Les pendaisons de Tulle (9 juin 1944) - Les malgré-nous

1944-2014
Sur le seuil de Sa maison †
Chaque mardi, une messe (à l’initiative de l’association Joseph Guerber) est célébrée à N.-D. de Lucelle pour les intentions de nos abonnés
et en souvenir de nos collaborateurs et de nos lecteurs défunts pour
qu’ils reposent dans la lumière et la paix du Seigneur.
Mme Paulette Moebs
«C’est avec douleur que l’équipe du service abonnements et
portage vient d’apprendre la disparition de Mme Paulette
MOEBS, née Rohfritsch, décédée à l’âge de 63 ans. Durant de
longues années, Mme MOEBS a distribué fidèlement l’AMI
Hebdo chaque semaine. Touchée par la maladie elle a dû arrêter son service début 2014. L’AMI Hebdo présente ses plus
sincères condoléances à sa famille et gardera d’elle le souvenir
d’une collaboratrice agréable et dévouée».
En mémoire de Madeleine Jung
Quand tu es partie, il y a un an, nous avons cru que la terre
s'écroulait. Aujourd'hui, c'est à travers nous que tu vis…
Tu nous guides et chaque matin, c'est toi qui nous donne force
et courage pour affronter un nouveau jour sans te voir ni t'entendre.
Ton époux et tes enfants et petits-enfants
Bitten und Danksagungen
- Pour la paix dans le monde,
- A st Christophe, st Antoine et st
Joseph qu’ils protègent ceux qui,
quotidiennement, prennent la
route,
- Pour les âmes du purgatoire les
plus délaissées,
- A Notre-Dame de Lourdes pour
42 - l’ami hebdo
tous les malades qu’elle les soutienne,
- Merci pour des grâces obtenues,
- Pour les défunts des familles,
- Pour un époux décédé, que la
ste Vierge Marie protège sa famille.
Les pendaisons de Tulle
(9 juin 1944)
En cette période de commémorations, nous revenons sur les pendaisons de Tulle et sur
le rôle de Maurice Roche qui était alors le secrétaire général de la préfecture (10 ans
plus tard, il deviendra secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin).
M
aurice Roche a eu
un rôle de premier
plan lorsque 99 Tullistes (sur les 120 initialement
prévus) ont été pendus, le 9
juin 1944, par des éléments
de la 2e division blindée Waffen-SS «Das Reich» : grâce à
sa connaissance de l’allemand et des Allemands, Maurice Roche a pu négocier avec
l’occupant pour que les représailles soient atténuées.
Cela est d’ailleurs confirmé
dans une lettre du Ministère
de l’Intérieur du 29.6.1945 :
«M. Roche a eu pendant
l’occupation une attitude
extrêmement brillante. Il a
pu, grâce à sa connaissance
parfaite de l’allemand, rendre de très grands services
à la population, en même
temps aux patriotes. Il a
contribué à éviter que la
ville de Tulle ne subisse de
la part des troupes allemandes un sort comparable
à celui d’Oradour». Pour son
action des 8 et 9 juin, où il
réussit à limiter les violences
allemandes sur la ville, et du
9 août 1944, date à laquelle
il obtint l’abandon de toutes
représailles, Maurice Roche
fut maintenu dans ses fonctions par le Comité local de
Libération dont le président,
Jules Lafue, écrivait le
12.9.1944 : «Le Comité local
de Tulle est d’autant plus
heureux de s’associer à cet
hommage qu’il n’oublie pas
l’attitude courageuse du secrétaire général de la Corrèze qui, dans les journées
tragiques de juin et d’août
1944, s’est dépensé sans
compter pour la sauvegarde
des vies et des biens des
habitants de la ville, montrant ainsi qu’il était de ceux
qui remplissent leur devoir
sans défaillance en assu-
Faire un roman sur un procès injuste, tant pour le Limousin que pour l’Alsace,
est un pari osé. On retrouve
ici, en 1958, le président du
Tribunal militaire de Bordeaux (Nussy-)Saint-Saëns
qui se remémore les
grandes phases de ce procès retentissant que fut celui
d’Oradour-sur-Glane. Il se
souvient de son fils Christian, du député Georges Calais (une référence à
Georges Bourgeois et peutêtre aussi aux fameux six
«Bourgeois de Calais» qui,
pour sauver leur ville face à
la menace anglaise en 1347,
se sont sacrifiés) et les 13
accusés alsaciens personnifiés par un dénommé Lohdinger (contraction des
PHOTOS COLL. J. ROCHE
BLAESS (95)
MICHELBACH-LE-HAUT: Sr Fidélis née Madeleine WANNER (91)
MOERNACH: M. Francis KOCH
(75)
MOMMENHEIM: M. Etienne
MEYER (84), Mme Mélanie DOSSMANN née Lemmel (60)
MOOSLARGUE: M. Jean-Marie
EBERWEIN (76)
MOTHERN: M. Rodolphe DECK
(93)
NEUWILLER-LES-SAVERNE: Mme
Emilie ROOS née Bastian (90)
NIEDERBRONN-LES-BAINS: Sr
Laurent née Joséphine APPEL
(94)
NIEDERENTZEN: M. Laurent
MULLER (36)
NORDHEIM: M. Gérard SPEICH
(85)
NORDHOUSE: M. Jean-Pierre
BRONNER (67)
OBERDORF: M. François GROSGUTH (90)
OHNHEIM: M. Charles MARX
(86)
REICHSHOFFEN: Mme Lucie
HENTZ (91)
RHINAU: Mme Marie-Joséphine
UTTER née Wimmer (85)
ROHRWILLER: Mme Odile MARX
née Heisserer (86)
SCHILTIGHEIM: M. Patrick HIEBEL
(66)
SCHIRRHOFFEN: Mme Albertine
BILDSTEIN née Brestenbach (89)
SELESTAT: Mme Denise HERRGOTT née Collin (88)
SENTHEIM: Mme Irène WOLFF
née Realini (82)
SOUFFLENHEIM: Mme Joséphine
SCHIMPF née Schwartz (77)
SOULTZ-LES-BAINS: M. Joseph
MOSER (92), M. Roger EBERLING
(67)
SOULTZEREN: Mme Louise ERTLE
(91)
ST-LOUIS (68): M. André MULLER
(85), M. Martin MULLER (80),
Mme Suzanne ALLEMANN née
Schaaff (88)
STRASBOURG: Sr Henriette Marie
née Marie Rose KISTLER (97),
Mme Marie-Antoinette INNINGER
née Mutschler (83), Mme Denise
ROHÉ (86)
STRASBOURG Montagne Verte:
M. Alfred LIEBY (75)
STRASBOURG Neudorf: Mme
Gabrielle FLIEGANS (92)
VILLAGE-NEUF: Mme Marie-Thérèse RICHARD née Vonachen
(82), Mme Annelise MEYER née
Moser (79)
WALDIGHOFFEN: Mme Frieda
WIEDER née Eckes, M. Marcel
GROSHEITSCH (85)
WALDOLWISHEIM: Mme Alice
ENGEL née Friederich (67), M. Alphonse ANTONI (91), Mme Joséphine KOEGER née Kapps (95)
WASSELONNE: M. Alfred DANGELSER (82)
WINTZENBACH: M. Louis HEMBERGER (98)
WISSEMBOURG: Mme Odile
KLEINERT née Hiebel (77)
WITTERSHEIM: Mme Clémentine
BEY née Lang (85)
WITTISHEIM: M. Paul WILLMANN
(86)
Un document inédit : l’écriteau allemand apposé sur la porte du bureau de Maurice
Roche. Il émane du quartier général de la 2e division blindée «Das Reich» comme l’indique la Feldpostnummer 20092.
mant jusqu’au bout toutes
les obligations de leur
charge». Pour son courage –
attesté par le lieutenant-colonel Hounau, ex-commandant
des Corps Francs de Tulle
(1952), par le général de Brigade Marcel Colliou – exRoussel dans la Résistance –,
par le Mouvement de Libération Nationale (1955) –, Maurice Roche a aussi été décoré
de la croix de Guerre avec
étoile d’argent en 1947 et a
été fait chevalier de la Légion
d’honneur en 1949.
Prenant des risques extrêmes,
le secrétaire général Roche
oeuvrait avec la Résistance,
transmettait des messages
codés, truquait les dossiers et
alertait les personnes recherchées avant qu'elles ne soient
arrêtées, ce qui lui valut d'être
décoré de la médaille du
Combattant volontaire de la
Résistance
(voir
aussi
http://www.malgre-nous.eu/
Maurice Roche devant la préfecture de Tulle en 1944.
DR
ALTKIRCH: Mme Liliane ZINS née
Groell (84)
ALTORF: M. Daniel ROHMER (49)
ASPACH: M. Alfred STIMPFLING
(77)
BARR: Mme Charlotte STRAUB
née Lux (79)
BENFELD: Mme Jeanne SPITZ
née Beck (92), Mme Marie-Thérèse KIRMSER née Lustig (81)
BERNARDSWILLER: Mme Annette WEBER née Schmitt (76)
BETTLACH: Mme Bernardine PETER née Springinsfeld (86)
BISCHWILLER: Mme Suzanne
PHILIPPS née Kleck (83)
BLOTZHEIM: Mme Marthe WEIDER (84)
BOURBACH-LE-BAS: Mme Marguerite WOLFARTH née Jenn (98)
BUSCHWILLER: Mme Chantal
BOEGLIN née Walter (63)
COLMAR: M. Lucien HUG (89)
DANNEMARIE: M. Edouard DIETEMANN (83)
ERNOLSHEIM-BRUCHE: M. Roger KELHETTER (67)
ERSTEIN: M. Alain KIENTZ (64)
ESCHAU: Mme Georgette LANDMANN née Baechler (92)
FEGERSHEIM: M. François MATT
(87)
FLEXBOURG: Mme Gabrielle dit
« Gaby » MUCKENSTURM née
Goetz (88)
FRIEDOLSHEIM/ST-JEAN-DEBASSEL: Sr Thérésa née Agathe
ENGEL
GINGSHEIM:
Mme
Jeanne
BARTH née Wind (84)
GRENDELBRUCH: Mme Thérèse
MERTZ née Brignon (92)
GRESSWILLER: M. Raymond
TROTZIER (78)
GRIESHEIM-SUR-SOUFFEL: M.
Gérard WAECKEL (57)
HAEGEN: M. Jean-Paul STRINTZ
(79)
HAGENBACH: M. Achille GESSIER
(89)
HAGENTHAL-LE-BAS:
Mme
Claire BISEL née Gutknecht (83)
HAGENTHAL-LE-HAUT: M. Bernard SCHOEN (71)
HAGUENAU: M. Alfred KIEFFER
(84)
HEGENHEIM: Mme Lilly SCHMITT
née Keck (80)
HEIMERSDORF: Mme Rosalie
BETSCHA née Riether (91)
HERRLISHEIM (67): Mme Alice
MATTER née Schwoob (77)
HORBOURG-WIHR: Mme MarieAntoinette THOMAS née Carl (60)
HUNINGUE: Mme Jeannine
BERNHARD née Baradel (88)
KINTZHEIM: M. Pascal SIPP (51)
KIRRWILLER: M. Antoine KRIEGER (89)
KNOERSHEIM: M. Paul SCHMITT
(87)
LA WANTZENAU: Mme Odette
KOHSER née Maridet (77), Mme
Germaine WEBER née Uhlrich
(91)
LINSDORF: Mme Jacqueline
WANNER née Blind (82)
LIPSHEIM: M. René RICHTER
(89)
LORENTZEN: M. André GENET
(95)
MACKENHEIM: Mme Adèle
SCHATT née Fahrner (85)
MARLENHEIM:
M.
Eugène
noms de deux incorporés de
force, Lohner et Giedinger).
L’ambiance du procès, avec
ses contradictions et ses incompréhensions, ses para-
doxes et ses haines, est bien
rendue. La tension est à son
comble et les arguments
des deux «camps» sont bien
exposés.
Le propre du roman est qu’il
permet aussi de prendre des
distances avec l’Histoire.
Ainsi, il ne sera nullement
question, par exemple, des
non-lieux dont les incorporés de force ont bénéficié
avant le procès de 1953
(pour avoir précisément
sauvé des civils à Oradour),
ni d’ailleurs de la «loi Oradour» de 1948 qui, seule,
aura permis de les placer sur
le banc des accusés.
Enfin, l’allusion aux «Bourgeois de Calais» - si s’en est
bien une – trouve un écho
avec le décès de Christian :
IMG/pdf/doc09.pdf sur le
rapport rédigé par Maurice
Roche le 23.11.1944).
Dans ces conditions, comment ne pas être étonné de
l’absence de Maurice Roche
dans certaines publications
ou certains documentaires récents ? Cette constatation
confirmerait-elle que l’histoire
«officielle» ait attribué les mérites de ce dernier à d'autres ?
Dans cette affaire, nous ne
saurions oublier l’action d’Elimar Schneider, alsacien incorporé de force dans la WaffenSS (voir N. Mengus, A. Hugel,
Entre deux fronts t.1, p.115119) qui, lui aussi, a vu son
action courageuse attribuée à
l’abbé Espinasse, malgré le
fait que l’ecclésiastique se
trouvait alors parmi les otages
et que l’un des deux sauvés
– Pierre Torquebiau – ait attesté, par écrit, que c’était
bien l’Alsacien qui l’avait
sauvé.
La question lancinante qui se
pose désormais est la suivante : pourquoi l’action de
Maurice Roche n'est-elle pas
plus mise en valeur et pour
quelles raisons ?
Nicolas Mengus
appelé en Algérie, il refuse
d’obéir à un ordre criminel
et se suicide. Tout ceci ne
renvoie-t-il pas aux accusés
alsaciens ? Pourquoi n’ont-ils
pas retourné leurs armes
contre les Allemands à Oradour ? Pourquoi ne se sontils pas sacrifiés, même si «un
tel acte d’héroïsme n’aurait
rien changé au massacre»
(p.80) ? De ce fait, leur amnistie – qui, en réalité, n’a
concerné que les 13 incorporés de force et non l’engagé volontaire – ne seraitelle pas perçue, ici, comme
un scandale ?
Nicolas Mengus
Fr. Guéroult, Oradour, le
roman d’un procès, Editions
Infimes, Orléans, 2014, 217
pages, 13 €.
6 juillet 2014