise a été fixée à 2 heures dans la classification ICHD 3 ; dans la précédente version, le seuil avait été fixé à 1 heure. Souvent la durée des crises peut être inférieure à 1 heure [3]. car bien souvent les jeunes enfants recherchent activement le sommeil qui va les soulager complètement. Beaucoup de ces enfants ne consultent pas car leurs crises sont ainsi parfaitement soulagées. De même, une prise précoce d’antalgiques peut soulager les crises, qui seront alors courtes. 1.1.2 Migraine avec aura Critères migraine avec aura A. Au moins 2 crises répondant aux accomplissant critères B-D B. Aura comprenant au moins un des symptômes (entièrement réversible) suivants : - visuels - sensoriels - langage - moteur - tronc cérébral - rétinien C. Au moins deux des critères suivants : 1- Au moins 1 symptôme de l’aura se développe progressivement en plus de 5 minutes et/ou d’autres symptômes se succèdent 2 - Chaque symptôme dure entre 5 et 60 minutes 3 - Au moins 1 symptôme est unilatéral 4 - La céphalée survient pendant l'aura ou suit l'aura dans les 60 minutes D. Pas de meilleure explication par un autre diagnostic ICHD ; un accident ischémique transitoire a été exclu. D’après la littérature, 30 à 50 % des enfants peuvent présenter une aura. ; Lle suivi pendant 40 ans d'une cohorte de 73 enfants migraineux a montré que 79 % avaient rapporté au moins un épisode d'aura [4]. LES AURAS DU CME 1.1.3 On pourrait citer là nos chiffres, même s’ils ne sont pas publiés ? peut-être un poster est référencé qqpart ? sinon, on fait un encadré avec les chiffres de notre cohorte. 1.1.41.1.3 Migraines complexes Certaines migraines de l'enfant sont « spectaculaires », elles peuvent faire errer le diagnostic : des formes ataxiques, hémiplégiques, paréssiques , confusionnelles, apraxiques peuvent être observées ; elles constituent parfois des manifestations inaugurales et nécessitent alors des explorations approfondies pour éliminer une lésion sous-jacente. Anciennement appelées « migraine confusionnelle » [5] « migraine de type basilaire », elles rentrent maintenant dans le cadre des « migraines avec aura du tronc cérébral » marquées par des troubles de la conscience, des symptômes visuels ou sensitifs bilatéraux ou des migraines hémiplégiques sporadiques. 1.2 La céphalée de tension Parmi les autres céphalées primaires de l’enfant, la céphalée dite de tension est de loin la plus fréquente, les autres sont exceptionnelles. 1.2.1 Diagnostic Les critères sont définis en complète opposition à ceux de la migraine. Critères IHCD diagnostiques A Au moins 10 épisodes répondant aux critères B – D B Céphalée d’une durée variant entre 30 min et 7 jours C La céphalée présente au moins deux des caractéristiques suivantes : Localisation bilatérale Sensation de pression (non pulsatile) Intensité légère ou modérée Aucune aggravation par l'activité physique D Absence des deux caractéristiques suivantes : Nausée ou vomissement Photophobie et phonophobie E Exclusion par l’anamnèse, l’examen clinique et neurologique, éventuellement par des examens complémentaires, d’une maladie organique pouvant être la cause de céphalées. En pratique, elle correspond à une céphalée faible à modérée non invalidante. 1.21.3 « Syndromes épisodiques pouvant être associés à la migraine » Ces tableaux cliniques évoluent par crises, les enfants sont asymptomatiques entre les crises. ils surviennent dans des familles de migraineux. 1.2.11.3.1 Les vomissements cycliques Les épisodes de vomissements intenses, sont récurrents, stéréotypés chez un même enfant. Tous les bilans sont normaux. A. Au moins 5 crises de nausées et vomissements sévères répondant aux critères B et C B. Crises stéréotypées chez un patient et récurrentes avec une périodicité prédictible C. Présence de tous les critères suivants 1. Nausées et vomissements au moins 4/heure 2. Durée des crises : ≥ 1h ; et jusqu’à 10 jours 3. Intervalle entre les crises ≥ 1 semaine D. Aucun symptôme entre les crises E. Non attribué à une autre cause (en particulier digestive) Le diagnostic est souvent fait tardivement car « un reflux » , une « gastro » sont suspectés à tort . La répétition des crises stéréotypées est spécifique « comme du papier à musique » ; les familles peuvent prévoir la survenue de la crise suivante. 1.2.21.3.2 La migraine abdominale La douleur est souvent sévère nécessitant un passage dans les services d’urgence. Les nombreux bilans sont tous négatifs A. Au moins 5 crises remplissant les critères B à D B. La douleur a au moins deux des trois caractéristiques suivantes 1. Douleur médiane, péri-ombilicale, ou mal localisée 2. Sourde 3. Modérée ou sévère C. Durant les crises, au moins deux des caractéristiques suivantes 1. Anorexie 2. Nausées 3. Vomissements 4. Pâleur D. Durée des crises 2 à 72 heures (en l’absence de traitement ou en cas de traitement inefficace) E. Intervalles libres complètement asymptomatiques entre deux crises F. Non attribué à une autre cause (en particulier rénale ou intestinale) La plupart des enfants vont évoluer vers des tableaux de migraine classique [6-8] I.2.2.1I.3.2.1 Colique du nourrisson Les liens entre la migraine et les coliques du nourrisson ont été récemment étudiés. Dans une première étude prospective sur 154 « couples » mère/enfant, les enfants dont les mères étaient migraineuses avaient un risque 2,6 fois supérieur d’avoir des symptômes de coliques [8]. Dans la deuxième étude, les parents d’enfants consultant aux urgences pour des crises de migraines étaient interrogés sur les antécédents de coliques du nourrisson chez cet enfant. Par rapport à des sujets témoins apparentés, le risque d’avoir eu des coliques était 6,6 fois supérieur [9]. 1.2.31.3.3 Le vertige paroxystique bénin Des crises de vertiges surviennent sans prodromes, et cèdent spontanément chez un enfant en bonne santé. A. Au moins 5 crises correspondant aux critères B et C B. Episodes de vertiges sévères survenant de manière inattendue, d’intensité maximale initialement et cédant spontanément en quelques minutes à quelques heures, sans perte de connaissance C. Au moins un des signes ou symptômes suivants : 1. Nystagmus 2. Ataxie 3. Vomissements 4. Pâleur 5. Appréhension D. Examens neurologique, audiométrique et vestibulaire normaux entre les crises E. Non attribué à une autre cause Au sein d’un centre tertiaire d’ORL [10], l’étiologie la plus fréquemment retrouvée devant des vertiges de l’enfant et de l’adolescent était la migraine, comme l’avaient déjà mis en évidence d’autres séries rapportées dans ce travail. Une étude épidémiologique de suivi à long terme d’enfants ayant présenté des épisodes de vertiges paroxystiques bénins confirme les liens avec la migraine[11]. Enfin, des vertiges sont très fréquemment présents lors de crises de migraine classiques. Environ 40 % des enfants migraineux consultant au Centre de la Migraine de l’Enfant ont des vertiges ou un syndrome vertigineux associé aux céphalées[12]. 1.2.41.3.4 Torticolis paroxystiques bénin A. Crises récurrentes chez un jeune enfant, répondant aux critères B et C B. Tête penchée d’un côté (ou de l’autre), avec une discrète rotation, cédant spontanément après quelques minutes à quelques jours C. Pendant les crises, présence d’un ou plusieurs des signes suivants 1. Pâleur 2. Irritabilité 3. Malaise 4. Vomissements 5. Ataxie (plus fréquente chez les plus âgés) D. Examen neurologique normal entre les crises E. Non attribué à une autre cause 2 2.1 Céphalées secondaires Sinusite Le diagnostic de sinusite est trop souvent évoqué devant des céphalées de l’enfant, y compris chez des enfants dont les sinus ne sont pas encore développés ; la radiographie montre alors l’absence d’aération des sinus (liée à l’âge) et « confirme » à tort le diagnostic de sinusite. La diagnostic de sinusite nécessite le plus souvent un avis spécialisé, il s’effectue essentiellement sur des critères cliniques (obstruction nasale, rhinovirus purulente, fébricule…) et très peu sur l’imagerie car 30 à 50 % d’anomalies non spécifiques sont retrouvées (au scanner ou à l’ IRM) chez l’enfant bien portant [13,14]. La douleur est généralement plus modérée et à type de pesanteur, ces sinusites ne provoquent pas de céphalée chronique et encore moins d’accès paroxystique [15]. L’analyse de la sémiologie de 2991 patients adultes avec un diagnostic initial de « sinusite » a montré que 88 % étaient d’authentiques migraineux [16]. Dans une étude prospective portent sur 214 enfant , un faux diagnostic de céphalée liée aux sinus avait été porté chez 40 % des patients migraineux et 60% de ceux porteurs de céphalée de tension [17]. En consultation spécialisée « céphalée », le faux diagnostic de « sinusite » est très régulièrement retrouvé chez les enfants mais aussi chez les parents. 2.2 Les yeux De nombreuses erreurs peuvent survenir dans l’appréciation du rôle des yeux dans les céphalées, un des premiers « réflexes » des parents et des médecins est la demande d’un examen ophtalmologique. La majorité des enfants consultant en centre spécialisé pour les céphalées ont déjà vu un ophtalmologiste avec souvent des lunettes correctrices prescrites, des séances d’orthoptie ont également été pratiquées sans bénéfice évident sur les accès migraineux. La céphalée associée aux troubles visuels « habituels » est modérée, elle a les caractéristiques sémiologiques de la céphalée de tension et répond facilement à la correction ; à l’inverse, les crises de migraine ne sont pas expliquées par ces problèmes ophtalmologiques. Cependant plusieurs éléments incitent à tort à rechercher cette cause visuelle : les enfants clignent des yeux en raison de la photophobie présente durant la crise ; la localisation périorbitaire de la céphalée, les manifestations de l’aura visuelle (vision floue, scotome scintillant, limitation du champ visuel, tâches colorées…) vont faire privilégier cette fausse piste. Cette origine visuelle reste encore trop largement évoquée par les professionnels en première intention car elle retarde de plusieurs mois le diagnostic et la prise en charge efficace des accès migraineux. Les authentiques causes ophtalmologiques sont très rares : le glaucome, les infections cornéennes peuvent induire des douleurs sévères. 2.3 La fièvre L’association fièvre et céphalée intense peut donner lieu à plusieurs types de difficultés. La fièvre, la raideur de la nuque orienteront bien entendu vers une infection méningée. Les épisodes fébriles sont très souvent observés dans les céphalées aiguës vues aux urgences mais la fièvre et les épisodes infectieux peuvent déclencher une authentique crise de migraine chez certains patients ; aucune raideur de nuque ne sera alors observée. Plus rarement, certaines formes de migraine comportent des troubles végétatifs à type d’hypothermie [18] ou d’hyperthermie : 9 % des enfants d’une série de 1724 enfants italiens[19]. Ces variations thermiques entraînent bien souvent la recherche de foyers infectieux et parfois la réalisation d’une ponction lombaire. L’interrogatoire des familles et la mise en évidence de crises récurrentes identiques doit permettre de porter le diagnostic de crises de migraines avec signes végétatifs. 3 En pratique Le diagnostic de migraine est essentiellement clinique. Il doit être évoqué rapidement chez un enfant présentant des céphalées récurrentes, ce ne doit pas être un diagnostic d’élimination. La plupart des enfants présentent des tableaux mixtes associant migraine et céphalée de tension et cette association doit être bien recherchée à l’interrogatoire. Moyennant une bonne connaissance de la sémiologie et de l’épidémiologie des céphalées de l’enfant, le praticien peut facilement poser un diagnostic de céphalée primaire et ainsi éviter la multiplication de bilans inutiles. Pour en savoir plus Il existe un livret d’information pour les enfants et les familles (www.sparadrap.org) et un site internet (www.migraineenfant.org ) pour les enfants et les professionnels. References (1) Abu-Arafeh I, Razak S, Sivaraman B, Graham C. Prevalence of headache and migraine in children and adolescents: a systematic review of population-based studies. Dev Med Child Neurol 2010 Dec;52(12):108897. (2) The International Classification of Headache Disorders, 3rd edition (beta version). Cephalalgia 2013 Jul;33(9):629-808. (3) Laurell K, Larsson B, Eeg-Olofsson O. 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ASSOCIATION ENTRE MIGRAINE DE l’ENFANT ET COLIQUES DU NOURRISSON Par Luigi Titomanlio et Jean-Christophe Mercier Dr Luigi Titomanlio Université Paris Denis Diderot, Paris Santé La Sorbonne Assistance Publique – Hôpitaux de Paris Service des Urgences Pédiatriques Hôpital Robert Debré 48, Boulevard Sérurier, 75019 Paris [email protected] INTRODUCTION Les coliques du nourrisson sont une cause fréquente de pleurs inconsolables durant les premiers mois de la vie. Elles sont généralement diagnostiquées selon les critères de Wessel [1]: pleurs et agitation pendant plus de 3 heures par jour, plus de 3 jours par semaine et pendant plus de 3 semaines chez un enfant en bonne santé. La physiopathologie et la présentation clinique selon l'âge des coliques ne sont pas bien comprises. Les coliques du nourrisson sont généralement interprétées comme un syndrome douloureux [2]. L'allergie aux protéines de lait de vache, des anomalies hormonales, intestinales, des facteurs parentaux et un dérèglement du système nerveux central ont été suggérés comme de possibles étiologies [3,4]. La migraine est une des causes les plus fréquentes de céphalées primaires chez les enfants [5,6]. Les critères diagnostiques de la migraine pédiatrique ont été établis par la classification internationale des céphalées - II révision (IHCD-II) [7]. Plusieurs variantes de la migraine, avec et sans aura, et de syndromes périodiques de l'enfance qui sont des précurseurs de la migraine ont été décrits [7], comme la migraine abdominale [8]. Les céphalées de tension sont aussi relativement fréquentes dans l'enfance [9] : douleur bilatérale avec une qualité pressante ou en bande, d'intensité faible à modérée. Une association possible entre ces deux syndromes douloureux, colique chez le nourrisson et migraine chez l’enfant a été évoquée, mais peu étudiée. Aussi, nous avons étudié l'association entre coliques et migraine en réalisant une étude cas-témoins, parallèlement à des enfants souffrant de céphalées de tension afin d’examiner la spécificité de la possible association entre coliques et migraine. MÉTHODES Nous avons effectué une étude cas-témoin d'enfants âgés de 6 à 18 ans se présentant aux urgences pédiatriques avec un diagnostic de céphalées primaires dans 3 hôpitaux européens entre avril 2012 et juin 2012. Au niveau de chaque centre participant, les contrôles étaient réalisés sur des enfants de même âge qui consultaient aux urgences pour un traumatisme mineur. Les enfants ayant des antécédents personnels de maux de tête récurrents ont été exclus du groupe témoin. Les céphalées primaires on été classées selon les critères de l’IHS [7]. Les parents ont rempli un questionnaire structuré pour déterminer les antécédents personnels et familiaux de colique infantile, défini selon les critères de Wessel [1]. Les médecins ont également revu attentivement le carnet de santé (libretto sanitario en Italie) de chaque enfant. Le critère de jugement principal était la différence dans la prévalence de coliques infantiles entre les enfants avec et sans un diagnostic de migraine. Les différences de prévalence de coliques entre les enfants avec et sans céphalées de tension ont été évaluées pour examiner la spécificité de l'association. Les variables significatives en analyse univariée au niveau nominal de 20 % ont été considérées dans l'analyse multivariée basée sur une régression logistique. RÉSULTATS Un total de 328 patients et 471 témoins ont été inclus dans l'étude. 208 enfants avaient une migraine (dont 142 avaient des migraines sans aura et 66 migraines avec aura). 120 ont été diagnostiqués comme céphalées de tension. Dans les migraines avec aura, la prévalence de coliques était de 69,7 % (46/66 enfants), et dans les migraines sans aura de 73,9 % (105/142 enfants). Dans le groupe des céphalées de tension, la prévalence était de 35 % (42/120 enfants), et dans le groupe témoin, la prévalence était de 26,5 % (125/471 enfants). Une régression logistique multivariée montrait une association entre coliques infantiles et migraine : 72,6 % vs. 26,5 % (RR: 6,61 [IC 95 %: 4,38 à 10], p <.001) par l’interrogatoire; 72,6 % vs. 26,3 % (RR: 6,68 [IC 95 %: 04.04 à 10.13], p <.001) par le carnet de santé. Cette association n'était pas retrouvée entre coliques infantiles et céphalées de tension : 35 % vs. 26,5 % (RR: 1,46 [IC 95 %: 0,92 à 2,32], p = 0,1) par l’interrogatoire ; 35 % vs. 26,3 % (RR: 1,48 [IC 95 %: 0,93 à 2,36], p = 0,1) par le carnet de santé. Cette association entre coliques infantiles et migraine était confirmée par une analyse en sous-groupes : migraine sans aura 73,9 % vs. 26,5 % (RR: 7,01 [IC 95 %: 4,43 à 11,09], p <.001) et avec aura 69,7 % vs. 26,5 % (RR: 5,73 [IC 95 %: 3,07 à 10,73], p <.001) et selon l'âge : 6 à 12 et 12 à 18 ans. Lorsque l'on compare les caractéristiques de la migraine chez les enfants avec ou sans antécédents de coliques du nourrisson, une qualité pulsatile de la douleur a été plus fréquemment rapportée dans le sous-groupe de coliques du nourrisson (p = .003). DISCUSSION Des études antérieures ont suggéré une association entre coliques infantiles et migraine [10,11,12]. Il était récemment rapporté que la migraine maternelle était associée à un risque accru de coliques infantiles [13], ce qui suggère que les coliques pourraient être une manifestation précoce de la migraine. Dans notre étude, l'association significative entre coliques infantiles et migraine sans aura et avec aura dans l’enfance, suggère une physiopathologie commune. Parmi les caractéristiques de la migraine, seul le caractère pulsatile de la douleur était significativement lié aux coliques infantiles. Les nourrissons avec coliques pourraient avoir une sensibilisation périvasculaire des terminaisons nerveuses intestinales de façon analogue à la physiopathologie de la migraine. Parmi les médiateurs potentiellement impliqués dans la modulation de l’activité sensorielle, le ‘Calcitoningene related-peptide pourrait être impliqué [14]. Le CGRP est également potentiellement impliqué dans la physiopathologie de la douleur abdominale induite par une inflammation des neurones sensoriels intestinaux [15]. Notre étude soulève des questions quant à la physiopathologie des coliques infantiles. Si les coliques s’avéraient être des manifestations précoces de migraine, ceci pourrait expliquer le manque d’efficacité de traitements dirigés contre une étiologie digestive. La physiopathologie de la migraine n’est pas non plus connue avec certitude, bien que les épisodes semblent initiés par une vague de dépression corticale conduisant à l’activation des voies douloureuses trigéminées. La migraine est une maladie génétique, comme le suggère la concordance de 34 % pour la migraine avec aura chez les paires de jumeaux homozygotes et de 12 % pour les paires de jumeaux dizygotes [16]. Les formes les plus sévères de migraine hémiplégique familiale sont liées à des mutations autosomales dominantes des protéines constitutives des canaux ioniques, comme CACNA1A (canal calcium voltage-dépendant de type P/Q), ATP1A2 (ATPase Na/K) et SCNIA (canal sodium voltage-dépendant) [17]. Les patients avec ces formats sévères de migraine peuvent également présenter des épisodes moins sévères. La raison tient probablement à ce que de multiples facteurs déclenchants dans l’environnement peuvent initier l’excitation neuronale. Le stress, un trouble du sommeil en particulier peuvent initier l’excitation neuronale. D’autres désordres périodiques de la prime enfance peuvent être considérés comme des équivalents de migraine, tels que le vertige bénin paroxystique, le torticolis bénin paroxystique et le syndrome de vomissements cycliques. Ce dernier syndrome apparaît au cours des deux premières années de vie, avec des vomissements survenant avec une périodicité régulière de 2 à 4 semaines. Ce syndrome de vomissements cycliques a un cycle circadien, commençant habituellement au cours du sommeil ou au réveil tôt dans la matinée. Plus tard dans l’enfance, la majorité des vomisseurs cycliques développe une migraine avec ou sans aura, suggérant fortement que les vomissements cycliques puissent être une forme de migraine [18]. Le moment de survenue et la fréquence à la fois des coliques infantiles et de la migraine sont en relation étroite avec le cycle éveil-sommeil avec un profil diurne. La migraine est fréquemment déclenchée par une perturbation du cycle sommeil-éveil. Le rôle du sommeil et des rythmes circadiens sont nettement moins connus pour les coliques infantiles. Peut-on remarquer que les coliques sont associées à une perturbation du sommeil du nourrisson et que, comme la migraine, le sommeil peut terminer un épisode de coliques. Il est possible que l’altération du cycle sommeil-éveil chez le nourrisson soit un déclencheur plutôt qu’une conséquence des coliques. De fait, la consolidation du sommeil nocturne survient vers 2-3 mois chez le nourrisson, et coïncide avec l’établissement d’un cycle circadien de la mélatonine [19]. In utero, le rythme circadien est régulé par des signaux maternels, tandis qu’après la naissance le rythme circadien s’établit vers l’âge de 3 mois, quand les coliques infantiles cessent. Une altération de la production circadienne de la mélatonine a été montrée dans certaines formes de migraine, et la mélatonine a été proposée comme traitement potentiel de la migraine. La mélatonine pourrait également affecter la motricité digestive. De fait, une étude récente a montré que la mélatonine du lait maternel pourrait améliorer le sommeil de son nourrisson et réduire la fréquence des coliques [20]. Pour conclure, notre étude a mis en évidence une association significative entre coliques infantiles et migraine de l’enfant. Si les coliques infantiles constituaient une forme précoce de migraine, les migraines pourraient représenter un continuum de manifestations entre coliques infantiles, vomissements cycliques de la petite enfance et migraine de l’enfant puis de l’adulte. Bien entendu, des études supplémentaires sont nécessaires avant d'envisager des traitements anti-migraineux comme une option pour traiter les coliques du nourrisson. REFERENCES 1. Wessel MA, Cobb JC, Jackson EB, Harris GS, Jr., Detwiler AC. Paroxysmal fussing in infancy, sometimes called colic. Pediatrics. 1954;14(5):421-435. 2. Gudmundsson G. Infantile colic: is a pain syndrome. 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Il s’agit donc d’un état pathologique définitif pour lequel, dans l’état actuel des connaissances, la seule possibilité pour maigrir et maintenir cette réduction pondérale est de suivre un régime restrictif à vie. Les difficultés engendrées par la lutte permanente contre la faim qu’entraîne un tel régime, expliquent les nombreux échappements thérapeutiques. En attendant la mise au point d’autres traitements moins contraignants, la chirurgie représente aujourd’hui la seule alternative thérapeutique efficace à long terme. Elle peut être bariatrique pour permettre un amaigrissement conséquent, ou esthétique pour faire disparaître certains préjudices esthétiques liés à la surcharge pondérale. Chirurgie bariatrique La chirurgie bariatrique a démontré depuis longtemps qu’elle représentait la seule thérapeutique efficace à long terme chez l’adulte [2,3]. Son utilisation chez l’adolescent est plus récente et génère encore des interrogations. Quelles sont les indications de la chirurgie bariatrique chez l’adolescent ? Les nord-américains sont indiscutablement ceux dont l’expérience est la plus ancienne, comme le montre la série de 566 adolescents opérés entre 1996 et 2003, publiée il y a quelques années [4]. Leur expérience est maintenant de plusieurs milliers d’adolescents opérés [5]. Il existe donc depuis longtemps aux Etats-Unis des recommandations bien précises pour poser l’indication d’une chirurgie bariatrique chez l’adolescent [6]. Ces dernières ont été mises à jour en 2009 [Tableau I]. De nombreux autres pays ont suivi en produisant leurs propres recommandations [5,7]. Tableau I. Critères d’inclusion et d’éligibilité pour la chirurgie bariatrique chez l’adolescent obèse (d’après [6]). Critères d’inclusion - IMC > 35 kg/m² avec une comorbidité sévère (diabète, syndrome d’apnées du sommeil sévère, pseudotumor cerebri, stéatohépatite sévère). - IMC > 40 kg/m² avec une comorbidité modérée (syndrome d’apnées du sommeil modéré, hypertension artérielle, insulinorésistance, intolérance au glucose, dyslipidémie, complications psychosociales liées à l’obésité, altération de la qualité de vie). - Après échec des autres prises en charge ayant duré au moins 6 mois. - Compliance de l’adolescent avant et après la chirurgie pour la prise en charge médicale, diététique et psychologique. Critères d’éligibilité - Stade de Tanner IV ou V (sauf en cas de comorbidité sévère mettant en jeu le pronostic vital). - Maturation de l’âge osseux avec une taille supérieure à 95 % de la taille attendue à l'âge adulte. - Capacité à intégrer les changements diététiques et de mode de vie indispensables en postopératoire. - Maturité intellectuelle et encadrement de la famille avec compréhension des risques encourus et des mesures thérapeutiques ultérieures (supplémentation nutritionnelle, suivi médical régulier). - Absence de troubles psychiatriques ou en cours de traitement (dépression, anxiété, compulsions alimentaires). En France, la HAS a émis récemment des recommandations totalement anachroniques, puisqu’elles stipulent que « La chirurgie n’a pas d’indication dans la prise en charge de l’obésité de l’enfant et de l’adolescent. Son utilisation n’est pas recommandée. » [8]. Il ne s’agit certes que d’un simple « avis d’expert » (niveau de preuve le moins élevé dans la hiérarchisation de la HAS), d’ailleurs en phase avec d’autres recommandations tout aussi stupides énoncées dans le même texte [9]. Heureusement, les véritables experts de l’obésité pédiatrique répandent un avis différent. La chirurgie bariatrique doit représenter une alternative thérapeutique sérieuse chez l’adolescent obèse. Ses indications doivent cependant être posées avec davantage de précautions que chez l’adulte en raison des particularités somatiques (période de croissance maximale) et psychiques (tolérance de la modification du corps, comportements à risque, mauvaise compliance aux recommandations diététiques et médicamenteuses) spécifiques à cette période de la vie. Les indications se limitent aujourd’hui aux obésités sévères, résistant à un traitement bien conduit, et associées à une ou plusieurs comorbidités ou retentissant de manière critique sur la qualité de vie et la situation psychologique et sociale. Les critères d’éligibilité des recommandations américaines doivent également être respectés (Tableau I). Il est cependant possible qu’elles s’étendent dans les années à venir aux formes moins sévères, sans comorbidités associées. Elles devront alors être posées avec beaucoup de rigueur pour éviter toute dérive inflationniste. Malgré l’accroissement probable des indications au cours des années à venir, celles-ci resteront limitées et bien moins fréquentes que chez l’adulte. Seuls quelques centres pédiatriques de référence devront donc poser ces indications, en lien avec des services d’adultes pour profiter de leur expérience en la matière. En revanche, il nous semble important que ces décisions échoient à des pédiatres et non à des médecins d’adultes. L’adolescent n’est pas un adulte et seuls les pédiatres peuvent appréhender les problèmes spécifiques de cette période de la vie. Quel montage chirurgical proposer ? Il existe actuellement 3 techniques de chirurgie bariatrique : l’anneau gastrique, le bypass et la sleeve gastrectomie (ou gastrectomie en manchon) [2,3]. Dans les recommandations américaines, le bypass reste la technique de choix, alors que les anneaux gastriques ne sont pas recommandés en raison de l’absence de données fiables à long terme en matière de tolérance et d’efficacité. La sleeve est plus récente et ses résultats demandent encore à être évalués, notamment à moyen et long terme [5,8]. La pose d’anneaux gastriques chez l’adolescent est cependant en augmentation outre-Atlantique, principalement pour des raisons économiques car elle est bien moins onéreuse [10]. Le bypass, et de plus en plus la sleeve, restent toutefois les techniques prioritairement choisies dans les familles aisées [10]. De rares travaux ont comparé les interventions par anneaux gastriques et par bypass chez l’adolescent obèse. Si la durée d’hospitalisation initiale est plus courte pour les anneaux, les complications au cours de la première année suivant la chirurgie ne sont pas significativement différentes entre les deux techniques [10]. En revanche, plusieurs années après la pose de l’anneau, des complications mécaniques sévères conduisant parfois au décès ont été décrits chez des adolescents, alors que la tolérance des bypass est bien meilleure sur le long terme [5]. Comme chez l’adulte [2,3], la réduction pondérale obtenue est plus importante avec le bypass que l’anneau gastrique [5,11,12]. Le seul avantage des anneaux est d’être aisément réversibles, contrairement aux bypass qui le sont plus difficilement. On notera enfin qu’en raison des nombreux échecs thérapeutiques et des fréquentes complications à long terme avec les anneaux gastriques, cette technique est aujourd’hui limitée à de rares indications chez l’adulte et donc pratiquement abandonnée au profit du bypass et de la sleeve [13]. La sleeve est une technique plus récente qui demande encore à être évaluée, même si les premières séries montrent des résultats assez proches de ceux obtenus avec les bypass [5,14]. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le bypass représente le montage chirurgical à proposer en première intention dans la majorité des cas chez l’adolescent obèse. La sleeve peut être intéressante chez les adolescents à risque opératoire élevé ou refusant le bypass dans un premier temps. Quant aux anneaux gastriques, leurs indications doivent se limiter aux rares adolescents qui expriment un souhait de réversibilité de leur intervention, en les prévenant cependant que l’anneau devra être extrait à terme et qu’une conversion en bypass ou en sleeve sera probablement nécessaire s’ils souhaitent maintenir leur réduction pondérale. Dans tous les cas, le choix du montage chirurgical devra être effectué par une équipe pédiatrique spécialisée, en lien avec un service d’adultes. Quel est le parcours péri-opératoire optimal ? Une bonne préparation à l’intervention est cruciale pour éviter toute complication postopératoire et pour être sûr que l’adolescent est bien prêt à bénéficier d’une telle chirurgie. Ainsi, un suivi en consultation d’au moins 6 mois est nécessaire avant de poser toute indication chirurgicale. Cette période permettra de réaliser l’évaluation médicale, psychologique et diététique primordiale pour préparer l’adolescent de manière optimale. Au cours de ce suivi, seront recherchées et corrigées d’éventuelles complications qui augmenteraient le risque opératoire (apnées du sommeil, HTA, hypertension intra-crânienne, diabète, etc.). Des troubles du comportement alimentaire ou des troubles psychiatriques contre-indiquant la chirurgie seront également recherchés. Enfin, les capacités de l’adolescent et de sa famille à suivre les contraintes diététiques et médicales post-opératoires, ainsi que leur réelle motivation seront évaluées. Un consentement éclairé de l’adolescent et des deux parents devra être systématiquement obtenu. Après l’intervention, un suivi médical, psychologique et diététique au long cours est indispensable. Les adolescents opérés doivent suivre un régime diététique spécifique et ingérer quotidiennement des suppléments minéraux et vitaminiques sous peine de voir rapidement apparaître d’importantes carences nutritionnelles [15]. Leur surveillance reposera sur des bilans cliniques et biologiques systématiques et des consultations diététiques régulières qui permettront d’ajuster les posologies des suppléments nutritionnels. Un soutien psychologique est également incontournable en raison de la double modification corporelle que va subir l’adolescent, amaigrissement et maturation sexuelle. Enfin, une contraception efficace devra être prescrite pendant au moins 2 ans après l’intervention chez les adolescentes car les grossesses non désirées ne sont pas rares en post-opératoire [16]. Quelles perspectives ? La chirurgie bariatrique de l’adolescent obèse va considérablement se développer au cours des années à venir. Elle va ainsi probablement permettre de soulager la souffrance d’un grand nombre d’adolescents atteints d’obésité morbide rebelle à toute thérapeutique médicale. Elle ne devra cependant en aucun cas être banalisée et être limitée à quelques rares centres pédiatriques spécialisés. Chirurgie esthétique Chez l’adolescent, l’obésité entraîne presque toujours des conséquences psychosociales liées au regard des autres, alors que les complications somatiques sévères sont rares. Cela justifie donc la place de la chirurgie esthétique que nous avons développée à l’hôpital Armand-Trousseau depuis quelques années. Elle concerne les adiposogynécomasties, les tabliers abdominaux et les verges enfouies. Adiposogynécomastie L'adiposogynécomastie est une accumulation de graisse au niveau de la région mammaire simulant le développement inesthétique de seins chez le garçon. Elle existe surtout en cas d'obésité importante, mais peut également se rencontrer chez des garçons ayant une surcharge pondérale modérée [17]. Cette disgrâce physique suscite souvent beaucoup de gêne et entrave sérieusement les activités nécessitant une exhibition du torse (activité physique, natation). Dans la mesure où l'amélioration obtenue après réduction pondérale est souvent assez limitée [17], il ne faut pas hésiter à proposer une chirurgie plastique dans les cas les plus mal tolérés [18]. Cette chirurgie devra toujours être précédée de l'élimination des autres causes de gynécomastie (hormonales, génétiques, tumorales et médicamenteuses), mais aussi d'une consultation psychologique afin d'apprécier les capacités de l'enfant à tolérer les modifications physiques que provoquera l'intervention. La grande majorité des garçons opérés sont particulièrement satisfaits du résultat obtenu [Figure 1] [17,18]. Tablier abdominal Certains adolescents obèses se plaignent davantage de l'existence d'un tablier abdominal singulièrement inesthétique que de leur surcharge pondérale elle-même. Cette disgrâce se voit surtout après chirurgie bariatrique chez l'adulte, mais elle peut également être présente en dehors de tout amaigrissement massif. La lipectomie permet de récupérer de manière spectaculaire un abdomen satisfaisant. Dans notre expérience, le bénéfice d'une telle intervention est remarquable [Figure 2]. Verge enfouie La verge enfouie est un problème assez fréquent chez les garçons souffrant d'une obésité sévère. L'importante masse graisseuse hypogastrique recouvre une verge souvent elle-même rétractée, la rendant partiellement ou totalement invisible. Bien que peu l'expriment, ce problème est fréquemment la source d'une souffrance psychologique, surtout chez les adolescents les plus âgés. Dans les cas les plus mal tolérés, un désenfouissement de la verge par ablation chirurgicale de la graisse suspubienne en excès avec réinsertion de son attache pubienne peuvent être proposés, mais les résultats ne sont pas toujours très satisfaisants [19]. Figure 1. Adiposogynécomastie avant et après chirurgie esthétique (Photos Dr Jacques Buis). Figure 2. Tablier abdominal avant et après chirurgie esthétique (Photos Dr Jacques Buis). Références 1. Tounian P. Programming towards childhood obesity. Ann Nutr Metab 2011; 58 (suppl 2): 30-41. 2. Sjostrom L, Lindroos AK, Peltonen M, et al. Lifestyle, diabetes, and cardiovascular risk factors 10 years after bariatric surgery. N Engl J Med 2004; 351: 2683-93. 3. Sjostrom L. Review of the key results from the Swedish Obese Subjects (SOS) trial - a prospective controlled intervention study of bariatric surgery. J Intern Med 2013; 273 : 219-34. 4. Tsai WS, Inge TH, Burd RS. Bariatric surgery in adolescents. Arch Pediatr Adolesc Med 2007; 161: 217-21. 5. Black JA, White B, Viner RM, et al. Bariatric surgery for obese children and adolescents : a systematic review and meta-analysis. Obes Rev 2013; doi: 10.1111/obr.12037. 6. Pratt JSA, Lenders CM, Dionne EA, et al. Best practice updates for pediatric/adolescent weight loss surgery. Obesity 2009; 17: 901-10. 7. Dixon JB, Fitzgerald DA, Kow L, et al. 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MISES AU POINT 2 LE RETARD VACCINAL CHEZ L'ENFANT : FREQUENCE ET IMPLICATIONS PAR FRANÇOIS DUBOS, PAULINE GRAS, PAULINE DEBACKER, MARION LAGRÉE, ALAIN MARTINOT Affiliations UDSL, Université de Lille-2, CHRU Lille, Urgences pédiatriques et maladies infectieuses, et EA2694, Santé publique : épidémiologie et qualité des soins Correspondance à : F. Dubos Hôpital R. Salengro, 2 av. Oscar Lambret, 59000 Lille Tel : +33320445575 ; Fax : +33320444719 Mel : [email protected] LA NOTION DE RETARD VACCINAL Le succès et l’efficacité d’un programme vaccinal ont longtemps été associés à la notion de taux de couverture vaccinale. Cependant lorsqu’on évoque une bonne couverture vaccinale, le retard à la réalisation de cette vaccination n’est pas pris en compte. Par exemple aux Etats-Unis, le taux de couverture vaccinale contre diphtérie, tétanos, coqueluche (DTCa) et varicelle des enfants de 19 à 35 mois est d’au moins 85 %. Il est supérieur à 90 % pour les vaccinations poliomyélite, rougeole-oreillons-rubéole (ROR), hépatite B et Haemophilus influenzae b [1]. Mais selon une étude publiée en 2002, seulement 18 % des enfants américains recevaient leurs vaccinations aux âges recommandés [2]. Le retard vaccinal met en avant une notion plus sensible de délai de non protection vaccinale. Il représente la période s’écoulant entre l’âge recommandé et l’âge réel de vaccination. Ainsi, en s’appuyant sur l’unique indicateur de couverture vaccinale, on occulte complètement l’âge de réalisation de ces vaccinations et les retards substantiels constatés avant d’avoir reçu un schéma vaccinal complet durant les deux premières années de vie [3]. Si le retard vaccinal intègre toute ou une partie de cette période de vulnérabilité maximale, l’enfant n’est pas couvert. En d’autres termes, le premier risque d’une vaccination non effectuée aux âges recommandés est de ne pas avoir un effet protecteur direct (individuel) du vaccin chez les jeunes nourrissons dans les deux premières années de vie, aux âges où la morbidité et la mortalité par infection à prévention vaccinale sont les plus élevées [4]. Le second risque lié au retard à l’administration des vaccinations est de ne pas compléter le calendrier vaccinal par effet domino [4]. FREQUENCE DU RETARD VACCINAL Un certain nombre d’études a étudié la fréquence de ce retard à la réalisation des vaccins chez les nourrissons et jeunes enfants. Cette fréquence varie d’un pays à l’autre en fonction des ressources nationales, des systèmes nationaux d’organisation de la vaccination et peut varier d’un schéma vaccinal à l’autre, d’un vaccin à l’autre et d’une dose à l’autre pour un même vaccin. PAYS A RESSOURCES ECONOMIQUES FAIBLES OU MOYENNES Une large étude a colligé les données des systèmes de santé de 45 pays entre 1996 et 2005 (médiane 2002), qui concernaient 217 706 enfants de moins de 3 ans. Dans ces pays où la tuberculose est endémique, la vaccination BCG était effective à 4 semaines de vie pour 49 % des enfants (écart interquartile [EIQ] : 30-70), à 3 mois pour 74 % (EIQ : 62-86) et à 6 mois pour 85 % (EIQ : 73-91) [5]. Dans le cadre de la vaccination DTCa, la 1re dose de vaccination DTCa (normalement indiquée à 6-8 semaines de vie) était effective à 12 semaines de vie pour 57 % des enfants en moyenne (EIQ : 46-70), et en moyenne pour 82 % des nourrissons âgés de 6 mois (EIQ : 67-89). La 3e dose de vaccination DTCa (normalement indiquée à 14 semaines de vie) était effective à 5 mois de vie pour 27 % des enfants en moyenne (EIQ : 16-42) et à 12 mois pour 65 % des enfants (EIQ : 49-79). La vaccination rougeole était effective à l’âge de 12 et 24 mois pour en moyenne respectivement 54 % (EIQ : 37-69) et 80 % des enfants (EIQ : 62-88) [5]. Dans une autre étude analysant les données de 31 pays, même si le BCG avait un taux de couverture vaccinale de 98 %, celui-ci était effectué avec retard dans 65 % des cas (extrêmes : 15-97) avec un retard médian de 2,1 semaines (EIQ : 0,9-3,0). Le 1er DTCa était effectué avec retard dans 67 % des cas (extrêmes : 12-89) avec un retard médian de 2,4 semaines (EIQ : 1,5-3,1). Le 3e DTCa était effectué avec retard dans 41 % des cas (extrêmes : 11-81) avec un retard médian de 6,3 semaines (EIQ : 3,3-9,0). Bien que la couverture vaccinale rougeole soit évaluée à 91 % dans ces pays, cette vaccination était effectuée avec retard dans 51 % des cas (extrêmes : 22-91), avec un retard médian de 4,1 semaines (EIQ : 2,5-5,8) [6]. A Buenos-Aires en Argentine, le 4e DTCa, recommandé à 18 mois, était effectif à 19 mois pour 43 % des enfants (intervalle de confiance [IC] à 95 % : 40-46) et la vaccination rougeole à 13 mois pour 55 % (IC95 % : 52-57) [7]. A la lecture de ces données, on s’aperçoit que le retard vaccinal est fréquent et varie grandement d’un pays à l’autre et d’un vaccin à l’autre. Même si les délais moyens ou médians de retard peuvent paraître peu importants, ceux-ci peuvent avoir des conséquences importantes tant au niveau individuel que collectif pour des affections à prévention vaccinale endémiques ou épidémiques dans ces pays telles que la tuberculose, le tétanos ou la rougeole. PAYS A RESSOURCES ECONOMIQUES ELEVEES Une étude nationale américaine publiée en 2002 et cités précédemment rapportait que seulement 18 % des enfants recevaient leur vaccination aux âges recommandés [2]. Le retard vaccinal moyen, tous vaccins confondus, était de 172 jours (5 mois ½) avec une médiane de 126 jours (4 mois) dans les deux premières années de vie [3]. Ce retard était supérieur à 6 mois pour 37 % des enfants de cette tranche d’âge. Il était estimé dans la même étude que 25 % des enfants < 24 mois avait un retard de plus de 6 mois pour au moins 4 vaccins [3]. En Suisse, même si là aussi les taux de couverture vaccinale atteignaient plus de 95 % pour les vaccins DT et poliomyélite et près de 90 % pour la vaccination coqueluche, toutes les vaccinations étaient administrées avec un retard significatif. L’absence de l’administration du/des rappel(s) concernait dans cette étude plus de 40 % des enfants pour le 1er rappel de la coqueluche et 2/3 des enfants âgés de 10 ans pour la 2e dose du vaccin ROR [8]. En France, alors que les données de couverture vaccinale sont régulièrement publiées, peu de données ont été publiées sur l’âge approprié d’administration de ces vaccins. Concernant la vaccination antipneumococcique, la couverture vaccinale à 2 ans était bonne à 88,6 % en 2010 [9]. Mais à 6 mois, elle était de 71 % pour la primovaccination, soit 29 % des nourrissons de 6 mois non couverts en période de vulnérabilité maximale quand on sait que le pic d’incidence des méningites à pneumocoque en 2010 était situé à 4 mois et que les sérotypes 19A et 7F inclus dans le vaccin recommandé étaient aux deux premiers rangs des sérotypes retrouvés [10]. Une étude non publiée de faisabilité, menée un jour donné auprès de sept pédiatres libéraux, a montré que le retard à la primovaccination DTCa touchait 9 à 31 % des enfants selon la dose mais ne dépassait pas 10 jours de retard médian (extrêmes : 1-365). Le retard à l’administration de la 2e dose du vaccin antipneumococcique et de son rappel étaient respectivement de 29 % (IC95 % : 20-39) et 63 % (IC95 % : 48-76) avec un délai médian de 16 et 36 jours respectivement, le retard pouvant atteindre parfois près d’un an. Pour la vaccination ROR le retard pour les doses 1 et 2 concernait respectivement 28 % (IC95 % : 18-40) et 42 % (IC95 % : 28-58) des enfants avec un délai médian de 62 (21 mois) et 162 jours (5 mois). FACTEURS DE RISQUE Les facteurs de risque de ne pas être vacciné ont été largement étudiés pour expliquer les taux de couverture vaccinale de chaque vaccin et leurs insuffisances dans les pays à fortes et faibles ressources [11,12]. Mais peu de données existent pour expliquer le retard à la réalisation d’une vaccination. Dans les pays à ressources faibles ou moyennes, les facteurs de risque de retard vaccinal étaient les enfants non premiers nés (controversé), l’absence d’étude secondaire chez un des parents, le caractère non marié ou isolé de la mère et le lieu de vie en périphérie des villes ou en zones rurales [6,7]. La réticence parentale à la vaccination (3 %) n’était pas un facteur significatif de retard vaccinal [5]. Dans les pays à ressources élevées comme aux Etats-Unis, les facteurs associés à un retard dans l’âge de réalisation du vaccin étaient finalement peu différents. Le retard concernait plus souvent de façon significative les enfants de mères célibataires, sans diplôme, vivant avec au moins deux enfants à domicile, avec un suivi par au moins deux praticiens vaccinateurs et utilisant des services publics pour la vaccination [3]. LE RETARD VACCINAL A-T-IL UNE REELLE IMPORTANCE ? Le retard vaccinal est-il un événement inévitable ? Quel délai a réellement une importance ? Un élément de réponse à la première question provient de pays aussi différents que le Rwanda, l’Egypte et le Pérou qui ont des taux de couverture et des âges appropriés de vaccination extrêmement élevés [5]. Cela signifie que le retard vaccinal est évitable. Un autre élément de réponse réside dans le fait que selon le vaccin et le pays, 20 à 50 % des enfants sont vaccinés aux âges recommandés [2,3,5,6,8]. Concernant le délai pouvant être cliniquement significatif, un jour de retard par rapport aux recommandations pourrait paraître significatif si on considère le calendrier vaccinal puisque celui-ci est élaboré en prenant en compte d’une part les données des essais cliniques où le protocole est scrupuleusement suivi et où aucun délai n’est admis, et d’autre part la balance entre une protection effective aux âges de vulnérabilité, une protection prolongée et la sécurité du vaccin [5]. Le retard peut n’avoir aucune conséquence pour ceux qui bénéficient de la protection de groupe (ou « herd effect ») en cas de couverture vaccinale élevée et sans retard à l’âge d’administration. Cela n’est cependant pas le cas pour les enfants à risque et lorsque le retard et l’insuffisance vaccinale sont élevés [5]. Dans la plupart des études antérieures analysant l’importance du retard vaccinal un retard était considéré significatif au delà d’1 mois pour le vaccin DT et poliomyélite [6,7,13,14], la coqueluche [14-16], la rougeole [17] et la vaccination antihépatite B [14]. Ce choix arbitraire était défini indépendamment du type de vaccin et de l’épidémiologie de la maladie visée. Seuls Yadav et coll. évoquaient une discussion d’experts pour au final définir un retard vaccinal significatif en cas de retard de 15 jours ou plus, pour toutes les vaccinations incluses dans le calendrier vaccinal indien, sans différenciation entre les vaccins [18]. La difficulté est probablement plus complexe puisqu’on peut supposer que le délai minimum acceptable peut différer d’un vaccin à l’autre et pour un même vaccin d’une dose à l’autre. Pour répondre à cette question, une étude de type DELPHI a été menée et vient de s’achever en France pour déterminer ce qu’est un retard vaccinal significatif à l’échelle individuelle, selon le vaccin et la dose du vaccin considéré (données en cours d’analyse). Les experts du groupe INFOVAC France et des trois commissions scientifiques du Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique ont participé à cette étude DELPHI afin d’atteindre un consensus sur la définition de ces retards vaccinaux. IMPLICATIONS LIEES AUX RETARDS VACCINAUX IDENTIFIES Plusieurs conséquences peuvent être associées au retard à la réalisation des vaccins. Pour certains vaccins, ce retard pourrait expliquer la persistance de certaines infections. Cela peut être un des nombreux facteurs explicatifs de l’épidémie de rougeole en France entre 2009 et 2011 [19]. Sur ce point précis du retard, il y a eu à la fois l’absence de protection aux âges de vulnérabilité maximale (risque premier) et pour d’autres un calendrier vaccinal non complété par effet domino (risque second), à l’origine de taux de couverture pour les première et deuxième doses de ROR n'atteignant en 2010 que respectivement 89,2 % et 60,9 % [20]. Parmi les jeunes nourrissons de plus de 2 mois ayant eu la coqueluche dans les années 90 aux Etats-Unis, au moins 44 % n’étaient pas vaccinées et 60 % des décès n’avaient reçus aucune dose de vaccin. Pourtant il y a des données montrant la baisse du risque d’hospitalisation pour coqueluche chez les nourrissons ayant reçu une ou deux doses du vaccin [15]. Enfin, la vaccination coqueluche dans la fratrie aux âges recommandés peut permettre aussi une protection indirecte de nourrissons trop jeunes pour être vaccinés. Les retards, lorsqu’ils sont importants, pourraient être les témoins de problèmes structurels d’organisation du système de santé publique, ou de problèmes d’accès aux soins. Ils augmentent dans ces cas le risque d’affections sévères (risque premier) pour ces populations non protégées [3,5]. Ils augmentent aussi le risque de ne pas être protégé plus tard (risque second). Ils sont à l’origine enfin pour le praticien de difficultés pour se souvenir du statut vaccinal de ces patients et pour mettre en œuvre une vaccination de rattrapage appropriée [3]. Enfin, selon certains auteurs, la réalisation des vaccinations aux âges recommandés pourrait avoir des implications plus larges, sachant que les programmes vaccinaux sont un élément moteur dans le domaine de la santé publique notamment en ce qui concerne la politique de prévention. Elle permet de rappeler d’autres mesures, comme dans les premiers mois de vie, les mesures de prévention de la mort inopinée du nourrisson, vers l’âge de 4-6 mois les risques de chute, vers l’âge d’un an les risques d’autres accidents domestiques. CONCLUSION La notion de retard vaccinal se différencie de la couverture vaccinale, car elle est variable d’un vaccin à l’autre et d’une dose à l’autre pour un même vaccin, selon l’épidémiologie de la maladie visée. Cette notion fournie une information plus précise sur la manière avec laquelle est effectuée la vaccination notamment chez le nourrisson. Même si les conséquences théoriques d’un retard à la réalisation d’un vaccin semblent évidentes, l’impact réel du retard vaccinal reste à évaluer. Dans l’intervalle, l’importance clinique du retard pris dans la réalisation d’un vaccin devrait pouvoir être définie grâce au consensus d’expert attendu suite à l’étude menée par méthode Delphi. La diffusion auprès des praticiens et la prise de conscience de cette notion de retard devrait permettre de réduire ce retard. D’autres critères d’évaluation restent à définir pour intégrer d’autres paramètres d’efficacité d’un vaccin, comme par exemple l’intervalle séparant deux doses tout aussi garant de l’immunogénicité vaccinale. REFERENCES (1) National, state and urban area vaccination coverage among children aged 19-35 months: United States, 2003. MMWR Morb Mortal Wkly Rep 2004;53:658-61 (2) Luman ET, Barker LE, Shaw KM, et al. Timeliness of childhood immunizations. Pediatrics 2002;110:935-9 (3) Luman ET, Barker LE, Shaw KM, et al. Timeliness of childhood vaccinations in the United States. Days undervaccinated and number of vaccines delayed. JAMA 2005;293:1204-11 (4) Guerra FA. Delays in immunization have potentially serious health consequences. Pediatr Drugs 2007;9:143-8 (5) Clark A, Sanderson C. 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Par Elise Launay1,2, Jean-François Brasme2, Catherine Deneux-Tharaux2, Dominique Gendrel3, Jérémie Cohen2,3, Martin Chalumeau2,3 1: Clinique Médicale Pédiatrique, Hôpital Mère-enfant, CHU Nantes, France 2: Unité Inserm 953, Maternité Port-Royal, 53 avenue de l’Observatoire, 75014 Paris, France 3: Service de pédiatrie générale, hôpital Necker Enfants Malades ; AP-HP ; Université Paris Descartes, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris, France Auteur principal : Pr Martin Chalumeau, Service de pédiatrie générale, hôpital Necker Enfants Malades, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris, France, email : [email protected] 1. Les enfants : une population à risque de retards diagnostiques ? L’Institute of Medicine indiquait en 1999 qu’aux USA entre 44 à 98 000 décès par an étaient liés à des soins suboptimaux et proposait de les classer en défaut de prévention, défaut de diagnostic, défaut de traitement et défaillance autre (logistique par exemple) [1]. On peut penser que la population d’âge pédiatrique est particulièrement à risque de soins sub-optimaux en raison de particularités liées à l’immaturité puis à la maturation [2]. Cela a été bien démontré dans le domaine thérapeutique ce qui a conduit à l’élaboration de recommandations pour la pratique et la mise en place de programmes de prévention dont l’efficacité a été démontrée [3]. L’immaturité puis la maturation exposent aussi probablement la classe d’âge pédiatrique à une fréquence plus élevée de soins sub-optimaux dans le domaine diagnostique par comparaison aux adultes. Le sous-groupe pré-verbal de la classe d’âge pédiatrique ne peut pas détecter, rapporter, ou préciser lui-même ses symptômes, ce qui le rend dépendant des connaissances et des pratiques d’une tierce personne (le plus souvent les parents) puis du médecin. A l’inverse, le groupe des adolescents a tendance à ne pas rapporter ses symptômes. Par ailleurs, les enfants d’âge pré-scolaire ont souvent des symptômes chroniques (comme le reflux gastro-œsophagien) ou des épisodes aigus récurrents pléomorphes (infections virales respiratoires et digestives), ou ont rapidement un retentissement général (anorexie, apathie, douleurs abdominales, vomissements) pour de nombreuses affections bénignes. Ceci rend les symptômes d’appel des affections graves (comme la fièvre, la douleur, les vomissements, l’anorexie, la dyspnée) peu spécifiques, majorant le risque d’errance diagnostique. La rareté des issues défavorables dans cette classe d’âge, dont le taux de mortalité est le plus bas (en comparaison aux nouveau-nés et aux adultes), peut contribuer aussi à diminuer la vigilance des cliniciens. Enfin, les procédures diagnostiques ont souvent un niveau de validation inférieur à celui obtenu chez l’adulte en raison de la difficulté à poursuivre des études cliniques en pédiatrie. 2. Absence de cadre méthodologique pour les études sur les délais diagnostiques Les erreurs et retards diagnostiques sont donc vraisemblablement fréquents en pédiatrie et font l’objet d’une littérature croissante. La plupart des études concluent que les délais diagnostiques des maladies étudiées sont trop longs, qu’il existe une association entre délai diagnostique et pronostic de l’enfant et qu’il est nécessaire de mettre en place des actions correctrices (cliniques ou de santé publique via l’éducation des parents). L’étude de la distribution, des déterminants et des conséquences des délais diagnostiques est cependant exposée à des biais et des facteurs de variation qui peuvent avoir des répercussions sur les plans d’action visant à améliorer les soins et mener à des actions non efficaces voire délétères. L’évaluation systématique des risques de biais et des facteurs de variation dans les études évaluant les délais diagnostiques est difficile car il n’existe pas de règles méthodologiques consensuelles pour conduire et rapporter ces études. La prise de conscience de la communauté scientifique de la nécessité d’améliorer la façon de rapporter les études cliniques a conduit au développement de recommandations méthodologiques qui ont contribué à l’amélioration de la qualité des articles rapportant ces études [4]. L’étape préalable à l’établissement de recommandations pour conduire et rapporter des études sur les délais diagnostiques est d’évaluer la qualité méthodologique de la littérature existante [4, 5]. 3. Qualité méthodologique des études publiées sur les délais diagnostiques en pédiatrie Une analyse de 50 articles consécutifs publiés entre 2005 et 2011 portant sur l’étude des délais diagnostiques en pédiatrie nous a permis de mettre en évidence une grande variabilité de qualité méthodologique et des domaines à fort risque de biais et de variation [6]. 3.1 Choix de la population étudiée Les études sur les délais diagnostiques sont très sensibles aux biais de sélection. Premièrement, un recrutement strictement hospitalier (ou pire, dans un centre de référence) va exposer l’étude à des biais liés à la particularité phénotypique des patients et à l’organisation du parcours de soins en amont, biais qui peuvent influer sur les délais diagnostiques. Une alternative est de se rapprocher le plus possible d’un recrutement ‘‘en population’’ c’est-à-dire de s’assurer de l’exhaustivité des cas durant une période et dans une zone géographique définies, ce qui peut être rendu possible par l’existence d’un registre validé [7, 8] ou de données enregistrées en routine comme celles du CepiDC [9]. Deuxièmement, il est important de rester conscient que les études sur les délais diagnostiques ne peuvent analyser que les cas… diagnostiqués. Il faut donc réfléchir à l’éventualité de formes létales ayant entraîné un décès avant diagnostic, ou de formes non diagnostiquées soit parce qu’elles sont peu symptomatiques, soit en raison d’une défaillance des parcours diagnostiques de routine en place durant la période d’étude. Ce risque dépend donc de l’histoire naturelle de la maladie, du caractère systématique et sensible des procédures diagnostiques appliquées aux patients présentant au moins un des symptômes pouvant conduire au diagnostic de la maladie étudiée. Par exemple, des auteurs analysant le délai diagnostique des accidents vasculaires cérébraux néonataux ne discutent pas la possibilité de non diagnostic de formes mineures ou de formes massives très rapidement létales [10]. Les auteurs n’indiquent pas non plus, parmi les nouveau-nés ayant présenté au moins un des symptômes pouvant conduire au diagnostic d’accident vasculaire cérébral, la proportion de ceux ayant eu la procédure diagnostique de référence (imagerie cérébrale). A contrario, dans une étude sur les délais diagnostiques du déficit en hormone de croissance, les auteurs précisent que tous les enfants évalués pendant la période d’étude pour un retard statural ont bénéficié de dosages biologiques et d’une IRM hypophysaire [11]. La description de la méthode d’identification des patients potentiellement éligibles est donc très importante et les étapes d’interprétation des résultats et de préparation des actions correctrices devront prendre en compte les biais de sélection potentiels. Troisièmement, il faut identifier et prendre en compte (comme critère d’exclusion ou de stratification) d’une part les populations à haut risque bénéficiant d’un dépistage systématique ou d’une surveillance spécifique qui vont raccourcir les délais diagnostiques et d’autre part des populations à bas risque qui vont subir des délais plus longs. Cela a été fait par exemple lors d’études sur les délais diagnostiques des médulloblastomes et des sarcomes d’Ewing de l’enfant où les patients atteints d’une prédisposition génétique connue aux cancers ou déjà surveillés après un premier cancer ont été exclus [7, 12]. De la même façon dans une étude sur le délai diagnostique des myopathies de Duchenne, les auteurs ont exclu les filles, à risque de délai plus long dans cette maladie liée à l’X, et les enfants avec des antécédents familiaux de myopathie susceptibles d’avoir des délais plus courts [13]. 3.2 Définition et mesure des délais Le délai diagnostique est l’intervalle séparant les premiers symptômes qui auraient pu permettre de faire un diagnostic d’une maladie du temps où il est fait. Pour calculer un délai diagnostique, il est donc nécessaire de définir un temps T0 correspondant aux premiers symptômes compatibles avec le début de la maladie. La simplicité de cette définition du T0 dépend de l’affection étudiée. Par exemple, pour le calcul des délais diagnostiques du déficit en hormone de croissance, des auteurs ont utilisé comme T0 l’apparition d’un infléchissement de la croissance staturale définie comme l’apparition d’un ou plusieurs des critères auxologiques de la Growth Hormone Research Society [11]. Si les symptômes d’alerte sont plus insidieux ou peuvent se mélanger avec ceux d’une affection intercurrente ou préexistante, la détermination du T0 peut être délicate. Par exemple, pour la détermination du T0 des infections bactériennes sévères, les symptômes d’une virose précédant l’infection bactérienne ont pu rendre cette détermination difficile [9]. Une solution peut être alors de faire évaluer ce délai par deux experts, si possible de formation et de type d’exercice éloignés, et de trancher les cas discordants par un troisième expert ou par discussion. Il est alors important de préciser si l’évaluation du délai était collégiale, situation où certains évaluateurs pourraient emporter la discussion d’autorité, ou si les évaluateurs étaient indépendants. Dans ce dernier cas, le calcul d’un coefficient d’accord entre les juges permettra d’évaluer de la robustesse de l’évaluation des délais [9]. Une autre difficulté pour la détermination du T0 peut intervenir lorsque la suspicion diagnostique n’existe qu’après l’accumulation de certains symptômes ou évènements de santé. Par exemple, des auteurs ont étudié le délai diagnostique du déficit immunitaire commun variable en choisissant un T0 au premier épisode infectieux (première otite…) [14]. Or les recommandations internationales sur les signes d’alerte qui doivent faire évoquer et rechercher un déficit immunitaire héréditaire portent sur la récurrence d’infections (par exemple plus de 8 otites par an chez les moins de 4 ans). Les auteurs auraient donc dû définir le T0 dans leur étude à la 8ème otite par exemple. La définition du temps T du diagnostic est souvent plus facile et peut correspondre à la première évocation du diagnostic par le clinicien lorsque celui-ci repose sur un faisceau d’arguments cliniques (par exemple pour la maladie de Kawasaki) ou de façon plus objective au moment de la réalisation de l’examen de référence (par exemple l’imagerie cérébrale pour l’accident vasculaire cérébral). Une division du délai diagnostique en sous-délais en fonction des acteurs impliqués peut permettre de cibler les actions correctrices. On sépare ainsi classiquement le patient (ou parent) delay qui va du premier symptôme à la première consultation, du doctor delay qui va de la première consultation au diagnostic. 3.3 Etude des déterminants et des conséquences des délais L’analyse des déterminants et des conséquences des délais diagnostiques est la suite logique de la mise en évidence de délais considérés comme trop longs. Cette analyse permet (i) d’établir un lien entre délai diagnostique et issue moins favorable (préalable nécessaire pour évaluer la pertinence de la mise en place d’actions correctrices) et (ii) l’identification des cibles générales des actions correctrices (parents ou médecins) et des messages de formation médicale et d’éducation sanitaire. La validité de la démonstration d’un lien entre délai diagnostique et issue dépend premièrement d’un calcul du délai diagnostique à l’aveugle de l’issue. Par exemple, dans une étude de la relation entre le délai diagnostique et la gravité initiale et la survie des médulloblastomes de l’enfant [7, 8], le calcul des délais est décrit comme difficile pour certains patients présentant un retard des acquisitions ou un strabisme très ancien. Il est alors important que ce calcul soit fait à l’aveugle de l’issue afin d’éviter d’introduire un biais de classement différentiel qui pourrait faire conclure par erreur à l’existence d’une association significative. Deuxièmement, il est important que les facteurs de confusion soient décrits et pris en compte. Dans le même exemple des médulloblastomes de l’enfant, un délai diagnostique long était associé à une survie plus longue. Un âge élevé au diagnostic était associé à la fois à un délai plus long et une survie plus longue, jouant un rôle de facteur de confusion. Après ajustement sur ce facteur de confusion dans un modèle de Cox, la relation protectrice paradoxale entre délai diagnostique long et meilleure survie disparaissait [8]. L’ajustement ne doit cependant pas être systématique, notamment sur les facteurs intermédiaires qui représentent une étape dans la chaîne causale. Par exemple, si on étudie la relation entre délai diagnostique d’un cancer et issue, si on pense que cette relation est médiée par la présence de métastases, l’ajustement sur ce facteur peut faire disparaître une vraie relation causale. Les études sur les déterminants et les conséquences des délais diagnostiques sont souvent conduites après dichotomisation des délais (autour d’un quartile par exemple) en délais courts vs délais longs. Cette stratégie entraîne souvent un glissement sémantique de ‘‘délais longs’’ vers ‘‘retards diagnostiques’’ (qui comporte un jugement de valeur). L’analyse des délais diagnostiques utilisés comme une variable continue est maintenant aisée avec les logiciels statistiques (par exemple après transformation en polynôme fractionnaire en cas d’écart à la linéarité) et devrait permettre d’éviter ces glissements sémantiques qui ne participent pas à la sérénité des débats scientifiques. 4. Délais diagnostiques, plaintes et expertises judiciaires Les délais diagnostiques sont la première cause de plainte pour erreur médicale en pédiatrie et les cancers sont la première cause de plainte pour retard diagnostique en pédiatrie [15]. Une étude a comparé les conclusions d’une revue systématique et de 56 procédures judiciaires déposées entre 1995 et 2011, concernant un retard au diagnostic d’un cancer pédiatrique, et comportant une expertise au sujet des conséquences présumées de ce retard, à partir de 2 bases de données nationales : l’Association Canadienne de Protection Médicale et Le Sou Médical-Groupe MACSF [16]. Le délai diagnostique médian était de 6 mois pour ces 56 cas. Les rapports des experts au sujet des conséquences des retards au diagnostic étaient concordants avec les données de la littérature dans 18 cas (32 %), discordants dans 14 (25 %), et non soutenu par la littérature dans 24 (43 %). Par exemple, pour 4 des 7 plaintes concernant un retard au diagnostic de rétinoblastome, l’expert a affirmé que ce retard était responsable de la sanction thérapeutique et des séquelles (énucléation au lieu d’un traitement conservateur), de façon cohérente avec l’association retrouvée dans plusieurs études entre délai long et aggravation de l’extension locale. En revanche, dans 21 cas concernant d’autres types de tumeurs, l'expert concluait que le retard avait des conséquences négatives, bien que la littérature ne rapporte soit aucune relation, soit une relation inverse entre délai diagnostique et conséquences, ou ne comporte pas de données sur les conséquences. Par exemple, pour une plainte concernant un retard au diagnostic de médulloblastome, l’expert a affirmé que ce retard était responsable de séquelles neurologiques et d’une perte de chances de survie, ce qui n’est pas soutenu par les données de la littérature, qui retrouve une association paradoxale entre délai long et survie meilleure, et pas d’association entre délai et séquelles neurologiques [16]. La comparaison des expertises judiciaires avec la littérature n'a pas pour but de remettre en question leur validité. En effet, les plaintes déposées peuvent avoir d'autres causes que la longueur du délai au diagnostic, comme la présomption d’une négligence du médecin traitant. De plus, les conséquences individuelles d'un retard au diagnostic peuvent différer de celles tirées de l'analyse d'une cohorte de patients. Par exemple, concernant un enfant décédé d'hypertension intracrânienne avant qu’une biopsie d'une tumeur du 3ème ventricule n’ait pu être réalisée, l'expert a conclu que le diagnostic aurait pu être fait 2 mois plus tôt, et que ce retard était la cause du décès : les conclusions des études quant à l’absence d’association entre délai diagnostique des tumeurs cérébrales et survie ne sont probablement pas applicables au cas particulier de ce patient. 5. Conclusion : l’étude des délais diagnostiques est un travail d’équipe Comment peut-on lire en 2010 dans les 2 revues majeures de pédiatrie (Pediatrics et The Journal of Pediatrics) qu’un accident vasculaire cérébral doit être suspecté et une neuro-imagerie réalisée devant toute apnée en période néonatale [10] et qu’un déficit immunitaire commun variable doit être suspecté devant un premier épisode d’otite [14] ? Ces conclusions basées sur des études utilisant une méthodologie inadéquate seraient évitées grâce à un travail en équipe des auteurs et/ou des éditeurs. La présence dans l’équipe qui conduit la recherche de médecins de premier recours habituellement confrontés aux symptômes d’appel étudiés (ici néonatalogistes pour les apnées du nouveau-né, médecin généraliste ou pédiatres libéraux pour les infections ORL) permettrait de discuter les résultats et de modérer les conclusions avec l’éclairage de l’expérience clinique. De plus, l’implication des médecins de premier recours (principaux acteurs du parcours diagnostique) dans l’évaluation des délais diagnostiques pourrait améliorer la légitimité et l’acceptabilité des actions correctrices proposées. La participation d’épidémiologistes dans la construction et l’interprétation des résultats des études apparaît aussi nécessaire. Dans les deux exemples précédents, ces méthodologistes auraient soulevé la question de la liste des symptômes considérés comme pouvant conduire au diagnostic (respectivement d’accident vasculaire cérébral et déficit immunitaire commun variable) et de la fréquence de réalisation de la procédure diagnostique de référence (respectivement imagerie cérébrale et bilan immunitaire) chez les patients ayant présenté au moins un de ces symptômes durant la période d’étude. Cela aurait prémuni les auteurs (et les éditeurs) contre des conclusions erronées. Il est intéressant de noter que dans notre revue systématique de la littérature pédiatrique concernant la qualité du reporting des études sur le délai diagnostique, les deux seules études (sur 50) qui remplissaient tous les critères de qualité méthodologique avaient été conduites avec des épidémiologistes [11, 17]. La mise à disposition de checklists validées pour la conduite et le reporting des études sur les délais diagnostiques semble urgente, par exemple via l’adaptation d’un des outils produits dans le cadre du réseau EQUATOR [4]. Enfin, la participation des associations de parents ne doit plus être négligée dans ce type d’étude. Les rares études au sujet des conséquences sur les parents des délais diagnostiques montrent que le déroulement des symptômes dans la période précédant le diagnostic représente pour eux un parcours difficile et douloureusement vécu, incluant des conflits avec les médecins et ayant des conséquences sur l’adaptation des parents à la maladie de leur enfant [16]. Le rôle des associations de parents est majeur dans la préparation des actions correctrices concernant le parents delay. Il est aussi important pour la dissémination des résultats souvent complexes entre le délai diagnostique et gravité initiale et pronostic, notamment afin de déculpabiliser les parents qui auraient pu tarder à consulter. REFERENCES 1. Committee on Quality of Health Care in America IoM. To err is human: building a safer health system. Washington, DC.: National Academy Press; 2000. 2. Allegaert K. Pediatric clinical pharmacology: an introduction to a series of educational papers. Eur J Pediatr 2013;172:289-92. 3. Otero P, Leyton A, Mariani G, Ceriani Cernadas JM. Medication errors in pediatric inpatients: prevalence and results of a prevention program. Pediatrics 2008;122:e737-43. 4. The EQUATOR Network website - the resource centre for good reporting of health research studies. http://www.equator-network.org/. Dernier accès le 15 juillet 2013. 5. Moher D, Schulz KF, Simera I, Altman DG. Guidance for developers of health research reporting guidelines. PLoS Med 2010;7:e1000217. 6. Launay E, Morfouace M, Deneux-Tharaux C, et al. Quality of reporting of studies evaluating diagnostic delay: a systematic survey in pediatrics. Soumis. 7. Brasme JF, Chalumeau M, Doz F, et al. Interval between onset of symptoms and diagnosis of medulloblastoma in children: distribution and determinants in a population-based study. Eur J Pediatr 2012;171:25-32. 8. Brasme JF, Grill J, Doz F, et al. Long time to diagnosis of medulloblastoma in children is not associated with decreased survival or with worse neurological outcome. PLoS One 2012;7:e33415. 9. Launay E, Gras-Le Guen C, Martinot A, et al. Suboptimal care in the initial management of children who died from severe bacterial infection: a population-based confidential inquiry. Pediatr Crit Care Med 2010;11:46974. 10. Srinivasan J, Miller SP, Phan TG, Mackay MT. Delayed recognition of initial stroke in children: need for increased awareness. Pediatrics 2009;124:e227-34. 11. Gascoin-Lachambre G, Brauner R, Duche L, Chalumeau M. Pituitary stalk interruption syndrome: diagnostic delay and sensitivity of the auxological criteria of the growth hormone research society. PLoS One 2011;6:e16367. 12. Brasme J-F, Chalumeau M, Oberlin O, Valteau-Couanet D, Gaspar N. Time to diagnosis of Ewing sarcoma in children is associated with tumoral volume but not with metastasis or survival: a prospective multicenter study. 45th Congress, International Society of Paediatric Oncology, Hong Kong, sept. 2013; abstract. 13. Ciafaloni E, Fox DJ, Pandya S, et al. Delayed diagnosis in duchenne muscular dystrophy: data from the Muscular Dystrophy Surveillance, Tracking, and Research Network (MD STARnet). J Pediatr 2009;155:3805. 14. Urschel S, Kayikci L, Wintergerst U, et al. Common variable immunodeficiency disorders in children: delayed diagnosis despite typical clinical presentation. J Pediatr 2009;154:888-94. 15. Najaf-Zadeh A, Dubos F, Pruvost I, et al. Epidemiology and aetiology of paediatric malpractice claims in France. 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Paliped, Equipe Ressource en Soins Palliatifs Pédiatriques (ERRSPP) en Ile de France, a vu le jour en 2010, après une réflexion initiée depuis plusieurs mois par l’Agence régionale d’hospitalisation, réflexion menée par des pédiatres mais aussi des représentants des réseaux et structures en soins palliatifs du milieu adulte. Parallèlement, fin 2010, dans le cadre du plan National Soins palliatifs 2008-2012, les missions des équipes ressources ont été définies et un budget a pu être dégagé permettant la création d’une équipe par région. Toutes les régions métropolitaines disposent aujourd’hui d’une telle structure. Ces structures ne sont ni une Equipe mobile de soins palliatifs, ni un réseau territorial, ni une hospitalisation à domicile. Il s’agit d’un modèle innovant, mis en place en raison de la rareté des décès des enfants par an en France, justifiant au plus une structure par région. On dénombre en effet, selon les chiffres Insee, environ 7 500 décès de patients de moins de 20 ans parmi les 550 000 décès annuels soit moins de 2 %. Parmi ces décès d’enfants, un tiers est dû à des causes accidentelles (comprenant les suicides) et un tiers a lieu en période néonatale (Graphe 1). Les décès par cancer sont en moyenne de l’ordre de 500 par an et il s’agit de la première cause de décès par maladie. Cette situation épidémiologique ne justifiait donc pas de créer des réseaux territoriaux de soins palliatifs ou des unités de soins palliatifs pédiatriques. De plus, la pratique pédiatrique est de maintenir une continuité des soins quelle que soit l’issue de la maladie, ce qui a comme effet potentiel de limiter certains retours à domicile. PALIPED s’est initialement rattachée administrativement au Réseau Ile de France d’Hématologie Oncologie Pédiatrique, réseau disposant d’un statut associatif loi 1901. Pour son fonctionnement, un comité de Pilotage (COPIL) s’est mis en place avec élection d’un responsable en charge de travailler en lien direct avec l’équipe salariée. Cette équipe s’est progressivement constituée au fil de l’année 2010 avec une chargée de mission, un médecin coordonnateur, une infirmière, une psychologue et une secrétaire. A compter de 2011, un médecin de recherche clinique a été embauché pour une durée déterminée. L’ensemble des personnels est à temps partiel et représente trois équivalents temps plein. Nous présentons donc le bilan de deux années (2011-2012) d’activités selon les missions définies par le référentiel. 1. ACCULTURATION DES EQUIPES A LA DEMARCHE PALLIATIVE PEDIATRIQUE Le Petit Larousse la définit comme la : « Modification des modèles culturels de base de deux ou plusieurs groupes d'individus résultant du contact direct et continu de leurs cultures différentes ». Cette acculturation doit passer par la rencontre du monde des soins palliatifs, peu formé à la pédiatrie avec le monde de la pédiatrie moins formé aux soins palliatifs de par la rareté des évènements. Paliped a organisé en 2010 et 2011 des enquêtes sur les besoins des équipes en Ile de France par des questionnaires adressés aux 64 services de pédiatrie, 31 Instituts Médico- Educatifs (IME), 13 réseaux de soins palliatifs et 63 équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) les interrogeant sur leur activité en soins palliatifs pédiatriques, leurs liens avec les partenaires et leurs difficultés. 65 % des équipes demandaient des formations. La nécessité d’une meilleure connaissance entre les équipes arrivait en second point, suivie du besoin de soutien autant pour les familles que pour les équipes. L’acculturation a donc été travaillée par Paliped de la manière suivante : - Le soutien d’équipes soignantes en apportant une expertise clinique lors d’une situation en cours ou en reprenant à distance après un décès une situation les ayant questionné. Lors des expertises cliniques, une part importante des questionnements tournaient autour de l’organisation du parcours de soins et la question du retour à domicile. - Des rencontres d’équipes : PALIPED de part sa proximité a mis en place des rencontres mensuelles avec les coordinatrices du RIFHOP, coordinatrices qui interviennent au domicile des patients. - Les projections du film « Est-ce que les doudous vont au ciel ? » [1] réalisées dans des staff de service de pédiatrie, ont permis des rencontres et de nombreux échanges sur les pratiques . Elles ont été au nombre de 8 en deux ans. - Différents groupes de travail se sont formés au sein de PALIPED permettant des rencontres pluri-professionnelles et pluri-disciplinaires. Ces groupes ont abouti à la rédaction de documents. On peut citer le Groupe ville-hôpital qui a réalisé une plaquette sur l’organisation du retour à domicile d’un enfant en soins palliatifs, le Groupe douleur et symptômes pénibles qui a rédigé des recommandations sur la prise en charge de la dyspnée, le Groupe polyhandicap qui réfléchit à un questionnaire d’enquête à destination des familles pour évaluer les besoins lors des passages aux urgences et un autre questionnaire vers les professionnels des urgences. Le groupe formation a, quant à lui, élaboré les programmes des journées régionales en lien si besoin avec les autres groupes (2 journées par an). A partir de 2012, ce groupe a participé à l’organisation de journées territoriales. Deux nouveaux groupes se sont constitués en 2012 : Le groupe matériel qui travaille à la rédaction d’un guide d’aide à la prescription de matériel pour les enfants atteints de polyhandicap et/ou en fin de vie et un groupe assistantes sociales. Une réflexion menée en 2012 a permis la constitution d’un groupe néonatalogie en 2013 et l’élargissement d’un groupe SAMU initié par l’HAD AP-HP au niveau régional. 2. FORMATION THEORIQUE, INFORMATION Paliped participe depuis sa création à la formation théorique et continue en Ile de France. Elle est par exemple intervenue à la journée pédiatrique du DESC « Médecine de la douleur-Médecine Palliative » en 2011. Elle a coordonné l’organisation de la journée en 2012. L’équipe a par ailleurs organisé des journées régionales de formation autour de thèmes comme la « Loi Leonetti en pédiatrie », les « Adolescents et jeunes adultes en soins palliatifs », « la Souffrance des soignants », « Rencontre avec l’enfant polyhandicapé ». Nous avons cité les Journées territoriales de formation déclinées sur les 4 territoires franciliens (Nord, Sud, Est, Ouest) avec l’objectif de créer une dynamique locale. 5 ont eu lieu sur le thème « Evaluation et prise en charge de la douleur de l’enfant en situation complexe ». Deux autres journées territoriales sont prévues en 2013 sur le thème du « confort de l’enfant polyhandicapé ». Le film « Est-ce que les doudous vont au ciel ? » a été projeté dans un contexte de formation professionnelle, accompagné d’un débat (plus de 30 projections en 2 ans). 3. CONTRIBUTION A LA RECHERCHE CLINIQUE DANS LE DOMAINE DES SOINS PALLIATIFS PEDIATRIQUES a. Paliped, investigateur principal de plusieurs études Etat des lieux régional, cité en introduction Etude sur le parcours de soins des enfants décédés en Ile de France en 2010 : à partir des données du SNIRAM (regroupant les données CCAM, PMSI et Assurance Maladie). Le schéma de cette étude a été finalisé fin 2012. Les données devraient pouvoir être disponibles fin 2013, retraçant entre autre, les lieux de décès, les lieux de prises en charge, le type d’intervenants dans la prise en charge d’un patient en situation palliative. Enquête RIFHOP-Paliped Un travail de recherche sur la démarche palliative mise en place pour des enfants suivis dans les 4 centres de référence en oncologie-hématologie, décédés en 2010 et domiciliés en Ile de France a été largement initié en 2011 et finalisé en 2012. Il sera complété en 2013 par une étude sociologique sur le vécu des parents et des soignants pour ces mêmes patients. Direction de travaux d’étudiants L’étude menée sur le parcours en soins palliatifs des enfants et jeunes adultes suivis dans les 4 centres de référence en onco-hématologie d’Ile de France, domiciliés en Ile de France décédés en 2010, s’est inscrite en partie dans le cadre d’un mémoire d’étudiante de DIU de soins palliatifs pédiatriques. b. Analyse des données épidémiologiques A partir des données Insee, une synthèse des causes de décès et les lieux de décès des enfants en Ile de France est réalisée chaque année. 4. PRISE EN CHARGE DE L’ENTOURAGE DES PATIENTS Pour remplir cette mission Paliped a mené différents types d’action a. Identification de solutions de répit Nous avons initié une réflexion sur des séjours de répit familiaux ce qui a abouti en 2012, à la réalisation de 2 séjours de répits familiaux ayant permis d’accueillir 7 familles dans un univers ludique et de bien-être (centre équestre et SPA), avec un encadrement médico-psycho-infirmier. Ce type de séjours a pour objectif d’offrir une solution clef en main aux familles permettant la constitution de moments de vie familiaux agréables et sécurisés. Ces séjours étaient destinés à des enfants suivis pour une pathologie hématologique ou oncologique. En 2013, deux séjours ont aussi été organisés pour des enfants présentant des pathologies neurologiques. Une analyse des évaluations à la fois par les familles et professionnels accompagnants est actuellement en cours. b. Prévention des deuils compliqués Nous avons initié deux projets en 2011 : • Constitution d’un annuaire ressource régional d’associations ou de professionnels pouvant proposer un soutien • Réflexion sur une écoute pour les parents par des parents, pendant la phase palliative de leur enfant. c. Activité clinique de l’équipe pour soutien et prise en charge de l’entourage L’équipe a été sollicitée à plusieurs reprises pour assurer des relais mais parfois est intervenue directement auprès de fratrie. Elle est par ailleurs intervenue auprès d’un collège, à leur demande, suite à des troubles présentés par des camarades de classe d’une jeune fille décédée. Une réflexion a été menée avec l’éducation nationale pour proposer un recours extérieur aux équipes éducatives. 5. Paliped : UNE EQUIPE QUI COMMUNIQUE 1. La communication Paliped a participé à plusieurs publications dans des revues de soins, lors de congrès de la Société Française de Pédiatrie (SFP), de la société Française de Soins Palliatifs (SFAP) ou encore au Congrès francophone de Soins Palliatifs de Montréal en 2012. Elle a coordonné le numéro spécial de la revue Médecine Thérapeutique Pédiatrie de janvier 2012 (Vol 15) à partir des communications de la journée de formation régionale sur la loi Leonetti. Paliped a travaillé en 2012 à la création d’un site Internet avec des niveaux d’accès différents pour le grand public ou les professionnels (http://www.paliped.fr). Une grande part de la communication de l’équipe s’est aussi faite autour des projets de recherche et des séjours de répits. afin de trouver des financements complémentaires auprès de fondations ou de partenaires privés. 2. Congrès et formation L’équipe de PALIPED a bénéficié d’environ 20 jours de formation par an. Une veille documentaire est assurée avec un lien fort avec le site francophone sur les soins palliatifs pédiatriques et le Centre François-Xavier Bagnoud (FXB). 3. Interactions avec d’autres structures Des liens ont été initiés avec les acteurs des soins palliatifs régionaux comme la CORPALIF (Association des acteurs en Soins Palliatifs en Ile de France) ou la RESPALIF (Fédération des réseaux de soins palliatifs en Ile de France). Au niveau national, notre équipe a participé très activement à la création de la Fédération des ERRSPP, le médecin coordonnateur de Paliped prenant le poste de trésorière après avoir travaillé à l’écriture et au dépôt des statuts. Conclusion : Paliped a su en deux ans, et malgré une équipe réduite, mettre en place de nombreux projets et commencer le long travail de maillage territorial. Ce travail doit se poursuivre afin d’intégrer la culture palliative dans toutes les spécialités pédiatriques confrontées à la mort d’un enfant mais aussi, de former aux spécificités pédiatriques les équipes de soins palliatifs d’un grand soutien pour le retour à domicile et les conseils thérapeutiques. C’est par cette acculturation, qu’une amélioration du parcours de ces enfants mais aussi de leurs parents, leur fratrie et des soignants qui les accompagnent, pourra voir le jour dans les années à venir, limitant souffrances et séquelles inutiles. Graphe 1 Graphe 2 (1) « Est ce les doudous vont au ciel ». Film 52 min, M et B. Dalmolin. Advita production, 2011. L’ANNONCE D’UN EVENEMENT INDESIRABLE GRAVE Par Professeur Denis DEVICTOR [[email protected]] Réanimation Pédiatrique et néonatale. Hôpitaux Universitaires Paris sud. Bicêtre. « J’ai autant de respect pour les erreurs que j’ai commises que pour le bien que j’ai pu faire ». Angela Davis lors d’un entretien sur France Info. Selon l’enquête de 2009 de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, il existe dans les hôpitaux français 275 000 à 395 000 événements indésirables graves par an [1]. La moitié serait évitable. « La plupart des EIG adviennent à la suite de soins non appropriés, mais aussi en raison de retards ou d'erreurs lors de la délivrance des soins. » « Le facteur humain, en particulier le manque de supervision ou de communication entre soignants, est en effet déterminant dans la survenue d'un EIG ». Sur les 6,2 EIG qui surviennent pour 1000 jours d’hospitalisation, 2,4 ont pour seule conséquence une prolongation d’hospitalisation, 1,9 ont mis en jeu le pronostic vital et 1,9 ont entraîné une incapacité à la sortie. Les quelques réflexions qui suivent sont issues de l’expérience. A plusieurs reprises nous avons été confrontés à l’annonce d’un événement indésirable grave (EIG), soit en tant que chef de service soit en tant que médiateur de l’hôpital ou encore comme conseiller des affaires juridiques. C’est ce retour d’expérience que je voudrais partager avec vous. Mais pour bien comprendre ces situations, il me semble nécessaire de préciser les caractéristiques d’un EIG afin d’en dégager les invariants. Ainsi nous pourrons aborder l’annonce de l’événement et tenter d’envisager quelques pistes pour gérer au mieux ces situations toujours traumatisantes, non seulement pour le patient et son entourage, mais aussi pour le personnel médical et paramédical. I. Les invariants d’un EIG : de la confiance au tragique Toute la relation patient-famille-médecin est fondée sur la confiance. D’un côté un patient qui remet entre les mains du médecin son bien le plus précieux : la vie, ses craintes, ses espoirs. C’est le principe du « primum fidere » en premier lieu faire confiance. De l’autre un médecin qui traitera le patient selon les règles de l’art et de la science, en faisant de son mieux car c’est sa vocation et en se basant par principe sur le « primum non nocere » hippocratique. La survenue d’un EIG vient briser ce pacte de confiance et dès lors s’installe une situation tragique à laquelle il faut faire face, tant du côté du patient et de sa famille que du côté du médecin et de son équipe. La survenue d’un EIG se décline toujours dans le registre du tragique. Le tragique est ce qui rend la vie impensable et l’événement inconcevable. Le tragique survient toujours quand deux absolus se confrontent, chacun ayant sa totale légitimité. Citons, les Horaces et les Curiaces, Antigone et Créon, Hamlet…. Dans le cas d’un EIG survenant à l’hôpital ces absolus sont deux systèmes de valeurs qui s’affrontent. D’un côté les valeurs du patient et de son entourage et de l’autre celles du médecin et de l’équipe soignante. Ainsi l’EIG met en cause d’un côté des souffrants qui a priori avaient confiance dans le savoir-faire et le savoir-être du corps médical, et de l’autre celui-ci qui a priori travaillait avec une totale conscience professionnelle et une bonne volonté. C’est le conflit de ces deux absolus qui rend l’événement tragique. D’un côté se trouve maintenant une victime, de l’autre un agresseur qu’il s’agisse du médecin, de son entourage ou du système hospitalier lui-même. Tout tragique se pose en termes de conflit. Celui-ci est sans issue car les deux points de vue sont tout aussi légitimes l’un que l’autre. D’un côté la confiance accordée par le malade et de l’autre la garantie qui lui est faite qu’il sera traité avec le maximum de sécurité. Le « primum non nocere » d’Hippocrate accompagne sans relâche nos études et notre vie professionnelle. Les symboles que l’on peut déchiffrer dans le caducée (le miroir et le serpent) nous rappellent également que la prudence est la reine des vertus de la médecine. Mais subitement l’événement vient briser le pacte. Surgit alors un conflit sans issue, un divorce sans pardon possible. Le tragique d’un EIG est qu’il est à la fois inacceptable et à la fois injustifiable. La situation tragique est exacerbée par la survenue inopinée de l’événement et son caractère totalement singulier. Personne ne s’y attendait, personne n’y était préparée, personne ne l’avait imaginé. Il prend les deux parties au dépourvu. Il les met subitement face à leurs finitudes : finitude de la condition humaine et finitudes de la supermédecine que l’on pensait toute puissante et à l’abri de toute défaillance. On ne peut se rattacher à la force inexorable du destin puisqu’il y a eu erreur humaine ou du système de soins. Toute tentative de compréhension du malade ou de son entourage est vouée à l’échec. Toute tentative de justification de la part des médecins et des équipes soignantes est également vaine. Ainsi le tragique résiste à la réconciliation. Alors que faire ? Fuir ses responsabilités ? Certainement pas. Se taire ? Ce serait tout aussi inacceptable. La seule voie est d’annoncer l’indésirable et de tenter de renouer un dialogue coûte que coûte, alors que tout s’oppose à cette démarche. II. La violence de l’annonce L’annonce d’un EG est une expérience qui mobilise les ressources humaines les plus profondes de la part du médecin et des équipes soignantes. Nous savons tous, et probablement mieux que nos patients, que la médecine est une profession à risque pour les malades. Mais aucun de nous n’a appris comment annoncer et gérer un EIG. La violence, extériorisée ou muette, la culpabilité des équipes soignantes permet de comprendre qu’il puisse exister des réactions inappropriées comme par exemple le déni, la fuite des responsabilités, le dédain, la recherche d’un bouc émissaire, la parole malheureuse, la banalisation, le jugement hâtif… Ces réactions sont inappropriées car elles ne peuvent être ressenties que comme un refus d’assumer ses responsabilités ou pire un manque de respect, d’empathie ou tout simplement d’humanité. Un refus de voir le patient ou la famille, un manque de transparence, une banalisation de l’événement, un dialogue empreint de condescendance, accabler autrui, des entretiens dénués d’humanité ne peuvent être ressentis que comme des injures. Ici les mots clés sont très certainement transparence, respect et humilité, ne mentir ni à soi, ni aux autres. Mais il faut aller au-delà. Il est nécessaire d’accompagner avec humanité la demande légitime d’explications et de transparence de la part des victimes. Or il n’est pas simple de réinstaurer le dialogue et de « faire le premier pas » dans ce contexte. Il n’est pas simple de reconnaître un dysfonctionnement, de présenter des excuses lorsqu’il y a eu faute avérée ou suspectée, d’écouter des doléances parfois exprimées de façon agressive. En période de crise, les premières paroles prononcées, les premiers gestes, les premières rencontres avec la victime et son entourage, le langage du corps revêtent une importance considérable. C’est en un quart de seconde que la famille sera prête à renouer la confiance ou à laisser le pacte définitivement rompu. Ce savoir être et ce savoir-faire ne s’apprend ni durant les études, ni même par l’expérience car les EIG sont heureusement rares ce qui ne fait qu’accentuer leur caractère dramatique. C’est donc sur la personnalité des uns et des autres qu’il faut compter. Au-delà du professionnalisme, ce sont valeurs de compassion, d’empathie, de courage, de simplicité, d’amour, de politesse, de bonne foi, d’humilité, de sincérité, de disponibilité, de respect qui sont sollicitées… III. L’annonce Celle-ci n’est qu’une étape dans un processus qui à mon avis en compte sept (Tableau 1). Bien entendu cette conduite à tenir est très schématique et peut paraître artificielle tant elle dépend de multiples facteurs : circonstances de l’événement, sa gravité, liens de confiance établis auparavant, responsabilités des uns et des autres…. Mais ce schéma, même s’il paraît caricatural, a l’avantage de proposer une trame alors que tous les acteurs se trouvent en plein désarroi. En premier lieu il faut s’occuper de la victime de l’accident. C’est la priorité des priorités. Ensuite il faut annoncer l’événement. Cette étape est incontournable, urgente, transparente. C’est sur la manière dont elle sera conduite que, secondairement pourront être renoués, si faire ce peut, un dialogue et des relations de confiance. Vient ensuite l’annonce elle-même. Celle-ci doit répondre à un certain nombre de règles élémentaires qui doivent être respectées. On peut critiquer, voire sourire de cette conduite à tenir. Ce serait faire fi de toutes les études comportementales réalisées ces dernières années qui ont notamment exploré l’attente des victimes, des usagers et de leur famille. Tout est concentré dans les premiers mots et les premiers gestes. Prononcer la phrase « il y a eu une erreur » est indispensable, mais combien difficile à dire ! Pourtant nous savons bien que si il y a eu erreur, il n’y a pas eu forcément faute. On prêtera une attention particulière au langage du corps qui en dit souvent plus long que la parole elle-même. Le patient et sa famille seront invités à s’exprimer et réponse claire, loyale, transparente leur sera donnée à chacune de leur question. A cette étape, il ne s’agit pas de dire où se trouve les responsabilités mais simplement de reconnaître l’erreur (sans parler de faute) et de dire qu’une analyse de l’accident sera réalisée de façon approfondie pour pouvoir répondre à toutes les questions que la victime ou son entourage peuvent légitimement se poser. Cet entretien sera évidemment consigné dans le dossier. Bien entendu un rapport circonstancié exhaustif sera immédiatement rédigé et la direction de la qualité et des droits des patients immédiatement alertée. Il s’agit de la troisième étape. La direction à son plus haut niveau doit être considérée comme une aide, non seulement pour écouter les doléances, mais aussi exprimer les excuses de l’institution et expliquer les procédures des recours possibles. Enfin il faut assurer aux victimes et à leur entourage de la complète disponibilité des médecins, des équipes et de la direction et que toute la transparence sera faite et l’ensemble des éléments leur sera communiqué. Ceci est indispensable car souvent une préoccupation des victimes et de leur entourage est que l’événement ne puisse se reproduire par la suite. Vient ensuite l’étape de dialogue au sein de l’équipe qui s’accompagne de l’analyse systémique de l’événement. Nous ne pouvons détailler cette étape. Mais nous savons bien que la survenue d’un événement est l’aboutissement de plusieurs dysfonctionnements qui ont fait « sauter » les barrières les unes après les autres. Ainsi un risque potentiel s’est transformé en accident. Il est trop facile de trouver un bouc émissaire. Prenons le cas d’une erreur médicamenteuse. Certes l’infirmière a exécuté la prescription. Mais celle-ci était-elle claire et bien rédigée ? Y avait-il une procédure écrite et connue dans le service ? L’infirmière était-elle débordée ce jour là ? etc, etc. Il existe de nombreuses méthodes pour analyser une EIG. Le tableau II reprend l’une d’entre elle. Ce tableau à l’avantage de montrer que l’accident est le point de convergence de nombreux dysfonctionnements. La gestion de l’entourage mérite une mention particulière. Il n’est pas rare que la victime ou famille soit sidérée à juste titre. Relais est alors parfois pris par des tierces personnes avec lesquelles il faut composer. Si ces personnes sont les « personnes de confiance » elles ont toute légitimité. Mais il n’en est pas toujours ainsi. Au-delà de l’entourage, ce sont les médias, les autorités judiciaires, les conseils des familles, les associations qui peuvent agir avec parfois beaucoup de fracas. D’où l’importance de la direction de la qualité et des droits des patients, celle des services de communication institutionnels qui permettent de filtrer les demandes d’information. On voit donc qu’il existe une véritable procédure à adopter. Malheureusement peu d’équipe la connaisse. Il faut qu’il y ait des formations au sein des hôpitaux, notamment dans les services à risque. Il existe des formations obligatoires pour éteindre un départ de feu. Pourquoi ne pas instaurer des formations pour faire face à la survenue d’un EIG ? Comme le départ d’un feu, l’EIG est subi, inattendu, imprévisible et singulier. Il faut apprendre à y faire face pour passer du conflit au dialogue. III. Passer du conflit à un dialogue renoué Il faut donc renouer le dialogue alors que tout s’oppose à ceci. Pourtant, point d’échappatoire. Cette démarche doit être proactive. C’est au médecin d’aller au devant des questions, des interrogations, des demandes d’explications, c’est au médecin de prendre les devants. Après avoir reconnu l’événement et exposé ses circonstances de survenue, l’une des étapes la plus difficile à franchir est sans doute la présentation des excuses. Il ne s’agit pas d’une demande de pardon : il ne saurait être accordé. Il s’agit de reconnaître autrui, de faire preuve de respect, de responsabilité et d’humanité. Nous ne sommes plus dans le « savoir faire » d’une médecine soit disant infaillible, mais dans le « savoir être ». Le pouvoir médical est maintenant dérisoire. Si nous avons avalé des milliers de pages pour devenir médecin et passer des dizaines et des dizaines d‘examens, à aucun moment nous avons appris le savoir être. Comme si celui-ci « allait de soi ». Mais d’autres facteurs s’opposent au dialogue : les proches, les medias, la rumeur, la colère, ce soudain désaveux de la médecine qui renvoie le patient ou ses proches devant toutes les imperfections du système hospitalier. Se surajoute parfois des incompréhensions d’ordre culturel, la crainte de l’affaire médico-légale, un verbiage médical incompréhensible. Qu’une attitude maladroite soit adoptée, qu’une parole malheureuse soit prononcée et c’est toute cette tentative de dialogue qui s’écroule. IV. Prendre soin des acteurs médicaux et paramédicaux et entreprendre une politique d’amélioration Il faut enfin prendre en charge le personnel soignant et médical impliqué de près ou de loin dans la genèse de l’événement. Médecins, personnels infirmier et administratif ne doivent pas être laissés à eux-mêmes avec leurs interrogations, leurs souffrances et leur culpabilité. Ils ont besoin de réinstaurer des points de repères. Certes les débriefings, les revues de morbi-mortalité (RMM), les retours d’expérience (REX) sont capitales. « Errare humanum est, sed perseverare diabolicum » est une citation que l’on prête à Sénèque. On pourrait aussi dire « Errare medicinum est, sed perseverare diabolicum ». Il faut donc tirer leçon de nos erreurs. Combien de fois avons-nous entendu de la part des victimes ou ex plaignants « je ne veux pas qu’un tel accident puisse se reproduire chez un autre ». D’où l’importance des RMM et des REX pour tirer leçon de nos erreurs. Mais il nous semble aussi important de mettre en place dans les hôpitaux des cellules d’accompagnement capables de réagir en temps réel au désarroi des équipes médicales et paramédicales, éviter les faux-pas et conseiller les acteurs concernés. Cette cellule aurait aussi pour rôle de réaliser une analyse systémique de l’EIG pour expliquer au personnel comment un tel événement a-t-il pu survenir. Cette cellule, en optimisant l’action des uns et des autres, pourrait sans doute éviter des évolutions vers la plainte en justice. Les événements indésirables font partie de la vie de l’hôpital et ne doivent pas être des sujets tabous. Il s’agit de sujet de travail à part entière. Par son regard extérieur, cette cellule d’accompagnement permettrait de guider les professionnels sur les mesures à prendre pour éviter la récidive immédiate de l’événement, la meilleure attitude à adopter vis-à-vis du patient, de sa famille et du personnel hospitalier, sur la nécessité de faire remonter à un plus haut niveau les informations… La composition d’une telle cellule sort du cadre de notre propos, mais il est important qu’elle puisse venir en aide à toutes les catégories de personnel impliquées, c’est-à-dire qu’elle en soit représentative. Pour qu’une telle structure voit le jour, il faudrait qu’elle puisse être reconnue par la communauté hospitalière, c’est-àdire que la gestion des événements graves fasse partie du projet de l’établissement et qu’il implique cadres hospitaliers, chefs de services, cadres de soins et cadres administratifs. En conclusion l’annonce d’un EIG est une école d’humilité et de savoir être. C’est vers une éthique de responsabilité qu’il faut tendre. Une fois de plus l’anticipation est la règle et il conviendrait que tout professionnel de santé soit formé à l’annonce d’un EIG afin qu’il puisse répondre de façon appropriée à la légitime revendication des patients concernés ainsi que de leur entourage. Tableau 1. Les sept étapes à respecter face à un EIG * 1. Prendre en charge le malade Ex : un surdosage médicamenteux a été réalisé : existe-t-il un antidote à injecter immédiatement ? Le mot clé ici est comment atténuer le plus vite possible les effets de l’erreur. 2. Annoncer l’EIG au patient et sa famille Ex : « Une erreur médicale a été commise. Toute la lumière sera faite et vous sera communiquée. Nous déterminerons les différentes responsabilités ». Les mots clés ici sont réactivité et transparence. 3. Annoncer l’EIG à la Direction Ex : Il s’agit d’une obligation législative. La Direction des Droits des Patients, de la Qualité et de la Gestion des risques doit être vécu comme une aide et non une entrave. Elle déterminera si l’erreur doit être signalée à l’ARS, aux autorités judiciaires ... Le mot clé est ici législation. 4. Discuter au sein de l’équipe Ex : La survenue d’un EIG est toujours vécue comme un drame au sein d’une équipe. La communication et le passage d’une culture de l’erreur à la faute permettent d’en atténuer les conséquences, conséquences parfois désastreuses tant sur le plan individuel que collectif. Les mots clés sont ici dialogue et absence de jugement à ce stade. 5. Analyser systémiquement l’EIG Ex : Cette analyse méthodique peut être réalisée par l’équipe elle-même, mais le cas échéant, elle doit être réalisée par une cellule ad-hoc extérieure au service (Cellule Enquête Analyse). Cette analyse permet de déterminer les points où les barrières « anti-accidents » ont été défaillantes et pourquoi. Les résultats de cette analyse sont discutés au sein du service et communiqués à la Direction puis aux victimes. Le mot clé est ici méthodologie. 6. Rédiger un rapport circonstancié Ex : Ce rapport est très difficile à rédiger. Chaque acteur doit décrire exactement ce qu’il a vécu sans porter de jugement. Il faut faire cette rédaction immédiatement, car le temps efface vite la mémoire. Le mot clé est ici factualité. 7. Entreprendre des actions d’amélioration Ex : Les revues de morbi-mortalité, les retours d’expérience intéressent en premier lieu le service, mais peuvent être sources d’enseignement pour tous. Le mot clé est ici « apprendre de nos erreurs ». * Cette conduite à tenir est à adapter en fonction de chaque cas particulier. Nous avons conscience de son caractère caricatural. Tableau 2 L’analyse systémique d’un événement indésirable grave. Exemple de facteurs à prendre en compte • Le contexte institutionnel Ex : contextes réglementaires, contraintes économiques • L’organisation et le management Ex : organisation et gouvernance, rapports hiérarchiques • L’environnement de travail Matériel, site, locaux, conditions de travail • Le fonctionnement de l’équipe Ex : communication orale et écrite, mode de transmission des informations • Les procédures opérationnelles Ex : conception, planification, lisibilité des tâches • Les facteurs individuels Ex : capacités techniques, relationnelles, compétence, formation • Les facteurs liés aux patients Ex : antécédents, difficultés de compréhension. Référénce : (1) Michel P, Minodier C, Lathelize M et al Ministère de l’emploi, de la solidarité et de la cohésion sociale. Rapport de l’ENEIS 2010 n° 17 . MISES AU POINT 3 INFECTIONS OSTEO-ARTICULAIRES DE l’ENFANT : ASPECTS MICROBIOLOGIQUES ET MEDICAUX Par Mathie LORROT1, Catherine DOIT 2, Sophie DUGUE1, Estelle LITZELMANN3, Stéphane BONACORSI 2 , Brice ILHARREBORDE 3 , Albert FAYE1. 1 : Service de Pédiatrie Générale, Hôpital Robert Debré 48, Boulevard Sérurier 75019 Paris (France). Université Paris Diderot. Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique (GPIP) de la Société Française de Pédiatrie. 2 : Service de Microbiologie, Hôpital Robert Debré 48, Boulevard Sérurier 75019 Paris (France). Université Paris Diderot 3 : Service d’Orthopédie Pédiatrique, Hôpital Robert Debré 48, Boulevard Sérurier 75019 Paris (France). Université Paris Diderot. Correspondance à adresser à : Dr Mathie LORROT Université Paris Diderot. Service de Pédiatrie Générale du Pr FAYE Hôpital Robert Debré (AP-HP) 48, Boulevard Sérurier 75019 Paris. Tel: 01 40 03 53 61 Fax: 01 40 03 47 45 Email: [email protected] Les infections ostéo-articulaires (IOA) de l’enfant sont des pathologies communautaires atteignant, le plus souvent l’enfant sain. Ces infections sont relativement fréquentes, évaluées récemment dans une étude réalisée dans le nord de la France à 7,1/100 000 chez l’enfant de moins de 15 ans et de 17/100 000 chez l’enfant de moins de 3 ans [1]. L’épidémiologie et le traitement des IOA de l’enfant ont été considérablement modifiés ces dernières années. Les progrès de la biologie moléculaire ont mis en évidence que Kingella kingae est un germe majeur responsable d’IOA chez l’enfant, devançant Staphylococcus aureus considéré jusqu’alors comme le principal pathogène responsable de ces infections. Depuis la conférence de consensus sur les IOA rédigée en 1991 par la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF), 1e traitement antibiotique de ces infections s’est considérablement simplifié [2]. En 2008, les propositions thérapeutiques du Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique ont précisé les modalités de l'antibiothérapie de ces infections [3, 4, 5]. Ces infections peuvent être très graves particulièrement en cas de retard diagnostique et/ou thérapeutique. Ainsi dès la suspicion clinique d’IOA, tous les moyens doivent être mis en œuvre pour affirmer le diagnostic et débuter le traitement rapidement. Le risque initial est le sepsis sévère à streptocoque de groupe A ou à S. aureus qui peut entraîner le décès de l’enfant. A distance, les risques sont les séquelles orthopédiques (destruction du cartilage articulaire, nécrose de la tête fémorale, inégalité de longueur des os longs par stérilisation partielle ou totale du cartilage de croissance de l’os atteint) et la chronicisation de l’infection. Le traitement des IOA nécessite toujours une hospitalisation initiale. Il comprend le drainage chirurgical des collections (ponction –lavage articulaire des arthrites septiques, drainage des collections) et une antibiothérapie débutée par voie intraveineuse qui sera relayée par voie orale. 1) Physiopathologie Ces infections surviennent par voie hématogène. Les bactéries infectent les zones de croissance les plus vascularisées, situées au niveau des métaphyses des os longs (loin du coude et près du genou) entraînant une ostéomyélite. [6, 7]. La phase initiale de l’ostéomyélite aiguë est caractérisée par un œdème du tissu osseux spongieux, puis l’infection diffuse vers la partie distale de la diaphyse, la corticale externe et le périoste. La phase tardive de l’infection est marquée par la constitution d’un abcès sous périosté qui, en diminuant la vascularisation périostée de la corticale osseuse peut entraîner une nécrose osseuse et la formation d’un séquestre. L’inoculation directe de la synoviale d'une articulation entraîne une arthrite septique. L'arthrite peut également être secondaire à la diffusion d’une ostéomyélite si la métaphyse est intra-articulaire (hanche, épaule, cheville) ou chez le nourrisson de moins de 18 mois, quand les réseaux vasculaires épiphysaires et métaphysaires ne sont pas encore individualisés et rendent le cartilage de croissance perméable. 2) Bactéries retrouvées dans les infections ostéo-articulaires (Tableau 1) Par les techniques de culture microbiologiques conventionnelles, le germe est isolé dans 50 % des ostéomyélites aiguës et 30 % des arthrites septiques. L’isolement d'une bactérie peut être réalisé par l’hémoculture (en faire 2 à 10 minutes d’intervalle), la ponction articulaire (systématique en cas d’arthrite) ou la ponction osseuse (rarement réalisée). Les prélèvements microbiologiques sont effectués, dans la mesure du possible, avant le début de l’antibiothérapie. Ces dernières années, l’épidémiologie des IOA de l’enfant a été bouleversée grâce aux progrès de la biologie moléculaire et le développement de techniques de PCR montrant que Kingella kingae est le pathogène le plus fréquent des IOA du jeune enfant. [8] K. kingae est un bacille Gram négatif dont la niche écologique est l’oropharynx de l’enfant entre l’âge de 6 mois et de 4 ans [9], chez lequel survient la majorité des IOA à K. kingae [10]. Ce pathogène est de culture exigeante et son isolement sur milieu solide à partir de pus est difficile mais amélioré si le prélèvement est introduit dans un flacon d’hémoculture [11]. Dans les arthrites septiques de l’enfant, la réalisation de la PCR K. kingae dans le liquide articulaire a multiplié par un facteur 3 à 4 le nombre de diagnostics d’infection à K. kingae par rapport à la culture et a placé K. kingae comme le premier germe des arthrites septiques survenant chez l’enfant de moins de 4 ans, devançant à cet âge S. aureus. K. kingae est responsable de 50 % des arthrites septiques documentées de l’enfant (75 % chez l’enfant de moins de 2 ans) [12, 13, 14]. K. kingae est un germe peu virulent, naturellement sensible à tous les antibiotiques actifs sur les bactéries Gram négatif excepté les lincosamides et le triméthoprime. Les bêta-lactamines représentent actuellement la famille d’antibiotiques de choix avec des CMI basses, la CMI50 de la pénicilline G et de l’ampicilline étant respectivement de 0,023 et 0.16 mg/l [15, 16]. A ce jour, dans le monde, seules trois souches (une aux USA et trois en Islande) ont été décrites résistantes aux bêta-lactamines par production d’une bêta-lactamase [17, 18]. Staphylococcus aureus a longtemps été considéré comme le pathogène le plus fréquemment responsable d’IOA chez l’enfant. S. aureus est responsable de 33 % des arthrites septiques documentées de l’enfant [12]. Actuellement, en France, S. aureus est sensible à la méticilline dans 90 % des cas ce qui témoigne de sa sensibilité aux pénicillines M (oxacilline, cloxacilline) à l'association amoxicilline-acide clavulanique et aux céphalosporines (céphalosporines de première génération > aux céphalosporines de deuxième génération). S. aureus est le plus souvent sensible à l'acide fusidique. Il est résistant aux macrolides dans 15 % des cas lorsqu’il est sensible à la méticilline (SASM) et dans 44 % des cas lorsqu’il est résistant à la méticilline (SARM) [19]. Dans d’autres régions du monde et plus particulièrement aux Etats-Unis, la prévalence des souches des SARM dans les infections communautaires à S. aureus est très élevée (aux alentours de 70 %) et l’antibiothérapie probabiliste doit en tenir compte [20]. En France, les infections invasives à Haemophilus influenzae type b ont disparu depuis la généralisation du vaccin Hib du nourrisson. Les autres bactéries sont plus rares : le streptocoque A et le pneumocoque sont retrouvés dans environ 10 % des cas. Le pneumocoque est un germe rarement impliqué dans ces infections et sa prévalence devrait encore diminuer suite à l’augmentation du taux de couverture des nourrissons par le vaccin pneumococcique conjugué (Prevenar 13®) [21]. Le streptocoque B et Escherichia coli concernent les nourrissons âgés de moins de 3 mois et Salmonella sp. retrouvée quasiment exclusivement chez les patients drépanocytaires. 3) Diagnostic d’une IOA de l’enfant 1) Signes d’appel Le diagnostic d’IOA doit être évoqué chez un enfant présentant une impotence fonctionnelle aiguë d’un membre associé à de la fièvre. Souvent, la douleur localisée et l’impotence fonctionnelle d’un membre vont orienter le clinicien et guider l’imagerie complémentaire. Cependant, l’examen clinique de ces enfants douloureux est parfois extrêmement difficile, même avec un traitement antalgique préalable. L’examen recherche des signes d’ostéomyélite aiguë : une dermo-hypodermite douloureuse d’un membre, une douleur à la palpation des métaphyses des os longs. L’examen complet des articulations recherche un choc rotulien, une limitation douloureuse de la mobilité d’une articulation, une attitude vicieuse d’un membre (flessum d’un genou, hanche « bloquée » en flexion rotation externe irréductible, attitude pseudoparalytique d’une articulation). 2) Bilan biologique Devant un tableau clinique évocateur, un prélèvement sanguin (NFS, CRP et fibrine) est réalisé à la recherche d’un syndrome inflammatoire biologique. L’analyse des données du bilan biologique doit tenir compte de plusieurs paramètres [22]. L’élévation des différents marqueurs tient compte de la cinétique des marqueurs utilisés. Ainsi, pour la Créactive protéine (CRP) qui est couramment utilisée en France : sa synthèse débute 4 à 6 heures après le début du stimulus inflammatoire, son pic est observé en 36 à 48 heures et sa demi-vie est de 24 à 48 heures. Le pic de procalcitonine (PCT) est plus rapidement atteint, 6 à 12 heures après le stimulus et sa demi-vie est de 24 à 48 heures. Ainsi, si le patient a consulté précocement, quelques heures après le début de l’infection, l’absence de syndrome inflammatoire biologique ne peut pas éliminer le diagnostic d’IOA. Les marqueurs utilisés ne sont pas équivalents en termes de spécificité et de sensibilité pour le diagnostic d’IOA. La polynucléose n’est ni sensible, ni spécifique. Elle présente cependant un intérêt dans certaines situations : son augmentation franche (20 à 40 000/mm3) est un très bon argument pour une infection invasive à pneumocoque ou à streptocoque de groupe A [23, 21]. A l’inverse, certaines infections sévères à S. aureus producteurs de LPV peuvent être accompagnées d’une leuco-neutropénie initiale, en raison de la particularité biologique de la toxine à lyser les globules blancs. Ainsi, la présence d’une leuco-neutropénie, contrastant avec un tableau infectieux sévère doit faire évoquer ce diagnostic [24]. La CRP est actuellement le meilleur marqueur diagnostique et de suivi de ces infections, mais son augmentation peut être modérée et varie selon les germes incriminés. Elle est supérieure à 20 mg/L dans plus de 98 % des ostéomyélites aiguës à S. aureus [25, 26] et dans environ 75 % des arthrites septiques [27]. Elle est volontiers élevée au cours des infections invasives à pneumocoques et à streptocoques de groupe A. Dans les infections à K. kingae, la CRP peut être initialement négative ou très peu élevée [12]. Son absence d’élévation est fréquente surtout dans les premières heures d’évolution de la pathologie, ainsi dans la série de Timsit et coll. qui comprend 124 IOA, la CRP est en moyenne de 48 mg/L et < 10 mg /L chez 18 % des enfants [28]. La PCT a peu d’intérêt pour le diagnostic d’IOA en effet son élévation est corrélée à la positivité des hémocultures dans le cadre d’IOA avec sepsis cependant ce marqueur manque de sensibilité en dehors de ce contexte particulier [29, 30]. Ainsi, s’il est présent, le syndrome inflammatoire est un argument pour le diagnostic d’infection bactérienne osseuse et/ou articulaire. A l’inverse, l’absence de syndrome inflammatoire biologique n’élimine pas formellement le diagnostic d’IOA. En cas de forte suspicion clinique d’IOA, il faut parfois débuter l’antibiothérapie en hospitalisation, et réévaluer cliniquement et biologiquement les patients après 24 heures. 3) Radiologie Les radiographies des os et/ou articulations touchées restent systématiques en urgeqnce. Surtout utiles pour le diagnostic différentiel devant une impotence fonctionnelle aiguë d’un membre, elles cherchent à éliminer une fracture, une tumeur. Dans les IOA, il n'y a pas initialement d’anomalie osseuse. On recherche une tuméfaction des parties molles et des signes indirects d’épanchement articulaire. Les signes osseux d'ostéomyélite sont retardés, la déminéralisation osseuse, l'ostéolyse et les appositions périostées n’apparaissent qu’au bout de 8 à 10 jours d’évolution. L’échographie est particulièrement intéressante pour compléter l’examen clinique, elle permet l’analyse des parties molles à la recherche d’un abcès (parties molles ou abcès sous périosté) ou d’un épanchement intraarticulaire (hanches). C’est un examen non invasif, rapide à réaliser dans l’urgence, mais toujours opérateur dépendant et qui a ses limites diagnostiques (difficultés techniques de réalisation du fait de la douleur, de l’épaisseur des parties molles). L’IRM est de plus en plus utilisée, exceptionnellement accessible en urgence, elle peut le plus souvent être réalisée dans les premiers jours de prise en charge et permet de conforter le diagnostic d’IOA et de rechercher des complications (abcès profonds, thrombose). L’IRM a un grand intérêt pour l’analyse des localisations profondes (pelvis, rachis, épaule. En effet, son excellente résolution spatiale met en évidence des anomalies du signal osseux à proximité des cartilages de croissance. La seule indication du scanner est la recherche de séquestre osseux dans l'ostéomyélite chronique. La scintigraphie osseuse au Technétium 99 est réalisable dès 48-72 heures d’évolution. Dans un contexte clinique évocateur d’IOA (impotence fonctionnelle avec ou sans signes de dermo-hypodermite), une hyperfixation osseuse à la scintigraphie osseuse renforce le diagnostic d’IOA. Cet examen a cependant des limites : sa sensibilité n’est que de 85 % et sa normalité n’élimine pas complètement la possibilité d’IOA, surtout chez l’enfant de moins de 2 ans. Sa spécificité est faible : l’hyperfixation osseuse n’est que le témoin de l’atteinte inflammatoire osseuse sans préjuger de la cause infectieuse ou non. La scintigraphie osseuse reste cependant un très bon examen lorsqu’on recherche une infection IOA chez un enfant fébrile et douloureux, surtout quand l’examen clinique n’est pas contributif ou difficile, en particulier chez le nouveau-né ou le jeune enfant [31]. 4) Tableaux cliniques particuliers IOA à Kingella kingae : des IOA d’évolution simple sous traitement Les arthrites à K. kingae surviennent essentiellement entre 6 mois et 4 ans. Les articulations principalement touchées sont celles du membre inférieur et en premier lieu le genou dans la moitié des cas [32]. Ces arthrites touchent plus volontiers le garçon et surviennent le plus souvent durant la période froide de l’année [10]. Le tableau clinicobiologique est caractérisé par un syndrome inflammatoire généralement modéré ; la fièvre est peu élevée voire absente dans un tiers des cas, et la CRP est en moyenne comprise entre 30 et 40 [12, 33, 26]. L’évolution des infections à Kingella kingae sous traitement adapté est le plus souvent rapidement favorable. Dans notre expérience, des complications surviennent dans 2 % des arthrites septiques à K. kingae contre 19 % pour les arthrites septiques à S. aureus [26]. Parmi les séries d’ostéo-arthrites décrites dans la littérature avec un suivi d’au moins 6 mois aucune ne décrit la survenue de séquelles [34, 13, 35, 12, 17]. La bactériémie occulte représente la deuxième forme d’infection invasive. Beaucoup plus rarement K. kingae peut être responsable d’infections respiratoires basses, d’endocardites ou de méningites [8]. IOA à Staphylococcus aureus producteur de la Leucocidine de Panton-Valentine (LPV) Certaines souches de S. aureus produisent une toxine, la Leucocidine de Panton et Valentine (LPV) qui est associée à des IOA très sévères dont l’évolution est difficile, même lorsque la prise en charge médico-chirurgicale est rapide et adaptée. Aux USA, ces souches sont très fréquentes et sont associées à des gènes de résistance à la méticilline ce qui complique l’antibiothérapie probabiliste de ces infections. En France, les S. aureus producteurs de LPV sont minoritaires parmi les S. aureus responsables d’infections invasives et ils restent, le plus souvent, sensibles à la méticilline [36]. Lors de la présentation initiale ou lors de l’évolution de ces patients, certaines caractéristiques cliniques doivent alerter les cliniciens. Ainsi, la sévérité du sepsis initial avec la présence d’un choc septique dans les premières heures d’hospitalisation, les atteintes IOA plurifocales, l’association à une fasciite ou à une myosite nécrosante, une thrombose septique profonde ou une pneumonie doit faire une IOA à S. aureus producteurs de LPV. La leucopénie initiale est fréquente, car la toxine lyse les leucocytes, elle contraste avec la sévérité clinique de ces infections et la valeur élevée de la CRP. Les infections cutanées (furoncle, abcès) précèdent ou accompagnent fréquemment ce type d’IOA. Dès le diagnostic cliniquement suspecté, une antibiothérapie permettant de réduire la production de toxine par la souche de S. aureus (clindamycine, rifampicine) doit être rapidement associée à l’antibiothérapie initiale probabiliste efficace contre S. aureus. Les immunoglobulines semblent avoir un intérêt dans la prise en charge aiguë de ces infections [37, 24]. Les hémocultures ou les cultures de pus profonds sont rapidement positives à S. aureus et permettent la confirmation de la présence de la toxine grâce à une PCR recherchant le gène codant la LPV. Malgré une antibiothérapie efficace in vitro, l’évolution de ces infections est moins rapidement favorable qu’au cours des IOA à S. aureus non producteurs de LPV. Les complications (abcès sous périosté, abcès musculaires, thromboses, localisations septiques secondaires) sont très fréquentes. En cas de persistance de la fièvre et/ou des douleurs, elles doivent être recherchées par l’imagerie (Scanner, IRM, échographie ± doppler), toujours guidée par la clinique. Une héparinothérapie est nécessaire en cas de thrombose septique et le drainage chirurgical des collections profondes est primordial. 5) Prise en charge thérapeutique Les infections ostéo-articulaires constituent une urgence diagnostique et thérapeutique car leur pronostic est corrélé à la rapidité et à l’adéquation de leur prise en charge. 5.1. Antibiothérapie initiale probabiliste. Le Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique (GPIP) propose un traitement antibiotique simplifié et raccourci de ces infections qui est résumé dans le tableau 2 [4, 38]. Dans la grande majorité des cas, une monothérapie est privilégiée. L’antibiothérapie initiale est toujours effectuée par voie intraveineuse et à des posologies élevées afin d’obtenir de fortes concentrations dans l’os infecté ou dans les articulations. Elle cible les germes les plus fréquemment retrouvés : S. aureus sensible à la méticilline, K. kingae, le Streptocoque de groupe A et le pneumocoque. Chez le nouveau-né et le nourrisson de moins de 3 mois, l’antibiothérapie doit être efficace sur le Streptocoque de groupe B, E. coli et S. aureus. Le traitement probabiliste ne considère pas S. aureus résistant à la méticilline sauf si l’infection est acquise en milieu hospitalier ou si l’épidémiologie locale comporte plus de 10 % de S. aureus résistant à la méticilline. Certaines situations nécessitent l’association de plusieurs antibiotiques, au moins durant les premiers jours de traitement : - les aminosides (gentamicine 5 mg/kg/j en une injection par jour) sont à associer pendant 48 à 72 heures systématiquement chez le nourrisson de moins de 3 mois et en cas de syndrome septique au moment du diagnostic dans les autres cas ; - un antibiotique « anti-toxine » (clindamycine ou rifampicine) doit être ajouté à l’antibiothérapie probabiliste initiale en cas de suspicion clinique d’IOA à S. aureus producteur de LPV ou chez les enfants présentant un syndrome toxinique associé (troubles hémodynamiques, rash cutané, défaillance multiviscérale) évoquant une IOA à streptocoque de groupe A. 2. Adaptation du traitement antibiotique initial si le germe est identifié Si le germe est identifié, l’antibiothérapie est adaptée au germe en fonction de sa sensibilité, si le germe n’est pas retrouvé, le traitement sera poursuivi en considérant S. aureus en première intention. 3. Durée du traitement intraveineux Evolution favorable La durée du traitement intraveineux initial peut être réduite à 4 ou à 7 jours en cas d’évolution favorable (diminution franche des douleurs, de la fièvre et du syndrome inflammatoire biologique). Elle est relayée par une antibiothérapie orale [4, 30]. En effet, les quelques études publiées montrent une efficacité thérapeutique équivalente, sans échec clinique, ni rechute ni séquelle d’un traitement parentéral raccourci à moins d’une semaine, voire à quelques jours [39, 40, 41]. De plus, une importante et récente revue de la littérature montre, à partir de 12 études prospectives dont une seule randomisée, l’efficacité identique (taux de guérison à 6 mois) selon que la phase parentérale est supérieure ou inférieure à 7 jours [42]. Evolution défavorable La plupart des complications des IOA surviennent dans les 7 premiers jours de la prise en charge. Les complications sont principalement l’apparition de foyers profonds de suppuration (arthrite septique de contiguïté d’une ostéomyélite, abcès sous périosté, un abcès des parties molles). Le mauvais contrôle de l’infection peut également être secondaire à une thrombophlébite suppurée au contact du foyer infectieux initial ou à une greffe septique sur une valve cardiaque. Ainsi, si l’évolution n’est pas favorable, attestée par la persistance de la fièvre et/ou des douleurs il faut : - vérifier que l’antibiothérapie administrée est optimale (molécules, posologies, nombre d’administration par 24 heures) - rechercher une complication locale (abcès sous périosté, abcès intra-médullaire ou thromboses veineuses septiques) ou générale (endocardite). L’imagerie (TDM, IRM, échographie) est souvent nécessaire, au mieux, guidée par la clinique [30]. Les collections sont à drainer chirurgicalement (dans ce cas il faut refaire les prélèvements microbiologiques osseux et/ou articulaires). Un traitement anticoagulant par héparine est nécessaire en cas de thrombose septique. Ces complications sont particulièrement fréquentes au cours du traitement des IOA à S. aureus producteur de LPV [24]. En cas d’échec confirmé d’un traitement antibiotique bien conduit et en l’absence de complications locales ou générales, il faut parfois reprendre ou poursuivre l’antibiothérapie intraveineuse. 4. Passage au traitement oral Le passage à l’antibiothérapie orale privilégie les molécules qui sont efficaces sur le germe retrouvé ou, en l’absence d’isolement, efficaces sur S. aureus et K. kingae. On favorisera les antibiotiques dont la diffusion osseuse est satisfaisante avec des posologies élevées et des prises réparties au cours de la journée. Enfin, on privilégiera toujours les molécules pour lesquelles il existe une formule galénique adaptée à l’âge de l’enfant. Un relais oral précoce de l’antibiothérapie nécessite toutefois une bonne observance de l’antibiothérapie orale de relais et un suivi médical initial rapproché. La durée totale du traitement est comprise entre 3 semaines et 1 mois dans les IOA non compliquées (Tableau 2). 5) Suivi ultérieur La guérison est attestée par l’absence de récidive de la fièvre et des douleurs et la persistance de la normalisation du bilan inflammatoire (NFS et CRP) jusqu’à la fin du traitement antibiotique. Les radiographies standard se normalisent progressivement. Les rechutes et le passage à la chronicité sont exceptionnels. Le suivi orthopédique est nécessaire pendant au moins 2 ans afin de surveiller l’absence de séquelles. Tableau 1 : Bactéries responsables des infections ostéo-articulaires de l’enfant et antibiothérapie probabiliste intraveineuse. < 3 mois Germes présumés Antibiothérapie probabiliste intraveineuse Staphylococcus aureus Céfotaxime 200 mg/kg/j (4 injections/j) Streptocoque de groupe B + gentamicine 5 mg/kg/j (1 injection/j) Escherichia coli Haemophilius influenzae b > 3 mois Kingella kingae Céfamandole 140 mg/kg/j (4 injections/j) Staphylococcus aureus ou amoxicilline-acide clavulanique 150 mg/kg/j Streptococcus pneumoniae (4 injections/j) Streptocoque de groupe A ± gentamicine 5 mg/kg/j (si sepsis) Tableau 2 : Propositions thérapeutiques du GPIP pour l’antibiothérapie des infections ostéo-articulaires de l’enfant. ANTIBIOTHERAPIE IV Germe Pas de germe identifié 1er CHOIX ALTERNATIVES Céfamandole 35 mg/kg/6H Amoxicilline-ac clav 40 mg/kg/6H S. aureus méti S Cloxacilline 50 mg/kg/6H Amoxicilline-ac clav ou clindamycine* RELAIS PER OS 1er CHOIX Amoxicilline-ac clav Cefadroxyl 50 mg/kg/8h 80 mg/kg/j en 3 prises par jour Clindamycine Amoxicilline-ac clav Clindamycine* 80 mg/kg/j en 3 prises par jour Cotrimoxazole** ou cefamandole Vancomycine 10 mg/kg/6H S. aureus méti R Clindamycine* + Rifampicine 10 mg/kg/12H Kingella kingae Amoxicilline 40 mg/kg/6H Streptocoque du groupe A Amoxicilline 50 mg/kg/6H Céfamandole Cefotaxime ou ceftriaxone si choc toxinique Streptococcus pneumoniae + Clindamycine* 10 mg/kg/6H + Rifampicine Amoxicilline 50 mg/kg/6H Ceftriaxone 75 mg/kg/24h (CMI impérative) ALTERNATIVES 40-60 mg/kg/j de SMX Clindamycine* Cotrimoxazole ** ou acide fusidique 60 mg/kg/j en en 3 prises par jour Levofloxacine** + rifampicine + Rifampicine Amoxicilline 150 mg/kg/j en 3 prises par jour Ciprofloxacine** Amoxicilline 150 mg/kg/j en 3 prises par jour Cefadroxyl Amoxicilline 150 mg/kg/j en 3 prises par jour Clindamycine* Cotrimoxazole** Clindamycine* (CMI impérative) (CMI impérative) * si sensible **si pas de déficit en G6PD *** si ceftriaxone ≥ 4 g/24h : donner 50mg/kg/12 heures Bibliographie: 1. 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NOUVEAUX VISAGES DES INFECTIONS OSTEO ARTICULAIRES DE L'ENFANT : ASPECTS ORTHOPEDIQUES Par Dr Camille THEVENIN-LEMOINE Hôpital Trousseau, 26 avenue du docteur Arnold Netter 75012 PARIS [email protected] DEMARCHE DIAGNOSTIQUE La présentation typique est une douleur d’un membre en l’absence de contexte traumatique. Ce simple énoncé doit entraîner la nécessité première d’affirmer ou d’éliminer une infection ostéo-articulaire (IOA) d’origine bactérienne car même si ce n’est pas le diagnostic le plus fréquent, c’est celui qui doit amener à une prise en charge urgente, dont le retard peut avoir des conséquences graves. L’orientation diagnostique et la décision thérapeutique se font sur un faisceau d’arguments sans qu’aucun de ces signes, même bactériologique, ne soit une condition nécessaire. La difficulté d’isoler le germe en cause, même en effectuant des cultures prolongées sur milieux enrichis, amène souvent à des décisions de traitement sans cette preuve bactériologique. L’examen clinique Il précise la fièvre, la localisation d’une douleur, des signes inflammatoires locaux (rougeur-chaleur-œdème), une limitation d’amplitude articulaire, la présence d’un épanchement (genou) et des adénopathies régionales. Il faudra systématiquement rechercher et prélever une éventuelle porte d’entrée (panaris, otite…) sachant qu’elle est le plus souvent absente, les germes les plus fréquemment incriminés étant des germes commensaux de la bouche. L’examen sera d’autant moins informatif que le site est profond (hanche, rachis) et que l’enfant est petit, le seul signe pouvant par exemple être un refus de la position assise, classique dans les sacro-iliites et les spondylo-discites. Des amplitudes articulaires normales rendent peu probables la présence d’un épanchement et on suspectera alors plutôt une ostéomyélite. Par contre, une limitation des amplitudes pouvant être liée aux douleurs, elle ne constituera alors pas un élément d’orientation. Dans une revue récente de 12 000 ostéomyélites, la douleur était présente dans 81 %, des signes inflammatoires locaux dans 70 %, de la fièvre dans 62 %, une limitation de la mobilité dans 50 % et un refus d’appui dans 50 % des cas [1]. Les pathologies virales (signes rhinopharyngés, varicelle) font partie des diagnostics différentiels, mais elles peuvent constituer un facteur favorisant, par immunodépression transitoire ou par lésions cutanées qui peuvent constituer des portes d’entrée. La biologie Elle recherche un syndrome inflammatoire biologique. On réalise en pratique une NFS et surtout une CRP dont la cinétique plus rapide permet une orientation diagnostique plus précoce. Pour la même raison, elle est le paramètre biologique principal de surveillance de l’efficacité du traitement. Mais ces anomalies ne sont pas spécifiques et si une CRP très élevée (> 100 mg/L) orientera plutôt vers une origine bactérienne, les infections virales peuvent donner des élévations plus modérées. Dans la série de Dartnell [1], une élévation des leucocytes étaient présente au diagnostic dans 36 % des cas, et une élévation de la CRP dans 81 %. La procalcitonine ne semble pas être un marqueur spécifique des infections ostéo-articulaires de l’enfant. Un taux élevé (> 0,5 ng/mL) ne permet pas d’affirmer l’origine bactérienne (VPP = 18,2 %). Par contre, un taux normal élimine quasi-formellement une origine bactérienne (VPN = 97,9 %) [2]. Il faut ajouter le prélèvement d’une porte d’entrée, et une hémoculture systématique, même en l’absence de contexte fébrile (positive dans 9,7 % des cas dans l’étude de Ferroni à Necker) [3]. L’importance des prélèvements à visée bactériologique tiens au fait de la difficulté d’isoler l’agent pathogène au niveau du site infectieux osseux ou articulaire. L’imagerie Radiographie standard : systématique, elle recherche l’élargissement d’un interligne articulaire (figure 1), témoignant d’un épanchement, et des lésions osseuses : ostéolyse, appositions périostées, séquestres (figure 2). Habituellement, la radiographie est normale au diagnostic, puisqu’un délai de 10-14 jours est nécessaire pour qu’apparaissent ces signes [4]. Elle est également importante pour les diagnostics différentiels (ostéochondrites, tumeurs, fractures dans le cadre d’une maltraitance…). Echographie : très fréquente, elle a pour objectif de rechercher un épanchement articulaire, et donc d’orienter vers une arthrite plutôt qu’une ostéomyélite de localisation juxta-articulaire. Elle permet également de retrouver des abcès souspériostés. Scintigraphie : elle permet d’objectiver par une hyperfixation le site infectieux dans le cas d’une ostéomyélite et de mettre en évidence des localisations secondaires. Elle a une sensibilité et une spécificité supérieures à 90 % [5]. Elle est également utile chez les nourrissons où la localisation même du problème peut être difficile. IRM : elle a pris une place majeure. Elle bénéficie d’une haute résolution. Elle permet un bilan complet : épanchement, œdème ou abcès intra-osseux, abcès sous-périostés et extension dans les parties molles (inflammation, abcès). Ses sensibilités et spécificités sont équivalentes voire supérieures à celle de la scintigraphie [6]. C’est de plus un examen non irradiant, mais qui nécessite une sédation chez le petit enfant (figure 3). Des IRM corps entier peuvent être utilisées dans la recherche de localisations multiples [7]. Une séquence STIR peut se substituer à la scintigraphie osseuse. Le signal typique d’une ostéomyélite sera un hyposignal T1 et un hypersignal T2. Les séquences en suppression de graisse améliorent la visualisation de l’œdème inflammatoire. L’injection de gadolinium permet de visualiser la coque d’un abcès ou de délimiter des plages de nécroses, qui ne prendront pas le contraste. CHIRURGIE Arthrite La présence d’un épanchement articulaire associé à des anomalies du bilan inflammatoire impose la réalisation d’une ponction au bloc opératoire. Le caractère d’urgence tient du fait que la prolifération bactérienne peut rapidement entraîner des lésions cartilagineuses graves. Classiquement, en cas de liquide purulent sera réalisé un lavage de l’articulation par arthrotomie ou arthroscopie [8] suivi d’une antibiothérapie. Ce lavage a un triple objectif d’identification bactérienne, de réduction de l’inoculum et de diminution de la pression intra-capsulaire qui serait responsable des nécroses de la tête du fémur parfois observées dans les arthrites de hanche [9]. Récemment, plusieurs équipes ont proposé des procédures percutanées, en particulier dans les localisations à la hanche. Givon [10] rapporte une série de 34 hanches pour lesquelles étaient réalisées des ponctions quotidiennes (3,6 en moyenne) sous anesthésie locale. Quatre ont fait l’objet d’un lavage en raison d’une évolution défavorable. Au recul moyen de 6 ans n’était retrouvée aucune complication. Journeau [11] rapporte une série de 43 hanches pour lesquelles était réalisée une ponction-lavage à la seringue sous AG. Un lavage chirurgical secondaire a été nécessaire dans 5 cas. Aucune complication n’est rapportée au délai moyen de 16 mois. Enfin Paakkonen [7] rapporte une série de 62 hanches pour lesquelles était réalisée une ponction simple sous AG. Une arthrotomie-lavage a été nécessaire dans 12 cas. Là encore, aucune complication rapportée au recul de 1 an. De ces publications, il ressort qu’il existe vraisemblablement une place pour le lavage articulaire percutané. Elles présentent néanmoins l’inconvénient de ne pas pouvoir laisser en place de drainage. Et le recul semble insuffisant pour juger de l’innocuité de cette technique. Les critères permettant de choisir le type de lavage restent à définir. En cas de liquide clair, on se limitera à une surveillance. Ostéomyélite En l’absence d’épanchement, on considèrera qu’il s’agit d’une ostéomyélite et on pourra débuter directement l’antibiothérapie en attendant la confirmation par scintigraphie ou IRM. On ne réalise alors pas de ponction au bloc (sauf en cas d’abcès sous-périosté ou de foyer nécrotique) car dans ce cas elle a uniquement un but diagnostique (et pas thérapeutique comme dans une arthrite car la bonne diffusion des antibiotiques permet un traitement médical seul). Et la rentabilité de cet examen en termes d’identification du germe étant mauvaise, on choisit de traiter ces infections de manière probabiliste. CAS PARTICULIERS Kingella Kingae C’est le principal responsable des IOA avant l’âge de 4 ans. Il donne typiquement des perturbations cliniques et biologiques modérées. Ferroni [3] retrouve une CRP moyenne à 42 mg/L (6-132) dans les infections à Kingella Kingae (KK) contre 64 (5-430) dans les autres infections documentées. Kanavaki [12] rapporte une série d’IRM dans le cadre d’IOA chez des enfants de moins de 4 ans dont 21 à KK et 10 à CG+. Elle retrouve moins d’inflammation osseuse et de réaction des parties molles dans les infections à KK. De plus des abcès dans le cartilage épiphysaire ne sont retrouvés que dans les infections à KK (48 %). L’évolution est souvent plus rapidement favorable et avec moins de complications qu’avec les autres pathogènes. KK est très sensible à l’amoxicilline. Néanmoins si les éléments d’orientation sont en faveur d’une infection à KK, leur spécificité n’est pas suffisante et donc une antibiothérapie couvrant SAMS reste recommandée en l’absence de confirmation microbiologique (culture ou PCR) [13]. Staphylocoque Aureus sécréteur de leucocidine de Panton et Valentine On observe une augmentation des cas d’IOA à Staphylocoque Aureus (SA) sécréteur d’une toxine : la leucocidine et Panton et Valentine (LPV). Le gène de cette toxine a été retrouvé dans 26 % des infections à SA à partir de 2005 dans la série de R. Debré [14]. Ces souches sont responsables de tableaux infectieux graves comprenant choc septique, localisations multiples avec nécroses osseuses extensives, thromboses veineuses profondes (TVP) et abcès pulmonaires. Initialement, de nombreuses études avaient observé des infections plus sévères en cas d’infection à SA résistant à la méthicilline (SARM) plutôt qu’à SA sensible à la méthicilline (SASM). Mais la production de LPV étant plus fréquente chez les SARM (74-100 % contre 9-46 % pour SAMS aux USA) [15], il est probable qu’en réalité, cette augmentation de gravité des infections à SARM soit due à la production de LPV. En cas de tableau clinique sévère, l’antibiothérapie probabiliste active sur SARM et permettant une diminution de la production de LPV sera donc à privilégier (cf. chapitre du Dr Lorrot). La constatation d’une IOA sévère impose la réalisation d’une IRM, afin de permettre un bilan local précis : étendue de l’inflammation et des plages de nécrose osseuses, abcès intra-osseux et sous-périostés, arthrites, TVP. En effet, du fait du mauvais accès des défenses immunitaires des antibiotiques dans les zones abcédées ou nécrotiques, le traitement chirurgical revêt une importance capitale. Et il est fréquent que des lavages chirurgicaux itératifs soient nécessaires. Dohin [16] a fait une revue rétrospective de 14 cas d’IOA à SA sécréteur de LPV. Il a retrouvé 6 chocs septiques. La CRP moyenne était de 202 mg/L. Et 10 patients (71 %) ont nécessité un lavage chirurgical itératif avec en moyenne 3 procédures par patient (de 1 à 5). Vander Have a fait une revue rétrospective de 27 patients présentant une IOA à SARM [17]. Seize (59 %) patients ont nécessité un nettoyage itératif, avec 2,4 procédures en moyenne et 8 présentaient une thrombose veineuse profonde. L’IRM permet donc d’optimiser la réalisation du temps chirurgical. Et il ne faudra pas hésiter à la répéter au bout de quelques jours, afin de guider les réinterventions [18]. La réalisation de séquences avec injection de gadolinium serait particulièrement importante pour rechercher des abcès dans les parties cartilagineuses du squelette [19]. Compte-tenu des complications (embols pulmonaires septiques) que peuvent engendrer les TVP, il convient de les rechercher systématiquement par IRM ou doppler, sans qu’un de ces examens ait fait la preuve de sa supériorité. Le cas échéant un traitement curatif par HBPM est à mettre en place [15]. ANTIBIOTHERAPIE Elle est débutée dès les prélèvements bactériologiques terminés, initialement intraveineuse, probabiliste en fonction de l’âge de l’enfant, et adaptée secondairement aux prélèvements effectués (cf. chapitre du Dr Lorrot). IMMOBILISATION Les immobilisations prolongées ne sont plus préconisées car pourvoyeuses de raideurs, et ne sont mises en place que pour 8 à 10 jours, à but antalgique. Dans le cadre d’infections agressives avec ostéolyse extensives, elles peuvent être préconisées en prévention d’une fracture. Il s’agit le plus souvent d’immobilisations plâtrées, qui peuvent être relayées par des attelles en cas de nécessité d’une protection prolongée sur des lésions particulièrement à risque. SUIVI La CRP se normalise le plus souvent sous 10 jours [20]. L’enfant est revu une semaine après la sortie pour contrôle clinico-biologique (NFS-CRP), l’immobilisation étant en général enlevée à ce moment-là ; puis à 1 mois, à la fin du traitement antibiotique, avec un contrôle radiographique pour dépister d’éventuels abcès osseux asymptomatiques sous antibiotiques et des lésions des cartilages de croissance (épiphysiodèse). A RETENIR - La CRP reste le marqueur biologique principal de diagnostic et de suivi des IOA. - La présence d’une IOA avec un tableau septique sévère impose la réalisation d’une IRM. Légendes des figures 1) Radiographie de bassin montrant une excentration du fémur G témoignant d’un volumineux épanchement articulaire. 2) Radiographie de l’humérus dans le cadre d’une ostéomyélite à Staphylocoque sécrétant la leucocidine de Panton et Valentine avec larges lésions ostéolytiques et appositions périostées. 3) IRM de l’humérus (même patient que figure 2). Noter les abcès dans les parties molles et les zones de nécrose intra-médullaire. BIBLIOGRAPHIE 1) Dartnell J, Ramachandran M, Katchburian M. Haematogeneous acute and subacute paediatric osteomyelitis: a systematic review of the literature. J Bone Joint Surg Br. 2012 May;94(5):584-9 2) Faesch S, Cojocaru B, Hennequin C et al. Can procalcitonin measurement help the diagnosis of osteomyelitis and septic arthritis ? A prospective trial. Ital J Pediatr. 2009 Nov 4;35(1):33 3) Ferroni A, Al Khoury H, Dana C et al. Prospective survey of acute osteoarticular infections in a French paediatric orthopedic surgery unit. Clin Microbiol Infect. 2012 Sep 12 4) Laurence N, Averill L. Imaging pediatric musculoskeletal infection. Tech Ortho 2011 26 (4):238-47 5) Schauwecker DS. The scintigraphic diagnosis of osteomyelitis. AJR Am J Roentgenol. 1992 Jan;158(1):9-18 6) Mazur JM, Ross G, Cummings J et al. 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En France, le paludisme sévère d’importation concerne 100 à 200 patients par an dont environ 15 % d’enfants [2]. La diffusion des moustiquaires imprégnées d’insecticides et l’utilisation des dérivés combinés de l’artémisinine (ACT) permettant de limiter la survenue de résistances parasitaires ont largement contribué à la baisse de l’incidence du paludisme au niveau mondial [1]. Mais la prise en charge des formes sévères reste complexe tant sur le plan diagnostic que thérapeutique. La quinine par voie intraveineuse (IV) jusqu’à présent largement utilisée est associée non seulement à des difficultés d’administration en zone d’endémie ou dans le cadre du paludisme d’importation mais aussi à une toxicité potentielle importante en particulier cardiaque [3]. C’est dans ce contexte que récemment des données se sont accumulées pour privilégier l’utilisation de l’artésunate IV, dérivé de l’artémisinine dans le paludisme sévère de l’enfant. Données générales sur l’artésunate L’artésunate est un dérivé hémisynthétique hydrosoluble de l’artémisinine. L’artémisinine (Artemisia Annua) est une plante chinoise (quingao) connue depuis 1500 ans pour ses propriétés antipyrétiques. Dans les années 70, un chimiste chinois en a extrait une gamme d’alcaloïdes aux propriétés antipaludiques telles que l’artémether, l’artémotil, l’arténilate, la dihydoarthémisine et l’artésunate. Les dérivés de l’artémisinine ont en commun une structure sesquiterpène avec en particulier un pont endoperoxide qui en interagissant avec le fer héminique produit la libération de radicaux libres toxiques sur le parasite en développement et sa vacuole nutritive [4]. Les dérivés de l’artémisinine ont des propriétés antipaludiques qui les rendent particulièrement efficaces [5-8] : -une parasiticidie rapide et puissante. En effet par rapport aux autres antipaludiques qui habituellement réduisent la charge parasitaire d’un facteur 10 à 100 par cycle parasitaire de 48h, l’artésunate réduit la charge parasitaire d’un facteur de 10.000 ; -un large spectre d’action : ces dérivés sont actifs du stade aséxué érythrocytaire le plus précoce (stade en anneau) au schyzonte en passant par le trophozoite. L’activité sur les « vieux » trophozoites est particulièrement intéressante car ceux-ci sont impliqués dans les phénomènes de séquestration au niveau des capillaires cérébraux. Par ailleurs, ces dérivés sont actifs sur l’ensemble des espèces plasmodiales ; -une diminution des phénomènes de cyto-adhérence in vitro aussi impliquée dans la physiopathologie des atteintes cérébrales avec en particulier une diminution du « roseting » qui correspond à l’agglutination des globules rouge aux hématies parasitées ; -une activité de « piting » qui correspond au sein de la rate à l’épépinage des résidus parasitaires du globule rouge qui est ainsi remis en circulation avec toutefois une probable diminution de sa durée de vie. Sur le plan pharmacologique l’artésunate est une prodrogue hydrolysée en dihydroartémisine par une estérase et par les enzymes du cytochrome P450. Sa demi-vie est courte (15-45 min pour l’artésunate, 30-100 min pour la dihydroartémisine). L’élimination est effectuée par voie biliaire après glucuroconjugaison [9]. Le profil de tolérance globale est relativement bon [10,11]. Une méta-analyse réalisée chez 9241 patients a mis en évidence essentiellement des troubles digestifs, un œdème de Quincke dans un cas pour 3000, pas de toxicité neurologique. Sur le plan cardiaque à forte dose un allongement du Qtc a été observé chez l’animal et une bradycardie chez l’homme. L’hématotoxicité a été mise en avant par certaines études. Une en particulier a montré la survenue d’une hémolyse retardée inhabituelle après négativation de la parasitémie et entre le 14e et 30e jour suivant le début du traitement chez 6 patients sur 25 (24 %) hospitalisés pour un paludisme sévère dans 7 centres d’Europe du Nord [12]. Cinq de ces patients ont nécessité une transfusion. L’activité « d’épépinage » de l’artésunate IV avec une diminution de la durée de vie des globules rouge « épépinés » pourrait être responsable de ces hémolyses retardées. Toutefois ceci n’a pas été formellement démontré. Efficacité et tolérance de l’artésunate L’efficacité de l’artésunate IV dans le paludisme sévère a principalement été démontrée dans 2 grandes études ouvertes, randomisées, chez l’adulte, l’étude Seaquamat [13] et chez l’enfant, l’étude Aquamat [14]. Dans ces études l’efficacité et la tolérance de l’artésunate IV ont été comparées à celles de la quinine IV. La première étude, Seaquamat, étude ouverte randomisée, a comparé l’efficacité et la tolérance de l’artésunate IV et de la quinine IV dans les accès palustres sévères en Asie du Sud-Est chez 1461 patients (majoritairement adultes mais avec ≈13 % d’enfants de moins de 15 ans dans chaque groupe). Cette étude a montré une réduction de la mortalité de 34,7 % dans le groupe artésunate par rapport au groupe quinine, une bonne tolérance de l’artésunate et un risque relatif d’hypoglycémie de 3,2 dans le groupe quinine. La 2e étude est l’essai ouvert randomisé Aquamat qui a inclus 5425 enfants (âge médian 2,9 ans (1,7-4,3) dans le groupe quinine et 2,8 ans (1,6-4,2) dans le groupe artésunate). Ces enfants ont été inclus dans 11 centres médicaux localisés dans 9 pays d’Afrique sub-Saharienne. La mortalité dans le groupe artésunate était significativement moins élevée (8,5 %) que dans le groupe quinine (10,9 %), avec une réduction relative de mortalité de 22,5 % dans le groupe artésunate (p = 0,0022) par rapport au groupe quinine. La réduction de la mortalité est toutefois moindre que celle qui a été observée chez l’adulte. A la sortie de l’hospitalisation, des séquelles neurologiques sont rapportées chez 3,9 % des enfants traités par artésunate et chez 2,8 % de ceux traités par quinine, avec un risque relatif en défaveur de l’artésunate, mais proche de 1 (1,36 [1,01-1,83], p = 0,04). Parmi les 170 enfants avec séquelles neurologiques à la sortie de l’hôpital, seuls 129 (75,9 %) sont revus à J28. Soixante-huit (52,7 %) ont totalement récupéré de leur déficit et 61 (47,3 %) présentent encore une anomalie neurologique. A ce moment la différence entre artésunate et quinine n’est plus significative (RR = 1,23 [0,74-2,03], p = 0,42). La répartition des séquelles à J28 était la suivante : 18 enfants (29,5 %) avaient des séquelles légères ou modérées et 43 (70,5 %) dont 23 enfants traités par artésunate et 20 par quinine) avaient des séquelles sévères (30 enfants avec troubles moteurs sévères, 14 avec cécité corticale, 9 avec troubles du langage ou de l’audition). L’effet de l’artésunate sur les séquelles neurologiques ne peut donc pas être évalué avec précision, du fait d’un manque de suivi à long terme. Toutefois on peut penser que des enfants plus sévères sur le plan neurologique ont survécu grâce à l’artésunate ce qui pourrait éventuellement expliquer une absence d’impact de l’artésunate sur le plan neurologique lors de la comparaison avec la quinine. Les hypoglycémies étaient plus fréquentes dans le groupe quinine (2,8 %) que dans le groupe artésunate (1,8 %) de manière comparable à ce qui a été observé chez l’adulte. Enfin aucun effet indésirable grave n’a été rapporté dans le groupe artésunate. Des données non publiées (source : Arjen Dondorp, Faculty of Tropical Medicine, Mahidol University, Bangkok, Thailand) ont indiqué que chez 478 nourrissons inclus dans l’étude, la mortalité était de 33/217 dans le groupe quinine et de 28/261 dans le groupe artésunate (p = 0,093). Des données de pharmacocinétique de l’artésunate portant sur 70 enfants âgés de 6 mois à 11 ans ont été récemment publiées. Toutefois ces données portaient sur l’administration d’artésunate par voie intramusculaire et non par voie intraveineuse. Une adaptation des doses unitaires a été proposée dans 7 tranches de poids allant de 6 à 25 kg du fait de variation de la clairance en fonction du poids des enfants [15]. Enfin, il faut noter que dans les 2 études les patients recevaient dès qu’ils pouvaient prendre des comprimés et après au moins 24 heures de traitement parentéral par artésunate, soit de l’artésunate oral pendant 7 jours (Seaquamat) soit de l’artémeter-luméfantrine pendant 3 jours (Aquamat). Par la suite, l’ensemble de ces données d’efficacité et de tolérance ont été confirmées par une méta-analyse de la Cochrane portant sur 7000 patients et ayant conduit l’OMS en 2008 a recommandé l’utilisation de l’artésunate IV en première ligne de traitement des accès palustres sévères [16,17]. L’ensemble de ces éléments a conduit les autorités françaises à mettre à disposition l’artésunate IV dans le cadre d’une procédure d’Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU) en mai 2011. Jusqu’à novembre 2012, 113 patients âgés de 2 à 82 ans avaient été traités par artésunate IV. La médiane du début du traitement était de 4 j et la clairance parasitaire à moins de 72 h était obtenue pour 2 patients sur 3 [18]. La léthalité était de 5,3 % et comparable à des études observationnelles où la quinine IV était utilisée [18]. Quinze anémies différées et/ou persistantes (13 %) ont été observées ayant nécessité 9 transfusions chez 8 patients [18]. En 2012, 5 enfants ont bénéficié d’un traitement par artésunate IV à l’hôpital Robert Debré pour un paludisme sévère. Aucun décès n’est survenu, ni aucun effet secondaire sévère. Aucun épisode d’hémolyse retardée n’a été constaté. Seul un allongement du QTc < 0,50 ms potentiellement en rapport avec l’administration d’arthemeter-luméfantrine en relais du traitement IV a été observé. Les données en zones d’endémies et ces premières données d’ATU ont conduit le Haut Conseil de la Santé Publique à recommander début 2013 l’usage de l’artésunate IV en première ligne du traitement des accès sévères de manière comparable à l’OMS [18]. L’artésunate en pratique Depuis 2012, l’obtention de l’artésunate IV s’effectue sous ATU dans l’indication traitement des paludismes graves à Plasmodium falciparum chez l’adulte et l’enfant de plus de 18 mois. Une procédure de surveillance étroite par l’ANSM et d’utilisation dans le cadre d’un Protocole d’Utilisation Thérapeutique (PUT) et de recueil d’information (www.ansm.sante.fr, www.cnrpalu-france.org) a été mise en place permettant un suivi par le Centre National de Référence du Paludisme et les centres régionaux de pharmacovigilance [18]. L’initiation du traitement pour le patient doit être possible en moins de 2 heures. Si ceci n’est pas possible la quinine IV doit être débutée ce qui n’empêche pas la prescription ultérieure d’artésunate IV dans les 24 premières heures. Cette réactivité implique un prépositionement de l’artésunate IV dans la pharmacie de l’hôpital mais aussi une information et une concertation de chaque acteur (médecins des urgences, de réanimation, infectiologues, pharmaciens) prenant en charge les enfants impaludés au sein de l’hôpital. La posologie de l’artésunate IV est de 2,4 mg/kg à H0, H12, H24 puis 2,4 mg/kg une fois par jour (la durée maximale de traitement est de 7 j soit 9 doses). Un relais oral est possible après 3 doses minimum par un traitement complet d’artéméther-luméfantrine (Riamet®) ou DHA-pipéraquine (Eurartésim) voire atovaquone-proguanil, ou méfloquine (sauf en cas d’accès sévère avec atteinte neurologique où la méfloquine est contre-indiquée). La préparation et la réalisation des injections est beaucoup plus simple que pour la quinine IV. Elle comporte la dissolution complète d’un flacon de 60 mg d’artésunate (Malacef®) par 1 ml de bicarbonate de sodium à 5 % (flacon et ampoule située dans la boîte) et 5 ml de glucosé à 5 %. Ceci permet l’obtention de 6 ml de solution d’artésunate à 10 mg/ml. La vitesse de perfusion en IV lente est de 3-4 ml/min (30-40 mg/min). Ce qui équivaut pour un enfant de 15 kg à une durée de perfusion de 1 minute environ. Actuellement, dans la mesure où les enfants atteints de paludisme sévère sont hospitalisés en réanimation ou en unité de surveillance continue, l’administration d’artésunate IV s’effectue dans ce type de service sous surveillance scopique, ECG systématique à l’initiation pour éliminer un QTc long et si bradycardie pour l’âge au cours du traitement. La surveillance clinique recherche des éruptions, prurit, acouphènes, vertige. Sur le plan biologique, en plus de la surveillance parasitologique (J3, J7, J28), il est recommandé d’effectuer une NFS et réticulocytes, haptoglobine à J3, J7, J14, J21 , J28 et un bilan plus approfondi à discuter en cas de majoration inexpliquée d’une anémie (Fer, Coombs, agglu froides, G6PD, électrophorèse Hb…) [18]. Situations particulières d’utilisation de l’artésunate IV Très peu de données sont disponibles chez l’enfant âgé de moins de 18 mois et aucune n’est publiée. Toutefois aucune limite inférieure d’âge d’utilisation n’est mentionnée par l’OMS. Dans ce contexte, l’utilisation avant 18 mois est possible mais nécessite une surveillance rapprochée. Concernant les rares paludismes sévères à d’autres espèces que le Plasmodium falciparum, un traitement par artésunate IV est aussi indiqué. Par ailleurs, l’artésunate IV est utilisable chez la femme enceinte au 2e et 3e trimestre (discussion au cas par cas au 1er trimestre) mais implique un suivi de la femme puis du nouveau-né rapproché en l’absence d’une large expérience. Dans le cadre d’un accès simple dont l’évolution peut rapidement devenir sévère en l’absence de traitement chez l’enfant, les vomissements peuvent constituer un obstacle à la conduite du traitement oral recommandé. Dans ce contexte, les recommandations 2007 de prise en charge du paludisme d’importation préconisent l’administration de quinine IV chez l’enfant en Unité de Soins Intensifs jusqu’à la possibilité d’un relais par voie orale à l’arrêt des vomissements. Dans cette situation, le remplacement de la quinine IV par l’artésunate pourrait être aussi justifié en termes de rapport bénéfice risque. Toutefois, cette indication n’est pour l’instant pas retenue dans le cadre de l’ATU mais mériterait d’être révaluée. Conclusion L’utilisation de l’artésunate IV constitue un progrès dans la prise en charge des patients atteints de paludisme sévère. Toutefois le manque de recul vis-à-vis de ce traitement nécessite une surveillance clinique et biologique rapprochée justifiant le protocole d’utilisation spécifique dont les données sont centralisées au Centre National de Référence du paludisme. La surveillance des résistances aux dérivés de l’artémisinine qui commencent à être décrites en Asie du Sud-Est constitue aussi un enjeu important dans l’utilisation de l’artésunate IV. Enfin, un positionnement rapide des autorités de santé est nécessaire sur l’utilisation de l’artésunate IV chez l’enfant impaludé ayant une intolérance digestive totale aux traitements antipaludiques par voie orale. 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L'ASTHME DE L'ENFANT, DES PHENOTYPES A LA PRISE EN CHARGE Par Jocelyne Just, Flore Amat, Nathalie Guillemot-Lambert Centre de l’Asthme et des Allergies, Service d’Allergologie, Hôpital Armand Trousseau ( HYPERLINK "mailto:[email protected]" [email protected]), INTRODUCTION L’asthme est la plus fréquente des maladies chroniques au cours de l’enfance. Les études épidémiologiques mettent en évidence que dans la majorité des cas, les symptômes d’asthme apparaissent au cours de l’enfance et que pour les enfants qui restent symptomatiques à l’âge adulte, les altérations de la fonction respiratoire sont présentes dès la première décade de la vie, et peut être même avant l’âge de trois ans. L’asthme ne doit plus être appréhendé comme une maladie mais comme un complexe de multiples syndromes qui s’associent de façon variée chez le même individu. Des facteurs génétiques et environnementaux peuvent influencer l’expression et la progression de cette maladie. Classiquement, le diagnostic de l'asthme repose sur la récidive d’épisodes combinant la toux, les sifflements et les gènes respiratoires. Le mécanisme physiopathologique sous-jacent associe une hyper-réactivité bronchique et une inflammation des voies aériennes. Cependant, parmi les différents phénotypes d’asthme, certains ont des caractéristiques physiopathologiques différentes. Mieux définir les différents phénotypes de l’asthme chez l’enfant, les mécanismes physiopathologiques attachés à ces différents phénotypes permettrait de mieux définir des thérapeutiques ciblées. Asthme du nourrisson L’asthme à début précoce et l’asthme à début tardif ont une course évolutive différente. La cohorte de Tucson [] a défini un phénotype d’asthme à début précoce durant les 2 premières années de vie et persistant durant l’enfance. Ce sont des enfants qui ont eu au moins un épisode de maladie respiratoire sifflante dans les trois premières années de vie et qui continuent de siffler à 6 ans. Ces enfants ont une fonction respiratoire perturbée à l'âge de 6 ans, alors qu'elle était voisine de ceux des enfants n’ayant jamais sifflé avant l’âge de 3 ans. Des études longitudinales montrent que l’asthme à début précoce qui va persister durant l’enfance est une entité plus homogène que l’asthme a début tardif []. L’asthme à début précoce a une composante familiale forte et allergique plus fréquente (c’est-à-dire avec un score d’atopie, appelé Asthma Prédictive Index (API) positif) [], et est souvent associé à une maladie plus sévère. L’European Respiratory Task Force [] a récemment publié un rapport recommandant qu’il faille différencier chez les nourrissons présentant des sifflements récurrents, les siffleurs occasionnels viro-induits et les siffleurs récurrents de causes multiples. Mais ces phénotypes, dont le classement est plus en rapport avec la sévérité, ne sont pas prédictifs du pronostic à long terme et pourraient varier dans le temps. En prenant en compte l’ensemble des paramètres pertinents dans la littérature pour définir l’asthme du nourrisson, nous avons identifié [], chez 551 nourrissons présentant un asthme actif, trois phénotypes : (Cluster 1) un groupe de siffleurs viro-induits ayant un asthme léger contrôlé sous faibles doses de corticoïdes inhalés ; (Cluster 2) un groupe de siffleurs récurrents sévères « non-atopiques » avec maladie souvent non contrôlée malgré de fortes doses de corticoïdes inhalées, plus fréquemment retrouvé chez la fille ; et enfin (Cluster 3) un groupe de siffleurs récurrents de causes multiples avec de nombreuses caractéristiques liées à un terrain atopique, eczéma dans 75 % des cas), Phadiatop nourrisson® positif (dans 90 % des cas) et intermédiaire en terme de sévérité, plus fréquent chez le garçon (Figure n°1). Des paramètres environnementaux associés a priori à une condition socio-économique péjorative (c’està-dire une surpopulation, la présence de moisissures et de cafards au domicile) sont associés au phénotype atopique (Cluster 3), alors que le phénotype le plus sévère (Cluster 2) est associé de façon significative à des facteurs de déclenchement a priori infectieux, c’est-à-dire une plus grande fréquentation de crèche collective. Ces clusters sont retrouvés ou concordants avec d’autres analyses en clusters de notre équipe []. Cette différence physiopathologie dominée par l’atopie chez le garçon et les infections chez la fille avec une inflammation peu corticosensible en lien avec un environnement infectieux, pourrait conduire à une prise en charge thérapeutique différente de ces phénotypes. L’asthme de l’enfant d’âge préscolaire Il existe différents phénotypes d’asthme sévère en fonction du risque d’exacerbations aiguës graves, du degré d’obstruction bronchique, de réponse au traitement, d’ancienneté de la maladie. Les études montrent que l’asthme à risque d’exacerbations aiguës graves ou asthmes difficiles à contrôler s’associe plutôt à l’asthme d’origine allergique. Ces patients ont une grande fluctuation de la fonction respiratoire entre les crises, qui reste plus souvent normale entre les crises. Ce phénotype d’asthme serait génétiquement déterminé, comme le montre l’association entre le polymorphisme de l’IL-4 (cytokine impliquée dans la réponse IgE) et les crises aiguës potentiellement mortelles d’asthme []. L’asthme d’origine allergique est un phénotype fréquent notamment durant l’enfance. De plus, l’allergie est associée au phénotype d’asthme persistant au cours de l’enfance mais également à l’âge adulte. Récemment nous avons montré, que chez des nourrissons asthmatiques, l’absence de sensibilisation allergique et d’hyper éosinophilie sanguine est associée à la rémission de l’asthme dans la petite enfance []. De la même façon, Simpson et coll [] montrent que les sensibilisations allergéniques précoces et multiples chez le nourrisson prédisposent à l’apparition d’un asthme sévère au cours de l’enfance défini par (i) un asthme persistant à l’âge de 8 ans, (ii) avec des antécédents d’hospitalisations pour crise, (iii) et une mauvaise fonction respiratoire. L’asthme sévère avec des anomalies de la fonction respiratoire ou obstructif. Les études longitudinales sur le devenir de l'asthme de l'enfant à l'âge adulte montrent qu’il existe une relation entre le déficit précoce de la fonction respiratoire et la persistance de l'asthme suggérant que les anomalies de la fonction respiratoire sont présentes tôt dans la vie. Ainsi, une étude australienne [] étudie la fonction respiratoire de sujets suivis de l’âge de 7 à 42 ans. Les enfants, ayant un asthme sévère associé à une obstruction bronchique, ont une obstruction bronchique persistante à l’âge adulte. Ceci suggère que le déficit de la fonction respiratoire des adultes présentant un asthme sévère se met en place, tôt dans la vie. Le déclin plus rapide de la fonction respiratoire qui caractérise ce phénotype serait également génétiquement déterminé. De la même façon, l’équipe de Fernando Martinez [] montre qu’une fonction respiratoire mauvaise après la naissance est un facteur de risques de syndrome obstructif à l’âge adulte. Prenant en compte ces données, nous avons décrit chez des enfants, âgés de 6 à 12 ans, trois phénotypes d’asthme : en comparaison à un phénotype d’asthme léger peu inflammatoire, un phénotype attendu d’asthme sévère multiallergique et exacerbateur avec des sensibilisations allergéniques multiples à des allergènes inhalés mais aussi alimentaires et une inflammation à éosinophile, et un asthme sévère avec plus de remodelage (VEMS plus bas) plutôt intrinsèque avec une inflammation neutrophilique (Figure n°2) []. En conclusion Selon les situations phénotypiques rencontrées (aiguës ou chroniques) le moment de la vie (enfance, petite enfance), l’association ou non à l’atopie, la signature inflammatoire de l’asthme est variable et devra orienter vers une prise en charge thérapeutique différente. Des phénotypes à la prise en charge exemples de traitements personnalisés Contrôle de l'environnement pour quel type d’asthme ? Une méta-analyse sur l'efficacité des housses de matelas anti-acariens de la poussière de maison ne montre pas d’efficacité de la réduction des allergènes par ses housses sur les exacerbations d’asthme allergique ou de rhinite allergique. Cependant, la plupart des études ont été menées dans des populations non homogènes en terme de sévérité de l'asthme, mais surtout en terme de définition de l'allergie. A l'inverse, une étude publiée dans le New England Journal of Medicine [] réalisée dans une population parfaitement sélectionnée (c’est-à-dire, chez des enfants atteints d'asthme modéré sensibilisés aux acariens) conclut à l'efficacité des housses anti-acariens (en comparaison au placebo) sur les exacerbations d’asthme. La corticothérapie inhalée chez l’enfant d’âge préscolaire ? Chez l’enfant d’âge préscolaire, la corticothérapie inhalée (CI) dans le traitement de l’asthme le plus souvent viroinduit à cet âge de la vie, a longtemps été discutée. Néanmoins, l’étude de HYPERLINK "http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed?term=%22Guilbert%20TW%22%5BAuthor%5D"Guilbert TW et coll [] a montré, chez des enfants d'âge préscolaire atteints d’un phénotype d’asthme persistant à risque élevé d’évoluer vers un asthme allergique (c’est-à-dire à score d’API positif), que deux ans de traitement par CI diminue de façon significative le risque d’exacerbations en comparaison au groupe placebo. Compte tenu du risque non négligeable de retentissement sur la courbe staturale de la CI à cet âge de la vie (réduction de la croissance -1 cm sur 2 ans par rapport au placebo par des doses quotidiennes de fluticasone dans une autre étude de Guilbert []), de nombreux auteurs se sont posés la question du traitement soit par une CI intermittente à fortes doses, soit par une CI à faibles doses en continu [,] dans le traitement de l’asthme de l’enfant d’âge préscolaire. Les conclusions de ces études sont que les phénotypes à traiter : (1) par une CI intermittente à fortes doses sont les asthmes persistants légers avec peu d’exacerbation dans l’année et un score d’API positif et pour lesquels la famille est capable de gérer un plan de crise ; (2) ceux à traiter CI doses faibles en continu, en période saisonnière à risque d’infection virale, sont les phénotypes d’asthme persistant non contrôlé ou d’asthme modéré à sévère. Le Montelukast pour quel phénotype d’asthme ? En se basant sur le phénotypes d’asthme en fonction de marqueurs liés à l’inflammation à éosinophile pulmonaire comme la fraction exhalée du monoxyde d’azote (Fe (NO)) et la sécrétion de leucotriènes urinaires E4 (LTE (4)) Rabinovitch et coll.[] peuvent cibler, chez 318 enfants atteints d'asthme léger à modéré, les répondeurs aux leucotriènes (en comparaison aux CI). Les enfants avec LTE (4) / Fe (NO) ratios égaux ou supérieurs au 75e percentile étaient susceptibles (p <0,05) d’être plus jeunes, plutôt des filles avec des niveaux inférieurs de marqueurs atopiques. Ce phénotype d’asthme (associé donc à un rapport LTE (4) / Fe (NO) élevé) était associé à une plus grande réponse au Montelukast par rapport à la CI pour le VEMS (augmentation de 1,8 %, p = 0,0005) mais aussi des éléments cliniques témoignant du contrôle de l’asthme (0,4 augmentation, p =0,001). Un traitement spécifique de l'allergie respiratoire pourrait modifier l’histoire naturelle de l’asthme dans des phénotypes bien sélectionnés Les maladies allergiques IgE médiés associés à l'asthme aggravent l’asthme en particulier en terme d’exacerbations aiguës mais aussi de déclin de la fonction pulmonaire au cours de l'enfance et aussi à l’âge adulte. Aussi, les traitements spécifiques de l'allergie doivent être considérés pour la prise en charge de l'asthme allergique. L'immunothérapie spécifique L'immunothérapie spécifique est un traitement qui a été mis en place depuis plus d'un siècle. De nombreuses métaanalyses concluent à l'efficacité de l'immunothérapie allergénique dans le traitement de l’asthme et de la rhinite allergique []. En outre, l'immunothérapie spécifique pourrait avoir un effet modificateur de l’histoire naturelle de l’allergie respiratoire, comme le passage de la rhinite allergique à l’asthme ou la réduction du risque de nouvelles sensibilisations allergéniques. Enfin, l'immunothérapie spécifique pourrait avoir une place dans la prévention tertiaire de l’asthme (c’est-à-dire l’aggravation de la maladie) ce qui permettrait de réduire les doses de corticoïdes inhalés nécessaires au contrôle de l’asthme []. L’indication actuelle de l'immunothérapie spécifique, chez les enfants asthmatiques, est l’allergie respiratoire de sévérité modérée, après un contrôle obtenu par un traitement symptomatique avec plutôt une mono-allergie aux acariens de la poussière de maison ou à certains pollens. Ainsi, pour des groupes d’experts internationaux, l'immunothérapie spécifique doit être proposée à des stades plus précoces de la maladie allergique dans l'hypothèse d'éviter le remodelage irréversible des tissus. L'Omalizumab traitement des asthmes allergiques sévères l'Omalizumab représente une approche nouvelle pour le traitement de l'asthme atopique dans un phénotype particulier que nous allons définir. L'Omalizumab est un anticorps humanisé monoclonal recombinant anti-IgE qui bloque la première étape de la réaction allergique IgE médiée. La réduction du taux d'IgE libres suite à la thérapie anti-IgE pourrait mener à une réduction de récepteur de haute affinité pour les IgE (Fc RI) sur les mastocytes, les basophiles et cellules dendritiques. L'Omalizumab est indiqué dans l’asthme allergique persistant sévère mal contrôlé par un traitement bien conduit multiple et optimal. Une méta-analyse portant sur 8 études et regroupant 3429 participants [] montre que l’Omalizuamb réduit significativement les exacerbations d'asthme (RR 0,57 5, 95 % CI, 0.48 à 0,66; P 5, 0001) pendant la phase de réduction de la CI. Ce traitement, administré par voie injectable, est globalement bien toléré en dehors de réaction locale (19,9 % vs 13,2 % pour le placebo) sans risque accru d’effets cardio-vasculaires, ou de néoplasie. Les effets secondaires sérieux sont l’anaphylaxie. La Food and Drug Administration’s Adverse Event Reporting System database a identifié 124 cas d’anaphylaxie sur une cohorte de 57 300 patients traités par Omalizumab (soit une fréquence de 0,2 %) []. Des études observationnelles, ont montré qu’après l'arrêt d'un traitement prolongé par l'Omalizumab, le contrôle de l'asthme peut persister comme un effet rémanent avec potentiellement donc un traitement modificateur de l'histoire naturelle de l’asthme sévère. Figure n°1 : 3 phénotypes d’asthme du nourrisson en fonction de la sévérité, l’atopie et les facteurs déclenchants [8] (MTW = Multiple Trigger Wheeze ou à facteurs déclenchants multiples), Severity : Sévérité de l’asthme) Figure n°2 : 3 phénotypes d’asthme de l’enfant [12] : Asthme léger peu inflammatoire, l’asthme sévère exacerbateur et multiallergique, l’asthme sévère obstructif et neutrophilique Martinez FD, Wright AL, Taussig LM, et al. Asthma and wheezing in the first six years of life. The Group Health Medical Associates. 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Ce sont de petits virus à ARN simple brin, résistants dans le milieu extérieur. Dans la famille des Picornavirus, il existe 4 genres : les genres Rhinovirus, Hépatovirus, Entérovirus, et depuis quelques années seulement le genre Parechovirus. La nouvelle classification des EV humains comporte 4 espèces : les coxsackievirus, les échovirus, les entérovirus 68, 69, 70 et 71 et les poliovirus. Les infections à EV non poliomyélitiques sont fréquentes et communes au monde entier. Elles surviennent de façon sporadique et épidémique, le plus souvent entre les mois de juin et septembre, atteignant préférentiellement les enfants et particulièrement les nourrissons dans les pays tempérés à haut niveau sanitaire. Leur transmission est oro-fécale. Le plus souvent asymptomatiques ou bénignes, les infections à EV peuvent parfois être plus sévères quelquefois fatales. Leur sévérité peut prendre différentes formes à la fois selon l’âge de l’enfant, selon le sérotype (Entérovirus 71 et Coxsackie A16) et selon l’organe touché : atteinte cardiaque avec péricardite, myocardite ; atteinte respiratoire avec œdème aigu pulmonaire, syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) ; atteinte neurologique avec méningite, encéphalite, myélite ; atteinte hépatique avec CIVD en période néonatale. Au sein des parechovirus humains (HPeV), les HPeV-1 et HPeV-2 (ex échovirus 22 et 23) sont connus depuis les années 1950 et c’est le séquençage de leur génome qui a conduit à l’individualisation du genre Parechovirus. Depuis 1994, 16 génotypes ont été décrits. Dès 2005, plusieurs études soulignent le rôle d’un génotype HPeV-3 dans différents tableaux cliniques du nouveau-né et du nourrisson : fièvre, sepsis, méningite, encéphalite néonatale, hépatite, tableau de choc infectieux [1-6]. Après avoir présenté la sévérité des entérovirus en période néonatale, puis selon le type d’organe touché et enfin selon le type de virus en cause, une description du parechovirus de type 3 s’appuyant sur une expérience à Trousseau et la littérature pourrait certainement permettre un diagnostic plus fréquent de ce dernier virus. Les entéroviroses sévères non poliomyélitiques - Rappel virologique Il existe plus de 68 sérotypes d’EV. Leur transmission est oro-fécale. Il s’agit de virus nus à ARN très résistants dans le milieu extérieur et le tube digestif. Ils résistent aux pH acides dont l’acidité gastrique. Leur diffusion se trouve limitée par les mesures d’hygiène collectives et individuelles, mise à disposition d’eau propre et lavage des mains. Dans la majorité des cas, les EV donnent des infections asymptomatiques. Les infections à expression clinique sont l’exception et résultent d’une diffusion du virus dans l’organisme par virémie. - Formes sévères dans la période néonatale Elles sont dues à des atteintes du SNC associées ou non à une atteinte myocardique ou une atteinte hépatique avec CIVD. Les infections à EV sont fréquentes en période néonatale. Les données recueillies par le réseau National Enterovirus Surveillance System (NESS) aux USA entre 1983 et 2003 rapportent que 11,4 % des infections à EV diagnostiquées concernaient les nouveau-nés. Les nouveau-nés symptomatiques ont différents tableaux cliniques : fièvre (30 %), méningite aseptique bénigne (40 %) et maladie sévère avec hépatite nécrosante, coagulopathie avec ou sans myocardite (30 %). En période néonatale, la mortalité est élevée (50 %) et peut dépasser 70 % en cas de myocardite. Il peut s’agir d’infections materno-foetales et néonatales acquises à entérovirus et cela toucherait 5/10 000 nouveaunés. Les échovirus 1 à 34 représentent 50 à 70 % des cas : l’échovirus 11 est responsable de la moitié des cas publiés et les coxsackievirus A1 à A24 et B1 à B6, de 20 à 30 % des cas [7]. Certains sérotypes sont plus souvent retrouvés selon l’organe le plus touché : échovirus 6, 7, 9, 11, 19 et 21 dans les hépatites nécrosantes. Ces dernières peuvent laisser des séquelles telles une fibrose hépatique ou une insuffisance hépatique chronique [8,9]. Le Coxsackie B1 est réputé très virulent en période néonatale dans une étude américaine [10] : myocardites, atteinte multiviscérale. - Gravité selon l’organe touché Les EV sont les virus les plus fréquemment responsables de méningites aseptiques de l’enfant. Ils sont dits « neurotropes » comme l’échovirus 30 (E-30), l’E-6, l’E-11, l’E-13, l’E-18 ou le coxsackievirus B5. Les encéphalites sont des complications rares des infections à EV. Sont en cause les virus coxsackie et échovirus. Durant la période néonatale, l’encéphalite peut faire partie d’un tableau d’infection à entérovirus généralisée dont le pronostic dépend autant de l’atteinte hépatique ou cardiaque que de celle du SNC. Les signes cliniques suggèrent une atteinte diffuse du parenchyme cérébral mais des formes focales ont été décrites évoquant cliniquement l’atteinte observée lors de l’encéphalite herpétique. Chez les enfants agammaglobulinémiques, les EV sont parfois responsables de méningoencéphalites chroniques. D’autres manifestations neurologiques sont possibles : paralysies et cerébellites post-encéphalites, myélite paralysante ou transverse, ataxie cérébelleuse, syndrome de Guillain-Barré [11]. Les atteintes cardiaques sont dues principalement aux coxsackievirus A et B : myocardites chez les nouveau-nés, nourrissons et le jeune enfant et péricardites et myopéricardites chez l’adolescent et le jeune adulte. La myocardite est un piège diagnostique en pédiatrie. La symptomatologie de la myocardite à EV suit une évolution biphasique avec une 1ère phase durant 1 à 7 jours pouvant associer de la fièvre (85 %) avec un rash, des symptômes digestifs (50 %), une méningite (50 %), une septicémie (25 %), une défaillance multiviscérale avec CIVD, une hépatite, une insuffisance rénale. La 2ème phase apparaît au 15ème jour sous forme d’une myocardite [7]. L’incidence de l’atteinte cardiaque est de 25 % mais est probablement sous-estimée (formes pauci-symptomatiques ou asymptomatiques). - Formes sévères liées aux virus L’entérovirus 71 est connu comme étant l’un des virus responsables du syndrome pieds-mains-bouche et d’herpangine. Jusqu’en 1975, ces infections étaient reconnues comme bénignes et guérissaient sans séquelles. Pourtant depuis 1975, plusieurs épidémies à entérovirus 71 ont été marquées par la survenue, au décours d’un syndrome pieds-mains-bouche, d’atteintes neurologiques sévères (méningites aseptiques, encéphalites, rhombencéphalites, paralysies flasques aiguës), d’hémorragies pulmonaires et de myocardites. La plus importante de ces épidémies est celle qui toucha Taiwan en 1998. Sur les 129 106 cas de syndrome pieds-mains-bouche rapportés, on compte 405 cas sévères avec atteinte neurologique et séquelles à l’origine du décès de 78 patients. La majorité des patients avait moins de 5 ans. Une étude française multicentrique publiée en 2010, hospitalière a décrit 59 patients infectés par l’entérovirus 71 dont 11 méningites, 3 méningoencéphalites, 1 myélite, 2 nourrissons sont décédés d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë secondaire à une rhombencéphalite [12]. Un travail chinois de 2012 [13] sur les atteintes neurologiques des syndromes pieds-mains-bouche arrive aux mêmes constatations. Deux virus sont incriminés : l’entérovirus 71 et le coxsackie A16. Les patients infectés par l’entérovirus 71 sont hospitalisés plus tôt et plus longtemps. Parmi 234 enfants, 5 sont décédés. Dans le groupe des patients infectés par le coxsackie A16, la symptomatologie neurologique est plus fréquemment l’encéphalite. - Méthodes diagnostiques La culture cellulaire était la méthode diagnostique la plus utilisée avant la PCR. Elle nécessite l’isolement du virus (LCR, sang, tissus, selles, urines, gorge). Elle a une sensibilité de 65-75 % (30-35 % dans le LCR). Par ailleurs, la durée d’obtention des résultats est variable de 3 à 7 jours. Il s’agit donc d’une méthode diagnostique longue, coûteuse et difficile. La PCR a pour premier avantage la rapidité d’obtention des résultats (parfois moins de 24 h). La recherche peut se faire sur le LCR, sang, tissus, selles, urines et prélèvement de gorge. Les sensibilité et spécificité sont proches de 100 % pour certains kits. La PCR permet la détection de nombreux sérotypes (RT-PCR). Son coût est toutefois encore relativement élevé. La sérologie n’est plus utilisée. La technique est lourde et coûteuse et nécessite de suivre l’évolution des différents sérotypes. - Approches thérapeutiques La vaccination est difficile à envisager du fait de la multiplicité et de la variabilité des sérotypes en dehors des virus poliomyélitiques. Il n’existe pas de traitement spécifique. Chez les patients immunocompétents, la guérison spontanée est la règle. On ne peut qu’encourager les mesures d’hygiène compte tenu du mode de transmission. La question du traitement se pose chez les patients immunodéprimés et dans les formes sévères. Les immunoglobulines polyvalentes injectables sont l’un des moyens de traitement actuel. Elles sont utilisées dans les formes chroniques de méningoencéphalites chez les patients immunodéprimés. De nombreuses molécules antivirales sont à l’étude dont le Pléconaril. Cet antiviral oral est un agent expérimental qui a été étudié chez des adultes et des enfants ayant une méningite à EV ou bien une méningoencéphalite chronique sur terrain immunodéprimé. Plusieurs études ont montré qu’il diminuait l’intensité et la durée des symptômes. Cependant, il n’a pas été étudié sur une large cohorte d’enfants. Une étude [14] ne montre pas de différence entre Pléconaril et placebo en termes de positivité du LCR, de durée d’hospitalisation ou des symptômes chez des enfants de moins de 12 mois. La diffusion dans le système nerveux central et l’épithélium nasal est excellente. Cette molécule agit en bloquant la fixation du virus aux récepteurs cellulaires et en empêchant la réplication virale. Son utilisation reste en cours d’évaluation en association ou non aux immunoglobulines. Dans le cas particulier des infections à entérovirus 71, ni les injections d’immunoglobulines polyvalentes ni le Pléconaril n’ont montré d’effet bénéfique sur l’évolution de la maladie. Les infections sévères à parechovirus de type 3 (HPeV-3) Un intérêt tout particulier est récemment porté sur le genre des parechovirus et notamment l’HPeV-3, responsable de manifestations cliniques sévères durant la période néonatale. Il s’agit d’un virus saisonnier, épidémique entre mai et octobre mais circulant également quelquefois en hiver avec une répartition biannuelle [6,15]. Sa prévalence chez les nourrissons de moins de 3 mois et particulièrement chez les nouveau-nés est variable de 2,1 à 9,3 % selon les années [6,15]. L’HPeV-3 est peu connu des cliniciens et donc largement sous-estimé. - Etude effectuée à Trousseau Nous avons réalisé une étude prospective descriptive de mai à décembre 2012, portant sur 8 nourrissons de moins de 6 semaines admis pour un tableau septique et hospitalisés dans le service de Pédiatrie Générale de l’Hôpital Trousseau depuis les Urgences Pédiatriques. Les 2 premiers cas ont été inclus de manière rétrospective. L’HPeV-3 a été recherché chez ces 2 nourrissons présentant un tableau septique sans syndrome inflammatoire à H0, H24, H48 de la fièvre et les prélèvements bactériologiques (ECBU, hémocultures et ponction lombaire) et viraux usuels (VRS, PIV3, grippes A et B, métapneumovirus, adénovirus, rotavirus, entérovirus) étaient négatifs à H48. La fièvre persistait au-delà des 48 premières heures d’antibiothérapie. Les 8 enfants étaient nés à terme et aucun d’entre eux n’avait d’antécédent. Résultats de l’étude Cette étude a permis de conforter le tableau clinico-biologique de l’infection à HPeV-3 : - population de nourrissons de moins de 6 semaines ; - fièvre élevée au 1er plan, persistante de 2 à 5 jours, mal tolérée pour tous ; - atteinte cutanée pour 5 d’entre eux faite d’éruption maculo-papuleuse retardée (J3-J4) par rapport au début de la fièvre touchant le tronc et les extrémités, fugace (48 h-72 h) parfois associée à un œdème des extrémités; - atteinte neurologique constante et parfois inquiétante : hypotonie, irritabilité et geignements, hyperesthésie, dysesthésie. Cet état persistait plusieurs jours (6 jours pour 2 patients). Devant le tableau encéphalitique de ces nourrissons, la recherche d’HSV1 a été faite trois fois. Des convulsions sont possibles (1 patient) ou des malaises avec perte de contact sans mouvement anormal (1 patient). - atteinte digestive : diarrhée et/ou distension abdominale, spontanément résolutives. - contage : il est retrouvé une histoire de contage intrafamilial dans 7 cas. - anomalies paracliniques les plus souvent retrouvées : lymphopénie, neutropénie, cytolyse hépatique. Il n’y avait pas de syndrome inflammatoire à H0, H24, H48. Le LCR était toujours normal (cellularité, protéinorachie, glycorachie, bactériologie). Dans le LCR la PCR EV était négative et la PCR HPeV positive chez tous les patients. Il s’agissait du génotype HPeV-3. Ce dernier était également retrouvé dans l’aspiration nasopharyngée pour 5 patients, les selles pour 4 patients et le sérum pour 2 patients. Du fait de l’âge et de la gravité du tableau clinique initial, tous les patients ont reçu des antibiotiques (céphalosporines + aminosides) pour une durée de 1 à 6 jours. La durée d’hospitalisation variait de 4 à 8 jours. - Autres expériences L’HPeV-3 est le plus fréquent des parechovirus et concerne les nourrissons de moins de 3 mois [6,16]. Depuis 2005, de nombreuses publications dans des pays très variés [2,17-20] dont la France ont mis en exergue le rôle des HPeV-3 dans différents tableaux cliniques du jeune nourrisson : syndrome fébrile, tableau de sepsis, et plus rarement méningite, encéphalite néonatale, hépatite, tableau de choc infectieux. Une étude rétrospective menée au CHU de Lyon sur 1128 LCR d’enfants de moins de 5 ans hospitalisés entre janvier 2008 et décembre 2010 pour fièvre néonatale ou du nourrisson et/ou signes de méningite ou encéphalite a montré que 2,9 % des LCR étaient HPeV positifs ; l’âge médian des patients était de 26 jours et 86 % présentaient un syndrome fébrile avec ou sans critère de sepsis. Les infections à HPeV-3 pouvaient être associées à des tableaux cliniques sévères [6]. Il n’est pas possible d’isoler l’HPeV par la PCR EV usuelle du fait de leurs différences génétiques. La trousse R-gene est utilisée en routine depuis 2011 par les 2 laboratoires associés du CNR EV-HPeV (Centres Nationaux de Référence des Entérovirus et Parechovirus de Lyon du Pr B. Lina et de Clermont-Ferrand du Pr H. Peigue-Lafeuille). Cette technique a été évaluée à Clermont-Ferrand comparativement à la RT-PCR. Les 2 méthodes ont présenté une performance équivalente, excepté la grande faisabilité et rapidité d’obtention des résultats avec la trousse commerciale. Pour le génotypage, la technique repose sur le séquençage du gène codant pour la protéine VP1, optimisée au laboratoire de Virologie de Lyon. La principale particularité de cette infection, retrouvée dans notre expérience et dans la littérature [2,4,21,22] est la fièvre élevée, mal tolérée et prolongée au-delà de 48 h d’antibiothérapie. La connaissance de ce tableau clinique permettrait d’obtenir un diagnostic précoce par la recherche d’HPeV-3 avant la fin des 48 premières heures de fièvre, pour arrêter les antibiotiques et raccourcir la durée d’hospitalisation. La symptomatologie dans notre expérience limitée à 8 patients est superposable à celle retrouvée dans la littérature et en particulier l’atteinte cutanée [23] : éruption maculo-papuleuse apparaissant vers J3-J4 du début de la fièvre, atteignant les paumes et les plantes et disparaissant en quelques jours, en moyenne en 3 jours. Parmi les symptômes neurologiques, certains auteurs décrivent des convulsions fébriles et des anomalies de la substance blanche modérées à sévères, corrélées au devenir neurodéveloppemental. Aucun de nos patients n’a eu de réaction cellulaire dans le LCR. Des encéphalites et des états de mal convulsifs peuvent parfois être mortelles [18,21]. Une fièvre élevée mal tolérée pose le problème du diagnostic différentiel chez les nourrissons de moins de 3 mois : les infections bactériennes, les autres infections virales (entérovirus et HSV1/HSV2) ou même la maladie de Kawasaki devant la fièvre prolongée. Il est fréquent de retrouver un contage dans l’environnement familial proche. La transmission se fait préférentiellement sur un mode horizontal [1,18]. Figure N°1 Conclusion Les Entérovirus comme les Parechovirus peuvent être responsables de manifestations cliniques allant de la fièvre non spécifique à des infections du système nerveux central ou du tissu cardiaque. Les nouveau-nés sont particulièrement à risque d’infections sévères associant une atteinte de plusieurs organes. La diffusion de la PCR entérovirus en cas de méningite aseptique a permis une diminution de l’usage d’antibiotique et de la durée d’hospitalisation. La recherche du génome des HPeV n’est pas encore réalisée de façon courante dans les laboratoires de virologie clinique. Un diagnostic rapide d’infection à HPeV réalisé simultanément au génotypage des HPeV pourrait permettre d’arrêter rapidement la prescription d’antibiotiques et raccourcir la durée d’hospitalisation. Figure N°1. Arbre décisionnel pour une demande de PCR HPeV. Nourrissons de moins de 6 semaines + Fièvre élevée mal tolérée + Tableau neurologique Absence de syndrome inflammatoire Prélèvements bactériologiques négatifs PCR entérovirus négative PCR HPeV avec génotypage à la recherche d’HPeV-3 Références [1] Harvala H, Robertson I, Chieochansin T, et al. Specific association of human parechovirus type 3 with sepsis and fever in young infants, as identified by direct typing of cerebrospinal fluid samples. J Infect Dis 2009; 199:1753-60. [2] Boivin G, Abed Y, Boucher FD. Human parechovirus 3 and neonatal infections. Emerg Infect Dis 2005; 11:103-5. 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SYNDROMES D’ACTIVATION LYMPHOHISTIOCYTAIRES CONSTITUTIONNELS Par Despina Moshous 1,2,3, Geneviève de Saint Basile 2,3, Guilhem Cros 1,2, Sébastien Héritier 1,2, Maryline Chomton 1,2, Bénédicte Neven 1,2, Capucine Picard 1,2,4, Alain Fischer 1,2,3 et Stéphane Blanche 1,2. 1 Unité d’Immunologie, Hématologie et Rhumatologie Pédiatriques, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), Hôpital Necker – Enfants Malades, Paris 2 Université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité, Institut Imagine, Paris 3 INSERM U768, Paris 4 Centre d’Etude des Déficits Immunitaires, Hôpital Necker – Enfants Malades, Paris Auteur principal : Despina Moshous [email protected] Unité d'Immunologie, d'Hématologie et de Rhumatologie Pédiatriques Hôpital Necker-Enfants Malades 149, rue de Sèvres 75015 Paris Tél 01 44 49 48 23 Fax 01 42 73 28 96 Introduction Le syndrome d’activation lymphohistiocytaire ou hémophagocytose lymphohistiocytaire (HLH) est une pathologie inflammatoire rare et potentiellement létale causée par une prolifération non contrôlée de lymphocytes activés et de macrophages secrétant un excès de cytokines inflammatoires [1]. Cette réponse immune exagérée et incontrôlée est le plus souvent fatale en l’absence de traitement. Les manifestations cliniques associent une fièvre persistante, une (hépato)splénomégalie et des symptômes neurologiques, dont la nature peut être extrêmement variée (irritabilité, états confusionnels, fontanelle bombante, hypotonie ou hypertonie, convulsions et états de coma) [2]. Ces signes cliniques sont associés avec une pancytopénie (particulièrement une anémie et thrombopénie), une hypertriglycéridémie, une hypofibrinogénémie, une hyponatriémie, une hyperferritinémie et une hépatite avec cytolyse [3]. Le tableau clinique et biologique est causé par une réponse immune anormale et non-contrôlée qui entraine une activation et expansion de cellules T CD8+, d’histiocytes et de macrophages, responsable pour la phagocytose des cellules sanguines, appelée aussi « hémophagocytose », qu’on peut observer dans différents organes [4]. Les cellules T CD8+ activées et les macrophages peuvent infiltrer la rate, le foie, des ganglions, la moelle osseuse et le cerveau, provoquant ainsi une atteinte multi-viscérale sévère [1]. Les cellules activées produisent également des cytokines pro-inflammatoires comme l’Interféron gamma, l’Interleukin 6, l’Interleukin 18 et le TNFα (Tumor Necrosis Factor alpha). La libération de ces cytokines contribue au tableau clinique et biologique. Dans la petite enfance, le syndrome d’activation lymphohistiocytaire (aussi appelé syndrome d’activation macrophagique) survient le plus souvent dans le contexte d’un déficit immunitaire constitutionnel. La grande majorité de patients développe le syndrome d’activation lymphohistiocytaire tôt après la naissance, souvent après un intervalle libre de quelques mois ou plus rarement quelques années, mais il existe également des formes néonatales voire des formes débutant déjà in utero [5] ainsi que des formes rares qui ne se manifesteront qu’en âge adulte [6]. En dehors de formes néonatales, pour lesquelles on n’identifie en règle générale aucun facteur déclenchant, ce syndrome est souvent déclenché par une infection. On note en particulier des infections virales de type virus du groupe herpes, le plus souvent l’EBV, mais on peut également identifier le CMV, le HHV6, l’adénovirus ou d’autres agents infectieux. Génétique Les formes génétiques qui sont essentiellement caractérisées par l’hémophagocytose lymphohistiocytaire sont dénommées lymphohistiocytoses familiales (LHF). La transmission de la LHF se fait selon le mode autosomique récessif. Malgré une hétérogénéité importante sur le plan génétique, on observe une présentation clinique très homogène pour les patients atteints des différentes formes de LHF. L’approche thérapeutique est également la même pour toutes les formes. Sur le plan génétique, le premier locus identifié étant associé à la LHF est situé en 9q21.3-22. Cette forme a donc été appelée LHF de type 1. A ce jour, aucun gène responsable n’a été décrit dans cette région. Le(s) facteur(s) génétique(s) pour la LHF de type 1 restent donc à identifier. Des études récentes révèlent l'existence d'au moins quatre gènes différents (voir tableau 1), qui codent pour les protéines perforin PRF 1 (LHF de type 2) [7], MUNC 13.4 UNC 13D (LHF de type 3) [8], syntaxin 11 STX11 (LHF de type 4) [9] et MUNC18.2 ou « syntaxin-binding protein 2 » STXBP2 (LHF de type 5) [10,11] respectivement. Toutes ces protéines jouent un rôle clef dans la cytotoxicité lymphocytaire dépendantes des granules lytiques des cellules natural killer (NK) et lymphocytes T cytotoxiques [4], un mécanisme effecteur indispensable au fonctionnement de la machinerie lytique des lymphocytes au niveau de la synapse immunologique. Un défaut dans l’exocytose des granules lytiques résulte en une réponse immune anormale et non-contrôlée avec activation et expansion de cellules T CD8+, d’histiocytes et de macrophages. Pour les familles avec identification génétique du défaut, un diagnostic prénatal devient possible. En Europe, l’incidence des LHF est environ 1,2/1 000 000 enfants par an, ce qui correspond à environ 1 enfant atteint sur 50 000 naissances vivantes [12]. On peut s’attendre donc à environ 15 patients concernés par an en France. A ce nombre s’ajoutent d’autres conditions génétiques, dans lesquelles l’HLH est uniquement une manifestation au sein d’un tableau clinique plus complexe. Les manifestations observées dans ces pathologies incluent des déficits immunitaires, des anomalies des plaquettes et un albinisme partiel. Dans ces pathologies autosomiques récessives, les gènes concernés n’ont pas seulement une fonction importante pour la cytotoxicité lymphocytaire, mais également pour d’autres mécanismes biologiques. Les premières manifestations de type HLH apparaissent en règle générale plus tard que dans les formes de LHF de type I – V. Il s’agit du syndrome de Griscelli de type II, du syndrome de Chediak-Higashi et plus rarement du syndrome Hermansky-Pudlak type II. Finalement, il faut mentionner d’autres déficits immunitaires connus, tels que le syndrome lymphoprolifératif lié à l’X de type I (syndrome de Purtillo) et de type II [13,14], qui sont également associés à un risque élevé de développer un syndrome d’activation lymphohistiocytaire, surtout dans le contexte d’une infection à EBV. Il existe aussi des formes secondaires associées aux maladies inflammatoires, auto-immunes, malignes ou métaboliques [15], ce qui rend le diagnostic parfois difficile et peut retarder la prise en charge thérapeutique. Diagnostic Le diagnostic de syndrome d’activation lymphohistiocytaire est confirmé par un diagnostic moléculaire compatible avec LHF. Selon les recommandations de la « Histiocyte Society » [16], au moins 5 sur les 8 critères diagnostiques suivants doivent être remplis au diagnostic initial en l’absence d’un diagnostic génétique établi ou des antécédents familiaux. Des examens immunologiques spécifiques sont réalisés dans des laboratoires de référence qui devront être contactés en urgence devant toute suspicion de LHF. En cas d’albinisme associé, une analyse de cheveu sous le microscope est indiquée et peut apporter le diagnostic. Critères diagnostiques • Fièvre • Splénomégalie • Cytopénie (touchant au moins deux lignées cellulaires) o Hémoglobine < 9,0 g/dl o Plaquettes < 100 000/µl o Polynucléaires neutrophiles < 1 000/µl • Hypertriglycéridémie et/ou hypofibrinogénémie o Triglycérides a jeun ≥ 3 mmol/l o Fibrinogène ≤ 1,5g/l • Hémophagocytose retrouvée dans un prélèvement histologique (sans signe d’un processus malin) • Fonction NK diminuée ou absente • Ferritine ≥ 500 µg/l • CD25 soluble ≥ 2 400 U/ml Pièges diagnostiques et atteinte neurologique Une atteinte neurologique isolée peut précéder l’activation lymphohistiocytaire systémique ou même être le premier et unique signe d’une lymphohistiocytose familiale [17]. Dans une récente étude chez 46 enfants atteint de LHF, 3 (7 %) enfants ont eu une atteinte neurologique isolée, tandis que 29 (63 %) ont eu une atteinte neurologique en plus des signes cliniques généraux. Parmi les signes neurologiques les plus fréquemment observés, l’apparition de crises convulsives (35 %) et de troubles de la conscience (31 %) ont nécessité une prise en charge en réanimation [18]. Des explorations complémentaires par imagerie (IRM cérébrale avec injections et ponctions lombaires, en l’absence de contre-indication sur le plan neurologique, hématologique et d’hémostase) sont indispensables et doivent être réalisées en urgence, aussi chez l’enfant tout à fait asymptomatique sur le plan neurologique, car tout retard diagnostique d’une atteinte cérébrale peut être catastrophique pour l’enfant et laisser des séquelles importantes. Lors de la ponction lombaire, le LCR est anormal avec une pleiocytose et/ou hyperprotéinorachie et/ou hémophagocytose chez la moitié des enfants atteints. L’imagerie cérébrale devrait être relue par un neuro- radiologue expert, elle montre des lésions en hypersignal T2 souvent bilatérales, symétriques et périventriculaires. Le cervelet est souvent atteint contrairement aux noyaux gris centraux et au tronc cérébral qui sont plus rarement touchés. Traitement et pronostic Sans traitement spécifique, la lymphohistiocytose familiale est rapidement fatale, avec une survie médiane de seulement deux mois suite à un syndrome d’activation lymphohistiocytaire déclaré. En 1983, une survie à long terme de seulement 4 % a été reportée hors greffe [19]. Par la suite, un progrès important de la prise en charge thérapeutique a pu être obtenu. Seule la greffe de moelle osseuse permet de guérir cette pathologie. Elle doit être précédée de la mise en rémission de l'activation lymphohistiocytaire. Des injections intrathécales de méthotrexate servent à prévenir ou à traiter les atteintes neuroméningées. Il est primordial de prendre en charge également toute infection concomitante de manière rigoureuse, surtout des infections virales comme l’EBV (indication au traitement anti CD20) qui sont souvent le facteur déclenchant d’une activation lymphohistiocytaire. Le premier traitement proposé a consisté en une chimiothérapie fondée sur l’étoposide, des corticoïdes et des injections intrathécales de méthotrexate en cas d’atteinte neuro-méningée (protocole « HLH-94 ») afin d’induire une rémission du syndrome lymphohistiocytaire. La guérison définitive nécessite une greffe de moelle osseuse allogénique permettant une correction durable du déficit immunitaire sous-jacent. Les premiers résultats du protocole « HLH-94 », essai thérapeutique prospectif et multicentrique réalisé sur 119 patients avec LHF, montrent une survie globale de 55 % [20]. Dans cette étude, on note une mortalité importante avant la greffe ainsi que des complications sévères observées précocement après la greffe. En effet, on ne peut pas exclure des conséquences défavorables associées au traitement initial contenant une chimiothérapie myélotoxique par VP16. En 2004, le protocole « HLH-94 » a été remplacé par le protocole « HLH-2004 », avec l’association de la ciclosporine A au traitement initial ainsi l’ajout de la prednisolone dans les injections intrathécales par méthotrexate. L’expérience passée de notre centre dans le traitement de la LHF Une meilleure compréhension de la pathophysiologie de la LHF a permis de proposer des alternatives thérapeutiques au traitement de référence contenant le VP16. En effet, l'activation lymphocytaire surtout de type CD8+ est un élément primordial dans le syndrome d’activation lymphohistiocytaire. Le développement des anticorps polyclonaux anti-lymphocytaires ou sérum anti-lymphocytaire (SAL, appelé aussi anti-thymoglobuline ou ATG) a ouvert la voie pour un traitement ciblé afin d’agir au cœur de la maladie de manière très spécifique et d’éviter au maximum les effets secondaires. Ainsi, une étude pilote a été menée dans notre centre sur six patients et a démontré l’efficacité d’une immunothérapie associant le sérum anti-lymphocytaire (SAL à 10 mg/kg/jour sur 5 jours consécutifs) à un traitement par corticostéroïdes, suivi par une thérapie d’entretien par ciclosporine A. Une rémission systémique a pu être observée dans les six patients traités, dont cinq cas de rémission complète [21]. Ces résultats encourageants ont été confirmés lors de l’analyse d’une cohorte plus importante de patients traités dans notre centre entre 1982 et 2004 [22]. 48 patients consécutifs atteints de LHF ont été analysés de manière rétrospective. Pour les 15 patients traités entre 1982 et 1992, le traitement initial a consisté en une association de VP16, corticostéroïdes, ciclosporine et des injections intrathécales de méthotrexate. Puis, entre 1991 et 2004, 33 patients ont reçu une immunothérapie par corticostéroïdes et ciclosporine associée au SAL dans 26 cas. 7 patients qui présentaient un syndrome d’activation lymphohistiocytaire moins sévère n’ont pas reçu du SAL. Tous les 33 patients ont reçu un traitement par des injections intrathécales de méthotrexate. L’analyse rétrospective de ces patients montre une tendance vers une meilleure survie globale de 62 % pour les patients traités par l’immunothérapie comparée à une survie globale de 44 % pour les patients traités avant 1992 avec l’approche thérapeutique « standard » par chimiothérapie myélotoxique. Une analyse successive de 38 patients traités dans notre centre par SAL en première intention (n = 28) ou en deuxième intention (n = 10) entre 1991 et 2005 a pu montrer une toxicité immédiate acceptable (limitée à une fièvre et un inconfort), ainsi que des effets secondaires essentiellement d’ordre infectieux et contribuant aux décès de 4 patients [23]. Etant donné l’effet myélotoxique du traitement de référence « HLH-94 », une neutropénie importante est souvent observée pendant les premiers deux mois de ce protocole [20]. En revanche, les patients traités par SAL dans notre centre ne présentaient que rarement une neutropénie transitoire [23]. En ce qui concerne l’efficacité du traitement par SAL, on observe une rémission complète dans 28 des 38 patients traités par le SAL (soit 73 %), comparé à un taux de rémission complète après 2 mois de traitement de référence « HLH-94 » de seulement 50 % [20]. A noter, que le taux de rémission complète obtenu dans les 28 patients traités par SAL en première intention est encore plus élevé car 23 sur les 28 patients présentent une rémission complète (soit 82 %) [23]. Le taux de survie globale pour l’ensemble des 38 patients était de 55 % (60,7 % pour les patients traités en première intention, 40 % pour les patients traités en deuxième intention) [23] ce qui est comparable au taux de survie globale observé lors du traitement de référence par le protocole HLH-94 [20]. Nouvelles approches thérapeutiques Malgré une amélioration considérable dans la prise en charge diagnostique (permettant l’initiation précoce d’un traitement spécifique) et thérapeutique, la mortalité de la LHF reste importante et un nombre non négligeable de patients traités par les protocoles de référence HLH-94 ou HLH-2004 meurent avant la greffe. Selon l’analyse récente du protocole « HLH-94 » 72 de 249 patients inclus sont décédés pendant le traitement initial ce qui correspond à un taux de survie de 71 % jusqu’à la greffe [16]. 124 patients des 177 patients survivants ont été greffés, la survie de 5 ans postgreffe de moelle était de 66 ± 9 %, la survie globale était de 54 ± 6 %. Fondé sur nos observations précédentes concernant l’utilisation du sérum anti-lymphocytaire pour le traitement initial des patients atteints de LHF, nous proposons une nouvelle stratégie thérapeutique par l’alemtuzumab en première ligne associé aux corticoïdes et à la ciclosporine A. L’alemtuzumab (MabCampath®) est un anticorps monoclonal humanisé dirigé contre la molécule de surface CD52 qui est présent à la surface des lymphocytes matures et des cellules dendritiques. En revanche, les cellules souches hématopoïétiques ainsi que les cellules de la lignée myéloïde n’expriment pas de CD52 à leur surface, à l’exception des éosinophiles et des monocytes/macrophages [24]. Il y a peu de données publiées concernant l’utilisation de l’alemtuzumab dans les syndromes d’activations lymphohistiocytaires. On note l’observation de quelques patients en âge pédiatrique qui ont montré une réponse favorable suite au traitement par alemtuzumab en deuxième intention [25]. Notre proposition thérapeutique de l’utilisation de l’alemtuzumab en première intention dans le LHF est fondée sur l’hypothèse que l’alemtuzumab, capable de tuer des lymphocytes T de manière efficace in vivo, devrait être mieux toléré que le SAL. En effet, contrairement au mécanisme d’action du SAL, l’alemtuzumab n’active pas les lymphocytes T. Nous attendons ainsi une meilleure tolérance et efficacité de l’alemtuzumab dans le traitement de l’activation lymphohistiocytaire, qui pourrait se traduire par une amélioration de la survie jusqu’à la greffe, mais également par une augmentation de la survie globale et de la qualité de vie quant aux éventuelles séquelles neurologiques. Dans une étude pilote menée dans notre unité, dix patients ont été traités par l’alemtuzumab en première intention en association avec un traitement par corticostéroïdes et ciclosporine A (manuscrit en préparation). Il s’agit de patients qui ont présenté un syndrome d’activation lymphohistiocytaire dans les premiers mois de vie (entre l’âge de 0 et 527 jours, âge médian de 33 jours). Quatre patients présentaient une atteinte cérébrale au moment du diagnostic. Des mutations dans les gènes connus d’être responsables de la LHF ont été identifiées chez tous les patients : PRF1 dans 6 cas, UNC13D dans 2 cas, STX11 dans 1 cas et STXBP2 dans 1 cas respectivement. Les résultats préliminaires pour ces dix patients traités par l’alemtuzumab sont encourageants. Notamment nous avons observé 100 % de survie jusqu’à la greffe et une survie de 70 % après la greffe. Une rémission complète avant la greffe a pu être obtenue chez 70 % des patients, une rémission partielle chez deux autres patients (20 %), qui ont été greffés après un traitement de deuxième ligne par SAL. Dans cette première série, un seul patient n’a pas répondu au traitement par alemtuzumab en première ligne, ni à un traitement par VP16 ou SAL, il est décédé a distance d’une greffe de cellules souches hématopoïétiques T déplétée d’un parent haplo-identique. Nous avons observé peu de complications liées à l’apparition et/ou réactivation d’infections virales, mais il faut rester prudent dans notre analyse étant donné le nombre restreint de patients traités jusqu'à ce jour. En conclusion, les résultats préliminaires de notre étude pilote portant sur dix patients sont prometteurs, raison pour laquelle nous proposons une étude prospective, multicentrique non randomisée, sur l’utilisation de l’alemtuzumab en première intention dans les LHF dans le cadre d’un PHRCN. Cette étude concerne les patients (< 16 ans) sans traitement spécifique préalable ou sous traitement par corticoïdes et/ou ciclosporine qui présentent un premier épisode de syndrome d’activation lymphohistiocytaire dans le contexte d’une lymphohistiocytose familiale (LHF), confirmée ou suspectée. Les résultats seront comparés aux résultats obtenus par le traitement de référence, le protocole HLH-94 /HLH-2004. Greffe des cellules souches hématopoïétiques et complications La survie postgreffe est bien meilleure en cas d’un donneur géno-identique, mais peu de patients ont un frère ou une sœur géno-identique. La qualité de la rémission au moment de la greffe est un facteur très important pour la survie, surtout en cas de donneur volontaire phéno-identique ou de donneur haplo-identique. La greffe nécessite une chimiothérapie préalable. Selon la compatibilité du donneur l’intensité de ce conditionnement pré-greffe sera variable, habituellement on utilise des protocoles contenant du Busulfan iv et Fludarabine, mais des chimiothérapies d’intensité réduite ont également été utilisées. Les patients greffés vont présenter les complications habituelles observées lors d’une greffe de moelle, mais il semble que la survenue de maladie veino-occlusive et d’atteinte pulmonaire inflammatoire et/ou hypertension artérielle pulmonaire soit plus importante chez les patients atteints de LHF. Un contrôle de la LHF postgreffe ne nécessite pas de chimérisme donneur complet, et un chimérisme stable entre 10 et 20 % de cellules de donneur semble suffisant pour garantir une survie sans maladie. Conclusions Toute suspicion de lymphohistiocytose familiale est une urgence diagnostique et thérapeutique et nécessite un contact immédiat avec un centre de référence. Des formes tardives ou neurologiques isolées sont un challenge diagnostique. A ce jour, la greffe de cellules souches hématopoïétiques reste le seul traitement curatif. Tableau 1 : Classification des déficits immunitaires avec syndrome d’activation lymphohistiocytaire Défaut génétique (protein) Forme Lymphohistiocytose familiale PRF1 (perforin) UNC13D (MUNC13-4) STX11 (syntaxin 11) STXBP2 (MUNC18-2) FHL2 FHL3 FHL4 FHL5 Syndromes avec albinisme RAB27A (RAB27A) LYST (LYST) AP3B1 AP3B1 Maladie de Griscelli (type 2) Syndrome de Chediak-Higashi Syndrome de Hermansky-Pudlak type 2 Syndrome lymphoprolifératif lié à l'X SH2D1A (SAP) X-linked lymphoproliferative disease (XLP) 1 XIAP (BIRC4) XLP 2 Références bibliographiques 1. de Saint Basile G, Menasche G, Latour S. Inherited defects causing hemophagocytic lymphohistiocytic syndrome. Annals of the New York Academy of Sciences 2011;1246(1):64-76. 2. Henter JI, Elinder G, Ost A. Diagnostic guidelines for hemophagocytic lymphohistiocytosis. The FHL Study Group of the Histiocyte Society. Seminars in oncology 1991;18(1):29-33. 3. Henter JI, Elinder G, Soder O, Hansson M, Andersson B, Andersson U. 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Lumbroso- Le Rouic (b), M. Gauthier-Villars (c), H. Brisse (d), F Doz (a, f) Départements d’oncologie pédiatrique (a), oncologie oculaire (b), génétique (c), imagerie médicale (d) et oncologie radiothérapie (e), Institut Curie, Paris. Université Paris Descartes, Sorbonne, Paris Cité (f) Adresse de l’auteur principal : Dr Isabelle Aerts, Département de pédiatrie, Institut Curie, 26 rue d’ulm 75005 Paris. [email protected] Introduction Epidémiologie Le rétinoblastome est une tumeur rare dont l’incidence est 1/15000-20000 naissances par an, mais reste la tumeur maligne intraoculaire la plus fréquente chez l’enfant [1] . Dans environ 60 % des cas, le rétinoblastome est unilatéral avec un âge médian au diagnostic de 2 ans. Il est bilatéral dans 40 % des cas avec un âge médian au diagnostic de 1 an. Des facteurs de risque infectieux ou environnementaux favorisant la survenue du rétinoblastome ont été rapportés mais ne peuvent être aujourd’hui considérés comme établis. La survenue plus fréquente de rétinoblastomes chez les enfants nés de grossesses par procréation médicalement assistée a été signalée mais non confirmée [2,3]. L’exposition au tabac avant la grossesse et l’âge maternel pourraient influer sur le risque de rétinoblastome [3]. Génétique Le rétinoblastome est le plus souvent sporadique, isolé (dans 90 % des cas). Il existe des formes familiales dans 10 % des cas. En 1971, Knudson a émis l’hypothèse selon laquelle deux évènements génétiques sont nécessaires au développement du rétinoblastome. Certains patients sont porteurs d’une altération génétique constitutionnelle correspondant à une prédisposition génétique. Le gène responsable de la prédisposition au rétinoblastome (RB1) est le premier gène suppresseur de tumeurs identifié. Le gène RB1, constitué de 27 exons, code pour une protéine phosphorylée de 110 KD. RB1 a un rôle de régulation du cycle cellulaire (transition phase G1-S). Une perte ou une mutation des deux allèles du gène RB1, localisé au niveau du chromosome 13q1.4 [4], est nécessaire pour que la tumeur survienne. Dans 90 % des formes unilatérales sporadiques, il existe une inactivation somatique des deux allèles de RB1 présente uniquement au niveau des cellules rétiniennes. Les patients porteurs d’une prédisposition au rétinoblastome correspondent aux patients ayant une forme familiale ou bilatérale sporadique, sans oublier 10 % de ceux atteints d’une forme unilatérale sporadique. Les patients, dans ce cas, sont porteurs d’une mutation constitutionnelle de RB1 présente dans toutes les cellules de l’organisme et d’une altération somatique du gène RB1 acquise au niveau des cellules rétiniennes. Ces patients ont un risque de 50 % de transmettre cette mutation constitutionnelle de RB1 à leur descendance. On retient qu’un enfant recevant cette prédisposition a un risque de l’ordre de 90 % de développer un rétinoblastome dans la petite enfance. Des études génétiques somatiques du caryotype et en CGH arrays effectuées au niveau des tumeurs de rétinoblastome ont mis en évidence que d’autres évènements génétiques en plus de la perte de RB1 sont nécessaires au développement tumoral (+1q, +6p, -16, -16q, -17, -17p) [5]. Des gènes modificateurs comme MDM2 interviendraient également dans la survenue du rétinoblastome [6]. Circonstances de découverte et modalités du diagnostic Les deux signes cliniques révélateurs majeurs et encore trop souvent méconnus sont la leucocorie et le strabisme. La leucocorie (reflet blanc pupillaire, en « œil de chat ») correspond à la visualisation directe de la tumeur à travers l’aire pupillaire ; elle est souvent inconstante au début de la maladie, seulement visible selon certains angles et certaines conditions lumineuses (Photo 1). Elle peut également être révélée sur des photographies au flash. Il suffit que les parents signalent un tel symptôme, même s’il n’est pas observé à l’examen clinique, pour devoir adresser l’enfant sans délai à un ophtalmologiste afin de procéder à un examen du fond d’œil après dilatation pupillaire. Le strabisme, qu’il soit signalé par les parents ou observé par le médecin, ne doit pas non plus être négligé. Un strabisme, même intermittent, impose une consultation urgente en ophtalmologie avec examen du fond d’œil ; dans le cas du rétinoblastome, il traduit l’existence d’une atteinte maculaire. Trop souvent encore, ces symptômes sont signalés par les parents mais ne sont pas pris en considération par les médecins ; ils sont retrouvés rétrospectivement, lorsque le diagnostic de rétinoblastome est finalement posé quelques mois plus tard. Pourtant une prise en compte précoce de ces symptômes peut permettre un diagnostic au moment où le volume tumoral intraoculaire est moindre et où la morbidité des traitements peut être diminuée. D’autres signes beaucoup moins fréquents peuvent être observés : rubéose irienne, hypopion, hyphéma, buphtalmie, uvéite, cellulite orbitaire, exophtalmie. Un dépistage systématique dans le cadre d’une prédisposition familiale ou d’un syndrome malformatif avec délétion du chromosome 13q peut également amener à faire le diagnostic [7]. Le diagnostic repose essentiellement sur l’examen du fond d’œil (FO) sous anesthésie générale en ophtalmoscopie indirecte, mettant en évidence une tumeur blanchâtre, en relief avec dilatation angiomateuse des vaisseaux (Photo 2). Cet examen, avec mémorisation des images du fond d’oeil grâce à la caméra spécifique grand angle RETCAM®, permet le bilan précis des lésions intraoculaires et d’en déterminer le groupe pour chaque œil soit selon la classification de Reese-Elworth, soit selon une classification plus récemment publiée (IRC : International Retinoblastoma Classification) [8]. Par ailleurs des examens radiologiques peuvent contribuer à établir le diagnostic. L’échographie oculaire, souvent réalisée dans le même temps anesthésique que le FO, met typiquement en évidence une masse échogène contenant de fines calcifications dans 95 % des cas, argument diagnostique essentiel lorsque le FO est d’interprétation difficile. Un décollement de rétine peut être observé dans les formes exophytiques. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est indispensable pour le bilan d’extension local et la recherche de lésions intracrâniennes éventuellement associées [9]. Le scanner ne doit plus être réalisé si l’accès rapide à l’IRM est possible car toutes les techniques exposant aux rayonnements ionisants doivent être évitées sur ce terrain. En outre la TDM est beaucoup moins performante que l’IRM pour le staging local. L’IRM a pour principal objectif d’évaluer l’extension au nerf optique (NO) (Photo 3) [10] (les autres atteintes extraoculaires sont rares) et de dépister les rares cas de rétinoblastome trilatéral (rétinoblastome bilatéral associé à une tumeur neuroectodermique primitive de localisation pinéale ou suprasellaire) [11]. L’imagerie contribue également au diagnostic différentiel avec certaines pathologies pseudotumorales (maladie de Coats, infection oculaire à toxocara canis, persistance du vitré primitif, dysplasies rétiniennes). Un bilan d’extension à distance (ponction lombaire, myélogrammes, biopsies ostéomédullaires) n’est nécessaire que lorsque après énucléation certains facteurs de risque histopathologiques sont mis en évidence. Une classification internationale intégrant l’extension locorégionale et à distance est actuellement utilisée [12]. Prise en charge thérapeutique Traitement du rétinoblastome unilatéral étendu intraoculaire Quatre vingt pour cent des patients atteints de rétinoblastome unilatéral doivent encore être traités par énucléation première car l’extension intraoculaire ne permet pas de traitement conservateur. L’énucléation doit être réalisée sans effraction oculaire, avec une section du nerf optique suffisamment postérieure, et la mise en place d’un implant intraorbitaire, le plus souvent de type hydroxy-apatite. Un examen anatomo-pathologique standardisé, examinant l’ensemble du globe oculaire et le trajet du nerf optique, associé à des prélèvements tumoraux permettant des études moléculaires (pouvant permettre de contribuer précieusement à l’information génétique des patients et de leur famille) sont réalisés [13]. L’indication d’un traitement adjuvant dont l’objectif est de limiter les risques de rechutes extraoculaires, est débattue, basée sur les résultats de l’analyse histopathologique de la pièce d’énucléation [14]. Dans la majorité des cas, aucune chimiothérapie postopératoire n’est nécessaire. Plusieurs associations de médicaments de chimiothérapie sont utilisées, principalement carboplatine-étoposide et vincristine-cyclophosphamide ± doxorubicine. Une irradiation orbitaire est effectuée en cas de résection microscopique incomplète (atteinte de la tranche de section du nerf optique ou extension extrasclérale lors de la rupture peropératoire accidentelle de l’œil dans l’orbite) ; elle peut être réalisée par radiothérapie externe interstitielle. Traitements des formes extraoculaires L’extension extraoculaire du rétinoblastome peut être locorégionale (tissus mous de l’orbite, adénopathies cervicales et prétragiennes) et/ou métastatique (essentiellement ostéomédullaire, système nerveux central). Ces formes devenues rares dans les pays industrialisés sont encore fréquentes dans les pays en voie de développement [15]. Dans le cas particulier et rare d’un rétinoblastome étendu avec atteinte du nerf optique intra-orbitaire détectable sur l’imagerie initiale, on réalise actuellement une chimiothérapie première suivie d’une énucléation à double équipe neurochirurgicale et ophtalmologique permettant la section du nerf optique en zone saine, l’énucléation avec préservation des muscles oculo-moteurs et la mise en place d’un implant orbitaire ; le traitement se poursuit par une chimiothérapie postopératoire [16]. L’utilisation de chimiothérapie intensive à base de carboplatine haute dose suivie d’une réinjection de cellules souches périphériques a nettement amélioré le pronostic des formes métastatiques en dehors des formes avec atteintes neuroméningées qui restent de pronostic péjoratif [17]. Traitements conservateurs des rétinoblastomes Dans les pays industrialisés, ces traitements sont presque toujours choisis, au moins pour un côté, dans les formes bilatérales. Ils sont également tentés de plus en plus souvent dans les formes unilatérales en cas de petite tumeur, ou survenant chez un très jeune enfant, notamment dans le cadre d’un dépistage, et donc dans un contexte de risque de développer un rétinoblastome bilatéral métachrone, c’est-à-dire décalé dans le temps. Le choix du traitement conservateur dépend du nombre de tumeurs, de leur situation en rapport avec la macula et l’implantation du NO, de la présence d’un décollement de rétine partiel ou total, de la présence d’un envahissement du vitré et des espaces sous rétiniens, de l’âge au diagnostic et de l’existence d’antécédents familiaux. Actuellement, seul un tiers des patients atteints de rétinoblastome bilatéral peut bénéficier d’un traitement conservateur des deux yeux. Le premier des traitements conservateurs à avoir été utilisé est la radiothérapie externe. Cependant son indication a largement diminué en raison des nombreux effets secondaires : troubles de croissance orbito-faciale, séquelles ophtalmologiques (rétinopathie, cataracte, syndrome sec), et endocriniennes, mais surtout augmentation du risque de deuxième cancer [18]. Cependant ce traitement reste indiqué pour préserver la vision dans certaines situations cliniques particulières (tumeurs massives, atteintes vitréennes diffuses et rechutes après traitement conservateur). D’autres méthodes conservatrices oculaires ont été développées : cryothérapie, curiethérapie par disque d’iode, thermochimiothérapie transpupillaire, chimiothérapie systémique ou locale. Une chimiothérapie néoadjuvante peut être administrée de manière à rendre les tumeurs accessibles à un traitement conservateur [19]. Les agents cytotoxiques actuellement utilisés sont des associations de deux ou trois médicaments (vincristine, étoposide, carboplatine). Le choix des médicaments et la fréquence des cycles varient d’une institution à l’autre. En cas de tumeurs paramaculaires, la chimiothérapie seule a été rapportée afin de tenter d’éviter des dommages maculaires par le laser [20]. Après chimiothérapie néoadjuvante, dans la plupart des cas, un traitement ophtalmologique local est effectué : thermothérapie, combinaison chimiothérapie–laser (thermochimiothérapie) pour les tumeurs du pôle postérieur ; cryothérapie et curiethérapie par disque d’iode ou ruthenium pour les tumeurs antérieures. En cas d’essaimage vitréen diffus, la radiothérapie externe reste nécessaire. De nouvelles approches thérapeutiques par injections intravitréennes [21], intra-artérielles de chimiothérapie [22] montrent des résultats encourageants mais méritent une évaluation prospective multicentrique. Pronostic, surveillance Le pourcentage de survie des patients atteints de rétinoblastome uni ou bilatéral est actuellement de 95 % dans les pays industrialisés. La vision doit autant que possible être préservée, dépendant du volume initial de la tumeur, de l’atteinte de la macula et du nerf optique et des effets secondaires des traitements. Dans les mois et les premières années qui suivent la fin du traitement, la surveillance ophtalmologique se poursuit sous anesthésie générale à un rythme mensuel puis elle est espacée progressivement mais maintenue au moins à un rythme trimestriel. Le but de ce suivi est de dépister le plus précocement possible les récidives intraoculaires ou les nouvelles tumeurs, afin d’augmenter les chances de préservation oculaire et visuelle. Un suivi pédiatrique est également nécessaire afin de dépister les séquelles liées au traitement (ototoxicité du carboplatine) [23]. Le handicap visuel doit également être pris en charge éventuellement dans des structures adaptées. Actuellement, la survie à long terme des patients atteints de formes héréditaires de rétinoblastome est menacée par le risque de survenue de tumeur secondaire [18]. Une étude de Kleinerman rapporte une incidence cumulative de tumeurs secondaires 50 ans après le diagnostic de 36 % pour les formes héréditaires et de 5,7 % pour les formes non héréditaires [24]. La radiothérapie externe, en particulier si elle est administrée avant la première année de vie, ainsi que la chimiothérapie potentialisent également ce risque. Les plus fréquentes des tumeurs décrites sont les ostéosarcomes de la face et des os longs, les sarcomes de tissus mous ainsi que les mélanomes cutanés. Il est important d’informer les familles et les patients eux-mêmes sur l’attention à apporter aux symptômes possibles de ces deuxièmes tumeurs et de leur suggérer d’éviter les conduites majorant le risque, telles que le tabagisme ou l’exposition solaire excessive. Information génétique Une consultation d’information génétique doit être proposée à tous les parents d’enfants atteints de rétinoblastome et pour tout patient ayant une histoire personnelle ou familiale de rétinoblastome. Le jeune âge au diagnostic, le caractère multifocal de la tumeur, la présence d’un retard psychomoteur, un syndrome malformatif, des antécédents familiaux de rétinoblastome et rétinome (lésion cicatricielle choriorétinienne correspondant à un rétinoblastome spontanément régressif) chez un des parents sont des arguments en faveur d’une prédisposition génétique au rétinoblastome. Dans les cas de rétinoblastome héréditaire, le risque de transmission à la descendance est de 50 %. Un rythme de surveillance des FO est proposé en fonction de la probabilité de prédisposition. Diverses études génétiques peuvent être proposées : recherche directe d’une mutation constitutionnelle du gène RB1 [25]; étude familiale indirecte par recherche de l’allèle porteur de la mutation de RB1 en cas d’antécédent familial, étude de la perte d’hétérozygotie au niveau tumoral permettant d’identifier l’allèle restant et porteur de la mutation. Un diagnostic anténatal peut être proposé dans les cas de rétinoblastome héréditaire avec mutation constitutionnelle du gène RB1 identifiée ou une étude familiale indirecte. Certaines équipes proposent également le diagnostic préimplantatoire du rétinoblastome dans les familles prédisposées [26]. Conclusion Le rétinoblastome est une affection maligne dont le pronostic vital est bon dans les pays industrialisés et dont les enjeux sont avant tout la préservation oculaire et visuelle ainsi que le risque de deuxième tumeur. Dans les pays émergeants, le pronostic vital reste très souvent engagé, souvent du fait d’un diagnostic tardif. Ainsi il apparaît nécessaire d’améliorer la précocité de la prise en charge en prenant en compte les symptômes signalés par les parents et en proposant de façon systématique à tout parent d’enfant atteint de rétinoblastome, une consultation d’information génétique. La prise en charge doit être pluridisciplinaire afin de permettre en premier lieu de préserver la vie mais aussi autant que possible les yeux et la vision, tout en minimisant le risque de second cancer. Photo n°1 La leucocorie, circonstance de découverte fréquente : La tumeur apparaît visible sous forme d’un reflet blanc dans la pupille Photos n°2 et 3 Le diagnostic : l’examen du fond d’œil montre la tumeur blanchâtre, retrouvée en IRM (séquence sagittale pondérée T2) sous forme d'une masse tissulaire contenant des microcalcifications (forme exophytique avec décollement de rétine). Références 1. Aerts I, Lumbroso-Le Rouic L, Gauthier-Villars M, Brisse H, Doz F, Desjardins L. Retinoblastoma. Orphanet J Rare Dis 2006;1:31. 2. Moll AC, Imhof SM, Cruysberg JR, Schouten-van Meeteren AY, Boers M, van Leeuwen FE. Incidence of retinoblastoma in children born after in-vitro fertilisation. Lancet 2003;361:309-10. 3. Foix-L'Helias L, Aerts I, Marchand L, et al. 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Service de Chirurgie Viscérale et Urologie Pédiatrique, Hôpital Robert Debré, Paris, France; *Service de Néphrologie Pédiatrique, Hôpital Robert Debré, Paris, France; Université Diderot, Paris 7. [email protected] Introduction 3 % des enfants présentent des lithiases urinaires (calculs) dans les pays occidentaux mais 30 % dans les pays en développement [1], et dans plus de la moitié des cas, ces calculs sont localisés dans le rein. Leur fréquence augmente depuis les dix dernières années [2]. On peut les découvrir à l’occasion d’une infection urinaire ou lors de douleurs abdominales ou lombaires (colique néphrétique) ou lors d’une échographie. Ces calculs peuvent s’évacuer de façon spontanée dans seulement moins de 30 % des cas et la majorité de ces patients nécessitent une prise en charge chirurgicale. Il existe de nombreuses techniques chirurgicales qui vont de la lithotritie extracorporelle (LEC) non invasive, aux techniques endoscopiques en plein essor, en passant par la chirurgie plus classique par laparoscopie ou voie ouverte (quasiment abandonnée actuellement). Un statut « stone-free » est défini par la présence de débris calculeux de moins de 4 mm. Ces différentes techniques, leurs indications, leurs complications vont être décrites. Circonstances de découverte. Bilan initial Des lithiases urinaires sont parfois diagnostiquées en urgence, en cas de pyélonéphrite obstructive, colique néphrétique ou plus exceptionnellement en cas d’anurie et insuffisance rénale en raison de lithiases obstructives bilatérales. Ces situations nécessitent une prise en charge chirurgicale initiale en urgence pour dériver les urines (mise en place de sonde double J ou néphrostomie) avant de traiter secondairement les lithiases. D’autres situations cliniques peuvent aussi permettre de diagnostiquer des calculs des voies urinaires comme une hématurie, des douleurs lombaires ou des infections urinaires récidivantes. Elles peuvent aussi compliquer une uropathie obstructive (défaut de drainage des urines). Parfois, des lithiases sont découvertes de façon fortuite lors d’une échographie abdominale ou d’un ASP. Un bilan complet (radiologique et métabolique) devra être effectué pour éliminer une pathologie rénale sous-jacente ou une malformation urinaire (syndrome de jonction pyélo-urétéral). C’est la raison pour laquelle, la prise en charge des lithiases urinaires de l’enfant est pluridisciplinaire et implique le néphrologue, l’urologue pédiatre, le radiologue et le biochimiste. Le bilan initial radiologique comporte un ASP (image 1) et une échographie vésicorénale permettant de préciser la localisation, le nombre, la taille du ou des calculs et connaître son caractère calcifié ou non. Quelquefois, ces calculs sont difficiles à mettre en évidence nécessitant la réalisation d’un scanner (TDM) utilisé en pratique courante chez l’adulte, moins chez l’enfant en raison de l’exposition aux radiations. Il s’agira aussi de savoir si le ou les calculs sont obstructifs. Une scintigraphie au DMSA sera aussi nécessaire pour évaluer la fonction de chaque rein en début de traitement et lors du suivi à moyen et long terme. Un bilan biologique complet est nécessaire avant toute prise en charge afin de chercher une maladie métabolique accessible à un traitement médical (cystinurie, hyperoxalurie, hypercalciurie, hyperuricurie..). Les lithiases de l’enfant peuvent être secondaires à des infections des voies urinaires (germe Proteus Mirabilis) ce qui représente 50 à 70 % des cas en Europe. Les calculs phosphatiques sont fréquents chez les enfants de moins de deux ans alors que les calculs oxalocalciques sont plus fréquents après l’âge de deux ans. Bilan préopératoire : examen des urines, bilan biologique (urée créatinine, hémostase, numération formule sanguine), examens radiologiques. Comment traiter les calculs ? Différents critères devront être appréciés avant de décider de la prise en charge chirurgicale : - taille du calcul (moins de 10 mm, entre 10 et 20 mmm ou plus de 20 mm) - Nombre de calculs - Localisation : en intrarénal (pyélon, calice supérieur, moyen, inférieur), urétéral, (lombaire ou pelvien), vésical - composition du calcul : « dur » cystine, Ca Ox monohydrate ; Brushite ou > 1000 HU au TDM - Patient, âge, sexe, pathologie sous-jacente - Expérience du chirurgien - matériel chirurgical disponible Quels calculs traiter ? Ceux qui sont symptomatiques, avec infections récidivantes ou non, avec obstruction (dilatation rénale, colique néphrétique). On surveillera les calculs non symptomatiques de petite taille < 3-4 mm. Les calculs sont ensuite recueillis et analysés afin de connaître leur composition exacte. Ce résultat donne en général une orientation très fiable sur la maladie causale des calculs et ne doit pas être manqué. Brièvement, les maladies à l’origine de la formation des calculs sont les infections urinaires (50 % des calculs), les troubles du métabolisme du calcium, de l’acide oxalique (acide contenu dans certains végétaux comme les épinards ou la rhubarbe), de l’acide urique (l’acide responsable de la goutte), de la cystine (qui est un des 21 acides aminés qui forment nos protéines). Lithotritie extracorporelle. (LEC) La LEC permet grâce à des ondes de choc de casser les calculs dans le rein ou l’uretère de façon non invasive (pas de cicatrices). Cette technique est faite sous anesthésie générale chez l’enfant et nécessite une hospitalisation de 48 heures permettant de surveiller la bonne tolérance postopératoire, récupérer des débris calculeux par tamisage des urines. Le repérage du ou des calculs est fait sous amplificateur de brillance si le calcul est radio-opaque ou sous échographie dans le cas contraire. Une hyperhydratation par voie intraveineuse est habituellement prescrite pour 48 heures facilitant l’évacuation des calculs par hyperdiurèse sous surveillance médicale. Il est contre-indiqué de faire une LEC en cas d’infection urinaire, de troubles de l’hémostase, ou en cas de calcul obstructif sur le haut appareil urinaire ; dans ce cas une dérivation interne des urines par montée endoscopique de sonde JJ sera nécessaire au préalable. La LEC peut être faite quel que soit l’âge de l’enfant (image 2) et plusieurs séances peuvent être nécessaires pour éliminer la totalité des calculs. Les meilleures indications de la LEC sont les calculs intrarénaux de moins de 15 mm, surtout pyéliques avec un taux de réussite évalué à 85 %-91 % si calcul < 10 mm [3] et 68 %-84 % si < 15 mm Les limites de la LEC sont les calculs de grande taille (coraliforme) avec seulement 16 % de réussite en une seule session , ou multiples, ou ceux localisés dans le calice inférieur ce qui peut rendre leur évacuation difficile, ou les calculs de consistance dure comme ceux de cystine ou brushite ou de calcium monohydraté. Enfin on peut constater des taux variables de complications en fonction de la taille des calculs traités pouvant atteindre 25 % en cas de calculs de plus de 25 mm [4] : peuvent survenir des pyélonéphrites (1 à 5 %), la migration de calcul avec possibilité d’obstruction et nécessité de dérivation des urines en urgence (montée de sonde JJ endoscopique) 1 à 5 % [5] et des coliques néphrétiques 6 % [3] La survenue à long terme de cicatrices rénales reste non prouvée [6]. Traitement endoscopique L’endoscopie (mini caméra introduite par les voies naturelles) avec du matériel spécialisé (fibre de laser, petites pinces) permet de casser des calculs dans les voies urinaires au laser ou avec un lithoclaste et de les retirer avec du matériel adapté à la taille de l’enfant. On peut utiliser des urétéroscopes (URS) semi-rigides ou souples, l’avantage de l’urétéroscope souple (image 3) est qu’il permet d’explorer en totalité l’uretère et l’ensemble des cavités rénales, calice inférieur compris. L’URS semi rigide permet d’explorer la partie distale de l’uretère en dessous des vaisseaux iliaques, cependant, chez l’enfant, l’uretère est très compliant et on peut accéder aux cavités rénales avec un semi rigide. Cette technique se fait sous contrôle scopique et avec un laser YAG Holmium ou un lithoclaste pour fragmenter les calculs. Par la suite, on pourra récupérer les plus gros débris calculeux grâce à des petites sondes de dormia, les petits fragments millimétriques s’évacueront en postopératoire grâce à une hyperhydratation intraveineuse. Un ECBU stérile est recommandé avant chaque procédure limitant ainsi le risque d’infection urinaire postopératoire. Aussi, s’il est nécessaire, un drainage par sonde urétérale (double J) peut être mis en place par voie endoscopique en fin de procédure, ce qui permet de diminuer le risque de douleurs postopératoires ou de coliques néphrétiques [7]. Ce traitement, initialement indiqué en urologie adulte est actuellement accessible en pédiatrie grâce à la miniaturisation du matériel, cependant il exige une expertise chirurgicale importante et un matériel adapté à la taille de l’enfant. Ce traitement est actuellement proposé en première intention pour les calculs urétéraux [8] et est plus efficace que la LEC [9]. Une large série pluricentrique (642 patients) menée par Dogan [10] a montré une efficacité de l’URS à 90,3 %, ce résultat étant de 92,6 % en cas de calculs de l’uretère distal (plus accessible) et de 81 % en cas de calculs proximaux. Le taux de complications était de 8,4 % avec surtout des infections postopératoires et des coliques néphrétiques. Ce taux de complication était significativement corrélé à la durée d’intervention. Il a aussi été décrit quelques rares cas de perforation urétérale. Dans la littérature la complication la plus fréquente est la survenue d’infection postopératoire qui varie de 1 à 4 % [11] et ne nécessite pas de traitement chirurgical mais juste une antibiothérapie. Des reflux vésico-urétéraux et des sténoses urétérales ont été décrites (0,6 %) à moyen terme chez l’enfant [12] justifiant l’utilisation de matériel adapté à la taille de l’enfant ainsi que de l’expertise du chirurgien. L’URS aussi utilisé en cas d’échec de LEC pour les calculs rénaux et notamment pour des calculs de cystine par exemple pour lesquels la LEC est efficace dans 1/3 des cas (calculs de consistance très dure). Traitement percutané Il s’agit de la néphrolithotomie percutanée (NLPC) qui consiste à fractionner les calculs en intrarénal, en percutané grâce à une gaine d’accès introduite sous contrôle scopique, comme une sonde de néphrostomie. Cette technique largement utilisée en urologie adulte l’est beaucoup moins en pédiatrie. Elle nécessite aussi du matériel hyper spécialisé et adapté à la taille de l’enfant et de l’expertise de l’urologue pédiatre. Après ponction des cavités rénales sous contrôle scopique, une gaine d’introduction va être placée dans les cavités rénales pour y introduire une caméra et fractionner les calculs avec un laser ou un lithoclaste. Cette procédure nécessite au préalable la réalisation d’une opacification rétrograde (UPR) des cavités rénales par une endoscopie. La ponction des cavités rénales peut se faire en supracostal ou souscostal en fonction de l’anatomie des cavités rénales, de la taille de l’enfant. Elle est particulièrement indiquée en cas de calcul coraliforme, ou de calculs de plus de 20 mm, en cas d’échec de la LEC, et ce d’autant plus s’il existe une dilatation des cavités pyélocalicielles. Cette technique permet le plus souvent de traiter les calculs en une seule procédure 83,3 % [13]. Cependant, c’est une technique invasive (à travers le parenchyme rénal), dont on ne sait pas encore évaluer l’impact sur la croissance rénale et la survenue de cicatrices du parenchyme rénal à long terme chez les enfants opérés. Les complications per et postopératoires sont plus importantes que lors des autres techniques chirurgicales : on rapporte 8 à 24 % d’hémorragie per ou postopératoire nécessitant une transfusion [14] et 2 à 49 % d’infections postopératoires nécessitant donc, dans les deux cas, des durées d’hospitalisation prolongées. En cas de ponction suscostale, le risque d’entraîner un hydrothorax est de 12,5 % avec 4 % de drainage thoracique prolongé [15]. Enfin, il a aussi été décrit des plaies de la rate ou du foie [16]. L’importance de la morbidité de cette technique fait aussi que les urologues pédiatres l’utilisent moins que les techniques extracorporelles ou endoscopiques. Traitement laparoscopique Parfois une voie d’abord chirurgicale est nécessaire et est faite par coelioscopie ou rétropéritonéoscopie afin d’aborder directement le rein (bassinet) ou l’uretère et retirer des calculs de plus de 10 mm. Cette technique consiste à aborder le pyélon ou l’uretère par voie laparoscopique ou rétropéritonéoscopique. Cette technique permet de traiter en une seule fois 95 % des patients et peut entraîner 4,5 % d’urinomes postopératoires [17] et n’est utilisée que très rarement ou dans des centres n’ayant pas accès aux autres techniques ou parfois après échec d’autres techniques [18]. Chirurgie ouverte Cette voie d’abord n’est actuellement quasiment plus utilisée en raison des différentes techniques mini-invasives citées ci-dessus et peut être utilisée en dernier recours. Indications Les indications sont prioritairement définies en fonction de la localisation et de la taille du ou des calculs. Lors du « guidelines 2013 de l’ESPU et EAU », les recommandations sont les suivantes (tableau joint) : Pour les calculs pyéliques ou caliciels de moins de 10 mm, la LEC est indiquée en première intention, quelle que soit la composition du calcul. Pour les calculs pyéliques ou caliciels de 10 à 20 mm, la LEC sera aussi proposée en première intention avec la nécessité de plusieurs séances. Si ces calculs sont multiples, on peut faire la NLPC ou l’URS en complément de la LEC. Pour les calculs urétéraux, l’URS est largement indiquée en première intention, ainsi que pour les calculs vésicaux, sauf en cas de calcul de grande taille (> 20 mm) pour lesquels une chirurgie mini-invasive peut être préférée. Conclusion Toutes ces techniques, extracorporelles et mini-invasives doivent être utilisées au sein d’un service d’urologie pédiatrique, en chirurgie « réglée » ou en urgence, en collaboration avec les néphrologues pédiatres et sont particulièrement adaptées à tous les enfants en fonction de leur âge et de l’existence de pathologies associées. La moitié des enfants présentent des récidives des calculs [19] et doivent être suivis par un néphrologue pédiatre et par un urologue pédiatre pour s’assurer de l’absence de complications à long terme en fonction des techniques utilisées. Tableau 1 : EAU/ESPU guidelines, 2013 (d’après Tekgul S.) Image 1: Lithiases bilatérales chez une fille de 10 ans avec une hyperoxalurie. (photo Dr Paye-Jaouen) Image 2 : LEC chez un enfant de 9 mois. (photo Dr Paye-Jaouen) Image 3 : Urétéroscope souple utilisé en pédiatrie.(photo Dr Paye-Jaouen). Bibliographie 1. Tellaloglu S, Ander H. Stones in children. Turk J Pediatr 1984, 26 ; 51-60. 2. VanDervoort K, Wiesen J, Frank R, et al. Urolithiasis in pediatric patients: a single center study of incidence, clinical presentation and outcome. J Urol 2007;177:2300-5. 3. Badawy A, and al. Extracorporeal shock wave lithotripsy as first line treatment for urinary tract stones in children: outcome of 500 cases Int Urol Nephrol (2012) 44:661–666. 4. Shouman AM, Ziada AM, Ghoneim IA, Morsi HA. Extracorporal Shock Wave Lithotrypsy monotherapy for renal stone > 25 mm in children. Urology, 2009 Jul;74(1):109-11. 5. Landau E et al. Extracorporeal Shock Wave Lithotripsy in Prepubertal Children: 22-Year Experience at a Single Institution With a Single Lithotriptor. J Urol 2009 Oct;182(4 Suppl):1835-9. 6. 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Clinical experience with pediatric urolithiasis. J Urol 1983;129:1166-8. LES NOUVEAUX TRAITEMENTS DE LA SCLEROSE EN PLAQUES DE L’ENFANT Par Marc Tardieu & Kumaran Deiva Centre national de référence des maladies inflammatoires du cerveau de l’enfant et Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Hôpitaux universitaires Paris Sud, Service de Neurologie pédiatrique. Adresse : 78 rue du général Leclerc 94275 Le Kremlin Bicêtre Cedex Adresse électronique : [email protected] Site internet www.nie-enfant.com Le nombre de molécules pharmacologiques ayant une efficacité démontrée dans la sclérose en plaques (SEP) de l’adulte a considérablement augmenté (Tableau 1). Les premières publications démontrant l’efficacité de traitements de la SEP datent de 1993. Chez des patients adultes, des injections d’interferons ‑ ou de glatiramère acétate réduisaient significativement le nombre de poussées cliniques, le nombre de lésions radiologiques et le handicap par comparaison à un placebo, au cours d’essais thérapeutiques en double aveugle sur deux ans. Un nouveau pas a été franchi au cours de ces 5 dernières années : quatre molécules différentes, ayant en commun d’agir par voie orale, ont démontré leur efficacité dans des essais comparatifs en double aveugle contre un placebo ou même pour certains contre un comparateur actif (en règle l’IFN‑). En parallèle, différents anticorps monoclonaux injectables empêchant la pénétration des lymphocytes dans le cerveau ou leur activation permettent une autre approche elle aussi efficace. Un récent consensus publié par l’International Pediatric Multiple Sclerosis Study Group, une instance de coordination internationale sous l’égide de la MS International Federation (MSIF), a établi que tout enfant doit être traité par un immunomodulateur dès que le diagnostic de SEP est établi [1]. Le but est d’utiliser les traitements immuno-modulateurs dans la phase initiale très inflammatoire de la maladie, période où ces molécules sont les plus efficaces. Les traitements de première ligne sont habituellement les interférons ou le glatiramère acétate qui sont sous forme injectable, et l’arrivée des nouvelles molécules en administration orale, augmente les choix thérapeutiques. Cependant, chez les enfants, toute utilisation hors Autorisation de Mise sur le Marché de ces nouvelles molécules est à éviter. En effet, la transposition des résultats obtenus chez l’adulte pour le traitement de la SEP de l’enfant n’est pas toujours évidente et cela nécessite des essais thérapeutiques pédiatriques évaluant l’efficacité, la dose nécessaire et les effets secondaires. La relative rareté de la maladie rend indispensable une coopération internationale. I. Préalables à la mise en place d’un traitement de SEP chez l’enfant A. La SEP de l’enfant est une maladie rare dont l’histoire naturelle a été établie Une sclérose en plaques peut être observée dès l’âge de 2 ans mais elle reste très rare jusqu’à l’âge de 10 ans, âge audelà duquel la fréquence augmente régulièrement. Dans la cohorte française, une des principales au monde, l’âge médian de début est 11,9 ans, 14 % des enfants ont un début avant 6 ans et 30 % avant 10 ans [2-6]. Comparée à la fréquence de survenue d’une SEP chez l’adulte, la survenue d’une SEP avant 16 ans est rare et ne représente que 3 à 10 % de toutes les SEP. L’incidence est de l’ordre de 0,18 à 0,5/100 000 enfants avec une variation selon les pays (incidence plus forte au Canada et au Royaume-Uni qu’en France par exemple). On peut estimer, à travers notre travail du centre national, à une quinzaine, le nombre de nouveaux cas de SEP de début avant 16 ans en France chaque année. La connaissance de l’histoire naturelle de la sclérose en plaques de l’enfant a considérablement progressé au cours de ces 10 dernières années grâce à l’établissement de grandes cohortes permettant un travail épidémiologique de qualité. Les principales cohortes ont été développées en France, au Canada, aux Pays-Bas puis plus récemment au RoyaumeUni et aux USA [2,3,7,8]. Elles sont de deux types : celles incluant tous les enfants dès leur première poussée démyélinisante de façon prospective pour ne retenir in fine que les enfants pour lequel le diagnostic de SEP est établi ; celles sélectionnant les adultes suivis dans des centres de sclérose en plaques et dont la première poussée a eu lieu avant 16 ans. Les résultats obtenus sont légèrement différents selon l’une ou l’autre de ces deux approches, ce qui est important pour leur interprétation (ainsi, l’âge moyen de début est toujours plus élevé dans les études partant d’adultes ayant une SEP). La cohorte française Kidsep a collecté tous les enfants de moins de 16 ans hospitalisés en France en neurologie pédiatrique pour un premier épisode démyélinisant d’allure inflammatoire. Nous avons observé que parmi les 467 enfants, 197 (42 %) ont présenté une nouvelle poussée et sont donc atteints d’une SEP [9]. Ce pourcentage est un peu inférieur dans d’autres cohortes, par probable différence de recrutement (entre autre différence de limite de l’âge supérieur d’inclusion à 16 ans ou 18 ans). La présentation clinique de la sclérose en plaques varie selon l’âge. Chez l’enfant pré-pubère, la première poussée peut prendre l’aspect d’une encéphalite aiguë identique à l’encéphalomyélite aiguë disséminée (souvent désignée par son acronyme anglais « ADEM »). L’ADEM est un syndrome caractérisé par un début brutal avec des troubles de la conscience, des signes neurologiques indiquant une atteinte disséminée touchant en particulier le tronc cérébral ou les noyaux gris. Une névrite optique est associée dans 9 % des cas et des crises convulsives ne sont pas rares (32 %). Il est maintenant bien établi à travers les grandes cohortes mondiales, que 10 à 18 % des enfants ayant une ADEM présentent par la suite une nouvelle atteinte démyélinisante d’allure inflammatoire et peuvent être qualifiés d’un diagnostic de SEP. D’après notre travail, le risque de SEP ultérieure est lié à la présence lors de la poussée initiale d’une névrite optique, d’une atteinte familiale de SEP et de différents critères IRM qui seront discutés plus loin [10]. Chez l’adolescent, cette présentation encéphalitique peut être observée mais elle est plus rare. Les signes habituels de SEP à cet âge sont similaires à ceux observés chez le jeune adulte. Tant chez l’enfant que l’adolescent, une SEP peut aussi débuter par une névrite optique, une myélite ou une atteinte sus-tentorielle sans trouble de la conscience (regroupés sous le terme de Syndrome Cliniquement Isolé). Le risque de récidive et d’évolution vers la SEP après un Syndrome Cliniquement Isolé varie selon le syndrome mais est très lié à la présence ou non de lésions de la substance blanche sur l’IRM encéphalique (le risque par exemple, d’évolution vers la SEP après une myélite est très faible si l’IRM cérébrale initiale est normale, comme cela est aussi le cas chez l’adulte). Deux examens principaux aident au diagnostic : l’analyse du LCR et les IRM cérébrale et médullaire : - L’examen du LCR, lors de la première poussée, met en évidence dans 43 % des cas, une méningite (> 10 cellules/‑l), dans 20 % une hyperprotéinorachie (> 0,50g/L) et dans 45 %, des bandes oligoclonales, ce dernier pourcentage étant très dépendant de la sensibilité de la technique utilisée et de l’âge de l’enfant. - En IRM, chez l’enfant jeune lorsque le début est de type ADEM, il est observé de larges plages de démyélinisation aux bords flous disséminées dans toute la substance blanche sus- et sous-tentorielle avec, dans 48 % des cas, des signes radiologiques d’atteintes des noyaux gris et, dans 22 % des cas, une atteinte corticale. Dans 15 à 30 % des cas, selon les séries, il existe une prise de contraste après injection de gadolinium. L’aspect radiologique des SEP de l’adolescent à leur début se rapproche de celui de l’adulte avec des lésions multiples sus- et sous-tentorielles touchant souvent le corps calleux et prenant pour certaines le produit de contraste. De nombreux travaux ont cherché à définir des caractéristiques radiologiques présentes sur l’IRM initiale associées à un risque élevé de récidive et donc de SEP [10-13]. Ces caractéristiques ont des sensibilités et des spécificités différentes, leur analyse détaillée dépasse le cadre de cette courte revue mais il s’agit principalement de : la présence d’au moins une image en hyposignal en T1 (signal analogue à celui du cortex) dans la substance blanche, la présence de lésions à limite nette dans la substance blanche en signal T2, la présence de lésions perpendiculaires au grand axe du cerveau et d’au moins une lésion périventriculaire. Un pronostic de gravité est possible dès le diagnostic de SEP. Nous avons pu établir que le sexe féminin, l’absence d’une altération de la conscience lors de la première poussée, la présence de certains critères IRM, un intervalle de moins de un an entre la première et la deuxième poussée, une évolution progressive sont associés à une plus grande gravité évolutive et un score combinant les facteurs a été établi [2]. La plupart des SEP de l’enfant évolue par poussées résolutives et très peu (9 % dans notre cohorte) deviennent secondairement progressives durant les premières années d’évolution. Le taux de rechute annuel se situe entre 0,9 et 1,4 rechutes/an durant les 2 à 5 premières années de maladie pour baisser ensuite et s’établir à 0,5 à 0,8 rechutes/an [14]. Le temps médian pour atteindre la première récidive après l’établissement du diagnostic de SEP est de 1,1 an avec 25 % des enfants rechutant dans les premiers 6 mois. Cependant une première rechute peut être très lointaine (jusqu’à 10 ans dans notre cohorte). L’évolution motrice est bonne durant les premières années dans la très grande majorité des cas. L’étude dérivée de la base Edmus a bien établi que le temps pour arriver à un handicap est plus long chez l’enfant que chez l’adulte (par exemple la durée médiane de maladie pour atteindre un handicap tel qu’un maximum de marche sans aide de 500 m, est de 20 ans chez l’enfant et de 10 ans chez l’adulte)[6]. Cependant le handicap surviendra à un âge chronologique plus jeune du fait de la précocité de début. Deux facteurs évolutifs sont encore mal précisés : - Les conséquences cognitives des poussées successives de SEP. Une atteinte cognitive, une gêne visuo-motrice, des troubles de l’attention sont maintenant bien décrits et observés chez au moins 30 % des enfants atteints de SEP [15,16]. Le nombre d’enfants en difficulté scolaire est supérieur chez les enfants ayant une SEP comparé à une population contrôle. Cependant, la cinétique de l’installation des troubles cognitifs dans les premières années de SEP de l’enfant n’est pas établie. Elle peut être différente selon l’âge de l’enfant au début de la maladie. - L’histoire naturelle de l’évolution radiologique n’est pas établie de façon certaine. Les résultats partiels sont très en faveur d’un nombre total de lésions supérieur chez l’enfant que chez l’adulte, d’un nombre supérieur de lésions prenant le gadolinium, probablement lié à une activité inflammatoire supérieure en début de maladie chez l’enfant à celle de l’adulte. Le rythme d’accumulation des lésions Gd+ en deux ans ou des lésions en hyposignal en séquences pondérées en T1 est mal établi ; c’est pourtant une donnée importante car ces deux critères sont souvent choisis comme point final d’étude secondaire dans les essais thérapeutiques. B. Critères internationaux pour le diagnostic de SEP de l’enfant A la suite de ces travaux épidémiologiques et de la révision des critères de diagnostic de la SEP chez l’adulte (critères de Mc Donald 2010), les critères de diagnostic de la SEP de l’enfant ont été récemment modifiés et sont explicités dans le tableau 2 [15]. Le but principal de cette révision est de débuter le traitement immunomodulateur le plus tôt possible. Le diagnostic peut désormais être établi dès la première poussée clinique si celle-ci s’accompagne de signes radiologiques établissant les classiques disséminations dans le temps (en particulier la présence conjointe de lésions prenant et ne prenant pas le gadolinium) et dans l’espace (atteinte de plusieurs zones du cerveau, en particulier sus et sous-tentorielles). C. Diagnostic différentiel Cette courte revue ne peut décrire toutes les possibilités mais les principales sont : les lymphohistiocytoses familiales hémophagocytaires, les vascularites surtout si elles sont purement cérébrales, différents types de cytopathies mitochondriales (Maladie de Leigh et maladie de Leber en particulier), plusieurs tumeurs dont le lymphome, les oligodendrogliomes et les gliomatoses diffuses. Le diagnostic doit être systématiquement reconsidéré en cas de rechutes fréquentes, d’une évolution progressive, d’un début avant 6 ans, d’atteintes symétriques de la substance blanche. II. Le traitement de la SEP chez l’enfant 1. Traitement de la poussée Comme chez l’adulte, le traitement d’une atteinte aiguë démyélinisante d’allure inflammatoire, y compris une ADEM, repose sur l’injection en 2 heures de doses élevées de methylprednisolone. Cependant la dose est moins bien définie en pédiatrie. Nous utilisons, comme la majorité des centres dans le monde, la dose de 30 mg/Kg/J pendant 3 jours de suite sans dépasser la dose de 1 g chez l’adolescent [17]. D’autres règles sont proposées utilisant 500 mg/m2 ou 1 g/1,73m2, ce qui aboutit à des doses moindres chez des enfants de 25-30 kg. Ce traitement réduit la longueur de la phase aiguë mais ne diminue pas le risque de poussées ultérieures. En cas de persistance d’une symptomatologie grave, l’injection de méthylprednisolone peut être répétée après 15 jours ou des plasmaphérèses pratiquées. Il ne s’agit cependant que de recommandations d’experts sans essai thérapeutique formel. 2. Traitement immunomodulateur initial : interférons et glatiramère acétate Le traitement immunomodulateur initial repose actuellement sur le choix de l’une des trois formes disponibles d’interféron ‑ ou sur le glatiramère acétate bien que ces molécules n’aient pas d’Autorisation de Mise sur le Marché pour tous les âges. En effet, aucun essai thérapeutique n’a été fait chez l’enfant ; aucune étude pharmacocinétique n’a pu établir avec certitude la dose la plus adaptée en fonction du poids. Le tableau 3 indique les doses utilisées selon la recommandation de l’IPMSSG. Les posologies des interferons ‑ sont augmentées progressivement par semaine tandis que le glatiramère acétate est débuté à pleine dose. Les principaux effets secondaires sont des frissons, de la fièvre et un sentiment de fatigue. La surveillance consiste en une numération formule sanguine et des dosages de transaminases avant le début du traitement puis à 1 mois, 3 mois, 6 mois, 12 mois puis tous les ans. A partir du prélèvement de sang à 6 mois des tests thyroïdiens sont ajoutés. Plusieurs études rétrospectives ont démontré que ces traitements sont bien supportés et suggèrent que l’efficacité est la même chez l’enfant et chez l’adulte [1,18]. Chez l’adulte la réduction du nombre de poussées ou de nouvelles lésions radiologiques est modérée et on considère que 20 à 30 % des patients adultes utilisant l’interféron ‑ ont un franc bénéfice au long cours. Chez l’enfant, il est maintenant bien établi, surtout à travers l’étude de la cohorte américaine que 40 % des enfants arrêtent ces traitements du fait d’une intolérance, d’effets secondaires, de persistance des poussées ou de difficulté d’observance [19,20]. Cela démontre l’absolue nécessité d’utiliser de nouvelles molécules. 3. La définition d’une « résistance » La définition même d’une résistance au traitement initial n’a pas encore fait l’objet d’un consensus [1,14,20]. La définition de travail associe : un minimum de 6 mois de traitement à pleine dose et une compliance thérapeutique, plus : soit une augmentation ou une absence de réduction du nombre de rechutes cliniques, la présence de nouvelles lésions en T2 ou de nouvelles prises de gadolinium sur l’IRM cérébrale, soit deux rechutes confirmées (clinique ou radiologique dans les derniers 12 mois (ou moins). 4. Les traitements de « deuxième ligne » et les essais thérapeutiques Le choix thérapeutique suivant, en cas de persistance des poussées malgré le traitement initial, a longtemps été la cyclophosphamide puis, plus récemment, le natalizumab [20]. L’efficacité de la cyclophosphamide ou du natalizumab n’a pas été analysée par des essais thérapeutiques formels et l’impression d’efficacité ne repose que sur des séries de cas. Ces deux molécules ont de plus des inconvénients parfois graves. Le principal risque du natalizumab est la survenue d’une leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP). Ce risque semble très faible si la personne traitée est séronégative pour le virus JC (cause de la LEMP) et si elle n’a pas reçu d’immunosuppresseur avant le début du traitement par natalizumab, ce qui est souvent le cas en pédiatrie. Les différentes molécules efficaces par voie orale (Tableau 1) sont particulièrement attrayantes pour des patients à l’âge pédiatrique mais l’autorisation de prescription par les agences européenne et américaines des médicaments nécessite des études spécifiques chez l’enfant. Dans ce but, un atelier de travail tenu à Washington en janvier 2012 a réuni les principaux universitaires traitant des SEP de l’enfant, l’ensemble des compagnies pharmaceutiques ayant terminé des études de phase III chez l’adulte, ainsi que les agences européennes et américaines du médicament [14]. La nécessité d’essais thérapeutiques formels chez l’enfant a été affirmée (nouvelle molécule contre placebo ou contre un comparateur actif (Interferon ‑ en règle). Ces essais nécessitant l’inclusion de 200 à 500 enfants ne peuvent être réalisés qu’au niveau mondial. Du fait de la prévalence de la maladie et du nombre d’enfants nécessaires à chaque essai, des choix peuvent être nécessaires entre les nouvelles molécules. Ils se feront en fonction de la toxicité et de l’efficacité observées au cours des essais de phase III chez l’adulte, essais qui doivent dans tous les cas précéder les essais chez l’enfant. Il doit s’y associer des études pharmacocinétiques pour mieux établir la dose utile en fonction du poids de l’enfant, des études de toxicité au long cours et des registres de surveillance. Les premiers essais évaluant les molécules données par voie orale devraient débuter dès 2013. En dehors du natalizumab, les autres anticorps monoclonaux n’ont pas d’essais chez l’enfant déjà programmés. Certains d’entre eux ont des effets secondaires qui peuvent rendre difficile leur utilisation chez l’enfant. Conclusion Le traitement de la sclérose en plaques s’est transformé. De nouvelles molécules sont proches d’être disponibles chez l’enfant. Des traitements « sur mesure », en fonction de l’âge et de la gravité de la maladie seront l’étape suivante qui combinera probablement les molécules. Chez certains patients un traitement d’emblée par des médicaments actuellement dits de deuxième ligne sera probablement le meilleur choix. Tableau 1 : Les différentes molécules utilisées dans le traitement de la sclérose en plaques. Molécules actuellement utilisées initialement. Interferons beta (IM ou SC*) Avonex®, Rebif®, Betaféron®. Glatiramer acétate (SC) : Copaxone® Nouvelles molécules prises par voie orale Fingolimod (PO) Gilenya® Teriflunomide (PO) Aubagio® Laquinimod (PO) Allegro® Dimethylfumarate (PO) Tecfidera® Nouveaux anticorps monoclonaux Natalizumab (IV) Tysabri® Alemtuzumab (IV) Lemtrada®/Campath® Daclizumab (IV) Zenapax® * IM : intramusculaire ; SC : sous-cutané ; PO : per os ; IV : intraveineux. Tableau 2 : Critères de l’International Pediatric Multiple Sclerosis Study Group pour le diagnostic de la SEP pédiatrique selon la révision 2013. - Survenue de deux atteintes cliniques démyélinisantes d’allure inflammatoire séparées de plus de 30 jours (dissémination dans le temps) et touchant des zones différentes du cerveau (dissémination dans l’espace). - Survenue d’une atteinte clinique associée à une IRM montrant une dissémination dans l’espace et des lésions multiples dont certaines prenant le contraste et d’autres non (établissant le critère de dissémination dans le temps). - Survenue d’une atteinte clinique associée à une dissémination dans l’espace sur l’IRM et à la survenue de lésions supplémentaires sur une IRM ultérieure (dissémination dans le temps). - Survenue d’un épisode d’ADEM suivi d’une atteinte clinique démyélinisante d’allure inflammatoire sans troubles de la conscience et d’une dissémination sur l’IRM de cette deuxième atteinte clinique. Tableau 3 : Règles de prescriptions des interférons et du glatiramère acetate. Avonex® : 30 µg IM/sem ; début: ¼, ½, 3/4/semaine* Rebif® : 44 µg** SC/3xsem ; début: ¼, ½, 3/4/semaine. Betaferon® : 250 µg SC/2 jours ; début : ¼, ½, 3/4/semaine. Copaxone ® : 20mg début : pleine dose. SC /jour ; * Montée progressive des doses au cours des trois premières semaines. ** Une dose de 22 mg est parfois utilisée particulièrement chez les enfants de moins de 12 ans. Références. [1] Chitnis T, Tenembaum S, Banwell B, Krupp L, Pohl D, Rostasy K, et al. Consensus statement: evaluation of new and existing therapeutics for pediatric multiple sclerosis. Mult Scler. 2012;18:116-27. [2] Mikaeloff Y, Caridade G, Assi S, Suissa S, Tardieu M. Prognostic factors for early severity in a childhood multiple sclerosis cohort. Pediatrics. 2006;118:1133-9. [3] Banwell B, Ghezzi A, Bar-Or A, Mikaeloff Y, Tardieu M. Multiple sclerosis in children: clinical diagnosis, therapeutic strategies, and future directions. 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LE SYNDROME D’ASPERGER : A L’HEURE DU PASSAGE DES TROUBLES ENVAHISSANTS DU DEVELOPPEMENT AUX TROUBLES DU SPECTRE AUTISTIQUE Par Dr. Adélaïde TONUS, Dr Nadia CHABANE, Pr Marie-Christine MOUREN ∗ ∗ Hôpital Robert Debré, Service de Pédopsychiatrie, 48 boulevard Sérurier 75935 PARIS CEDEX 19 Introduction La CIM-10, dixième révision de la Classification Internationale des Maladies de l’Organisation Mondiale de la Santé, classification de référence et le DSM-IV, 4ème édition du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Association américaine de psychiatrie), définissent les Troubles Envahissants du Développement par la triade clinique associant : (1) altération qualitative des interactions sociales, (2) altération qualitative de la communication, (3) comportements et intérêts restreints, répétitifs et stéréotypés. Cette association de symptômes est également connue sous le nom de « Triade de Wing ». Le Syndrome d'Asperger est classé parmi les Troubles Envahissants du Développement. Il est défini par l’association d’une altération qualitative des interactions sociales et de comportements et intérêts restreints, répétitifs et stéréotypés. La perturbation doit entraîner une altération cliniquement significative du fonctionnement social. Il n’existe pas de retard de langage significatif (mots isolés présents à l’âge de 2 ans et phrases à l’âge de 3 ans) ni de retard significatif dans le développement cognitif (Quotient Intellectuel > 70). Dans la version DSM-5 dont la sortie est imminente, le syndrome d’Asperger disparaît de la classification américaine, les Troubles du Spectre Autistique (TSA) venant remplacer les Troubles Envahissants du Développement (TED). Les Troubles du Spectre Autistique regroupent, sous une nouvelle entité, divers syndromes comme l’autisme (dont l’autisme de haut niveau), le syndrome d’Asperger et les troubles envahissants du développement non spécifiés. De nombreuses études démontrent l’absence de différences significatives entre le syndrome d’Asperger et l’autisme dit de haut niveau, remettant en cause la définition et la validité externe du syndrome d'Asperger. Nous allons nous intéresser aux particularités cliniques du syndrome d’Asperger et tenter de comprendre en quoi ce syndrome, s’il ne constitue plus un diagnostic « autonome », continue à s'inscrire dans les Troubles du Spectre Autistique. Un retard de diagnostic important Le syndrome d’Asperger se distingue de l'autisme par l’absence de retard significatif du développement cognitif et de l'acquisition du langage. C'est l'altération prolongée de l'interaction sociale, associée aux autres « bizarreries » qui interpellent l'entourage, puis le médecin. C’est pourquoi le diagnostic est parfois si tardif. Il apparaît clairement un délai de plusieurs années entre l’apparition des premiers symptômes autistiques et le diagnostic définitif. Si ce retard diagnostique existe pour l’autisme dit de Kanner, il semble encore plus important dans le syndrome d’Asperger. En effet, le diagnostic de syndrome d’Asperger est posé plus tardivement que pour l’autisme, avec un diagnostic formulé aux alentours de 11 ans dans le syndrome d’Asperger versus 5,5 ans dans l’autisme. Il n’y a pas de syndrome d’Asperger diagnostiqué avant l’âge de 3 ans [1]. Une meilleure connaissance et compréhension de ce syndrome pourrait permettre de réduire ce délai diagnostique. Particularités psychomotrices précoces dans le syndrome d’Asperger Le mouvement peut être considéré comme la première forme de langage et son analyse pourrait servir de moyen de diagnostic et d'étude des différentes formes des troubles autistiques. S’intéresser au développement psychomoteur des enfants permettrait la mise en évidence de signes précoces dans le syndrome d’Asperger. En effet, Il existe chez les enfants atteints de syndrome d’Asperger des défauts de coordination motrice et des troubles moteurs, auxquels se sont intéressés Teitelbaum et coll. [2]. Ces auteurs ont pour cela procédé à une étude des mouvements de 16 enfants à partir de vidéos familiales grâce à un système d’analyse des mouvements. Cette étude montre, dès les premiers mois, des anomalies des schémas des mouvements, à un âge très antérieur au diagnostic habituel du trouble. Elle relate des défauts de coordination motrice dès 3 mois, un manque d’inhibition de certains réflexes primitifs, un défaut d’apparition d'autres réflexes, un retard d'acquisition de position assise et des déséquilibres divers par trouble des réflexes de posture chez les enfants présentant un autisme comme chez ceux présentant un syndrome d’Asperger. Les auteurs proposent donc l’utilisation de ces réflexes comme signes précoces de détection de l’autisme et du syndrome d'Asperger. L’absence de retard de langage avant 3 ans dans le syndrome d’Asperger Différents critères diagnostiques sont utilisés à travers le monde pour définir le syndrome d’Asperger. Les principaux, retrouvés dans la littérature, sont les critères de Gillberg et Gillberg (1989), ceux de Szatmari (1989), ceux de la CIM10 (1993) et ceux du DSM-IV (APA 1994). Malheureusement, ces différents groupes de critères présentent un faible degré de concordance entre eux, compromettant la comparabilité des études sur ce syndrome [3]. La différence principale qui apparaît lors de l’étude de ces différentes définitions, porte sur le critère retard de langage, défini par l’absence de mots avant 2 ans et l’absence de phrases avant 3 ans. En effet, pour la CIM-10 et le DSM-IV, la présence d’un retard de langage exclut le diagnostic de syndrome d’Asperger. Ce retard de langage est, en revanche, présent dans la définition de l’autisme de haut niveau. Des troubles de la communication verbale et non verbale sont cependant classiquement décrits dans le syndrome d’Asperger : particularités de vocabulaire, langage adultomorphe, anomalies de prosodie ou encore compréhension littérale du langage avec peu d’accès à l’humour et l’ironie. Nous pouvons donc nous interroger sur la pertinence de l’absence de trouble du langage dans la définition du syndrome d’Asperger. Si un retard de langage à proprement parler n’est pas mis en évidence avant l’âge de 3 ans, des troubles de communication verbale sont néanmoins présents dans ce syndrome. Altération des interactions sociales et comportements et intérêts stéréotypés dans le syndrome d’Asperger Une altération des compétences sociales est retrouvée dans le syndrome d’Asperger comme dans l’autisme de haut niveau [4]. Lorsque des différences sont retrouvées entre les deux groupes au niveau des compétences sociales, elles s’atténuent avec l’âge. Si les interactions précoces avec les parents sont globalement conservées dans le syndrome d’Asperger, les difficultés relationnelles vont apparaître avec les pairs lors de la première confrontation à la socialisation. On retrouve classiquement dans les descriptions cliniques du syndrome d’Asperger, la présence d’un intérêt spécifique envahissant pour un sujet bien défini (histoire, géographie, astronomie, anatomie…), avec souvent un savoir encyclopédique sur ce sujet. Les comportements et intérêts restreints, comme les stéréotypies motrices, sont retrouvés de façon équivalente dans le syndrome d’Asperger et l’autisme dit de haut niveau [5]. Nous voyons ici combien il est difficile de différencier syndrome d’Asperger et autisme de haut niveau, cette différentiation étant aujourd'hui remise en cause. La validité externe du syndrome d’Asperger mise en doute Depuis sa description en 1981 par Lorna Wing, se référant à l’article sur la Psychopathie Autistique de Hans Asperger écrit en 1944, la notion de syndrome d’Asperger a suscité de nombreuses polémiques et une littérature abondante, notamment concernant son individualisation vis-à-vis de l’autisme de haut niveau. Certains auteurs mettent en doute son existence en tant qu’entité clinique distincte de l’autisme de haut niveau et le situeraient à une extrémité des troubles du spectre autistique qui formeraient un continuum. De nombreux articles de la littérature, comparant le syndrome d’Asperger à l’autisme de haut niveau, symptômes par symptômes, démontrent l’absence de différences significatives entre ces deux entités cliniques [4,5,6,7,8,9]. Il existerait une différence d’intensité des symptômes plutôt que des profils symptomatiques distincts, ce qui serait en faveur de l’hypothèse d’un continuum du spectre autistique, continuum à plusieurs dimensions (socialisation, communication, intérêts restreints et répétitifs, niveau intellectuel) avec des différences d'intensité en fonction de chaque dimension. Un spectre d’intensité symptomatique La sévérité des symptômes des troubles du spectre autistique est variable d'une personne à l'autre mais également au cours du temps et en fonction de la prise en charge chez une même personne. La présence d’un retard mental vient également moduler cette intensité. Rappelons qu’une efficience intellectuelle normale est retrouvée dans environ 30 % des cas de troubles autistiques[10]. Un retard mental, défini par un Quotient Intellectuel (QI) < 70, n’est pas présent dans le syndrome d’Asperger mais un QI hétérogène est retrouvé. On observe une dissociation importante entre le QI verbal (QIV) et le QI performance (QIP) en faveur du QIV dans le syndrome d’Asperger, cette dissociation étant inverse dans l’autisme de haut niveau [7]. Le QI global est supérieur chez les patients Asperger par rapport aux patients autistes de haut niveau. Il existe une différence de niveau de langage entre les patients avec autisme de haut niveau et les patients Asperger avec un meilleur niveau de langage pour les patients Asperger. Cette différence de niveau de langage entre les deux groupes varie avec l’âge : les difficultés sont plus importantes chez les autistes de haut niveau avant 3 ans mais s’atténuent au cours du temps [6,7]. De même, les compétences sociales semblent meilleures chez les patients Asperger mais les résultats divergent selon les études [4,8]. Enfin, en s’intéressant à l’évolution des tableaux cliniques du syndrome d’Asperger et de l’autisme de haut niveau, les trajectoires développementales semblent similaires dans les deux groupes avec, néanmoins, un meilleur fonctionnement global et un tableau clinique moins sévère pour les Asperger que pour les autistes de haut niveau. Ainsi le pronostic apparaît globalement meilleur pour le Syndrome d’Asperger [9]. Un diagnostic précoce possible dans le syndrome d’Asperger Les premiers signes d’inquiétude parentale surviennent vers l’âge de 30 mois dans le syndrome d’Asperger et vers l’âge de 18 mois dans l’autisme [1], ce qui nous fait penser qu’un diagnostic précoce est possible pour l'ensemble des Troubles du Spectre Autistique. Une étude attentive du développement psychomoteur précoce va permettre de mettre en évidence des anomalies motrices dans le syndrome d’Asperger comme dans les autres Troubles du Spectre Autistique [2]. Si l’altération qualitative des interactions sociales est l’élément central et universel des Troubles du Spectre Autistique, elle n’est pas toujours mise en évidence dans les premières années de vie : c’est pourtant un signe précoce et plus spécifique que le retard de langage mais qui échappe souvent à l’entourage (cela particulièrement dans le syndrome d’Asperger où il est classiquement décrit des relations précoces avec les parents qui semblent préservées). Une bonne connaissance de la triade clinique des Troubles du Spectre Autistique permettrait de repérer ces éléments cliniques plus précocement. Conclusion La validité du syndrome d’Asperger est controversée du fait notamment d’une critériologie variable mais également d’une distinction discutable entre autisme de haut niveau et syndrome d’Asperger dans les études. C’est pourquoi la communauté scientifique parle actuellement de plus en plus de « Troubles du Spectre Autistique », spectre avec un continuum dans l'intensité de l’expression syndromique. Il ne faut cependant pas sous-estimer la sévérité potentielle du syndrome d’Asperger, car si les symptômes sont de moindre intensité, le retentissement fonctionnel peut néanmoins être sévère. Si le diagnostic des Troubles du Spectre Autistique n’est pas toujours aisé, une bonne connaissance et compréhension de ces troubles va permettre un diagnostic plus précoce. L’intérêt d’un diagnostic précoce est avant tout l’efficacité d’une intervention immédiate, au niveau de la socialisation, au moyen de groupes d’habiletés sociales, de la rééducation (en particulier de la pragmatique du langage et de la psychomotricité) et de l’adaptation de l’environnement et de la scolarité. Cette efficacité d’une intervention précoce est d’autant plus importante que plus l’enfant est jeune, meilleure est sa plasticité neuronale et cela particulièrement avant l’âge de huit ans. La prise en charge précoce permettra également une diminution de l’anxiété parentale, une sensibilisation de l’entourage à la différence de ces enfants et une vigilance à l’égard de la fratrie dont on sait qu’elle présente un risque plus élevé de trouble du spectre autistique que la population générale. Bibliographie 1. Howlin P et Asgharian A. The diagnosis of autism and Asperger syndrome: findings from a survey of 770 families. Developmental Medicine & Child Neurology 1999 ; 41 : 834-839 2. Teitelbaum O, Benton T, Shah P.K et al. Eshkol–Wachman movement notation in diagnosis: The early detection of Asperger’s syndrome. PNAS 2004 ; 101 : 11909–11914 3. Kopra K, von Wendt L, von Wendt T.N et al. Comparison of Diagnostic Methods for Asperger Syndrome. J Autism Dev Disord 2008 ; 38 : 1567–1573 4. 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Il est admis que l’étiologie de l’autisme est complexe faisant interagir très probablement des facteurs génétiques et environnementaux. Aussi bien les études de jumeaux que l’existence de formes syndromiques monogéniques d’autismes sont en faveur d’un poids important des facteurs génétiques. Le système immunitaire pourrait être impliqué dans l’autisme. En particulier l’hypothèse d’une réponse immunitaire inappropriée à des facteurs environnementaux divers a été émise. De nombreuses études épidémiologiques et expérimentales chez l’animal font le lien entre autisme et auto-immunité. Maladies auto-immunes dans les familles d’enfants autistes De nombreuses études épidémiologiques ont démontré un lien entre autisme et maladies auto-immunes familiales [1]. Le risque d’autisme est augmenté chez les mères ayant une polyarthrite rhumatoïde ou une maladie cœliaque [2]. C’est probablement l’exposition fœtale aux anticorps transmis qui participe au risque. L’incidence de Diabète de type 1 chez les mères et les pères d’enfants autistes est également plus élevée que chez des témoins [3]. L’hypothèse est celle d’un terrain génétique commun. Dans une étude égyptienne, 47 % des enfants autistes auraient une histoire familiale de maladies auto-immunes [4] contre 8 % dans la population générale. Récemment l’étude du registre danois portant sur 3325 enfants autistes a confirmé ces données [5]. Des anticorps dirigés contre le système nerveux central fœtal ont été retrouvés chez des mères d’enfants autistes [6]. Des modèles animaux ont démontré que les anticorps maternels antineuronaux pouvaient, s’ils étaient injectés à des souris gestantes, altérer le développement neuronal [7]. Le lien entre maladies auto-immunes maternelles et autisme est complexe, faisant intervenir des facteurs génétiques et une altération de l’environnement fœtal. Cela incite à mieux dépister les pathologies auto-immunes maternelles pour mieux les prendre en charge. Autisme et syndrome des anticorps antiphospholipides Chez les enfants nés de mères ayant des maladies auto-immunes, les auto-anticorps influencent le développement fœtal. L’exemple le plus caractéristique est le risque de bloc auriculo ventriculaire chez les enfants nés de mères ayant un lupus ou un syndrome de Sjögren [8]. Une dyslexie est observée chez 40 % des enfants nés de mères lupiques et 20 % des enfants nés de mères ayant un syndrome des anticorps antiphospholipides (SAPL) [9] [10]. L’exposition fœtale aux APL pendant la grossesse est responsable de complications néonatales [8] [11]. Depuis près de 10 ans, un registre européen de suivi longitudinal des enfants nés de mères ayant un SAPL a été mis en place, coordonné par l’hôpital Jean Verdier [12]. Entre 2003 et 2009, 141 enfants inclus ont été suivis. Vingt trois enfants (16,3 %) sont nés avant 37 SA et 12 % étaient hypotrophes. Aucun enfant n’a présenté de complications thrombotiques. En revanche, 3 enfants du registre (3/141, 2,1 %) ont présenté un autisme alors que l’incidence de l’autisme en Europe est estimée à 0,5 % [13]. Les effectifs sont bien sûr insuffisants pour conclure mais cela nous a amené à conduire une étude rétrospective monocentrique de suivi d’enfants nés de mères ayant un lupus ou un SAPL primitif, hospitalisées à Jean Verdier entre janvier 2003 et janvier 2010. Cette étude, indépendante du registre européen, est en cours de publication. Quarante cinq enfants nés de mères ayant un lupus ont été inclus (groupe 1). Parmi ces enfants, 3 ont développé un lupus cutané néonatal. Treize enfants sont nés de mères ayant un SAPL primitif (groupe 2). Aucun enfant n’a développé de thrombose. Au cours du suivi, 3 enfants ont développé un autisme (3/13 ; 23 %) répondant aux critères de classification DSM IV. Ces enfants n’étaient pas prématurés et ne présentaient pas de RCIU. Le bilan somatique de l’autisme était normal. En particulier, aucune anomalie n’avait été retrouvée sur le caryotype moléculaire (puce Illumina 500K). De façon intéressante, les anticorps anti-β2GP1 de type IgG persistaient chez ces 3 enfants à des titres significatifs. Dans les modèles animaux, l’exposition aux anticorps antiphospholipides est responsable d’hyperactivité et d’anxiété et des injections intrathécales d’APL ont un effet sur l’apprentissage et la mémorisation [14]. In vitro, les anticorps anti-β2GPI peuvent se lier aux cellules cérébrales endothéliales [15]. Les enfants nés de mères SAPL ont une intelligence normale mais des troubles des apprentissages sont présents : 26 % des cas [16]. Notre étude pose la question d’une prédisposition à l’autisme chez les enfants nés de mères SAPL et justifie un suivi à long terme de ces enfants. L’association entre autisme et maladies auto-immunes pose la question de bases génétiques communes. Cette étude ne permet cependant pas de conclure en l’absence de groupe contrôle et nécessite d’autres études plus larges. Nous avons par ailleurs entrepris une étude cas/témoins portant sur 46 enfants autistes et 46 témoins appareillés sur l’âge, le sexe et l’origine géographique comparant les taux d’APL chez les enfants et leurs mères dont les premiers résultats seront présentés. Autisme et cytokines pro-inflammatoires De nombreuses cytokines sont impliquées dans le développement et la maintenance neuronale. Plusieurs études indépendantes ont retrouvé une diminution significative du taux sanguin de TGF-β chez les enfants autistes [17, 18]. Le « macrophage inhibitory factor » (MIF) est une autre cytokine pro-inflammatoire récemment impliquée dans l’autisme par une large étude d’association retrouvant un polymorphisme associé à des taux plus élevés de MIF sanguins dans plus de 1000 familles [19]. L’activité cytotoxique des cellules Natural killer (NK) est diminuée par rapport aux témoins dans plusieurs études sans que les liens physiopathologiques ne soient établis. Une étude récente a examiné l’expression de la réponse cytokinique des monocytes de patients autistes suite à la stimulation des Toll like et montré qu’elle était très augmentée par rapport aux témoins en particulier pour TLR-2 and TLR-4 [20]. L’interféron ‑ a également été impliqué dans l’autisme [21, 22] [23]. Nous présenterons une observation d’une jeune fille, autiste de 9 ans ayant développé un lupus, pour laquelle les explorations génétiques sont en faveur d’une activation constitutionnelle de la voie de l’interféron ‑. Recherche d’auto-anticorps chez les patients autistes Plusieurs études ont mis en évidence la présence d’anticorps dirigée contre le SNC chez des enfants autistes [24]. D’autre part, dans une étude récente près de 20 % des enfants autistes ont des anticorps antinucléaires contre 2,3 % dans le groupe témoin [25]. A l’inverse, les dernières études contrôlées ne mettent pas en évidence de relation entre allergie et autisme. Conclusion L’autisme est une pathologie neurodéveloppementale complexe. Un bilan somatique pluridisciplinaire est indispensable dans la démarche étiologique. Le pédiatre généraliste a sa place dans cette démarche de médecine interne. On peut faire l’hypothèse d’un lien entre autisme et auto-immunité pour un sous-groupe d’enfants autistes, que ce soit par l’exposition fœtale aux anticorps transmis ou du fait d’un terrain génétique commun. La recherche de maladies auto-immunes familiales doit donc faire partie de l’interrogatoire des parents d’enfants autistes. Références 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 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En France, l’enquête ObEpi, réalisée entre 1997 et 2006, a révélé, qu’en 2006, 23 % des femmes sont en surpoids et 13 % sont obèses. La prévalence a augmenté de 2 à 2,5 fois pour les femmes entre 18 et 39 ans, c’est-à dire-celles en âge de procréer [1]. Le diabète gestationnel est défini comme un trouble de la tolérance glucidique conduisant à une hyperglycémie de sévérité variable, débutant ou diagnostiqué pour la 1ère fois pendant la grossesse, quels que soient le traitement nécessaire et l’évolution dans le post-partum (OMS). En réalité, cette définition recouvre deux entités cliniques différentes : une anomalie de la tolérance glucidique réellement en rapport avec la gestation et qui disparait au moins temporairement en post-partum, et le diabète préexistant à la grossesse ou aggravé au cours de celle-ci, principalement le diabète de type 2, mais qui sera découvert à l’occasion de cette grossesse et persistera dans ses suites. L’incidence du diabète est actuellement estimée à 6 %. En réalité son incidence est très variable selon les populations étudiées et peut atteindre jusqu’à 20 %. En 2008, de nouveaux critères diagnostiques ont été proposés par l’International Association of Diabetes and Pregnancy Study Group (IADPSG). Les valeurs seuils proposées sont recueillies après un test OMS de 75 g de glucose réalisé entre 24 et 28 SA et sont : glycémie à jeun 0,92 g/L, glycémie à une heure 1,80 g/L et glycémie à 2h 1,53 g/L. Le diagnostic de DG est posé si une seule des valeurs est supérieure à ces seuils. Suite à ces nouvelles recommandations qui ont abaissé les seuils de glycémie précédemment retenus, l’incidence attendue pour le DG est de l’ordre de 15 % [2]. De nombreux travaux ont prouvé qu’un taux de glucose maternel élevé pendant la grossesse est associé à l’existence d’une macrosomie et d’une morbidité fœtale et à des complications ultérieures en période. Parmi ces travaux, beaucoup ont porté sur le diabète de type 1 ou de type 2. Or, il semble que la fréquence et la gravité des complications fœtales et néonatales en cas de DG sont différentes de celles rapportées pour ces deux types de diabète. L’exposition fœtale au diabète maternel est aussi considérée comme un des facteurs de risque de développer un syndrome métabolique à l’âge adulte. Effet de l’hyperglycémie maternelle sur la croissance fœtale La macrosomie se définit par une valeur du poids de naissance supérieur à 4 000 ou 4 500 g. Une autre définition prend en considération le terme de naissance et définit la macrosomie pour un poids de naissance supérieur ou égal au 90ème percentile ou > +2DS (> 97ème percentile) pour l’âge gestationnel. Parmi les nouveau-nés macrosomes, certains sujets ont une croissance harmonieuse de leur poids, leur taille et leur périmètre crânien correspondant à leur potentiel génétique. La macrosomie du nouveau-né de mère diabétique se caractérise par un excès de masse grasse, une augmentation de la masse musculaire, une organomégalie sans augmentation de la taille du cerveau. Il y a plus de 50 ans, Pedersen avait émis l’hypothèse que la macrosomie observée dans le cadre d’un diabète maternel est une conséquence de l’hyperinsulinisme fœtal secondaire à l’hyperglycémie maternelle. Plusieurs études ont depuis confirmé cette hypothèse. En particulier, les résultats de l’étude HAPO (Hyperglycemia and Adverse Pregnancy Outcome), portant sur 19 885 nouveau-nés, ont montré récemment qu’il existe une relation linéaire et continue entre la proportion de masse grasse du nouveau-né (évaluée sur les mesures anthropométriques et la mesure des plis cutanés), le niveau de la glycémie maternelle et le taux d’insuline fœtale estimé par le dosage du peptide C au cordon [3]. Cette étude montrait que des valeurs de glycémie maternelle inférieures à celles définissant le DG peuvent être associées à un excès de croissance fœtale, portant particulièrement sur le tissu adipeux. Il est maintenant clairement admis que le diabète maternel, quel que soit son type, est un facteur de risque de macrosomie. Deux méta-analyses récentes ont retrouvé une diminution significative de la macrosomie et de l’excès de croissance fœtale après traitement spécifique du DG [4]. D’autres facteurs de risque de la macrosomie sont souvent associés au DG, en particulier le surpoids ou l’obésité maternelle [5]. Conséquences de la macrosomie en période périnatale La naissance d’un nouveau-né macrosome est associée à un risque plus élevé de complications néonatales, comme les traumatismes obstétricaux, la détresse respiratoire ou l’hypoglycémie. Quelle que soit la cause de la macrosomie, celle-ci augmente aussi le risque d’asphyxie périnatale et de décès, en particulier lorsque le poids de naissance excède 4 500 g. Dystocie des épaules et traumatismes obstétricaux La dystocie devient un évènement grave si elle s’accompagne d’un traumatisme. La paralysie du plexus brachial chez le nouveau-né de mère diabétique est un évènement rare dont la fréquence rapportée est entre 0,2 et 3 %. Le faible nombre d’évènements ne permet donc pas une estimation précise du risque dans les différentes études. L’instauration d’un traitement du DG ne diminue pas significativement la fréquence des traumatismes obstétricaux [4]. Les traumatismes obstétricaux sont le plus souvent en lien avec des poids ≥ 4 500 g qui augmentent le risque de dystocie des épaules, quelle que soit la cause de l’excès de croissance [6]. Détresses respiratoires La fréquence et le risque de détresse respiratoire en cas de DG sont difficiles à apprécier car cette information n’est pas toujours rapportée dans les différentes études. Le critère généralement pris en considération est la nécessité d’un transfert en unité de néonatologie, qui sous-entend pour certains cas la prise en charge d’une détresse respiratoire. La fréquence de ces transferts varie entre 3 et 12 %, et n’est pas modifiée selon les modalités de traitement du diabète maternel [4]. Le risque de détresse respiratoire est particulièrement augmenté pour les nouveau-nés de mère avec DG lorsque le poids était ≥ 4 000 g, en comparaison des nouveau-nés de mère avec DG de poids < 4 000 g [7]. Une autre étude qui a inclus tous les nouveau-nés de plus de 4000 g pendant 3 ans a montré une augmentation du risque de complications respiratoires parallèle à l’augmentation du poids de naissance, que la mère soit ou non diabétique [8]. Complications métaboliques • L’hypoglycémie Il est démontré depuis longtemps qu’il existe une corrélation entre l’augmentation du taux de peptide C au cordon, la macrosomie et l’hypoglycémie néonatale. Récemment, l’étude HAPO a confirmé cette relation. L’hypoglycémie néonatale était faiblement corrélée au niveau des glycémies maternelles, mais fortement corrélée au taux de peptide C mesuré au cordon à la naissance. Les nouveau-nés les plus gros et/ou les plus gras étaient plus à risque de développer une hypoglycémie [9]. Ces résultats ont été retrouvés dans d’autres études. La macrosomie augmentait le risque d’hypoglycémie pour les nouveau-nés de mère avec DG dont le poids était ≥ 4 000 g, en comparaison des nouveau-nés de mère avec DG mais de poids < 4 000 g [7]. La macrosomie, quel que soit le statut diabétique de la mère est en ellemême un facteur de risque d’hypoglycémie, avec une incidence la plus élevée lorsque le poids est > 4 500 g [8]. L’hypoglycémie néonatale est donc en lien avec l’hyperinsulinisme fœtal qui persiste après la naissance. Il est cependant difficile de connaître l’incidence précise de l’hypoglycémie en cas de DG en raison de la variabilité de la définition utilisée selon les études et des modalités de dépistage. La fréquence des hypoglycémies traitées par voie intraveineuse, rapportée dans les deux études randomisées pour la prise en charge du diabète maternel, est faible de l’ordre de 5 à 7 % et ne diffère pas selon la qualité du traitement du DG [10, 11]. • Hypocalcémie et hyperbilirubinémie On considère classiquement que les nouveau-nés de mère diabétique sont à risque d’hypocalcémie et d’ictère. Ces considérations reposent sur des niveaux de preuve très faibles et n’ont pas de réelles bases physiopathologiques. L’ictère pourrait être expliqué tout au plus dans certaines situations de polyglobulie rencontrées chez les nouveau-nés macrosomes. En effet l’excès de croissance fœtale est associé à une stimulation du métabolisme fœtal qui entraine une hypoxémie relative et stimule la sécrétion d’érythropoiëtine. Aucune étude n’a spécifiquement étudié le risque d’hypocalcémie en cas de DG. L’hyperbilirubinémie serait faiblement associée au niveau de la glycémie maternelle [3]. Impact du diabète de type 2 préexistant à la grossesse sur les malformations fœtales et la mortalité périnatale Les malformations fœtales Un contrôle insuffisant de la glycémie maternelle durant la période périconceptionnelle augmente le risque de malformations en cas de diabète préexistant à la grossesse. La plupart des études montre que le risque de malformations n’est pas ou peu augmenté en cas de DG en comparaison de la population générale (ORs entre 1,1 et 1,3) [12]. Les malformations décrites sont du même type que celles retrouvées en cas de diabète pré-gestationnel (cardiaques, squelettiques et cérébrales). Il existe une relation entre le risque de malformations fœtales, le niveau de la glycémie maternelle retrouvé lors du dépistage en cours de grossesse, la précocité du diagnostic de diabète et l’IMC maternel. Ces observations suggèrent que l’augmentation du risque de malformations rapportée dans certaines études est probablement liée à l’inclusion dans le groupe DG de femmes avec un diabète de type 2 méconnu [13]. Mortalité périnatale et asphyxie périnatale Une large étude de cohorte a clairement montré que le taux de mortalité périnatale en cas de DG est analogue à celui de la population générale, après exclusion des cas de diabète prégestationnel de type 2, méconnus avant la naissance (14). La revue de la littérature ne montre pas de différence formelle concernant la mortalité néonatale ou périnatale, selon que le DG est traité ou non, quelles que soient les modalités de traitement [4]. Dans les deux études randomisées qui ont comparé deux groupes de femmes avec DG, dont un seul bénéficiait d’un traitement spécifique, aucune différence n’a été mise en évidence sur le risque d’asphyxie périnatale définie sur le score d’Apgar à 5 min ou un pH au cordon < 7,0 [10, 11]. Ces données confirment que la notion de DG recouvre deux entités de gravité différente : une anomalie de la tolérance glucidique apparue en cours de grossesse dont le risque de complications graves est faible et le diabète de type 2 méconnu avant la grossesse dont le risque de complications graves est élevé. Impact de l’obésité maternelle sur les complications du diabète Les complications périnatales sont plus fréquentes en cas d’obésité maternelle, même chez les femmes obèses sans diabète. La macrosomie est la principale complication rapportée en cas d’obésité maternelle, indépendamment du diabète [15, 16]. Sa fréquence augmente parallèlement à l’augmentation de l’IMC maternel en début de grossesse. Le risque de mort fœtale ou de décès périnatal est deux à trois fois plus élevé chez les femmes obèses en début de grossesse après exclusion des grossesses avec malformation et des diabètes préexistants à la grossesse [17]. Le risque de mort fœtale ou de décès périnatal est minimal pour un IMC à 23 kg/m2, puis il augmente de façon linéaire avec l’IMC maternel. Pour chaque unité d’IMC supplémentaire à partir de cette valeur, le risque de décès augmente de 6 %. Enfin, l’obésité maternelle est associée à une augmentation du risque de malformations, en particulier des anomalies du tube neural [18]. La fréquence du diabète augmente avec l’IMC maternel (ORs pour les femmes en surpoids, avec obésité et obésité morbide 1,97 (95 % CI 1,77-2,19), 3,01 (95 % CI 2,34-3,87) and 5,55 (95 % CI 4,27-7,21) respectivement [19]. L’obésité et le diabète sont associés indépendamment à un risque plus élevé de complications au cours de la grossesse, pour la mère et le fœtus. Mais, l’association du diabète et de l’obésité a un impact plus sévère sur le devenir de la grossesse que chacun considéré séparément [20]. Devenir à long terme des enfants nés de mère avec DG Les conséquences du diabète maternel sur le développement fœtal semblent se révéler tout au long de la vie des descendants de ces femmes diabétiques. En effet, il existe une littérature très riche qui étudie les conséquences à long terme du diabète maternel. Cette littérature est alimentée par des données épidémiologiques et des données expérimentales. Différentes complications à long terme ont été rapportées chez les enfants de mère avec diabète, en particulier le risque d’anomalie de la régulation glucidique, de troubles de la corpulence (surpoids, obésité), de maladies cardiovasculaires ou de syndrome métabolique [21]. Cette dernière entité est définie différemment selon les études mais associe habituellement une insulino-résistance, une dyslipidémie, une hypertension artérielle (HTA) et une obésité. Des données importantes ont été issues de la population des indiens Pima dans laquelle il existe une forte prévalence de diabète de type 2. Dans une même fratrie, les descendants de femmes qui ont eu un DG ou un diabète de type 2 pendant la grossesse sont plus fréquemment obèses ou ont plus fréquemment un diabète de type 2 que ceux dont les mères ont développé un diabète après la grossesse ou qui n’ont pas de diabète [22, 23]. Les mêmes observations ont été faites sur la fréquence de l’HTA [24]. Des résultats analogues ont été retrouvés dans une cohorte suédoise qui comparait des sujets masculins d’une même fratrie, selon qu’ils étaient nés avant ou après le diagnostic de diabète chez leur mère. L’IMC à 18 ans était plus élevé pour ceux exposés au diabète in utero [25]. Ces résultats démontrent l’impact négatif de l’environnement intra-utérin sur la santé à long terme, au-delà des facteurs génétiques et du mode de vie. Les données épidémiologiques récentes apportent des éléments moins formels sur cette association. Bien qu’il semble que le diabète maternel joue un rôle sur l’obésité dans l’enfance, l’importance et l’impact d’autres facteurs plus ou moins associés avec le diabète maternel (génétique, mode de vie, surpoids ou obésité maternelle…) est difficile à établir. Certaines études ont ainsi montré que l’association entre diabète maternel et obésité ou hypertension dans l’enfance perdait de sa significativité lorsque l’on ajustait sur l’IMC de la mère avant la grossesse [26-28]. De nombreuses données expérimentales issues de différents modèles animaux apportent des arguments sur l’impact de l’altération intra-utérin et le devenir métabolique et cardiovasculaire à plus ou moins long terme [29, 30]. Elles ont aussi permis de montrer que des altérations épigénétiques modifiant la régulation des gènes étaient à l’origine de ces perturbations. Ces modifications épigénétiques se produisant au cours d’une période de vulnérabilité pendant le développement perdurent toute la vie et sont même transmises aux générations suivantes [31]. L’épigénétique met en jeu plusieurs facteurs qui permettent la modification de l’expression des gènes, sans altération de la séquence d’ADN. Il existe plusieurs types de mécanismes biochimiques à l’origine des modifications : la méthylation de l’ADN, les modifications des histones (acétylation, méthylation, phosphorylation) ou les micro ARNs qui sont des séquences noncodantes régulatrices de l’expression des gènes. Les conséquences d’une exposition précoce à un milieu inadapté ne se limitent pas seulement à l'individu exposé, mais dans certains cas elles peuvent se transmettre à la génération suivante. Ce phénomène transgénérationnel pourrait en partie contribuer à l’augmentation rapide de l’incidence des anomalies nutritionnelles et métaboliques chez l’adulte [32]. Conclusions Les complications néonatales sévères en cas de DG, lorsque les cas de diabète de type 2 préexistants ont été éliminés, sont rares. La macrosomie est la principale conséquence néonatale démontrée d’un DG et représente le facteur essentiel lié aux complications. L’obésité maternelle, fréquemment associée au DG, est un facteur de risque surajouté de complication. L’altération du milieu intra-utérin a pour conséquence des modifications de la régulation du génome fœtal qui sont à l’origine des complications métaboliques et cardiovasculaires qui se développent au cours de la vie des enfants et des adultes issus de grossesse avec diabète. Ces anomalies épigénétiques se transmettent aux générations suivantes et contribuent probablement à la forte augmentation de la prévalence de l’obésité et du diabète observée au cours des dernières décennies. La prise en compte de l’état métabolique et nutritionnel de la femme enceinte a une importance capitale en termes de prévention et de conséquences pour la santé publique. Références : 1. Charles MA, Eschwege E, Basdevant A. Monitoring the obesity epidemic in france: the obepi surveys 1997- 2006. Obesity 2008;16:2182-6. 2. Metzger BE, Gabbe SG, Persson B, et al. International association of diabetes and pregnancy study groups recommendations on the diagnosis and classification of hyperglycemia in pregnancy. Diabetes Care 2010;33:676-82. 3. Hyperglycemia and Adverse Pregnancy Outcome (HAPO) Study: associations with neonatal anthropometrics. Diabetes 2009;58:453-9. 4. Horvath K, Koch K, Jeitler K, et al. 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TRAITER MOINS MAIS TRAITER MIEUX LES NOUVEAU-NES SUSPECTS D’INFECTION MATERNO FŒTALE : VERS DE NOUVELLES RECOMMANDATIONS Par JB MULLER, E LAUNAY, J CAILLON, JC ROZE, C GRAS-LE GUEN Réanimation et Urgences pédiatriques, Hôpital Mère Enfant CHU NANTES, 38 bd Jean Monnet, 44093 NANTES Cedex 1. [email protected] L’infection materno-fœtale (IMF) précoce reste une préoccupation majeure des néonatologues, dans les pays en voie de développement (1) comme dans les pays industrialisés (2). À l'heure actuelle aucun marqueur biologique n'étant assez sensible, ni spécifique pour permettre à lui seul d'établir le diagnostic d’IMF et d'initier le traitement (3), la prise en charge se fait sur un faisceau d'arguments cliniques et biologiques. Alors que la prévalence des infections néonatales précoces a diminué depuis la généralisation de l’antibioprophylaxie per-natale (0.34–0.37 infection néonatale précoce à Streptocoque B pour 1000 naissances en 2008 aux Etats Unis ) (4), la question se pose d’adapter notre démarche diagnostique et thérapeutique à ces modifications épidémiologiques récentes. 1 Etat des lieux des pratiques actuelles Les recommandations pour la pratique clinique de l’ANAES en 2002 (5) tiennent compte des difficultés diagnostiques rencontrées par les cliniciens en précisant que « tout nouveau-né qui va mal, sans raison apparente, est a priori suspect d'infection », la précocité du traitement permettant alors d’éviter l’aggravation parfois foudroyante des infections diagnostiquées tardivement. Cabaret et al rapportent que 46% des nouveau-nés de leur maternité de niveau 3 font l’objet d’une suspicion d’IMF, résultat proche de celui de l’équipe de Lille en 2008 (43% de Nouveau-nés suspects d’IMF) (6,7). Pourtant, Joram et al dans un travail rétrospectif français mené entre 2005 et 2008 sur une cohorte de 12485 nouveau-nés rapportent une prévalence de l’IMF probable de 1.2 % et de l’IMF certaine de 0.24‰ naissances (8). En effet, parmi les 26 nouveau-nés classés comme infectés seuls 3 enfants présentaient une infection certaine (hémoculture positive). Dans la plupart des centres de naissance, ces nouveau-nés suspects d’IMF font l’objet d’un examen de liquide gastrique assorti selon les cas d’un bilan sanguin complémentaire (hémoculture, Numération Formule sanguine, CRP ...). Il est d’usage qu’un second bilan sanguin soit réalisé 24 ou 48 heures après le premier afin d’analyser la cinétique des marqueurs inflammatoires. Ces prélèvements répétés ne sont pas anodins chez le nouveauné, avec un risque d'anémie chez les plus petits, (nécessité d'un volume de sang minimal conséquent notamment pour la rentabilité de l'hémoculture (9)) mais aussi une pénibilité et ou une douleur non négligeable compte tenu des difficultés techniques à prélever du sang à cet âge. Nombre de ces nouveau-nés font l’objet d’une antibiothérapie probabiliste et le plus souvent d’une hospitalisation (11% et 10% respectivement dans l’étude de Cabaret et al, jusqu’à 80% selon certaines publications américaines (5,10). 2 Effets de l’antibiothérapie en période néonatale A Sur l’écologie bactérienne Les effets délétères de l’antibiothérapie néonatale sont aujourd’hui de mieux en mieux décrits. Concernant l’écologie bactérienne tout d’abord, il a été établi une relation directe entre consommation antibiotique et émergence de résistance bactérienne, l’exemple des bactéries sécrétant des béta lactamase à spectre étendu étant le plus récent (11). Même s’il ne concerne qu’encore très peu les nouveau-nés, l’augmentation du nombre des infections à entérobactéries résistantes aux céphalosporines n’est pas sans poser problème dans nos prises en charge quotidiennes aux urgences. B Sur le microbiote intestinal à court terme De manière tout aussi préoccupante, les effets de l’antibiothérapie sur l’implantation de la flore digestive à cette période clef de la mise en place du système immunitaire font l’objet de nombreuses publications décrivant des effets secondaires immédiats mais aussi différés. A cours terme, l’antibiothérapie néonatale pourrait être impliquée dans la prolifération de certaines bactéries résistantes aux antibiotiques utilisés, générant dysbioses et diarrhées. Certains auteurs ont décrit des effets des antibiotiques prolongés bien au-delà de l’arrêt du traitement . Goldenberg et al. rapportent ainsi des profils de flores observés après différentes antibiothérapies à large spectre chez un patient d’hématologie, et illustrent les bouleversements durables observés à plusieurs semaines d’intervalle tant dans la quantité que la qualité des espèces bactériennes de la flore fécale (12). De la même manière, Penders et al ont rapporté, en utilisant des RT-PCR quantitatives parmi une cohorte de 1032 nouveau-nés aux Pays Bas, des modifications de la flore fécale à l’âge d’un mois chez les enfants exposés à une antibiothérapie (amoxicilline le plus souvent). Ces modifications concernaient ici encore une diminution des genres Bifidobacterium et Bacteroides considérés comme des éléments « bénéfiques » de la flore, par opposition à Clostridium difficile et Escherichia coli (13). C Conséquences à long terme Les conséquences possibles à long terme seraient en rapport avec des perturbations provoquées dans la maturation du système immunitaire exposé à moins d’antigènes bactériens, ou des antigènes différents compte tenu du spectre des antibiotiques utilisés. S’appuyant sur l’hypothèse hygiéniste de Starkan ainsi que sur l’hypothèse de programmation de Barker, des associations ont été établies entre antibiothérapie néonatale et allergie, diabète, obésité ou encore pathologies inflammatoires.(14,15,16). Il semble aujourd’hui s’établir un consensus quant à la nécessité de préserver le microbiote afin de maintenir un équilibre hôte/bactérie. On réalise que la balance bénéfice-risque longtemps en faveur d’une approche très interventionniste des pédiatres doit être réévaluée à la lumière des nouvelles données épidémiologiques et écologiques. Ainsi, les indications d’antibiothérapies doivent être identifiées à l’aide de règles de décisions cliniques établies à partir de données actualisées, en utilisant de nouveaux marqueurs diagnostics susceptibles d’aider le clinicien dans l’identification, idéalement, des seuls enfants infectés. La nature des antibiotiques utilisés doit également être revue, en particulier l’utilisation de molécules à large spectre comme les céphalosporines de 3ème génération. La durée des antibiothérapies pourrait également être revue à la baisse, le niveau de preuve dans ce domaine étant très modeste. 3 La procalcitonine à l’aide du pédiatre Procalcitonine dosée en post natal et procalcitonine dosée au cordon La procalcitonine (PCT) est un marqueur inflammatoire étudié depuis de nombreuses années, et qui a montré, chez l’adulte (17), puis chez l’enfant, une bonne valeur diagnostique pour l’infection bactérienne (18). Les études concernant le nouveau-né sont moins nombreuses. L'étude de la cinétique de variation physiologique de la PCT la première semaine de vie par D. Turner (19), souligne la difficulté d'interprétation de ce marqueur en période néonatale précoce, du fait de son augmentation physiologique durant les 48 à 72 premières heures de vie, période qui correspond pourtant au moment où le diagnostic d’IMF doit être porté. Les auteurs décrivaient également des variations en rapport avec l’âge gestationnel de l’enfant, complexifiant encore son interprétation. Joram et al. (20) ont montré dès 2006 que la PCT dosée de manière semi-quantitative, initialement au cordon ombilical, permettait de s’affranchir de ce pic postnatal physiologique et de distinguer de manière discriminante les enfants infectés des enfants sains. Les auteurs ne retrouvaient pas par contre un effet de l’âge gestationnel sur le résultat du dosage au cordon. La même équipe a confirmé l’intérêt de ce marqueur en rapportant l’expérience de 4 années d’utilisation d’un dosage quantitatif, cette fois la PCT au cordon en routine dans une maternité de niveau 3 (8). Le seuil pathologique a été fixé à 0,6 ng/ml comme meilleur compromis entre sensibilité et spécificité. Les performances diagnostiques ont été jugées prometteuses avec une sensibilité à 92%, une spécificité de 97%, un rapport de vraisemblance positif de 32 et négatif de 0.08. Ces valeurs diagnostiques semblent même supérieures à celles des facteurs de risque habituellement utilisés et recommandés jusqu’alors par l’ANAES, en particulier celle de l’analyse microbiologique du liquide gastrique (21) dont la sensibilité est estimée à 64%, la spécificité à 88.6%, le rapport de vraisemblance positif à 5.6 et négatif 0.41. En effet, la fréquente discordance entre examen direct et culture microbiologique laissent à penser que l’utilisation de l’examen direct du liquide gastrique pourrait induire le clinicien en erreur dans le choix de l’antibiothérapie probabiliste initiale. De fait, les pédiatres français demeurent parmi les seuls à utiliser encore l’examen microbiologique des prélèvements périphériques, aujourd’hui non recommandés par les experts de l’American Academy of Pediatrics ou encore du National Institute for Health and Clinical Excellence en Angleterre (22,23). La question de l’utilisation des résultats microbiologiques du liquide gastrique pour l’adaptation secondaire de l’antibiothérapie chez le nouveau-né infecté, sans documentation bactérienne autre, mérite toutefois d’être discutée. A l’issue de ces travaux préliminaires, la même équipe propose d’intégrer la PCT à un algorithme de prise en charge des nouveau-nés suspects d’IMF dans le but d’identifier plus précisément les enfants relevant d’un bilan biologique complémentaire, d’une antibiothérapie ou d’une surveillance hospitalière. Intégration de la PCT à un algorithme diagnostique Cabaret et al ont publié récemment un travail visant à évaluer la valeur diagnostique d’un algorithme de prise en charge des enfants suspects d’infection materno-fœtale intégrant le résultat de la PCT au cordon. Leur but était d’évaluer l’économie possible d’examens complémentaires, d’hospitalisation et d’antibiothérapie, tout en vérifiant les performances diagnostique de l’algorithme afin de s’assurer que tous les nouveau-nés infectés seraient rapidement identifiés.(5) Dans ce travail, portant sur 755 nouveau-nés suspects d’IMF les valeurs diagnostiques de la prise en charge habituelle du centre de naissance (basée sur les recommandations de l’ANAES) et du nouvel algorithme évalué n'étaient pas significativement différentes. En utilisant ce nouvel algorithme, tous les nouveau-nés infectés (n=4) auraient été traités, le nombre de bilans aurait été significativement diminué (13,6% versus 46,8% ) permettant une diminution significative des coûts. Les auteurs n’observaient par contre pas de diminution significative des prescriptions antibiotiques. Un nouvel algorithme a donc été proposé (figure 1) par la même équipe afin de permettre en priorité de diminuer le nombre des antibiothérapies néonatales (24). Il a été nécessaire pour cela d’intégrer de nouveau un dosage de CRP à la population des enfants asymptomatiques mais dont la PCT au cordon était positive (0,6 ng/ml). Ce nouvel algorithme a ainsi été appliqué rétrospectivement à une cohorte constituée prospectivement de 2366 nouveau-nés suspects d’IMF. Ces performances diagnostiques semblent cette fois supérieures à celles du protocole de prise en charge actuel. Les probabilités post-test en cas de test positif étaient de 9% ; IC95% (7,8-10,2) vs 6% IC95% (5-7) et en cas de test négatif de 0,001% IC95% (0-10-6) vs 0,001% IC95% (0-10-6 ). Ce nouvel algorithme permettrait aussi une diminution significative du nombre d’examens complémentaires (12,7% vs 39,6% p <0.00001) ainsi que, cette fois, des prescriptions antibiotiques (8,9% vs 13,3%p = 0.00001). 4 Conclusion L’épidémiologie de l’IMF a changé, il est urgent de pouvoir adapter nos stratégies diagnostiques et thérapeutiques afin de limiter le désagrément pour les familles et l’exposition délétère aux antibiotiques des nouveaunés. Pour autant, le dosage de la PCT au cordon ne doit pas être utilisé comme une « boule de cristal », mais comme un outil de triage intégré a un algorithme diagnostique permettant, pour un nouveau-né suspect d’IMF, d’apprécier plus précisément sa probabilité d’être infecté et de choisir la stratégie de prise en charge la mieux adaptée à sa situation. Ainsi, compte tenu du caractère unicentrique et rétrospectif de nos derniers travaux, nous proposons de valider cette approche à l’occasion d’une étude nationale multicentrique, contrôlée prospective, randomisée en cluster. Une dizaine de maternité de niveau 2 et 3 ainsi qu’une clinique de niveau 2 se sont déjà proposés pour participer à cette étude qui fera l’objet d’une demande de financement au PHRC 2014. Ce travail pourra être également l’occasion de tester plusieurs alternatives thérapeutiques, tant sur la nature des molécules utilisées (amoxicilline en première intention ? bithérapie systématique avec de la gentamicine ?), que sur la durée des traitements ; certains travaux rapportant des résultats convaincants sur l’utilisation de la PCT dans l’adaptation de la durée de l’antibiothérapie (25). L’écriture de nouvelles recommandations apparaît ainsi comme une nécessité ; l’accumulation de nouvelles données épidémiologiques, cliniques et biologiques depuis plus de 10 ans nous offrant sans doute la possibilité de traiter moins mais traiter mieux les nouveau-nés suspects d’infection materno-fœtale. Figure 1 Références 1. Edmond K. and Zaidi A. New approaches to preventing, diagnosing, and treating neonatal sepsis. PLoS Med 2010;7: p. e1000213 2. Seale A.C., Mwaniki M., Newton C.R. et al. Maternal and early onset neonatal bacterial sepsis: burden and strategies for prevention in sub-Saharan Africa. Lancet Infect Dis 2009. 9: p. 428-38. 3. Koenig J.M. and Keenan W.J., Group B streptococcus and early-onset sepsis in the era of maternal prophylaxis. Pediatr Clin North Am, 2009. 56: 689-708 4. Verani JR, McGee L, Schrag SJ et al. Division of Bacterial Diseases, National Center for Immunization and Respiratory Diseases, Centers for Disease Control and Prevention (CDC). Prevention of perinatal group B streptococcal disease—revised guidelines from CDC, 2010. MMWR Recomm Rep. 2010;59(RR-10):1–36 5. Diagnostic et traitement curatif de l'infection bactérienne précoce du nouveau-né, ANAES, Editor. 2002. 6. Cabaret B, Laurans C, Launay E et al. Diagnostic value of a new procalcitonin cord sample-guided algorithm to manage newborns suspected of early-onset infection.. Arch Pediatr 2013 Jul 19. 7. Noguer Stroebel A, Thibaudon C et al. Early neonatal bacterial infections: could superficial bacteriologic samples at birth be limited?. Arch Pediatr 2008;15:375-81. 8. Joram N, Muller JB, Denizot S et al. Umbilical cord blood procalcitonin level in early neonatal infections: a 4year university hospital cohort study. Eur J Clin Microbiol Infect Dis. 2011;30:1005-13. 9. Buttery J.P. Blood cultures in newborns and children: optimising an everyday test. Arch Dis Child Fetal Neonatal Ed 2002. 87: F25-8. 10. Stocker M, Fontana M, El Helou S et al. 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Neonatal Procalcitonin Intervention Study (NeoPInS): Effect of Procalcitonin-guided decision making on duration of antibiotic therapy in suspected neonatal early-onset sepsis: A multi-centre randomized superiority and non-inferiority Intervention Study. BMC Pediatr. 2010 8;10:89. LES DEFAUTS DU DEVELOPPEMENT TESTICULAIRE : QUELLES DECISIONS PRENDRE Par Claire Bouvattier, Pierre Bougnères. Endocrinologie Pédiatrique, Hôpital Bicêtre. Centre de référence des maladies du développement sexuel. La naissance néonatale d’un nourrisson aux organes génitaux anormaux (anomalies de la différenciation sexuelle, ADS) est toujours un grand traumatisme et une surprise pour les parents et les soignants. Quelques règles simples doivent être appliquées. On expliquera aux parents que l’aspect des organes génitaux ne permet pas pour l’instant de se prononcer sur le sexe de l’enfant. Des mots « indifférenciés », non sexués, sont utilisés pour décrire les organes génitaux : bourgeon génital, bourrelets génitaux et gonades. Le nouveau-né est examiné en présence de ses parents qui lui donneront un surnom, en attendant que la déclaration à l’état civil puisse être faite. Les termes ambiguïté, hermaphrodisme… sont à bannir. La naissance d’un nouveau-né aux organes génitaux inhabituels permet de surseoir transitoirement à la déclaration de l’enfant auprès des autorités d’Etat Civil (circulaire du 28 octobre 2011 du code Civil). En pratique, le médecin rédige un certificat expliquant que la déclaration du sexe est actuellement impossible, et demandant un délai, avant la déclaration du prénom et du sexe de l’enfant. La présence de gonades palpables à l’examen clinique est primordiale pour le raisonnement étiologique: si une gonade est palpée, c’est à priori un testicule, et donc un défaut de virilisation chez un nouveau-né dont le caryotype comprend le plus souvent un chromosome Y. On parle d’ADS 46,XY. En moins de 48h, le diagnostic de sexe chromosomique sera confirmé. Le dosage de la 17OH-progestérone (ne pas attendre le résultat du dépistage néonatal) éliminera un déficit en 3‑hydroxysteroide deshydrogénase (risque vital d’insuffisance surrénalienne). L’échographie pelvienne recherchera des dérivés Müllériens (vagin, utérus). La testostérone et l’AMH seront prélevés dans les 36 premières heures de vie. Un transfert rapide de l'enfant et de sa mère dans un centre spécialisé permettra un bilan étiologique complet. La prise en charge des ADS du nourrisson est loin d’être simple. Les décisions thérapeutiques dépendent de l'anatomie des organes génitaux et des possibilités de réparation chirurgicale (cavité vaginale, utérus, taille du bourgeon génital, ...), du diagnostic étiologique et de l'évolution prévisible, en particulier en période post-pubertaire. Chez des garçons mal virilisés (ADS 46,XY), l'enquête étiologique, longue et délicate, ne permet un diagnostic étiologique que dans 50 % des cas. La présence ou non de dérivés Müllériens à l'échographie pelvienne distingue les anomalies de la production ou de la réceptivité à la testostérone (pas d’utérus), des dysgénésies testiculaires où les gonades sécrètent insuffisamment la testostérone et l’AMH (l’utérus ne régresse pas). Le phénotype va du type féminin complet à la présence d'un hypospade périnéal ou scrotal. Les gonades sont situées dans les bourrelets génitaux, en position plus ou moins haute, dans la région inguinale ou en position abdominale. Des anomalies du développement génital sont observées dans de nombreux syndromes malformatifs, comme le syndrome de SmithLemli-Opitz (déficit en 7-dehydrocholesterol réductase). L’hypospade est une malformation fréquemment retrouvée chez les nourrissons porteurs de retards de croissance intra utérin, en particulier harmonieux et sévères. Les anomalies de la différenciation sexuelle sont le plus souvent découvertes en période néonatale, lors de l'examen des organes génitaux du nouveau-né. Moins habituellement, l’échographie prénatale met en évidence une anomalie des organes génitaux. Parfois, c’est la discordance entre le phénotype et le caryotype, alors que l’amniocentèse a été pratiquée pour une autre raison, qui fait évoquer le diagnostic. Une anomalie des organes génitaux externes peut être reconnue ou suspectée à l’échographie du deuxième trimestre, et le plus souvent après 22 SA. La détermination du sexe fœtal sur sang maternel permet d’orienter rapidement le diagnostic. Si la recherche de SRY dans le sang maternel est positive, le caryotype de l’enfant comporte un chromosome Y. La question d’un choix de sexe différent du sexe génotypique peut se poser (par exemple dans les dysgénésies gonadiques mixtes 45,X/46,XY ou les insensibilités partielles aux androgènes). L’amniocentèse permet l’analyse du caryotype, le dosage de la testostérone et de ses précurseurs, et l’analyse du récepteur des androgènes si la testostérone est normale ou élevée. Les futurs parents pourront rencontrer un endocrinologue pédiatre, un généticien, un chirurgien, un psychologue, s’ils le souhaitent. Le grand bénéfice de la prise en charge prénatale est de permettre une information claire et parfois la détermination du sexe de l’enfant dès la naissance. Ceci permet d’éviter de surseoir à la déclaration de l’enfant à l’état civil. La découverte d’une anomalie des organes génitaux externes, en prénatal ou à la naissance, justifie des explorations à visées étiologiques, afin de permettre une prise en charge optimale. L’impact de ces malformations à long terme est mieux connu. Les anomalies de la différenciation sexuelle nécessitent la coopération de plusieurs disciplines : endocrinologue pédiatre, généticien, biologiste, psychiatre, gynécologue-obstétricien, radiologue et chirurgien. REFERENCES : Ogilvy-Stuart AL et al. Early assessment of ambiguous genitalia. Arch Dis Child.2004;89:401–407. Hughes IA et al. Consensus statement on management of intersex disorders. Arch Dis Child. 2006;91: 554–563. Warne G.L. Raza J. Disorders of sex development, their presentation and management indifferent cultures. Reviews in Endocrine & Metabolic Disorders 2008;9:227–236. Main KM et al. Low birth weight and male reproductive function. Hormone Research 2006;65:116–122. Van der Zanden LFM et al. Aetiology of hypospadias : a systematic review of genes and environment. Hum Reprod Update 2012;18:260-283 HYPONATREMIES DU NOUVEAU-NE : UN SUJET SALE ? Par Laetitia Martinerie, Delphine Zenaty, Dominique Simon, Juliane Léger, Jean-Claude Carel Service d’Endocrinologie et Diabétologie Pédiatrique, Hôpital Robert Debré, 48 boulevard Sérurier, 75019 Paris [email protected] I. Physiologie de la balance hydrosodée du nouveau-né A. Physiologie générale Au sein de l’organisme, l’eau totale se répartit en deux sous-compartiments séparés par la membrane cellulaire : le compartiment intracellulaire et le compartiment extracellulaire. Ce dernier est constitué par le secteur vasculaire et le secteur interstitiel. La teneur en eau de l’organisme dépend du stock hydrique, mais sa répartition entre les compartiments cellulaire et extracellulaire et donc l’hydratation de ces deux compartiments dépend principalement du bilan sodé. Chez l’homme, le bilan sodique est réalisé par deux variables : les entrées alimentaires (100 à 200 mmol/j) et les sorties rénales et extrarénales. L’efficacité du contrôle rénal de la balance hydrosodée repose sur l’équilibre du débit filtré de sodium (dépendant de la natrémie et du débit de filtration glomérulaire) et de la réabsorption tubulaire de sodium. Les parties distales du néphron sont les plus impliquées dans la régulation fine du bilan sodé permettant d’aboutir à un bilan nul et de préserver un état d’hydratation extracellulaire stable. Les effecteurs de cette régulation agissent en réponse à la stimulation de barorécepteurs et volorécepteurs ; ce sont notamment divers systèmes neuro-endocriniens dont le système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), le facteur atrial natriurétique, l'innervation végétative ou le système des prostaglandines. Les segments néphroniques exprimant le récepteur minéralocorticoïde, récepteur principal de l’aldostérone, hormone centrale de la réabsorption sodée, sont regroupés sous le terme de néphron distal sensible à l’aldostérone (Aldosterone Sensitive Distal Nephron, ASDN) [1]. La réabsorption sodée s’y fait par deux transporteurs principaux : le canal épithélial à sodium (Epithelial Sodium Channel, ENaC) situé à la membrane apicale, et la pompe Na+/K+-ATPase localisée à la membrane basolatérale, assurant un transport vectorialisé de sodium de la lumière tubulaire vers le milieu intérieur (Figure 1). Les cellules principales du canal collecteur distal sont aussi le siège d’une réabsorption hydrique transépitheliale émanant de la force osmotique générée par le transport de sodium. Cette réabsorption se fait à travers les canaux aquaporiques : AQP2, dont l’expression à la membrane apicale est induite par la vasopressine et AQP3 et AQP4 exprimés à la membrane basolatérale de façon constitutive. Le canal collecteur apparait donc comme le siège de la modulation finale de l’excrétion rénale du sodium, du potassium et de l’eau [2]. Figure 1 : Mécanisme de la réabsorption du sodium dans la cellule du canal collecteur cortical (CCD). ENaC : canal épithélial à sodium. ROMK : canal potassique. • Rôle de la voie d’activation minéralocorticoïde La première étape de l’activation de la voie minéralocorticoïde est caractérisée par la biosynthèse et la sécrétion de l’aldostérone, hormone stéroïdienne, qui représente l’hormone minéralocorticoïde prédominante chez les mammifères. Cette hormone est synthétisée au niveau de la zone glomérulée de la corticosurrénale. La régulation de la biosynthèse et de la sécrétion de l’aldostérone est complexe. Elle peut être divisée en deux phases : une régulation rapide (dans les minutes ou heures qui suivent la stimulation) au cours de laquelle la production d’aldostérone est contrôlée par une augmentation du transport de cholestérol vers la membrane interne de la mitochondrie, régie par une expression accrue de la protéine StAR ; et une régulation lente, chronique (plusieurs heures à quelques jours), au cours de laquelle la production d’aldostérone est augmentée par induction de l’expression de l’aldostérone synthase (dernière enzyme de la chaîne de biosynthèse de l’aldostérone, dont l’expression est spécifique à la zone glomérulée). Ces deux phases de production font intervenir majoritairement trois régulateurs : le système rénine-angiotensine principalement, le potassium extracellulaire, et à un moindre degré l’ACTH. L’adostérone agit principalement en se liant à un récepteur, le récepteur minéralocorticoïde (MR), récepteur nucléaire stéroïdien, qui est un facteur de transcription hormono-dépendant. Comme l’illustre la Figure 2, au niveau de la cellule du canal collecteur, le MR, après liaison à l’aldostérone, est transféré dans le noyau, où il se fixe aux éléments de réponse spécifiques de l’ADN, recrute des coactivateurs et induit la transcription de gènes cibles. Parmi ceux-ci, la sous-unité ‑ du canal épithélial à sodium (ENaC) et la pompe Na-K-ATPase de la membrane basolatérale [3]. Deux autres protéines ont un rôle majeur dans le maintien de la balance hydrominérale au niveau de cette cellule. Il s’agit du récepteur de l’arginine-vasopressine (V2R), localisé sur la membrane basolatérale, qui après fixation de la vasopressine, induit, l’exocytose à la membrane apicale de granules contenant les canaux AQP2. La synthèse et la régulation post-transcriptionnelle de AQP2 sont également sous la dépendance du MR [4]. Les glucocorticoïdes participent également indirectement à la régulation de la balance hydrosodée de l’organisme en pouvant activer le MR et en régulant négativement la biosynthèse et la sécrétion de l’hormone antidiurétique [5]. Figure 2 : Principaux gènes cibles du MR impliqués dans la réabsorption hydrosodée au niveau de la cellule du canal collecteur cortical. D’après [3]. • Rôle de l’hormone antidiurétique : vasopressine ou ADH L'ADH est une hormone synthétisée dans les noyaux supra-optiques du système nerveux central, stockée dans la neurohypophyse et sécrétée en réponse à de nombreux stimuli comme l'hypertonicité plasmatique, l'hypovolémie, l'hypotension, la nausée, l'hypoglycémie, la douleur, et d'autres situations de stress comme l'hyperthermie. En situation physiologique, la variable la plus importante régulant la sécrétion d'ADH est l’augmentation de la pression osmotique du plasma, qui stimule les osmorécepteurs de l'hypothalamus antérolatéral. En réponse à cette sécrétion d'ADH, l'épithélium du tubule collecteur devient perméable à l'eau par l'insertion à la membrane apicale des canaux aquaporines. En l'absence d'ADH ou par inactivation de son récepteur rénal, le récepteur V2R, l'épithélium du tubule collecteur est imperméable à l'eau et les urines sont diluées, hypotoniques (diabète insipide). A l’inverse, en cas de sécrétion accrue et inappropriée d’ADH (SIADH), toute l’eau est réabsorbée et les urines deviennent très concentrées, hypertoniques. B. Particularités du nouveau-né In utero, l’homéostasie fœtale est contrôlée par le placenta. Le rein ne joue qu’un rôle accessoire. La filtration glomérulaire débute à la 10e semaine de grossesse (SG) et la première urine est émise, contribuant à la production du liquide amniotique. Vers la 36e semaine de gestation, la néphrogenèse est achevée, et le rein, bien que toujours immature, peut prendre le relais du placenta dans la régulation de l’équilibre hydrosodé du fœtus. L’immaturité des principales fonctions rénales (hémodynamique, glomérulaire et tubulaire) chez le nouveau-né, la transition entre le milieu aquatique intra-utérin et le milieu terrestre extra-utérin et la nécessité de s'adapter aux besoins d'une croissance rapide, rend cette phase d’adaptation d’autant plus fragile. La croissance nécessite la mise en place d’un bilan hydro-électrolytique positif, avec des apports supérieurs aux sorties. • Répartition des compartiments hydriques Alors que la répartition des différents compartiments est fixe chez l’adulte, le pourcentage d’eau entrant dans la composition corporelle et sa répartition au sein de l’organisme entre les différents compartiments hydriques subit des modifications considérables au cours de la vie fœtale, néonatale et postnatale. Ces variations résident en grande partie sur la croissance cellulaire et l’augmentation de la masse grasse et varient entre le nouveau-né à terme, le prématuré, ou le nouveau-né avec retard de croissance intra-utérin. La perte de poids physiologique observée durant la période néonatale (5 à 10 % du poids du corps) se fait principalement au détriment du secteur extracellulaire et plus particulièrement du secteur interstitiel (le secteur vasculaire reste stable). Le débit urinaire des nouveau-nés à terme est compris entre 1 et 3 ml/kg/h. La réduction du volume extracellulaire atteint couramment 15 % du poids corporel chez le prématuré et est associée à un débit urinaire pouvant atteindre 7 ml/kg/h [6]. Parallèlement, la filtration glomérulaire augmente brutalement au cours des premières heures de vie, mais reste faible (20 ml/min/1.73m2), augmentant progressivement pour atteindre des chiffres proches de l’adulte à l’âge de 1 an. Toutes ces modifications hémodynamiques rénales sont contrôlées par un ensemble de facteurs hormonaux vasoactifs, dont l’angiotensine II et les prostaglandines rénales [7]. • Régulation rénale de l’excrétion hydrique Le mécanisme de concentration-dilution des urines est essentiel afin d’assurer la régulation du bilan hydrique. Celui-ci dépend essentiellement de l’action de la vasopressine. Chez le nouveau-né, le pouvoir de concentration des urines est plus faible, de l’ordre de 600 mOsm/kg, voire 500 mOsm/kg chez le prématuré. Cette hypotonicité est liée à la maturation incomplète de l’anse de Henlé, au faible gradient cortico-médullaire et à la faible excrétion uréique du fait de l’anabolisme élevé [8]. De plus, bien que la production de vasopressine soit normale, l'ADH étant présente chez le fœtus dès la 11e semaine de gestation [9], il existe une résistance du canal collecteur à son action, à la naissance. La protéine AQP2 est détectée dès la 12e semaine de gestation au niveau de la membrane apicale des cellules des différentes branches du bourgeon urétéral et du système collecteur [10]. L’incapacité du nouveau-né à concentrer ses urines n’est donc pas liée à l’absence d’expression de l’AQP2, mais à l’absence de modifications post-traductionnelles nécessaires à son activation ou à son adressage membranaire, lié à une absence d’activation néonatale de la voie minéralocorticoïde [11,12]. Les taux élevés de prostaglandines rénales contribuent également à la diminution de la réabsorption hydrique du canal collecteur et la formation d’AMPc en réponse à la vasopressine est limitée. Le pouvoir de concentration des urines augmente progressivement et atteint des taux adultes vers l’âge de 1 an [8]. A l’inverse, le pouvoir de dilution des urines est acquis in utero, et ne diffère pas entre le prématuré, le nouveau-né à terme et l’adulte. Dans les conditions physiologiques normales, les reins du nouveau-né à terme doivent excréter la surcharge hydrique acquise au cours de la vie fœtale. De ce fait, la faculté de concentration maximale des urines n’est pas nécessaire à la naissance. Cependant, chez l’enfant prématuré, dont la surcharge hydrique est plus grande et le pouvoir de concentration des urines plus faible, le risque de désordres hydro-électrolytiques devient important. • Régulation rénale du sodium Le contrôle rénal de l’excrétion sodée apparaît capital au maintien de la volémie ainsi que pour assurer un bilan sodé positif, indispensable à la croissance. La fraction excrétée de sodium est élevée à la naissance puis diminue progressivement chez le nouveau-né à terme et atteint moins de 1 %. La mise en place des mécanismes de régulation de la balance hydrosodée, et de ses principaux acteurs au niveau du néphron distal (ENaC, Na/K-ATPase, AQP2), est en étroite relation avec la voie minéralocorticoïde. Toutes les enzymes de la stéroïdogenèse surrénalienne sont exprimées, et ce, dès la 8-9e SG [13]. La voie de biosynthèse des hormones surrénaliennes, et particulièrement de l’aldostérone, est donc en place et fonctionnelle précocement au cours du développement. Cependant, en période néonatale, il existe une insensibilité rénale physiologique à l’aldostérone, qui se traduit par des taux circulants d’aldostérone élevés, contrastant avec des signes fonctionnels d’hypoaldostéronisme (hyponatrémie, hyperkaliémie, perte urinaire de sel) [14] expliquant, en partie, la perte de poids physiologique observée chez tous les nouveau-nés. Cette résistance à l’aldostérone à la naissance est liée à la baisse drastique d’expression du MR (et de ses différents gènes cibles, ENaC, Na-K-ATPase) dans les parties distales du néphron, après une expression fœtale transitoire (20-25 SA), qui réapparaît ensuite en période post-natale, parallèlement à la maturation tubulaire rénale [12]. Il existe donc à la naissance une hyponatrémie transitoire physiologique. La réapparition très progressive du MR rénal en période postnatale rend les capacités d’activation de la voie minéralocorticoïde aisément dépassées en cas de situation pathologique (infection urinaire, déshydratation, gastro-entérite, vomissements, etc…). La perte physiologique de poids des premiers jours de vie, la résistance néonatale du tube collecteur à l’action de l’aldostérone et de l’ADH, font que les pathologies congénitales hormonales de la réabsorption hydrosodée, ne se révèlent généralement que dans la deuxième semaine de vie. II. Hyponatrémie L’hyponatrémie se définit par une diminution de la concentration du sodium plasmatique en deçà de 135 mmol/l. Celle-ci peut-être divisée en trois catégories : les hyponatrémies isotoniques, hypertoniques ou hypotoniques, fonction de l’osmolarité plasmatique. Ces dernières se subdivisent en hyponatrémies hypotoniques isovolémiques, hypervolémiques ou hypovolémiques, selon qu’elles sont liées à des pertes sodées rénales ou extra-rénales et/ou à une rétention d’eau. L’examen clinique, l’anamnèse et la natriurèse permettent de s’orienter (Tableau 1). Si l’hyponatrémie s’installe de manière brutale, les signes cliniques sont dominés par les signes neurologiques : l’encéphalopathie hyponatrémique, témoignant de l’œdème cérébral. Les manifestations en sont des nauséesvomissements, somnolence, agitation inhabituelle, augmentation du périmètre crânien, des convulsions, troubles de la conscience, voire un arrêt cardio-respiratoire. Si l’hyponatrémie s’installe plus progressivement, celle-ci est mieux tolérée et d’autres signes cliniques peuvent être au premier plan tels qu’une mauvaise prise de poids +++ ou des œdèmes (fonction de l’étiologie) chez le nouveau-né. Comme nous l’avons vu précédemment, le nouveau-né se caractérise par une immaturité importante des systèmes de régulations fines de la balance hydrosodée. Ainsi, plusieurs facteurs contribuent à augmenter le risque de survenue d'une hyponatrémie en période néonatale. Dans un contexte de sécrétion d'ADH, la survenue d'une hyponatrémie peut être le résultat d'une surcharge hydrique pure en raison des besoins nutritionnels, d'un déficit relatif en Na, qui se traduit au début par une stagnation pondérale, et peut aboutir, s'il se prolonge, à un retard de croissance et des lésions neurologiques. Nous avons choisi de développer ici la conduite à tenir face à la découverte d’une hyponatrémie chez un nouveau-né à l’exclusion des hyponatrémies iatrogènes (diurétiques, apports sodés insuffisants, perfusion, postopératoire, etc.). Nous détaillerons principalement les étiologies hormonales. III. Orientations étiologiques Face à la découverte d’une hyponatrémie chez un nouveau-né, il est important d’évaluer l’état clinique de l’enfant à la recherche de signes de retentissement (signes neurologiques) et de signes en faveur de l’origine étiologique (poids, œdèmes, signes de déshydratation, dyspnée d’acidose). L’examen clinique sera complété par des examens biologiques permettant d’orienter la démarche diagnostique et thérapeutique : - Natrémie et natriurèse sur une miction (poche ou compresse) - Kaliémie, bicarbonates - Protidémie, urée, créatininémie - Osmolarité sanguine - Osmolarité urinaire - Glycémie La démarche diagnostique et étiologique est résumée dans le Tableau I. En période néonatale, les étiologies de l’hyponatrémie sont dominées par les hyponatrémies hypotoniques, hypovolémiques. En dehors de ces étiologies, un diabète néonatal transitoire ou définitif sera éliminé par la mesure de la glycémie, l’hypothyroïdie congénitale est généralement associée à d’autres signes cliniques (ictère prolongé, hypotonie, fontanelle large,.. ), de même que l’insuffisance en glucocorticoïdes (insuffisance corticotrope dans le cadre de déficits antéhypophysaires multiples congénitaux, ou d’origine surrénalienne par anomalie de la voie de signalisation du récepteur de l’ACTH), avec hypoglycémie et hyponatrémie isolée, euvolémique, sans hyperkaliémie. Le SIADH néonatal est extrêmement rare, lié à une pathologie infectieuse intercurrente (méningite, pneumopathie) et le Cerebral Salt-Wasting Syndrome (CWS) est exceptionnel. Enfin, les causes d’hyponatrémie hypotoniques hypervolémiques seront évoquées devant la présence d’œdèmes (liés à une rétention hydrosodée importante, avec rétention hydrique > rétention sodée) et d’autres signes cliniques spécifiques orientant vers une insuffisance cardiaque, une insuffisance hépato-cellulaire, une insuffisance rénale ou un syndrome néphrotique congénital. Les hyponatrémies hypotoniques (osmolarité plasmatique < 280 mosmol/l) hypovolémiques (stagnation pondérale, perte de poids, signes de déshydratation) sont liées à une perte sodée excessive d’origine rénale ou extra-rénale (perte sodée > perte hydrique, osmolarité urinaire > 400 mosmol/l). A. Pertes sodées d’origine extra-rénale Dans ces situations, la natriurèse est inférieure à 20 mmol/l, témoignant d’une réponse adaptée du rein face à l’hyponatrémie. Les causes digestives : diarrhées, vomissements, notamment dans le cadre de gastro-entérites aiguës sont les causes les plus fréquentes. Le jeune nourrisson est particulièrement sujet à la déshydratation au cours des épisodes de gastroentérite aiguë en raison de l'importance de son secteur extracellulaire et de son renouvellement qui peut atteindre 50 % par jour. Les déshydratations sont hypotoniques dans 25 % des cas [15]. Les signes hémodynamiques sont plus fréquents en cas d'hyponatrémie, du fait du mouvement d'eau surajouté du secteur extracellulaire vers le secteur intracellulaire. L'existence d'une hyponatrémie représente un facteur de risque de décès d'une gastro-entérite aiguë. Les autres étiologies de pertes sodées extra-rénales sont beaucoup plus rares : 3e secteur liquidien (gastro-entérite, pancréatite, péritonite, brûlure,…), pertes cutanées chez le grand prématuré. Tableau I : Orientation diagnostique devant une hyponatrémie du nouveau-né. (SIADH : Sécrétion Inappropriée d’Hormone AntiDiurétique ; OGE : Organes Génitaux Externes). B. Pertes sodées d’origine rénale Ces situations seront évoquées devant une natriurèse inappropriée en regard de l’hyponatrémie : natriurèse > 20 mmol/l. Elles s’associent en règle générale à une acidose et à une kaliémie élevée, en dehors de l’acidose tubulaire proximale où la kaliémie est basse. Afin de différencier les pathologies hormonales et les pathologies rénales (néphropathies tubulo-interstitielles), des dosages hormonaux seront réalisés : aldostérone, rénine, cortisol, ACTH, avant tout traitement, ainsi qu’un examen cytobactériologique des urines, et une échographie rénale. • Insuffisance surrénalienne globale Associant déficit en minéralocorticoïdes (voir ci-dessous) et déficit en glucocorticoïdes. Le déficit en minéralocorticoïdes provoque une perte de sel accompagnée de difficultés de concentrations des urines. Le déficit en glucocorticoïdes s’accompagne d’une rétention hydrique accrue, par sécrétion inappropriée d’ADH. Le déficit combiné de l’ensemble de ces hormones conduit donc à une hyponatrémie par un double mécanisme. Les dosages de rénine et ACTH sont élevés et ceux du cortisol et de l’aldostérone sont normaux ou bas, inadaptés. Les étiologies des insuffisances surrénaliennes congénitales sont nombreuses, liées à des anomalies génétiques de développement de la surrénale ou enzymatiques dans la chaîne de biosynthèse des hormones surrénaliennes (± gonadiques), et peuvent s’accompagner dans ces situations d’une anomalie de développement des organes génitaux externes, voire d’une réversion sexuelle complète. Il convient donc devant toute suspicion d’insuffisance surrénalienne de bien examiner les organes génitaux externes, de rechercher la présence ou l’absence de gonades et l’existence d’un hypospade ou d’une hypertrophie clitoridienne. Le bilan étiologique pourra dans ces situations être complété par un dosage de la 17-OH progestérone, de la ‑4-androstènedione et de la testostérone et la réalisation d’une échographie pelvienne (organes génitaux internes) ± caryotype. L’hématome bilatéral des surrénales néonatal peut exceptionnellement être responsable d’une insuffisance surrénalienne, généralement transitoire. • Déficit isolé en minéralocorticoïdes Dans cette situation, les dosages d’ACTH et de cortisol sont normaux, la rénine est très élevée et la concentration plasmatique d’aldostérone est inadaptée (normale ou basse). L’absence de biosynthèse d’aldostérone est liée à une mutation inactivatrice à l’état homozygote du gène de l’enzyme aldostérone-synthase : CYP11B2 [16]. Plusieurs mutations du gène CYP11B2 ont été décrites chez l’homme. Quelles que soient ces mutations, elles n’entravent aucunement le développement fœtal, mais ont une révélation postnatale, dans les semaines qui suivent la naissance. • Pseudohypoaldostéronisme de type I Le pseudohypoaldostéronisme de type I dans sa forme autosomique dominante, est caractérisé par une résistance à l’action rénale de l’aldostérone. Les patients atteints présentent précocement, durant les premières semaines de vie, une déshydratation, une stagnation pondérale, une hyperkaliémie, une hyponatrémie et une acidose métabolique, malgré des taux élevés d’aldostérone et de rénine plasmatique. Une supplémentation sodée est nécessaire à leur survie durant l’enfance, puis peut-être supplantée par une alimentation riche en sel au-delà des premières années de vie. Les adultes conservent cependant des taux d’aldostérone et rénine plasmatique très élevés [17]. Ces anomalies sont en rapport avec une mutation inactivatrice du MR, à l’état hétérozygote. A ce jour, une cinquantaine de mutations responsables de ce syndrome ont été décrites, réparties sur l’ensemble du gène [3]. Ceci suggère un phénomène d’haplo-insuffisance, non formellement démontré, avec seulement 50 % des récepteurs produits fonctionnels, émanant de l’allèle non muté. Etonnamment, aucune mutation à l’état homozygote n’a été identifiée jusqu’à présent, suggérant que ce phénotype serait létal in utero. La perte d’un seul allèle suffit pour le développement des symptômes de la maladie. Dans la forme récessive du pseudohypoaldostéronisme de type 1, liée à une mutation à l’état homozygote du canal ENaC, le tableau est beaucoup plus sévère, avec notamment une insuffisance respiratoire néonatale par défaut de clairance du liquide alvéolaire [18]. • Pseudohypoaldostéronisme transitoire Ce tableau est identique à celui du pseudohypoaldostéronisme de type I dans sa forme dominante, mais est décrit chez les nourrissons, uniquement avant l’âge de trois mois, lors d’un épisode d’infection urinaire haute avec ou sans malformation urologique sous-jacente [19]. Les mêmes signes cliniques et biologiques sont retrouvés, notamment aldostérone et rénine plasmatique très élevées, mais après correction de l’infection urinaire, la supplémentation sodée peut être progressivement diminuée, avec un retour à la normale en quelques semaines. Il n’existe pas de mutation du récepteur minéralocorticoïde dans ces situations. Le mécanisme responsable serait l’inflammation liée à l’infection, qui provoquerait une diminution d’expression de certains gènes-cibles du MR [20] et possiblement du MR lui-même, encore peu exprimé dans le rein du nouveau-né, conduisant à une véritable résistance hormonale. IV. Prise en charge de l’hyponatrémie Les grands principes du traitement de l’hyponatrémie ne seront pas développés ici. Ils reposent sur une correction lente de la natrémie (protocoles largement diffusés) et le traitement étiologique spécifique. Dans l’hypothèse d’une insuffisance surrénalienne le traitement consistera en l’administration d’hémissuccinate d’hydrocortisone à la dose de 2 mg/kg toutes les 6 heures en IVD (à ces doses l’hémissuccinate d’hydrocortisone à une action glucocorticoïde et minéralocorticoïde), en plus des apports sodés, glucosés et en calcium, et le traitement éventuel d’une hyperkaliémie menaçante. Après corrections des troubles hydro-électrolytiques, le traitement hormonal pourra se poursuivre per os par hydrocortisone, fludrocortisone et NaCl en attente des résultats des dosages hormonaux. Références 1. Reilly RF, Ellison DH. Mammalian distal tubule: physiology, pathophysiology, and molecular anatomy. Physiol Rev. 2000; 80:277-313 2. 81 Loffing J, Schild L. Functional domains of the epithelial sodium channel. J Am Soc Nephrol. 2005; 16:3175- 3. Viengchareun S, Le Menuet D, Martinerie L et al. The mineralocorticoid receptor: insights into its molecular and (patho)physiological biology. Nucl Recept Signal. 2007; 5:e012 4. Hasler U, Leroy V, Martin PY et al. Aquaporin-2 abundance in the renal collecting duct: new insights from cultured cell models. Am J Physiol Renal Physiol. 2009; 297:F10-8 5. Davis LG, Arentzen R, Reid JM et al. Glucocorticoid sensitivity of vasopressin mRNA levels in the paraventricular nucleus of the rat. Proc Natl Acad Sci U S A. 1986; 83:1145-9 6. Modi N. 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Elle remplace la palpation manuelle, méthode classique de détection des lésions, par une image quantitative des propriétés élastiques des tissus. L’imagerie d’élasticité est déjà utilisée pour le diagnostic du cancer du sein en IRM (Philips corps entier 1.5 Tesla [1]) avec des cadences d'acquisition très lentes ou encore sur différents échographes conventionnels [2]. Toutefois, le mode implémenté sur ces échographes (appelé élastographie statique) n’est pas optimal puisqu’il est fortement dépendant du maniement de la sonde par l’utilisateur. Il faut en effet appliquer une contrainte permanente à la surface du sein à l’aide de la sonde échographique pendant l’examen. De plus, il est difficile par cette approche d’imager l’élasticité en profondeur dans les tissus, la contrainte étant appliquée uniquement à la surface de l’organe. Enfin, cette approche, appelée élastographie statique ne donne pas une image quantitative de l'élasticité des tissus, mais seulement une image qualitative basée sur la déformation des tissus sous contrainte. Les limitations de cette approche la rendent donc inadaptée aux applications pédiatriques. L’Institut Langevin a développé ces dernières années une nouvelle approche d’élastographie, appelée Shear Wave Elastography basée sur un concept d'échographe ultrarapide. Cette nouvelle approche consiste à appliquer la contrainte à distance dans les tissus à l’aide d’un faisceau ultrasonore focalisé pendant quelques dizaines de microsecondes. La réponse des tissus à cette « palpation » à distance est ensuite imagée grâce à un échographe ultrarapide capable de réaliser plusieurs milliers d’images par seconde [3]. Cette technique a donné naissance à un nouvel échographe dédié au cancer du sein commercialisé depuis novembre 2008 : l’Aixplorer de la société Supersonic Imagine. Elle est maintenant en phase d’investigation clinique pour d’autres organes comme le foie, les artères, le cœur, la thyroïde, l’œil… Son efficacité clinique (augmentation importante de la spécificité du diagnostic) a notamment été démontrée dans le diagnostic du cancer du sein lors d’une très large étude multicentrique [4]. Le Doppler Ultra-ultrasensible Le développement de l’imagerie échographique ultrarapide apporte également une résolution temporelle jamais égalée par les techniques de Doppler conventionnelles pour imager les flux sanguins dans le corps. Fort de cette avancée technologique, le laboratoire a conçu un nouveau mode Doppler ultrasensible qui permet de gagner un facteur 100 en sensibilité par rapport au mode doppler standard. Ce mode, testé in vivo sur le petit animal, est implémenté sur un prototype de recherche et permet d’imager de beaucoup plus petits vaisseaux sanguins que le mode standard comme illustré dans la figure 1. (a) 1mm (b) 1mm Figure 1. Imagerie des flux sanguins cérébraux sur un rat trépané (a) avec le mode Doppler standard et (b) avec le mode Doppler ultrasensible. (adapté de Macé et al. 2013 [5]) Applications pré-cliniques chez le rongeur Ces techniques ont été évaluées in vivo sur un modèle de rat d’ischémie cérébrale focale [6]. Ce modèle consiste à réaliser l’occlusion pendant deux heures de l’artère cérébrale moyenne de l’hémisphère droit du rat par l’introduction d’un filament par la carotide [7]. Cette occlusion provoque une lésion ischémique localisée qui constitue un bon modèle des lésions induites dans les cas graves d’asphyxie périnatale. (a) Elastographie mou 1 kPa 50 kPa dur (b) Doppler ultrasensible contrôle +1 jour +2 jours +4 jours +7 jours Temps après occlusion Figure 2. Cartes d’élasticité (a) et images des flux sanguins (b) obtenues avec l’échographe ultrarapide à différents temps après l’accident ischémique. On observe le ramollissement des tissus lésés au cours du temps et l’hyperperfusion dans la lésion (adapté de Macé et al. 2011 [8]). 12 Elasticité (kPa) (a) (b) 10 8 6 4 2 Figure 3. Quantification des paramètres de perfusion (a) et d’élasticité (b) dans la lésion ischémique. Statistiques sur 5 animaux par groupe (adapté de Macé et al. 2011 [8]). Macé et al. ont réalisé le suivi de cette lésion ischémique par élastographie et Doppler ultrasensible à différent temps 1, 2, 4 et 7 jours - après l’occlusion (N = 5 animaux par groupe) [8]. Grâce à l’élastographie, il a été observé que la lésion ischémique est plus molle que les tissus cérébraux sains (voir figure 2.a). L’évolution de cette chute d’élasticité devient de plus en plus forte entre 1 et 7 jours après l’occlusion. Grâce au doppler ultrasensible, il est également observé une forte augmentation de la perfusion dans la lésion par rapport à l’hémisphère sain (voir figure 2.ab). Avec le mode Doppler ultrasensible, la perfusion avant, pendant et juste après l’occlusion peut être monitorée et ainsi il est possible d'imager précisément la zone non irriguée du cerveau (voir figure 3). On note qu’une hyperperfusion est observée quelques minutes seulement après la reperfusion. Avant Pendant Après Figure 3. Imagerie Doppler ultrasensible réalisée avant, pendant l’occlusion et juste après reperfusion. La zone non irriguée est parfaitement identifiée pendant l’occlusion et on note une dissymétrie correspondant à une hyperperfusion dans la zone lésée juste après la reperfusion. (adapté de Macé et al. 2011 [8]). Ces résultats, qui n’ont jamais été observés par une autre modalité d’imagerie, prouvent : - la faisabilité de l’imagerie d’élasticité et doppler ultrasensible du cerveau in vivo avec un échographe commercial (Aixplorer©) et une sonde échographique standard (sonde linéaire Vermon 8 ou 15 MHz) avec des résolutions spatiales inégalées ; - que les lésions cérébrales ischémiques présentent une élasticité très différente des tissus sains et que cette élasticité évolue au cours du temps ; - que les lésions cérébrales ischémiques induisent une modification hémodynamique importante et ceci dans les premières 24h après l’accident vasculaire. Là aussi, ce mode pourrait donc améliorer le diagnostic précoce de telles lésions. Applications cliniques Les applications et avantages cliniques des modes d’élastographie et Doppler ultrasensible sont importants : 1) Accès à un paramètre mécanique quantitatif, l’élasticité, sous forme de cartographie couleur quantitative, permettant des mesures focales dans des régions d’intérêt choisies. 2) Imagerie doppler couleur à large bande, haute résolution, permettant la visualisation des flux macro- et micro-vasculaires sur de grande surface. 3) Quantification de cartes de résistivité vasculaire et de pulsatilité tissulaire en quasi temps réel. Ces techniques se positionnent comme une extension des capacités de diagnostic des échographes [9] et n’impose aucune modification protocolaire au médecin lors de son examen clinique. Elles nécessitent cependant une innovation technologique importante à savoir l'échographie ultrarapide. Le domaine d'application d’un tel système est vaste. Il pourrait permettre en hôpital, clinique ou cabinet de radiologie d'imager les propriétés visco-élastiques de multiples organes et ainsi apporter une aide lors du dépistage ou du diagnostic de certaines pathologies (cancer, hépatites C, cirrhoses,…). Dans le cadre du diagnostic du cancer du sein, il permet, en complémentarité avec la mammographie et l’échographie, d'affiner le diagnostic [10, 11]. Le mode Doppler ultrasensible peut également permettre d’étendre les capacités diagnostiques de l’imagerie des flux sanguins par ultrasons dans le cadre des applications cardiovasculaires classiques (cœur, artères) mais aussi dans de nouveaux domaines comme pour imager la vascularisation des tumeurs. Ce système est basé sur la technologie des ultrasons, et donc de faible coût en comparaison avec l’imagerie d’élasticité par IRM. Comme tout échographe standard, c’est un système d'imagerie ambulatoire pouvant être utilisé tant en préqu'en postopératoire, voire déplacé jusqu'à la chambre du patient. Ceci consiste un avantage particulièrement important en pédiatrie. Etude du cerveau du nouveau-né par l’élastographie quantitative et le Doppler Ultra-rapide : Etude BELUGA L’imagerie échographique du cerveau chez l’adulte présente un inconvénient majeur : la boîte crânienne perturbe fortement le passage des ultrasons. Seule une technique de correction des aberrations efficace permettrait de surmonter cet obstacle, mais ce domaine reste à l’état de recherche. Cependant, chez le nouveau-né la présence de la fontanelle, espace membraneux séparant les différents os du crâne, permet de réaliser des échographies cérébrales. Comme précisé précédemment, cet examen échographique du cerveau chez les nouveau-nés est couramment réalisé pour détecter des anomalies neurologiques. Forts du saut technologique que constitue l’échographe Aixplorer© (Supersonic Imagine, Aix-en-Provence, France), nous réalisons actuellement une étude de faisabilité et d’analyse de l’intérêt que peut apporter l’imagerie d’élasticité et l’imagerie Doppler ultrasensible du cerveau du nouveau-né normal et cérébro-lésé. Nous testons la capacité de ces nouveaux modes à poser un diagnostic plus rapide d’une part et à suivre l’évolution dans le temps d’autre part des lésions neurologiques observées chez 20 % des enfants grands prématurés. L’objectif de ce travail est de déterminer l’apport diagnostique de l’élastographie quantitative cérébrale transfontanellaire chez le grand prématuré < 32 SA, comparé à un groupe contrôle de nouveau-nés à terme. Les objectifs secondaires sont de (i) décrire les modifications de l’élasticité au cours du développement cérébral chez le prématuré avec et sans lésions cérébrales, comparé au nouveau-né à terme, (ii) d’étudier en Doppler ultra-sensible de la perfusion cérébrale chez le prématuré avec et sans lésions de la substance blanche, et enfin (iii) d’étudier l’existence d’une corrélation entre les données Doppler ultra-sensible et l’activité cérébrale recueillie sur EEG. Cette étude descriptive des images cérébrales obtenues en élastographie quantitative permettra une confrontation avec les données d’échographie conventionnelle et d’IRM du cerveau chez le nouveau-né prématuré de moins de 32 SA. Des résultats préliminaires de l’étude BELUGA seront présentés lors des Journées Parisiennes de Pédiatrie 2013. Conclusion L’élastographie quantitative et le Doppler Ultra-sensible sont deux nouvelles techniques d’imagerie médicale et potentiellement outils diagnostiques dans le cadre des lésions cérébrales observées chez le prématuré. Une évaluation de leur applicabilité et de leur plus-value par rapport à l’échographie transfontanellaire classique et l’IRM est en cours. Références 1- Sinkus R, Tanter M, Xydeas T, et al. Viscoelastic shear properties of in vivo breast lesions measured by MR elastography. Magn Reson Imaging 2005;23:159-65. 2- Frey H. Realtime elastography. A new ultrasound procedure for the reconstruction of tissue elasticity. Radiologe 2003;43:850-5. 3- Bercoff J, Tanter M and Fink M. Supersonic shear imaging: a new technique for soft tissue elasticity mapping. IEEE Trans Ultrason Ferroelectr Freq Control. 2004;51:396-409. 4- Berg W. Shear-wave Elastography Improves the Specificity of Breast US: The BE1 Multinational Study of 939 Masses. 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Quantitative assessment of breast lesion viscoelasticity: initial clinical results using SuperSonic Imagine shear imaging. Ultrasound Med Biol 2008;34:1373-86. 11- Bavu E, Gennisson JL, Couade M, et al. Noninvasive in vivo liver fibrosis evaluation using supersonic shear imaging: a clinical study on 113 hepatitis C virus patients. Ultrasound Med Biol 2011;37:1361-73. MISES AU POINT 7 ANAPHYLAXIE SEVERE ET PRISE EN CHARGE Par Etienne BIDAT , Mohamad El Zoobi, Bertrand Chevallier APHP, Service de pédiatrie hôpital Ambroise Paré, Boulogne. Tiré à part : [email protected] La fréquence de l’anaphylaxie est en augmentation dans tous les pays occidentaux. La pratique quotidienne montre que les accidents allergiques anaphylactiques, de plus en plus fréquents, sont souvent mal pris en charge malgré le recours aux services d’urgence. Les symptômes de la phase aiguë peuvent être mal interprétés et par conséquent traités de façon non conforme aux recommandations. Nous proposons de mettre l’accent sur ces dysfonctionnements et d’examiner les solutions pour les éviter. Mais qu’est-ce que l’anaphylaxie ? L’anaphylaxie ne peut se limiter qu’au choc anaphylactique. Dans l’expression la plus modérée, elle peut se limiter à la survenue, après l’exposition à un allergène connu, de signes touchant deux organes cibles, comme l’association d’un prurit et de vomissements. L’anaphylaxie est considérée comme hautement probable dans trois situations [1] : 1. La survenue rapide d’une urticaire, d’un œdème, d’un prurit, d’un flush et au moins un des deux signes suivants : dyspnée, bronchospasme, hypoxémie hypotension, choc 2. L’exposition à un allergène connu du patient et survenu dans les minutes ou heures de deux des signes suivants urticaire généralisée, œdème, prurit, flush dyspnée, bronchospasme, hypoxémie hypotension, choc douleurs abdominales, vomissements 3. La survenue d’une hypotension artérielle dans les minutes ou heures après l’exposition à un allergène connu : 1 mois-1 an : < 70 mm Hg 1-10 ans : < 70 mm Hg + [2 fois l’âge] 11-17 ans : < 90 mm Hg. Des classifications pour l’anaphylaxie Il est difficile de s’y retrouver dans la classification en grades ou en sévérité des réactions anaphylactiques. La classification princeps revient à Ring et Messmer [2]. Elle a été adaptée par Sampson et coll [3] et est la classification le plus souvent employée. Dans les recommandations sur la prise en charge du choc anaphylactique, la Société Française de Réanimation Française apporte quelques précisions [4] (Tableau 1). Pour ajouter de la confusion, l’Académie Européenne d’Allergologie propose une classification en trois grades de réactions anaphylactiques (léger/modéré/sévère) [1]. Astier et coll, qui adaptent une classification proposée par Ewan et Clark, proposent 5 grades de sévérité lors de la survenue de réaction anaphylactique au cours d’un test de provocation aux aliments. Cette classification est parfois utilisée en France [5]. On retiendra des différentes classifications qu’une réaction présentée en grade de sévérité n’est interprétable que si on dispose de la référence et surtout qu’il ne faut pas attendre la chute de tension pour parler d’anaphylaxie. Des signes – habituels, banaux - sont possibles dans l’anaphylaxie. Par exemple, après l’exposition à un allergène connu, l’association d’une urticaire et d’un autre signe (douleur abdominale et/ou gêne respiratoire, …) constitue une anaphylaxie et doit être traitée de manière adaptée. Des tableaux cliniques variés Les symptômes d’anaphylaxie par allergie alimentaire varient avec l’âge. Les nourrissons ont plus souvent un prurit, de l’urticaire, et des vomissements. Les enfants d’âge préscolaire présentent plus souvent des sifflements et un stridor. Les adolescents ont souvent des symptômes subjectifs comme une « gêne pour avaler » ou une « difficulté pour respirer » et des symptômes cardiovasculaires [6]. Une forme particulière d’anaphylaxie est à connaître : l’anaphylaxie induite par l’exercice physique et l’ingestion d’aliments. Les symptômes surviennent après l’ingestion d’un aliment donné (auquel le patient présente une sensibilisation IgE-dépendante) suivi d’un exercice physique le plus souvent intense et/ou prolongé. L’anaphylaxie n’apparaît pas après l’ingestion isolée de l’aliment ou un simple exercice physique. L’association de l’ingestion d’aliment et de l’effort (endurance souvent) est indispensable pour que l’anaphylaxie apparaisse [7]. Sa prévalence théoriquement faible est probablement sous-estimée. La plupart des aliments ont été reconnus responsables. Des cas sévères voire mortels ont été rapportés [8]. Généralement les symptômes débutent au bout de 10 à 15 minutes d’effort par un prurit des paumes des mains et de la plante des pieds puis survient l’anaphylaxie. Les aliments en cause sont le plus souvent le blé (pain ou pâtes alimentaires par le biais d’une allergie à oméga 5 gliadine), mais tous les aliments sont possibles. Certaines anaphylaxies d’effort ne surviennent qu’après l’ingestion de deux aliments. La prévalence de l’anaphylaxie augmente. L’anaphylaxie sévère [grade III et IV, selon la classification de Sampson] représenterait 1% des consultations dans les services d’urgence et atteindrait 1 à 3 individus pour 10 000 habitants [9]. Le risque de décès serait de 0,6 % à 2 % des cas, ce qui correspondrait 1 à 3 décès par anaphylaxie par million d’habitants [9, 10]. Classiquement on rapportait que la fréquence de l’anaphylaxie alimentaire sévère augmentait avec l’âge (2 à 3 fois plus fréquente chez l’adulte que chez l’enfant) [9]. En fait elle serait aussi fréquente chez l’enfant, même très jeune, que chez l’adulte [11], mais était méconnue. En Floride [12], en 2005-2006, l’anaphylaxie est plus fréquente chez les enfants de sexe masculin âgés de moins de 4 ans (8,2 p. 100 000), et chez les adultes de sexe féminin de 15-45 ans (9,9 p. 100 000). L’anaphylaxie méconnue par les services d’urgences ? La pratique quotidienne montre que les accidents allergiques sévères, de plus en plus fréquents, sont souvent mal pris en charge malgré le recours aux services d’urgence. Les symptômes de la phase aiguë peuvent être mal interprétés et par conséquent traités de façon non conforme aux recommandations [1, 13, 14]. Comme nous l’avons observé récemment, ces symptômes sont même souvent sous-estimés ou même méconnus par les régulateurs des urgences et par les services d’urgences eux-mêmes (tableau 2 et 3). Ces 11 observations n’ont pas pour but de stigmatiser les services d’urgences et de régulation français : leur travail quotidien est difficile et remarquable. Loin d’être exceptionnelles, ces observations ne sont cependant qu’un échantillon de notre pratique quotidienne. La difficulté de la reconnaissance de l’anaphylaxie et sa gestion défectueuse à la phase aiguë n’est pas spécifique à la France. Une analyse de la littérature, portant sur 59 études [75 articles sélectionnés], effectuée par Kastner et al. [15] relève 202 « défaillances » (gaps) dans la gestion de l’anaphylaxie. Les problèmes concernent la reconnaissance et la gestion de l’anaphylaxie par les patients et les médecins, mais aussi le suivi de l’anaphylaxie par les médecins [15]. Anaphylaxie : un traitement standardisé Les recommandations pédiatriques européennes précisent qu’uniquement en cas d’urticaire ou d’angio-œdème isolé, un antihistaminique seul peut être administré [1]. Il est indiqué, dans cette situation, qu’il faut prévoir l’injection d’adrénaline s’il existe des antécédents de réaction sévère, d’asthme associé, et surveiller l’enfant pendant 4 heures car les symptômes cutanés isolés peuvent être le signe précoce d’une anaphylaxie plus grave. Les recommandations insistent sur la précocité de l’injection d’adrénaline, tout particulièrement chez l’enfant car, en l’absence de cardiopathie, ce traitement est parfaitement toléré. C’est surtout le traitement immédiatement efficace, le traitement de base de l’anaphylaxie [1]. Les antihistaminiques et/ou les corticoïdes, souvent exclusivement prescrits, risquent de masquer le développement de l’anaphylaxie et de retarder l’injection d’adrénaline. Il faut rappeler que plusieurs observations ou séries ont établi une corrélation entre les décès par allergie alimentaire et le retard d’injection de l’adrénaline [16]. Les traitements associés à l’adrénaline dépendent des signes : oxygène, remplissage vasculaire, nébulisation d’adrénaline ou de bêta2-adrénergiques. Les corticoïdes oraux ou injectables peuvent être utilisés, mais ils ne sont pas un traitement de première intention de l’anaphylaxie car leur délai d’action est beaucoup trop long. De plus il n’est pas prouvé qu’ils diminuent le risque de réaction anaphylactique retardée [1]. Et pourtant ils sont encore trop souvent utilisés en première intention par les services d’urgence, comme nous l’avons constaté dans nos observations. L’injection d’adrénaline nécessite une surveillance. Si elle est très précoce, pratiquée devant des signes « modérés », nous pensons qu’un délai de 4 heures peut être suffisant. En cas de signes respiratoires, les recommandations [1] conseillent une surveillance hospitalière de 6-8 heures et, en cas d’hypotension, d’au moins 24 heures en réanimation ou à proximité. Dans huit sur onze de nos observations, l’enfant et/ou la famille désiraient, en accord avec le programme d’éducation thérapeutique qu’ils avaient suivi, effectuer l’injection d’adrénaline. Dans les huit observations les médecins auraient contre-indiqué l’injection alors qu’elle était justifiée, en accord avec les recommandations actuelles. En France, comme dans d’autres pays [1], il est probable que les recommandations sont peut être connues sur un plan théorique, mais que la difficulté de l’appréciation de l’urgence rend leur application difficile. Il faut sans cesse rappeler, que chez l’enfant, il n’y a pas de danger à injecter l’adrénaline en intramusculaire, et si cette action est envisagée, il faut la conseiller sans inquiétude. Dans ces observations, les régulateurs étaient confrontés à des familles parfaitement au courant de la gestion de l’anaphylaxie. De ce fait, la question de la régulation par téléphone chez des familles éduquées est un sujet à approfondir. Les effets bénéfiques de l’amélioration de la prise en charge de l’anaphylaxie chez l’enfant, en accord avec les recommandations européennes, viennent d’être parfaitement illustrés. Arroabarren et coll [17] ont comparé avant et après l’implantation d’un protocole codifié, inspiré des recommandations Européennes [1]. Les résultats obtenus sont très significatifs. Ils témoignent de l’efficacité d’un protocole où l’adrénaline auto-injectable est l’élément central de la prise en charge. A noter que sur 33 doses d’adrénaline injectées il ne fut pas observé d’effet secondaire notable, sauf des palpitations légères dans un cas [17]. Que proposer ? Ces observations, ainsi que de nombreuses autres, nous ont conduits à modifier nos objectifs éducatifs dans la prise en charge de l’anaphylaxie. Jusqu’à une date récente nous insistions, en cas d’anaphylaxie, sur la nécessité d’appeler tout de suite le 15, avant de faire l’injection d’adrénaline [18]. Maintenant nous insistons sur l’importance de ne pas appeler le 15 avant de faire l’injection, mais de le faire après. Nous rappelons qu’une injection d’adrénaline, si elle est faite par excès, entraîne au plus des petits signes, les mêmes que ceux ressentis lors « d’un coup de stress » [19]. Par contre nous rappelons que l’injection nécessite une surveillance d’au moins 4 heures. Si le service d’urgence renvoie rapidement l’enfant, nous conseillons à la famille de rester en salle d’attente 4 heures au total. La reconnaissance et le traitement de l’anaphylaxie ne sont que les premiers éléments de sa prise en charge. Il ne faut pas oublier que toute anaphylaxie nécessite un bilan et une éducation de l’enfant et de sa famille. Tout enfant ayant présenté une anaphylaxie doit être adressé à une consultation spécialisée en allergologie afin d’en effectuer le bilan et de compléter l’éducation. Trop d’enfants quittent les services d’urgence sans diagnostic d’anaphylaxie [6]. Un programme, inspiré des recommandations Européennes effectué dans les services d’urgence augmente de manière très importante le nombre d’enfants qui sortent avec des instructions adaptées (69 % vs 22 %) [17]. Quand prescrire de l’adrénaline auto-injectable ? Il existe des recommandations, ou plutôt des propositions pour la prescription d’adrénaline auto-injectable [1, 20]. Ces propositions sont surtout destinées aux enfants présentant une allergie alimentaire, première cause d’anaphylaxie chez l’enfant. On peut résumer les indications de prescriptions d’adrénaline auto-injectable en cas d’allergie alimentaire comme suit : – antécédent de réaction anaphylactique à l’aliment (en prenant la définition actuelle) – réaction systémique à un aliment et asthme associé (même si celui-ci n’est pas en rapport avec une allergie alimentaire), – réaction systémique et allergie à un aliment qui présente un risque de réaction sévère : arachide, fruits à coque, graines, lait de chèvre, brebis, sans allergie au lait de vache, – réaction à une petite quantité d’aliment, – mastocytose associée, – adolescent, – accès difficile aux soins. Cette adrénaline auto-injectable doit alors toujours être disponible. A chaque consultation il est de la responsabilité du médecin de s’assurer que l’enfant et/ou sa famille connaissent les indications et le maniement du stylo auto-injectable choisi [18]. En conclusion En consultation, les parents nous rapportent souvent des accidents allergiques anaphylactiques qui n’ont pas été pris en charge de façon optimale, malgré le recours aux services d’urgences. Onze observations récentes permettent d’illustrer ces défaillances, de rappeler les signes d’appel de l’anaphylaxie qui sont souvent légers ou semblent banaux [au stade 1] et la gestion de la phase aiguë selon les recommandations. Nos propositions suivent les recommandations internationales récentes : chez l’enfant l’injection intramusculaire d’adrénaline est d’une totale innocuité, et cela doit être sans cesse être rappelé. Ces observations non exceptionnelles nous ont amené à modifier notre programme d’éducation de gestion de l’anaphylaxie. L’information et l’éducation doivent concerner l’ensemble des acteurs de la prise en charge des urgences (pompiers, médecins régulateurs….). Conflits d’intérêt potentiels : les auteurs ont déclaré ne pas avoir de conflit d’intérêts sur le sujet. Tableau 1 : Classification de la gravité des réactions d’hypersensibilité immédiate (adapté de [3]) Grade I II III IV Symptômes Signes cutanés généraux : érythème, urticaire / angio-œdème Au moins 2 organes atteints : signes cutanés, symptômes respiratoires (bronchospasme, toux, dyspnée), symptômes digestifs Hypotension artérielle : collapsus, tachycardie ou bradycardie, arythmie Arrêt cardiaque et/ou respiratoire, décès Classification proposée par la société française de réanimation dans les recommandations sur la prise en charge du choc anaphylactique [4]. Grade I II III IV Symptômes Signes cutanéomuqueux généralisés : érythème, urjcaire avec ou sans œdème angioneurotique. Akeinte muljviscérale modérée avec signes cutanéomuqueux, hypotension et tachycardie inhabituelles, hyperréacjvité bronchique (toux, difficulté ventilatoire). Akeinte muljviscérale sévère menaçant la vie et imposant un traitement spécifique ; collapsus, tachycardie ou bradycardie, troubles du rythme cardiaque, bronchospasme. Les signes cutanés peuvent être absents ou n’apparaître qu’après la remontée tensionnelle. Arrêt cardiaque et/ou respiratoire, décès L’absence de tachycardie, de signes cutanés, n’exclut pas le diagnosjc d’une réacjon anaphylactoïde. Tableau 2 : description des patients NOM Sexe âge Allergies alimentaires Pathologies allergiques associées Antoine M 10 ans Arachide, fruits à coques Asthme, rhinite Martin M 14 ans Arachide Asthme Léo M 10 ans Lait de vache Néant Louis M 11 ans Arachide Asthme, rhinite, conjonctivite Alexis M 13 ans Arachide Asthme, rhinite, eczéma Chloé F 11 ans Arachide, fruits à coques, sésame Asthme, rhinite, conjonctivite Dimitri 1 M 5 ans Blé, arachide Asthme, eczéma Dimitri 2 M 5 ans Blé, arachide Asthme, eczéma Yanis M 8 ans Blé, arachide, fruits à coques Asthme, rhinite Pierre louis M 3 ans Arachide Néant Lena F 3 ans Lait de vache Asthme Constance F 12 ans Arachide, lupin, amande, moutarde, noix de coco Asthme, conjonctivite, rhinite Tableau 3 : Accidents et prise en charge NOM Facteurs déclenchés Symptômes Action des parents Conseils lors de l’appel des urgences Evolution Suggestion d’adrénaline par les parents Antoine 2 h après repas dans l’avion Oe, Ud, Vo Ah Solupred® Vo puis disparition des Symptômes Oui Martin Barre de céréales Pb, DA, Vo, OdQ laryngé Ah Solupred® Transporté aux urgences BD + Adrénaline Oui Léo Biscuit U, OdQ Ah + Solupred® Solupred® Non Louis Repas à l’école P, G respi Transporté aux urgences BD + Adrénaline inhalé Transporté aux urgences, Adrénaline IM Alexis Poulet cacahuète G resp, Ud Demande à l’école de faire l’Anapen® Ah +Bd et refus Anapen® Bonne évolution en qlq heures Oui Chloé Houmous (sésame) Pb, fatigue, DA, Vo, U Ah et appel SAMU Solupred® et transport aux urgences Surveillance en milieu hospitalier qlq heures Oui Dimitri 1 4 MNS® G resp , Ud Appel SAMU Solupred® + Ah, consulter aux urgences Nébulisation BD, surveillance 2h Non Dimitri 2 6 MNS® G resp, Oe, Ud Appel Médecin Solupred® + Ah, surveillance 30 min au cabinet Amélioration Non Ne pas faire d’adrenaline CS aux urgences L’enfant demande de faire l’Anapen® Yanis ½ tranche de pain Fatigue, Ud, Oe Appel SAMU Solupred®+ Ah, transporté aux urgences Amélioration en qlq heure Oui Pierre louis Bonbon arachide Pb, Vo, DA, toux Ah et appel SAMU Déconseille Adrénaline CS aux urgences adrénaline IM, Oui Léna Biscuit petit LU® Ud, Oe visage, Célestène + Ah puis Anapen® Rester à la maison et appel si nécessaire Bonne NA Ah + Solupred® Ne pas faire Anapen®, envoi pompier qui appelle le SAMU SAMU nébulisations répétées d’adrénaline et transport urgences Hésitation G resp, toux Constance Grande quantité de Moutarde Oe visage, Ud, G resp, conjonctivite Oui ± Ah : anti-histaminique, BD : bronchodilatateurs, CS : consultation, DA: douleur abdominale, G resp : gêne respiratoire, IM : intramusculaire, Oe : Œdème, OdQ : œdème de Quincke laryngé, P : prurit, Pb : prurit buccal, Qlq : quelques, U : Urticaire, Ud : urticaire diffuse, Vo : vomissement. 1. 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Koné-Paut2 1 : Service des urgences pédiatriques, CHU Armand Trousseau, AP–HP, 75012 Paris, France 2 : Service de pédiatrie générale et rhumatologie pédiatrique, centre de référence des maladies auto-inflammatoires de l’enfant (CeRéMAI), CHU de Bicêtre, AP–HP, université Paris Sud, 78, avenue du Général Leclerc, 94270 Le Kremlin-Bicêtre, France Correspondance : Jean-Baptiste Armengaud, service des urgences pédiatriques, hôpital A.Trousseau, 26 avenue du Dr A. Netter, 75012 Paris. E-mail : [email protected] 1. Introduction Le syndrome adéno-cutanéo-muqueux fébrile décrit par Tomisaku Kawasaki en 1967 dans cinq observations est une vascularite systémique atteignant les vaisseaux de petit calibre. Le pic d’incidence se situe entre 6 mois à 5 ans et le sex-ratio est équilibré [1]. Malgré les progrès récents en épidémiologie, en microbiologie et en génétique, la physiopathologie de la maladie reste incomplètement connue, associant probablement des facteurs environnementaux (agent infectieux conventionnel ou non, aliments, variations climatiques…) et une prédisposition individuelle génétiquement déterminée [2,3]. Elle est observée de façon ubiquitaire dans le monde mais l’incidence de la maladie rapportée dans la littérature varie de 5 à 240 cas pour 100 000 enfants de moins de 5 ans. La répartition ethnique propre à chaque continent est probablement un facteur intermédiaire expliquant ces variations ; l’incidence la plus forte est observée dans les régions d’Asie et d’Australie. En Europe, l’incidence est mal connue mais semble moins élevée qu’en Asie, atteignant environ 5 cas pour 100 000 enfants de moins de 5 ans [4]. Le diagnostic de la maladie est clinique : la forme complète typique associe le critère majeur (fièvre quotidienne pendant au moins 5 jours consécutifs) à au moins quatre des cinq critères mineurs suivants : anomalies des extrémités associant un érythème et un œdème des mains et des pieds puis une desquamation des extrémités des doigts ; exanthème polymorphe ; conjonctivite bulbaire bilatérale douloureuse sans écoulement ; anomalies des lèvres et de la bouche pouvant associer une chéilite érythémateuse, une glossite (langue framboisée), une mucite diffuse de la cavité oro-pharyngée ; adénopathies cervicales (≥ 1,5 cm de diamètre), unilatérales ou bilatérales [1]. Lorsque des lésions coronaires sont observées précocement (avant le 10ème jour de la fièvre), le diagnostic peut être évoqué si seulement 3 des 4 critères associés à la fièvre requis sont observés. Toute autre maladie infectieuse ou inflammatoire connue (rhumatisme articulaire aigu, syndrome de Stevens-Johnson…) doit être systématiquement recherchée et écartée. Les formes incomplètes associent moins de 4 critères mineurs au 7ème jour de fièvre. Les formes atypiques associent des signes ne faisant pas partie des critères mineurs (arthralgies, hépatomégalie, éruptions atypiques…) mais qui peuvent parfois orienter le diagnostic [5]. La maladie de Kawasaki représente la première cause de cardiopathie ischémique acquise chez l’enfant dans les pays industrialisés [6]. La complication majeure est la constitution de lésions coronaires. Elles se traduisent par une dilatation diffuse ou la formation d’anévrysmes, de sténoses, d’obstructions, ou de calcifications des artères coronaires. Une fois constituées, ces anomalies peuvent se compliquer de thromboses ou de dissection, entraînant le plus souvent un décès par cardiomyopathie ischémique aiguë. Elles sont observées dans 15 à 25 % des cas en l’absence de traitement [1]. La mortalité de la maladie de Kawasaki à moyen et long terme est presque exclusivement expliquée par les conséquences de l’ischémie myocardique [7]. 2. Pertinence diagnostique et adéquation thérapeutique Les spécialistes internationaux de la maladie de Kawasaki précisent qu’en l’absence de test diagnostique spécifique, l’algorithme décisionnel proposé repose sur un niveau de preuve insuffisant pour affirmer le diagnostic ; il s’agit d’un avis d’experts (niveau de preuve C) destiné à aider le clinicien dans sa démarche diagnostique et thérapeutique [1]. L’enjeu est de pouvoir évoquer le diagnostic clinique avec une probabilité suffisamment élevée pour prendre une décision thérapeutique adéquate à brève échéance (avant le 7ème jour de fièvre). Le traitement de première intention est l’injection intraveineuse d’immunoglobulines humaines polyvalentes (IgIV) à la dose de 2 grammes par kilogramme de poids corporel associée à l’administration orale d’aspirine à dose anti-inflammatoire, soit 80 à 100 mg/kg/jour [8]. L’efficacité de ce traitement pour contrôler le syndrome inflammatoire caractérisant la maladie été démontrée : il réduit l’incidence des anévrysmes coronaires de 30 % à moins de 5 % chez les patients répondeurs, réduisant consécutivement la mortalité secondaire par ischémie myocardique [9-11]. La résistance au traitement est définie par la persistance de la fièvre ou sa recrudescence entre le 3ème et le 8ème jour suivant la fin de l’injection d’IgIV [1]. Elle est observée chez 10 à 25 % des patients ayant reçu une injection d’IgIV à la dose recommandée avant le 10ème jour de la fièvre [12]. Les patients réfractaires au traitement initié entre le 5ème et le 10ème jour d’évolution ont probablement un profil immunitaire particulier, caractérisé par un défaut d’apoptose de certaines cellules inflammatoires [13]. Cette résistance au traitement est parfois définie par le recours à une 2ème cure d’IgIV pour obtenir une apyrexie durable et la régression des stigmates inflammatoires cliniques et biologiques. Un diagnostic et un traitement trop précoces risquent de surestimer la prévalence de patients résistants aux IgIV, en traitant des patients ne présentant pas de maladie de Kawasaki et pour lequel le traitement risque de n’être pas efficace [5]. Il a été démontré que le traitement n’était pas plus efficace pour obtenir une apyrexie durable ou réduire l’incidence des lésions coronaires s’il a été initié au 4ème ou au 7ème jour de la fièvre [1,14,15]. Une injection d’IgIV réalisée avant le 5ème jour n’a pas d’effet préventif supérieur sur l’incidence des lésions coronaires et pourrait être associée au recours plus fréquent à une 2ème cure d’IgIV [14,15]. Un diagnostic inadapté aux critères internationaux et un traitement consécutif trop précoce exposent au risque de diagnostiquer par excès la maladie de Kawasaki et de surestimer la prévalence de la résistance aux IgIV. En l’absence de lésions coronaires précoces ou de l’ensemble des critères requis, le diagnostic de maladie de Kawasaki doit donc être évoqué avec circonspection avant le 5ème jour de la fièvre. 3. Prédiction de la résistance aux IgIV : de l’identification de facteurs de risque à la validation de scores prédictifs Chez 15 à 25 % des patients traités selon les recommandations internationales, le syndrome inflammatoire majeur caractérisant la maladie de Kawasaki est incomplètement contrôlé par l’injection d’IgIV [4,12,16]. Les patients résistants au traitement par IgIV ont un risque plus élevé de survenue de lésions coronariennes en comparaison avec les patients sensibles aux IgIV [1,12,17]. Il semble utile d’identifier les patients à risque de résistance aux IgIV pour orienter la décision thérapeutique de façon optimale dans un délai court (7 à 10 jours), afin de limiter la morbimortalité secondaire liée à l’ischémie myocardique. Identifier les patients à risque de résistance aux IgIV revient à identifier les patients à haut risque de morbi-mortalité liée au développement de lésions coronaires, même si tous les patients résistants aux IgIV ne constituent pas des lésions coronaires. Le clinicien a besoin d’un outil utilisable en pratique courante lui permettant d’identifier ces patients à haut risque morbide avec la probabilité la plus élevée et la plus fiable possible. Depuis la fin des années 1990, des marqueurs cliniques et biologiques ont été identifiés et leur association au risque de résistance aux IgIV a été évaluée. Peu de marqueurs cliniques ont été validés [18,19]. Une étude rétrospective chinoise réalisée parmi plus de 1000 patients rapporte des signes cliniques plus fréquents mais non spécifiques chez les patients résistants aux IgIV [19]. La durée de la fièvre à l’initiation du traitement serait significativement plus courte chez les patients résistants aux IgIV [18,19]. L’interprétation de cette donnée n’est pas univoque, car le diagnostic de maladie de Kawasaki a pu être évoqué par excès chez ces patients, en méconnaissant un diagnostic différentiel expliquant l’inefficacité du traitement [5]. Un traitement initié avant le 5ème jour de la fièvre a été décrit comme associé au recours plus fréquent à une 2ème cure d’IgIV, qui est parfois un critère définissant la résistance aux IgIV dans la maladie de Kawasaki [14,15]. Des marqueurs biologiques ont été décrits comme significativement plus élevés chez les patients résistants aux IgIV à la phase initiale de la maladie ; ces marqueurs sont la protéine C-réactive, le nombre total de globules blancs, le taux de polynucléaires neutrophiles, la concentration d’aspartate aminotransférase, d’alanine aminotransférase, de gammaglutamyl transférase et de bilirubine totale [6,18-21]. Dans une étude récente sur 80 patients ayant développé des lésions coronaires malgré une injection d’IgIV, le pro-peptide natriurétique cérébral (NT-pro-BNP) a été identifié comme significativement associé au risque de résistance aux IgIV (sensibilité : 71 % ; spécificité : 62 %) et d’incidence élevée de lésions coronaires (sensibilité : 95 % ; spécificité : 85 %) ; d’autres cytokines sont actuellement évaluées comme facteurs prédictifs de la résistance aux IgIV dans la maladie de Kawasaki, mais il s’agit encore de voies de recherche [22, 23]. A l’inverse, certains marqueurs ont été rapportés comme significativement moins élevés à la phase aiguë de la maladie chez les patients résistants aux IgIV ; il s’agissait du taux d’hémoglobine, du taux de plaquettes, de la natrémie et de l’albuminémie [18, 19]. Ces variations biologiques observées chez les patients résistants aux IgIV ne sont pas spécifiques et sont probablement le reflet d’un processus inflammatoire intense que ces patients développent en raison d’un profil immunitaire particulier [13]. Ces facteurs ont été majoritairement identifiés dans de faibles échantillons (77 – 196 patients). Seulement deux études ont identifié des marqueurs associés à la résistance aux IgIV dans des populations de plus de 1000 patients [19,21]. L’identification de ces marqueurs était réalisée de façon rétrospective, mais il s’agissait de patients non sélectionnés (cohortes ou registres nationaux). Depuis 15 ans, la prédiction de la résistance aux IgIV a progressé grâce à la dérivation de scores permettant de classer les patients à faible ou haut risque de résistance aux IgIV. Ces scores sont des outils destiné au clinicien pour l’aider dans sa décision thérapeutique en pratique courante. Ils associent les paramètres cliniques ou biologiques de routine préalablement identifiés comme significativement associés au risque de résistance aux IgIV. Parmi les scores publiés durant la dernière décennie, quatre d’entre eux ont été dérivés dans des populations asiatiques [17,19,24,25]. La valeur prédictive de cinq d’entre eux a été évaluée de façon interne ou externe [17,19,24-26]. Cette évaluation a été réalisée dans des populations majoritairement asiatiques. Les 3 scores les plus utilisés sont composés de 3 à 7 variables cliniques et biologiques associées au risque de résistance aux IgIV [17,24,25]. Les variables continues ont été transformées en variables dichotomiques autour de valeurs-seuil déterminées selon leur distribution dans la population de dérivation, pour permettre l’attribution de 1 ou 2 points par variable au-dessus de la valeur-seuil ; la cotation différentielle de chaque variable (1 ou 2 points) est en rapport avec la force d’association statistique entre la variable et le risque de résistance aux IgIV. Dans leur population originale de dérivation, ces 3 scores avaient des valeurs prédictives variables (tableau 1). Dérivé dans une population de 546 patients non sélectionnés, le score de Kobayashi prédisait le risque de résistance aux IgIV autour d’un seuil de risque arbitraire de 15 % avec une sensibilité de 87 % et une spécificité de 63 %. Les auteurs avaient également prévu la validation du score dans un échantillon consécutif de la même population (204 patients) : cette validation interne a montré que le score avait une spécificité de 90 % et une sensibilité de 77 % [24]. La validation prospective externe du score de Kobayashi dans une population asiatique de 1626 patients a montré un pouvoir prédictif similaire (spécificité 80 % ; sensibilité 71 %) [27]. Le couple sensibilité / spécificité est le seul paramètre prédictif pertinent pour comparer ces scores dans des populations d’origine géographique différentes : ces deux paramètres ne dépendent pas de la prévalence de la maladie, qui varie selon la répartition ethnique d’un continent à l’autre. 4. Quel score utiliser pour prédire la résistance aux IgIV dans la maladie de Kawasaki en Europe ? Plus récemment, la valeur prédictive de ces scores a été étudiée dans des populations occidentales non majoritairement asiatiques [12,16,27]. A l’inverse des populations asiatiques dans lesquelles leur valeur prédictive avait été évaluée jusque là, les scores d’Egami et Sano avaient une sensibilité supérieure à celle du score de Kobayashi dans une population nord-américaine [16]. Cependant, plus de la moitié des patients à haut risque de résistance aux IgIV n’était pas correctement identifiée (tableau 2). Le seul score actuellement dérivé de façon originale dans une population occidentale a été rapporté dans une étude regroupant 362 patients issus de deux centres hospitaliers pédiatriques majeurs des Etats-Unis. Ce score associait 4 critères : la durée de la fièvre, le concentration en hémoglobine (standardisée selon les valeurs moyennes pour l’âge), le taux de polynucléaires immatures (>20 %), la concentration en gamma-glutamyl-transférase (≥ 60 UI/L). Dans cette population occidentale, ce score permettait d’identifier les patients à risque de résistance aux IgIV avec une sensibilité de 73 % et une spécificité de 62 %. Les auteurs ont conclu que la valeur prédictive de leur score était insuffisante pour une utilisation en pratique clinique courante. Après analyse en sous-groupes ethniques, ce score avait une sensibilité plus élevée pour identifier les patients à haut risque de résistance aux IgIV chez les Caucasiens (81 %) que chez les patients d’origine hispanique (68 %) ou asiatique (67 %). Ces résultats suggèrent l’influence de la répartition ethnique sur la prédiction de la résistance aux IgIV et la nécessité de développer des scores adaptés à chaque continent. Aucune validation prospective interne ou externe de ce score n’a été actuellement rapportée. Dans cette étude, les auteurs rapportaient des valeurs prédictives négatives élevées pour le risque de résistance aux IgIV (91 %) et le risque d’anévrysmes coronaires (97 %). Ces paramètres prédictifs dépendent de la prévalence de la maladie ; celle-ci varie sensiblement selon l’origine géographique de la population étudiée, rendant inappropriée leur utilisation pour comparer la valeur prédictive d’un score d’un continent à l’autre [12]. L’épidémiologie du risque de résistance aux IgIV dans la maladie de Kawasaki est mal connue en Europe. Aucune étude n’a évalué dans une population européenne la valeur prédictive des scores de risque de résistance aux IgIV validés dans des populations asiatiques ou nord-américaines. Il paraît nécessaire de tester la valeur prédictive de l’ensemble des scores publiés dans une population européenne. En l’absence de score ayant une valeur prédictive satisfaisante pour identifier les patients à haut risque de résistance aux IgIV, un score original pourra être dérivé et secondairement validé. 6. Conclusion La résistance aux IgIV dans la maladie de Kawasaki représente indirectement un risque élevé de morbi-mortalité liée aux complications cardiaques de la maladie. En pratique courante, le clinicien a besoin d’outils prédictifs pour rapidement identifier ces patients à risque, afin d’orienter le choix thérapeutique et réduire l’incidence des complications coronaires. Une identification précoce et fiable de ce risque permettra de mettre en œuvre chez ces patients un traitement de seconde ligne efficace ou même d’associer d’emblée l’injection d’IgIV à un traitement immuno-modulateur (corticothérapie systémique), dont l’efficacité dans la prévention de l’apparition de lésions coronaires a été récemment démontrée chez ces patients résistants aux IgIV. Tableau 1 : pouvoir prédictif des 3 principaux scores de prédiction de résistance aux IgIV dans leur population de dérivation originale. Score Sensibilité Spécificité Kobayashi(24) 33 % 87 % Egami(17) 42 % 85 % Sano(25) 40 % 85 % Tableau 2 : validation externe des 3 principaux scores de prédiction de résistance aux IgIV dans des populations non majoritairement asiatiques. Score Kobayashi(24) Se* Etudes Sp* Tremoulet et al.(12) Seki et al.(27) 72 % 79 % Sleeper et al.(16) 33 % 87 % *: Se: sensibilité; Sp: spécificité Egami(17) Se* Sp* 38 % 84 % 42 % 85 % Sano(25) Se* 40 % Sp* 85 % Score original Se* Sp* 73 % 62 % Références 1. Newburger JW, Takahashi M, Gerber MA, et al. Diagnosis, treatment, and long-term management of Kawasaki disease: a statement for health professionals from the Committee on Rheumatic Fever, Endocarditis, and Kawasaki Disease, Council on Cardiovascular Disease in the Young, American Heart Association. Pediatrics, 2004; 114: 1708-33. 2. Piram M, Kone-Paut I. [Kawasaki disease: what's new in 2012?]. Arch Pediatr, 2012; 19: 1012-4. 3. Khor CC, Davila S, Breunis WB, et al. 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Par Isabelle Koné-Paut (1) 1 : Centre de référence des maladies autoinflammatoires, Pédiatrie générale, rhumatologie pédiatrique, Hôpital de Bicêtre, APHP, Université de Paris SUD Correspondance Pr Isabelle Koné-Paut Centre de référence des maladies auto-inflammatoires Service de pédiatrie générale, Rhumatologie pédiatrique CHU de Bicêtre, 78 rue du Général Leclerc, 94270, Le Kremlin-Bicêtre, France Tel : 01 45 21 32 46 Fax : 01 45 21 33 43 E mail : [email protected] Le centre de référence national: http://asso.orpha.net/CEREMAI/ Le portail de la maladie de Kawasaki : http://www.kawanet.fr Les immunoglobulines intraveineuses comme traitement de référence de la maladie de Kawasaki aiguë et leurs mécanismes d’action La maladie de Kawasaki (MK) représente la première cause de cardiopathie acquise dans les pays développés. Elle peut aussi, mais rarement, engager le pronostic vital en phase aiguë par choc cardiogénique dû à une dysfonction myocardique sévère. Le devenir à long terme des patients ayant présenté une lésion coronaire reste à préciser. Une étude récente montre que 5 % des infarctus du myocarde chez les jeunes adultes < 40 ans pourraient être dus à une MK passée inaperçue [1]. En dehors des anévrismes géants, en règle définitifs, les autres anomalies coronaires et la myocardite, beaucoup plus fréquentes pourraient prédisposer à la survenue d’un infarctus du myocarde à un âge très jeune. Traiter efficacement la phase aiguë de la MK représente donc un enjeu considérable pour les patients, malgré les difficultés attenantes à la certitude du diagnostic, qui reste essentiellement clinique, et l’absence d’un traitement spécifique régulièrement efficace. Les premières approches thérapeutiques par les IgIV émanent d’un cas clinique puis de petites séries de cas publiés en français [2, 3]. Puis en 1986 l’étude de Newburger et al, confirme les IgIV comme traitement de référence de la MK [4]. A cette époque les enfants randomisés pour recevoir les IgIV avaient reçu 400 mg/kg/j 4 jours de suite associées à de l’aspirine à 100 mg/kg pendant 14 jours puis à 3-5 mg/kg/j. Le risque d’anévrismes coronaires était passé à 8 % chez les patients traités par IgIV plus aspirine contre 23 % chez les patients traités par aspirine seule. Diverses méta-analyses et études ont montré ensuite que l’effet des IgIV est dose-dépendant, indépendant du traitement concomitant par aspirine, et que des doses plus importantes sont plus efficaces [5, 6]. Le mécanisme d’action des IgIV dans la MK n’est probablement ni unique ni spécifique. La MK est avant tout une maladie inflammatoire aiguë dont la cause n’est pas connue mais au cours de laquelle ont été décrits un certain nombre de phénomènes immunologiques tels que le relargage de cytokines pro-inflammatoires comme l’IL-1, l’IL-6 et le TNF‑. La lésion endothéliale semble directement liée à l’activation de l’immunité innée ; Les PNN à la phase initiale de la MK produisent un stress oxydatif générant de l’oxyde nitrique (NO) et des dérivés oxygénés (ROS), et expriment une grande quantité de molécules d’adhésion favorisant leur attachement à l’endothélium et à sa lésion. D’autres observations reliées à l’immunité adaptative montrent un déséquilibre de la balance T helpers-T régulateurs, une activation B polyclonale ainsi qu’une infiltration de plasmocytes portant une IgA dans différents tissus dont les vaisseaux et les poumons [7]. Les IgIV pourraient agir en bloquant directement les cytokines pro-inflammatoires, en bloquant les récepteurs Fc exprimés à la surface des monocytes (donc en bloquant le phénomène d’ADCC), en neutralisant directement un antigène ou un superantigène inconnu, en bloquant la NO synthase et sur les cellules endothéliales en modulant directement leur fonction ou par un effet anti-anticorps anti-cellules endothéliales [8]. Les IgIV comme traitement de référence de la maladie de Kawasaki aiguë Aujourd’hui, le traitement de référence de la maladie de Kawasaki (MK) repose sur l’administration d’une seule perfusion d’immunoglobulines intraveineuses (IgIV) (2g/kg) [niveau d’évidence A], dans les 10 jours après le début de la fièvre, idéalement dans un délai de 7 jours [9]. Les patients traités trop précocement avant J5 ne diminuent pas leur risque d’anévrisme coronaire et nécessitent plus souvent une deuxième perfusion d’IgIV. Pour des enfants non traités après J10 de fièvre, le traitement par IgIV reste indiqué s’ils sont toujours fébriles, s’ils présentent des signes d’inflammation systémique (CRP et/ou VS élevée) ou s’ils présentent des signes de vascularite coronaire [Niveau d’évidence C]. Si l’association de l’aspirine à doses anti-inflammatoires aux IgIV reste recommandée, son rôle préventif dans le développement des anévrismes coronaires n’a jamais été démontré. Par ailleurs l’innocuité de l’aspirine à des doses dépassant 80 mg/kg dans cet orage cytokinique peut exposer à de sérieuses complications comme le syndrome d’activation macrophagique. La mise en route de ce traitement dans les délais permet l’obtention d’une apyrexie dans environ 80 % des cas, cependant 15-20 % des patients restent fébriles au-delà de 48 h et nécessitent un retraitement ou un traitement alternatif. La résistance au traitement par IgIV pose problème car elle est fortement associée à la présence d’une vascularite et notamment d’une atteinte coronaire. D’autres facteurs prédictifs de non réponse aux IgIV ont été identifiés et différents scores ont été proposés.[10,11] (tableaux 1 et 2). Le score de prédiction d’Egami est le plus utilisé, il comprend : il compte pour 1 point (1) Nourrisson de moins de 6 mois, (2) traitement institué avant J4 de fièvre, (3) Plaquettes ≤ 30 x 10(10)/L, (4) CRP ≥ 8 mg/dL, et 2 points pour (5) ALAT ≥ 80 IU/L. En utilisant un cut-off de 3 ou plus, on peut déterminer le risque de résistance aux IgIV avec une sensibilité de 78 % et une spécificité de 76 % [9,10] (tableaux 1 et 2). La définition d’une résistance aux IgIV est selon l’AHA, la persistance ou la recrudescence de la fièvre dans les 72 h suivant la perfusion d’IgIV mais on peut se demander s’il est licite d’attendre au-delà de 48 heures. Deux questions importantes émergent de ces éléments. La première est quel traitement appliquer après échec d’une perfusion d’IgIV ? Dans ce cas l’AHA recommande de tenter une deuxième perfusion d’IgIV, même si l’efficacité de cette attitude n’a jamais été évaluée. La seconde est quel schéma thérapeutique pourrait-on proposer de plus efficace pour augmenter le taux de réponse aux IgIV ? Avec intérêt particulier pour l’emploi des corticoïdes. Quelle place pour les corticoïdes ? Les corticoïdes ont été utilisés dès les années 1960 par T Kawasaki pour 22 de ces 50 patients, sans qu’il ait pu conclure à leur efficacité. Ensuite de nombreuses études non contrôlées et sur de petits effectifs ont donné des résultats très controversés. Kato et al. ont rapporté 17 patients d’une étude non randomisée et non contrôlée avec une forte fréquence d’anévrismes coronaires et avaient à cette époque évoqué un effet délétère des corticoïdes sur cette complication [12]. Kijima et al. ont rapporté à l’opposé 15 patients ayant reçu 3 bolus de méthylprednisolone intraveineuse [13]. Une amélioration des anomalies coronaires était notée chez 53 % des patients. Inoue et al. ont rapporté une étude multicentrique randomisée en ouvert incluant 178 patients [14]. Le but de cette étude était d'évaluer le bénéfice de l'ajout de prednisolone IV 2 mg/kg/jour jusqu'à ce que le patient devienne afébrile, puis de la prednisone PO jusqu'à ce que la CRP se normalise, suivie d'un schéma de décroissance de 15 jours. Moins anévrismes ont été observés à 1 mois, avec une durée plus courte de la fièvre, une diminution plus rapide de la CRP, moins de cas réfractaires sans aucun des effets secondaires importants. Une autre étude prospective randomisée multicentrique en double aveugle a été réalisée incluant 199 patients. Le critère principal était d'évaluer le bénéfice d'une perfusion de méthylprednisolone IV (30 mg/kg) donnée en association avec le traitement de référence (IgIV + acide acétylsalicylique) [15]. Dans cette étude, aucun bénéfice n'a été observé avec ce régime en terme de jours d’hospitalisation, de durée de la fièvre, de taux de retraitement, du pourcentage d'effets secondaires ou de la taille des coronaires. Les deux études font donc état de résultats contradictoires. Finalement une étude récente du Lancet vient remettre les corticoïdes en traitement « de choix » de la vascularite de la MK. Cent vingt cinq patients ont été randomisés pour recevoir des IgIV associées à de la prednisolone et 123 pour recevoir des IgIV seules. Quatre patients [3 %] des patients ayant reçu des corticoïdes contre 28 patients [23 %] (p < 0,0001), ayant reçu des IgIV seules ont fait des anévrismes coronaires [16]. Autres options alternatives Les résultats obtenus par d’autres alternatives thérapeutiques doivent être globalement interprétés avec prudence, car ils concernent peu de patients souvent traités assez tardivement ce qui peu rendre difficile l’interprétation du critère absence de fièvre qui peut correspondre aussi à l’évolution naturelle d’une MK traitée ou non. Les cytotoxiques Un certain nombre de cytotoxiques, méthotrexate, ciclosporine et ciclophosphamide ont été utilisés pour traiter des MK, ainsi que plus rarement les plasmaphérèses. Pour la ciclosporine 2 études non contrôlées : Une petite étude de 10 patients sélectionnés de façon homogène et une étude japonaise multicentrique de 28 patients ont montré des résultats autour de 70 % d’efficacité de la ciclosporine après échec des IgIV [17]. Dix-sept patients avec MK résistante aux IgIV ont été traités avec du méthotrexate 10 mg/m2 par semaine dont 76 % avaient des anévrismes coronaires à une période entre 7 et 10 jours après le début de la fièvre [18]. Ils ont tous répondu complètement sur le plan systémique mais l’effet sur la vascularite coronaire n’a pas été étudié. Les anti-TNF alpha Aujourd’hui aucune étude ne permet de confirmer l’efficacité des anti-TNF dans la MK résistante aux IgIV. Une courte étude non comparative incluant 15 patients ayant reçu de l’etanercept (2 injections en 15 jours) juste après la perfusion d’IgIV, a montré une bonne sécurité, une pharmacocinétique non altérée et l’absence d’anomalie coronaire chez tous les patients [19]. Une étude ouverte récente avec infliximab : vingt patients éligibles traités initialement par IgIV jusqu’à 4 g/kg [20]. "La résistance aux IgIV" était définie par une fièvre persistante ou réapparaissant > 38°C et une augmentation des paramètres inflammatoires biologiques 48 h après la perfusion d’IgIV. Ils ont reçu 5 mg/kg d’infliximab, administré dans les 10 premiers jours de la fièvre. Tous sauf deux ont répondu complètement avec diminution des atteintes coronaires. Les deux patients réfractaires ont eu des échanges plasmatiques. Cette étude ouverte ne permet pas de confirmer une efficacité de l’infliximab, d’autant que la seule étude contrôlée ayant été réalisée auparavant par le groupe de J Newburger, ne montrait de différence qu’en terme de jours de fièvre et d’hospitalisation mais pas en terme de réduction des lésions coronaires chez le groupe traité par infliximab comparé au groupe retraité par IgIV après un premier échec de la perfusion initiale à 2 g/kg d’IgIV. Les anti-CD20 On retrouve une observation de MK multirésistante à 3 perfusions d’IgIV et ayant rechuté le lendemain de l’arrêt d’une corticothérapie de 7 jours, qui a reçu à 20 jours d’évolution une perfusion de rituximab à 15 mg/kg. La défervescence a été rapide avec une diminution des anévrismes coronaires observés lors d’une visite de suivi à 3 mois. L’efficacité de ce traitement fait très tardivement ne peut donc pour l’instant être confirmée [21]. Les anti interleukine-1 Certaines caractéristiques cliniques de la MK, sont très similaires à celles observées dans les maladies autoinflammatoires, particulièrement l'arthrite juvénile idiopathique systémique avec qui elle peut être confondue au début. Une augmentation des cytokines inflammatoires, IL-1‑ et TNF‑ est observée dans la MK aiguë en corrélation avec l'artérite coronarienne chez des modèles animaux. Une souris Knockout (caspase 1 - / - et IL1R-/ -) a été protégée contre la MK induite par un extrait de paroi de Lactobacillus casei mais la MK a été restaurée par injection d’IL-1‑ recombinant [22]. Cette souris a développé une artérite coronaire qui pourrait être prévenue par l'injection de l'antagoniste du récepteur IL-1: anakinra, pendant 3 à 5 jours. Les souris déficientes en récepteur d’IL-1 et les souris traitées avec l'anakinra, n'ont pas réussi à développer une artérite. Seul le blocage de l'IL-1‑, mais pas du TNF‑, réduit la myocardite. Deux autres cas reportés ont montré un effet spectaculaire de l'anakinra dans la MK. En pratique Devant une résistance à une première cure d’IgIV, fièvre persistante ou réapparaissant dans les 48 heures il semble logique de proposer une deuxième perfusion d’IgIV, même si actuellement aucune étude ne permet de conclure que cette attitude est plus efficace qu’un autre traitement alternatif. [Cette attitude a concerné 23 % des patients traités dans le registre français de la MK : Kawanet. Données non publiées]. En cas d’échec de ce traitement on peut proposer des corticoïdes à dose anti-inflammatoire sur une durée relativement limitée (maximum 2 semaines), particulièrement en cas de coronarite associée. Si ce traitement est insuffisant on peut se poser la question d’une biothérapie tout en sachant qu’aucune d’entre elle n’a apporté la preuve de son efficacité. Mieux distinguer les patients à risque de résistance aux IgIV et donc de coronarite, reste un point essentiel qui devrait justifier une intensification thérapeutique dès la phase initiale de la MK. Ce chapitre rappelle que la période optimale pour traiter la MK par IgIV reste autour du 7e jour de fièvre et que traiter avant J5 augmente le risque de résistance à ce traitement. Tableau 1 : Les facteurs prédictifs de résistance aux IgIV identifiés par régression logistique selon Egami K et al [10] Predictors Odds ratio (95% confidence interval) Age, ≤ 6 vs. > 6 mois 2.06 (0.72–5.94) Jours de fièvre, ≤ 4 vs > 5 d 2.07 (0.97–4.41) Plaquettes, ≤ 30 × 1010 vs >30 × 1010/L 1.72 (0.83–3.57) ALAT, ≥ 80 vs < 80 IU/L 4.62 (2.23–9.54) CRP, ≥ 8 vs < 8 mg/dL 2.82 (1.34–5.95) P .18 .06 .15 <.001 .006 Hosmer and Lemeshow test P = .45, IgIV, immunoglobulines intraveineuses; ALT, alanine aminotransferase; CRP, Creactive protein. Tableau 2 : Score de prédiction de résistance aux IgIV selon Kobayashi [11] Signe Score Na <133 mmol/L 2 ASAT>100 UI/L 2 Days of illness <4 before IgIV treatment 2 Neutrophils>80% 2 CRP ≥ 10 mg/L 1 Age<12 mois 1 Plaquettes ≤ 30000/mm3 1 Score: Score > 9 : Risque =100 %, score 9 =90 %, score 8-7= 70 %, score 6=50 %, score 5=30 %, score 4=20 %, score<4=2-7 % Références 1. Lori B. Daniels, Matthew S. 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MISES AU POINT 8 HISTOIRE NATURELLE DES MALFORMATIONS PULMONAIRES Par Alice Hadchouel1, 2, Christophe Delacourt1, 3 1 Pneumologie Pédiatrique, Hôpital Necker, APHP, Paris, France 2 Université Paris Descartes - Sorbonne Paris Cité, Institut Imagine 3 Université Paris Descartes, Paris, France Auteur correspondant : Alice HADCHOUEL Service de Pneumologie et d’Allergologie Pédiatriques Hôpital Universitaire Necker-Enfants Malades 149 rue de Sévres, 75743 PARIS Cedex 15 [email protected] Introduction Il existe une grande variété d’anomalies du développement pulmonaire, aboutissant à la coexistence chez le même individu de poumon normal et de tissu malformatif localisé. Ces différentes anomalies ont une origine assez précoce, au stade pseudoglandulaire ou canaliculaire précoce du développement pulmonaire, comme en témoigne leur identification possible à l’échographie du 2e trimestre de la grossesse. En effet, les progrès de l’échographie anténatale permettent actuellement d’identifier un grand nombre de ces malformations dès la période fœtale sous la forme d’hyperéchogénicité et/ou de kystes. Cependant, l’aspect échographique n’est pas spécifique du type de malformation. En effet, un aspect kystique correspond le plus souvent à une malformation adénomatoïde kystique pulmonaire (MAKP) mais peut également correspondre à une séquestration ou un kyste bronchogénique. Un aspect hyperéchogène non kystique peut correspondre à une MAKP, une séquestration, une atrésie bronchique, ou encore un emphysème lobaire congénital (ELC). Enfin, l’identification anténatale d’une vascularisation systémique ne correspond que dans 50 % des cas à une séquestration pulmonaire isolée, et est associée dans l’autre moitié des cas à des aspects malformatifs variés, dont les MAKP [1]. Ces aspects morphologiques similaires témoignent très probablement d’anomalies communes du développement. Les études rétrospectives publiées au cours de ces dernières années se sont particulièrement intéressées aux deux types de malformations les plus fréquentes, MAKP et séquestrations, et ont permis de mieux en définir l’évolution naturelle, surtout anténatale. malformations adÉnomatoïdes kystiques pulmonaires (MAKP) Les MAKP sont des malformations bronchopulmonaires caractérisées par la présence de « kystes » intraparenchymateux de taille variable, allant de quelques millimètres à plusieurs centimètres, bordés par un épithélium de type respiratoire. Il ne s’agit toutefois pas de véritable kystes, car toujours en communication à la fois avec les voies aériennes proximales et le tissu pulmonaire distal. L’incidence des MAKP se situerait entre 1/11000 et 1/35000 naissances vivantes [2]. Les MAKP sont habituellement décrites en 3 groupes selon la classification histologique de Stocker, basée sur la présence de kystes et la taille des kystes [3]. Cette classification est toutefois très imparfaite, car ne correspondant pas à des mécanismes physiopathologiques clairement différents, et peu appropriée à la description des lésions chez le fœtus [4]. Par ailleurs, il est important de noter que ces malformations peuvent être associées à une vascularisation systémique dans 30 % des cas [4], ces lésions étant considérées comme des formes hybrides. De nombreuses MAKP sont maintenant diagnostiquées avant la naissance par l’échographie anténatale, le plus souvent au deuxième trimestre de la grossesse avec des termes moyens de découverte s’échelonnant de 20 à 23 semaines d’aménorrhée (SA) selon les séries [5, 6]. Une augmentation de taille est fréquente au cours de la vie fœtale, avec un maximum attendu autour de 28 SA [7]. Au-delà de ce terme, la malformation peut voir son volume diminuer et dans un certain nombre de cas n’être plus visible en échographie à la fin de la grossesse. Dans une récente revue de la littérature, Cavoretto a rapporté un taux de « résolution » anténatale complète de 29,5 % en moyenne avec des fréquences variant de 0 à 65,6 % selon les séries [8]. Dans notre expérience, le taux de disparition échographique est de 25 % [7]. Les MAKP peuvent être associées à d’autres malformations, avec un taux rapporté pouvant atteindre 18 % selon les séries [5]. Les associations décrites sont essentiellement des malformations cardiaques et des agénésies rénales [5]. À la naissance, la présentation clinique est très variable et est essentiellement corrélée à la taille de la malformation [5]. Près de la moitié des nouveau-nés sont asymptomatiques [6, 9, 10]. Les malformations volumineuses peuvent être à l’origine de signes de détresse respiratoire et doivent être rapidement opérées. Les cas sévères sont peu fréquents du fait des possibilités de thérapeutiques anténatales. Une radiographie pulmonaire est habituellement réalisée à la naissance quelle que soit la présentation clinique. Cependant, la radiographie standard peut apparaître faussement normale et sa sensibilité dans l’évaluation initiale a été estimée à 61 % [9]. De même, dans les cas où les lésions n’étaient plus visibles à la dernière échographie prénatale, la radiographie standard peut être interprétée comme normale alors que la tomodensitométrie (TDM) montre des lésions persistantes dans plus de 90 % des cas [7]. C’est pourquoi la TDM thoracique avec injection est indispensable dans tous les cas de malformations kystiques et/ou hyperéchogènes de diagnostic prénatal quelle qu’ait été leur évolution avant la naissance et leur présentation clinique postnatale. Le délai de réalisation de cet examen varie d’un centre à l’autre, et il est en général réalisé dans les trois premiers mois de vie. La TDM permet de préciser le type de lésion et d’orienter parfois vers un autre diagnostic (atrésie bronchique, emphysème lobaire congénital, séquestration ou forme hybride séquestration/MAKP) ; elle permet également d’évaluer le volume et l’extension de la malformation. Dans les formes sévères, la TDM apprécie le degré de refoulement et de compression des structures médiastinales adjacentes et l’aspect du parenchyme pulmonaire adjacent et controlatéral (possibilité d’hypoplasie pulmonaire). Parmi les enfants asymptomatiques, l'incidence et la prévalence des complications sont peu connues, le manque d'études prospectives à long terme étant principalement dû à la fréquente décision d’exérèse chirurgicale des malformations pulmonaires. Par ailleurs, les résultats disponibles sont souvent contradictoires, ne permettant pas d'estimation fiable du risque de complication [11, 12]. La principale complication est l’infection de la malformation qui semble cependant faible au cours des trois premières années de vie, autour de 10 % [11]. La survenue d’un pneumothorax ou d’un saignement est également possible mais rare [2]. Il existe une possibilité de régression spontanée avec l’âge. Dans une série rétrospective portant sur 29 enfants asymptomatiques à la naissance, 17 % d’entre eux ont vu le volume de leur malformation diminuer et même disparaître pour le tiers d’entre eux [6]. L’interrogation majeure sur l’histoire naturelle des MAKP concerne les descriptions répétées d’associations entre ces malformations et le développement de tumeurs pulmonaires, conduisant encore la majorité des équipes à une exérèse systématique des MAKP même asymptomatiques. Environ 40 cas d’association de MAKP et de carcinome bronchioalvéolaire, de rhabdomyosarcome ou de pleuro-pneumoblastome ont été publiés [2]. Les carcinomes bronchioalvéolaires sont associés à des MAKP de type I et sont observés en général à l’âge adulte, avec cependant quelques cas décrits dés l’âge de 11 ans [2]. La présence de clusters de cellules à mucines dans ces malformations a été proposée comme responsable de la transformation maligne [2]. Toutefois, il est aussi possible qu’il s’agisse d’associations de lésions malformative et tumorale chez un même patient, plutôt que de la dégénérescence d’une unique lésion initiale, pouvant refléter une même susceptibilité génétique [2]. Cette prédisposition génétique paraît évidente dans le cas du pneumoblastome, puisque des cas familiaux et/ou une atteinte multi-organe sont retrouvés dans plus d’un tiers des cas [13]. Enfin, certaines tumeurs sont toutefois survenues malgré une résection antérieure de la malformation [2]. La chirurgie systématique ne protégerait donc pas totalement du risque tumoral. Concernant les formes non diagnostiquées avant la naissance, l’infection est le principal mode de révélation (Figure 1). Dans une série récente, l’âge moyen du diagnostic de ces formes à révélation tardive est de 4,1 ans [10]. Il faut d’ailleurs savoir évoquer le diagnostic de MAKP devant un tableau d’infection pulmonaire récurrente affectant le même segment, avec à la radiographie un aspect d’expansion pulmonaire et une absence de bronchogramme aérien. D’autres manifestations plus rares peuvent révéler une MAKP : pneumothorax, hémothorax, chylothorax et hémoptysie [5]. A. B. Figure 1 : Tomodensitométrie montrant une MAKP macrokystique du lobe supérieur gauche découverte à l’occasion d’une infection chez un enfant de 5 ans. A. Coupe axiale ; B. coupe coronale. séquestrations pulmonaires Les séquestrations pulmonaires constituent avec les MAKP les malformations pulmonaires les plus fréquemment diagnostiquées en anténatal. Il existe deux types de séquestration : intralobaire et extralobaire. La séquestration intralobaire est un segment pulmonaire isolé et non fonctionnel sans communication avec les voies aériennes ou le parenchyme normal adjacent, et irrigué par une ou des artères systémiques anormales (Figure 2) [14]. Elle ne possède pas d’enveloppe pleurale propre. La forme extralobaire est moins fréquente. Elle correspond à du mésenchyme aberrant, qui se développe de façon autonome, sans lien avec le poumon normal. Elle possède sa propre enveloppe pleurale. Les formes intralobaires sont le plus souvent localisées au niveau du lobe inférieur gauche [14]. Les formes extralobaires sont le plus souvent de localisation intrathoracique, entre le lobe inférieur gauche et le diaphragme, mais peuvent également être localisées au niveau abdominal, médiastinal antérieur ou postérieur [15]. Les formes intralobaires peuvent être associées à d’autres types de malformations pulmonaires, comme une MAKP, ces lésions étant considérées comme des formes hybrides. Bratu a ainsi montré, dans une série de 39 cas de « séquestrations », qu’une association avec d’autres types de malformations était en fait présente dans 44 % des cas. Le plus souvent, il s’agissait d’une MAKP [1]. Les séquestrations extralobaires sont associées à une autre malformation congénitale dans 40 % des cas (déformations vertébrales ou de la cage thoracique, hernie de coupole diaphragmatique, duplications digestives, cardiopathies) [16]. À la naissance, les séquestrations sont asymptomatiques dans 80 % des cas. Après la période néonatale, les séquestrations peuvent rester asymptomatiques dans 10 à 15 % des cas [15]. Concernant les formes symptomatiques, les signes cliniques sont comparables à ceux rencontrés au cours des MAKP avec cependant 2 particularités :(1) une plus grande fréquence des épisodes de surinfection qui constituent le mode de révélation classique des formes non identifiées avant la naissance et (2) la possibilité de défaillance cardiaque précoce secondaire à un shunt gauche-gauche. Les signes de détresse respiratoire et d’insuffisance cardiaque sont en général précoces, avant 2 semaines de vie [1], alors que les complications infectieuses apparaissent en général après 3 ans et sont plus fréquentes chez l’adulte. Enfin, il existe une possibilité de régression spontanée des lésions au cours du temps. Dans une récente revue de la littérature, sur 95 cas de séquestrations de diagnostic prénatal, une régression anténatale progressive des lésions a été observée dans 38 cas. À la naissance, les nouveau-nés étaient asymptomatiques et la malformation n’était plus visible sur la TDM postnatale, suggérant la possibilité de thrombose spontanée de l’artère nourricière [8]. A. B. Figure 2 : Tomodensitométrie montrant une séquestration intra-lobaire du lobe inférieur droit découverte à l’occasion du bilan d’infections répétées du même segment pulmonaire chez un enfant de 18 mois. A. Coupe para-coronale en fenêtre médiastinale mettant en évidence deux vaisseaux systémiques naissant de l’aorte sous diaphragmatique et vascularisant une zone de condensation lobaire inférieure droite ; B. Coupe axiale montrant le séquestre pulmonaire surinfecté. Autres malformations Emphysème lobaire congénital L’emphysème lobaire congénital (ELC) est caractérisé par la distension progressive d’un lobe, parfois de deux lobes. Une obstruction partielle ou complète de la bronche lobaire est supposée être à son origine [14]. De nombreux phénomènes obstructifs intrinsèques ou extrinsèques ont été décrits : bronchomalacie, bride, sténose, compression vasculaire, kyste bronchogénique. En anatomopathologie, l’architecture du parenchyme pulmonaire est conservée. Le lobe supérieur gauche est le plus souvent atteint, suivi du lobe moyen et du lobe supérieur droit. L’ELC est rarement diagnostiqué en période anténatale. Son aspect hyperéchogène n’est pas différentiable d’une MAKP microkystique. La prévalence de l’ELC est estimée à 1/20000 à 1/30000 naissances [17]. Il peut être associé à des malformations cardiaques dans 14 % des cas [16]. L’âge de révélation de l’ELC est habituellement précoce, dans les premiers mois de vie, parfois dès la naissance. Dans une série récente portant sur 17 cas, l’âge moyen au diagnostic était de 4,5 mois et les modes de révélation étaient une détresse respiratoire progressive dans 11 cas, une détresse respiratoire aiguë dans 5 cas et une infection pulmonaire dans 1 cas [18]. Rarement, l’ELC est asymptomatique et de découverte fortuite chez le grand enfant ou même chez l’adulte. Atrésie bronchique L’atrésie bronchique peut être identifiée en période prénatale, avec un aspect hyperéchogène similaire à un ELC ou une MAKP microkystique. En l’absence de diagnostic anténatal, l’atrésie bronchique est en général découverte dans l’enfance ou à l’âge adulte soit de façon fortuite sur une radiographie thoracique réalisée pour une autre indication, soit devant un tableau d’infection récurrente ou de dyspnée. L’atrésie peut toucher une bronche lobaire, segmentaire ou sous-segmentaire. L’atteinte de la bronche segmentaire ventilant le segment apicodorsal du lobe supérieur gauche est la plus classique [14]. L’association à la TDM d’une hyperclarté systématisée et d’une mucocèle est très évocatrice. C’est toutefois l’examen anatomopathologique des pièces opératoires qui permet d’affirmer le diagnostic d’atrésie bronchique, et parfois de corriger un diagnostic initialement posé. Ainsi, sur 105 malformations pulmonaires kystiques asymptomatiques opérées avec un diagnostic présomptif de MAKP ou séquestration, le diagnostic d’atrésie bronchique a été porté à l’examen histologique dans 6 % des cas [19]. Kystes bronchogéniques Les kystes bronchogéniques représentent 10 à 15 % des malformations pulmonaires identifiées chez l’enfant [20]. Il s’agit de structures kystiques isolées, remplies de liquide ou de mucus. Ils sont souvent attachés à la trachée ou une bronche souche mais ne communiquent pas avec elles [14]. Ils sont tapissés par une paroi de type bronchique. Sur le plan physiopathologique, ils sont considérés comme un bourgeon bronchique aberrant à partir du tube digestif primitif. Le diagnostic prénatal est assez rare. Leur localisation est le plus souvent médiastinale, juste au-dessous de la bifurcation trachéale, mais peut en fait être extrêmement variée, en situation intrapulmonaire, pleurale, suprasternale ou abdominale. La taille des kystes augmente progressivement avec l’âge. Les symptômes possibles sont liés à l’effet de masse du kyste sur les structures adjacentes [5] et dépendent donc de sa taille et de sa localisation. Lorsqu’il est périphérique, le kyste bronchogénique est le plus souvent asymptomatique, de découverte fortuite et souvent à l’âge adulte. Lorsqu’il est médiastinal, il peut comprimer les voies aériennes proximales et entraîner une détresse respiratoire précoce de sévérité variable. Cette détresse respiratoire est parfois progressive par un phénomène d’airtrapping avec distension du poumon en aval, entraînant l’évolution vers un ELC [18]. La compression des voies aériennes peut aussi favoriser l’infection des territoires pulmonaires en aval. La compression de l’œsophage se manifeste par une dysphagie. Enfin, la compression des structures cardiovasculaires peut intéresser les cavités cardiaques et entraîner des troubles du rythme, mais aussi les gros vaisseaux comme la veine cave supérieure. La surinfection intrakystique est également un mode de révélation d’autant plus qu’elle peut provoquer une brusque augmentation de volume du kyste et des signes fonctionnels de compression. D’autres manifestations, plus rares, sont possibles comme la survenue d’un pneumothorax, d’un hémothorax ou d’une hémoptysie [5]. Conclusion Même s’il existe une grande variété de malformations pulmonaires congénitales, leurs évolutions ont des caractéristiques communes. Une proportion importante de ces malformations peut rester asymptomatique et découverte de façon fortuite dans l’enfance ou l’âge adulte, à l’occasion d’une radiographie thoracique. Dans les formes symptomatiques, l’infection est le mode de révélation le plus souvent retrouvé. Enfin, une partie d’entre elles peut régresser spontanément, mais la fréquence de ces résolutions spontanées est actuellement difficile à estimer car la majorité des malformations sont réséquées chirurgicalement après leur découverte. Dans certaines équipes, il existe cependant des formes asymptomatiques pour lesquelles une approche conservatrice est décidée. Des études prospectives de suivi de ces enfants seraient extrêmement informatives et permettraient de dégager certains facteurs prédictifs associés à une résolution spontanée des lésions. bibliographie 1. Bratu I, Flageole H, Chen MF, et al. The multiple facets of pulmonary sequestration. J Pediatr Surg. 2001;36:784-90. 2. Fitzgerald DA. Congenital cyst adenomatoid malformations: resect some and observe all? Paediatr Respir Rev. 2007;8:67-76. 3. Stocker JT, Madewell JE, Drake RM. Congenital cystic adenomatoid malformation of the lung. Classification and morphologic spectrum. Hum Pathol. 1977;8:155-71. 4. 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Il est notamment très présent dans les blocs chirurgicaux : gants stériles, garrot pour perfusion, sondes, matériel d’anesthésie... Cependant, devant l’apparition d’allergies aux latex, plusieurs services ont décidé de retirer tout matériel contenant du Latex notamment des services de pédiatrie. Ce changement de matériel a t-il vraiment un intérêt et quel en est son coût ? 1. Les réactions au Latex : L’allergie au latex est bien connue, puisque l’on considère que la prévalence de la population générale sensibilisée varie de 1 à 6 %. Dans la population pédiatrique, c’est la première cause de réactions anaphylactique, lors des interventions chirurgicales(1). 1.1. Les différents types de réaction au Latex : 1.1.1. Les irritations : réaction non allergique, provoquée par le port de gants poudrés. Ce phénomène est retrouvé chez le porteur de gant (donc le soignant) et non chez le malade. 1.1.2. Les dermatites allergiques de contact (type IV) ou hypersensibilité retardée : histamino-libération non spécifique, ce sont les additifs au Latex (anti-oxydant et additifs) qui provoquent cette réaction. 1.1.3. Les allergies de type I ou immédiates : dues aux protéines de latex. Une sensibilisation est nécessaire avec production d’anticorps IgE par les lymphocytes B, contre les protéines de latex lors du premier contact. Lors d’une seconde exposition, le complexe protéine de latex-IgE entraîne la dégranulation des mastocytes et des basophiles et la production de nombreux médiateurs, tels que l’histamine, les protéases, les prostaglandines et les leucotriènes. Ils seront responsables des réactions, allant de l’urticaire au choc anaphylactique. Les manifestations dépendent du type de contact (2): Aéroporté, par la poudre contenue dans les gants lors du retrait de ceux-ci, les manifestations sont de type rhinite, conjonctivite, asthme. Contact direct du Latex avec des tissus vascularisés lors de sondages, intubation, geste chirurgical, responsable des chocs anaphylactiques, œdème de Quincke. Une réaction au latex, durant l’anesthésie, apparaît en général entre 30 à 60 minutes après l’induction(1). Les signes cutanés sont rarement repérés, le patient étant recouvert par les champs stériles. Fréquence des signes cliniques observés chez les enfants opérés Hypotension 81 % Tachycardie 81 % Bradycardie 14,3 % Bronchospasme 62 % Réaction cutanée 67 % Immédiate 78 % Retardée 22 % Figure n° 1 (1) : Fréquence des signes cliniques observés chez l’enfant, lors d’une réaction allergique en per-anesthésie 1.2. La sensibilisation, les allergies croisées La sensibilisation peut se faire soit par inhalation lors du retrait de gants poudrés, soit par contact direct avec la peau, les muqueuses ou les séreuses, lors d’une intraveineuse, d’une intervention chirurgicale, d’un cathétérisme urinaire… Le principal mécanisme de sensibilisation est donc une exposition répétée au Latex. Celle-ci peut se faire à domicile, au contact d’objet contenant du Latex (tétine, jouet, ballon de baudruche…). Mais les enfants ayant subi plusieurs opérations chirurgicales, ont un risque significativement plus élevé de développer des manifestations cliniques au latex, et ce, principalement si les opérations ont lieu durant la première année de vie (3, 4, 5). Enfin, il existe des allergies croisées entre le Latex et certains fruits, les patients ayant développé une allergie à ces fruits pourront faire une réaction allergique au Latex lors de la première exposition au Latex. 1.3 Le diagnostic Il peut être clinique, mais est confirmé par des examens paracliniques : tests cutanés, test de provocation, dosage des IgE spécifiques. Aucun n’a une sensibilité à 100%. 2. Épidémiologie 2.1 L’incidence de l’allergie au Latex Elle augmente depuis 30 ans. Sa prévalence est actuellement de 1 à 6% dans la population générale (6). Différentes raisons sont avancées (5,7): • Une variété d’arbre différente et une culture intensive augmentant la présence de protéines allergènes, • Une techniques de fabrication des produits contenant du latex modifiées, rendant ces produits plus allergisant, • Une augmentation de la consommation de gants et de préservatifs dans la prévention de transmission d’agents infectieux comme le VIH ou les virus d’hépatite (7), augmentant l’exposition et donc la sensibilisation au Latex. 2.2 Les accidents anaphylactiques Cependant, la fréquence des accidents anaphylactiques par le Latex per-anesthésiques reste stable :12 à 17% des accidents anaphylactiques dans la population générale (7). Mais, chez l’enfant, ce taux représente 76% des cas des réactions anaphylactiques (1). Il est 5 fois plus fréquent chez les enfants multiopérés (1 intervention sur 2100) (8) 2.3 Patients à risque en pédiatrie • Spinabifida ou autre myélodyspalsie : enfants ayant des contacts précoces et répétés avec le Latex (gants d’examane, sondes, chirurgie). Taux de sensibilisation supérieur à 70%(7) • Enfants multi opérés, surtout en cas d’intervention urinaires ou digestives, taux de sensibilisation au Latex de 30 à 70% (5). • Atopie : les antécédents familiaux d’atopie augment le risque d’allergie au Latex (5). L’atopie joue aussi un rôle synergique sur le risque de développer une allergie au Latex chez les enfants multi opérés. • Allergie croisée : Il existe des allergies croisées entre le latex et certains fruits : l’avocat, la noix, la banane, la châtaigne, le kiwi, le melon, le raisin, le fruit de la passion, la pêche, la papaye, la noisette, etc. Ces allergies se traduisent par un prurit, un gonflement des lèvres, des conjonctivites, de la toux, de l’asthme, ou de l’urticaire(5). • 3. Traitement… ou prévention ? 3.1 Le traitement de l’allergie au Latex La désensibilisation peut entraîner une diminution des signes cliniques, mais il n’a pas été retrouvé de diminution des IgE spécifiques. La prémédication « antiallergique » (association de diphenhydramine, cimétidine et méthylprednisolone) est inutile voir dangereuse(9). 3.2 La prévention 3.2.1 La prévention secondaire Elle consiste à éviter les réactions allergiques au Latex. Elle vise donc les enfants allergiques ou à risque d’allergie au Latex. Il faut, tout d’abord détecter ces enfants par des interrogatoires précis et éventuellement des tests paracliniques. Elle nécessite de créer des « circuits » sans Latex, dans les différents services dans lesquels ces enfants doivent passer et une organisation particulière doit être mise en place pour que ces enfants passent au bloc opératoire en première position afin de diminuer le taux de pneumallergènes présents dans la salle. 3.2.2 La Prévention primaire Elle consiste à éviter la sensibilisation au Latex et s’adresse donc à tous les enfants. Il s’agit donc de créer des services de pédiatrie exempte de Latex. Une éviction totale du Latex des blocs opératoires a montré son efficacité en réduisant la sensibilisation au Latex d’enfants à risque : diminution de la prévalence de la sensibilisation au Latex chez des enfants ayant un spina bifida de 26,7 à 4,5% (10), ou en diminuant le taux d’IgE spécifique chez des enfants atteints de spina bifida de 42 à 7%.(11) Enfin, cette éviction du Latex des services de pédiatrie profite aussi au personnel soignant. 4. Le passage au sans Latex 4.1 Avantages La prise en charge dans les services et au bloc opératoire des enfants allergiques ou à risque d’allergie au Latex est plus simple. Elle ne demande pas d’organisation particulière. Les risques d’erreur (et d’accident) sont beaucoup plus faibles. 4.2 Coût Les fabricants de matériel pharmaceutiques travaillent sur le développement de matériel sans Latex. Mais ce matériel de substitution est généralement plus cher. Une étude a été effectuée au CHU de Grenoble(12) pour rechercher et remplacer tout le matériel contenant du Latex au bloc opératoire et dans le service de chirurgie pédiatrique. L’étude des coûts a montré : • Les gants chirurgicaux sans Latex sont 2 à 3 fois plus chers que ceux qui sont avec Latex, hors, cela correspond au produit le plus consommé. • Par contre, les gants de soins non stériles sont au même prix. • Les drains type Penrose, Delbet, sont plus chers sans Latex. • Certains produits peuvent cependant être moins cher, soit parce qu’ils sont fabriqués par un laboratoire différent (sonde thermique), soit parce que le produit est différent (raccord de sonde). Le surcoût total engendré est de 40% pour les produits concernés, mais le coût des produits contenant du Latex ne correspond qu’à 1, 3% du coût total des dépenses de consommables, l’augmentation des dépenses n’est donc que de 0,9%. D’autre part, cette augmentation des dépenses peut-être compensée à moyen ou long terme par d’autre réductions : • réduction des dépistages de sensibilisation au Latex, • réduction des complications liées à une réaction allergique au Latex, notamment de choc anaphylactique, • réduction des allergies au Latex chez le personnel soignant et donc de la prise en charge de cette maladie professionnelle. • Enfin, une organisation simplifiée, permet d’augmenter la « productivité » des services (pas d’annulation de bloc sur une découverte tardive d’allergie au Latex, pas de délai entre deux interventions, pas de temps passé à rechercher des produits sans Latex pour un enfant particulier). Conclusion L’allergie aux Latex augmente dans la population générale. Elle est notamment favorisée par des interventions chirurgicales à répétition dans la petite enfance. Elle peut entraîner des complications grave comme des chocs anaphylactiques. Obtenir des services de pédiatrie sans Latex permettrait de diminuer la sensibilisation au Latex et les réactions allergiques graves. La recherche de tous les produits contenant du Latex et leur remplacement par des produits de substitution peuvent être longues et coûteuses, mais ce coût peut être compensé à terme par la réduction des complications liées à l’allergie au Latex. Cependant, ces produits de substitution contiennent des matériaux nouveaux. Ceux-ci pourraient aussi induire des allergies. Quelques cas de dermites allergiques aux Thiurames ou au Néoprène ont été décrits. Il faut donc rester vigilant face à ces nouveaux produits, même si les réactions pour l’instant décrites sont de type dermatite et que ces matériaux paraissent donc moins dangereux que le Latex. Références 1.MURAT I. Anaphylactic reactions during paediatric anaesthesia; results of the survey of the French Society of Paediatric Anaesthetists (ADARPEF) 1991–1992 Paediatric Anaesthesia 1993; 3: 339-343 2. 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